AFPP 3 e CONFÉRENCE SUR L ENTRETIEN DES ESPACES VERTS, JARDINS, GAZONS, FORÊTS, ZONES AQUATIQUES ET AUTRES ZONES NON AGRICOLES TOULOUSE 15, 16 ET 17 OCTOBRE 2013 OBJECTIF ZERO PESTICIDE DANS NOS VILLES ET VILLAGES DU LUBERON N. BOUEDEC Parc naturel régional du Luberon 60 Place Jean jaurès 84400 APT nicolas.bouedec@parcduluberon.fr RÉSUMÉ Dans le cadre d un appel à projet de l Agence de l eau R.M.C, le service écologie urbaine du Parc naturel régional du Luberon anime une démarche de réduction de l usage des produits phytosanitaires, pour les communes adhérentes au Parc. A ce titre, le Parc a réalisé des audits des pratiques phytosanitaires auprès de 43 communes, des formations spécifiques pour les élus et agents techniques communaux ainsi que pour les entreprises d espaces verts et a développé des outils de communication adaptés pour le grand public. Le Parc a également assuré la promotion des techniques alternatives auprès des communes de son territoire. Mots-clés : Parc du Luberon, audits, formations, produits phytosanitaires, techniques alternatives. ABSTRACT In response to a call for proposals by the local water agency, the urban ecology service of the Luberon Regional Nature Park conducts a program of reduction of plant protection products for the communities within the Park. The Park undertook audits of the use of herbicides and pesticides among the 43 communities, proposed workshops for local council members and community groundskeepers as well as for businesses providing park and garden maintenance, thereby creating communication tools destined for the general public. In addition, the Park encourages the communities within it to use these alternative methods of pest and weed control. Keywords: Luberon Regional Nature Park / natural gardening / organic products / communication nurseries.
INTRODUCTION L utilisation des produits phytopharmaceutiques en zone non-agricole (ZNA : espaces verts, parcs et jardins, jardins amateurs, collectivités,...) représente environ 13 % des utilisations de pesticides en France. Malgré des quantités utilisées moindres par rapport à celles épandues en zones agricoles, les surfaces traitées en zones non agricoles présentent beaucoup plus de risques en termes de pollution des eaux. On estime que l utilisation des pesticides en zones non agricoles est responsable de près de 30 % de la pollution de l eau par les pesticides. Dans le cadre d un appel à projet de l Agence de l Eau, l opération du Parc du Luberon intitulé «objectif zéro pesticide dans nos villes et villages» a porté sur l amélioration des pratiques des applicateurs en zones non agricoles en matière d'usage des pesticides, sur le développement et la diffusion d outils spécifiques pour la diminution de l'usage des pesticides et sur la sensibilisation et la formation des gestionnaires d espaces verts des collectivités locales, à l utilisation de techniques alternatives. Cette opération est conforme aux missions essentielles d un Parc naturel régional à savoir notamment l expérimentation d opérations nouvelles, la diffusion de ces opérations ainsi que l éducation à l environnement. ACTIONS REALISEES ET RESULTATS Cette opération comprenait les missions suivantes : 1) effectuer dans 43 communes rurales du Parc du Luberon un audit des pratiques phytosanitaires et assurer le suivi de la mise en œuvre de cet audit, 2) assurer l assistance à maîtrise d ouvrage pour l élaboration des plans de désherbages pour quelques villes du Parc comme Pertuis ou Apt, 3) élaborer et réaliser un programme de formation des techniciens et élus des différentes collectivités territoriales sur des produits phytosanitaires et les alternatives, sur une méthodologie de gestion raisonnée, 4) élaborer et réaliser un programme de formation des entreprises de jardins et paysagistes aux pratiques alternatives, 5) créer et animer un club grand public dont les objectifs seraient des conseils, aides, échanges sur «la conception et la gestion des jardins en accord avec leur environnement». La réalisation d un audit des pratiques phytosanitaires La première phase de cette opération a constitué à réaliser un audit des pratiques phytosanitaires auprès de 43 communes du Parc du Luberon. L idée était de rencontrer, dans chacune de ces communes, un agent ou un responsable technique en charge du désherbage et un élu en charge du service technique afin d échanger sur les pratiques communales et amener progressivement les communes à adopter les techniques alternatives au désherbage chimique. Ces techniques alternatives sont en effet, moins pénalisantes pour l environnement mais également moins dangereuses pour la santé des agents applicateurs.
L audit a été réalisé par le biais d un questionnaire composé de 110 questions qui abordaient les 14 thèmes suivants : généralité hydrographique, achat et transports de produits phytosanitaires, local de stockage des produits phytosanitaires, bureau technique, stock des produits phytosanitaires, protection de l applicateur, matériel de pulvérisation, poste de remplissage et préparation du traitement, application des produits phytosanitaires, gestion du fond de cuve, lavage externe du pulvérisateur, gestion des déchets, organisation du désherbage traitement chimique ou traitement alternatif /secteurs Ce questionnaire exhaustif était complété en mairie avec l aide du personnel technique et des élus en charge du service technique ou de l environnement. Ensuite, ce questionnaire était finalisé par une visite au niveau du local technique afin d identifier notamment les pesticides présents dans le stock communal. L inventaire de chaque produit phytosanitaire était réalisé, le numéro de l autorisation de mise sur le marché relevé, puis reporté sur la grille correspondante dans le questionnaire de l audit. Des communes à «zéro phyto» Quelques communes du Parc du Luberon, par volonté politique ou technique, ont décidé de supprimer l usage des pesticides et notamment du désherbant, pour assurer l entretien de leur espace public. L audit a révélé que 12 % des communes, soit 5 commune sur 43, n utilisent plus de produits phytosanitaires pour l entretien de la voirie ou des espaces verts. Par ailleurs, si 12 % des communes n utilisent plus de pesticides, 37 % des communes ont réduit de manière très importante leur traitement chimique pour l entretien des espaces communaux. 16 communes utilisent moins de 10 litres de pesticides par an, ce qui est relativement peu pour un territoire communal. Ces communes ont supprimé l utilisation du désherbant pour l entretien de la voirie communale et utilisent à la place des techniques alternatives, comme le désherbage manuel, mécanique ou le désherbeur thermique. Le cimetière est cependant, dans les communes engagées dans une démarche de réduction de l usage des pesticides, bien souvent le dernier lieu entretenu avec un désherbant chimique. Les élus et les agents techniques communaux reçoivent des recommandations de la part des habitants pour garder un cimetière le plus minéral possible sans présence d herbes indésirables.
Dans le cimetière, la présence d herbes n est pas tolérée par les habitants. Le cimetière doit toujours être bien «entretenu» par les agents techniques. Le stockage des produits Seules, 7 % des communes, soit 3 sur 43, possèdent un local en règle pour le stockage des produits phytosanitaires. Pourtant, la réglementation prévoit que les produits phytosanitaires doivent être stockés dans une armoire ou un local spécifique dédié à ce seul usage. Ce local doit être aéré ou ventilé et fermé à clé s il contient des substances classées T+, T, c, m ou r. Le stock des produits 67 % des communes possèdent un stock réduit de produits phytosanitaires, c est-à-dire inférieur à 50 litres. Concernant ce stock, il existe une grande variation d une commune à l autre, le stock s établissant pour les communes auditées de 0 à 350 litres. Malgré tout, on peut fixer une moyenne à 50 litres de pesticides en stock, pour les communes auditées. Au total, cet audit a permis de déterminer que 2158 litres de produits phytosanitaires étaient stockés dans ces 43 communes. Parmi ces 2158 litres, 1709 litres, soit 79 % sont des désherbants. 55 molécules différentes ont été identifiées dans les stocks communaux, dont une grande majorité d herbicides. Ces derniers représentent près de la moitié des substances chimiques rencontrées lors de l audit dans les communes du Parc. Citons notamment, le glyphosate, l aminotriazole le 2.4D ou le triclopyr, molécules les plus utilisées par les agents techniques communaux pour réaliser les opérations de désherbage ou de débroussaillage. La présence de Produits Phytosanitaires Non Utilisables (PPNU) Dans la majorité des communes, on note la présence de produits phytosanitaires non utilisables. Des communes possèdent même en stock plusieurs produits phytosanitaires dont l autorisation de mise sur le marché a été retirée depuis plusieurs années. Ces produits restent en stock sur l étagère sans être pour autant utilisés. De nombreuses communes possèdent en stock notamment du Diuron, molécule de désherbage interdite depuis 2002 ou encore de l atrazine, molécule interdite depuis 1997.
Les communes gardent ces produits en stock par méconnaissance du fonctionnement de l A.M.M. Pratiquement aucune commune n a connaissance du site «EPHY» du Ministère de l Agriculture qui permet de savoir si un produit possède toujours son A.M.M ou pas. Lors de l audit, 71 bidons de pesticides non utilisables ont été retrouvés. Cela représente un stock de près de 300 litres. Au final, en nombre de produits, 24 % des pesticides stockés sont des produits phytosanitaires non utilisables, ce qui est relativement important. L application des produits Concernant l application des produits, seules 7 % des communes appliquent correctement les pesticides. Cette thématique aborde les notions de conditions météo, de la vérification du bon usage des produits, du mélange des produits et de la présence d une aire de préparation spécifique avec rétention. Une majorité des communes prépare la bouillie devant l atelier municipal avec le risque de voir le pulvérisateur déborder ou se renverser à proximité de l avaloir des eaux pluviales. Au niveau du respect de la zone non traitée mis en œuvre dans l arrêté du 12 septembre 2006, l article 12.1 indique que l utilisation des produits en pulvérisation ou poudrage au voisinage des points d eau doit être réalisée en respectant la zone non traitée figurant sur l étiquetage. L arrêté précise qu en l absence de mention relative aux ZNT sur l étiquetage, une ZNT d une largeur de 5 mètres doit être respectée par défaut. Cette notion semble bien respectée par les agents techniques qui, à 70%, ne pulvérisent pas de désherbant à proximité des cours d eau de leur commune. L utilisation de techniques alternatives 72 % des communes, soit 31 communes, déclarent utiliser, ou vont prochainement utiliser, pour l entretien de leur commune des techniques alternatives. Elles utilisent les outils de désherbage mécanique, (balayeuse, binette ) et les outils de désherbage thermique comme le désherbeur thermique à gaz (Villars, Cucuron, Roussillon). Quelques communes utilisent du paillage comme Cheval-Blanc et des plantes couvre-sol. Des communes, comme Cereste, utilisent également de la résine pour limiter le désherbage au niveau des pieds d arbres. Enfin, des communes disposent au centre-ville d aménagement permettant de réduire l entretien et donc l utilisation de désherbant comme Niozelles ou Villeneuve.
Commune de Villelaure Commune de Villelaure Commune de Céreste Commune de Villeneuve Commune de Cheval-Blanc Commune de Cavaillon La présence des EPI Lors de l audit, était également vérifiée la présence effective des équipements de protection individuels ainsi que leur utilisation lors de la manipulation et l application des pesticides. Il s avère que le constat est inquiétant. Seulement 14 % des communes disposent d équipements de protection individuels en règles, équipements pourtant imposés par la réglementation et notamment le Code du travail. Une grande majorité des communes utilisent soit des équipements insuffisants (gants de jardinage, masque à poussière) ou encore plus préoccupant, aucun équipement du tout. Une sensibilisation des agents techniques sur la nécessité de porter ces équipements a été réalisée lors de cet audit afin que ces derniers se protègent efficacement.
Le respect du délai de rentrée Si peu d agents protègent leur santé, ils sont également peu nombreux à protéger la population communale lors de l application des pesticides. 14 % des communes seulement indiquent respecter ce délai de rentrée. L arrêté du 12 septembre 2006 prévoit la mise en place après traitement d un délai de rentrée, durée pendant lequel il est interdit aux personnes de pénétrer dans les lieux où a été appliqué un produit. Le délai de rentrée est de 6 heures au minimum, 8 heures en cas d application en milieu fermé, 24 heures après toute application de produit comportant une des phrases de risques suivantes (R36, R38, R41), 48 heures pour ceux comportant une des phrases de risque suivantes (R42, R43). Gestion des déchets En application du décret n 2002-540 du 18 avril 2002, les Produits Phytosanitaires Non Utilisables et les emballages vides de produits phytosanitaires sont considérés comme des déchets dangereux. Il est interdit pour les emballages vides de les brûler, de les enterrer ou de les mettre aux ordures ménagères ou au tri sélectif. Avec le soutien financier d Adivalor, ces déchets sont collectés et traités dans des centres spécialisés de déchets industriels spéciaux. 47 % des communes traitent correctement les EVPP et 44 % les PPNU. La majorité des communes déposent les bidons vides après utilisation à la déchetterie ou chez leur fournisseur (coopératives agricoles). La réalisation d un programme de formations Dans le cadre de cet appel à projet un programme de formation a été mis en place. Il visait à sensibiliser sur la démarche, à informer sur la toxicité de ces substances, sur les bonnes pratiques d utilisation des produits phytosanitaires, sur l existence des mesures et produits alternatifs au traitement chimique, sur la gestion raisonnée (méthodologie, broyage des déchets verts, paillage, utilisation de l eau, prise en compte de la biodiversité, utilisation de plantes adaptées au climat et aux sols). Il devait s accompagner de démonstrations de matériel substitutif au traitement chimique, de visites sur sites. Ce programme de formation devait s adresser : aux techniciens et élus des différentes collectivités territoriales présentes sur le territoire du Parc du Luberon (communes, communautés de communes, conseils généraux ), aux entreprises de jardins et paysages du Parc du Luberon. Cinq thèmes de formation ont été proposés : 1) règles et précautions pour l usage des produits phytosanitaires 2) les méthodes alternatives au désherbage chimique 3) la protection biologique intégrée dans les espaces verts 4) organiser le changement des pratiques : la gestion différenciée et le plan de désherbage 5) aménagements et conception durable des espaces publics. Près de 300 personnes (élus, techniciens, entreprises) ont été formées dans le cadre de ce programme de formation.
Des animations pour le «grand public» La campagne de communication à la radio Dans le cadre de cet appel à projet, nous avons également souhaité pouvoir «toucher» le grand public sur le thème de la réduction de l usage des pesticides en réalisant des spots radio diffusés sur l antenne de France bleu Vaucluse, du 12 mars au 12 mai 2012. 89 messages ont été diffusés durant cette période. Par ailleurs, durant la semaine pour les alternatives aux pesticides qui s est tenue du 20 au 30 mars 2013, le Parc du Luberon a fait passer sur France bleu Vaucluse, 5 messages différents sur le thème de la pollution de l eau par les pesticides ainsi que sur le paillage et les plantes couvre-sol. Au total du 18 mars au 5 avril 2013, 68 messages sont passés à l antenne de cette radio. la conception et l édition d un livret sur les plantes couvre-sol Dans le cadre de notre action auprès du grand public, nous avons décidé d éditer un guide technique sur le thème des plantes couvre-sol qui a pour objectif d aider le grand public et les communes à planter des plantes couvre-sol adaptées au climat de notre région. De ce fait, ces plantes couvre-sol seront plus rustiques et plus résistantes aux maladies. Elles nécessiteront moins de soins et de traitements, moins d arrosage. Enfin, elles couvriront rapidement le sol et éviteront l emploi d herbicides. Cet ouvrage a été conçu pour présenter un argumentaire et des conseils permettant de concilier le jardin et l environnement, mais aussi de préserver la biodiversité. des animations auprès du grand public sur le thème de la réduction de l usage des pesticides Dans le cadre de cet appel à projet, nous avons également souhaité mettre en place un programme de formation sur le thème du jardinage au naturel auprès des jardiniers amateurs. Il s agissait de réaliser des conférences «grand public», composées d un exposé illustré par un diaporama et divers outils pédagogiques, suivi d une visite de jardin, réalisées sur 4 communes du Parc : Apt, Cavaillon, Pertuis et Pierrevert au printemps 2012, en s appuyant sur des associations locales de jardins partagés ou des évènements sur le thème du jardin au naturel organisés par les communes. Le Parc naturel régional du Luberon a également participé en 2013, à la semaine nationale pour les alternatives aux pesticides. Dans le cadre de cet évènement national, les animations suivantes ont été réalisées : une conférence-débat intitulée : "Zéro pesticide, partageons nos savoir-faire!» organisée le mercredi 27 mars 2013 à 18h30 à la Maison du Parc à Apt en partenariat avec une association locale de préservation de la biodiversité «Foll Avoine». une exposition : «Objectif zéro pesticide dans nos villes et villages du Luberon» mise en place du 20 mars au 5 avril 2013 à la Maison du Parc à Apt. Il s agit d une exposition ludique sur le thème du danger des pesticides et de leurs alternatives composée de 16 panneaux.
CONCLUSION Quelques communes de notre territoire, n utilisent plus de produits phytosanitaires. D autres s engagent à réduire progressivement les traitements chimiques. Globalement, il en ressort que les communes du Parc sont prêtes à s engager dans une démarche de réduction ou de suppression des pesticides. Le Parc, au travers le soutien financier de l Agence de l eau, a pu accompagner ces communes vers cette voie. Notre objectif est de pouvoir continuer à accompagner les collectivités et les entreprises de notre territoire dans un programme de réduction de l usage des produits phytosanitaires. Afin de continuer ces actions, le Parc du Luberon a déposé un dossier de demande de financement en juillet 2012 auprès de l Agence de l eau et de la Région PACA, afin de programmer de nombreuses actions de sensibilisation, d information et de formation auprès des collectivités territoriales et les entreprises du paysage du notre territoire. REMERCIEMENTS Remerciements à l Agence de l eau Rhone Méditerranée et Corse qui a financé à hauteur de 80% cette opération. Merci également à la Région PACA qui nous soutient dans la poursuite de cette opération. Remerciements également à la FREDON PACA qui a assuré pour le compte du Parc l animation du programme de formations.