ORGANISATION POUR L HARMONISATION EN AFRIQUE DU DROIT DES AFFAIRES (OHADA) ---------- COUR COMMUNE DE JUSTICE ET D ARBITRAGE (CCJA) ---------- Première Chambre ---------- Audience publique du 18 mars 2016 Pourvoi : n 101/2013/PC du 29/08/2013 Affaire : ANON SEKA (Conseil : Maître ATTALE Estelle, Avocat à la Cour) Contre GECOS FORMATION Sarl ARRET N 048/2016 du 18 mars 2016 La Cour Commune de Justice et d Arbitrage (CCJA) de l Organisation pour l Harmonisation en Afrique du Droit des Affaires (OHADA), Première Chambre, a rendu l Arrêt suivant en son audience publique du 18 mars 2016 où étaient présents : Messieurs Marcel SEREKOISSE-SAMBA, Président Mamadou DEME, Juge Robert SAFARI ZIHALIRWA, Juge et Maître ASSIEHUE Acka, Greffier ; Sur le pourvoi en date du 29 août 2013 enregistré au greffe de la Cour de céans sous le numéro 101/2013/PC formé au nom et pour le compte de ANON SEKA, domicilié à Abidjan, 04 BP 1329 Abidjan 04, par Maître Estelle ATTALE, Avocat près la Cour d appel d Abidjan, y demeurant Abidjan-Plateau, 8, Rue Sénateur Lagarosse, Immeuble KM, 1 er étage, 16 BP 1509 Abidjan 16, en l étude duquel domicile élu, dans la cause qui l oppose à l Ecole Supérieure de Commerce et de Gestion (GECOS FORMATION), dont le siège est Abidjan- 1
Cocody, Boulevard Mitterrand, Cité des Arts, Rue des Dominicains, société unipersonnelle de KONE LAMAN, en cassation de l arrêt numéro 79 rendu le 18 février 2011 par la Cour d appel d Abidjan, dont le dispositif est le suivant : «PAR CES MOTIFS : Statuant publiquement, contradictoirement, en matière civile et en dernier ressort ; En la forme : Reçoit l appel relevé par GECOS FORMATION du jugement n 1707 rendu le 15 juin 2009 par le tribunal de première instance d Abidjan ; Au fond : -L y dit mal fondé et l en déboute ; -Confirme en toutes ses dispositions la décision attaquée ; -Condamne l appelante aux dépens ( )» ; Le demandeur invoque à l appui de son pourvoi deux moyens tels qu ils figurent dans sa requête annexée au présent arrêt ; Sur le rapport de Monsieur César Apollinaire ONDO MVE, Juge ; Vu les articles 13 et 14 du Traité relatif à l harmonisation du droit des affaires en Afrique ; Vu le Règlement de procédure de la Cour Commune de Justice et d Arbitrage de l OHADA ; Attendu qu il résulte des pièces du dossier de la procédure que l arrêt numéro 1493 du 14 décembre 2001, rendu par la Cour d appel d Abidjan, désigne ANON SEKA comme administrateur séquestre des biens immobiliers dépendant la Communauté des ex-époux Gaoussou Dramane OUATTARA-Nicolas Liliane Juliette, au nombre desquels celui occupé à titre locatif par la GECOS FORMATION; que celle-ci refusant de verser ses loyers entre ses mains, ANON SEKA a saisi le Tribunal de première instance d Abidjan qui, par jugement numéro 1707 du 15 juin 2009, a condamné la GECOS FORMATION à payer la somme de 18.240.000 Francs, prononcé la résiliation de son bail, et ordonné son expulsion et celle des occupants de son chef des lieux loués; que sur appel de la société GECOS FORMATION, la Cour d appel d Abidjan a rendu l arrêt objet du présent pourvoi ; 2
Attendu que par lettre numéro 623/2013/G2 du 1 er Octobre 2013, le Greffier en chef de la Cour de céans a signifié le présent recours à la défenderesse par le biais de son conseil, la SCPA TOURE-AMANI-YAO & Associés, lequel en a accusé réception le 08 du même mois ; que le principe du contradictoire ayant été observé, il y a lieu de statuer sur la cause ; Sur le deuxième moyen Attendu que celui-ci reproche à la Cour d appel d Abidjan d avoir omis de statuer sur les demandes d ANON SEKA, tendant à la condamnation de la GECOS FORMATION au paiement des loyers échus et dus depuis le jugement objet d appel jusqu à son départ des lieux, et des dommages-intérêts pour les préjudices soufferts, exposant ainsi sa décision à cassation conformément à l article 206-7 du code de procédure civile ivoirien ; Attendu qu il résulte des éléments produits au dossier, notamment des conclusions d appel du 27 novembre 2009 d ANON SEKA, et de celles en réplique du 8 mars 2010 de la GECOS FORMATION, que le recourant a bien présenté à la Cour d appel d Abidjan les demandes énoncées au moyen ; qu il apparait de son examen que l arrêt déféré n y a pas répondu ; que le grief étant ainsi avéré, la cassation est encourue, et il y a lieu d évoquer ; Sur l évocation Attendu que suivant acte du 20 juillet 2009, la GECOS FORMATION a interjeté appel du jugement n 1707 rendu le 15 juin 2009 par le tribunal de première instance d Abidjan, dont le dispositif est le suivant : «Par ces motifs : Statuant publiquement, contradictoirement, en matière civile et en premier ressort ; -Rejette l exception d irrecevabilité tirée du non-respect des dispositions de l article 33 du code de procédure civile, commerciale et administrative ; -Reçoit Monsieur ANON SEKA en son action ; -L y dit bien fondé ; -Condamne la société GECOS FORMATION à lui payer la somme de 18.240.000 FCFA représentant les arriérés de loyers échus et impayés ; -Prononce la résiliation du contrat de bail liant les parties ; -Ordonne son expulsion des lieux qu elle occupe, tant de sa personne, de ses biens que de tout occupant de son chef ; 3
-Ordonne l exécution provisoire de la présente décision nonobstant toute voie de recours ( )» ; Qu elle prétend ne pas refuser de payer les loyers, mais se heurter au nonrespect par ANON SEKA d un accord conclu avec OUATTARA Gaoussou, prévoyant le paiement de ceux-ci lors du règlement à la GECOS FORMATION par l Etat ivoirien des subventions liées à la scolarisation des étudiants orientés ; qu elle détient diverses créances sur ledit Etat qu elle entend céder à l intimé conformément aux articles 1689 et suivants du code civil ; qu elle demande à la Cour de lui en donner acte et, en conséquence, de réformer le jugement entrepris en la maintenant sur les lieux, pour qu elle accomplisse sa mission d enseigner et éduquer la jeunesse ivoirienne ; qu elle ajoute que son expulsion occasionnerait des troubles à l ordre public, sa fermeture étant de nature à avoir des incidences sur les étudiants et leurs parents, les enseignants et les salariés dont les emplois seraient menacés ; tandis que l Etat ivoirien serait confronté à un problème urgent de recasement de plus de 700 étudiants par lui orientés et qui sont à sa charge ; Attendu qu en réplique, se fondant sur les articles 61, 66 et 311 de l Acte uniforme relatif au droit des sociétés commerciales et du groupement d intérêt économique, ANON SEKA soulève l irrecevabilité dudit appel, aux motifs que l acte y relatif «qui indique que la société GECOS FORMATION est une SARL, ne mentionne nulle part son capital social pour permettre aussi bien à la Cour qu à Monsieur ANON SEKA de le connaitre d une part, et de savoir si le montant de ce capital atteint le minimum fixé par cet Acte uniforme d autre part, alors surtout que le capital social est un élément essentiel de la SARL qui est une société de capitaux» ; qu au fond, il sollicite, outre la confirmation du jugement entrepris en tous ses points, la condamnation de l appelante à payer «les loyers échus depuis le prononcé du jugement dont est appel, et ceux à échoir jusqu au prononcé de l arrêt à intervenir, et de son départ effectif des lieux», ainsi que «la somme de 5.000.000 de Francs CFA à titre de dommages et intérêts», le tout en application des dispositions de l article 175 du code de procédure civile de Côte d Ivoire ; Mais attendu, d une part, que si toute société commerciale est tenue de mentionner son capital sur ses actes, l Acte uniforme susvisé, adopté le 17 avril 1997, applicable en l espèce, n engage, en cas d inobservation de ce devoir, que la responsabilité civile de la société et de ses dirigeants concernés, à l opposé de celui révisé du 30 janvier 2014 qui, dans ce cas, met en jeu, en son article 891.1, la responsabilité pénale de ces derniers ; qu il n est donc pas prévu, comme le prétend l intimé, la nullité de l acte en cause ; que de plus, il ressort des pièces produites au dossier par l intimé lui-même, notamment la signification commandement du 02 juillet 2013 dressé par Maître DAIPO AYEPO, Huissier à 4
Abidjan, l avenir d audience du 24 octobre 2008 et l assignation du 08 septembre 2008, établis par Maitre Félix KABHAN BILE, lui aussi Huissier à Abidjan, que la GECOS FORMATION est une SARL unipersonnelle au capital de 2.000.000 de francs CFA ; qu il y a lieu de rejeter le moyen comme non fondé, et de déclarer l appel recevable ; Attendu, d autre part, que l appelante ne rapportant pas la preuve de l accord qu elle prétend avoir conclu avec Gaoussou Dramane OUATTARA, loi des parties qui aurait pu s imposer à ANON SEKA qui n en serait que tiers exécutant, c est à bon droit que le Tribunal de première instance d Abidjan a statué ainsi qu il l a fait, de sorte que son jugement mérite d être confirmé en toutes ses dispositions ; Attendu, enfin, que les demandes d ANON SEKA, en appel, sont, en la forme, recevables, par application de l article 170 du code de procédure civile ivoirien, selon lequel, jusqu'à la clôture des débats, l intimé peut former appel incident, par conclusion, appuyées des moyens d'appel, ce qui est le cas ; qu au fond, l alinéa 2 de l article 175 du même code dispose qu une partie peut, en appel, demander des arrérages et loyers échus «depuis le jugement dont est appel» ; qu il échet de faire droit à la demande y relative ; qu en revanche, si le même texte précité consacre la possibilité d une partie de solliciter également des dommages-intérêts pour le préjudice souffert depuis le jugement attaqué, c est à la condition que la mauvaise foi de la partie qui doit les payer soit démontrée ; qu en l espèce, la mauvaise foi de la GECOS FORMATION n étant pas établie, les prétentions d ANON SEKA relatives aux dommages-intérêts ne peuvent prospérer ; Et attendu que la GECOS FORMATION ayant succombé, il importe de la condamner aux dépens ; PAR CES MOTIFS Statuant publiquement, après en avoir délibéré, Casse et annule en toutes ses dispositions l arrêt n 79 rendu le 18 février 2011 par la Cour d appel d Abidjan ; Evoquant et statuant de nouveau : En la forme : Déclare recevables les appels principal de la GECOS FORMATION et incident d ANON SEKA contre le jugement n 1707 rendu le 15 juin 2009 par le Tribunal de Première Instance d Abidjan ; Au fond : 5
Confirme ledit jugement en toutes ses dispositions ; Y ajoutant : Condamne la GECOS FORMATION à payer à ANON SEKA les loyers échus depuis le 15 juin 2009 jusqu à la date du présent arrêt ; Déboute les parties du surplus de leurs demandes ; Condamne la GECOS FORMATION aux dépens. Ainsi fait, jugé et prononcé les jour, mois et an que dessus et ont signé : Le Greffier Le Président 6