20 SEPTEMBRE 2013 C.08.0018.F/1 Cour de cassation de Belgique Arrêt N C.08.0018.F 1. J.-M. H., 2. P. G., demandeurs en cassation, représentés par Maître François T Kint, avocat à la Cour de cassation, dont le cabinet est établi à Charleroi, rue de l Athénée, 9, où il est fait élection de domicile, contre 1. D. W., 2. LE CABINET MÉDICAL OPHTALMOLOGIQUE, B.T., société privée à responsabilité limitée dont le siège social est établi à Montigniesle-Tilleul, avenue des Faisans, 17, défendeurs en cassation,
20 SEPTEMBRE 2013 C.08.0018.F/2 représentés par Maître Michel Mahieu, avocat à la Cour de cassation, dont le cabinet est établi à Watermael-Boitsfort, boulevard du Souverain, 36, où il est fait élection de domicile. I. La procédure devant la Cour Le pourvoi en cassation est dirigé contre l arrêt rendu le 22 juin 2007 par la cour d appel de Mons. Le 22 août 2013, l avocat général André Henkes a déposé des conclusions au greffe. Le président Christian Storck a fait rapport et l avocat général André Henkes a été entendu en ses conclusions. II. Les moyens de cassation Les demandeurs présentent deux moyens dont le second est libellé dans les termes suivants : Dispositions légales violées Articles 577-2, 815 et 1134 du Code civil Décisions et motifs critiqués L arrêt, rejetant l appel des demandeurs, confirme entièrement le jugement entrepris, renvoie la cause au premier juge par application de l article 1068, alinéa 2, du Code judicaire, après avoir ordonné le remplacement de l expert désigné par la décision entreprise, rejette, par confirmation de celle-ci, la demande reconventionnelle des demandeurs, aux motifs que, même s il n existe aucune société constituée par les parties au litige, «[celles-ci] ont acquis ensemble le laser litigieux ; que les règles de la copropriété en droit belge reposent sur l article 577bis du Code civil, lequel
20 SEPTEMBRE 2013 C.08.0018.F/3 s applique à défaut de toutes dispositions ou conventions spéciales, c est-àdire à défaut de toute volonté contraire exprimée, soit par une loi spéciale, soit par des conventions ou des testaments (R.P.D.B., v Propriété, n 274) ; que sont notamment soumises audit article toutes les indivisions ayant pour objet des choses mobilières ou immobilières et notamment celles qui sont nées à l occasion d une acquisition faite conjointement (R.P.D.B., ibidem, n 279) ; que le paragraphe 8 dudit article énonce que le partage de la chose commune est régi par les règles établies au titre des successions, soit les articles 815 et suivants du Code civil (R.P.D.B., n 295) ; qu il suit de cette analyse que c est à juste titre que le premier juge a décidé d appliquer lesdits articles, a constaté que le bien n était pas commodément partageable et a recouru à une mesure d expertise destinée à son estimation à l époque de la rupture, soit le 1 er décembre 2001», et qu il a rejeté la demande reconventionnelle des demandeurs. Griefs Si l article 577-2, 1 er, du Code civil (ancien article 577bis avant la loi du 30 juin 1994 ayant modifié la numérotation) dispose que, «à défaut de conventions et de dispositions spéciales, la propriété d une chose qui appartient indivisément à plusieurs personnes est régie ainsi qu il suit» et si le paragraphe 8 de cette disposition porte encore que «le partage de la chose commune est régi par les règles établies au titre des successions», en revanche, l article 815 dudit code ne s applique qu à l indivision ordinaire et fortuite, essentiellement précaire, et nullement à la copropriété volontaire, qui correspond à la situation par laquelle deux ou plusieurs sujets de droit décident librement et sans contrainte de créer à titre principal une indivision mobilière ou immobilière entre eux, régie par le principe de l autonomie de la volonté et de la convention-loi imposé par l article 1134 du Code civil, le juge ne pouvant, par application de l article 815 du Code civil, ordonner le partage du bien acquis en commun et se trouvant en indivision volontaire.
20 SEPTEMBRE 2013 C.08.0018.F/4 Il s ensuit que l arrêt qui, par les motifs qu il indique, ne constate pas que l état d indivision dans lequel se trouvaient les parties à propos de l appareillage litigieux aurait été le résultat d une situation fortuite et involontaire mais, au contraire, admet qu elle est née de leur accord de volonté de l acquérir en commun et de créer expressément, à son sujet, une copropriété volontaire, n a pu décider légalement que les défendeurs pouvaient y mettre fin à leur gré (violation de l article 1134 du Code civil), qu il y avait lieu d ordonner le partage de la chose commune par application des articles 577-2 et 815 du Code civil (violation de ces dispositions) et qu il s imposait de désigner un expert chargé d évaluer la valeur du bien commun à la date de la décision des défendeurs, la demande reconventionnelle des demandeurs n étant pas fondée. III. La décision de la Cour Sur le second moyen : L article 815 du Code civil, dont l alinéa 1 er dispose que nul ne peut être contraint à demeurer dans l indivision et que le partage peut être toujours provoqué, nonobstant prohibitions et conventions contraires, ne s applique pas à l indivision volontaire à titre principal. L arrêt, qui constate que l action des défendeurs «a pour objet la liquidation de l indivision qui lie les parties relativement à [un] appareil» qu elles «ont acquis ensemble» et «dont [elles] faisaient usage dans le cadre de l exercice de leur profession», n a pu, sans violer l article 815 précité, décider qu il y avait lieu d ordonner le partage de la chose commune conformément à cette disposition. Le moyen est fondé.
20 SEPTEMBRE 2013 C.08.0018.F/5 Par ces motifs, La Cour cassé ; Casse l arrêt attaqué ; Ordonne que mention du présent arrêt sera faite en marge de l arrêt fond ; Réserve les dépens pour qu il soit statué sur ceux-ci par le juge du Renvoie la cause devant la cour d appel de Liège. Ainsi jugé par la Cour de cassation, première chambre, à Bruxelles, où siégeaient le président Christian Storck, les conseillers Didier Batselé, Martine Regout, Gustave Steffens et Sabine Geubel, et prononcé en audience publique du vingt septembre deux mille treize par le président Christian Storck, en présence de l avocat général André Henkes, avec l assistance du greffier Patricia De Wadripont. P. De Wadripont S. Geubel G. Steffens M. Regout D. Batselé Chr. Storck