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Soins palliatifs pluridisciplinaires chez un malade en fin de vie. Accompagnement d un mourant et de son entourage (69) Pr. R. Favre Septembre 2005 1. Avant propos Malgré l importance quantitative de cet item (n 69) le chapitre sur la douleur est volontairement résumé car ce sujet est particulièrement développé dans le module 6 puisqu il correspond à trois items (n 65, 66 et 68). Les chapitres V, VI, VII et VIII ont été écrits en collaboration avec Monsieur Eric DUDOIT, psycho-oncologue et Madame Anne DORMIEUX-VIGIANO, Cadre Infirmier en oncologie médicale. 2. Introduction On peut distinguer deux grandes orientations thérapeutiques en médecine. La première se rapporte aux traitements curatifs qui ont pour but la guérison des patients. La deuxième se rapporte aux traitements palliatifs qui ne visent pas la guérison mais surtout l amélioration de la durée de vie et du confort des patients. On se situe dans un concept de qualité de vie plutôt que de quantité de vie. Bien que n étant plus dans un processus de guérison, il faut insister lourdement sur le fait que nous sommes toujours dans un processus de soins, dans une véritable philosophie de soins. De plus, les traitements palliatifs ne sont qu une composante, certes très importantes mais non exclusive, des soins palliatifs. Il faut traiter les symptômes et si possible tous les symptômes gênants ou très gênants pour les patients. Cependant, non seulement les soins palliatifs ne se limitent pas aux traitements des symptômes mais il n y a pas de frontière absolue entre les différents soins et traitements, avec parfois, comme cela peut être le cas en cancérologie, le passage d un type de concept à l autre. Ainsi, on peut concevoir les soins continus intégrés comme étant l ensemble des différents concepts thérapeutiques : les traitements curatifs utilisent des stratégies de guérison, les traitements et les soins palliatifs concernent les traitements des symptômes et les soins permettant d améliorer la qualité de vie du patient, l accompagnement correspond à une attitude qui soutient le patient en le soignant, ainsi que son entourage. Pour les soins palliatifs, il n y a pas de véritable hiérarchie thérapeutique, tout est soin. Toutes les structures de soins sont au service de toutes sortes de soins en même temps (consultations, soins externes, hospitalisation de jour, hôpital de semaine, hospitalisation classique, hospitalisation et soins à domicile.). Par exemple, il faut prendre en compte la souffrance du malade dans sa globalité, c est-à- dire aussi la souffrance morale de ses proches en donnant aux demandes le degré d urgence qu elles ont pour celui qui les formule. La prise en charge globale d un patient en soins palliatifs et en accompagnement est un devoir de la médecine actuelle qui dispose de multiples traitements efficaces qu il faut continuer, 1

sans oublier une approche humaine capitale même si elle s appuie sur un socle technique indispensable. Pourtant, il faut se résoudre à accepter le caractère inéluctable de la fin de vie. Nous sommes là, nous, médecins et soignants pour traiter, soulager, accompagner, en un mot : soigner. 3. Historique et fondements des soins palliatifs Il est impossible d indiquer avec précision l origine réelle des soins palliatifs et de l accompagnement car ce comportement de soins devait exister bien avant les véritables traitements curatifs. Dès l instant où un être humain s est préoccupé de son semblable souffrant, on peut penser que les soins palliatifs sont nés. L objectif de calmer est probablement apparu avant celui de guérir. Même si le début des soins palliatifs remonte à l origine même de la médecine, on retrouve des points de repère précis dans la littérature médicale qu il est naturellement important de citer car ils correspondent à une prise de conscience du problème par la communauté médicale et parfois par la société dans son ensemble. C est probablement Cicely Saunders qui fut une des premières à institutionnaliser les soins palliatifs. Il y a presque cinquante ans, dans un contexte où le cancer représentait le symbole de l incurabilité, cette jeune femme médecin britannique comprit que «lorsqu il n y a plus rien à faire», il y a encore quelque chose à faire. Lorsqu il n est plus possible de «traiter» («cure» en anglais), on peut encore soigner («care» en anglais). Elle est à l origine de la création du Saint-Christopher s Hospice qui a été le modèle d établissement de soins palliatifs et d accompagnement et qui a eu une influence considérable, non seulement dans le monde anglo-saxon, mais en Europe en général et en France en particulier. L approche globale, holistique, d un malade avec humanité et respect est la caractéristique, la base, des soins qu a proposés l humaniste Cicely Saunders. Parfois un peu utopiste, cette approche qui s appuie sur la communication verbale et non verbale a eu le mérite d être une des premières à être verbalisée et même relativement codifié. Les bases d une transmission, voire d un enseignement, des soins palliatifs étaient ainsi jetées. En 1967, l année où le Saint-Christopher s Hospice ouvrait dans la banlieue de Londres, une psychiatre installée à Chicago, Elizabeth Kubler-Ross, allait profondément modifier l approche des soignants qui font face à la mort. Elle est rapidement convaincue que les derniers temps de la vie peuvent être tout autre chose qu une morne attente de la fin, que ceux qui partent, comme ceux qui restent, ont besoin d être soutenus, aidés, entourés par la communauté des vivants. C est par son livre «Les derniers instants de la vie» qu Elizabeth Kubler-Ross devient célèbre. Elle décrit le chemin parcouru par les patients à la fin de leur vie. Ce chemin peut être long. Elle y distingue cinq étapes : la dénégation, la colère, le marchandage, la dépression, l acceptation. La tristesse de devoir quitter la vie est inéluctable. Il faut rester à côté du patient et par quelques paroles et beaucoup de silence, essayer de créer une ambiance de calme propice à l expression de la souffrance, pour traverser cette dernière période pénible pour atteindre le rivage de l acceptation avec une certaine sérénité. Le message d Elizabeth Kubler-Ross est de redécouvrir que le «mourant» n est pas un être d une autre espèce que nous-mêmes et qu il est jusqu au bout un «vivant». Le patient est ainsi replacé au centre, impliqué dans un dialogue. Invité à instruire le soignant, il redevient un acteur du système de soins. 2

Au début des années 70, des fondations pour la prise en charge des patients cancéreux en fin de vie étaient créées dans le Royaume-Uni et dans le monde anglo-saxon. Par exemple, le Docteur B.MOUNT créait au début de l année 1975 une unité de soins palliatifs à Montréal devenue très célèbre. Cette unité, avec celle de l hôpital Notre Dame (francophone) à Montréal, a influencé le courant déjà existant. Plus discret, ce courant des soins palliatifs existait en France. On retrouve cette influence dans la circulaire ministérielle du 26 août 1986 qui concerne l organisation des soins palliatifs et l accompagnement des malades en phase terminale. On retrouve aussi cette influence dans la création de la première unité de soins palliatifs française, formalisée et médiatisée, à l hôpital international de l université de Paris, en juin 1987, par le Docteur Maurice Abiven. Le courant des soins palliatifs devient ainsi plus présent en France. Il véhicule une certaine idée de la mort, de la vie, de la solidarité. Il s affronte à la souffrance. La vie humaine même diminuée et affaiblie doit être respectée, encouragée et honorée dans toutes ses dimensions. Le malade n est pas réduit à son organe malade mais est envisagé dans sa totalité organique et psychique et aussi comme un être humain appartenant à une communauté. Une équipe pluridisciplinaire, élargie à des bénévoles et à des ministres du culte, est une structure adaptée pour prendre soin de la personne malade dans toutes ses dimensions. Ainsi, un véritable courant de soins continus intégrés est progressivement apparu. Depuis la loi du 31 juillet 1991, les établissements publics de santé dispensent aux patients les soins préventifs, curatifs ou palliatifs que requiert leur état. Ce droit des malades a été ensuite étendu à l ensemble des établissements de santé et aux institutions médico-sociales (article 7 de la loi du 9 juin 1999). Le développement des soins palliatifs en milieu hospitalier a débuté depuis la circulaire du 26 août 1986 grâce aux unités pilotes. Les Unités de Soins Palliatifs (U.S.P.) avec des lits d hospitalisation traditionnelle Les équipes mobiles de soins palliatifs (E.M.S.P.) ont permis d appliquer les objectifs de la circulaire : développer un nouveau modèle de soins, former des soignants et des formateurs, approfondir la recherche. Les progrès ont été lents, mais en ce début de vingt et unième siècle, le mouvement paraît correctement amorcé. Le nombre des U.S.P. et des U.M.S.P. est toujours trop insuffisant mais augmente progressivement. Sur le plan qualitatif, il faut se donner les moyens d avancer dans le domaine des soins palliatifs au domicile. Il faut reconnaître que, pour les soins palliatifs, la démarche française a été longue et un peu tardive. Maintenant, tous les professionnels et les acteurs de soins sont conscients de leur devoir de s investir dans une démarche plus proche des réalités vécues par les patients et par leurs proches. Les soins palliatifs ne sont pas qu un ensemble de techniques mais sont aussi un autre regard porté sur la personne malade. 3

4. La souffrance globale chez un patient en fin de vie 4.1. La souffrance L expression de la souffrance va dépendre de la personnalité et du caractère du patient qui se sont construit tout au long de la vie. La personne est unique. Ainsi, certains malades cacheront leur souffrance, d autres en parleront parfois de façon démunie. L être humain se structure par la relation à l autre, aux autres. La maladie et la souffrance altèrent parfois cette capacité relationnelle de chacun. Il est capital de chercher à maintenir une communication, en tenant compte des aspects sociaux, culturels, familiaux, et professionnels. La maladie engendre des souffrances multiples, ou, si l on veut, la souffrance globale a des composantes multiples : La douleur en est la première composante, soit douleur aiguë qui permet souvent de poser un diagnostic, soit douleur chronique, lancinante, continue avec quelques paroxysmes. La rupture de l équilibre quotidien demande des efforts parfois considérables : respirer, se laver, aller aux toilettes La dépendance peut entraîner un sentiment d humiliation souvent exacerbé par une véritable vulnérabilité. La fatigue est très pénible et très gênante pour le patient. Parfois, le malade peut se sentir exclu, il n arrive plus à tenir ses rôles socio-familiaux. La peur est souvent un sentiment fort, peur de souffrir, peur de quitter ses proches, peur de mourir. Enfin, la souffrance de l entourage est ressentie par le patient ; elle accentue sa propre souffrance. 4.2. Prise en charge de la douleur Il est indispensable de prendre en charge la souffrance des patients. Cette prise en charge commence par celle de la douleur. Il faut commencer par préciser le type de douleur : douleur aiguë ou chronique. La douleur aiguë a une fonction d alarme. En général, elle est limitée dans le temps. Elle comprend trois éléments : la lésion tissulaire causale, la douleur et l anxiété. L éviction de la cause avec un traitement antalgique adapté pendant la durée de la douleur permettront la régression des lésions tissulaires, de la douleur et la disparition de l anxiété. La douleur chronique évolue souvent depuis plusieurs mois. On peut rencontrer un véritable syndrome douloureux chronique avec des manifestations physiques, psychologiques, comportementales et sociales. Il peut se retrouver dans des affections bénignes comme les céphalées, les douleurs postopératoires, rhumatologiques, viscérales, postzostériennes ou les lombalgies, les radiculalgies, les douleurs après amputation, les douleurs neuropathiques, les algoneurodystrophies, les douleurs psychiques. Les douleurs chroniques se rencontrent souvent dans l évolution d un cancer ou d un SIDA, mais des douleurs aiguës sont parfois au premier plan. Il faudra savoir proposer les bonnes attitudes pour favoriser une bonne prise en charge des deux types de douleurs, donc bien évaluer la douleur ainsi que son incidence sur le psychisme et le comportement du malade. Le 4

but est d éviter le passage à un syndrome douloureux chronique qui est toujours plus difficile à traiter. Il faut commencer par faire un diagnostic précis de la douleur, et pour cela, croire la plainte du patient, l interroger ainsi que sa famille et parfois les soignants. Il faut aussi observer les comportements du patient au repos et en mouvement. L examen clinique complet est un moment capital qui sera toujours complété par l évaluation des différentes caractéristiques de la douleur. On précise d abord le mécanisme générateur de la douleur : par excès de nociception, par désafférentation ou psychogène. Ensuite, on évalue la douleur notamment par l utilisation des différentes échelles de la douleur. 4.3. Les échelles d évaluation de la douleur Les échelles d évaluation de la douleur permettent de quantifier, de visualiser et de comparer. Les échelles verbales quantitatives concernent les situations où le malade doit quantifier l intensité de sa douleur en ayant recours à des mots simples. Il existe de nombreuses grilles d évaluation dont la plus simple est la suivante : 0 pas de douleur, 1 douleur légère, 2 douleur modérée, 3 douleur sévère. Ces grilles d évaluation peuvent être proposées sous forme de graphique dont la lecture est rapide et facilite le suivi de la douleur et son évolution dans le temps. Les échelles visuelles analogiques (E.V.A.) sont matérialisées par une ligne horizontale ou verticale de 10 cm, non graduée. Le patient inscrit une croix au niveau correspondant à sa douleur. La mesure est réalisée chaque jour. Il est important que le malade voie ce qu il a noté la veille. Actuellement, une réglette avec un curseur que le malade déplace simplifie encore la lecture. Les échelles numériques consistent à demander au patient d estimer par un chiffre de 0 à 100 la douleur ressentie pendant les heures précédentes. L éventail de possibilités entre 0 et 100 donne une vue plus détaillée des fluctuations de la douleur. Les échelles quantitatives et qualitatives correspondent à un questionnaire qui rassemble tous les mots descriptifs de la douleur utilisés couramment. Ces mots sont groupés en trois classes principales. Les premiers décrivent les qualités sensorielles, les deuxièmes les qualités affectives et les troisièmes des mots non spécifiques. Les résultats obtenus avec ces questionnaires peuvent être traités statistiquement. Cependant, ils sont parfois critiqués car tous les patients ne comprennent pas tous les mots ; il peut y avoir de grandes différences entre la signification officielle d un mot et celle que lui donne le malade. En fait, là aussi, ce qui est important c est l évolution au cours du temps de l évaluation de la douleur. Les échelles multidimensionnelles fournissent une évaluation à la fois quantitative et qualitative. Il s agit par exemple du questionnaire «Mac Gill Pain», du QDSA (Questionnaire de Saint Antoine) ou grille du club français d algologie. Ils permettent d évaluer les mécanismes de la 5

douleur. Leur inconvénient est qu ils reposent sur le langage et dépendent des aptitudes à l expression verbale des sujets. On peut rapprocher de ces échelles multidimensionnelles les échelles d évaluation des modifications d activité. La plus connue est l échelle de Karnofsky ou critères de Karnofsky. On évalue l état clinique des patients selon une cotation de dix en dix allant de cent à zéro. (100 correspond à l état normal et 0 à la mort). Entre 100 et 80, le travail ou une activité normale sont possibles sans soins spéciaux. Entre 70 et 50, le travail n est pas possible, mais la vie à la maison est possible avec une aide d importance variable. Entre 40 et 0, les soins nécessaires sont équivalents à ceux d une hospitalisation ; le malade peut s aggraver rapidement. La classification de l OMS est une variante de celle de Karnofsky, la cotation allant de 0 à 4. (O correspond à l état normal et 4 aux soins indispensables à malade dépendant). Conclure sur la souffrance globale d un patient en fin de vie c est encore insister sur la prévalence de la douleur qui varie de 60 à 80 % selon les auteurs. Il faut donc savoir la reconnaître par une véritable démarche évaluative. Pour les patients communicants et coopérants, les outils d auto-évaluation sont adaptés et permettent une bonne prise en charge thérapeutique antalgique. Pour les patients communicants ou coopérants, les outils d hétéroévoluations permettent d apprécier la douleur au travers des changements de comportements somatiques, psychomoteurs et psychosociaux. Les jeunes enfants bénéficient de ces approches, ce qui n est pas toujours le cas pour les malades psychiatriques ou pour les malades comateux. Il ne faudra jamais oublier de replacer la douleur dans le contexte général de la souffrance du patient, non seulement dans sa composante psychologique et affective, mais aussi dans sa composante somatique en évaluant et en traitant les autres symptômes pénibles autre que la douleur. 5. Savoir prendre en charge les symptomes autres que la douleur chez un patient en fin de vie Nous avons vu que la souffrance des malades en phase terminale n est pas le seul fait de la douleur. Même si elle est au premier plan, il existe de nombreux autres symptômes responsables d inconfort encore trop souvent négligés par les soignants et parfois cachés par les malades. Avant d être purement symptomatique, le traitement cherchera à être si possible étiologique. Le but est de diminuer le moins possible la qualité de vie des patients et de traiter des symptômes très variables de façon à diminuer l intensité de l inconfort. 6

5.1. Troubles respiratoires 5.1.1. Dyspnée 5.1.1.1. Définition La dyspnée est un symptôme subjectif décrit par le patient comme une sensation désagréable de difficulté à respirer. Ce symptôme est fréquent en phase terminale ; il est très angoissant pour le patient, mais aussi pour son entourage. La perception de la dyspnée et sa sévérité sont variables suivant la rapidité d apparition du symptôme, les expériences antérieures et l anxiété du patient. 5.1.1.2. Traitement Traitements étiologiques de la dyspnée Les causes de la dyspnée en phase terminale sont les mêmes qu aux autres stades de la maladie et le traitement doit, là aussi, être d abord étiologique et utiliser toutes les ressources de l équipe multidisciplinaire. Même en situation de maladie très évoluée, certains traitements peuvent être proposés après évaluation du patient : par exemple, le traitement au laser d une tumeur endobronchique. Traitements symptomatiques de la dyspnée Oxygénothérapie L efficacité de l oxygénothérapie est souvent controversée sauf en cas d'hypoxie et les indications resteront fonction de l amélioration ressentie par le patient. Cette oxygénothérapie s effectuera plutôt à la sonde nasale qu au masque ; celui-ci qui augmente la gêne subjective et perturbe la communication. Benzodiazépines Les benzodiazépines ont un effet dépresseur sur les centres respiratoires et un effet myorelaxant. L action anxiolytique permet de rompre l auto-aggravation de la sensation dyspnéique en diminuant l angoisse ressentie par le patient. Le diazépam est le plus utilisé, à la dose de départ de 5 mg par jour qui doit parfois être augmentée chez certains patients. L administration orale ou rectale permet son utilisation même en situation d urgence, en particulier à domicile. Sa demi-vie longue (30-60 h) permet une seule prise quotidienne. 5.1.2. Encombrements 5.1.2.1. Définition L encombrement est une production est une production anormale de sécrétions au cours ou au décours de la toux. 5.1.2.2. Traitements Pour l encombrement sans dyspnée, on propose des aérosols fluidifiants, des mucolytiques et une kinésithérapie. Lorsque l expectoration est impossible, on réalise, pour les patients coopérants, une aspiration simple ou une aspiration endoscopique. Pour les patients épuisés, notamment en phase terminale, on évite les aspirations qui peuvent être traumatisantes ; on 7

essaie d assécher les excrétions bronchiques par la scopolamine ou l atropine. Les antibiotiques et les corticoïdes sont souvent utilisés. Pour l encombrement avec dyspnée, il faut systématiquement penser aux traitements spécifiques de la pathologie, comme par exemple un OAP traité par diurétique, dérivés nitrés et oxygénothérapie. Il faut aussi traiter la dyspnée. Le traitement de l encombrement comprendra surtout scopolamine et atropine, mais aussi morphine par voie orale ou intraveineuse. le midazolam à usage uniquement hospitalier est intéressant pour sa demi-vie courte dans les situations avec asphyxie. Son effet amnésiant peut être recherché. Il peut être prescrit par voie sous cutanée à la dose de 2,5 à 5 mg qui peut être augmentée. L action des opioïdes sur la dyspnée n est pas bien élucidée mais, à petites doses, ils diminuent la sensibilité bulbaire à l hypoxie et le rythme respiratoire des dyspnées avec polypnée. Chez le patient ne recevant pas d opioïdes, la dose de départ doit être faible : 5 mg de chlorhydrate de morphine toutes les 4 h per os ou, si le patient ne peut avaler, 15 mg de morphine sous-cutanée par 24 h. Si le patient reçoit déjà des opioïdes pour la douleur, la dose à utiliser pour la dyspnée est le 1/10 de la dose de 24 h en bolus. 5.1.3. Toux 5.1.3.1. Définition La toux peut être due à différents facteurs qui co-existent chez le même patient. Ce symptôme est très intriqué la dyspnée. La toux aggrave la sensation dyspnéique (avec un phénomène d auto-aggravation)? Le traitement doit être autant que possible étiologique et faire appel à toutes les ressources de l équipe multidisciplinaire. L apport de la kinésithérapie ou des soins infirmiers est fondamental. 5.1.3.2. Traitement Le traitement doit d abord être étiologique : antibiotiques pour une infection, diurétiques dans l insuffisance cardiaque. Lorsque le traitement n est pas ou n est plus efficace, il faut adapter le traitement symptomatique, surtout en phase terminale : les antitussifs opiacés, codéine et morphine, les antisécrétants comme la scopolamine qui diminuent le volume des sécrétions du patient qui ne peut plus expectorer. 5.1.4. Hémoptysies 5.1.4.1. Définition Il s agit d extériorisation par la bouche de sang d origine pulmonaire. Il doit être distingué des saignements digestifs ou de la sphère ORL. 8

5.1.4.2. Etiologies L étiologie la plus fréquente est celle du cancer du poumon. Ce symptôme est très inquiétant pour le patient et son entourage ainsi que les soignants qui redoutent une hémoptysie foudroyante. 5.1.4.3. Traitement Le traitement dépend de la cause et du stade évolutif de la maladie du patient. Les hémoptysies répétées à un stade précoce peuvent bénéficier d embolisation ou de laser. A un stade très évolué, il faut proposer au patient qui redoute cet événement, l utilisation de midazolam dans un but de sédation transitoire de la vigilance qui permet de passer le cap difficile et qui du fait de son effet amnésiant peut être recherché. 5.2. Troubles digestifs 5.2.1. Nausées et vomissements Ces symptômes sont très fréquents à la phase terminale car plus de 40 % des patients en souffrent de façon durable. Ils altèrent sérieusement le confort de la fin de vie. Les causes en sont multiples et les traitements doivent être adaptés au mécanisme mis en jeu. 5.2.1.1. Rappel physiopathologique Le mécanisme des nausées et des vomissements est complexe et met en jeu plusieurs centres nerveux : la zone gâchette (trigger zone, CTZ) des chémorécepteurs sensibles aux toxines circulantes, aux métabolites et aux médicaments, le centre du vomissement qui est stimulé par le CTZ mais également par les centres supérieurs cérébraux, ainsi que : la vue l odorat le centre vestibulaire l hypertension intracrânienne le nerf X, lui même stimulé par la stase gastrointestinale, la radiothérapie abdominale, la chimiothérapie, l atteinte hépatique, l augmentation de volume d origine tumorale. La stimulation est mécanique ou chimique et implique la mise en jeu des récepteurs sérotoninergiques 5HT3. 5.2.1.2. Les voies d administration des traitements La voie orale doit être privilégiée mais peut aggraver les nausées ou bien être totalement inefficace du fait de vomissements ; il convient alors d utiliser d autres voies d administration : la voie rectale peu utilisée en France est pourtant très intéressante la voie sous cutanée pour l halopéridol la voie intraveineuse. 5.2.1.3. Traitement : quelques exemples Si les causes sont intriquées, il conviendra de les répertorier pour ajuster le traitement. Causes iatrogènes 9

De nombreux médicaments peuvent être en cause. Les mécanismes sont multiples : irritation gastro-intestinale (antibiotiques, AINS) stase gastrique (opioïdes, tricycliques, anticholinergiques) activation de la CTZ (opioïdes, digoxine, antibiotiques, cytotoxiques) récepteurs 5HT3 (cytotoxiques) Si leur utilisation n est pas indispensable, la meilleure solution est d interrompre le traitement ou de changer de produit. Si le médicament est indispensable (par exemple les opioïdes), les nausées cessent en général au bout de 48 h par un traitement correcteur avec du métoclopramide ou du dompéridone. En cas de persistance ou de vomissement, il faut penser à utiliser la voie parentérale. La chimiothérapie : L indication est ici celle des anti 5HT3 Causes mécaniques Par exemple la stase gastrique, l occlusion intestinale. Le traitement associe prokinétiques et antisécrétoires. Les corticoïdes peuvent également être efficaces. Troubles métaboliques l hypercalcémie est généralement réversible avec les perfusions de bisphosphonates insuffisance rénale insuffisance hépatique terminale Hypertension intracrânienne Le traitement de première intention est le traitement corticoïde à forte dose, par exemple méthylprednisolone : 240 mg le matin. 5.2.2. Atteintes buccales : soins de bouche Les soins de bouche sont souvent négligés par les équipes soignantes qui accordent pourtant une grande attention aux soins corporels : laisser un patient souillé sans effectuer de change leur apparaîtrait comme une négligence grave, alors pourquoi laisser une bouche sale! Certaines lésions buccales sont parfois très douloureuses altérant le confort du patient, empêchant l alimentation et gênant la communication avec l entourage. La bouche permet aussi d embrasser : comment le faire quand elle est malodorante? Avec une bouche saine, une très large majorité de patients peuvent boire et manger jusqu à leur dernier jour. Il est nécessaire de sensibiliser les équipes soignantes et les familles de l importance des soins de bouche à la phase terminale. A cette période en effet, les atteintes buccales sont fréquentes. 5.2.2.1. Bouches sèches, bouches sales C est souvent le seul symptôme de déshydratation perçu par le patient ; il est aggravé par la respiration bouche ouverte et un certain nombre de médicaments (antidépresseurs, diurétiques etc.) A l examen, les muqueuses et les lèvres sont sèches et la langue dépapillée, rouge, parfois «rôtie». Les sécrétions salivaires sont épaisses, parfois sales. Les soins de bouche doivent être pratiqués régulièrement et systématiquement après les repas avec du bicarbonate ou de la Bétadine bain de bouche. Il faut également nettoyer les dents et les éventuelles prothèses. Pour diminuer la sécheresse buccale, il peut être utile de faire sucer de l ananas frais, des glaçons ou des sorbets. 5.2.2.2. La bouche mycotique La bouche mycotique est souvent le fait de Candida albicans, mais sur certains terrains très immunodéprimés, d autres levures résistantes aux antifongiques peuvent être observées. 10

L examen retrouve un érythème diffus de la langue et de la cavité buccale avec des dépôts blancs nacrés parfois confluents. La mycose buccale est très souvent associée à une mycose oesophagienne qui aggrave les troubles alimentaires. Chez les patients atteints de SIDA en phase terminale, elle est pratiquement toujours présente et implique un traitement intensif. Des bains de bouche à la Bétadine peuvent être utilisés, associés au miconazole (Daktarin Gel) qui est bien accepté par les patients. Un traitement long de trois semaines est nécessaire. En cas d atteinte diffuse et chez les patients sévèrement immunodéprimés ou atteints de SIDA, il est nécessaire d utiliser un antimycosique par voie générale : fluconazole (Triflucan ) par exemple. 5.2.2.3. La bouche ulcérée Dans le cadre du patient atteint de SIDA, il s agit le plus souvent d une atteinte herpétique récurrente. Les vésicules très évocatrices sont fréquemment absentes à l examen. Très douloureuse et s accompagnant de signes généraux, elle nécessite des antiviraux par voie générale comme l aciclovir (Zovirax ). L ulcération neutropénique, chimio ou radio-induite est ulcéro-nécrotique, et très algique. Les antalgiques majeurs par voie générale doivent être employés si nécessaire ; les soins locaux resteront les plus doux possibles avec des produits au PH neutre (Bétadine bain de bouche diluée) et Xylocaine. En situation de phase terminale, on peut utiliser, avec un effet antalgique très rapide, des bains de bouche aux corticoïdes. 5.2.2.4. La bouche hémorragique Nous la rencontrons chez les patients en aplasie ou dans le cadre de lésions tumorales endobuccales. Ce symptôme inquiète beaucoup le patient et son entourage. Aux soins de bouche habituels, on ajoute un hémostatique local comme l alginate de Calcium (Coalgan ). 5.2.2.5. Les lésions tumorales Dans le cadre de lésions tumorales en phase terminale, les soins de bouche ont pour objectif de diminuer la douleur et de combattre la surinfection toujours présente. Outre les soins de bouche habituels, les moins agressifs possibles, il est nécessaire de rajouter de la Xylocaine et/ou des corticoïdes pour leur effet antalgique. Une antibiothérapie contre les germes GRAM + et les anaérobies est très souvent nécessaire pour limiter les odeurs pénibles pour le patient et l entourage. 5.2.3. Constipation La constipation est un symptôme très fréquent qui doit être traitée préventivement traitement préventif et nécessite une surveillance régulière des selles. Outre l inconfort de ce symptôme, le laisser évoluer peut entraîner un syndrome subocclusif sur fécalome dont le traitement est plus difficile et désagréable. 5.2.3.1. Etiologies La constipation est due à de nombreux facteurs qui peuvent s associer et aggraver le symptôme. déshydratation des selles car le patient ne boit pas assez, 11

hypercalcémie affection sténosante du tube digestif (cancer colique occlusif) perte du tonus de la paroi digestive (paraplégie) De plus les médicaments utilisés, opioïdes, antidépresseurs, entraînent par eux mêmes une constipation. 5.2.3.2. Traitement Le traitement doit être mis en route en fonction de l étiologie. Il nécessite très souvent une association médicamenteuse. Per os : Action osmotique : lactulose (peut entraîner à forte dose un ballonnement), Lubrifiant : huile de paraffine (peut donner des pertes anales), Stimulants : docusate Péristaltogène : prostigmine (peut provoquer des douleurs en cas de lésion sténosante du tube digestif) Par voie rectale : Glycérine Sorbitol Les moyens non médicamenteux associent des règles hygiéno-diététiques (parfois impossibles à appliquer en phase terminale), comme manger des légumes, des fruits et boire beaucoup, maintenir une activité physique, proposer une chaise percée. Il peut être utile si cela n est pas douloureux de faire pratiquer des massages abdominaux. Points à retenir : la constipation peut s installer même si le patient ne s alimente pas la prescription d opoïdes nécessite un traitement préventif systématique de la constipation simultanée ne pas attendre plus de trois jours sans selles. Dans ce cas, faire un toucher rectal et si nécessaire un lavement évacuateur l incontinence et la diarrhée d apparition récente doivent faire rechercher un fécalome 5.2.4. Le Hoquet 5.2.4.1. Définition Le hoquet est un spasme clonique, réflexe, du diaphragme et des muscles respiratoires accessoires. Habituellement il survient par périodes courtes mais peut devenir très gênant lorsque les épisodes sont rapprochés ou subintrants. La persistance du hoquet est très pénible pour le patient et gêne le sommeil et l alimentation. 5.2.4.2. Etiologies Le hoquet est lié à une distension gastrique ou à une irritation diaphragmatique. Les causes du hoquet sont : la distension gastrique l irritation du nerf vague par un processus tumoral du cou ou du thorax l irritation du nerf phrénique par un processus tumoral du cou ou du médiastin. 5.2.4.3. Traitement Les moyens non médicamenteux : stimulation nasopharyngée (boire de l eau glacée), stimulation du conduit auditif externe (faire éternuer), stimuler la muqueuse avec une sonde nasogastrique. Il est possible d évacuer l estomac si le hoquet est lié à la stase gastrique. 12

Les manœuvres d hyperventilation, la technique de Valsalva peuvent être proposées. Le traitement médicamenteux : métoclopramide 10 mg IV toutes les 4 h si nécessaire chlorpromazine 10-25 mg IV ou per os nifédipine 10-20 mg per os toutes les 8 h. 5.2.5. Occlusions 5.2.5.1. Fréquence La fréquence générale est faible : 3 à 6 %. Les occlusions se retrouvent avec une plus grande fréquence dans les cancers colo-rectaux et les cancers de l ovaire mais peuvent se rencontrer dans toutes les situations de patient en phase avancée de la maladie. 5.2.5.2. Etiologies Chez un même patient, plusieurs causes peuvent être associées : Occlusion de type mécanique obstruction de la lumière intestinale (tumeur, fécalome) infiltration de la paroi (tumeur, radiothérapie) compression extrinsèque (masse abdominale) Occlusion de type paralytique atteinte des nerfs de la motricité instestinale (compression médullaire avec paraplégie) médicamenteuse : opiacés, vincaalcaloïdes post-opératoire carcinose péritonéale 5.2.5.3. Aspects cliniques Les symptômes modérés et intermittents au début du tableau augmentent d intensité et deviennent permanents. Des douleurs à type de coliques ou des douleurs permanentes peuvent être accompagnées de nausées et de vomissements qui peuvent être fécaloïdes signant l occlusion basse. L arrêt des selles ou une diarrhée paradoxale de vidange du bout distal ou sur fécalome peuvent être observées. L examen montre une distension abdominale d autant plus importante que l occlusion est distale. La présence de borborygmes dans les occlusions basses peuvent être absents en cas d iléus paralytique. Il faut vérifier absolument l ampoule rectale à la recherche d un fécalome. L indication de la radiologie dépend de l état clinique du patient et du stade évolutif de la pathologie. Le cliché simple de l abdomen va montrer des images à type de niveaux liquides en position debout, signant l occlusion et éventuellement sa cause en cas de stase stercorale. 5.2.5.4. Traitement des occlusions Le traitement chirurgical peut être discuté en concertation multidisciplinaire, dans certains cas très précis et en fonction du stade évolutif de la maladie. En pratique, lorsque l occlusion est basse, la prise en charge des symptômes est moins difficile que dans l occlusion haute. 13

Le traitement médical est le plus souvent indiqué et est associé en fonction des symptômes. Les médicaments utilisés sont les suivants : Antispasmodiques pour les douleurs à type de coliques en interrompant les traitements gastrokinétiques comme le métoclopramide ou irritants coliques comme les dérivés du séné. Morphiniques pour les douleurs abdominales constantes. Corticoïdes pour lutter contre les nausées et contre l occlusion elle-même (par exemple méthylprednisolone 60 mg qui pourra être augmenté jusqu à 240 mg). Des doses importantes administrées rapidement sont plus efficaces que des petites doses sur un temps long. Halopéridol dans les nausées et vomissements (en commençant par une dose de 1 mg par voie sous cutanée). Octréotide dans les états sévères non contrôlés par les traitements ci-dessus (à la dose de 0,3 mg/24h) La sonde nasogastrique n est le plus souvent pas indiquée dans les occlusions terminales qui sont généralement bien contrôlées par le traitement médicamenteux. Cependant, lorsque les vomissements sont incontrôlés et dans certaines occlusions hautes (carcinome gastrique, cancer du pancréas), il faut proposer la mise en place d une sonde qui peut soulager le patient, et réévaluer régulièrement la situation. Si le patient ne la supporte pas, il vaut mieux l ôter. Certains patients vont présenter des vomissements occasionnels qui les gêneront moins que la sonde nasogastrique. Comme toujours en situation de soins palliatifs, c est la décision du patient qui dictera les choix thérapeutiques. Dans les occlusions hautes, il faut également mentionner la gastrostomie per cutanée pour éviter la sonde gastrique. La nutrition parentérale ne présente généralement pas d intérêt en situation terminale avancée. Cependant, elle doit être proposée quand les patients présentent un syndrome occlusif chronique empêchant toute alimentation alors qu il a une espérance de survie de plusieurs mois et un état clinique satisfaisant comme dans le cas de certaines tumeurs ovariennes avec carcinose péritonéale. 5.2.5.5. Remarque : La diarrhée est un symptôme plus rare qui nécessite souvent un traitement étiologique (par exemple anti-infectieux) ou quelquefois un traitement symptomatique facile à mettre en œuvre. 5.3. Nutrition et Hydratation Les problèmes d hydratation et de nutrition des patients en fin de vie sont une préoccupations quotidiennes des médecins travaillant auprès de patients cancéreux ou atteints de SIDA en phase terminale, et également en gériatrie. 5.3.1. Nutrition 5.3.1.1. Définition La fonction de la nutrition ne peut se résumer à une simple absorption calorique et hydrique pour assurer la survie ; s y associe la notion de plaisir, de convivialité et de partage, fortement liés au désir de vie. 14

Ceci explique que les prises de décisions ne soient jamais neutres mais au contraire subjectives, fortement marquées par la personnalité du prescripteur ; elles peuvent être source de conflits. Cette nutrition n aura pas pour intention de faire prendre du poids au patient mais d empêcher la fonte musculaire et de permettre de garder une meilleure autonomie physique. Elle doit être non contraignante (par exemple perfusions la nuit), ne pas empêcher le retour à domicile ; le patient doit être régulièrement réévalué. Sur un long terme, plus de deux semaines, il est préférable d utiliser le mélange ternaire disponible à domicile. Devant les situations difficiles, la décision ne doit pas être prise par une seule personne, mais le médecin doit entendre la ou les demandes du patient qui doit rester le principal acteur des soins et en parler avec l entourage et l équipe soignante. 5.3.1.2. Fréquence des troubles de l alimentation L amaigrissement (77 %) et l anorexie (67 %) sont retrouvés avec une très grande fréquence chez les patients en phase terminale. La réalimentation et/ou la réhydratation par la bouche peuvent être compromises par des symptômes associés tels que nausées et vomissements, troubles de la déglutition, obstacle sur les voies digestives, troubles psychiques sévères, état comateux. La présence d une atteinte buccale, fréquente et douloureuse comme une candidose, peut aggraver les symptômes. La cachexie favorise la dépendance ; l alitement diminue la résistance de la personne aux agressions infectieuses et constitue une des causes de décès des patients. 5.3.1.3. Evaluation du patient dénutri La stratégie alimentaire va être définie en fonction de la situation clinique ; psychologique du patient ; elle nécessite un bilan : Interrogatoire du patient L interrogatoire va rechercher : l ancienneté et la sévérité de la perte de poids la dénutrition est définie par une perte de poids de plus de 10 % du poids habituel son importance pour le patient sur le plan objectif mais également son retentissement psychologique. Il faut lui faire préciser ses goûts et ses aversions alimentaires et dépister les carences les plus évidentes. L interrogatoire permettra de définir si la dénutrition est le fait de l anorexie, si celle-ci est sélective ou enfin s il existe, de façon associée, une dysphagie. Il recherchera les symptômes associés, douleurs, nausées ou dyspnée qui, une fois traités, pourraient améliorer l anorexie du patient. Il est important de faire parler le patient sur son «vécu alimentaire», sur l importance que lui-même donne à sa perte de poids et à son retentissement sur l autonomie et l image corporelle. Examen clinique Il va rechercher les signes de dénutrition : maigreur, amyotrophie et de déshydratation ; il comprend un examen attentif de la cavité buccale à la recherche d une cause locale aggravante, comme une mycose. 15

Bilan biologique Le dosage de l albumine, de la préalbumine, de la protéine C réactive et de l orosomucoïde permet d obtenir le PINI (Index Pronostic Nutritionnel et Inflammatoire). Cet index n apporte pas plus de renseignements pronostiques que le dosage de l albumine sérique seule, mais sa variation après une semaine permet de connaître la gravité de la dénutrition ainsi que son caractère réversible. Il permettra d évaluer l efficacité de la stratégie mise en place. Bilan alimentaire Ce bilan, mis en place par les diététiciennes, infirmières et aides soignantes, ou à domicile par l entourage, permet de relever, sur 48 heures, tout ce que le patient absorbe. On note également les mets que le patient préfère. 5.3.1.4. Traitement de la dénutrition en fin de vie Les propositions thérapeutiques vont dépendre : de l état clinique du patient et du stade évolutif de sa maladie, du contexte psychologique, des contraintes techniques. Elles devront répondre aux questions suivantes : Est-il nécessaire d intervenir? Comment évaluer la stratégie alimentaire? La prise en charge sera multidisciplinaire et nécessitera en institution la formation et la motivation de tous les acteurs autour du patient ainsi que des cuisiniers. A domicile la formation des auxiliaires de vie et des aides ménagères est importante. L intention en phase terminale n est plus de prolonger la durée mais la qualité de la vie. Par ailleurs, l alimentation par la bouche fait partie d un des plaisirs que le patient pourra conserver longtemps si l on prend soin de cet aspect. C est également à travers les repas que l équipe soignante et la famille pourront continuer à partager avec le patient ; la convivialité a un sens symbolique plus important que le simple compte des calories. 5.3.1.5. Modalités du traitement de la dénutrition L alimentation et l hydratation orales restent la forme privilégiée d intervention nutritionnelle. L équipe soignante ou l entourage du patient va privilégier les solutions les plus simples et adaptées aux goûts et aux habitudes alimentaires du patient. Les conseils d une diététicienne peuvent être précieux. L alimentation doit rester un plaisir. Conseils alimentaires : o fractionner les repas et proposer des collations o privilégier l apport successif des mets : rien de plus rebutant que le «plateau repas» o éviter les aliments à odeurs fortes qui stimulent l appétit du sujet sain mais peuvent être écoeurants chez le sujet nauséeux o installer confortablement le malade dans une atmosphère conviviale o soigner la préparation et la présentation des repas, le plaisir des yeux précède celui de la bouche o enrichir les aliments en protéines, o les aliments le plus souvent acceptés sont lactés et/ou sucrés o chez le patient nauséeux, préférer les aliments froids moins odorants 16

o la texture pâteuse est plus facile à déglutir chez les patients qui ont des lésions buccales ; Penser à diminuer le nombre de comprimés et gélules que les patients sont supposés avaler avant le repas. L alimentation par voie orale nécessite une bouche fonctionnelle, ce qui souligne l importance des soins de bouche. Possibilités médicamenteuses de faibles doses de corticoïdes auraient un effet bénéfique mais limité dans le temps (Prednisone 15 à 20 mg par jour). Les progestatifs de synthèse (acétate de mégestrol, médroxyprogestérone acétate) permettraient un gain de poids et une amélioration de l état général chez les patients atteints par le VIH ou la cachexie cancéreuse. Ce serait un médicament de plus, chez des sujets polymédicamentés, non dénués d effets secondaires, en particulier thromboemboliques. 5.3.1.6. Alimentation entérale Elle n est indiquée que chez les patients porteurs d une atteinte de la filière digestive haute, gardant une bonne autonomie, acceptant les contraintes physiques et psychologiques d un tel traitement. Il est préférable de réaliser une gastrostomie d alimentation car la sonde nasogastrique douloureuse et inesthétique est mal acceptée. Le patient doit bien entendu être informé du diagnostic et, dans la mesure du possible, du pronostic ou en tout cas des résultats attendus de cette nutrition pour pouvoir choisir librement, Il doit idéalement être totalement autonome pour brancher ses poches. Si la contrainte lui pèse, il doit pouvoir demander l arrêt de cette nutrition artificielle. Cette technique permet un apport calorique équilibré qui doit être suffisant autour de 35-40 kcal/kg/jour. Le débit de la nutrition doit être stable et lent pour éviter les sensations de malaises et de nausées ainsi que les diarrhées provoquées par un débit trop rapide. Il est parfois nécessaire de brancher les nutriments la nuit pour permettre plus d autonomie au patient aux dépens cependant des rythmes biologiques. Les accidents graves ne sont pas rares, liés au reflux dans les bronches et les poumons avec pneumopathies d inhalation (50 % de décès) ; aussi ces poches de nutrition doivent être branchées sur un patient assis et vigilant. Les incidents sont nombreux : fuite par l orifice de la gastrostomie, infections cutanées, érosion de paroi, obstruction du tube, migration intra-abdominale, pneumopéritoine, iléus réflexe. Malgré l appareillage, il convient de proposer, dans la mesure où cela est possible, une alimentation par la bouche pour conserver le plaisir oral. Il suffit parfois que le patient garde l aliment en bouche pour se pénétrer de sa saveur. 5.3.1.7. Alimentation parentérale La nutrition parentérale stricte est onéreuse et non dénuée de dangers infectieux et hépatiques (stéatose). Elle nécessite un accès veineux par cathéter central tunnellisé, ou chambre implantable avec cathéter veineux central, des conditions d asepsie particulièrement strictes et un débit de perfusion stable. Elle impose donc une éducation du patient qui doit être en bonne autonomie physique et psychique. Ceci implique que les indications à la phase terminale sont exceptionnelles. 17

5.3.2. Hydratation L objectif poursuivi est le plus souvent de réhydrater le patient et/ou d éviter une fonte musculaire : Les perfusions par voie veineuse doivent rester exceptionnelles en raison du risque infectieux, de la surveillance nécessaire et du capital veineux souvent très diminué. Parfois douloureuses et souvent gênantes, elles peuvent être arrachées par le patient et la contention parfois envisagée n est pas acceptable en phase terminale. Cependant, si le patient est déjà porteur d un cathéter central ou d un site implantable, cette voie peut être utilisée, surtout si le malade le demande. On peut aussi proposer les perfusions sous cutanées. 5.3.2.1. Technique de la perfusion sous-cutanée La voie de perfusion sous-cutanée (hypodermoclyse) était tombée en désuétude dans les années soixante mais connaît actuellement un nouveau regain d intérêt en raison de sa facilité de mise en route et de son innocuité qui en font une méthode privilégiée pour le domicile et pour les patients en phase terminale. La mise en place d une perfusion sous-cutanée nécessite d introduire une aiguille souscutanée ou un microperfuseur à ailette sur les faces latérales du thorax, de l abdomen ou la face latérale des cuisses en évitant les muscles et les veines de voisinage ainsi que les régions oedematiées. L aiguille est fixée par un adhésif transparent permettant de visualiser le point d injection et n est changée que si nécessaire : érythème, œdème par exemple. Les solutés doivent être isotoniques, sérum salé isotonique (Na Cl 0,9 %), sérum glucosé à 2,5 % avec 4,5 g de Na Cl par litre. Le débit de perfusion habituellement admis est de 1 ml/mn mais certains auteurs utilisent des débits plus élevés (25 ml/mn parfois avec plusieurs sites d injection). La tolérance est bonne et les complications rares : cellulite, ecchymose. 5.3.2.2. Les indications de la réhydratation en fonction du stade évolutif clinique et biologique Si le patient est en phase pré-terminale : son espérance de vie attendue est supérieure à huit semaines. L albumine sérique est supérieure à 30 g/l ou s améliore après la mise en place d une stratégie nutritionnelle. L objectif est d améliorer la survie. Privilégier la voie orale, Enrichir l alimentation, Collations hyperprotéinées, Soins de bouche, Corticoïdes ou acétate de mégestrol. Cas particuliers Chez les patients qui présentent une atteinte de la filière digestive haute (cancer ORL ou oesophagien), il faut proposer au patient la mise en place d une alimentation par gastrostomie. Chez les patients qui présentent un syndrome occlusif chronique (par exemple, carcinose péritonéales) ou une malabsorption, il faut proposer une alimentation parentérale stricte. 18

Si le patient est en phase terminale : Son espérance de vie attendue est inférieure à 8 semaines, l intention est d éviter les complications. L albumine sérique est inférieure à 30 g/l. La voie orale reste privilégiée avec les mêmes recommandations que précédemment en accentuant l aspect confort et plaisir plutôt que la quantité calorique. Le recours à l hydratation et la nutrition «artificielle» doit rester exceptionnel, uniquement pour passer un cap, en réévaluant régulièrement le patient et en privilégiant la voie souscutanée. Cas particuliers Les patients bénéficiant déjà d une nutrition parentérale complète ou entérale par gastrostomie verront leur traitement poursuivi mais éventuellement allégé surtout en cas d intolérance. Si le patient est à la phase ultime : les 48 dernières heures. Le dosage de l albumine n est pas nécessaire. Il est inutile de recourir à la biologie pour voir que le processus du mourir est enclenché. L alimentation doit être maintenue par la bouche si le patient le désire en privilégiant le confort et le plaisir. L hydratation et l alimentation artificielle n ont plus ici leur place et sont même déconseillées car elles augmentent l encombrement bronchique et éloignent la famille qui n ose s approcher d un patient avec des «tuyaux». 5.4. Atteintes cutanées 5.4.1. Escarres 5.4.1.1. Définition Les escarres sont des lésions cutanées apparaissant aux points de pression cutanée. Elles sont fréquentes (20 %) à la phase terminale. Elles sont aggravées par la macération. 5.4.1.2. Etiologies Chaque fois qu un patient est maintenu immobile dans son lit, le risque d escarre est à considérer comme aggravé par la dénutrition, l atteinte neurologique et le mauvais état général. 5.4.1.3. Traitement Le traitement préventif est essentiel Il consiste à éviter l hyperpression cutanée installation sur un lit adapté : matelas multialvéolé, matelas à eau, matelas NIMBUS changements réguliers de position positionnement, à l aide de mousses découpées, des articulations fragiles (chevilles par exemple) massages réguliers des zones cutanées à risque avec inspection rigoureuse du tégument à la recherche de signes cutanés pouvant évoluer vers une escarrification (rougeurs, aspect cartonné) éviter la macération maintenir un apport calorique suffisant 19

mobiliser le plus possible les patients (lever au fauteuil, changements de positions, mobilisations passives). Lorsque les patients sont en phase terminale, le traitement des escarres déjà constituées est palliatif car il ne sera plus possible d obtenir une cicatrisation dans la plupart des cas. Les objectifs du traitement seront d éviter au patient les phénomènes douloureux et les odeurs déplaisantes. Les soins seront donc essentiellement des soins de propreté pour diminuer les phénomènes douloureux et infectieux et pour éviter l aggravation de l atteinte cutanée. Il est important lorsque ces soins sont douloureux de penser à une prévention antalgique. 5.4.2. Prurit 5.4.2.1. Définition Le prurit est la sensation cutanée qui donne envie de se gratter. Le prurit peut être très gênant voire pénible lorsqu il est étendu ou intense ; il peut gêner le sommeil et entraîner des lésions de grattage. Physiopathologie Le prurit et la douleur paraissent emprunter les mêmes voies neurologiques. Les médiateurs impliqués sont nombreux : histamine, sels biliaires, prostaglandines E. Les opiacés aggravent le prurit. 5.4.2.2. Etiologies Les étiologies sont nombreuses et éventuellement associées : atteinte cutanée : essentiellement la sécheresse cutanée ; mais aussi toutes les causes dermatologiques de prurit (eczéma, infections) lié aux médicaments mécanismes allergiques (béta-lactamines ) histamino-dépendant (morphiniques.) cholestase hépatique (progestatifs) lié aux maladies systémiques insuffisance rénale, insuffisance hépatique maladie de Hodgkin, syndromes myéloprolifératifs 5.4.2.3. Examen L examen des téguments va rechercher les causes du prurit local. L interrogatoire essaiera d identifier des causes liées aux soins (décapage trop agressif de la peau, produits susceptibles d être allergisants) et aux traitements pris par le patient. 5.4.2.4. Traitement Il faut tout d abord appliquer des mesures générales comme couper les ongles des mains, éviter les bains chauds répétés, les savons agressifs et graisser la peau après la toilette (Cerat frais de Galien, Biafine). Le traitement médicamenteux, s il est nécessaire, utilise les anti-histaminiques comme l hydroxyzine (Atarax ) à la dose de 25 mg En cas de cholestase, on utilisera la cholestyramine (Questran ) L indication d un drainage biliaire pourra être proposé en fonction du stade évolutif du patient. On peut également proposer une corticothérapie. 20