La fertilisation et le chaulage des érablières.



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Transcription:

La fertilisation et le chaulage des érablières. C. Camiré 1, R. Ouimet 2 et J.D. Moore 1 1 Centre de recherche en biologie forestière, Université Laval 2 Direction de la recherche forestière, MRN, Québec Résumé Si l'on fait exception des pépinières et des plantations, l'emploi des engrais chimiques en foresterie n'est pas pratique courante au Québec. Dans la forêt feuillue, on assume que le recyclage des nutriments est suffisamment rapide pour permettre une nutrition adéquate de l'érable à sucre. Les travaux effectués dans le cadre du dépérissement de la forêt feuillue au Québec ont toutefois mis en évidence des sols très pauvres en nutriments et, surtout, des sols présentant de grands déséquilibres entre les ions K, Ca et Mg dans les horizons B. Le recyclage des éléments par les litières ne peut modifier adéquatement ces déséquilibres. Dans ce contexte, l'ajout de nutriments dans certaines érablières apparaît donc incontournable si l'on souhaite soustraire ces écosystèmes aux stress indus des déséquilibres nutritionnels. Étant donné que le potassium est l'élément le plus déficient sur le complexe ophiolitique et que cet élément se recycle efficacement, la fertilisation pourrait se faire aux cinq ans, voire aux dix ans avec des doses de 50 à 100 kg K ha -1. Dans les stations très pauvres et acides des basses Laurentides, l'ajout de 2 à 3 t de chaux ha -1 aux 10 ans devrait suffire. Le problème opérationnel pour procéder au chaulage est toutefois grand, du moins s il est fait par voie aérienne et seule la chaux dolomitique est granulable, composé que l on doit éviter lorsqu il y a déjà un excès de Mg dans le sol. Dans ce cas, on devra appliquer du gypse. Le chaulage généralisée des érablières est à proscrire. Introduction L'acériculture est bien développée au Québec et est une source financière importante pour bon nombre d'agriculteurs et de propriétaires de boisés. La production acéricole a d'ailleurs augmenté de façon marquée ces cinq dernières années et les stocks de produits du sucre de l'érable ont pu être totalement vendus durant les deux dernières années. Aussi, la production par entaille s'est améliorée grâce à la collecte sous vide, pratique maintenant très généralisée. Au niveau des pratiques d'aménagement forestier des érablières, peu de chose a changé au cours des deux ou trois dernières décennies. Le dépérissement quasi généralisé de la forêt feuillue au début des années 80 a eu un effet de choc sur les acériculteurs, certains voyant bon nombre de leurs érables carrément mourir en peu de temps. Dans les pires cas, des acériculteurs ont même perdu complètement leurs boisés par mortalité. Les travaux effectués durant la décennie 80 et poursuivis depuis ont montré que les extrêmes climatiques étaient responsables de l'augmentation marquée de la mortalité de l'érable à sucre (Côté et Ouimet 1996). Les sites les plus affectés ont été ceux 1) de drainage assez mauvais, 2) de sols minces sur escarpements rocheux, et 3) surtout, de sols déséquilibrés en éléments nutritifs. Durant cette période, un programme opérationnel de 51

fertilisation des érablières dépérissantes a été mis en place par le Ministère des Ressources naturelles du Canada et le Ministère des forêts du Québec. Ce programme opérationnel visait à assister les acériculteurs en finançant le diagnostic (échantillonnage du feuillage et des sols, analyses chimiques et prescriptions d'intervention) et le coût des engrais. Les acériculteurs prenaient en charge les coûts d'application. Les travaux de recherche ont mis en évidence la nutrition très perturbée de la très grande majorité des érablières dépérissantes (Camiré et Ouimet 1993). Les interventions de fertilisation ont montré que les arbres répondaient de façon positive à la fertilisation en augmentant leur teneur en l'élément déficient et en augmentant leur croissance radiale (Ouimet 1991, 1995). Les observations visuelles ont aussi montré un meilleur feuillage et une diminution des symptômes de carence. Quel enseignement doit-on tirer de ces différentes observations? Il est manifeste que notre vision de la forêt feuillue aux sols riches ne tient plus totalement. Il est aussi manifeste que les déséquilibres sur roches ultramafiques sont importants et représentent des stress considérables pour l'érable à sucre et les autres essences de l'érablière. Nous ne croyons pas cependant qu'il soit nécessaire de développer une approche de fertilisation applicable dans l'ensemble des érablières sous production acéricole car bon nombre de celles-ci sont supportées par un sol adéquat assurant une nutrition convenable. Les produits à privilégier Pour réduire l'acidité La chaux - ou la chaux dolomitique - demeure le meilleur produit disponible pour neutraliser l'acidité et de façon concomitante, augmenter les teneurs en calcium et magnésium échangeables. La chaux dolomitique se granule bien alors que la chaux n'est pas granulable. Lorsque le sol est déjà bien pourvu en Mg, il ne faut pas utiliser la chaux dolomitique. S'il ne s'agit que d'ajouter du calcium, le gypse est le produit à privilégier. Nos expériences avec la chaux dolomitique montrent aussi qu'il s'agit d'une bonne source de Mg. Le potassium Il s'agit de l'élément le plus limitant sur les roches ultramafiques. Dans le programme opérationnel de fertilisation, K2SO4 à été préféré à KCl afin de ne pas créer de stress avec Cl -. Nous croyons toutefois qu'aux doses proposées il n'y a pas lieu d'avoir de craintes de ce côté. Le phosphore Cet élément était aussi déficient sur les roches ultramafiques et de bons résultats ont été obtenu avec le super phosphate triple. Ce produit peut être mélangé avec le KCl et la granulation est facile Épandage aérien Pour qu'un produit soit applicable par voie aérienne, il faut qu'il ne soit pas hygroscope et qu'il soit granulable. La concentration de l'élément actif a avantage à être la plus élevée possible afin de réduire les frais d'épandage. Dans le sud du Québec, les routes secondaires peuvent être utilisées comme lieu d'atterrissage pour les petits avions, ce qui diminue les frais d'épandage. 52

Les enseignements tirés du programme opérationnel de fertilisation des érablières Lors de la mise en place du programme, nous avons eu le mandat de procéder aux analyses chimiques du feuillage d érable à sucre et de prescrire des fertilisants ou amendements selon les résultats obtenus. Notre banque de données est constituée de 1249 érablières différentes (Tableau 1). Les résultats qui suivent ont été tirés de cette banque. Lors du début du programme, on se basait surtout sur les concentrations absolues alors que plus tard, on a pu calculer les indices DRIS selon la proposition de Lozano et Huynd (1989). Les indices DRIS nous apparaissent plus fiables sur les plans théorique et pratique car ils prennent en compte l ensemble des éléments dosés. Il est d ailleurs connu que, physiologiquement, les déséquilibres sont plus importants que les valeurs absolues. Tableau 1. Indices DRIS par groupe de déficiences. Déficiences Indice N Indice P Indice K Indice Ca Indice Mg P (55) 1 6-24 -8 2 24 K (242) 19-8 -33-5 27 Ca (131) 22 0-7 -32 18 P-K (305) 14-25 -36 6 40 P-Ca (3) 10-18 -5-21 34 K-Ca (328) 28-3 -36-33 44 Ca-Mg (4) 30 19 1-31 -19 P-K-Ca (88) 28-28 -72-40 113 1 Nombre de stations dans ce groupe Les données de la base montre qu il y corrélation positive entre les éléments N, P et K, et très négatives entre K et Mg (antagonisme) (Tableau 2). Bien que la corrélation soit positive entre Ca et Mg, une analyse plus fine de cette relation montre que pour les faibles valeurs de Mg, cette relation est bien positive mais lorsque les concentrations de Mg deviennent plus forte, la relation n existe plus. Cela s observe très bien dans le cas du groupe déficient P-K-Ca. 53

Tableau 2. Corrélations linéaires entre les concentrations de nutriments pour l ensemble de la banque. P K Ca Mg N 0,296 0,342 0,016-0,047 P 0,231-0,084 0,130 K 0,095-0,320 Ca 0,226 Relations indices DRIS et concentrations en nutriments Comme prévu, les concentrations d un élément sont toujours les plus fortement corrélées positivement à l indice DRIS de cet élément (Tableau 3). La relation négative entre la concentration en N et l indice DRIS en K indique bien l antagonisme NH 4 + - K + de même que la relation négative entre la concentration en Mg et l indice DRIS en K indique bien l antagonisme K + - Mg + au niveau du prélèvement de K +. Contrairement à ce qui a été observé entre Mg et Ca foliaire (relation positive), la relation au niveau de l indice DRIS en Ca et la concentration foliaire en Mg est négative. Cela démontre bien qu à partir d une certaine teneur en Mg dans le sol, le prélèvement de Ca diminue. Tableau 3. Corrélations linéaires entre les concentrations en nutriments et les indices DRIS de ces mêmes nutriments pour l ensemble de la banque....concentrations en nutriments... Indices DRIS N P K Ca Mg N 0,346 0,064-0,541-0,587 0,094 P 0,171 0,560 0,137-0,599-0,595 K 0,080-0,004 0,791-0,084-0,743 Ca -0,106-0,275 0,117 0,830-0,203 Mg 0,165 0,049-0,533-0,094 0,890 Nous avons considéré, arbitrairement, qu une station n ayant aucun indice plus grand que +15 et plus petit que -15 ne présentait de problèmes nutritionnels. Cela regroupait 47 stations ayant les concentrations suivantes (mg kg -1 ): N, 18206 ± 2550; P, 1365 ± 313; K, 7851 ± 1139; Ca, 9715 ± 1932; et Mg, 1378 ± 306. Les rapports entre éléments étaient: N/P, 13,8 ± 2,96; 54

N/K, 2,34 ± 0,311; N/Ca, 1,94 ± 0,406; N/Mg, 13,8 ± 3,23; P/K, 0,176 ± 0,039; P/Mg, 1,010 ± 0,196; K/Ca, 0,839 ± 0,208; K/Mg, 5,96 ± 1,55; et Ca/Mg, 7,18 ± 1,21. Les moyennes des indices DRIS pour l ensemble de la banque sont: N, 20; P, -12; K, -31; Ca, -15; et Mg, 38. Aucune station n a été déclarée déficiente en N ainsi qu en Mg. Le plus grand nombre de stations déficientes était pour K-Ca (26%) et P-K (24%) (Tableau 1). Dans 7 % des stations, des déficiences en P-K-Ca étaient observées. Le magnésium est l élément s éloignant le plus de l indice nul et cela, de façon positive alors que l inverse est observé pour K. Le caractère acide des stations étudiées s exprime par des indices négatifs pour le calcium alors que l inverse est observé pour l azote. Au Tableau 4 sont présentées les prescriptions pour chacun des groupes de déficiences. Les différences entre les applications aériennes et terrestres résultent de l impossibilité de granuler certains composés (e.g. la chaux standard). Les doses à appliquer ne sont pas indiquées car elles dépendent de l intensité de la carence et du type de sol. Ainsi, une érablière avec un indice K de -60 pourrait recevoir une dose deux fois plus forte qu une érablière avec une valeur de -25. Toutefois, on ne doit pas faire une extrapolation linéaire de ces indices. Nous proposons plutôt des doses modérées et au besoin, répétées aux cinq ou dix ans. Ainsi, l acériculteur pourrait ne traiter que 1/5 de son érablière par année, après la récolte de la sève ou au mois d août. Tableau 4. Groupes de déficiences et prescriptions selon l épandage terrestre ou aérien. Déficiences Épandage terrestre Épandage aérien P (55) 1 Triple superphosphate Triple superphosphate K (242) KCl KCl Ca (131) Chaux avec très peu de Mg Gypse P-K (305) Triple superphosphate et KCl Triple superphosphate et KCl P-Ca (3) Triple superphosphate et chaux avec très peu de Mg Triple superphosphate et gypse K-Ca (328) KCl et chaux avec très peu de Mg KCl et gypse Ca-Mg (4) Chaux dolomitique Chaux dolomitique P-K-Ca (88) Triple superphosphate, KCl et chaux avec très peu de Mg Triple superphosphate, KCl et gypse 1 Nombre de stations dans ce groupe Le chaulage En agriculture, la majorité des espèces sélectionnées pour les besoins de l animal ou de l homme sont sensibles à l acidité du sol. Il est donc de pratique courante d amender le sol avec de la chaux ou de la chaux dolomitique. D ailleurs, les logiciels développés pour les 55

prescriptions fournissent à l agriculteur la quantité de chaux à ajouter pour un ph à atteindre, ph qui varie selon les cultures. En forêt, du moins nos forêts naturelles, les espèces sont adaptées aux sols acides, situation assez générale des érablières. Des manques d éléments seraient bien plus fréquents que des toxicités dues à l aluminium. Il faut toutefois préciser qu une forte acidité du sol limite la minéralisation des litières et de la matière organique en général, ce qui peut aussi conduire à des déficiences. Nous ne croyons toutefois pas qu il soit opportun de généraliser le chaulage dans les érablières. Les interventions nous apparaissent totalement contre-indiquées lorsque la nutrition est équilibrée. D ailleurs, pour les manques de Ca, le gypse nous semble plus approprié que la chaux car il est moins retenu à la surface du sol et plus rapidement disponible pour l arbre. Par contre, si l on désire aussi relever le ph, la chaux doit être utilisé. Dans les stations où le magnésium est en excès, on devra s assurer que la chaux utilisée contient une très faible teneur en Mg. Sinon, on aggravera le problème. Certains acériculteurs mal informés ou mal conseillés auraient aggravé le déséquilibre causé par Mg en épandant des doses massives de chaux dolomitique. Références Camiré, C. et R. Ouimet 1993. L'analyse foliaire et les prescriptions d'amendement et de fertilisation dans les érablières dépérissantes du Québec. Compte-rendu du colloque "La recherche sur le dépérissement: un premier pas vers le monitoring des forêts", Direction de la recherche du ministère des Forêts, Serv. trans. technol. : 139-147. Côté, B. et R. Ouimet. 1996. Decline of the maple-dominated forest in southern Quebec : impact of natural stresses and forest management. Environ. Rev. 4 : 133-148. Lozano, F.C. et K.D. Huynd. 1989. Foliar diagnosis of sugar maple decline by DRIS. Commun. Soil Sci. Plant Anal. 20 : 1895-1914. Ouimet, R. 1991. La fertilisation des forêts dépérissantes: résultats encourageants dans la Beauce et l'estrie. Agrosol 4(1): 62-68. Ouimet, R. 1995. Suivi forestier du programme de lutte contre le dépérissement des érablières. Résultats des suivis un, trois et cinq ans des opérations de fertilisation 1898 à 1992. Gouv. Québec, Dir. de la Rech. for., Min. Ress. nat., Rap. Int. n 402. 14 p. 56