Intégration des métabolismes glucidique, protidique, lipidique Régulation de la glycémie Pr Carole Planès Physiologie P2 SMBH 2009-2010
Généralités PLAN Voies métaboliques de la phase post-prandiale et de la phase de jeûne Contrôle neuro-hormonal du métabolisme énergétique Insuline Glucagon Actions métaboliques de l adrénaline Autres hormones Métabolisme énergétique lors de l exercice Physiopathologie : diabète et résistance à l insuline
Généralités sur le contrôle et l intégration des métabolismes glucidique, protidique, lipidique Nous assurons notre continuelle autoréplication de forme et de structure grâce à la transformation de matière organique empruntée à l écosystème. Si l énergie interne de l individu ne varie pas (masse, température, composition constantes), les entrées d énergie (énergie chimique) sont égales aux sorties (chaleur + travail mécanique externe).
L ATP et le transfert d énergie dans la cellule Oxydation des substrats énergétiques Energie chimique 40 % CO 2 + H 2 O (+ NH 3 ) Energie thermique 60% ADP + Pi ATP Fonctions cellulaires nécessitant de l énergie
Les molécules organiques issues des aliments sont utilisées essentiellement pour produire de l énergie. Cependant : Chez l individu en bonne santé qui a terminé sa croissance : Les molécules organiques sont en perpétuel renouvellement (à l exception de l ADN) Il existe un équilibre en ana- et catabolisme. Pour permettre ce renouvellement, l alimentation doit assurer en plus de l apport énergétique : le besoin protidique minimal (1g/kg de masse corporelle) l apport en acides aminés essentiels, vitamines et certains acides gras
Notion d interconvertibilité moléculaire La plupart des cellules (notamment celles du foie) ont la capacité de convertir un type de molécule en un autre. Glucose glycogène; glucose => a. gras; a. aminés => glucose L importance et la direction de ces transformations moléculaires sont finement contrôlées par plusieurs hormones et par le système nerveux autonome. Les principaux effecteurs de cette interconvertibilité sont : le foie, le muscle, le tissu adipeux.
Cas particulier du tissu nerveux Contrairement aux autres tissus, le cerveau n est pas capable d oxyder d autres métabolites que le glucose (et les corps cétoniques). Il est entièrement dépendant de son apport en glucose. la glycémie (concentration plasmatique en glucose) doit être maintenue constante, même à distance d un repas. Glycémie normale : À jeun : 4 à 5.5 mmol/l, soit 0.9 à 1 g/l Après les repas : peut s élever jusqu à ~ 8 mmol/l Une hypoglycémie sévère (< 2 mmol/l, soit 0.35 g/l) peut entraîner un coma, voire si elle se prolonge, la mort.
Notre apport alimentaire est habituellement discontinu Phase POST-PRANDIALE (4h suivant le repas) - l essentiel des besoins en énergie est couvert par les glucides ingérés. - la grande majorité des graisses et des a. aminés absorbés sont mis en réserve sous forme de triglycérides dans le tissu adipeux.
Notre apport alimentaire est habituellement discontinu Phase POST-PRANDIALE (4h suivant le repas) - l essentiel des besoins en énergie est couvert par les glucides ingérés. - la grande majorité des graisses et des a. aminés absorbés sont mis en réserve sous forme de triglycérides dans le tissu adipeux. Phase de JEUNE (fin de nuit, fin de matinée et d AM) - l organisme doit synthétiser du glucose qui sert à la production d énergie pour le système nerveux. - les besoins énergétiques des autres organes sont couverts par les lipides endogènes.
Voies métaboliques de la phase post-prandiale glucose galactose fructose Foie glucose glycogène glycérophosphate triglycérides Acides gras VLDL Ac aminés NH 3 urée triglycérides CO 2 + H 2 O + énergie Tissu adipeux glycérophosphate muscle Ac aminés glucose protéines glycogène glucose glucose CO 2 + H 2 O + énergie Autres tissus triglycérides Ac gras Chylomicrons
Voies métaboliques de la phase post-prandiale L essentiel de l énergie provient de l oxydation du glucose qui se fait dans toutes les cellules. Une grande partie des glucides ingérés est mise en réserve sous forme de glycogène (foie et muscle) et de triglycérides (tissu adipeux). L essentiel des lipides ingérés est stocké sous forme de triglycérides dans le tissu adipeux. Les acides aminés en excès peuvent être mis en réserve sous forme de triglycérides (tissu adipeux).
Voies métaboliques de la phase de jeûne Muscle protéines glycogène Ac lactique Ac aminés Ac pyruvique Ac lactique Ac pyruvique glycogène glucose Foie CO 2 + H 2 O + énergie Autres tissus Corps cétoniques Ac gras glycérol Ac aminés Corps cétoniques Ac gras Ac gras Tissu adipeux NH 3 urée triglycérides glucose glycérol glucose CO 2 + H 2 O + énergie Tissu nerveux
Aspect quantitatif Réserves glycogéniques du foie ~ 100 g, soit environ 400 Kcal : Juste de quoi assurer des dépenses énergétiques modestes pendant ~ 4h. Au terme d un jeûne de 24h, la néoglucogénèse hépatique peut produire ~ 180 g de glucose (~ 720 Kcal) C est insuffisant pour des besoins énergétiques quotidiens compris entre 2000 et 3000 Kcal/j. Mobilisation des triglycérides du tissu adipeux et utilisation des lipides par les tissus autres que le système nerveux (+ médullaire rénale et érythrocytes).
Voies métaboliques de la phase de jeûne Maintien de la glycémie grâce à la glycogénolyse hépatique et à la néoglucogénèse (= formation de glucose à partir du glycérol, des ac. lactique ou pyruvique, des ac. aminés). Mobilisation des graisses de réserve qui fournissent des acides gras aux tissus autres que le tissu nerveux. Epargne du glucose que seul le tissu nerveux consomme.
Par quels mécanismes les cellules de notre organisme sont-elles informées du type de voie métabolique à utiliser? Système de contrôle neuro-humoral complexe impliquant plusieurs hormones et le système nerveux autonome.
Les hormones sont des substances chimiques messagères de l organisme, qui assurent la transmission d informations dans la régulation des fonctions organiques et métaboliques. Les hormones endocrines sont synthétisées dans les glandes (ou cellules) endocrines et sont distribuées à leur tissus cibles par voie circulatoire.
Hormones intervenant dans le métabolisme énergétique Insuline Glucagon Adrénaline GH (Growth Hormone ou hormone de croissance) Glucocorticoïdes (Cortisol)
L insuline
Les îlots de Langherans du pancréas endocrine sécrètent L insuline (cellules β) Le glucagon (cellules α) La somatostatine (cellules δ)
Structure de l insuline Hormone peptidique de 51 aa Clivage de la proinsuline par une endopeptidase dans les granules de stockage de la cellule β insuline + peptide C. L insuline est catabolisée par une insulinase présente dans divers tissus. 40% de l insuline est inactivée au cours du premier passage hépatique. Demi-vie < 10 min.
β α insuline Récepteur de l insuline Récepteur de l insuline Activité tyrosine Kinase autophosphorylation en présence d insuline Famille des récepteurs de facteurs de croissance (hétérotétramère) Internalisation du complexe insuline-récepteur après liaison Pi Insulin Receptor Substrates Transduction du signal Effets métaboliques Effets mitogéniques
Effets de l insuline L insuline est la principale hormone de l anabolisme : En permettant la mise en réserve des substrats glucidiques et lipidiques dans ses tissus cibles En favorisant l expression de gènes et les synthèses protéiques dans toutes les cellules. Elle a un effet hypoglycémiant.
TISSUS CIBLES - foie - muscle - tissu adipeux Toutes cellules
Transport de glucose Cotransport sodium-glucose (SGLT) Nabinding site Na + Glu Glucosebinding site Transporteurs du glucose (GLUT) Na + Glu Secondairement actif, contre le gradient de concentration du glucose - Cell. épithéliales rénales - Cell. épithéliales intestinales Diffusion facilitée Transport passif, saturable Au moins 6 isoformes de GLUT chez l homme
Insuline et transport de glucose GLUT1 : ubiquitaire, non régulé par l insuline. GLUT2 (hépatocytes et cellules β du pancréas) : faible affinité pour le glucose (K m ~ 42 mm), non régulé par l insuline le glucose pénètre d autant plus dans la cellule que sa concentration extracellulaire est élevée (pas de saturation) GLUT3 (neurones) : forte affinité (K m : 10 mm), non régulé par l insuline GLUT4 (muscle, tissu adipeux) : s insère dans la membrane plasmique en réponse à l insuline à partir de vésicules de stockage intracellulaires En l absence d insuline, le glucose ne peut pénétrer
Glycémie pré et postprandiale
Effets de l insuline sur le foie Dans le foie, l insuline augmente l utilisation du glucose et diminue sa production : En augmentant la glycolyse et la synthèse de glycogène En inhibant la glycogénolyse et la néoglucogénèse.
Effets de l insuline sur le foie GLYCOGENOGENESE + GLYCOLYSE _ GLYCOGENOLYSE NEOGLUCOGENESE glycogène (+) glycogène synthase Glucose (+) glucokinase Glucose 6 P Voie de la glycolyse Triose P Phosphoenolpyruvate (+) pyruvate kinase Pyruvate glycogène Glucose Glucose 6 -P Fructose 6-P (-) Fructose 1-6- biphosphatase Fructose 1-6- biphosphate Triose P (-) Glycogène phosphorylase Phosphoenolpyruvate (-) Phosphoenolpyruvate Alanine carboxykinase glycine cystéine Oxaloacétate sérine Asparagine thréonine Aspartate tryptophane Pyruvate
sang Effets de l insuline sur le muscle GLUCOSE (+) Cellule musculaire glucose glucose-6-p glycogène synthase (+) glycogénogénèse glycolyse synthèses protéiques GLYCOGENE fructose-1,6-bip CO 2 pyruvate Pyruvate (+) déshydrogénase Cycle de Krebs lactate lactate acétyl-coa CO 2 ACIDES AMINES (+) Ac aminés (+) SYNTHESE PROTEIQUE
Effets de l insuline sur le tissu adipeux GLUCOSE (+) glucose glucose-6-p Adipocyte lipogénèse lipolyse triose-p α-glycérol-p pyruvate Pyruvate (+) déshydrogénase acétyl-coa sang LIPOPROTEINES (+) carboxylase synthase malonyl-coa (+) Lipoprotéine lipase ac gras (+) triglycérides ac gras Glycérol Ac gras TRIGLYCERIDES (-) lipase
Mise en jeu de la sécrétion d insuline GLUCOSE +++ (glycémie) Acides aminés Acides gras Corps cétoniques Acétylcholine (X) Gastrine, sécrétine + - Somatostatine Adrénaline Noradrénaline Incrétines (GIP, GLP1 ou entéroglucagon) Cellules β GH cortisol + INSULINE
Mécanisme du «glucose-sensing» dans les cellules β du pancréas K ATP glucose GLUT2 + - K + ADP/ATP K ATP GLUT2 K + Ca 2+ glucose ADP/ATP + Entrée de Ca 2+ Ca 2+ Dépolarisation Sécrétion d insuline Inhibition de canaux potassiques sensibles à l ATP lorsque la glycémie augmente
Sécrétion d insuline et glycémie Sécrétion nulle si glycémie < 3 mmol/l Sécrétion max. si glycémie 18 mmol/l
Le glucagon
Le glucagon Peptide de 29 ac aminés Sécrété par les cellules α des îlots de langherans, à partir du clivage protéolytique du proglucagon Métabolisé par le foie et le rein (I/2 vie de 3 à 4 min)
Le glucagon Agit sur le foie à doses physiologiques Récepteur membranaire couplé à une G protéine (adénylate cyclase) AMPc activation PKA phosphorylations qui activent ou inhibent les enzymes du métabolisme A des effets inverses de ceux de l insuline : il augmente la production et diminue l utilisation de glucose par le foie effet hyperglycémiant à court terme. N agit qu à doses pharmacologiques sur le tissu adipeux et le cœur.
Effets du glucagon sur le foie GLYCOGENOGENESE GLYCOLYSE _ + GLYCOGENOLYSE NEOGLUCOGENESE glycogène glycogène (-) glycogène synthase (+) Glycogène phosphorylase Glucose Glucose (-) glucokinase Glucose 6 -P Glucose 6 P Voie de la glycolyse Fructose 6-P (+) Fructose 1-6- biphosphatase Fructose 1-6- biphosphate Triose P Phosphoenolpyruvate (+) Phosphoenolpyruvate carboxykinase Oxaloacétate Pyruvate
Mise en jeu de la sécrétion de glucagon Acides aminés GLUCOSE +++ Acétylcholine Adrénaline Noradrénaline VIP CCK + Cellules α - Insuline Somatostatine Corps cétoniques Acides gras Sécrétion max. si glycémie < 0.5 g/l Sécrétion nulle si glycémie > 2 g/l glucagon
Actions métaboliques de l adrénaline glycémie Centres Σ Fibres Σ Neurones hypothalamiques sensibles au glucose adrénaline Σ Médullosurrénale Cellule α du pancréas Tissu adipeux Muscle Foie Récepteurs β 3 Récepteurs β 2 Récepteurs α Récepteurs β 2 Sécrétion glucagon triglycérides Ac gras Lipolyse effet hyperglycémiant glycogène Ac pyruvique Ac lactique Glycogénolyse glycogène glucose Ac pyruvique Ac lactique
Autres hormones intervenant dans GH le métabolisme énergétique - Est stimulée par l hypoglycémie (entre autre) - Empêche le passage transmembranaire du glucose - Favorise l hydrolyse des TG et l utilisation des acides gras - Favorise l anabolisme protidique (en épargnant l utilisation des acides aminés) Glucocorticoïdes (cortisol) - Sécrétion circadienne, non rythmée par les repas - Empêche le passage transmembranaire du glucose - Indispensable à la néoglucogénèse à partir des acides aminés (hormone du catabolisme protidique) - Effet hyperglycémiant
Contrôle et intégration des métabolismes glucidique, protidique, lipidique au cours de l exercice musculaire
Contrôle du métabolisme glucidique au cours de l exercice musculaire La glycémie reste stable, voire augmente, sauf pour des exercices prolongés. Diminution de la sécrétion d insuline qui n est plus nécessaire à l entrée du glucose dans le muscle. Augmentation de la sécrétion de : catécholamines, glucagon, hormone de croissance.
Couverture des besoins énergétiques dans le muscle grâce : aux glucides stockés dans le muscle (glycogénolyse), à la libération de glucose par le foie (glycogénolyse et néoglucogenèse à partir du lactate et pyruvate libéré), Aux acides gras libres provenant des graisses de réserve (leur contribution augmente au fur et à mesure que l exercice se prolonge). La glycémie peut diminuer lorsque l exercice se prolonge (marathon).
Consommation d O 2 au cours d un exercice Consommation d O 2 Pourcentage correspondant à l oxydation des acides gras et du glucose plasmatique (mmoles/min) 20 15 Glycogène et Lipides musculaires 10 37 50 62 acides gras 5 0 37 41 36 30 27 40 90 180 240 min glucose repos exercice
Pourcentage du débit splanchnique de glucose provenant de la néoglucogenèse au cours de l exercice Débit de glucose (mmoles/min) 2.0 glycogénolyse 1.5 Acides aminés 1.0 glycérol pyruvate 0.5 25 % 16 % 45 % lactate 40 240 min repos exercice
Conclusion Le métabolisme énergétique et la glycémie sont déterminés par un équilibre endocrinien complexe. L insuline, seule hormone hypoglycémiante, en est le facteur prépondérant : elle permet l utilisation du glucose et la mise en réserve des substrats glucidiques et lipidiques. Les effets de l insuline sont constamment plus ou moins contrebalancés par les autres hormones ou neurotransmetteurs. Cet équilibre dynamique permet de maintenir à peu près constante la glycémie malgré la variabilité des apports et des dépenses énergétiques.
Physiopathologie Le ou les diabètes
Définitions Diabète : Glycémie à jeûn 7 mmol/l (1.26 g/l) mesurée au moins 8h après le dernier repas [Et/ou glycémie 2h après charge orale de glucose 11.1 mmol/l (2 g/l)] Glycémie à jeûn anormale : 6.1 < Glycémie à jeûn < 7 mmol/l (1.1 1.25 g/l)
Diabète de type 1 Diabète «insulinodépendant» Sujet habituellement jeune, non obèse. Absence de sécrétion d insuline par destruction des cellules β du pancréas par un processus autoimmun (facteurs génétiques prédisposants +/- agression virale) Acido-cétose ~ 6% des diabètes
Syndrome Polyuropolydipsique
Diabète de type 2 Diabète «non insulinodépendant» (DNID) Typiquement chez le sujet obèse de plus de 40 ans ~ 92% des diabètes. Prévalence : 3-5% pop g ale Chez les obèses, le tissu adipeux sécrète des adipocytokines (leptine, adiponectine) et libère des acides gras (lipolyse) qui bloquent la transmission du signal insulinique au niveau cellulaire périphérique. Cette «résistance à l insuline» induit une augmentation de la sécrétion d insuline par le pancréas (hyperinsulinisme), qui s épuise progressivement avec risque de défaillance secondaire des cellules β du pancréas et déficit de production d insuline
Le diabète L hyperglycémie chronique est délétère Altération de la structure et fonction des cellules endothéliales affectant les microvaisseaux : Rétinopathie diabétique Néphropathie diabétique Neuropathie diabétique et les macrovaisseaux : Infactus du myocarde, accident vasculaire cérébral, ischémie des membres inférieurs Ces complications vasculaires sont la première cause de morbidité et de mortalité dans le diabète.
Biopsie musculaire (tissu «sain») chez un diabétique Athérosclérose des artérioles (épaississement de paroi) Occlusion des capillaires