ELEPHANTS Création La Loge Paris 7 / 8 / 9 / 10 Mars 2017 «Les tyrans eux-mêmes trouvaient étrange que les hommes puissent supporter d être maltraité à ce point. C est pourquoi ils se sont toujours couverts du manteau de la religion. Et s affublaient des signes de la divinité pour cautionner leur sale vie. Et ceux d aujourd hui ne font pas mieux. Avant de commettre leurs crimes les plus graves. Ils les font toujours précéder par quelques jolis discours sur le bien public. La liberté. Et la défense des malheureux.» D'après «Le discours de la servitude volontaire», Étienne de La Boétie - 1576 Traduction en français actuel de Ludovic Pouzerate - 2016 Avec Ludovic Pouzerate et Besoin Dead Complicité artistique Étienne Parc Direction de production Dantès Pigeard Production Mushotoku-Warai. Avec le soutient du Collectif 12 Mantes la jolie et de Confluences.
Éléphants est un duo. Duo entre Ludovic Pouzerate, acteur de formation, et Besoin Dead, projet solo d'un musicien hors norme, Pascal Benvenuti. Batterie, guitares préparées en percussions, micro HF, Besoin Dead est une expérimentation post-punk à la puissance jubilatoire. C'est par la rencontre de la parole et de la puissance du post-punk de Besoin Dead que nous tentons de rendre toute la force de la pensée de La Boétie Écrit en 1576 "Le discours de la servitude volontaire" fait partie des classiques de la pensée politique Française. Ludovic Pouzerate l'avait lu il y a de nombreuses années jusqu'à ce qu'une certaine nuit ce texte lui revienne en mémoire. Le relisant dans la foulée il ressent alors la pure nécessité d'apprendre ce texte et de travailler cette pensée, et ce bien que ce désir premier ne soit pas un désir de «spectacle» ou de «création théâtrale». Dans notre époque faite de tant de déchirures son désir premier est alors très égoïstement de se donner des armes intellectuelles solides afin de ne pas se faire emporter par les manigances et manipulations permanentes du pouvoir aujourd'hui. Connaissant le processus d'incarnation de l'acteur, son désir est d'abord celui d'un apprentissage, et même d'une auto-éducation. Ce n'est ensuite qu'au fur et à mesure de la réécriture du texte que bouleversé par certaines pages il a le désir de partager cette pensée en public. Pensée qui analyse si finement les rapports de domination et de servitude, une analyse complexe, excluant tout manichéisme, toute simplification dans la lecture du monde et de notre société.
De 1576 à 2016. Pauvres et misérables peuples insensés, nations opiniâtres en votre mal et aveugles en votre bien, vous vous laissez emporter devant vous le plus beau et le plus clair de votre revenu, piller vos champs, voler vos maisons et les dépouiller des meubles anciens et paternels! Vous vivez de sorte que vous ne vous pouvez vanter que rien soit à vous ; et semblerait que meshui ce vous serait grand heur de tenir à ferme vos biens, vos familles et vos vies ; et tout ce dégât, ce malheur, cette ruine, vous vient, non pas des ennemis, mais certes oui bien de l ennemi, et de celui que vous faites si grand qu il est, pour lequel vous allez si courageusement à la guerre, pour la grandeur duquel vous ne refusez point de présenter à la mort vos personnes. Celui qui vous maîtrise tant n a que deux yeux, n a que deux mains, n a qu un corps, et n a autre chose que ce qu a le moindre homme du grand et infini nombre de nos villes, sinon que l avantage que vous lui faites pour vous détruire. D où a-t-il pris tant d yeux, dont il vous épie, si vous ne les lui baillez? Comment a-t-il tant de mains pour vous frapper, s il ne les prend de vous? Les pieds dont il foule vos cités, d où les a-til, s ils ne sont des vôtres? Comment a-t-il aucun pouvoir sur vous, que par vous? Comment vous oserait-il courir sus, s il n avait intelligence avec vous? Que vous pourrait-il faire, si vous n étiez receleurs du larron qui vous pille, complices du meurtrier qui vous tue et traîtres à vous-mêmes? Vous semez vos fruits, afin qu il en fasse le dégât ; vous meublez et remplissez vos maisons, afin de fournir à ses pilleries ; vous nourrissez vos filles, afin qu il ait de quoi soûler sa luxure ; vous nourrissez vos enfants, afin que, pour le mieux qu il leur saurait faire, il les mène en ses guerres, qu il les conduise à la boucherie, qu il les fasse les ministres de ses convoitises, et les exécuteurs de ses vengeances ; vous rompez à la peine vos personnes, afin qu il se puisse mignarder en ses délices et se vautrer dans les sales et vilains plaisirs ; vous vous affaiblissez, afin de le rendre plus fort et roide à vous tenir plus courte la bride ; et de tant d indignités, que les bêtes mêmes ou ne les sentiraient point, ou ne l endureraient point, vous pouvez vous en délivrer, si vous l essayez, non pas de vous en délivrer, mais seulement de le vouloir faire. Soyez résolus de ne servir plus, et vous voilà libres. Je ne veux pas que vous le poussiez ou l ébranliez, mais seulement ne le soutenez plus, et vous le verrez, comme un grand colosse à qui on a dérobé sa base, de son poids même fondre en bas et se rompre. Discours de la servitude volontaire - 1576 Pauvres. Misérables peuples insensés. Attachés à votre mal. Et aveugles à votre bien. Sous votre nez vous vous faites voler le plus gros de vos revenus. Piller vos champs. Vider vos maisons des meubles de vos ancêtres. Rien n'est plus à vous. Et vous applaudissez. Et vous vivez comme une joie qu'on ne vous laisse que la moitié de vos biens. De vos familles. De vos vies. Et ce désastre ce malheur cette ruine. Ne vous vient pas d'ennemis. Mais bien de celui que vous avez vous même rendu fort comme il est. De celui pour lequel vous allez si courageusement à la guerre. Et pour lequel vous ne refusez même pas de vous sacrifier. Ce maitre n'a pourtant que deux yeux. Deux mains. Un seul corps. Et rien de plus que n'importe lequel des habitants de l'une de nos villes. Rien de plus à part ce que vous lui fournissez vousmême pour vous détruire. Ou trouve-t-il tous ces yeux pour vous surveiller? Si ce n'est chez vous même? Ou trouve-til tous ces poings pour vous tabasser? Si ce n'est chez vous même? Les pieds avec lesquels il piétine vos villes. Ou les trouve-t-il si ce n'est parmi vous? A-t-il d'autre pouvoir sur vous que celui qui lui vient de vous-même? Comment oserait-il vous harceler s'il n'était pas de mèche avec vous? Qu'est-ce qu'il pourrait vous faire? Si vous n'étiez pas les complices du pervers qui vous viole? Du meurtrier qui vous tue? Et les traitres de vous-même? Vous cultivez vos champs pour qu'il les pille. Vous remplissez vos maisons pour qu'il les cambriole. Vous éduquez vos filles pour qu'il puisse les baiser. Vous élevez vos enfants pour qu'il les envoie à la guerre. A l'abattoir. Qu'il en fasse les communicants de ses prédations. Et les exécutants de ses vengeances. Vous vous tuez au travail pour qu'il s'engraisse dans la luxure. Pour qu'il se vautre dans ses plaisirs tordus. Vous vous affaiblissez pour le rendre toujours plus fort. Pour qu'il vous tienne toujours plus fermement en laisse. Et de toutes ces humiliations. Que même un animal si il les sentait ne pourrait pas supporter. Vous pourriez vous délivrer. Si vous vouliez bien. Même pas vous délivrer. Mais seulement le souhaiter. Soyez convaincus de ne plus servir. Et vous voilà libres. Je ne vous invite même pas à combattre le tyran. Ni à chercher à l'abattre. Mais seulement à ne plus le soutenir. Et vous le verrez alors comme un géant de pierre. Auquel on a fait sauter la base. S'écrouler sur lui-même. Et se briser. Traduction en Français actuel Ludovic POUZERATE
LUDOVIC POUZERATE est acteur auteur et metteur en scène. Il se forme aux Ateliers du Sapajou dirigés par Annie Noël Reggiani (1997-1999), puis avec Gennadi Bogdanov du GITIS et Zygmunt Molik du Théâtre Laboratoire. Après avoir joué pendant plus de dix ans (Notamment avec Arnaud Meunier, Christine Letailleur, puis Nicolas Kerszenbaum), il se consacre en priorité à partir de 2006 à l'écriture et à la mise en scène, cherchant à faire entendre une part de la parole des "invisibles" d'aujourd'hui. Après avoir créer ses textes Moi-Je / Wouf-Wouf!, La chaîne, Grands espaces, à Mains d'oeuvres et Confluences, il crée BRÛLE! en 2011 au Théâtre Gérard Philippe Centre Dramatique National de Saint Denis, et Grandir au Nouveau Théâtre de Montreuil CDN lors du Festival 360 en 2013. Plusieurs de ses textes sont édités en livres ou en revues. BESOIN DEAD est le projet solo de Pascal Benvenuti, bassiste des Louise Mitchels et de La Fraction. Une installation comprenant une batterie, deux guitares préparées en percussion et du chant. La performance est techniquement ambitieuse, et demande un extrême contrôle comme une parfaite coordination dans la mesure où celui-ci n utilise ni boucle ni sons pré-enregistrés. En résulte une musique forcément profondément prenante, puisque l on se laisse absorber par le déroulement de morceaux qui se dressent chacun à leur façon comme un intense combat.
Mushotoku-Warai association 41 rue de Nantes 75019 Paris Siret : 80788749200013 APE : 9001Z Licence 2-1088380 - DLC : 17 / 11 / 2018 Production et diffusion : Dantès Pigeard production.mushotokuwarai@gmail.com + 33 6 01 98 98 97