Analyse de la gestion des ordures ménagères par les collectivités. UFC-Que Choisir



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Analyse de la gestion des ordures ménagères par les collectivités UFC-Que Choisir 1

Résumé La question de la maîtrise de la production des déchets ménagers et de la gestion de leur élimination est au cœur des enjeux consuméristes et environnementaux ce qui en fait une des priorités de l UFC-Que Choisir. En vertu du principe pollueur-payeur, l association s est, par le passé, prononcée en faveur d une politique de réduction à la source des déchets, orientée vers les fabricants de produits manufacturés dans le cadre de la responsabilité élargie du producteur et pour une tarification du service d enlèvement des déchets en fonction de l usage du service comme, aujourd hui, seule la redevance incitative le permet. Néanmoins, constatant que 89% de la population est assujettie à la TEOM, la taxe d enlèvement des ordures ménagères, et notant que son montant a quadruplé en moins de 20 ans, l UFC-Que Choisir s est livrée à une analyse des budgets de gestion des déchets par les collectivités et établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) ayant recours à financement du service par la TEOM. A l heure du paiement de cette taxe conjointement à la taxe foncière 1, l association a donc souhaité examiner la justification économique de l envolée des niveaux de TEOM et ainsi prolonger l étude de la Cour qui a épinglé récemment la gestion des déchets. L UFC-Que Choisir a réalisé un audit des politiques locales d élimination des déchets ménagers auprès d un échantillon représentatif de collectivités ou EPCI ayant conservé la compétence déchets et couvrant une population totale de 15,8 millions d individus. Les analyses sont basées sur les rapports sur le coût et la qualité du service d enlèvement des déchets que les EPCI ont l obligation de mettre à la disposition du public. Les résultats de l étude de l UFC-Que Choisir montrent tout d abord le manque de transparence financière des politiques locales. Dans 20% des collectivités, l association n a pu obtenir aucun élément. En outre, les rapports que l UFC-Que Choisir s est procuré, à défaut d être normalisés, apparaissent peu opérationnels pour une analyse comparée. Au-delà, l analyse des données financières démontre la très grande disparité des coûts de gestion des déchets d une collectivité à l autre. Ainsi, si 29% des collectivités affichent des coûts inférieurs à 80 euros par habitant, dans 18% d entre elles les coûts dépassent 121 euros par habitant. Or, les analyses de l UFC-Que Choisir apportent la démonstration d une maîtrise insuffisante des budgets de gestion des déchets dans certaines collectivités qui affichent des coûts d élimination des déchets nettement supérieurs (de 20% ou plus) au coût de référence calculé à qualité de service comparable 2. Les surcoûts sont la conséquence de schémas d organisation trop coûteux notamment pour la collecte, de prestations des sociétés privées payées au prix fort et de recettes annexes à la TEOM étonnement basses dans certaines collectivités. Dans 20 collectivités rassemblant 6 millions d habitants soit 23% de l échantillon, les coûts affichés sont plus de 10% supérieurs à la moyenne nationale à qualité de service équivalente, ce qui induit une surfacturation du service aux habitants concernés. Sur l ensemble de l échantillon, le préjudice total est évalué à 144 millions d euros par an soit 10% du budget total de gestion des déchets par l ensemble des collectivités analysées. Au vu de ce constat peu reluisant, l UFC-Que Choisir adresse une série de propositions pour plus de transparence financière, un contrôle renforcé des budgets locaux et un meilleur pilotage des politiques locales de gestion des déchets. 1 La TEOM prélevée par les services fiscaux de l État qui retiennent alors des frais de perception à hauteur de 7,6% du montant global et prend à sa charge les éventuels impayés repose sur la même base que la taxe foncière relative au bâti. 2 Même service de collecte (flux collectés, fréquence de collecte), même mode de traitement (incinération, stockage, recyclage), même structure d habitat. 2

Table des matières RESUME... 2 UNE TAXE QUI PROGRESSE 10 FOIS PLUS VITE QUE LE GISEMENT DE DECHETS... 4 L ENQUETE DE L UFC-QUE CHOISIR...... 5 I LA TRANSPARENCE FINANCIERE TOUTE RELATIVE... 6 1 UNE DISPONIBILITE QUI LAISSE A DESIRER... 6 2 UNE INFORMATION PARCELLAIRE... 6 II DES DIFFERENCES LOCALES MARQUEES... 9 1 UNE TAXE D UN MONTANT MOYEN DE 99 EUROS PAR HABITANT... 9 2 UN COUT DU SERVICE DES DECHETS QUI VARIE DU SIMPLE AU DOUBLE!... 10 A SERVICE EQUIVALENT, DE FORTES DISPARITES LOCALES III LES TROIS CAUSES DES DERAPAGES TARIFAIRES... 11 1 DES SCHEMAS D ORGANISATION COUTEUX..................................................... 11 2 UNE PRESTATION DE SERVICE PAYEE AU PRIX FORT... 12 3 LE CONTROLE DEFICIENT DES RECETTES ANNEXES A LA TEOM... 13 4 UN PREJUDICE GLOBAL ESTIME CORRESPONDANT A 10% DU BUDGET TOTAL... 13 IV CONCLUSION : UNE MAITRISE INSUFFISANTE DES BUDGETS DE GESTION DANS CERTAINES COLLECTIVITES... 17 V LES DEMANDES DE L UFC-QUE CHOISIR... 18 VI ANNEXES... 19 1 LA POLITIQUE DE GESTION DES DECHETS MENAGERS... 1 9 2 VERS UNE TARIFICATION INCITATIVE?... 21 3

Une taxe qui progresse 10 fois plus vite que le gisement de déchets Les évolutions du montant de cette taxe au regard de l évolution de la masse des déchets soulèvent des interrogations. En effet, la taxe a quadruplé en moins de 20 ans (passant de 1,28 milliard en 1990 à 5,4 milliards en 2009) pour un gisement de déchets en très faible augmentation voire en baisse depuis le milieu des années 2000. Pour la seule année 2009, la TEOM a progressé de 7,1%! Certes, le durcissement de la règlementation pour la protection de l environnement explique en partie ces hausses et ainsi aurait renchéri les coûts de collecte et traitement de plusieurs dizaines d euros par tonne collectée voire de plusieurs centaines d euros pour ce qui concerne les déchets recyclés. Ainsi, la taxe sur le stockage des déchets qui vise à dissuader le recours à la mise en décharge a décuplé en 15 ans. La loi de 1995 a créé une taxe sur le traitement des déchets. Cette taxe intégrée depuis à la taxe générale sur les activités polluantes, la TGAP, a été à maintes reprises augmentée par décret passant de 3 euros par tonne stockée à sa création à 40 euros par tonne en 2015 (loi de finances 2009, suite au vote de la loi Grenelle), son champ d application étant élargi aux déchets incinérés pour atteindre 14 euros la tonne en 2013. En 2009, le produit de TGAP s'est élevé à 317 millions d euros dont 279 millions d'euros sur le stockage et 38 millions d'euros sur l'incinération. Ce durcissement ne saurait donc à lui seul expliquer une hausse de plus 4 milliards d euros de la TEOM en moins de 20 ans. 4

L enquête de l UFC-Que Choisir La loi de 1975 a introduit pour les communes la compétence d élimination des déchets ménagers et assimilés. Les communes peuvent alors se regrouper en syndicats, communautés urbaines, communautés d agglomérations ou communauté de communes pour faire face à ces nouvelles obligations. Pour le financement du service des déchets, les collectivités ou EPCI à compétence déchets sont habilités à décider du niveau de la TEOM, exprimé en pourcentage de la base foncière. Aussi, avons-nous sélectionné un échantillon de collectivités ou EPCI parmi ceux qui figuraient dans les bases disponibles comme dépositaires de la compétence collecte. La principale base utilisée est la base Banatic de la DGCL, en date de 2009, qui décrit les compétences des structures intercommunales. Elle a été complétée par la base SINOE de l ADEME. L échantillon a été stratifié selon 3 critères : la densité de logements, l activité touristique et le taux d habitat collectif. Les caractéristiques d habitat ont été construites à partir des bases de l INSEE sur les caractéristiques des communes. Les collectivités ou EPCI situés en milieu rural ont été exclues de l échantillon, le rapport ne concernant que les communes de plus de 3 500 habitants. Grosse Agglomération 18 Urbain 37 Mixte à dominante urbaine 38 Mixte à dominante rurale 38 Touristique 19 Total 150 La loi du 13 juillet 1992, pose un nouveau principe : celui de l information du public. L accès au public du rapport sur le prix et la qualité de gestion des déchets ménagers sera rendu obligatoire par décret en 2000 (décret n 2000-404 du 11 mai 2000). C est donc sur la base de ces rapports que nous avons souhaité comparer entre eux un échantillon de 150 EPCI sur l ensemble des variables relatives à la gestion des déchets ménagers (volume, flux, collecte, traitement et coûts). La première partie de ce rapport s intéresse à la problématique de manque de transparence des politiques locales de gestion des déchets ménagers. Dans la deuxième partie, l amplitude des disparités locales dans les coûts de gestion des déchets ménagers est exposée. Les principaux éléments explicatifs de ces disparités seront ensuite analysés dans une troisième partie. 5

La transparence financière toute relative La maîtrise de la gestion de l élimination des déchets ménagers nécessite en premier une connaissance pointue de l ensemble des informations relatives à la collecte comme à l élimination des déchets. Cette connaissance des éléments relatifs à la gestion des déchets, l UFC-Que Choisir l a évaluée au regard des éléments communiqués par les collectivités ou EPCI dans les rapports publics sur le prix et la qualité de gestion des déchets ménagers dont l accès au public a été rendu obligatoire par le décret n 2000-404 du 11 mai 2000. 1. Une disponibilité qui laisse à désirer La première étape de l étude consistait à obtenir le rapport sur le prix et la qualité de gestion des déchets ménagers. Seuls 92 collectivités ou EPCI nous ont communiqué leur rapport sur le prix et la qualité de gestion des déchets ménagers. Il est à noter que seul un sur trois donne accès à ces rapports gratuitement et directement en ligne. Auprès des autres collectivités ou EPCI qui nous ont transmis le rapport sur demande, 21% nous l ont communiqué dès le premier appel. En revanche, il a fallu 4 relances ou plus pour obtenir le rapport dans 19% des communes. Dans une dizaine de cas, il n a pas été possible de collecter le rapport déchets lui-même mais les rapports d activité de la collectivité incluant une partie «environnement» relative aux déchets. Au moins sept rapports sont des rapports d activité générale. Un autre rapport est la concaténation des trois rapports des exploitants, sans aucune consolidation, ni des recettes, ni des coûts, ni d indication sur le financement du service. Les défections ont concerné principalement les communes ou regroupement de communes rurales ou touristiques. 2. Une information parcellaire Après la collecte des rapports vient le temps de l analyse. Force est de constater ici l extrême hétérogénéité dans la présentation comme dans les données fournies. Car si le décret de 2000 explicite les éléments qui doivent y figurer, ces rapports peuvent prendre des formats très variés. Si le rapport le plus court ne compte que 2 pages. 6

Le rapport doit contenir les éléments suivants : I. Les indicateurs techniques 1. Indicateurs relatifs à la collecte des déchets : Territoire desservi (dans le seul cas d'un EPCI). Collecte des déchets provenant des ménages : nombre d'habitants desservis en porte à porte et, le cas échéant, à des points de regroupement (nombre de tels points) ; fréquence de collecte (variations sur le territoire concerné ; variations saisonnières, le cas échéant ; fréquence de collecte pour les terrains de camping et caravanage s'ils existent) ; nombre et localisation des déchèteries, si elles existent, et types de déchets qui peuvent y être déposés ; collectes séparatives proposées : types de déchets concernés et modalités ; types de collectes des déchets encombrants et paramètres afférents (nombre de lieux de dépôt et/ou fréquences de ramassage). Collecte des déchets ne provenant pas des ménages pris en charge par le service : récapitulatif des tonnages enlevés au cours de l'exercice considéré ; rappel des tonnages de déchets enlevés, au cours du précédent exercice, par ces différentes collectes ; évolution prévisible de l'organisation de la collecte. 2. Traitement : Traitement des déchets ménagers et assimilés collectés conjointement : localisation des unités de traitement ; nature des traitements et des valorisations réalisées (centre de tri, par exemple) ; capacité de ces unités et tonnage traité dans l'année. Mesures prises dans l'année pour prévenir ou pour atténuer les effets préjudiciables à la santé de l'homme et à l'environnement des opérations d'élimination des déchets. II. - Les indicateurs financiers Modalités d'exploitation du service d'élimination (régie, délégation, etc.) en distinguant, si besoin est, les différentes collectes et les différents traitements. Montant annuel global des dépenses du service et modalités de financement. Montant annuel des principales prestations rémunérées à des entreprises sur contrat. Ces indicateurs peuvent, éventuellement, être complétés par les indicateurs suivants : coût global, ramené à la tonne de déchets enlevés, du service d'élimination des encombrants (collecte et traitement ou stockage) ; modalités d'établissement de la redevance spéciale d'élimination des déchets assimilés si cette redevance a été instaurée ; produits des droits d'accès aux centres de traitement et stockage dont la collectivité est maître d'ouvrage pour les déchets assimilés apportés directement par les entreprises elles-mêmes ou par des collectivités clientes ; er montant détaillé des aides reçues d'organismes agréés au titre du décret n 92-377 du 1 avril 1992 relatif aux déchets résultant de l'abandon des emballages ou mandatés par des organismes agréés (investissements, soutien à la tonne triée, soutien aux tonnes de matériaux valorisés, soutien à l'information des usagers) ; montant détaillé des recettes perçues au titre de la valorisation (valorisation matière hors organismes agréés, valorisation énergétique). 7

Sur l ensemble des rapports collectés, nombreux sont ceux où des informations essentielles manquent à l appel tant les données techniques (fréquences de collecte, tonnages de déchets gérés) que les données financières (éléments de coûts comme les recettes). Ainsi 19 rapports sur 92 ne mentionnent tout simplement pas le montant de la TEOM, la taxe d élimination des ordures ménagères! Dans près de la moitié des cas, des indicateurs financiers comme le coût à la tonne de la collecte ou celui relatif au traitement ne sont pas calculés. Ces indices sont pourtant essentiels pour l évaluation des coûts de gestion de l activité déchets et peuvent être analysés au regard des référentiels de coûts proposés par l Ademe. Le référentiel national des coûts de gestion du service public d élimination des déchets de l Ademe porte à la fois sur tous les déchets gérés par les collectivités et sur des données observées. Cette synthèse vise à permettre aux collectivités et acteurs publics de disposer de valeurs de référence (en euros par habitant et en euros par tonne collectée) et de mieux appréhender la structuration des coûts de gestion des déchets. Nombre de rapports sans l indicateur recherché (ou très difficile à trouver) parmi les 92 rapports collectés Fréquence de collecte OMR 12 Indicateurs techniques Habitants desservis en porte à porte Tonnage total collecté Nombre de déchèteries Mode de collecte sélective Tonnage OMR collecté 5 4 4 3 9 Mode de collecte encombrant 1 Source UFC-Que Choisir 2011 0 5 10 15 20 25 Nombre de rapports sans l indicateur, ou très difficile à trouver Nombre de rapports sans l indicateur recherché (ou très difficile à trouver) parmi les 92 rapports collectés Montant des produits (vente de matériaux, redevance spéciale, ) 19 Indicateurs financiers Montant TEOM Montant des soutiens des organismes agréés Montant annuel global des dépenses du service 13 16 19 Modalités d exploitation du service 6 Source UFC-Que Choisir 2011 0 5 10 15 20 25 Nombre de rapports sans l indicateur, ou très dif f icile à trouver Ces éléments plaident pour une réglementation plus précise s agissant des modalités de communication des rapports et des informations devant obligatoirement y figurer 3. 3 La Cour des comptes avait relevé en 2002 que les obligations d information prévues par le décret de 2000 n étaient pas systématiquement appliquées (i.e. la production des comptes rendus financiers et techniques pour les marchés publics dans le cadre des délégations de service public) et que «les pénalités contractuelles pour non-production des documents exigibles ne sont que rarement appliqués». Dans son rapport de septembre 2011, la Cour réitère ses critiques : «Les chambres régionales des comptes relèvent fréquemment que le rapport annuel sur le prix et la qualité du service institué par le décret n 2000-404 du 11 mai 2000 demeure insuffi sant. Le rapport du délégataire ou le 8

Des différences locales marquées Sur la base des informations collectées, l UFC-Que Choisir a procédé à une étude comparée des politiques locales d élimination des déchets ménagers. L objectif était l analyse du coût de l élimination des déchets et de son financement, à travers un indicateur principal : le niveau de TEOM, taxe d élimination des ordures ménagères, calculé par habitant desservi. Les résultats de cette analyse permettent de constater l extrême hétérogénéité des politiques de gestion d une collectivité à l autre avec des conséquences très marquées sur les coûts supportés par les consommateurs. 1. Une taxe d un montant moyen de 99 euros par habitant Sur les 92 collectivités dont l UFC-Que Choisir a examiné les données, la taxe représente une charge moyenne de 99 euros par habitant. Cette moyenne cache cependant de fortes disparités puisque le minimum observé est de 31 euros par habitant, le maximum de 404 euros par habitant. On observe que 9% des collectivités et EPCI proposent une taxe inférieure à 60 euros par habitant quand, à l inverse, dans 7% d entre eux, les coûts excèdent 160 euros par personne. Montant de TEOM par habitant selon l état de couverture du budget par les ressources dédiées ( /habitant) 136 93 69 123 99 Bénéficiaire (13) Equilibré (45) Déficitaire (15) TEOM par habitant Inconnu (19) Total (82) Source UFC-Que Choisir 2011 Mais, les valeurs de TEOM inférieures à 60 euros par habitant correspondent à des situations budgétaires déficitaires. Les collectivités ont alors recours au budget général pour équilibrer les comptes. Ainsi, les bas niveaux de TEOM affichés sont dans ce cas artificiellement bas car ils ne tiennent pas compte de la réalité des coûts de gestion des déchets. On constate ainsi que dans les 15 EPCI présentant des situations budgétaires déficitaires, le niveau de taxe est particulièrement bas à 69 euros par habitant. Inversement, d autres collectivités présentent des budgets largement bénéficiaires. Les recettes de TEOM excèdent alors de 30% le coût «aidé» de gestion des déchets (c est-à-dire les dépenses de fonctionnement moins les autres recettes). Ces collectivités collectent 136 euros par habitant, soit 37 euros de plus par habitant que les collectivités qui présentent un budget équilibré. Dans ce cadre, l usager supporte des coûts injustifiés au regard du service rendu. Ce type de procédé est interdit mais faute de contrôle, ces pratiques illicites perdurent. Ainsi, sur les 7 collectivités ou EPCI de notre échantillon qui affichent les forts niveaux de TEOM par habitant, 5 présentent des budgets largement excédentaires de 15% jusqu à 22% ; les 2 autres présentant des situations budgétaires inconnues. collationnement des rapports d exécution du service par les titulaires de marchés s y substituent parfois. En outre, les informations manquent de fiabilité et les données chiffrées présentées résistent parfois mal à la comparaison avec les bases de données et les éléments de facturation.» 9

2. Un coût du service des déchets qui varie du simple au double! Afin de comparer les collectivités ou EPCI entre eux et compte-tenu des difficultés d interprétation de la TEOM, l UFC-Que Choisir a reconstitué le coût réel du service imputable aux habitants (coût aidé TTC). Cet indicateur est calculé à partir des dépenses de fonctionnement auxquelles sont retranchées les recettes annexes (hors TEOM). Répartition des collectivités selon le coût imputable par habitant 33% 21% 21% 8% 9% 5% 4% 31 à 40 41 à 60 61 à 80 81 à 100 101 à 120 121 à 140 140 à 160 161 et plus coût par habitant Source UFC-Que Choisir 2011 Sur cette base, le coût moyen de gestion des déchets ménagers s établit à 99 euros par habitant 4 sur les données de 2009 soit le même montant que le niveau de TEOM par habitant mais surtout que le coût moyen calculé par l Ademe dans son référentiel 2008 publié en avril 2011. De nouveau, on constate une très forte disparité des situations puisque 29% des collectivités ou EPCI affichent des coûts inférieurs à 80 euros par habitant, 54% des coûts par habitant compris entre 81 et 120 euros et 18% des coûts supérieurs à 121 euros par habitant. A service équivalent, de fortes disparités locales En comparant entre eux des collectivités ou EPCI avec une structure d habitat et une gestion du service public d élimination des déchets similaires, on constate d inexplicables écarts de coûts. Par exemple, sur les plus grandes agglomérations, les coûts varient du simple (70 euros pour Lyon) au double (149 euros pour Marseille). Autre exemple, bien que Nanterre et Champigny sur Marne affichent des caractéristiques proches (gisement, organisation de collecte et traitement, etc.), les coûts par habitant sont près de 50 euros supérieurs dans la seconde. En zones urbaines ou mixtes, les mêmes écarts de coûts par habitant sont observés. Au Mans ou au Havre, malgré des organisations du service comparables et des volumes proches de déchets à gérer, les coûts varient du simple au double. A Dijon, Brest, Angers, Laval ou Rennes, les coûts de gestion n excèdent pas 70 euros par habitant contre plus de 120 euros pour Le Havre ou Arras. En zones touristiques, les niveaux de coûts sont sans commune mesure avec ce qu on observe dans les autres catégories de collectivités. A ce titre, notons que les 4 collectivités ou EPCI avec les coûts réels les plus élevés du service de gestion des déchets par habitant appartiennent toutes à la catégorie des collectivités touristiques. Or, les rapports des collectivités ou EPCI touristiques le plus souvent ne prennent pas en compte le nombre d habitants corrigé des saisonniers. Ce qui explique que l on observe des ratios par habitant atypiques pour cette catégorie de collectivités ou EPCI. En effet, la population estivale induit un gisement de déchets très important et nécessite une activité accrue des services de gestion des déchets. En conséquence, le prix du service par habitant devient beaucoup plus onéreux et ce surcoût doit être supporté pour l essentiel par les résidents. 4 Avec une médiane à 92 euros par habitant ; ce qui signifie que dans 50% de l échantillon, le coût est inférieur à 92 euros/habitant et dans 50% des cas, il excède ce montant. 10

Les trois causes des dérapages tarifaires L UFC-Que Choisir n a pas voulu s arrêter au simple constat de disparités des coûts mais a voulu en identifier les causes. Outre le volume de déchets à gérer (plus la collectivité doit gérer de déchets par habitant plus coûteux sera le service), les différences locales de coûts par habitant s expliquent par l extrême disparité des coûts d élimination d une tonne de déchets d une collectivité à l autre. L analyse des politiques locales des déchets menée par l UFC-Que Choisir identifie ainsi des facteurs de surcoûts que représentent le recours à une prestation de service ou des recettes annexes à la TEOM étonnamment basses dans certaines collectivités ou EPCI. Considérant que les collectivités doivent davantage recourir à l analyse comparée de leur budget, l UFC-Que Choisir a établi une grille d analyse des coûts de gestion prenant en compte les modalités de collecte et de traitement. Cette analyse permet d identifier les collectivités subissant des surcoûts comparativement aux autres collectivités à service comparable. Outre les volumes de déchets par habitant à gérer, les différences de coûts par habitant observées entre collectivités ou EPCI s expliquent par la grande disparité des coûts d élimination à la tonne de déchets. En effet, les coûts de gestion d une tonne de déchets se situent dans une fourchette de prix qui varie de 70 euros la tonne pour le moins cher à près de 300 euros la tonne pour les plus chers, soit un écart de 1 à 4! Le coût moyen s établit à 164 euros la tonne. Répartition des collectivités selon le coût à la tonne 32% 18% 19% 14% 5% 8% 4% 70 à 100 101 à 130 131 à 160 161 à 190 191 à 220 221 à 250 251 à 290 Source UFC-Que Choisir 2011 coût à la tonne 1. Des schémas d organisation coûteux Les particularités du schéma d organisation de la collecte (flux et fréquence) et le mode d élimination (incinération, stockage, recyclage) induisent des coûts à la tonne différents. Une collectivité qui propose une collecte en porte-àporte quotidienne pour trois flux ou plus affichera des coûts de gestion à la tonne nettement supérieurs à ceux d une commune ne collectant que les OMR en porte-à-porte qui plus est à une fréquence hebdomadaire. Sur notre échantillon, on constate que chaque passage en porte-à-porte supplémentaire pour les OMR implique un surcoût sur le coût de collecte de la tonne de déchets (tous flux) de 6,65 euros. Ceci permet d expliquer les coûts supérieurs de collecte de la tonne de déchets observés en milieu dense urbain (+7% par rapport à la moyenne) où les fréquences de passage sont supérieures. Le nombre de flux collectés en porte-à-porte (OMR, RSOM, encombrants, déchets verts, etc.) impacte également sur les coûts de collecte à la tonne. Chaque flux supplémentaire collecté en porte-à-porte induit un surcoût de 9 euros en moyenne par tonne. 11

De même, une collectivité incinérant 75% des déchets affichera des coûts différents d une collectivité qui parvient à limiter l incinération à 25% des déchets ou moins. L Ademe évalue à moins de 100 euros le coût moyen d élimination d une tonne de déchets d OMR par incinération et à plus de 150 euros le coût de traitement d une tonne de déchets de recyclables secs. 2. Une prestation de service payée au prix fort Outre les modalités de la collecte et du traitement, le mode de gestion (en régie, en prestation de service) permet d expliquer des écarts de coûts significatifs. En effet, l organisation en régie permet de proposer des coûts de collecte mieux maîtrisés notamment en cas de fréquence de collecte limitée. A l opposé, quand la collecte est confiée à une société privée 5, les coûts de collecte à la tonne sont en moyenne supérieurs y compris quand les fréquences de passage en porte-à-porte sont limitées. Coût moyen de collecte à la tonne selon le mode de gestion de la collecte ( /t) Mode de gestion de la collecte Collecte Privée (99 hors Paris) Collecte Mixte Collecte en Régie 107 92 89 0 25 50 75 100 125 Source UFC-Que Choisir 2011 Coût total de collecte à la tonne En cas de collecte assurée par des prestataires privés, le coût moyen de collecte à la tonne s établit à 107 euros la tonne (99 euros si on exclut le cas particulier de Paris) contre 89 euros la tonne en cas de collecte assuré par une régie et 92 euros la tonne en cas de collecte réalisée par la collectivité et en partie par un prestataire privé. Les opérateurs privés proposent néanmoins une fréquence de collecte plus élevée (3,7 passages en moyenne pour les OMR versus 2,8 pour les régies). Toutefois, à fréquence de collecte comparable, on note en moyenne des coûts de collecte à la tonne supérieurs de 12% quand la prestation est assurée par une société privée par rapport à une organisation en régie. Ces observations viennent apporter la confirmation du manque de concurrence dans ce secteur, où Veolia Propreté et SITA (filiale de Suez Environnement) se partagent l essentiel du marché. Face à ce duopole, les collectivités ou EPCI ne disposent ni des informations nécessaires ni des modes de gestion de contrats adaptés (manque de préparation en amont, durée de contrats trop longue, dispositions contractuelles insuffisamment maîtrisées, etc.). Le faible nombre d acteurs limite les capacités des collectivités ou EPCI à faire jouer la concurrence pour obtenir des contrats de services adaptés à leurs besoins et au juste prix. L UFC-Que Choisir a constaté un fort déficit d information lors de l exploitation des rapports sur le coût et la gestion du service des déchets. Faute d expertise, les collectivités ou EPCI ne parviennent pas à apprécier les prestations et les coûts de celles-ci, qui leur sont proposés par les co-contractants. L insuffisance des contrôles du service par les collectivités ou EPCI laisse l opportunité aux co-contractants de «surfacturer» leurs prestations. 5 53 % des collectivités sont en prestation de service (i.e. les sociétés privées réalisent une prestation de service lorsqu elles exploitent des équipements collectifs). 12

3. Le contrôle déficient des recettes annexes à la TEOM Si l équilibre budgétaire des collectivités ou EPCI repose principalement sur les taxes perçues auprès des habitants, les recettes incluent également : les soutiens et subventions liés à la collecte sélective des emballages accordés par les organismes agréés comme Adelphe ou Eco-Emballages6, les ventes de matériaux issus de la collecte sélective, les ventes d électricité et de chaleur, la redevance spéciale (RS) pour les déchets non ménagers7 (déchets assimilés) payée par les entreprises qui utilisent le service municipal des déchets dont le montant est proportionnel au service rendu, le paiement des professionnels pour les accès aux déchèteries et la vente de prestation d incinération ou de mise en décharge auprès des professionnels ou d autres collectivités ou EPCI. En complément de la TEOM, les communes perçoivent la redevance spéciale. Ces revenus peuvent couvrir jusqu à 40% des dépenses totales dans certaines collectivités ou EPCI réduisant d autant les taxes qui reposent sur les administrés. Coût net par habitant selon la part des recettes autres que la TEOM Part des recettes autres que la TEOM Plus de 20% (20) 83 10-20% (34) 104 0-10% (22) 109-25 50 75 100 125 150 Coût total par habitant Source UFC-Que Choisir 2011 Ainsi, les coûts se situent autour de 83 euros par habitant quand les recettes annexes représentent plus de 20% du coût net, contre 109 euros quand elles en représentent moins de 10%. Or un faible niveau des recettes annexes dans certaines collectivités ou EPCI n a pas toujours de réelle justification. Comme nous l avons constaté, dans de nombreux rapports, cette donnée relative aux recettes annexes est mal renseignée malgré l obligation de mise à disposition prévue par le décret du 11 mai 2000. A ce titre, la Cour des Comptes soulignait dans son rapport de 2002 que face au manque de précision dans l information sur les recettes de valorisation ces sommes restent souvent dans les comptes des co-contractants. En 2011, la Cour réitère ses critiques : «il est courant que des recettes annexes (ventes de sous-produits, autoconsommation d électricité, prestations pour tiers, etc.), [ ], n apparaissent pas en comptabilité.». Ce déficit d information peut induire des situations où le co-contractant contrôle les recettes annexes (matériaux, énergie) alors que le financement et l amortissement de l infrastructure sont supportés par la collectivité. S agissant de la redevance spéciale versée par les entreprises utilisant le service public d élimination des déchets, elle est rarement présente dans les rapports ou reste d un niveau très limité. Le Conseil économique et social a d ailleurs souligné la diffusion très restreinte de la redevance spéciale limitée à 3% du territoire. 4. Un préjudice global estimé correspondant à 10% du budget total Pour chaque collectivité, nous avons comparé les coûts affichés à des coûts de références qui prennent en compte la nature des gisements collectés, les spécificités locales des schémas de collecte et d élimination. Nous nous sommes basés sur les données des rapports sur le prix et la qualité du service déchets pour connaître la nature et les volumes des gisements (volumes par flux), les schémas d organisation de la collecte (modes de collecte, fréquences de collecte, types de flux collectés, nombre de flux collectés) et de traitement (incinération, stockage, 6 Ces organismes perçoivent auprès des producteurs et importateurs de produits commercialisés dans des emballages des sommes au titre du principe de la Responsabilité élargie des producteurs (REP). Les sommes perçues correspondent à environ 40% des coûts d élimination des déchets d emballage ménager. 7 Ainsi que la redevance spécifique pour les déchets des terrains de camping et caravaning 13

recyclage). A partir de ces données, en nous appuyant sur les coûts de références calculés par l Ademe dans son référentiel des coûts 8, nous avons pu reconstituer, pour chaque collectivité, le coût d élimination de la tonne de déchets auquel le coût réel à la tonne de chaque collectivité peut être comparé. Répartition des collectivités selon le coût de référence à la tonne 24% 32% 27% 4% 8% 4% 1% 101 à 130 131 à 150 151 à 170 Source UFC-Que Choisir 2011 171 à 190 coût à la tonne 191 à 210 211 à 230 231 à 250 En tenant compte des schémas locaux de gestion des déchets, 83% des collectivités ou EPCI devraient afficher un coût complet compris dans une fourchette entre 131 euros et 190 euros la tonne, la moyenne s établissant à 166 euros. Certes, quelques communes peuvent afficher des coûts nettement supérieurs (jusqu à 244 euros la tonne pour Paris) compte-tenu des schémas d organisation locaux particuliers (collecte assurée en porte-à-porte essentiellement, recours massif à l incinération). 8 Les coûts de l Ademe sont calculés pour l année 2008. Nos données collectées concernent l année 2009. Nous avons donc appliqué un redressement aux coûts de l Ademe 2008 de +5% sur l incinération et le stockage des OMR (prolongement de la tendance observée sur la période 2006-2008) 14

Le tableau qui suit indique pour les collectivités ou EPCI de plus de 300 000 habitants l écart entre le coût réel et le coût de référence calculé pour un schéma d organisation comparable. Nom Population Ecart relatif au référentiel de coûts Coût net/hab Plus de 300 000 habitants CU Strasbourg 467 376 +54% 98 Marseille Provence Métropole 1 044 117 +33% 149 Paris 2 215 197 +13% 144 Bordeaux Métropole 702 522 +10% 104 Grand Lyon 1 257 114 +9% 70 Nantes Métropole 580 502 +8% 98 Grenoble-Alpes-Métropole 403 217 +7% 107 Lille Métropole 1 100 000-9% 115 Communauté du Pays d'aix 366 762-11% 99 Rennes Métropole 412 533-28% 61 De 100 000 à 300 000 habitants CU Pays de Biarritz 105 396 +35% 149 SMICVAL du Libournais 186 047 +27% 114 Saint- Nazaire agglomération 116 519 +24% 116 Communauté urbaine HAVRAISE 246 195 +10% 131 Grand Nancy 264 000 +10% 107 Clermont Communauté 279 621 +9% 87 Caen La Mer 222 359 +6% 94 Reims Métropole 215 326 +5% 86 CA Plaine centrale du Val de Marne 151 790-0% 94 Agglo Pau Pyrénées 150 539-7% 98 Chambéry métropole 125 250-15% 80 Valenciennes Métropole 191 880-19% 84 Angers Loire Métropole 273 403-23% 67 Le Mans Métropole 183 220-27% 70 Dunkerque Grand Littoral 197 027-30% 87 CA du Douaisis 157 392-41% 75 Communauté urbaine BREST 210 117-45% 48 Le Grand Dijon 244 243-49% 46 On constate ainsi qu à Marseille, Biarritz ou Saint Nazaire, les coûts affichés sont nettement supérieurs à que ce qu on observe sur l ensemble du territoire pour une qualité de service similaire (gisements, modalités de collecte et de traitement). Marseille affiche des coûts de gestion à la tonne supérieurs de plus de 50 euros à son référentiel de coûts. En outre, la ville enregistre un gisement par habitant particulièrement élevé (660 Kg/hab), soit une fois et demie les gisements de villes comme Lyon ou Strasbourg. Le coût net par habitant atteint 149 euros, soit le plus élevé des collectivités en zone urbaine dense! Paris se singularise par des coûts de référence les plus élevés de notre échantillon, compte-tenu d une fréquence de collecte en porte-à-porte très élevée (passages quotidiens) et du grand nombre de flux collectés en porte-àporte. En outre, Paris affiche des coûts légèrement supérieurs au référentiel et enregistre des gisements d OMR par habitant très élevés (421 Kg/hab). Le coût net par habitant (144 euros) est, en conséquence, l un des plus élevé de notre échantillon. Néanmoins pour la métropole, les indices par habitant sont difficiles à interpréter, compte-tenu de l importance du gisement de déchets assimilés et du nombre important d entreprises assujetties à la TEOM. La communauté urbaine Pays de Biarritz affiche des coûts de gestion à la tonne élevés, particulièrement sur l activité collecte. En outre, le gisement par habitant est élevé, ce qui fait que la communauté urbaine Pays de Biarritz affiche un des coûts de gestion des déchets par habitant les plus élevés de notre échantillon (149 euros/habitant, contre 99 euros/habitant en moyenne). A l opposé, certaines collectivités parviennent à afficher des coûts nettement en retrait de leurs coûts de référence. Sur la communauté d agglomération de Lyon, le gisement, particulièrement maîtrisé (252 Kg d OMR/hab), permet d afficher un coût par habitant inférieur à 80 euros! 15

De même, dans les communautés urbaines de Brest, Le Mans, Dijon et Rennes, les administrés profitent de coûts de gestion particulièrement bas. Dans toutes ces collectivités, les recettes annexes à la TEOM sont très élevées (couvrant de 20% jusqu à plus de 50% du budget total) et les coûts de collecte sont de 20% inférieurs aux coûts de référence. Sur les 72 collectivités ou EPCI où l analyse a été possible, 20 collectivités ou EPCI présentent des coûts de gestion significativement supérieurs (de plus de 10%) aux coûts moyens observés en France par l Ademe pour une qualité de service équivalente 9. Sur l ensemble de l échantillon, le préjudice total est évalué à 144 millions d euros par an soit 10% du budget total de gestion des déchets des collectivités ou EPCI analysés. - Dans 12 de ces collectivités rassemblant 2,5 millions d habitants (soit 16% de la population enquêtée), les coûts affichés sont entre 25% et 50% supérieurs aux coûts de référence, ce qui induit un préjudice moyen annuel de 31 euros par habitant. En comparant les données détaillées des budgets aux indices issus du référentiel, on constate que les surcoûts sont la conséquence : - 1 ère ) De recettes annexes à la TEOM particulièrement basses (couvrant moins de 10% des coûts totaux) ; - 2 ème ) De coûts de collecte élevés au regard du service proposé, c est-à-dire compte-tenu des fréquences de collecte en porte-à-porte proposées et du nombre de flux différents (OMR, RSOM, encombrants, etc.) collectés en porte-à-porte. Ces analyses démontrent toute l utilité pour les collectivités de développer des outils de pilotage pour comparer leurs coûts de gestion avec les coûts observés sur le reste du territoire pour une qualité de service comparable. Les analyses de l UFC-Que Choisir mettent en lumière des écarts de coûts de gestion des déchets entre les collectivités que les schémas d organisation locaux ne peuvent expliquer. Ces collectivités font ainsi peser sur leurs administrés des montants de TEOM injustifiés! C est la raison pour laquelle, les collectivités ou EPCI qui affichent des coûts nettement supérieurs au référentiel ou des gisements très nettement supérieurs à ceux des collectivités comparables doivent entreprendre, sans attendre, une étude d évaluation et d optimisation de leur schéma de gestion des déchets. 9 En prenant en compte la nature des gisements, les spécificités locales des schémas de collecte et les modes d élimination, et à partir des coûts de références actualisés calculés par l Ademe dans son référentiel des coûts 16

Conclusion : une maîtrise insuffisante des budgets de gestion dans certaines collectivités Notre étude des rapports sur la qualité et le coût du service des déchets démontre, d une part, toute l importance d une normalisation des rapports et, d autre part, l intérêt pour les collectivités ou EPCI de comparer leurs données à un référentiel correspondant à leur schéma de gestion. Les comparaisons permettent d optimiser les schémas d organisation et d identifier les éventuels postes de surcoût. Ces éléments sont indispensables tant dans la gestion des services en régie que dans les négociations des contrats avec les prestataires privés. Faute d une meilleure maîtrise des budgets de gestion, les consommateurs continueront de subir l inflation galopante de la TEOM. L actualité récente avec la possibilité d instauration d une part variable à la TEOM initiée par le Grenelle, via la tarification incitative, rend toutes ces dispositions d autant plus urgentes. Premier soutien du principe d une tarification où chacun paierait en fonction de ses déchets, l UFC-Que Choisir tient cependant à souligner qu un tel dispositif requiert la parfaite maîtrise de la gestion des déchets par les collectivités et la réévaluation du barème amont de certains emballages pour inciter au tri, faute de quoi les budgets pourraient s envoler. 17

Les demandes de l UFC-Que Choisir Dans un contexte de croissance des coûts de gestion de déchets supportés par le consommateur, l UFC-Que Choisir dresse le constat d une maîtrise insuffisante de la gestion des déchets dans de nombreuses collectivités ou EPCI. L UFC-Que Choisir en appelle à une réglementation renforcée de la politique des déchets, un contrôle renforcé des budgets locaux de gestion des déchets et une gestion optimale des ordures ménagères : Pour une plus grande transparence financière des politiques locales de gestion des déchets Un renforcement de la réglementation relative à la communication des informations sur la gestion des déchets doit être mis en place tant s agissant des conditions de mise à disposition des rapports sur le prix et la qualité du service des déchets que des informations qui doivent y figurer. Pour un renforcement des règles comptables en matière budgétaire : Le vote de budgets bénéficiaires, où les recettes de la TEOM excèdent sciemment le budget de fonctionnement de la gestion des déchets, ne doit plus être permis. Les collectivités ou EPCI doivent être tenues de financer le service public par l ensemble des usagers (ménages, professionnels, résidents saisonniers) en fonction du service rendu. Pour la mise en place par les collectivités ou EPCI d outils de pilotage du service de gestion des déchets : Les collectivités ou EPCI doivent recourir à l analyse comparée de leur budget à partir d indicateurs de performance, notamment sur deux critères : le gisement par habitant et le coût complet à la tonne, dans un référentiel correspondant au type de service proposé. Le niveau des recettes annexes à la TEOM doit être davantage contrôlé et mis en cohérence avec les données de gestion des déchets (soutiens distribués, gisements de déchets valorisés, population saisonnière, redevance spéciale, etc.). Pour une réduction de la quantité d ordures ménagères orientées vers le stockage et l incinération par la tarification incitative L UFC-Que Choisir souhaite une réduction de la quantité d ordures ménagères orientées vers le stockage et l incinération par la mise en place d une tarification incitative qui, toutefois, requiert trois conditions préalables : 1. La mise à disposition pour les usagers des moyens leur permettant de gérer leurs gisements (solutions de compostages et de tri) ; 2. Une revalorisation du barème amont afin que les coûts de gestion des recyclables secs (RSOM) soient suffisamment bas pour inciter au recyclage ; 3. La renégociation des contrats avec l ensemble des délégataires pour les intéresser à l atteinte des objectifs de maîtrise des gisements. 18

Annexes 1. La politique de gestion des déchets ménagers Ordures ménagères au sens traditionnel 50% Source UFC-Que Choisir d'après Ademe Déchets des ménages : 62% Les déchets municipaux représentent un gisement annuel de 50 millions de tonnes de déchets que les municipalités doivent gérer. Ces déchets émanent de trois sources distinctes : des communes elles-mêmes 10 (entretien de la voirie, des espaces verts, nettoyage des marchés) pour 28% du total, des ménages pour 62% et des artisans et commerçants pour 10% (on parle alors de déchets assimilés). La loi impose aux communes d assurer la collecte de ces déchets au moins une fois par semaine et d en assurer l élimination. Les déchets des ménages sont constitués des ordures ménagères au sens strict (i.e. ce que les familles déposent dans les bacs-poubelles), des déchets verts des ménages et de leurs objets encombrants. Les ordures ménagères au sens traditionnel incorporent en sus les déchets assimilés des artisans et commerçants collectés conjointement aux déchets des ménages et représentent 20% du volume globale d ordures ménagères collectées. 150 ans de politiques des déchets La problématique de gestion des déchets des ménagers se pose depuis longtemps aux communes et c est à partir ème de la seconde moitié du 19 siècle que le système de gestion moderne des déchets va s imposer dans les pays industrialisés dont la France. Il faudra attendre 1975 et la transposition de la directive européenne du 15 juillet de la même année relative à la gestion des déchets pour que soient fixées les responsabilités et les conditions d élimination des déchets. Selon la loi, l élimination des déchets des ménages est assurée par les communes ou les groupements constitués entre elles. Le texte donne ainsi aux communes la compétence de l élimination des déchets. Mais dans les 20 ans qui suivront, le nombre d incinérateurs va tripler et le pays se couvrir de décharges dont le nombre passe de 123 en 1975 à 500 en 1993! La loi de 1975 ne permet donc pas de limiter la production de déchets, ce sera l objectif des 10 Sur le critère du gisement, la France fait selon l OCDE moins bien que le Canada ou la Finlande (respectivement 420 et 470 Kg/hab./an) mais mieux que l Allemagne, l Espagne ou l Australie (qui produisent entre 600 et 700 Kg/hab./an) et surtout l Etats-Unis et la Norvège et la Suède (qui atteignent des sommets culminant à plus de 750 Kg/hab./an) 19

lois successives de 1992, 1995 et du Grenelle qui va fixer des objectifs quantitatifs de limitation des gisements et se doter des mécanismes sensés permettre de les atteindre. La gestion des déchets ménagers Sur notre échantillon, les collectivités ou EPCI collectent en moyenne 635 Kg par habitant dont 317 Kg d OMR 11. Les gisements varient d une collectivité à l autre. En effet, si un quart des collectivités collectent moins de 250 Kg d OMR par habitant, dans un quart d entre elles, les gisements d OMR dépassent 335 Kg par habitant et dans 10% d entre elles, les gisements excèdent 400 Kg par habitant comme à Paris, Marseille, Toulon ou Neuilly-sur-Seine. La gestion proprement-dite des déchets comprend plusieurs étapes que l on peut regrouper en deux grands types d opérations : la collecte d une part et l élimination d autre part. L activité de collecte La collecte des déchets est assurée soit en porte-à-porte soit auprès de points d apport volontaire. Les ordures ménagères collectées en porte-à-porte et les déchets déposés en déchèterie correspondent à près de 80% des déchets ménagers gérés par les communes. Les autres flux correspondent aux collectes sélectives (Recyclables secs des ordures ménagères, verre, encombrants, biodéchets). La fréquence de collecte traditionnelle en porte-à-porte -c est-à-dire pour les ordures ménagères résiduelles- varie très fortement d une collectivité à l autre. Un tiers des collectivités ou EPCI propose une fréquence de collecte six à sept fois par semaine, un tiers trois à cinq passages par semaine et un tiers, un à deux passages de collecte maximum chaque semaine. En complément, les communes doivent mettre en place des services de collecte sélective par apport volontaire notamment pour les matériaux recyclables (verre, papier, textiles, métaux) ou les déchets spécifiques comme les huiles usagées ou les piles. Les gisements d encombrants des ménages sont collectés en porte-à-porte ou par apport volontaire. 11 L Ademe observait un gisement de 316 Kg d OMR dans son enquête collecte de 2007 20