La loi organique relative aux partis politiques n 29-11 La principale caractéristique du projet de loi organique n 29-11 relative aux partis politiques soumis au Parlement pour approbation est que son objet s'inspire essentiellement des principes et règles inédites posés par la constitution de 2011 et en premier lieu de la définition précise du parti politique et la détermination de son rôle conformément aux dispositions de l'article 7 de cette même constitution qui dispose : «Les partis politiques œuvrent à l encadrement et à la formation politique des citoyennes et citoyens, à la promotion de leur participation à la vie nationale et à la gestion des affaires publiques. Ils concourent à l expression de la volonté des électeurs et participent à l exercice du pouvoir, sur la base du pluralisme et de l alternance par les moyens démocratiques, dans le cadre des institutions constitutionnelles.» Ce qui tranche clairement avec la terminologie utilisée auparavant ainsi que avec la vision que l'on se faisait des fonctions des formations politiques généralement. Le projet de loi organique introduit plusieurs règles de fonctionnement des partis politiques dont les principales sont : l encouragement et l incitation des jeunes en général à la participation politique, la mise en place de règles garantissant la stabilité politique au sein des conseils élus, la consécration de moyens matériels et humains en faveur des partis politiques et la régulation rigoureuses du financement public attribué aux partis politiques. I- Promotion de la participation politique des jeunes et des femmes Plusieurs dispositions du projet de loi organique ont pour objet d'assurer la promotion et le renforcement de la participation politique des jeunes. La mesure phare à cet effet vise le rajeunissement de l'élite politique en fixant l'âge légal requis pour fonder une formation politique à 18 ans au lieu de 23 ans (article 5 du projet de loi organique) conformément aux dispositions de l'article 30 de la constitution de 2011 (premier alinéa) qui dispose «Sont électeurs et éligibles, tous les citoyennes et les citoyens majeurs jouissant de leurs droits civils et politiques. La loi prévoit des dispositions de nature à favoriser l égal accès des femmes et des hommes aux fonctions électives.» Dans le même ordre d'idées l'article 26 du projet de loi organique précise que les partis politiques doivent œuvrer à l'élargissement et la généralisation de la participation des femmes et des jeunes dans le processus de développement politique de la société. Pour ce faire les partis politiques doivent s'atteler à l'établissement dans leurs appareils dirigeants sur les plan
régional et national à hauteur du tiers de quotas composés de femmes, à l'horizon de la mise en œuvre progressive du principe de parité entre les hommes et les femmes, et ce conformément aux dispositions de l'article 19 de la constitution de 2011 qui dispose que l'état doit œuvrer à la mise en œuvre du principe de la parité entre les hommes et les femmes et que à cet effet, il sera créé «une Autorité pour la parité et la lutte contre toutes formes de discrimination.» Le projet de loi organique dispose dans le même article que toute formation politique est tenue de préciser dans son règlement intérieur la proportion des jeunes à insérer au sein de ses appareils dirigeants. Cette règle impérative s'inscrit dans un cadre général qui se rapporte à l'instauration de règles et de principes relatifs à la gestion démocratique des structures internes des partis consacrée par l'article 25 du projet de loi organique qui précise que toute formation politique doit être organisée et gérée conformément à des principes démocratiques qui sont à même de permettre à tout membre de participer effectivement à la gestion et au fonctionnement des différentes structures du parti. Les formations politiques doivent également se soumettre aux principes de bonne gouvernance en matière de gestion interne surtout en ce qui concerne la transparence, la responsabilité et la reddition des comptes. Ces mesures comportent également un autre aspect du fonctionnement interne des formations politiques : la sélection et la présentation des candidats aux différentes échéances électorales. À cet égard l'article 28 du projet de loi organique soumet clairement toute formation politique lors de la sélection de ces candidats aux différentes échéances électorales au respect des normes suivantes : - respect des principes de démocratie et de transparence en matière de sélection des candidats en vue des différentes échéances électorales. - présentation de candidats intègres, compétents et en mesure de remplir convenablement leurs tâches électives. Il est certain que ces mesures relatives au bon choix des candidats et également à la conformité des choix aux exigences des fonctions électives contribueront certainement au renforcement de l'adhésion des citoyens aux institutions élues et aux efforts des formations politiques et contribueront à l'élargissement de la participation politique aux différentes sphères de la société marocaine. II- La moralisation de la vie politique et la garantie de la stabilité des conseils élus (interdiction du nomadisme politique)
Le phénomène de transhumance politique, notamment l'abandon par des élus en cours de mandat de l'étiquette politique sous laquelle ils ont été élus en faveur d'une autre formation politique, a sérieusement égratigné la crédibilité de la sphère politique. Pratiqué massivement, ce phénomène contribue à détourner la fonction élective de ces objectifs, ce qui contribue à approfondir le scepticisme et le déficit de confiance vis-à-vis des institutions et des acteurs politiques qui se sont installés de façon chronique chez de larges couches de la société marocaine. Pour remédier à ce phénomène et limiter ses impacts négatifs, le législateur a adopté des mesures tendant à interdire à tous élus en cours de mandat sous la coupole de l'une des deux chambres du Parlement d'appartenir à une autre formation politique jusqu'à la fin de son mandat (article 5 de la loi relative aux partis politiques du 14 février 2006) sous peine de sanction (une amende de 20 000 à 100 000 DH aux termes de l'article 55 du même texte). Mais ces mesures législatives pourtant claires n'ont pas limité l'expansion du phénomène de transhumance politique, surtout que les poursuites en vue de l'application des sanctions prononcées sont restées lettres mortes et que les sanctions sous forme d'amendes n'ont pas été suffisamment dissuasives à l encontre des plus récalcitrants et déterminés à adopter une nouvelle étiquette politique au détriment de celle sous laquelle ils ont été élus. Cette insuffisance de la législation antérieure constitue le fondement même de la nouvelle législation aux termes du projet de loi organique n 11-29 conformément aux dispositions de l'article 61 de la constitution qui dispose que «tout membre de l une des deux Chambres qui renonce à son appartenance politique au nom de laquelle il s est porté candidat aux élections ou le groupe ou groupement parlementaire auquel il appartient, est déchu de son mandat.» L'article 20 du projet de loi organique adopte cette règle et élargit son effet aux élus des conseils des collectivités locales et des chambres professionnelles ainsi qu aux formations politiques elles-mêmes qui acceptent d'attribuer leur étiquette politique à des élus en cours de mandat. L'aspect répressif est cantonné ainsi, à la simple déchéance du mandat électif. Une mesure qui s'avérera pourtant plus efficace que toute autre sanction telle que celles prévues par le texte précédent. La sanction de déchéance vis-à-vis des conseillers et des représentants est prononcée par la Cour constitutionnelle après saisine du président de la chambre concernée. III- le financement public des partis politiques
Le projet de loi organique relative aux partis politiques comporte de nouvelles règles liées aux subventions annuelles attribuées par l'état aux partis politiques en vue de la couverture des frais de fonctionnement et des frais d organisation des congrès nationaux ordinaires, ainsi que le financement des campagnes électorales dans le cadre des opérations électorales locales, régionales ou nationales. Les dispositions relatives à ces différentes questions sont plus développées et détaillées et rédigées dans un texte unique alors qu'elles étaient disséminées entre la loi relative aux partis politiques de 2006 et le code électoral de 1997. -Les subventions annuelles attribuées aux partis politiques. L'État consacre une allocation financière aux partis politiques qui ont participé aux élections législatives, selon des règles relatives à l'importance électorale de chaque formation politique. Trois catégories sont ainsi déterminées : - la première catégorie concerne toutes les formations politiques qui ont participé aux élections législatives et ont assuré la couverture d'un minimum de 10 % de l'ensemble des circonscriptions électorales locales. Cette catégorie bénéficie d'un montant forfaitaire distribué à égalité. - une deuxième catégorie concerne les formations politiques qui ont réalisé 3 % et moins de 5 % du nombre des suffrages exprimés lors des élections législatives au niveau de l'ensemble des circonscriptions électorales locales. Cette catégorie bénéficie d'un montant supplémentaire équivalent au montant forfaitaire précédemment évoqué. - une troisième catégorie concerne les formations politiques qui ont réalisé au moins 5 % des suffrages exprimés. Cette catégorie bénéficie d'un appui financier calculé sur la base du nombre de sièges obtenus et des suffrages exprimés en faveur de chaque formation politique. - Les subventions destinées à la couverture des frais d'organisation des congrès nationaux des partis politiques. Les formations politiques qui ont participé aux élections législatives et qui ont pu réaliser la couverture d au moins 10 % des circonscriptions électorales locales reçoivent une fois tous les quatre ans une subvention destinée à la couverture des frais d'organisation de leurs congrès nationaux ordinaires. Cette subvention est de l'ordre de 50 % du montant annuel attribué à la formation politique au titre de l'année qui précède l'organisation du congrès national. D'autre part, le projet de loi prévoit, en plus de ces deux catégories de subventions, d'autres règles en mesure de permettre aux partis politiques de renforcer leurs moyens financiers et
humains et par conséquent d être en mesure de remplir convenablement les missions qui leur sont assignées aux termes de la constitution. Ainsi le projet de loi organique autorise les formations politiques à bénéficier des revenus des investissements liés aux entreprises d'édition et de presse dont elles sont propriétaires. Les partis politiques bénéficieront également d'exemptions fiscales sur leurs propriétés telles que ce sera précisé par la loi de finances. elles peuvent également bénéficier des services de fonctionnaires publics mis à leur disposition et de programmes de formation assurés en leur faveur par la puissance publique.