KF/AN REPUBLIQUE DECÔTE D IVOIRE --------------------- COUR D APPEL D ABIDJAN -------------------- TRIBUNAL DE COMMERCE D ABIDJAN -------------------- RG N 1152/2013 JUGEMENT CONTRADICTOIRE du 17/10/2013 ------------------ Affaire : Société COCAF IVOIRE (Me Agnès OUANGUI) Contre Coopérative Agricole BEDIBESSIE dite CABI (Me BOA Olivier Thierry) ---------------------- DECISION : Contradictoire Rejette l exception d incompétence ; Reçoit la société COCAF IVOIRE en son opposition ; L y dit bien fondée ; Déclare irrecevable la requête aux fins d injonction de payer en date du 08 juillet 2013 présentée par la Coopérative Agricole BEDIBESSIE dite CABI ; Condamne la défenderesse aux dépens. AUDIENCE PUBLIQUE DU 17 OCTOBRE 2013 Le Tribunal de Commerce d Abidjan, en son audience publique ordinaire du jeudi dix-sept octobre de l an deux mil treize tenue au siège dudit Tribunal, à laquelle siégeaient : Docteur KOMOIN FRANCOIS, Président du Tribunal ; Messieurs KACOU BREDOUMOU Florent, SILUE Daoda, NIAMKEY Paul et AMUAH David, Assesseurs ; Avec l assistance de Maître DOUHO Danielle, Greffier ; Avons rendu le jugement dont la teneur suit dans la cause entre : La société COCAF IVOIRE, dont le siège social à Abidjan, commune de Marcory, Zone 4, boulevard de Marseille, Immeuble LES CLARISSES, 01 BP 1342 Abidjan 01, représentée par son Directeur Général, Monsieur Stéphane CHAUDRON ; Demanderesse, représentée par son conseil, Maître Agnès OUANGUI, Avocat près la Cour d Appel d Abidjan, y demeurant 24, Boulevard Clozel, Immeuble SIPIM, 5 ème étage, 01 BP 1306 Abidjan ; Et D une part ; La Coopérative Agricole BEDIBESSIE dite CABI, dont le siège social sis dans la commune d Abengourou, BP 160 Abengourou, représentée par son Directeur, Monsieur BOA Emmanuel ; Défenderesse, représentée par son conseil, Cabinet BOA Olivier Thierry, Avocat demeurant à Abidjan Plateau, Avenue Lambin, Tour BIAO, 15 ème étage ; D autre part ; Enrôlée pour l audience du 31 juillet 2013, l affaire a été appelée et renvoyée au 10 octobre 2013 devant la 1
Première Chambre pour poursuite de la tentative de conciliation. A cette audience de renvoi, le Tribunal a constaté la non conciliation des parties et l affaire étant en état de recevoir jugement, elle a été mise en délibéré pour décision être rendue le 17 octobre 2013 ; Advenue cette audience, le Tribunal a vidé son délibéré dont le contenu suit : LE TRIBUNAL Vu les pièces du dossier ; Ouï les parties en leurs demandes ; Après en avoir délibéré conformément à la loi ; FAITS, PROCEDURE ET PRETENTIONS DES PARTIES Par exploit d huissier en date du 22 juillet 2013, la société COCAF IVOIRE a assigné la Coopérative Agricole BEDIBESSIE dite CABI et le Greffier en chef du Tribunal de Commerce d Abidjan à comparaître le 31 juillet 2013 devant le Tribunal de Commerce de ce siège pour entendre statuer sur l opposition par elle formée contre l ordonnance d injonction de payer n 0001872/2013 du 10 juillet 2013 l ayant condamnée à payer la somme de 199.221.150 FCFA à la CABI. A l appui de son acte d opposition, la société COCAF IVOIRE soutient que le Tribunal de Commerce d Abidjan n est pas compétent pour rendre l ordonnance d injonction de payer querellée au motif que les parties ont prévu, suivant les stipulations de l article 9 de la convention de partenariat les liant, de soumettre tout litige relatif à l interprétation et/ou à l exécution de ladite convention au Tribunal de Première Instance d Abidjan-Plateau. Elle estime par conséquent que le Tribunal de Commerce de ce siège, devait se déclarer incompétent pour rendre l ordonnance d injonction de payer. 2
Elle relève en outre que dans sa requête aux fins d injonction de payer en date du 08 juillet 2013, la CABI indique qu elle est une coopérative régie par la loi n 97-721 du 23 décembre 1997 portant statut de la Coopération dont le siège social est sis dans la Commune d Abengourou, BP 160 Abengourou. Elle fait remarquer que la CABI n a pas indiqué son siège social en ce sens que le siège social ne peut être constitué par une domiciliation à une boîte postale. Il doit être localisé, poursuit-elle, à une adresse ou une indication géographique suffisamment précise, étant entendu que la défenderesse ne saurait nier que la ville d Abengourou est subdivisée en quartiers ayant des rues bien déterminées. Pour que son siège social soit précis, la CABI, la créancière poursuivant, aurait dû indiquer le quartier d Abengourou ainsi que la rue dans lesquels est situé ledit siège social, mentionne-t-elle. Elle souligne que tel n étant pas le cas en l espèce, le défaut d indication du siège social a pour conséquence de rendre la requête aux fins d injonction de payer présentée par la CABI irrecevable en application de l article 4 de l Acte Uniforme OHADA portant organisation des procédures de recouvrement simplifiées et des voies d exécution. La société COCAF IVOIRE précise par ailleurs que suivant la requête aux fins d injonction de payer en date du 08 juillet que la défenderesse réclame la somme de 199.221.150 FCFA correspondant à la prime globale de certification au titre de la campagne 2012-2013. Toutefois, explique-t-elle, aux termes de la convention de partenariat la liant à la CABI dans le cadre du projet de certification UTZ, il a été convenu par les parties que la prime de cacao certifié sera payée par l acheteur, à savoir la société COCAF IVOIRE en fin de campagne à la coopérative, qui se doit de reverser au minimum 50% aux planteurs. En outre, à l annexe 2 de ladite convention, il a été stipulé que la campagne 2012-2013 commençait du 03 octobre 2012 pour se terminer au 30 septembre 2013, rappelle-t-elle. Elle en déduit que la date d exigibilité de la prime de 3
ladite campagne est fixée au 30 septembre 2013 de sorte qu elle n en est pas débitrice à ce jour. La créance dont le recouvrement est poursuivi par la CABI n étant pas exigible, c est en violation des dispositions de l article 1 er de l Acte Uniforme OHADA portant organisation des procédures simplifiées de recouvrement et des voies d exécution que l ordonnance n 0001872/2013 du 10 juillet 2013 a ét é rendue, insiste-t-elle. Elle demande par conséquent la rétractation de ladite ordonnance. En réplique, la CABI fait valoir qu en mentionnant dans sa requête que son siège social est situé à Abengourou, BP 160 Abengourou, elle a localisé de manière précise ledit siège social puisqu elle est la seule à avoir cette adresse dans cette ville. Elle précise qu il n y pas d adressage de rue à Abengourou de sorte que cette localisation du siège social par l adresse postale est conforme aux dispositions de l Acte Uniforme susvisé. S agissant de l exigibilité de la créance dont elle poursuit le recouvrement, elle soutient que les arguments avancés par la société COCAF IVOIRE n ont plus lieu d être dans la mesure où la date du paiement de la prime de la campagne 2012-2013 fixée au 30 septembre 2013 par la convention des parties est maintenant acquise. Estimant que la société COCAF lui est à présent redevable de la somme de 199.221.150 FCFA, elle conclut au rejet de l opposition formée par celle-ci et sa condamnation au paiement de cette somme. En la forme SUR CE Sur le caractère de la décision La CABI ayant fait valoir ses moyens, il y a lieu de statuer contradictoirement à son égard. Sur la compétence L article 7 de la Décision n 01/PR du 11 janvier 20 12 portant création, organisation et fonctionnement des 4
tribunaux de commerce conférées à ces tribunaux. énumère les attributions Il s agit là de compétence d attribution qui est d ordre public, caractère ayant pour conséquence que toute convention y dérogeant est nulle conformément aux dispositions de l article 9 du code de procédure civile, commerciale et administrative. Il en résulte qu en l espèce, la clause insérée par les parties dans leur convention, convention dont l objet se trouve pleinement dans le champ de compétence matérielle du Tribunal de Commerce, par laquelle elles ont convenu de soumettre tout litige relatif à l interprétation et/ou à l exécution de ladite convention au Tribunal de Première Instance d Abidjan-Plateau est nulle. Dès lors, la société COCAF IVOIRE ne peut s en prévaloir pour dénier la compétence du Tribunal de Commerce de ce siège pour connaître de la requête aux fins d injonction de payer introduite par la CABI. Il y a lieu de déclarer mal fondée l exception d incompétence soulevée par la demanderesse et de la rejeter. Sur la recevabilité de l opposition L opposition de la société COCAF IVOIRE ayant été introduite dans les forme et délai prescrits par la loi, elle sera déclarée recevable. Au Fond Sur la recevabilité de la requête aux fins d injonction de payer La demanderesse conclut à l irrecevabilité de la requête aux fins d injonction de payer présentée par la CABI au motif que ladite requête n indique pas de manière précise le siège social de ladite coopérative. L article 4 de l Acte Uniforme OHADA portant organisation des procédures simplifiées de recouvrement et des voies d exécution dispose : «La requête doit être déposée ou adressée par le demandeur, ou par son mandataire autorisé par la loi de chaque Etat partie à le représenter en justice, au greffe de la juridiction compétente. Elle contient, à peine d'irrecevabilité : 5
1) les nom, prénom, profession et domicile des parties ou, pour les personnes morales, leurs forme, dénomination et siège social ; 2) l'indication précise du montant de la somme réclamée avec le décompte des différents éléments de la créance ainsi que le fondement de celle-ci. Elle est accompagnée des documents justificatifs en originaux ou en copies certifiées conformes. Lorsque la requête émane d'une personne non domiciliée dans l'etat de la juridiction compétente saisie, elle doit contenir sous la même sanction, élection de domicile dans le ressort de cette juridiction». La mention du siège social requise dans la requête aux fins d injonction de payer répond à une exigence de localisation des personnes morales pour permettre la signification à celle-ci des actes procéduraux. Aussi, le siège social doit-il être désigné par une adresse ou une indication géographique suffisamment précise pour satisfaire à ladite exigence. En l espèce, dans sa requête aux fins d injonction de payer en date du 08 juillet 2013, la CABI écrit que son siège social est sis dans la Commune d Abengourou, BP 160 Abengourou. S il est vrai que la CABI est la seule, comme elle le rappelle, à avoir la boîte postale susvisée à Abengourou et qu il n existe pas d adressage de rue dans cette ville, il n en demeure pas moins que la localisation du siège social de la défenderesse est imprécise. Il aurait fallu en effet pour la CABI préciser, à l appui de la boîte postale de la coopérative, le seul élément objectif de localisation de son siège social en l absence d adressage des rues de la ville à savoir au moins le quartier de la ville d Abengourou dans lequel est situé le siège social. Faute d avoir indiqué cet élément qui aurait permis de localiser le siège social de la CABI de manière précise et suffisante, la requête aux fins d injonction de payer présentée par la défenderesse ne répond pas aux exigences de l article 4 de l Acte Uniforme précité. Il convient, dans ces conditions, de déclarer ladite requête irrecevable. 6
Sur les dépens La CABI succombe à l instance ; Il y a lieu de la condamner aux dépens ; PAR CES MOTIFS Statuant publiquement, contradictoirement et en premier ressort, Rejette l exception d incompétence ; Reçoit la société COCAF IVOIRE en son opposition ; L y dit bien fondée ; Déclare irrecevable la requête aux fins d injonction de payer en date du 08 juillet 2013 présentée par la Coopérative Agricole BEDIBESSIE dite CABI ; Condamne la défenderesse aux dépens ; Ainsi fait, jugé et prononcé publiquement les jour, mois et an que dessus. ET ONT SIGNE LE PRESIDENT ET LE GREFFIER./. 7