Mémoire de Recherche Appliquée



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Mémoire de Recherche Appliquée Apprenti : oui non Mission : Entreprise : Nom : MOISSET Nicolas Conseiller de recherche : Nathalie Chiss Thème : Relations commerciales Quels sont les outils marketing nécessaires à la mise en place du magasin idéal? Année de réalisation : 2005/2006

SOMMAIRE REMERCIEMENTS.Page 04 INTRODUCTION.Page 05 PARTIE 1 : FONDEMENT THEORIQUE DES ATTENTES CONSOMMATEURS ET DE LEURS REPERCUSSIONS SUR LA DISTRIBUTION..... Page 09 I. Les nouvelles attentes des consommateurs.. Page 09 A. La recherche de valeur... Page 09 1. Authenticité..Page 10 2. Lien Social....Page 11 3. Ethisme.....Page 11 4. Ecologie....Page 12 5. Pédagogie...Page 13 6. Reconnaissance, valorisation, estime du client....page 13 B. La recherche de plaisir........page 14 1. Hédonisme....Page 14 2. Réenchantement...Page 14 3. Emotions et sensations.....page 15 4. Personnalisation....Page 16 II. Réponses des distributeurs aux attentes consommateurs...page 18 A. Spécificités......Page 19 B. Thématisation......Page 20 C. Marketing sensoriel.....page 22 D. Marketing expérientiel........page 26 E. Théâtralisation de l offre.....page 29 F. Marketing éthique.......page 32 PARTIE 2 : ETUDE EMPIRIQUE DE LA SATISFACTION DES CONSOMMATEURS FACE A LA NOUVELLE DISTRIBUTION....Page 34 I. Les hypothèses......page 34 A. Choix des hypothèses de recherche..page 34 2

B. Les hypothèses........page 35 II. La méthodologie.......page 35 A. Choix du type d étude : l étude qualitative..page 36 B. Les études projectives...page 36 C. Les entretiens de groupe...page 36 III. Construction des entretiens.....page 37 A. Organisation logistique.....page 37 B. Structure de l entretien......page 37 1. Etude projective....page 38 a. Le collage.....page 38 b. Les verbes.....page 38 2. L entretien semi directif...page 38 3. Phase d interprétation de l étude projective.page 40 4. Conclusion....Page 40 IV. L analyse de contenu Page 40 PARTIE 3 : ANALYSE DES RESULTATS & IMPLICATIONS MANAGERIALES.Page 42 I. Analyse des résultats.....page 42 A. Analyse du discours......page 42 1. Critique.....Page 43 2. Satisfaction....Page 47 3. Rêve..Page 51 B. Analyse des collages.....page 53 C. Analyse des verbes....page 56 1. Positif...Page 57 2. Négatif...Page 60 II. Implications managériales......page 62 A. Image de la distribution... Page 62 B. Outils des distributeurs préalablement étudiés Page 63 C. Nouveaux outils... Page 68 CONCLUSION..Page 70 3

REMERCIEMENTS Je tiens à remercier tout particulièrement Madame Nathalie Chiss, ma suiveuse, pour son soutien et ses nombreux conseils tout au long de cette période de recherche. Je souhaite également remercier les personnes qui ont accepté de réaliser mes interviews, et tout spécialement Andrée Gaillard et la Famille Godeau pour leur accueil et leur aide précieuse. Je tiens aussi à remercier les différents professionnels que j ai pu rencontrer au démarrage de mon mémoire et qui m ont aidé à construire ma réflexion. Enfin, je tiens à exprimer ma reconnaissance envers ma famille et mes amis pour leur soutien et leurs idées continues. 4

INTRODUCTION La distribution a depuis des siècles évoluée de façon intensive, passant du colporteur savoyard vendant sa production artisanale à la naissance des hypermarchés en 1963. Elle a pris naissance six mille ans avant Jésus Christ, lors de la création des premières villes, due à la sédentarisation des hommes et à la division technique du travail. Les commerçants étaient pour la plupart de simples producteurs vendant une offre très spécialisée. La distribution a par la suite peu évoluée jusqu au 19 éme siècle où est apparue la révolution industrielle et la naissance du Bon Marché à Paris en 1852 par Boucicaut. Par la suite de nombreux formats commerciaux sont nés tels que les magasins populaires, les supermarchés jusqu au concept store ou flagship actuels. Le site Wikipedia la définit comme le secteur qui regroupe des entreprises dont l activité consiste à assurer la distribution physique de biens et de services pour les mettre à la disposition de la population. Elle est aussi un lien entre le producteur et le consommateur ; elle met en relation plusieurs intervenants afin de subvenir aux besoins des clients. La distribution est aujourd hui un des secteurs d activités les plus importants en France, elle touche quotidiennement l ensemble de la population, cependant elle est depuis de nombreuses années en grande mutation. En effet, de la petite épicerie à la naissance de grands centres commerciaux, l évolution de ces quarante dernières années a donné un nouveau visage à cette fonction. Depuis quelques années, nous observons cependant un essoufflement dans le développement des grandes surfaces dû à la saturation du marché et aux nombreuses contraintes législatives telles que la loi Royer en 1973, la loi Balladur en 1993 ou la loi Raffarin en 1996. De plus, l arrivée il y a environ cinq à dix ans du commerce électronique a encore bouleversé ce secteur en pleine ébullition. La distribution est elle-même dirigée par la consommation, elle est le moyen d accès pour la population à la consommation. L évolution de la consommation est donc liée à la distribution. La consommation au sein des pays développés s est aujourd hui largement développée et complexifiée. Nous sommes dans un marché hautement concurrentiel où le souci n est plus de produire mais de vendre. La consommation des ménages est l agrégat central de l analyse économique, elle reste le principal moteur de la croissance économique depuis la fin des années 1970. Conjointement le degré d exigence des consommateurs croit, les attentes des consommateurs sont passées d une démarche quantitative à une démarche beaucoup plus qualitative. Les consommateurs s éloignent du modèle de consommation de masse pour atteindre une consommation immatérielle et symbolique plus personnalisée. Pour reprendre l idée de Kotler (2002) nous sommes passés d un concept de vente avec une forte importance de l outil de production à une ère de concept marketing et des besoins changeant pour le consommateur. Aujourd hui nous pouvons considérer le concept de marketing holistique où le consommateur à des exigences individuelles comme dominant. 5

L évolution de la distribution doit donc prendre en considération les changements du consommateur pour profiter de cette nouvelle consommation. La distribution doit évoluer conjointement à la consommation, l un pouvant influencé l autre. Cette rapide étude nous indique les différents motifs poussant un consommateur à se rendre au sein d un point de vente : Motifs individuels Motifs sociaux Tenir son rôle Se distraire Se faire plaisir Se tenir au courant des nouveautés Faire de l exercice physique Recevoir des stimulations sensorielles Rencontrer des gens en dehors de la maison Avoir des échanges avec des gens qui partagent les mêmes centres d intérêt Retrouver ses pairs Exercer son statut et son autorité Marchander pour le plaisir Source : d après Tauber E. (1972) 1 Faire les courses fait partie du rôle social de la ménagère Le magasin peut être un lieu de promenade S offrir quelque chose à titre de compensation Source d informations Valorisation de l atmosphère du magasin Fonction de «place du marché» Le magasin spécialisé attire des gens partageant les mêmes goûts Le magasin tend à attirer des gens qui se ressemblent Pouvoir du client sur le commerçant Plaisir de faire une bonne affaire Cette étude date de 1972, il est primordial aujourd hui de prendre en compte ces différents motifs en essayant de comprendre ceux qui sont insatisfaits ou peu satisfaits par la distribution actuelle et de savoir si de nouvelles attentes sont apparues. Les motivations des consommateurs doivent être des axes de réflexion aux distributeurs pour élaborer leurs stratégies respectives. Selon l Encyclopédie Vente et distribution d Alain Bloch & Anne Macquin, éditions Economica (2001) les fonctions traditionnelles d un point de vente sont : - L ajustement de l offre et de la demande dans l espace - L ajustement de l offre et de la demande dans le temps - Le conditionnement, - L assortiment, - La fonction financière - La présentation des produits. Les fonctions contemporaines sont quant à elles : - La conception et la partie marketing des produits - Le contrôle de l information - Le développement de concepts de vente 1 La distribution : Organisation et stratégie Editions EMS Marc Filser / Véronique des Garets / Gilles Paché - 2001 6

L évolution de ces fonctions montre de façon précise l importance de l adaptation à mettre en place. Le commerce contemporain doit se réorienter et même anticiper les nouvelles fonctions qu il aura à prendre en considération. Le magasin est devenu au fil du temps un véritable produit, il détient un certain nombre d attributs à l image d un produit. Ces attributs sont à prendre séparément en compte pour avoir une logique cohérente de différenciation. L enseigne commercialisera ensuite son concept aux travers de ses différentes spécificités. Ces nouveaux concepts ne sont plus basés sur une logique uniquement marchande mais sur une logique extrêmement plus complexe intégrant la notion de sens. Cette notion est primordiale pour créer de nouveaux repères aux consommateurs, le commerce n est plus un «preneur de tout, faiseur de rien» comme le définissez Melon dans Essai politique sur le commerce en 1974. L image du commerce et de la distribution a longtemps été négative pour de nombreuses personnes, elle n était ni saine, ni proche du consommateur. Il faut à l heure actuelle inverser la tendance et construire une distribution à l image du nouveau consommateur. Comme nous allons l étudier dans un second temps, le consommateur est devenu de plus en plus complexe et contradictoire. Il a différentes sortes de besoins auquel on ne peut répondre en une seule fois. Pour contrer cela, les distributeurs établissent différentes stratégies pour un point de vente. Ce schéma permet de visualiser les grands axes pouvant être choisis par un distributeur. Sophistication Différenciation Marginalisation Valorisation Élitisme Diversification Focalisation Promotion Braderie Discount Banalisation Standardisation Commerce, une dynamique pour demain Ed. Liaisons 1998 C. Chain et N. Gian Nous allons dans cet essai nous intéresser à la partie supérieure de ce schéma. Nous étudierons en profondeur l aspect sophistication lié principalement au bien être et au qualitatif comparé à la partie standardisation liée à l économie et au quantitatif. Ce contraste est illustré dans le journal La croix du 29 mars 2004, Robert Rochefort Directeur général du Credoc stipule dans l article «Les grandes surfaces et l'avenir du monde» qu il y a aujourd'hui un désenchantement, à l'égard de la "surconsommation" et que l'hypermarché ne fait plus rêver. Les consommateurs convoitent aujourd hui les magasins "à thème" pour la décoration, la nature ou la culture et les hards discount de taille raisonnable avec un assortiment réduit de produits courants pour l'approvisionnement de tous les jours. 7

Nous allons tenter à travers ce mémoire d étudier conjointement les nouvelles attentes des consommateurs et les outils des distributeurs y répondant. L objectif étant ici de savoir si la distribution répond aux aspirations du nouveau consommateur mais aussi de dessiner le commerce idéal de demain Après une revue de la littérature sur les nouvelles attentes des consommateurs et les nouveaux outils des distributeurs nous étudierons ces aspects en profondeur dans une étude qualitative où nous serons à l écoute des consommateurs. Suite à cette démarche nous pourrons dresser un portrait de la distribution actuelle pour ensuite nous projeter à demain 8

PARTIE 1 : FONDEMENT THEORIQUE DES ATTENTES CONSOMMATEURS ET DE LEURS REPERCUSSIONS SUR LA DISTRIBUTION I. Les nouvelles attentes des consommateurs 2 A l étude de la pyramide des besoins de Maslow, nous pouvons nous rendre compte succinctement que les besoins physiologiques et de sécurité sont aujourd hui assurés pour la majorité de la population française. Par conséquent, les distributeurs doivent se concentrer à satisfaire les besoins sociaux, d estime et d accomplissement. Ces besoins correspondent à des nouvelles attentes se transformant elles mêmes en nouvelles tendances de consommation. Le consommateur a beaucoup évolué ; aujourd hui nous sommes dans une phase de séduction de consommateur, il faut désormais aller à sa rencontre, il a perdu sa naïveté et les distributeurs doivent faire leurs preuves pour le satisfaire. Il détient une double dimension rationnelle - émotionnelle et devient expert tout en gagnant en maturité et en diversité. Le marketing a pour but d être le lien privilégié entre les différents intervenants afin de créer une réelle cohésion, mais les comportements multiples, complexes et opaques, sont difficiles à étudier. Pour cela, il faut comprendre, évoluer, échanger, se renouveler, apprécier La consommation est un sujet complexe faisant référence à la psychologie, à la sociologie, à l économie mais aussi à l histoire ou la démographie. Elle est souvent un miroir de notre société complexe et passionnante. Notre société est en perte globale de repères et trouve sa force dans une forte diversité, une vision hétéroclite qui apporte une nouvelle dynamique, une ouverture, la mise en lumière de certaines valeurs et une forte recherche du plaisir. A. La recherche de Valeurs Rieunier et Volle (2002) décrivent la valeur comme «la traduction comportementale d une valeur personnelle ou sociale, instrumentale ou terminale, révélée au travers des consommations de multiples individus pour une période et une société données». Filser (2002) démontre que l expérience de consommation entraîne la recherche d informations et de connaissances. La consommation ne se limite pas à l acte d achat mais va plus loin car elle est source de valeurs. 3 2 «Les mutations du consommateur français, comment s y adapter» Ed EMS Franck et Walther Oettgen 2004 «Le rapport Popcorn»Comment vivrons nous l an 2000. Ed de l homme Faith Popcorn 1994 3 Risque et performance : L impact de la théâtralisation des enseignes sur l attitude des consommateurs vis à vis de celles-ci - ESC Amiens 2004 Boucher Béatrice 9

1. Authenticité 4 Véronique et Bernard Cova dans Décisions marketing d octobre 2002 5 déclarent que le consommateur est à la recherche de sens qui comble le vide dû à la chute des grandes utopies. Ils mettent en évidence 6 mondes authentiques : «le monde d origine archéologique» : lien par rapport à une époque «Enseigne Comptoir de Famille» «Le monde d origine inspirée» : lien avec un fondateur «Loué» «Le monde d origine spatiologique» : lien par rapport au lieu «Mozzarella-Italie» «le monde d origine ritualisée» : lien avec une culture, une corporation Heineken «culture de la bière» «le monde d origine naturelle» : lien avec l esprit nature «produits bio» «le monde d origine technique et technologique» : lien avec un savoir faire «Ikea» Les consommateurs sont à la recherche d authenticité, de «vraie vie», cela se traduit par des expériences quotidiennes dans la redécouverte du local et de l imaginaire (terroir, tradition, légendes, tribus). Les marchés reprennent de l ampleur car ils sont authentiques, vrais, naturels ; on peut y trouver des produits artisanaux, du terroir, biologiques simples et nostalgiques. Ce sont des produits «fait main», imparfaits mais emplis d âme, ils ne sont pas superficiels. L authenticité implique donc une histoire, un lieu, des hommes et un savoir faire. Prenons pour exemple la publicité pour l eau gazeuse Quézac reprenant les clés du succès d un produit authentique, elle fait référence aux racines, au retour en arrière. Le passé est une force qui nous permettra d avancer en donnant un sens à nos actes. Nous cherchons dans notre mémoire la sécurité des choses vécues et apprises, d une époque où la vie n était peut-être pas mieux, mais plus définie et moins instable et où le futur pouvait être davantage prévisible. Le futur et le progrès technique ne sont plus perçus comme «des éléments de bien être, mais à l inverse, comme des facteurs de risques» soulignent Franck et Walther Oettgen dans leur ouvrage (2004). Nous avons besoin de nous rassurer, de nous concentrer sur des choses simples, oubliées depuis quelques années : la nature, le corps La simplicité déstresse face à la société de consommation : le luxe est désormais l espace, le temps et la sérénité. Le but est ici d acheter moins mais mieux, privilégier la qualité sur la quantité. Cette authenticité est aussi un moyen de construire sa personnalité, sa culture, de se construire sa propre histoire en tant que citoyen du monde. La nostalgie se rapproche de cette notion, le passé est une base stable et sûre, on peut difficilement le changer et il nous sécurise. Le consommateur est à la recherche de ses racines et de son identité, avec l émergence de la mondialisation, de l urbanisation et de la modernisation en général. 4 La distribution : Stratégies des groupes et marketing des enseignes Pearson Education Jacques Dioux Marc Dupuis 2005 5 Les particules expérientielles de la quête d authenticité du consommateur Décisions Marketing n 28 Oct-Dec 2002 Véronique et Bernard Cova 10

L émergence du rétro marketing démontre cette attente, les industriels ressortent les anciens packagings emplis de charme et donnant une profondeur au produit, on peut aussi voir apparaître de nouveaux produits «anciens» avec des packagings bruts : «Comptoir de famille» ou «L occitane en Provence». L authenticité fait appel aux sentiments et à l émotion. Nous pouvons illustrer ce constat par l émergence des livres de cuisine de recettes traditionnelles, campagnardes ou d autrefois mettant en scène des produits simples, sains et artisanaux. Le même phénomène est visible également en matière de décoration intérieure avec les styles campagnards ou régionaux. 2. Lien Social Dans la société actuelle, où l individualisme est de rigueur, il est souvent difficile de rencontrer des gens, de faire des connaissances. Pour contrer cela, le chaland cherche à développer des liens sociaux lors de ses achats. Le lien social selon le site wikipedia est «l ensemble des appartenances, des affiliations, des relations qui unissent les individus ou les groupes sociaux entre eux et qui les amènent à se sentir membres d'un même groupe, fût-ce par «métissage»». Le lien social permet une qualité de vie au delà des niveaux de richesse. Notre société actuelle permet difficilement d établir un lien fort et de développer le bonheur d être ensemble. La solitude est l un des maux les plus présents dans notre société, l incompréhension et le sentiment de non reconnaissance sont les cris de détresse communiqués fréquemment par nos médias. La canicule de l été 2003 est la preuve de cette solitude subie par des personnes n ayant pas de relations réelles et authentiques. Les gens cherchent donc que ce soit par le biais d association, et d internet à recréer un cercle de relations. L interaction avec d autres personnes peut aussi se produire au sein des points de vente, et être source d enrichissement. Les magasins peuvent être un lieu de rencontre pour les «tribus» où même être à la base de la naissance de ces entités. Ces tribus ne sont plus basées sur une même classe sociale mais sur des centres d intérêts communs et une mentalité partagée. Se rendre dans un point de vente permet donc de s ouvrir aux autres, d accepter les différences et donne un côté solidaire face à la solitude grandissante de notre société et aux moyens matériels de communication que sont Internet et le téléphone portable. Les commerçants de quartier retrouvent un regain d intérêt : ces commerces permettent de discuter avec le vendeur et de construire une relation amicale. Ils ne sont donc plus une simple ressource mais un véritable contact qui rassure, qui nous reconnaît et qui apporte sécurité et confort. Les clubs de consommateurs ou les programmes de fidélité sont aussi des moyens d apporter une attention aux clients et donc de le privilégier. 3. Ethisme Il s agit d une des tendances lourdes depuis quelques années, l éthique concerne les principes moraux et la conduite. Nous voyons apparaître un retour à la morale qui passe par tous les domaines d activités, de la consommation à la politique. Ce réveil des consciences est 11

récent, il s agit de la responsabilité individuelle envers soi même mais aussi envers les autres. L éthique est une vision à long terme, pour l amélioration de la société et du monde de demain. Ce mouvement fait face à la globalisation mais aussi à toutes les avancées scientifiques qui effraient en fondant des valeurs universelles. Les consommateurs ont compris que la construction d un monde meilleur passait par une contribution de chaque individu. Il s agit pour cela d acheter des produits équitables, de boycotter les entreprises ne respectant pas les conditions de travail adéquates en France ou à l étranger, ou de s engager auprès d associations humanitaires Les produits achetés doivent être de qualité mais doivent aussi avoir une éthique, une valeur saine, il s agit ici de l image de l entreprise contenue dans le produit. Les industriels et distributeurs doivent appliquer un code de bonne conduite, ils ont des droits et des devoirs pour mériter le respect des consommateurs et donc pour vendre leurs produits. Le consommateur n est plus dupe des principes commerciaux, il est averti des supercheries et des pratiques d entreprises, il demande donc une plus grande transparence des pratiques. Il cherche à connaître l histoire de l entreprise et du produit et les valeurs qu elle communique. Il préfère acheter moins mais mieux. Fin 2000, 73,5% des français se déclaraient prêts à payer plus cher un produit qui soutiendrait le commerce équitable selon une étude CREDOC 6. Faith Popcorn souligne quant à elle que «les consommateurs exigeront et rechercheront des produits non seulement efficaces mais générant par ailleurs des profits acceptables». Le marketing doit s axer sur une cause précise, l achat devient de plus en plus une prise de position. L écologie et l éducation sont avec l éthique les trois secteurs cruciaux à prendre en considération par une entreprise futuriste. 4. Ecologie «L'écologisme est un courant de pensée (certains disent une philosophie) inspirée de la science de l'écologie, qui tend au respect des équilibres naturels. L'écologisme correspond au développement d'un souhait du citoyen de retour à la nature et au naturel. Il est essentiellement issu d'une demande sociale et de la protestation contre des techniques non évaluées expérimentalement». (Wikipedia). Les consommateurs ont aujourd hui conscience des problèmes écologiques, ils essaient de trier leurs déchets, d acheter des produits avec peu d emballage ou de l emballage recyclé. Ils sont aussi sensibles à toutes les actions où les programmes de prévention de la nature réalisés par les industriels ou les distributeurs. Une étude CREDOC 7 en 1996 prouvait que 89,2% des français étaient sensibles aux problèmes d environnement et que 54% étaient prêts à payer 10% plus chers des produits préservant l environnement. Une autre étude CREDOC 8 montrait que 60% des personnes interrogées, considéraient les garanties écologiques d un produit comme une motivation d achat Le consommateur se rapproche de la nature, d où l émergence des activités de jardinage et du tourisme vert. Le consommateur de demain recherche une certaine pureté et simplicité issues de la nature. La nature repose et rassure le consommateur, elle lui apporte la sérénité et la spiritualité dans un monde complexe. Il ne suffit cependant pas d avoir un lien à court terme 6 CREDOC, Enquête consommation, fin 2000 7 Enquête CREDOC Conditions de vie et aspirations des français, 1996 Sensibilité au problème d environnement 8 Rapport du CREDOC n 170 avril 2002 «La consommation en 2002. Quelles modifications des comportements après le ralentissement économique, les attentats du 11 septembre et l arrivée de l Euro» 12

avec celle-ci, mais d établir un engagement à long terme afin que nous la respections et que nous prenions conscience de sa dégradation. Cette notion est à rapprocher de la notion de simplicité, de retour aux sources et de qualité. 5. Pédagogie La pédagogie est la science de l éducation, elle fait référence à l acquisition de connaissances par l enfant afin de le conduire, le mener à l age adulte. Elle est la transmission d un savoir quelconque. La population actuelle est de plus en plus curieuse, et souhaite apprendre tout au long de sa vie, elle est aussi de plus en plus craintive par rapport à la consommation, elle souhaite être informée des méthodes de fabrication, des moyens d utilisation Les consommateurs sont aujourd hui ouverts sur le monde extérieur, sur l international, ils sont donc curieux de connaître de nouveaux modes de vie, nouveaux produits ainsi que des cultures différentes Nous pouvons par exemple mentionner le nombre accru d informations sur les packagings de produits de grande consommation, ou la présence de sites internet expliquant la fabrication et l histoire des marques. Cette information est source de transparence et de qualité pour le consommateur. La consommation doit servir à apprendre, à s éduquer, elle a un rôle pédagogique. Nous sommes une nouvelle fois dans l apport de valeurs au sein de l acte d achat. 6. Reconnaissance, valorisation, estime du client Au sein de notre société mouvementée par la précarité et l incertitude affective, chaque individu est à la recherche de son identité par différents moyens. Le culte de soi s explique par la place de l individu dans notre monde social. Se connaître, s affirmer sans tricher, de façon égoïste est devenu chose courante. De nombreux livres et articles ont été publiés ces dernières années concernant l identité que ce soit au travail, au niveau national ou religieux. Le but suprême de cette recherche de soi est d être maître de sa vie, de dérouler son développement personnel de façon précise pour atteindre son bonheur. Le consommateur prend l entière responsabilité de ses décisions, afin d affirmer et d exploiter son potentiel. L individu doit apprendre à acquérir une confiance en lui dans un monde où le doute est souvent présent. Les distributeurs doivent prendre cet aspect en considération de façon précise, le client devient de plus en plus exigeant et souhaite être respecté. Il recherche une certaine valorisation, une estime, et est conscient d avoir une place de choix face aux distributeurs. Si l un d eux n apporte pas de reconnaissance à ses clients, si le relationnel est inexistant, le magasin ne pourra survivre. Le client a besoin d être rassuré dans cette époque angoissante, il a besoin d attention, d amour. Le chaland attend de moins en moins de l église ou de la famille, il attend de nouveaux repères, il a besoin d être guidé, de trouver des réponses à ses questions. La croissance du marché de l astrologie illustre cette tendance, où l homme a besoin de repère, de reconnaissance et d estime. 13

B. La recherche de plaisir 1. Hédonisme L'hédonisme provient du grec hèdus qui signifie quelque chose d agréable, de plaisant. «L hédonisme est une doctrine philosophique qui fait du plaisir le but de l'existence». (wikipedia). Selon l étude Credoc de Juin 2000 (A nouveaux consommateurs, nouvelles stratégies industrielles), 29,3% des français consommaient par nécessité et 11,3 % aussi par plaisir en 1993. En 1999, ils étaient 26,1% à consommer par nécessité alors que 18,8% le faisaient par plaisir. Ces chiffres prouvent le changement visible dans la consommation des ménages sur cet aspect. Consommer par plaisir permet d oublier les soucis quotidiens dans la pratique d une tâche nécessaire. L acte d achat est un moyen notamment pour les femmes de se remonter le moral, d oublier et de s épanouir. Le consommateur est aussi prêt aujourd hui à payer dans le seul but de se faire plaisir et non plus de répondre à des besoins physiologiques ou de sécurité. Le seul objectif est de prendre soin de soi d où l émergence des massages, des centres de bronzage La fréquentation de ce type d établissement est faîte dans l unique recherche de plaisir et de se sentir bien. Faith Popcorn souligne sous le terme «petites gâteries» le fait d effectuer un achat pour un bonheur temporaire, se faire plaisir par une récompense matérielle. En effet, une importante partie du plaisir d achat se trouve dans l acte d acquisition d un produit : visite du magasin, naissance du désir, hésitation, mots du vendeur Ces petits plaisirs peuvent être considérés comme des petits luxes. On se fait plaisir en achetant quelque chose de qualité, pas avec des produits bon marché. Les grandes marques de luxe mettent en vente des petits produits tels que des portes clefs, des sacs vendus moins cher mais qui pourront être achetés par une population plus large. Ces acheteurs n ont souvent pas les moyens d acheter une grosse pièce mais par ce petit achat atteignent la notion d élite et de luxe. Ce processus d achat est par conséquent souvent très long et source de plaisir. 2. Réenchantement 9 Le réenchantement est une tendance lourde, il est là pour lutter contre la monotonie de la vie et l importante rationalisation de la société moderne : «la cage de fer de la rationalité». Les consommateurs actuels veulent rêver, être surpris, séduits. Ils veulent revivre leur enfance, s évader de la rigueur du monde professionnel, oublier les soucis, le stress et la peur. Les individus veulent aujourd hui profiter de la vie et découvrir quotidiennement de nouvelles choses pour s émerveiller. Ils ont envie de retrouver l insouciance de leur jeunesse, de se souvenir des jours où tout était facile, des doux moments de bonheur. Nous voulons à nouveau regarder la vie avec les yeux d'un enfant, prendre plaisir dans les choses simples, le cœur léger, gai, plein de vie. «Carpe diem» signifiant vivre au jour le jour est le symbole de cette nouvelle génération. 9 La distribution : Organisation et stratégie Editions EMS Marc Filser / Véronique des Garets / Gilles Paché 2001 14

Les magasins Disney store sont envahis par les trentenaires que les soirées «Bécassine» passionnent. Prendre la vie du bon côté et ne pas être blasé par notre environnement, s émerveiller à chaque pas et bien sûr à chaque achat. La légèreté, l enthousiasme, la spontanéité et l humour rendent la vie plus «fun», que ce soit au travail ou le reste du temps. Les individus ne cachent plus leur sensibilité d enfant et prennent plaisir à l exploiter. 3. Emotions & Sensations Le site wikipedia nomme l émotion comme «l'expérience psychologique 1. subjective et interne, 2. par un individu ou un groupe, 3. de réactions biologiques objectives (adrénaline...) 4. survenant en réponse à certaines situations 5. en opposition ou non avec un souhait conscient. Elle se traduit en général à son tour par une réponse qui peut être affective (tristesse, colère, joie...), physiologique (changements dans le fonctionnement corporel interne, autres bien entendu que ceux faisant partie des causes de l'émotion), cognitive (interprétation de la situation - voir lavage de cerveau) comportementale.» Platon considérait l émotion comme un trouble de l état habituel du sujet, aujourd hui la psychologie la considère comme quelque chose de nécessaire et même bénéfique. Le consommateur actuel est à la recherche d émotions et de sensations : lorsqu il fait du shopping, il est souvent à la recherche du produit coup de cœur qu il n a pas prévu d acheter mais qui lui fournira une dose suffisante d émotions pour se laisser tenter. Nous pouvons remarquer facilement l importance de la musique dans notre société actuelle avec la success story de l I-pod. La musique provoque une énergie, une sensation, un sentiment, une émotion recherchés par le consommateur. Cette recherche de sens ne se limite pas à l ouie mais aussi à l odorat avec l émergence de nombreux nouveaux parfums emplis d exotisme et de rêve, au toucher et à la vue avec le design et l ergonomie sans oublier la recherche de goût illustrée par les nouvelles pratiques de fooding, les mélanges salés sucrés ou les mix des cuisines du monde. Le consommateur a une de l extrême, il supporte de moins en moins la routine. Son confort étant grandissant, il souhaite faire face de plus en plus à des sensations fortes le déstabilisant. Le consommateur actuel a des rêves et des limites qu il veut atteindre, il veut vivre à «200 à l heure» pour profiter du temps qui lui reste. Il est à la recherche de stimuli, d'aventures mais de façon maîtrisée, sécurisée. «L accro branche» a permis à beaucoup de personnes de monter aux arbres, d escalader, de sauter en étant dans des conditions de sécurité optimales. L objectif est donc de vivre une sensation forte sans prendre pour autant d importants risques. 15

Partir en vacances dans des pays lointains est une démarche sûre et facile, les organismes se chargent de votre confort et de votre sécurité. Faire un safari en Afrique donne un goût d aventure et nous transpose dans la peau d Indiana Jones. Les plaisirs exotiques nous permettent une fuite dépaysante, ils passent par l alimentation (cuisine japonaise à brésilienne), la décoration (styles cubains à japonais), l habillement (des tongs aux ponchos) Ces produits sûrs et familiers nous apportent la dose de sensationnel qui pimente notre vie et lui permet d être différente. Cet aspect apparaît dans la lutte face au rationalisme ennuyeux qui devient de plus en plus oppressant. La recherche de sensations et d émotions peut être liée à la recherche de lien social, nous cherchons à partager à plusieurs des moments intenses mais ce partage n est possible qu en groupe. «Faire la fête» n est plus exclusivement réservé à la jeune génération et tout le monde cherche à s amuser par différents moyens (Costumes, Thèmes) ou pour différentes occasions (Halloween, St Patrick ). Le temps consacré aux loisirs ne cesse d augmenter et répond à ces nouveaux besoins de découvertes de soi et du monde. Un consommateur sera séduit par un produit qui lui rappellera son enfance et qui lui donnera une émotion nostalgique, il sera séduit par un produit inutile mais qui le fait sourire d où le succès toujours grandissant des gadgets. 4. Personnalisation La personnalisation est une adaptation effectuée sur un produit (ou un service) par rapport à l usager ou le consommateur. La personnalisation est présente de façon intensive par les industriels de l objet promotionnel mais s étend depuis quelques années à un plus large public. Tout individu cherche à être différent de son voisin et par une consommation personnalisée afin d avoir un rôle actif en tant que consommateur en élaborant son schéma de consommation. Comme le montre l étude du Credoc 10, «le catalogue 1999 Nouvelles Frontières illustre bien cette nouvelle façon d'appréhender le consommateur : «vous êtes unique» dit le slogan, «nous avons réuni dans cette brochure toutes les possibilités [ ] pour construire votre voyage. Le voyage qui vous ressemble» Il y a une recherche de réalisation de soi et d épanouissement personnel : «Faites équipe avec Lapeyre» le consommateur fait à sa façon, une sorte de sur mesure, la consommation est un moyen de construire sa personnalité. Une personnalité est une œuvre différente et originale qui demande une attention très particulière. Cette tendance s illustre aussi par l émergence de magazines ayant des cibles très restreintes, ceux-ci sont basés sur des styles de vie, des habitudes similaires. Le célèbre adage «je suis ce que je consomme» s adapte de plus en plus dans la société actuelle. Cependant ce n est pas au consommateur à s adapter mais au distributeur à correspondre le plus possible à sa cible. Le client doit être aujourd hui placé au début du processus de fabrication et non à la fin comme auparavant. Lorsque la Ford T est sortie des usines, tous les exemplaires étaient uniformes ce qui était synonyme d excellence et de modernité. Aujourd hui cette tendance est largement inversée, l uniformité reflète le bon marché et la grossièreté. Le consommateur a besoin d éveiller sa créativité dans un monde monotone, où l on a besoin de faire confiance à son imagination pour contrer l aspect lisse de l ère technologique. La différence devient une force, une preuve de caractère, une certaine originalité sortant de 10 Etude prospective des grandes tendances de la consommation Credoc, Département "Dynamique des marchés" Juin 2000 16

l ordinaire. Cette dimension émergente permet d apporter un peu de «fun» dans notre vie en créant son style en étant moins influencé par une logique de classe sociale ou de pression familiale. Etre différent des autres soulage et conduit à sa construction identitaire. Afin de satisfaire le client, les distributeurs doivent donc diversifier l offre pour que chacun d entre nous puisse trouver l objet qui lui correspond. Il est rare qu une personne s habille uniquement d une seule et unique marque, elle cherchera un pantalon de marque X puis cherchera un tee-shirt de marque Y et des chaussures de marque Z : cette combinaison lui sera propre et constituera son style. Cependant une offre large des distributeurs ne suffit pas, il faut aussi que le produit puisse s adapter réellement au consommateur, ou être créé par lui-même. On peut ici parler de customisation. Il s agit de personnaliser de façon précise le produit, en faisant du «sur mesure» selon les goûts propres à chacun. Les couturiers utilisent la personnalisation depuis longtemps comme de nombreux artisans qui créent des pièces uniques. Cette tendance est désormais reprise par les industriels qui ont pris conscience que les produits de masse ne correspondent plus aux nouvelles attentes. Faith Popcorn souligne très justement dans son rapport que tous les meubles de cuisine sont à la même hauteur alors que les consommateurs ont tous des tailles différentes. La technologie est aujourd hui suffisamment au point pour permettre une adaptation individuelle. Le nouveau consommateur sera donc producteur de son achat, il aura un rôle actif dans sa consommation afin que le produit acheté lui corresponde. Pour conclure, nous pouvons croiser cette étude des tendances en retenant les quatre grandes dimensions soulignées par Walther et Franck Oettgen (2004), qui sont selon eux les nouveaux moteurs comportementaux. «La dimension réaliste» : Le consommateur devient exigeant et souhaite une grande transparence ainsi qu une forte autonomie par rapport à la fréquentation des points de ventes et à ses choix afin de profiter de la meilleure offre au moment et à l endroit voulu. «La dimension hédoniste» : Le consommateur met le plaisir au centre de ses préoccupations. L observateur Cetelem 2003 révèle que 61% des personnes interrogées ont mis en corrélation le fait de consommer et le fait de se faire plaisir de temps en temps. La recherche de sens et de nature sont des outils à cette recherche hédonique comme le sont également plus explicitement la recherche du jeu et de la distraction. «La dimension fusionnelle» : Le consommateur a besoin de s entourer, de partager mais aussi de découvrir, de voyager pour ne pas s enfermer dans une bulle, mais vivre plusieurs vies, plusieurs connections afin de fuir la réalité et rester indépendant. «La dimension responsable» : Le consommateur devient peu à peu éthique, engagé, citoyen et prend conscience de son rôle pour demain dans les domaines environnementaux, sociaux et commerciaux. 17

Si l on prend en compte l ensemble des ces tendances dominantes on peut rapidement se rendre compte que le concept de supermarché n est plus réellement adapté au consommateur. La grande distribution ne fait plus rêver mais reste un outil pratique et efficace pour faire ses achats. Un supermarché est un endroit «agressif» où le bruit, l éclairage, la foule ne permettent pas la sérénité et le rêve du consommateur. Il ne vit pas une aventure fantastique au sein de ce type de surface, il a besoin de plus de sensualité, de magie. Ce concept est basé sur l uniformité, une consommation peu différenciée où la notion de personne est peu prise en compte. Les supermarchés sont limités en informations pour les clients et donc ne parviennent pas à les rassurer. Pour ces raisons nous nous intéresserons peu à la grande distribution mais plus majoritairement à une nouvelle forme de commerce prenant en compte les nouvelles attentes étudiées. Cependant, il est important de noter à nouveau que le consommateur actuel est contradictoire et qu il a des besoins différents selon les moments de la journée où selon certaines situations. Nous n avons par exemple pas pris en compte la notion d urgence, de manque de temps. Ce choix est volontaire car nous sommes dans une logique d idéal, d un commerce où le consommateur est ouvert et a une attitude sereine. Les notions d efficiences, de temps ou monétaires ne seront donc pas prises en considération. II. Réponses des distributeurs aux attentes consommateurs Un distributeur a trois fonctions principales, une fonction de transaction qui consiste à vendre un produit au client, une fonction relationnelle qui consiste à mettre en place un échange avec ce client : un lien social, et enfin la dernière fonction est celle de réenchantement qui illustre la satisfaction du client. A la lecture des attentes consommateurs nous pouvons en déduire qu aujourd hui ces trois fonctions sont indispensables et indissociables à la satisfaction du client. La fonction transactionnelle est souvent satisfaite, la fonction relationnelle doit être améliorée tandis que la fonction réenchantement est à étudier de façon plus précise. Les aspects à prendre en compte aujourd hui sont l échange pour renforcer le confort d achat, l information par une certaine transparence et l aspect social par la création d événements ou d animations. Un bon produit au bon prix n est plus suffisant, le client doit développer un état affectif positif permettant la fidélisation du consommateur. Marc Filser constate que «La consommation du lieu de vente devient plus importante que les produits qui y sont proposés». La consommation n est pas uniquement un destructeur de biens mais également un producteur de sens (Filser 2002). Les travaux les plus récents considèrent la fréquentation des magasins en tant que comportement autonome, et non uniquement motivée par la recherche d un produit ou d un service (Filser 1996). Nous sommes passés d une parcellisation des moments de vie à une vision plus globale de la vie : achat = loisir = spiritualité = culture. L objectif pour un distributeur est de faire rentrer les clients au sein de la boutique. L objectif pour le consommateur dans un point de vente est de s évader du quotidien, de perdre ses repères spatio-temporels. Le but est ici de créer une valeur intrinsèque au magasin, lui donner une dose d affectif, une personnalité. 18

Pour cela le créateur doit avoir un concept, celui si se définit par Jacques Dioux et Marc Dupuis (2005) par une «Combinaison d éléments matériels et immatériels détenus par l enseigne qui concourent à apporter au consommateur des solutions à la fois globales et spécifiques en termes de commercialisation de biens et de services.» La personnalité de l enseigne provient tout d abord du fondateur lui-même mais aussi de l idée de base qu il a voulu explorer. Natures et Découvertes a pour objectif de rassembler l univers de la découverte et celui de la nature dans un même lieu et dans une ambiance adéquate. Mais l idée provient aussi de sa vision du métier qui est la «capacité à redécouper le marché et apporter des réponses inédites à des segments ou univers à des besoins actuels ou virtuels, mais également par rapport à des valeurs qui transcendent souvent le rôle du distributeur au sens strict et des valeurs de l enseigne proche des tendances de consommation (respect de la nature, éthique ). 11 Ces nouveaux espaces de vente commencent à apparaître ; certains ont du mal à se développer dû au fait qu ils engendrent des frais importants par rapport aux ventes effectuées, d autres comme Natures & Découvertes réussissent quant à eux à réaliser un chiffre d affaires de 130,2 millions d euros et une croissance en 5 ans de 40%. A. Spécificités Face aux surfaces de vente des hypermarchés, les consommateurs recherchent pour leurs achats non alimentaires des surfaces de vente intimistes n étant pas des «machines à vendre». Les petites surfaces ont plus d âme et facilitent les échanges. Cependant afin que le consommateur ne se sente pas trop oppressé celui-ci ne doit pas être trop petit, nous pouvons considérer comme taille adéquate une taille comprise entre 50 et 300m². Concernant la localisation nous pouvons remarquer que de plus en plus de centres commerciaux naissent dans des lieux historiques tels que Bercy Village le plus grand marché de vins et spiritueux du monde après 1880. Les français aiment effectuer leur shopping au sein des centres villes historiques, lieux conviviaux, vivants, esthétiques et authentiques. Les clients fréquentent ce type de magasin pour flâner et réaliser des achats d impulsion. Cette démarche est différente d autres surfaces de vente où le client se déplacera pour un produit particulier. Certains des nouveaux concepts de magasin se situent au sein des centres commerciaux, ceux ci sont aussi en pleine restructuration et cherchent à ressembler aux centres villes historiques avec des places, des cafés à l image du centre commercial Val d Europe. 11 La distribution : Organisation et stratégie Editions EMS Marc Filser/Véronique des Garets / Gilles Paché 2001 Distribution, Acteurs et Stratégies Economica Marc BENOUN et Marie-Louise HELIES HASSID - 1995 Le Magasin Amiral De l atmosphère du point de vente à la stratégie relationnelle de l enseigne Décisions Marketing N 24 Sept Dec 2001 Marc Filser Marketing expérientiel et performances des enseignes de distribution Revue Française du marketing n 198 Juillet 2004 Marc Dupuis / Dominique Le Jean Savreux La distribution : Stratégies des groupes et marketing des enseignes Pearson Education Jacques Dioux Marc Dupuis 2005 19

Concernant la politique de prix, la quasi totalité de la population prend en compte ce facteur dans sa consommation, cependant ces nouveaux concepts ne cherchent pas à se différencier par cette variable. Les prix y sont donc moyens, parfois plus élevés du fait des charges supplémentaires qu il supportent. Mais le consommateur est prêt à payer plus cher un produit dans un contexte particulier. B. Thèmatisation 12 Comme nous l avons étudié précédemment, le concept du «tout sur le même toit» ne correspond plus aux nouvelles attentes du consommateur. Le consommateur souhaite actuellement des magasins personnalisés, qui lui correspondent ainsi qu une plus grande diversité. La distribution s est donc diversifiée et a appliqué le principe de thématisation. Le but est d éclater les familles de produits pour mettre en place une logique transversale composée de différentes familles de produits. Il s agit de faire une segmentation de l offre par rapport à différentes variables : - Une cible : des magasins peuvent proposer une offre en adéquation avec des besoins d une tranche d âge précise et souvent d un sexe donné. Nous pouvons ici citer l exemple de Jennyfer ou Pimkie qui ont pour cible les jeunes adolescentes. Colette a également une cible Bobos dictant son offre (CD, cosmétiques, vêtements ) - Une valeur : Le magasin Nature & Découvertes est le premier exemple de ce type de magasin, la valeur est ici le respect de la nature, Résonances quant à lui est basé sur le bien être, Human inside sur l Ethique et l exotisme Pour ce type de magasin les clients partagent tous la ou les même(s) valeur(s), le même engagement. La thématisation autour de valeur permet à l enseigne de se baser sur des valeurs non marchandes, de donner au consommateur un sens à sa consommation. Les produits présents en magasin sont transversaux et ne sont pas d une seule catégorie. On peut souvent y trouver de la décoration, de l habillement, des livres en lien avec cette valeur. - Un loisir : la Fnac ou Décathlon font référence à la culture ou au sport et ont un assortiment très large. Cependant des spécialistes se sont crées tels que Andaska pour les sports Outdoor ou «Album» pour les amateurs de bande dessinée. - Une communauté : il existe aujourd hui des tribus qui ont des besoins homogènes, des magasins ont vu naissance pour répondre à ce type de besoins, tels que les magasins 12 Le marketing sensoriel du point de vente «Créer et gérer l ambiance des lieux commerciaux» Editions Dunod Sophie Rieunier 2004 La distribution : Organisation et stratégie Editions EMS Marc Filser / Véronique des Garets / Gilles Paché 2001 Distribution, Acteurs et Stratégies Economica Marc BENOUN et Marie-Louise HELIES HASSID 1995 Mettre en scène pour vendre Management février 2001 p64 Anne Claret Tournier Documents fourni par Nature et Découvertes Carine Evano Negroni Rédactrice Marketing La distribution : Stratégies des groupes et marketing des enseignes Pearson Education Jacques Dioux Marc Dupuis 2005 20