Comité permanent Inter-Etats de Lutte Contre la Sécheresse dans le Sahel. Centre Régional AGRHYMET

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Comité permanent Inter-Etats de Lutte Contre la Sécheresse dans le Sahel Centre Régional AGRHYMET Bulletin Mensuel Numéro spécial juin 2010 PREVISION SAISONNIERE DES PLUIES ET DES DEBITS EN AFRIQUE DE L OUEST, TCHAD ET CAMEROUN. PERIODE : juillet-août-septembre 2010. RESUME Un cumul pluviométrique supérieur ou égal à la normale 1971 2000 est attendu au Sahel pour la saison 2010, avec des risques élevés d inondations. Si cette prévision se réalise avec une bonne répartition temporelle des pluies, la campagne agricole sera satisfaisante. De même, des écoulements supérieurs ou égaux à la normale sont prévus pour les bassins du Sénégal, de la Gambie, du Niger moyen et du lac Tchad. Ces bassins sont à surveiller sur le plan des inondations. Toutefois, malgré le risque élevé d inondations en saison des pluies dans le bassin du Niger, une pénurie d eau n est pas à exclure pendant la période sèche. En effet, si la situation normale à tendance déficitaire prévue dans le haut bassin du Niger se réalise, elle affecterait les disponibilités des ressources en eau dans le reste du bassin en saison sèche. Par ailleurs, il est fortement recommandé de suivre de près les mises à jour des prévisions qui seront faites en cours de saison pour tenir compte des éventuels changements des conditions océaniques. Ces mises à jours sont particulièrement utiles pour le bassin de la Volta, la Comoé et le Niger supérieur, car la prévision climatique est incertaine dans les zones où ces bassins prennent leur source.

Introduction Le 13 ème forum de Prévision Saisonnière en Afrique de l Ouest, Tchad et Cameroun s est tenu les 27 et 28 Mai 2010 à Niamey (Niger). Ces deux journées de présentation et de discussion des résultats étaient précédées par deux pré-forums, l un avec les experts des services météorologiques nationaux à l ACMAD, et l autre avec leurs homologues des services hydrologiques au Centre Régional AGRHYMET. Les prévisions du cumul pluviométrique sur la période Juillet-Aout-Septembre 2010 et des débits moyens des périodes de hautes eaux dans les principaux bassins fluviaux de la sous région ont été faites en utilisant les températures de la surface des océans et les résultats de simulations effectués avec les modèles des grands centres mondiaux de prévision climatique dont Météo France, le Centre Hadley du service météorologique britannique (UK MetOffice), le Service Américain chargé des études océanographiques et atmosphériques (NOAA), l Institut International de Recherche sur le climat et la société (IRI, New York), le Centre Européen pour les Prévisions Météorologiques à Moyenne Echéance (ECMWF), etc. Les représentants de 18 Services Météorologiques et Hydrologiques Nationaux (SNMH) d Afrique de l Ouest et du Centre ont également utilisé les relations statistiques établies au préalable pour les différentes régions de leurs pays respectifs pour faire des prévisions. A l issue de cet exercice, des cartes consensuelles du cumul pluviométrique sur la période Juillet-Aout-Septembre 2010 et des débits moyens des hautes des principaux bassins fluviaux ont été établies. I. Bases et signification des prévisions saisonnières La prévision saisonnière est une prévision dont l échéance est supérieure ou égale à un mois. Cette prévision indique si la saison à venir sera potentiellement humide ou sèche. Elle est différente de la prévision du temps qui porte sur le suivi dans le court terme des événements météorologiques. La prévision saisonnière se base sur la relation entre les températures de surface de l Océan (TSO ou SST pour Sea Surface Temperature, en anglais), 2

d une part, et la pluviométrie ou les débits des bassins fluviaux en Afrique de l Ouest, d autre part. En effet, plusieurs études ont montré que si : dans la partie équatoriale de l océan Pacifique, les températures sont inférieures à la normale (anomalie négative des températures par rapport à la référence 1961-1990 ou 1971-2000), les conditions climatiques sont favorables à une bonne pluviométrie au Sahel. Le phénomène correspondant à cette situation des TSO inférieures à la normale est appelée La Nina et la situation opposée s appelle EL Nino. au niveau de l Océan Atlantique, la présence d un dipôle avec des températures froides au Sud (anomalies de TSO négatives, notamment sur le Golfe de Guinée) et des températures chaudes au Nord Ouest (anomalies positives des TSO), les conditions sont également favorables à une bonne pluviométrie au Sahel, mais moins favorables sur la zone côtière du Golfe de Guinée. L influence de l océan Indien sur la pluviométrie au Sahel et en Afrique de l Ouest n est pas encore bien quantifiée. C est pourquoi, pour le moment, les températures de cette partie de l océan global ne sont pas utilisées. Ces différentes zones ayant une influence marquée sur la saison des pluies en Afrique de l Ouest sont représentées à la figure 1. L océan indien dont l influence sur la pluie au Sahel n est pas encore bien quantifiée est encerclé en pointillés rouges. 3

Figure 1 : Principales zones océaniques ayant une influence marquée sur la saison des pluies en Afrique de l Ouest Les TSO des zones principales (zone NINO3, ATL-NW et le Golfe de Guinée) ont donc été utilisées dans l établissement des différents modèles de régression servant à la prévision des pluies et des débits en Afrique de l Ouest. Le coefficient de corrélation de ces modèles de régression dépasse très rarement 0,6. Cela montre que les conditions océaniques n expliquent, à travers ces relations statistiques, qu une partie, souvent inférieure à 50%, de la variabilité de la pluviométrie ou des débits. Un coefficient de corrélation de 0,6 signifie une variance expliquée de 36%. Plusieurs facteurs autres que les températures des océans, tels que les champs de vent en surface et altitude, interviennent dans la détermination de la pluie d une région ou des débits d un bassin. Les conditions locales (humidité de surface, orographie), régionales (conditions atmosphériques du jour au jour), les caractéristiques physiographiques des bassins versants sont aussi autant de facteurs qui influent sur l issue d une saison des pluies, mais qui ne sont pas pris en compte par les modèles de régression TSO-pluie ou TSO-débit. Cette situation conduit à ne prévoir que des catégories ou classes (supérieure à la 4

normale, normale ou inférieure à la normale) et non des quantités de pluie ou débit. Il faudra souligner au passage que la relation statistique entre les TSO et les débits est plus forte que celle qui existe entre les TSO et la pluie. Ceci s explique par le fait que le débit est un facteur intégrateur (il intègre l ensemble des écoulements sur le bassin) alors que la mesure de la pluie est une donnée ponctuelle, valable pour le seul site de mesure. Ainsi, au niveau de l hydrologie, certains coefficients de corrélation entre les TSO et les débits atteignent les valeurs de 0,8. Techniquement, les régressions sont établies sur la base des indices des pluies ou débits, d une part, et ceux des TSO, d autre part. Ces indices sont calculés par rapport à la période de référence (1961 1990 ou 1971 2000). La série des indices calculés sur la base des données historiques permet d établir trois classes : inférieure, moyenne ou supérieure. On qualifie alors la prévision d excédentaire, de normale ou de déficitaire selon l appartenance de l indice à l une des classes, en tenant compte de l incertitude associée au modèle de régression. Il faudra ajouter que les prévisions effectuées sur la base des modèles statistiques sont confrontées à celles issues des modèles dynamiques produites par quelques centres internationaux de prévision saisonnière. L analyse combinée de toutes les prévisions permet de dégager des prévisions consensuelles. Les prévisions sont représentées sous forme de boîte comme suit : la boîte supérieure indique le pourcentage de chance qu une saison de pluie supérieure à la normale. La boîte du milieu indique le pourcentage d une saison moyenne et la boîte du bas indique celui d une saison dont la pluviométrie est inférieure à la normale. Par exemple, le schéma ci-dessous indique 60% de chance pour une saison supérieure à la normale, 25% pour une saison normale et 15% pour une saison sèche. 60 25 15 5

II. Températures des surfaces des océans ayant servi à l élaboration des prévisions saisonnières 2010 Pour cette année, les températures des trois zones indiquées à la figure 1 se présentent comme suit : des températures froides dans le pacifique (on est en présence d une situation de La Nina), des températures chaudes pour l Atlantique Nord-Est et des températures froides dans le Golfe de Guinée (Figure 2). La conjugaison de ces facteurs fait donc que sur l ensemble de l Afrique de l Ouest, excepté les zones côtières du Golfe de Guinée, une pluviométrie normale à tendance humide et des écoulements supérieurs ou égaux à la normale sont attendus au cours de la saison des pluies 2010. Figure 2 : Anomalies de température moyenne pour la période d avril, main et juin 2010, estimées par l ECMWF (European Centre for Medium-Range Weather Forecasts). La configuration actuelle des trois principales zones (en cercle vert) ayant une influence importante sur le climat de l Afrique de l Ouest est favorable à de bonnes précipitations dans le Sahel. III. Prévisions saisonnières consensuelles des cumuls pluviométriques Ainsi, pour ce qui est des cumuls pluviométriques sur la période juillet août - septembre (JAS), nous avons la situation suivante (Fig. 2) : Une Zone I comprenant l extrême sud-ouest de la Mauritanie, le Sénégal, la Gambie, la Guinée Bissau et la moitié Nord de la Guinée Conakry et une Zone II constituée par les régions sahélienne et nord soudanienne du Tchad où la probabilité d une pluviométrie supérieure 6

à la normale est la plus élevée (45%) avec cependant une probabilité de pluviométrie normale non négligeable (35%), et celle d une pluviométrie inférieure à la normale de 20%. Ceci correspond à une situation humide à normale. Une Zone III comprenant l extrême sud-est de la Mauritanie, le Mali, le Burkina Faso, le Niger, la moitié sud de la Guinée Conakry, la Sierra Leone, les régions septentrionales et centrales de la Côte d Ivoire, du Ghana, du Togo, du Bénin et du Nigéria où la probabilité d une pluviométrie équivalente à la normale est la plus élevée (45%), et celle d une pluviométrie supérieure à la normale de 40%. La probabilité d avoir une pluviométrie inférieure à la normale est relativement faible dans cette zone (15%). Ceci correspond à une situation normale à tendance humide. Une Zone IV constituée par les zones côtières du Libéria, de la Côte d Ivoire, du Ghana, du Togo et du Bénin, où la probabilité d une pluviométrie équivalente à la normale est également la plus élevée (45%), mais suivie cette fois de la probabilité d une pluviométrie inférieure à la normale (30%), puis de celle d une pluviométrie supérieure à la normale (25%), ce qui correspond à une situation normale à tendance sèche. Enfin une Zone V constituée par les régions côtières du Nigéria et du Cameroun où les probabilités d une pluviométrie inférieure à la normale est la plus élevée (45%), suivie de celle d une situation normale (35%) puis de celle d une pluviométrie supérieure à la normale (20%), ce qui correspond à une situation sèche à normale. 7

Figure 3 : Prévision saisonnière du cumul pluviométrique sur la période Juillet-Aout- Septembre (JAS) 2010 en Afrique de l Ouest, Tchad et Cameroun. IV. Prévisions saisonnières des écoulements des principaux bassins en Afrique de l Ouest pour la saison 2010 La prévision saisonnière des débits au sein des principaux bassins fluviaux en Afrique de l Ouest est coordonnée par le Centre Régional AGRHYMET depuis son lancement en 1999. Ces principaux bassins sont : le bassin du fleuve Niger subdivisé en trois grands sous-bassins : le Niger Supérieur s étendant des massifs du Fouta Djallon en Guinée à la Station de Koulikoro au Mali ; le Niger moyen s étendant de la station de Diré au Mali à la sortie du territoire Nigérien ; et le Niger Inférieur qui commence à la station de Malanville (station entre la frontière du Niger et du Bénin) ; le bassin du fleuve Sénégal ; le bassin du fleuve Gambie ; 8

le bassin de la Comoé (en Côte d Ivoire) ; le Système du Lac Tchad ; et le bassin de la Volta. Pour ce qui est de l hydrologie, ce n est pas la période JAS qui est prévue, mais le débit moyen des hautes eaux. La période des hautes eaux change légèrement d un bassin à un autre, mais elle se situe globalement pour l ensemble des bassins d août à octobre, soit un mois de retard par rapport aux pluies. Ainsi, pour l année 2010, la situation attendue pour les principaux bassins fluviaux en Afrique de l Ouest se présente comme suit (Fig. 4) : Fleuve Sénégal : des écoulements supérieurs à la normale 1971 2000 sont attendus, avec une probabilité de 60%. La confiance accordée à la prévision sur ce bassin est donc relativement élevée. La normale 1971 2000 des débits des hautes eaux de la station de Kidira (correspondant approximativement à la période d août, septembre et octobre) est de 325 m 3 /s. Cette station représente la partie non régularisée du bassin, Fleuve Volta : des écoulements proches de la normale avec une probabilité de 45%. La normale 1971 2000 des débits des hautes eaux (approximativement de juillet à octobre) à la station Volta Noire en Côte d Ivoire est de 290 m 3 /s. Une mise à jour de la prévision sur ce bassin est indispensable, du fait des fortes incertitudes qui caractérisent les prévisions de la partie amont du bassin. Bassin supérieur du fleuve Niger : des écoulements proches de la normale avec une probabilité de 50% sont attendus. La normale 1971 2000 des débits des hautes eaux du Niger supérieur à la station de Koulikoro au Mali est de 2820 m 3 /s. Toutefois, la configuration de la prévision sur cette partie du bassin montre une tendance normale à sèche dans la zone nord et une tendance normale à humide dans la zone sud. Cette situation pourrait conduire à la fois à des inondations 9

dans certaines parties du Niger supérieur et des déficits d eau dans d autres endroits du bassin. Delta intérieur du fleuve Niger : des écoulements normaux avec une tendance supérieure à la normale sont prévus avec une probabilité de 45%. La normale 1971 200 des hautes eaux à la station de Diré au Mali est de 1150 m 3 /s. L augmentation des débits du Niger Moyen par rapport à ceux de Koulikoro s explique essentiellement par les apports de la partie sud du bassin, notamment celui de l affluent Bani, pour lequel des écoulements supérieurs à la normale sont prévus. Niger Moyen : il y a deux périodes des hautes à la station de Niamey. La première due principalement aux apports des affluents de la rive droite (prenant naissance sur le territoire Burkinabé) se situe de juillet à octobre. La seconde, appelée crue malienne ou soudanienne, est due aux apports du haut bassin. C est donc la première crue, ayant lieu en saison de pluie, qui est considérée dans la présente prévision. Ainsi, des écoulements supérieurs à la normale, avec une probabilité de 50% sont attendus au niveau des stations de Niamey et de Malanville (station située à la frontière Niger-Bénin). Les normales 1971 2000 des hautes eaux de ces deux stations sont respectivement de 875 m 3 /s et de 1095 m 3 /s. La probabilité de débits de pointe dépassant la moyenne est encore plus grande, elle est supérieure à 60%. Du fait des modifications importantes des états de surface ayant entraîné une augmentation des coefficients de ruissellement dans cette partie du bassin, les années pluvieuses se traduisent généralement par des pics importants des débits occasionnant des inondations par débordement des cours d eau. Cette situation de débordement du fleuve est particulièrement critique pour la ville de Niamey. Notons, toutefois, qu une mise à jour des prévisions sur cette partie du bassin est indispensable, du fait de l incertitude qui caractérise la situation des affluents de la rive droite sur le territoire Burkinabé. Niger inférieur : des écoulements supérieurs à la normale avec une probabilité de 45% sont attendus. La normale 1971 2000 est de 10

11400 m 3 /s à la station de Lokoja au Nigeria pour la période des hautes eaux. Le risque d une situation d écoulement inférieur à la moyenne est aussi bien élevé avec une probabilité de 30%. Fleuve Comoé : des écoulements moyens avec une probabilité de 50% sont attendus. Les débits moyens des hautes eaux sont de : 205 m 3 /s à la station de Kafolo en amont du Bassin, 530 m 3 /s pour Serebou au centre du bassin et 595 m 3 /s pour Aniassue en aval. Toutefois, la prévision des débits extrêmes donne une situation supérieure à la moyenne, ce qui fait craindre des inondations dans ce bassin. Une mise à jour des prévisions est fortement recommandée pour ce bassin du fait des incertitudes qui caractérisent ces prévisions. Bassin du Lac Tchad : des écoulements moyens avec une tendance supérieure à la moyenne sont attendus avec une probabilité de 45%. Le bassin du Lac Tchad étant très grand, la prévision n y est pas homogène. C est ainsi qu il est prévu une situation excédentaire pour le sous-bassin du Chari avec une probabilité de 45%. Pour toutes les stations considérées dans ce bassin, il est prévu des débits extrêmes supérieurs à la normale avec une probabilité de 60%. Aussi, des inondations sont fort à craindre dans ce bassin, malgré le caractère moyen de la situation globale. Les normales 1971 2000 pour la période des hautes eaux sont de 780 m 3 /s pour la station de Manda sur la rivière Bahr Sara ; 850 m 3 /s pour la station Moundou sur le Logone, 1700 m 3 /s pour la station de N Djamena sur le Chari et 210 m 3 /s sur la station de Bol au niveau du Lac Tchad. Fleuve Gambie : des écoulements supérieurs à la moyenne avec une probabilité de 45% sont attendus. La normale 1971-2000 au niveau de la station de Kédougou est de 235 m 3 /s. 11

Figure 4 : Prévision saisonnière des débits moyens des hautes eaux des principaux bassins fluviaux en Afrique de l Ouest, au Tchad et au Cameroun pour l année 2010. 12

V. Prévision spécifique pour le bassin du Niger Du fait de la forte variabilité spatiale de la pluviométrie en Afrique de l Ouest, une prévision globale cache toujours des disparités spatiales importantes. Quelque soit l année, il y a toujours des localités excédentaires et déficitaires. Or, ces réalités locales sont plus pertinentes pour les prises de décision. Ces disparités locales sont, toutefois, faiblement expliquées par les conditions océaniques. Elles relèvent en grande partie d autres facteurs (régionaux et locaux) que les températures de surface utilisées pour élaborer la prévision globale. C est ainsi que nous avons entrepris une étude spécifique de réduction d échelle spatiale des prévisions saisonnières dans le bassin du Niger. Nous avons démontré, dans cette étude, la possibilité d élaborer une prévision détaillée pour la soixantaine de sous-bassins du fleuve du Niger, définis par l ABN dans le cadre de son modèle de gestion du bassin. Pour la plupart des sous-bassins, Le Skill ou la performance des prévisions, qui est représenté par le coefficient de corrélation est supérieur à 0.4 (Figure 5). Cette valeur est considérée comme un seuil significatif dans le domaine des prévisions saisonnières. Sur la base des modèles de régression établis pour chaque sous-bassin, nous avons élaboré une prévision spatialement plus détaillée dans le bassin du fleuve Niger pour la saison 2010. Nous notons ainsi que la situation prévue globalement moyenne sur le haut bassin du Niger cache deux tendances bien distinctes. La partie Nord du haut bassin est prévue normale à sèche alors que la partie Sud serait humide à normale. Ce mélange de deux tendances différentes a abouti à la situation globalement normale sur l ensemble du haut bassin. Cela montre bien la valeur ajoutée de l étude spécifique menée sur le bassin du Niger. La prévision dans le bassin du Niger montre, qu en dehors du haut bassin pour lequel une situation normale à tendance déficitaire est attendue, les débits prévus pour 2010 sont supérieurs ou égaux à la normale pour la majorité des sous-bassins (Figure 6). 13

Figure 5 : Skill ou performance (représenté par le coefficient de corrélation) des modèles de prévision saison saisonnière statistique établis pour les différents sousbassins du Niger. Figure 6 : Prévision saisonnière détaillée dans le bassin du Niger pour la saison 2010. 14

VI. Avis et recommandations du Centre Régional AGRHYMET Il est important de rappeler que ces prévisions sont de nature probabiliste, avec chacune des catégories (inférieure, équivalente et supérieure à la normale) ayant des chances de se réaliser. Il est également important de rappeler que la prévision saisonnière porte sur le caractère global de la saison et non sur un événement particulier, comme celui ayant frappé la ville d Ouagadougou le 1 er septembre 2009. Ainsi, pour les pays du Sahel, quoi que les catégories normale et supérieure à la normale aient les probabilités les plus élevées, une situation inférieure à la normale est possible (15 à 20% de chance). Par ailleurs, ces prévisions sont celles du cumul pluviométrique sur la période Juillet-Aout-Septembre ou du débit moyen des hautes eaux pour les différents bassins. Elles ne donnent aucune indication sur la répartition temporelle au cours de ces mois, sur les occurrences de fortes pluies, ou sur les dates de début ou de fin de la saison pluvieuse. Enfin, les comparaisons (supérieure, normale ou inférieure) sont faites par rapport à la moyenne sur la période 1971-2000 (figure 7), et non à l année dernière ou une autre année quelconque. Figure 7: Cumuls pluviométriques moyens de Juillet à Septembre sur la période 1971-2000 en Afrique de l Ouest, Tchad et Cameroun. Source des données : http://earlywarning.usgs.gov/adds/datatheme.php 15

Impacts probables Au cas où cette prévision se réaliserait avec une bonne répartition temporelle des pluies, les productions agricoles et pastorales pourront être équivalentes à supérieures à la moyenne dans les pays du CILSS. Toutefois, il existe un risque élevé de fortes pluies pouvant provoquer des inondations, occasionner des dégâts importants, y compris des pertes de superficies emblavées. Ces conditions humides seront également favorables au développement des ennemis des cultures, notamment les sautériaux et le criquet pèlerin, pour lesquels la surveillance et les mesures de prévention devront être renforcées. Sur le plan hydrologique, la prévision dans le bassin du fleuve Sénégal fait craindre, en plus des inondations directement liées à la pluviométrie, celles dues au débordement du fleuve. Déjà, du fait de l occupation croissante et la dégradation du réseau hydrographique dans ce bassin, on assiste, ces dernières années, à une fréquence plus importante des inondations. Les écoulements excédentaires prévus dans différentes parties du bassin du Niger font également craindre des inondations ; du fait que ces dernières années, les écoulements se concentrent en milieu de saison et les débits maximums des affluents qui alimentent cette partie du bassin ont augmenté. Toutefois, cette situation excédentaire en saison de pluie dans le Niger moyen et inférieur ne devrait pas être interprétée comme une situation d abondance absolue des ressources en eau. En effet, la prévision dans la partie amont du bassin (partie guinéenne) est normale avec une tendance déficitaire, ce qui pourra avoir un impact négatif sur la disponibilité des eaux dans le reste du bassin en saison sèche. Or, c est surtout durant cette période que la demande en eau est plus importante, que ce soit pour la gestion du barrage de Sélingué au Mali, l irrigation dans le Delta intérieur, la production énergétique du barrage de Kainji dans le Niger inférieur ou la navigation sur l ensemble des tronçons. La situation hydrologique prévue dans le bassin du Lac Tchad est globalement moyenne. Mais, du fait de la forte hétérogénéité des écoulements dans ce bassin, certaines parties seront fortement excédentaires, d autres déficitaires. Par exemple, une situation excédentaire 16

est attendue pour le sous-bassin du Chari. Cette partie du bassin est donc à surveiller étroitement sur le plan des inondations. La situation de déficit pluviométrique prévue aux côtes du golfe de Guinée n affectera pas significativement les écoulements des bassins de la Volta et de la Comoé. Il nous est toutefois difficile de caractériser l impact de la prévision de la Volta sur le barrage d'akosombo, du fait de la forte incertitude qui caractérise cette prévision. Recommandations Sur le plan agricole, cette prévision peut, en cas de démarrage normal de la saison, être mise à profit pour augmenter les superficies sous les cultures à haut potentiel de rendement (maïs, riz, sorgho) ou de rente (coton, arachide), en y apportant les quantités recommandées de fertilisants. Cependant, l enherbement et les attaques de déprédateurs (insectes et maladies) pourraient constituer une contrainte majeure au cours de cette saison. Les agriculteurs et les structures d encadrement doivent suivre de près les informations données par les services météorologiques nationaux, qui interpréteront ces prévisions selon les principales zones agroécologiques de chaque pays, et procéderont à leur mise à jour tout au long de la saison. Sur le plan hydrologique, malgré une situation excédentaire prévue dans la plupart des sous-bassins, la durée des écoulements pourrait être courte. Ce raccourcissement de la durée des écoulements est une tendance actuelle liée aux changements globaux (climat et états des surfaces du sol) dans la région. Il constitue ainsi un paramètre clé dans la gestion des ressources en eau. Les barrages à buts multiples, comme celui de Manantali au Mali par exemple, doivent tirer profit de ces informations sur les scénarios hydrologiques les plus plausibles pour la saison à venir. Par ailleurs, il est fortement recommandé de suivre les mises à jour des prévisions qui seront faites en cours de saison. L avenir des prévisions dépendra de celui des conditions océaniques. Si les températures des surfaces des océans changent, la mise à jour, qui se fera faite en début 17

juillet, impliquera des changements importants sur les prévisions. A titre d exemple, les températures des surfaces des zones clés au niveau de l océan ont, en 2009, complètement changé entre Mai et Juillet (Figure 8). Cela a eu pour conséquence un changement du cours de la saison des pluies. La saison a démarré sèche, mais a terminé humide dans beaucoup de zones. SST de mai 2009 SST de juillet 2009 Figure 8 : Changement des températures des surfaces des océans entre mai et juillet durant la saison 2009. En mai l Atlantique Nord était froid et le Sud chaud, ce qui était moins favorable à des précipitations au Sahel. En juillet la situation était complètement inversée, l Atlantique nord est devenu chaud alors que le sud est devenu froid. Cela a changé le cours de la saison des pluies 2009. Aussi, le Centre Régional AGRHYMET du CILSS publiera les mises à jour dans ses différents bulletins mensuels et spéciaux, dans le cadre des activités classiques qu il mène avec ses partenaires, notamment: - Le suivi de la campagne agricole à travers des réunions de briefing décadaires en vue de faire le point sur l état d avancement de la campagne agricole et de donner l alerte en cas de besoin. L évaluation préliminaire des récoltes et la détermination des zones à risque faites en collaboration avec les services techniques nationaux, le FEWS NET, la FAO et le PAM en fin de saison pour établir la situation alimentaire prévisionnelle dans chaque pays et dans le Sahel pour les besoins d aide à la décision. SECRÉTARIAT EXECUTIF : 03 BP 7049 Ouagadougou 03 BURKINA FASO. Tél. (226) 50 37 41 25/26/27/28/29 Fax : (226) 50 37 41 32 Email : cilss@fasonet.bf, Site Web : www.cilssnet.org CENTRE RÉGIONAL AGRHYMET : BP 11011 Niamey, NIGER. Tél (227) 20 31 53 16 / 20 31 54 36 Fax : (227)20 31 54 35 Email : admin@agrhymet.ne, Site Web : www.agrhymet.ne INSTITUT DU SAHEL : BP 1530 Bamako, MALI. Tél : (223) 222 21 48 / 223 02 37 Fax : (223) 222 23 37 / 222 59 80 Email : dginsah@agrosoc.insah.ml, Site Web : www.insah.org 18