La médiation familiale vise à préserver le lien

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La médiation familiale : activités des services, usagers et effets sur la résolution des conflits Pauline Domingo Céline Barbosa CNAF Direction des Statistiques, des Études et de la Recherche. Pôle Recherche et Prospective. CNAF Direction des politiques familiale et sociale. Mots clés : Médiation familiale Conflit familial CAF. La médiation familiale vise à préserver le lien familial lorsqu il est fragilisé par un événement ou une situation tels que les divorces, les séparations, la recomposition familiale, les conflits familiaux autour du maintien des liens entre les grands-parents et les petits-enfants, ainsi que ceux entre les jeunes adultes et leurs parents. En proposant un temps d écoute, d échange et de négociation, l objectif de la médiation est de permettre d aborder le conflit familial dans un espace neutre afin de restaurer le dialogue et de coconstruire une parentalité équilibrée. À la suite des conclusions du rapport Guinchard (2008) préconisant de placer la médiation familiale au cœur du dispositif de résolution amiable des conflits familiaux (1), cet article a pour objectif de confronter le discours sur la médiation familiale souvent enchanté (Dumoulin, 2002) à la réalité des pratiques et de ses effets. Pour ce faire, deux sources de données ont été mobilisées (encadré 1, p. 86) : d une part, le bilan annuel d activité des services de médiation familiale conventionnés (encadré 2, p. 87) et, d autre part, une évaluation réalisée dans les services de médiation des caisses d Allocations familiales (CAF). L étude vise à décrire l activité des services de médiation et à évaluer l impact de la médiation sur la résolution des conflits (accords, amélioration relationnelle, aucune avancée) et s intéresse aux facteurs pouvant expliquer l issue des médiations (caractéristiques sociodémographiques des participants, caractéristiques des conflits) ; elle s interroge, en outre, sur la notion de «médiation interrompue». Les résultats concernant l appréciation par les bénéficiaires des processus de médiation sont également présentés. 269 services de médiation familiale conventionnés par les comités départementaux Au 31 décembre 2009, 269 services de médiation familiale étaient conventionnés par les comités départementaux. Ces services emploient 629 médiateurs familiaux professionnels pour un nombre de postes en équivalent temps plein (ETP) s élevant à 260,05. 13 443 mesures de médiation familiale en 2009 Les services de médiation familiale déploient une offre d information auprès des familles et des partenaires. En 2009, ils ont organisé 8 196 réunions d information collectives : 61 % destinées au public et 39 % aux partenaires. Ils ont réalisé 40 624 entretiens d information préalables individuels (encadré 3, p. 90) : 75 % reposent sur l initiative des parents et 25 % sur l injonction du juge. En 2009, 85 078 entretiens ont été réalisés par les services : 48 % pour une information préalable et 52 % pour une séance de médiation familiale. Le nombre de médiations familiales terminées (2) entre le 1 er janvier et le 31 décembre 2009 s élève à 13 443 (graphique 1, p. 87). Un peu plus d un tiers d entre elles sont des mesures judiciaires. Le bilan d activité estime à 2,6 le nombre moyen de séances par mesure (3). Par conséquent, les (1) Ce rapport propose, notamment, d instaurer la «double convocation» (à l audience et à un entretien d information préalable à la médiation) et une tentative de médiation familiale obligatoire pour les actions visant à modifier les modalités d exercice de l autorité parentale. (2) La médiation familiale est dite «terminée» lorsqu il n y a plus de séances de médiation familiale prévue, quelle que soit l issue du processus. Une médiation interrompue avant son achèvement du fait du médiateur ou des parties est considérée comme terminée. (3) Cette estimation repose sur le rapport entre le nombre de séances de médiation familiale réalisée entre le 1 er janvier 2009 et le 31 décembre 2009 (44 454) et le nombre de médiations familiales terminées sur cette même période (17 359). 85 Synthèses et statistiques

Encadré 1 Les sources de données Le bilan d activité des services de médiation familiale À l initiative du Comité national de suivi de la médiation familiale, depuis 2009, l ensemble des services conventionnés de médiation familiale remplit annuellement un questionnaire d activités. Ce dernier comprend des données sur le service (moyens humains, territoires d intervention, etc.), sur les activités liées à l information (réunions collectives, entretiens individuels, etc.) et sur les processus de médiation (durée des mesures, nombre de séances, issue des processus, etc.). Le présent article repose sur les réponses de deux cent soixante-six services sur les deux cent soixante-neuf conventionnés au 31 décembre 2009. L enquête dans les services en gestion directe Depuis 2005, la Caisse nationale des Allocations familiales a mis en place une évaluation dans les services de médiation en gestion directe, s appuyant sur deux outils de recueil des données : une fiche de suivi, remplie par les médiateurs, permettant de recueillir des informations sur les participants pour chaque entretien d information préalable et chaque médiation (caractéristiques sociodémographiques), les processus (type de médiation, durée ), leur contenu (type de conflit, thèmes abordés) et leur issue (accord, amélioration relationnelle) ; un questionnaire de satisfaction rempli par les participants à la fin du processus de médiation. Cependant, les données issues de ce questionnaire sont à prendre avec précaution en raison d un taux de réponse faible (17 %), d un mode de passation hétérogène et d une surreprésentation des répondants ayant conclu un accord. La première vague de l enquête réalisée en 2005 a fait l objet de plusieurs publications (*). L article exploite les vagues 2006 et 2007. Il repose sur 3 145 observations réparties comme suit : 2 040 entretiens d informations préalables (sans poursuite en médiation) et 1 105 médiations familiales. En 2006, dix services en gestion directe participaient à l évaluation et 16 en 2007. En outre, l article présente les résultats de l exploitation des questionnaires de satisfaction remplis par les participants à la fin du processus de médiation lors des trois vagues successives de l enquête en 2005, 2006 et 2007, soit 569 observations. (*) Minonzio J., 2006, «Évaluation de la médiation dans les CAF», Dossier d études, CNAF, n 82 ; Minonzio J., 2006, «La médiation familiale dans les CAF : un service d appui à la parentalité en cas de conflit», l e-ssentiel, n 54 ; Minonzio J., 2007, La médiation familiale dans les CAF : un service dont l efficacité varie selon les conflits traités, Recherches et Prévisions, n 89:71-80. durées des mesures de médiation (4) sont en général inférieures à six mois : 57 % des mesures ont duré moins de trois mois et 32 % entre trois et six mois. On peut noter que les durées des médiations comme le nombre de séances par mesure ne diffèrent pas selon qu elles soient judiciaires ou conventionnelles, laissant ainsi supposer que l activité des services ne dépend pas de la nature des médiations. Les mesures de médiation familiale terminées en 2009 ont concerné 29 450 personnes bénéficiaires (5). Elles portent majoritairement sur des divorces ou des séparations (80 %), mais également des conflits sans séparation (9 %), des conflits parents-jeunes adultes (4 %) et des problèmes de relations intergénérationnelles (4 %). Les trois quarts des médiations familiales ont eu un impact positif Près de six médiations sur dix ont permis la réalisation d un accord (graphique 2, p. 88). Dans la moitié des cas, il s agit d un accord écrit qui pourra être homologué par un juge si les parties le souhaitent. De fait, ces accords sont un peu plus fréquents dans le cadre judiciaire : 31 % des médiations judiciaires ont donné lieu à un accord écrit contre 29 % parmi les mesures conventionnelles. À l inverse, les accords oraux semblent mieux convenir aux personnes venues spontanément en médiation : 30 % des médiations conventionnelles ont donné lieu à un accord oral contre 21 % dans le cadre judiciaire. Pour nuancer l approche de l impact de la médiation uniquement en terme d accord, le bilan d activité des services recueille un indicateur d apaisement du conflit (6). D après les médiateurs, parmi les médiations qui n ont pas abouti à un accord, 43 % ont permis une avancée significative dans la réduction du conflit (amélioration sur le plan relationnel, rétablissement de la communication, etc.). Ainsi, les trois quarts des médiations familiales ont eu un impact positif sur la résolution du conflit (graphique 2, p. 88). Les résultats de l évaluation de la médiation familiale dans les services en gestion directe des CAF Alors que le bilan d activité ne permet pas d identifier les facteurs pouvant expliquer l issue des médiations, l évaluation menée dans les services en gestion directe des CAF (encadré 1) permet (4) Il s agit du temps écoulé entre la date du premier entretien d information préalable et la dernière séance de médiation familiale. (5) Le nombre de participants par mesure est légèrement supérieur à deux : en effet, plus de deux personnes peuvent participer de manière régulière à l ensemble des séances, notamment dans les situations de recomposition familiale et de conflit intergénérationnel. (6) Cet indicateur, rempli par les médiateurs eux-mêmes qui pratiquent ainsi une forme d autoévaluation, présente néanmoins le risque de surestimer les effets positifs. 86 Synthèses et statistiques

Encadré 2 Le développement de la médiation familiale dans un cadre partenarial Pour préserver les liens familiaux et un environnement favorable à l enfant, la branche Famille s est impliquée dans le développement de la médiation familiale par le pilotage du dispositif à l échelon national et local ainsi que par la création, en 2006, de la prestation de service «médiation familiale» pour financer des postes de médiateurs familiaux dans des services conventionnés par les partenaires à l échelon départemental. Ces services sont principalement gérés par des associations (90 %) et par des caisses d Allocations familiales (CAF) (8 %, soit vingt-deux services dits «en gestion directe»). Leur financement repose à 95 % sur des financements publics : 55 % sont apportés par les organismes de sécurité sociale (51 % par les CAF), 21 % par l État (11 % par les services déconcentrés du ministère du Travail, de la Solidarité et de la Fonction publique, 6 % par les crédits délégués par le ministère de la Justice auprès des cours d appel et 2 % par l aide juridictionnelle) et 15 % par les collectivités territoriales (10 % par les départements). Les participations familiales, fonction d un barème progressif, représentent 5 % des ressources totales des services. d avancer sur cette question. Néanmoins, plusieurs précautions, liées au fait que l enquête est spécifique aux services de médiation des CAF, doivent être mentionnées pour apprécier la portée des résultats. Alors que les bilans d activité concernent l année 2009, les données issues de l évaluation dans les services en gestion directe datent de 2006 et 2007. Comparativement à l ensemble des services, ceux en gestion directe des CAF gèrent un peu plus souvent des médiations de type «divorce-séparation» et «conflit sans séparation» (94 % contre 89 % dans les bilans d activité). Enfin, les services de médiation des CAF reçoivent un peu moins de familles dans un cadre judiciaire qu au niveau national. Les participants à la médiation familiale et leurs enfants Les parents reçus à un entretien d information préalable sont âgés, en moyenne, de 39 ans. Parmi eux, 72 % sont séparés, divorcés ou en cours de séparation alors que 26 % déclarent vivre encore ensemble. Lorsqu ils sont séparés, la durée moyenne de leur vie en couple est de dix ans. Un quart des familles reçues en entretien d information préalable sont en situation de recomposition familiale. En moyenne, les parents qui viennent à un entretien d information préalable ont eu 1,97 enfant. L âge moyen de l enfant le plus jeune, issu du couple parental, concerné par la médiation familiale est de 6 ans et demi (âge médian de 5 ans). Dès lors que l un des parents est en situation de recomposition familiale, le nombre d enfants concernés est un peu plus important et s élève à 2,21. Lorsque les parents sont séparés, les enfants vivent dans 73 % des cas chez leur mère. On peut noter que la résidence chez le père est deux fois moins fréquente que la résidence alternée. 36 % des entretiens d information préalable ont donné lieu à une poursuite en médiation familiale. Les caractéristiques sociodémographiques des personnes venues à un entretien d information préalable sont sensiblement les mêmes que celles des personnes ayant ensuite poursuivi en médiation. Pour autant, certaines caractéristiques semblent favoriser la poursuite en médiation (tableau 1, p. 88), notamment le moment de celle-ci dans l histoire du couple parental. Près de la moitié des parents en cours de séparation poursuivent en médiation contre seulement un tiers des parents déjà séparés. Les parents en situation de recomposition familiale poursuivent également plus souvent en médiation après l entretien d information. Enfin, les situations qui nécessitent un dialogue important entre les parents séparés semblent favoriser l entrée en médiation : la moitié des parents pratiquant la résidence alternée ont poursuivi en médiation familiale alors qu ils sont seulement un tiers parmi ceux où les enfants résident exclusivement chez la mère. Graphique 1 Activités des services de médiation familiale au 31 décembre 2009 Entretiens d'information Séances de médiation familiale Mesures de médiation familiale terminées Mesures de médiation familiale en cours 59 % 3 916 65 % 13 443 Source : Questionnaire d activité 2009 des services de médiation familiale. Lecture : entre le 1 er janvier et le 31 décembre 2009, 40 624 entretiens d information ont été réalisés, dont 75 % dans le cadre conventionnel. 75 % 64 % 40 624 44 454 Cadre judiciaire Cadre conventionnel 87 Synthèses et statistiques

Graphique 2 Issue des processus de médiation familiale 25 % 30 % lieu à un accord, 16 % des médiations ont permis une avancée significative dans la résolution du conflit (8,5 %) ou dans la modification des relations père-mère-enfant (7,5 %). Enfin, 36 % des médiations n ont donné lieu à aucune avancée significative. 18 % Le processus de médiation L entretien d information préalable permet de faire le point sur les thèmes que les parents souhaiteraient aborder au cours de la médiation. Les préoccupations sont centrées, d une part, sur les problèmes de communication et, d autre part, sur les responsabilités parentales, notamment le plan d accueil des enfants, cités par 55 % des parents qui se sont engagés dans un processus de médiation (graphique 3). La moitié des médiations ont duré entre deux et quatre mois et comprenaient entre deux et cinq séances. La disparité s explique essentiellement par le fait que la médiation a abouti à un accord (3,9 mois en moyenne) ou non (2,8 mois en moyenne) et par le fait qu elle ait été arrêtée avant son achèvement (2,9 séances en moyenne) ou non (4,5 séances en moyenne). L effet de la médiation dans la résolution des conflits Dans l évaluation des services en gestion directe, la part des accords est plus faible qu au niveau national : un peu moins de la moitié des médiations terminées (interrompues ou achevées) se sont soldées par un accord (48 %). Même si elles n ont pas donné 27 % Accord écrit. Accord oral. Avancée significative dans l apaisement du conflit. Aucune avancée. Source : Questionnaire d activité 2009 des services de médiation familiale. Une autre manière d appréhender les effets de la médiation familiale consiste à évaluer ses effets d un point de vue relationnel. Cette question est difficile à remplir pour les médiateurs car elle implique une appréciation subjective sur l apaisement du conflit. Dans 34,2 % des cas, ils déclarent ainsi qu ils ne savent pas juger de l amélioration relationnelle entre les parties (tableau 2). Néanmoins, les médiateurs observent un apaisement significatif avec un règlement du conflit pour 30,7 % des médiations familiales et, dans 35,1 % des cas, un simple rétablissement de la communication ou une baisse de l intensité du conflit (sans règlement du conflit). L appréciation de l amélioration relationnelle ne recouvre pas parfaitement l appréciation du règlement du conflit. En effet, pour 20 % des médiations ayant donné lieu à un accord, le médiateur juge qu il y a eu un simple rétablissement de la communication ou une baisse de l intensité du conflit sans règlement du conflit. Tableau 1 Proportion de poursuite en médiation familiale selon les caractéristiques des conflits et celles sociodémographiques des personnes venues à un entretien d information préalable (en %) Selon le type de médiation sollicitée Part de poursuites en médiation Parmi les «conflits sans séparation» 36,2 Parmi les «Divorces-séparations» 35,8 Selon l origine de la demande Parmi les demandes spontanées 37,4 Parmi les injonctions du juge 69,0 Selon le statut du couple parental Parmi les non séparés 40,2 Parmi les divorcés 39,4 Parmi les séparés 33,3 Parmi les personnes en cours de séparation 49,6 Parmi les situations de recomposition familiale 45,8 Selon le mode de résidence des enfants (si parents séparés) Parmi les situations où les enfants résident chez la mère 32,1 Parmi les situations où les enfants résident chez le père 43,2 Parmi les situations de résidence alternée 50,5 Ensemble (part des personnes ayant poursuivi en médiation familiale après l entretien d information préalable) Source : CNAF Enquête médiation familiale dans les services en gestion directe Caf, vagues 2006 et 2007. Champ : conflit de type «Conflit sans séparation» et «Divorce-séparation». Les pourcentages en vert et gras indiquent les parts de poursuite en médiation (selon les différentes caractéristiques) supérieures de 5 points à la part moyenne de poursuite en médiation qui s élève à 36 %. Lecture : 40,2 % des parents non séparés ont poursuivi en médiation familiale après l entretien d information préalable, contre 36 % parmi l ensemble des personnes venues à un entretien d information préalable. 36,0 88 Synthèses et statistiques

Graphique 3 Thèmes que les parties souhaitent aborder et ceux ayant donné lieu à un accord Plan accueil Contribution financière Autorité parentale Communication Résidence Apaisement conflit Vacances Organisation administrative Confiance Choix allocataire Scolarité Loisirs Santé Partage des biens Thèmes à aborder pour les personnes qui sont allées en médiation familiale. Thèmes des accords. Aideàladécision 0% 10% 20% 30% 40% 50% 60% 70% 80% Source : CNAF Enquête médiation familiale dans les services en gestion directe CAF, vagues 2006 et 2007. Champ : conflit de type «Conflit sans séparation» et «Divorce-séparation». Lecture : 22,1 % des personnes ayant suivi une médiation familiale souhaitaient aborder le thème de «l aide à la décision» mais 16,8 % des accords mentionnent ce thème. Tableau 2 Répartition des médiations familiales selon leur issue et l amélioration relationnelle selon les médiateurs (en %) Accord (48 %) Avancée significative (16 %) Source : CNAF Enquête médiation familiale dans les services en gestion directe CAF, vagues 2006 et 2007. Champ : conflit de type «Conflit sans séparation» et «Divorce-séparation». Lecture : 56,9 % des médiations ayant donné lieu à un accord ont permis un apaisement significatif des relations. Aucune avancée (36 %) Ensemble Apaisement significatif des relations avec règlement du conflit 56,9 1,1 17,9 30,7 Simple rétablissement de la communication sans règlement du conflit 4,6 29,0 28,6 17,2 Baisse de l intensité du conflit sans règlement du conflit 15,4 8,7 45,8 17,9 Ne sait pas 23,1 61,2 7,7 34,2 Total 100 100 100 100 Les médiateurs ont déclaré que 48 % des médiations démarrées ont été arrêtées avant d être achevées (encadré 3, p. 90). Dans la moitié des cas, un des parents est à l origine de cet arrêt et, dans 27 % des cas, ce sont les parents, d un commun accord, qui décident de mettre un terme à la médiation. Ces médiations déclarées «arrêtées» avant d être «achevées» ne sont pas en général des échecs. En effet, 40 % de ces médiations interrompues ont donné lieu à un accord (16 %) ou à une avancée significative dans la résolution d une partie du conflit ou dans la modification des relations père/mère/enfant. De plus, même s il n y a aucune avancée significative dans la résolution du conflit, dans 37 % des cas, les médiateurs jugent qu il y a eu une amélioration d un point de vue relationnel. Le contenu des accords de médiation familiale Les accords sont centrés sur l organisation temporelle et financière de la garde des enfants (graphique 3) : 67 % des accords mentionnent le plan d accueil des enfants et 50 % la contribution financière. L origine de la demande de médiation (juridique ou conventionnelle) influe fortement sur le contenu des accords. Dans le cadre des médiations judiciaires, les accords portent plus 89 Synthèses et statistiques

Encadré 3 Définitions Entretien d information préalable (ou prémédiation) : sur injonction du juge ou la suite d un contact avec le service de médiation, il s agit d un échange personnalisé en présence d une (ou des) partie(s) qui permet aux personnes de s engager en toute connaissance dans une médiation familiale. Médiation familiale conventionnelle et judiciaire : elle comporte au moins un entretien d information préalable et un nombre de séances de médiation familiale variable selon les situations. On parle de «médiation familiale conventionnelle» (ou «spontanée») lorsque les personnes ont contacté directement le service (même si elles ont été orientées par le juge, la caisse d Allocations familiales, un travailleur social, etc.) et de «médiation familiale judiciaire» lorsqu elle est décidée par un juge, avec l accord des deux parties, et notifiée dans le cadre d une ordonnance. souvent sur les aspects relationnels : 67 % des accords de médiation judiciaire mentionnent le thème du rétablissement de la communication et 63 % celui de l apaisement du conflit, alors que ce n est le cas que de respectivement 50 % et 38 % des accords de médiation conventionnelle. À l inverse, les accords judiciaires portent moins souvent sur l organisation de la vie quotidienne avec les enfants (santé, scolarité, loisirs, etc.) et sur l organisation administrative et financière de la séparation (pension alimentaire, choix de l allocataire percevant les allocations, etc.) : 22 % des accords judiciaires abordent la question de la contribution financière à l entretien de l enfant contre 42 % des accords conventionnels. Ainsi, il semble que, pour les parents suivant une médiation judiciaire, celle-ci doit être l occasion d aborder la dimension relationnelle de la séparation pour mieux construire et comprendre la décision de justice concernant, notamment, la garde des enfants. Pour les parents venus spontanément en médiation, celle-ci est avant tout un moyen de régler leurs différends organisationnels dans la gestion de leur séparation. Pour autant, la question du plan d accueil cristallise beaucoup de tensions, quelle que soit l origine de la demande de médiation : il est évoqué dans près de 60 % des accords. Les facteurs favorisant une issue favorable de la médiation familiale Si on compare les thèmes que les parents souhaitaient aborder au cours de la médiation familiale (déclaration lors de l entretien d information préalable) et les thèmes stipulés dans les accords (graphique 3, p.89), il apparaît que ces derniers sont un bon outil pour régler les problèmes organisationnels (organisation des vacances, administrative, de la résidence des enfants ). En revanche, les difficultés de communication et de confiance se prêtent mal à une formalisation dans un accord. Outre les caractéristiques du conflit, celles des participants à la médiation peuvent en influencer l issue. Le degré de résolution du conflit est fortement corrélé au différentiel de salaire entre les parents (Minonzio, 2007). Plus celui-ci est important, moins les médiations ont convergé vers un accord. Les parents dont les médiations n ont donné lieu à aucune avancée significative ont un différentiel de salaire moyen de 891 euros, alors qu il s élève à 765 euros lorsque les parents ont trouvé un accord. Le fait que l un des parents au moins soit en situation de recomposition familiale influe également sur l issue de la médiation. L absence de recomposition familiale améliore les chances de trouver un accord : 47 % des parents en situation de recomposition familiale ont trouvé un accord alors qu ils sont 52 % en l absence de recomposition. Des différences d appréciation des accords selon les sexes Pour évaluer la satisfaction des bénéficiaires de médiation, il leur a été demandé de noter, sur une échelle de 1à5,leseffets du processus de médiation. Les résultats confirment ceux mis en évidence par Jérôme Minonzio (2006). Les femmes Graphique 4 Appréciation des accords de médiation selon le sexe 22 % 23 % La meilleure solution 10 % Femme 15 % Un accord a minima, la solution la moins mauvaise possible Homme 5% Source : CNAF Enquête de satisfaction médiation familiale dans les services en gestion directe CAF, vagues 2005, 2006 et 2007. 3% Un renoncement 22 % 27 % Une solution équitable 36 % 28 % Une solution satisfaisante, nouvelle base de fonctionnement 90 Synthèses et statistiques

sont légèrement plus satisfaites des effets relationnels de la médiation. Un peu plus souvent que les hommes, elles jugent que la médiation leur a permis d échanger sur des sujets restés non exprimés jusque-là (moyenne des notes des femmes supérieure de 0,22 points à celle des hommes) et de comprendre les dysfonctionnements de leur couple (+ 0,19). Les hommes sont plus satisfaits que les femmes des résultats de la médiation sur les aspects financiers. À l inverse, les femmes sont plus satisfaites en ce qui concerne les aspects organisationnels, notamment l organisation des vacances (+ 0,30) et de la résidence des enfants (+ 0,28). Ainsi, l attribution des rôles de chacun dans la sphère domestique persiste dans la satisfaction à l égard des résultats de la médiation. L appréciation globale des accords montre également des différences sexuées nettes. Les femmes sont moins nombreuses que les hommes pour qualifier les accords de «solution équitable» (graphique 4). En revanche, elles jugent plus souvent que ces accords sont une solution satisfaisante. À court terme, en travaillant sur la dimension relationnelle de la séparation, la médiation familiale se révèle être plutôt efficace pour accompagner les parents dans la gestion de leur conflit. Si l hypothèse selon laquelle la médiation familiale s apparente à un processus éducatif permet de favoriser une forme plus consensuelle de régulation des conflits (Bonafé-Schmitt et Charrier, 2008), elle devrait modifier également la façon dont le couple parental gère les conflits ultérieurs. Cette hypothèse ouvre une nouvelle piste d évaluation : celle, à moyen terme, des effets comparés de la médiation et des procédures judiciaires de séparation (7) sur la capacité des parents à gérer, dans la durée, les questions concernant les enfants. Ce type d évaluation permettrait, en outre, de dégager les facteurs qui influencent le choix du mode de règlement des conflits. Bibliographie Bonafé-Schmitt J.-P. et Charrier P. (2008), Évaluation des effets de processus de médiation familiale sur les médiés, Empan, n 72. Charrier P., 2009, «Évaluation comparée des effets des processus judiciaires et de médiation», rapport de recherche pour le compte de la FENAMEF, sous la responsabilité scientifique de Jean-Pierre Bonafé-Schmitt, Laboratoire MODYS. Dumoulin L., 2002, La médiation familiale : entre institutionnalisation et recherche de son public, Recherches et Prévisions, n 70. Guinchard S. (dir.), 2008, «L ambition raisonnée d une justice apaisée», rapport de la commission sur la répartition des contentieux. Minonzio J., 2007, La médiation familiale dans les CAF : un service dont l efficacité varie selon les conflits traités, Recherches et Prévisions, n 89:71-80. Minonzio J., 2006, «Évaluation de la médiation dans les CAF», Dossier d études, CNAF, n 82. Minonzio J., 2006, «La médiation familiale dans les CAF : un service d appui à la parentalité en cas de conflit», l e-ssentiel, n 54. (7) On peut noter à ce propos les résultats de la recherche action de la FENAMEF, dont la deuxième partie (Charrier, 2009), compare la manière dont les parents parlent de leur séparation selon le mode de règlement du conflit. L étude montre notamment qu une partie des divorces par consentement mutuel se rapproche des médiations conventionnelles du point de vue de la mise en mots de la séparation. 91 Synthèses et statistiques