LE BONHEUR (Charles Ritter) Charles Ritter 29 rue de Lagny 94300 Vincennes 06 71 79 40 36 ch.ritter@wanadoo.fr Note d intention Après plusieurs films auto-produits à caractère nettement conceptuel, le désir de réaliser mon projet «Le bonheur» me fera revenir sur un travail de narration plus classique. Sans doute plus accessible, ce projet présente cependant deux caractéristiques qui pour moi importent le plus : son universalité, et une dimension très personnelle. Ici, c est ma propre fille de 3 ans que je projette dans un possible avenir de jeune mère se remémorant ses premiers moments de bonheur d enfance. A cet égard, le film propose également une réflexion sur le souvenir et ses représentations : les photos d enfance avec lesquelles on grandit sont-elles des portes que l on peut ouvrir à la faveur d un «syndrome de la madeleine de Proust»? C est en tout cas ce que le film évoque ici. Synopsis : Un geste anodin fait resurgir dans la mémoire d une jeune femme un instant de bonheur d enfance.
Continuité dialoguée : 1. APPARTEMENT JOUR Le visage d une jeune femme (Noémie-adulte). Assise au seuil d un balcon d un appartement, elle semble attendrie par une lecture. La page qu elle tourne est celle d un album photo. Un enfant vient sur ses genoux, mais elle semble s adresser à quelqu un d autre, hors-champ : «En fait, de la petite enfance, on ne se rappelle que des photos. Jamais de l événement qui leur est lié. On grandit avec l image de ces photos. Mais je crois que le souvenir de l instant vécu reste inaccessible. En tout cas à cet âge là» Pas de réponse. Elle tourne une autre page. On entend bien le bruit délicat des fines feuilles intercalaires. «Qu est-ce que tu en penses?» Elle sourit à une nouvelle photo. (carton titre : «le bonheur» en caractères minuscules et très petits) 2. JARDIN PRIVATIF Noémie, 3ans, arrose les fleurs d un grand bac dans un jardin privatif, avec un arrosoir vert miniature.
Sa maman (off) : «Elle est vraiment très concentrée. Ça fait une demi-heure qu elle est là, avec son arrosoir» Son papa (off) : «Tu crois qu elle s en rappellera, de ses premières vacances ici, chez ses cousins. C est un peu juste, trois ans, non? Tiens, on va faire une photo. Tu viens, Noémie? Viens avec Papa, Maman fait la photo» Son papa vient poser avec elle sur la photo. Rires. L image se fige en photographie. 3. JARDIN PUBLIC (avec inserts Appartement Jour* et Jardin privatif **) Dans un grand jardin public, une jeune femme (Noémie-adulte) se promène avec une petite fille d environ 8 ans. Une amie (Clara) avec une poussette les accompagne. Elles tiennent une conversation banale sur la rentrée des classes et les vacances d été passées. «Et en juillet, on a été voir de la famille en Italie» «Ah oui, c est vrai que vous avez de la famille là-bas» «Depuis le temps qu on voulait y aller! C était un peu un retour aux sources pour moi. J y passais mes vacances, quand j étais enfant. La petite ne les connaissait pas encore» petite!» «La petite». Tu te rends compte, Betteline. Ta maman t appelle encore sa
Betteline : «Ben oui, maman! Par rapport au bébé de Clara, quand même!» Rires. «C est vrai qu on est toujours la petite de quelqu un. A propos, Betteline ( )» Le regard de Noémie-adulte se fixe sur un point, un peu plus loin. «Tiens, c est curieux, là, on dirait» L amie à la poussette et la petite fille ne relèvent pas la remarque et continuent à parler entre eux à propos de la rentrée. Noémie-adulte se rapproche d un arrosoir vert miniature, abandonné sur un bac à fleur. Elle se saisit de l arrosoir, l observe, regarde autour d elle, mime le geste d arroser, répète le geste, le suspend. On entend des voix déjà entendues, entremêlées : ** «très concentrée sur la chose. Ça fait une demi-heure qu elle est là / qu elle se rappellera, de ses premières vacances / Viens avec Papa, Maman fait la photo» ** On voit fugitivement l image du papa qui vient à côté de Noémieenfant poser pour la photo. * Noémie-adulte (off, à quelqu un) : «de la petite enfance, on ne se rappelle que des photos ( ) je crois que le souvenir de l instant» * On voit fugitivement Noémie-adulte qui feuillette un album photo chez elle.
Les voix s entremêlent, alors que Noémie-adulte, l arrosoir en main dans le jardin public, répète le geste lentement, comme pour fixer le souvenir. ** La photo de Noémie-enfant avec son papa et l arrosoir vert. Soudain, la photo s anime, devient scène de film. On voit la suite de la scène de la pose photo, au milieu des rires partagés. Des flots d images de bonheur d enfance surgissent à la conscience de Noémie-adulte (envolée musicale). Une voix (Clara) : «Noémie? ça ne va pas? Tu ne te sens pas bien?» Dans le jardin public, Noémie-adulte s est accroupie. Elle a pris son visage dans les mains. Son amie à la poussette s inquiète, se rapproche, ainsi que l enfant. Noémie-adulte découvre son visage, en larmes, des larmes de bonheur. «Non. Ça va bien. Au contraire. Un souvenir. J étais gamine. C était Mon Dieu» Noémie-adulte prend la petite fille dans les bras : «Mon chéri. Je me suis souvenu de ton grand-père, tout-à-coup Et de ma maman aussi (à son amie : ) Excuse-moi, Clara» Son amie Clara l enlace, souriante et compatissante. Noémie-adulte a du mal a reprendre le chemin, à laisser l arrosoir vert. Ils s éloignent du bac à fleurs, et se perdent dans le parc. Un couple d adolescents qui les suivait se rapproche du bac à fleurs. Le garçon remarque l arrosoir, s en empare, taquine sa jeune amie en faisant mine de l arroser. Elle se défend par jeu, et ils s embrassent furtivement (sans doute un premier baiser). Puis le garçon balance l arrosoir dans le bac à fleurs, et ils poursuivent leur chemin. Mais la jeune fille revient chercher l arrosoir, rejoint son jeune amoureux, et ils se perdent ensemble au loin dans le parc.