Sillage et trainée d'un obstacle 1 Sillage et trainée d'un obstacle Principe Un obstacle placé au sein d'un écoulement modie ce dernier. Par réaction, l'obstacle subit une force, que l'on décompose en force de trainée et force de portance. Dans la plupart des situations usuelles (dans l'air ou dans l'eau), l'écoulement se fait à haut nombre de Reynolds. C'est notamment le cas dans les expériences de ce T.P. Pour un obstacle non prolé, le sillage comprend alors une zone de recirculation importante, due au décollement des couches limites. Les eorts de trainée subis par l'obstacle sont alors essentiellement dus au déséquilibre des pressions autour de l'obstacle. Le frottement du uide sur les parois de l'obstacle contribue de manière négligeable aux forces sur l'obstacle. Dans ce T.P. on visualisera les perturbations de l'écoulement autour d'un cylindre, puis on mesurera la force de trainée. 1 Dispositif expérimental On dispose d'une souerie dont la veine d'essai présente une section de 20 cm par 30 cm. Le couplage entre les pales et le moteur se fait par un dispositif magnétique, dont l'intensité est réglable. On peut alors xer la vitesse dans la veine d'essai entre 1 m/s et 40 m/s. On peut placer dans la veine d'essai des cylindres de diérents diamètres (entre 2 mm et 5 cm) Un générateur de fumée permet d'ensemencer l'écoulement et de visualiser la zone de recirculation en aval de l'obstacle, notamment à basse vitesse. La vitesse de l'écoulement est mesurée grâce à un tube de pitot. 2 Force de trainée et de portance, dénition du C x La force totale exercée sur un obstacle se décompose en une force de trainée T parallèle à la direction de l'écoulement, et une force de portance P, perpendiculaire à l'écoulement. Pour des raisons de symétrie évidente, la portance sur le cylindre est nulle. Au contraire une aile d'avion, ou une voile de bateau présente un extrados le long duquel les lets uides sont accélérés. La diérence de pression entre les faces de l'aile crée une force de portance. La force de trainée, tend à entrainer l'obstacle avec l'écoulement. Dans le cas d'un objet se déplaçant dans un uide au repos, c'est la force qui s'oppose au déplacement. P F U T L'amplitude de ces forces dépend des caractéristiques du uide (de sa densité ρ et de sa viscosité cinématique ν), de la vitesse de l'écoulement U, et des dimensions caractéristiques de l'obstacle. On choisit (on justiera ce choix) de normaliser les forces de trainée par la force inertielle caractéristique (1/2)SρU 2 où S désigne la surface de l'obstacle, projetée sur la direction perpendiculaire à l'écoulement. On dénit ainsi le coecient de trainée : C x = T (1/2)SρU 2 (1) Par analyse dimensionnelle, pour une géométrie de l'obstacle donnée, on voit que C x n'est fonction que du nombre de Reynolds de l'écoulement. Comment déniriez-vous un coecient de portance?
Sillage et trainée d'un obstacle 2 3 Détermination des eorts sur le cylindre Le problème est invariant par translation suivant l'axe du cylindre. On peut donc se ramener à un problème bidimensionnel. Les forces de trainée, de portance, sont calculées pour une unité de longueur dans la direction invariante. 3.1 Bilan de quantité de mouvement : méthode de Pitot Pour déterminer les forces de trainée on réalise un bilan de quantité de mouvement sur un volume de contrôle ABCD de l'écoulement. Si le volume de contrôle est pris susament large, on pourra négliger les perturbations de l'écoulement et considérer que les champs de vitesse et de pression ne sont perturbés que sur la face avale du volume de contrôle. Les forces exercées par le cylindre sur le uide ( F = T ), ainsi que les forces de pression P contribuent au bilan de quantité de mouvement. On a F = P + Φ sortant ( p) Φ entrant ( p) (2) (on néglige ici les pertes de charges dues aux parois de la souerie). On rappelle que le ux de quantité de mouvement à travers une surface est Φ = u. ds p Σ où p = ρ u est la densité volumique de quantité de mouvement. Écrire le bilan de quantité de mouvement en fonction des prols de vitesses et de pression. y U A B y u(y) y x D On peut donc, à partir de la comparaison des prols de vitesse en amont et en aval de l'obstacle, déterminer les forces de trainée et de portance. C 4 Manipulation 4.1 Visualisation À faible vitesse (maximum environ 2 m/s), on peut ensemencer l'écoulement avec de la fumée. Quels sont les diérents régimes d'écoulement que l'on peut observer? À quelle gamme de Re correspondent-ils? On portera une attention particulière à la position des points de décolement des couches limites (on regardera notamment comment celle-ci dépend de la vitesse de l'écoulement). 4.2 Champ de vitesse Pour mesurer le prol de vitesse on utilise un tube de Pitot (voir annexe). Étant donnée la sensibilité du manomètre à disposition (on mesure le mm d'eau), dans quelle gamme de vitesse pourra-t-on réaliser des mesures de vitesses? Établir le prol de vitesse dans la souerie en l'absence d'obstacle. On mesure ainsi la qualité de l'écoulement d'air dans la souerie.
Sillage et trainée d'un obstacle 3 4.3 Évaluation de la trainée Choisir un cylindre, et xer la vitesse de l'écoulement, de telle sorte que son sillage soit turbulent (Re > 300) Tracer les prols de vitesses et de pression amont et aval au cylindre. pour faciliter les calculs de la trainée, on aura intérêt à relever vitesse et pression en des points régulièrement espacés. Fixer une nouvelle vitesse pour l'écoulement. Comparer les nouveaux prols de vitesse et de pression aux précédents. À partir du bilan de quantité de mouvement, calculer la trainée du cylindre pour les Reynolds auxquels vous avez travaillé. En déduire la valeur du C x. 4.4 Si il reste du temps... On pourra, calculer le C x d'un cylindre de taille diérente.
Sillage et trainée d'un obstacle 4 A A propos de l'écoulement autour du cylindre A.1 Diérents régimes d'écoulement En fonction du nombre de Reynolds l'écoulement autour d'un cylindre présente diérents régimes : Re < 5 On est en régime visqueux, les lignes de courants sont parfaitement symétriques (entre l'amont et l'aval du cylindre), les forces sur le cylindre sont essentiellement d'origine visqueuse. Re = 0.16 et Re = 1.54. 5 < Re < 44 En aval du cylindre on observe une zone de recirculation, formée de tourbillons qui restent attachés au cylindre. Re = 26. 44 < Re < 300 En aval du cylindre on observe une allée de tourbillons alternés (allée de Bénard von Karman). L'écoulement est très périodique. Re = 140. 300 < Re < 3.10 5 Le détachement des tourbillons devient irrégulier, l'écoulement en aval du cylindre est turbulent. Re = 10 4. Re > 3.10 5 les couches limites, jusque-là laminaires, deviennent turbulentes. Elles restent attachées plus longtemps au cylindre, ce qui reduit la zone de recirculation, et se traduit par une chute brutale du coecient de trainée.
Sillage et trainée d'un obstacle 5 A.2 Séparation des couches limites, et zone de recirculation. À haut nombre de Reynolds (dès Re > 5 pour un cylindre), les forces visqueuses sont négligeables au sein de l'écoulement. Une particule uide passant au large de l'obstacle conserve son énergie mécanique totale, et entre l'amont et l'aval du cylindre, comme la vitesse n'est pas modiée (conservation du débit), la pression est conservée (Théorème de Bernouilli). Cependant, pour une particule uide passant au ras de l'obstacle (à l'intérieur de la couche limite), les eets visqueux ne sont pas négligeables (la présence d'une paroi impose une vitesse nulle, et de fort gradients de vitesse). Au nez de l'obstacle, la vitesse est nulle (on a un point d'arrêt), et toute l'énergie de la particule uide est sous forme potentielle (sous forme de pression). Puis la particule contourne l'obstacle en accélérant. Elle convertit son énergie potentielle en énergie cinétique d'une part, et en dissipe une autre part. Au faît de l'obstacle, la vitesse est maximale, puis la particule ralentit retransformant son énergie cinétique en énergie potentielle. Cependant, l'énergie mécanique dans ces lignes de courant est diminuée, et est plus faible que pour les lignes de courant au sein du uide. Il y a donc dans le sillage de l'obstacle un gradient de pression adverse, et un écoulement à contre courant. On note de plus que, dans le régime d'écoulement turbulent (Re > 300), l'épaisseur caractéristique de la couche limite est δ = DRe 1/2. L'intensité de la dissipation visqueuse est ρνu/δ 2 ρu 2 /D. L'énergie cinétique transportée par le uide est proportionnelle à ρu 2. Elle sera donc dissipée sur une longeur proportionnelle au diamètre du cylindre. Or le point de séparation des couches limites correspond au point où toute l'énergie initialement disponible a été dissipée : le uide n'a plus alors d'énergie pour aller à l'encontre du gradient de pression inverse. On comprend alors pourquoi la position du décollement des couches limites est indépendante de la vitesse de l'écoulement et du diamètre du cylinde. A.3 Le cas du uide parfait Il est intéressant de comparer l'écoulement réel avec celui d'un uide parfait : l'absence de viscosité n'impose plus de condition de non glissement à la paroi du cylindre, ni de dissipation d'énergie près de celle-ci. On peut alors calculer un champ de vitesse permanent, compatible avec les équations d'euler. Cependant ce champ de vitesse à très peu de signication physique. Outre que les uides parfait n'existent pas, cette solution de l'équation d'euler n'est pas stable. C'est pour cela d'ailleurs qu'elle ne représentent pas correctement les écoulements à grand nombre de Reynolds. En coordonnées cylindrique le champ de vitesse est donné par u r = U cos(θ)(1 R 2 /r 2 ) u θ = U sin(θ)(1 + R 2 /r 2 ) et le champ de pression à la surface du cylindre P (θ) = P + 1 2 ρu 2 (1 4 sin 2 (θ)) - Sens de l'écoulement + + - Lignes de courant et champ de pression pour l'écoulement d'un uide parfait autour d'un cylindre. Dans ce cas, les particules uides arrivant sur le cylindre le contournent en augmentant leur vitesse. Leur énergie cinétique augmente, et leur énergie potentielle stockée sous forme de pression diminue, jusqu'à l'azimuth θ = Π/2. Puis, la vitesse et l'énergie cinétique rediminuent, en même temps que la pression remonte. La viscosité étant nulle, il n'y a aucune dissipation d'énergie et les lignes de courant restent attachées au cylindre, contrairement à un écoulement réel.
Sillage et trainée d'un obstacle 6 B Le tube de pitot Pour mesurer une vitesse on peut utiliser un tube de Pitot. Ce système est notamment utiliser sur les avions. Le principe est d'introduire dans l'écoulement un obstable prolé. Celui-ci perturbe très peu l'écoulement, cependant, au point amont de l'obstacle on crée un point d'arrêt (de vitesse nulle). Les lignes de courant contournent l'obstacle, et le uide reprend sa vitesse initiale (celle que l'on veut mesurée). Sur ces lignes de courant il existe donc un point aval, où la vitesse est celle de l'écoulement principal (et que l'on cherche à mesurer), et un point amont où la vitesse est nulle (et donc connue). On mesure la diérence de pression entre ces deux points. Celle-ci est reliée, par le théorème de Bernouilli, à la diérence du carré des vitesses. 1 2 ρ fluide v 2 = P On mesure ainsi la vitesse de l'écoulement. C Le générateur de fumée On fait circuler dans un l résistif (d'une résistivité de l'ordre de 100Ω/m), un courant électrique de l'ordre de 1 A. Par eet Joule, ce dernier chaue, et vaporise un mélange d'ethanol et de glycérine (avec quelques traces de produit tensio-actifs pour favoriser le mouillage de l). Ce dispositif produit un rideau de fumée, qui est entrainé par l'écoulement principal. Si l'écoulement à une vitesse trop faible (moins de 0.3 m/s) les eets de ottabilité ne sont plus négligables, et au delà de quelques mètres par seconde, le rideau est trop dilué pour permettre une visualisation correcte de l'écoulement. D Références Boundary-Layer Theory, H. Schlichting, McGraw-Hill book company, 1950 An introduction to uid dynamic, G.K. Batchelor, Cambridge University Press, 1967. Les images sont extraites de : An album of uid motion, M. Van Dyke, Parabolic Press, 1982.