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Transcription:

14 OCTOBRE 2010 C.09.0608.F/1 Cour de cassation de Belgique Arrêt N C.09.0608.F G. M.-M., demanderesse en cassation, représentée par Maître François T Kint, avocat à la Cour de cassation, dont le cabinet est établi à Charleroi, rue de l Athénée, 9, où il est fait élection de domicile, contre L. C., défendeur en cassation, représenté par Maître Jacqueline Oosterbosch, avocat à la Cour de cassation, dont le cabinet est établi à Liège, rue de Chaudfontaine, 11, où il est fait élection de domicile.

14 OCTOBRE 2010 C.09.0608.F/2 I. La procédure devant la Cour Le pourvoi en cassation est dirigé contre le jugement rendu le 30 juin 2009 par le tribunal de première instance de Tournai, statuant en degré d appel. Le conseiller Sylviane Velu a fait rapport. L avocat général Thierry Werquin a conclu. II. Le moyen de cassation La demanderesse présente un moyen libellé dans les termes suivants : Dispositions légales violées - article 23 de la Constitution ; - articles 1134, spécialement alinéa 3, 1382 et 1383 du Code civil ; - principe général du droit aux termes duquel nul ne peut abuser de son droit. Décisions et motifs critiqués Le jugement attaqué fait droit à la demande du défendeur de suppression de la pension alimentaire qu'il payait à son épouse en exécution des conventions préalables au divorce par consentement mutuel des parties reçues devant notaires le 26 septembre 1979. Le jugement attaqué relève :

14 OCTOBRE 2010 C.09.0608.F/3 «[Le défendeur] fait valoir que la pension alimentaire après divorce, fixée à partir du 1 er octobre 1979 à 8.500 francs (210,71 euros) par mois, s'élève actuellement, par le jeu de l'indexation, à 568,91 euros par mois alors que ses propres revenus ne sont que de 1.040,49 euros par mois tandis que les revenus de [la demanderesse] se chiffrent à 1.050,10 euros par mois et que cette dernière a formé un nouveau ménage avec un sieur G. P. Il considère que cette situation est contraire à la législation applicable depuis la loi du 27 avril 2007 réformant le divorce, qu'elle constitue un abus de droit ou, à tout le moins, une violation de l'article 23 de la Constitution consacrant le droit de mener une vie conforme à la dignité humaine». Le jugement attaqué décide ensuite que l'ancien article 301 du Code civil demeure d'application aux conventions préalables au divorce par consentement mutuel des parties dès lors que celles-ci sont antérieures à la modification de ce texte par la loi du 27 avril 2007 réformant le divorce. Et ce jugement relève, en faisant sienne la jurisprudence de la Cour [de cassation], que la clause des conventions préalables au divorce par consentement mutuel «par laquelle l'un des époux s'engage à payer à l'autre époux une pension alimentaire qui n'est pas une dette alimentaire légale est uniquement soumise aux règles du droit des obligations, ce qui signifie qu'une adaptation n'est donc possible que si les parties ont prévu une clause de révision et d'adaptation dans la convention tandis que l'adaptation par le juge des pensions alimentaires entre ex-époux après divorce par consentement mutuel à de nouvelles circonstances nées par suite d'événements imprévus lors de la conclusion de la convention est contraire à l'article 1134 du Code civil» et que «cette théorie [...] a été entérinée par la Cour constitutionnelle [ ] qui a dit pour droit que les articles 301, 307bis et 1134 du Code civil et l'article 1288 du Code judiciaire ne violent pas les articles 10 et 11 de la Constitution en tant qu'une modification de la pension alimentaire à payer par l'un des époux à l'autre, après un divorce par consentement mutuel, n'est possible que de l'accord des époux divorcés ou en application des règles du droit commun des obligations».

14 OCTOBRE 2010 C.09.0608.F/4 Contrairement au principe qu'il énonce, le jugement attaqué supprime cependant la pension alimentaire convenue par les parties par les motifs suivants : «Il n'en demeure donc pas moins que l'exercice d'un droit d'une manière qui dépasse les limites de son exercice normal par une personne prudente et diligente constitue, sur la base de l'article 1382 du Code civil, un abus de droit. Or, en l'espèce, [la demanderesse] continue d'exiger le paiement de la pension alimentaire convenue dans le cadre de son divorce par consentement mutuel alors que : - cette convention est ancienne de près de trente ans ; - elle a formé un nouveau ménage ; - elle bénéficie de revenus personnels équivalents à ceux de son exépoux ; - le paiement de cette pension alimentaire grève les revenus [du défendeur] au point de ne lui laisser que des ressources inférieures au revenu d'intégration sociale pour une personne isolée, prévu par la loi du 26 mai 2002 remplaçant la loi du 7 août 1974 instituant le droit à un minimum de moyens d'existence ; - rien n'indique que cette situation soit d'une quelconque manière imputable [au défendeur], l'indexation de la pension alimentaire convenue ayant évolué de manière disproportionnée par rapport à ses revenus qui sont constitués d'une pension de l'office national des pensions. La réunion de l'ensemble de ces circonstances particulières rend abusive la poursuite de l'exécution de la convention du 26 septembre 1979 relative au paiement d'une pension alimentaire après divorce par [le défendeur] au profit de [la demanderesse]. A cet égard, la référence à l'article 23 de la Constitution n'est pas sans pertinence puisqu'il ne peut pas être admis que l'exécution d'une convention puisse justifier la violation du droit d'un individu à la dignité humaine. Tel est bien le cas en l'espèce dans la mesure où, ainsi qu'il a été évoqué ci-dessus, le

14 OCTOBRE 2010 C.09.0608.F/5 solde disponible [du défendeur], après paiement de la pension alimentaire litigieuse, n'est plus que de 471,58 euros par mois, soit un montant inférieur au revenu d'intégration sociale». Griefs L'abus de droit est caractérisé par la circonstance que le titulaire d'un droit use de celui-ci dans l'intention exclusive de nuire à autrui ou sans intérêt raisonnable et suffisant. Il en est ainsi lorsque le préjudice causé au tiers est hors de toute proportion avec l'avantage recherché ou obtenu par le titulaire du droit. L'abus de droit est donc caractérisé par l'exercice d'un droit de manière déraisonnable, disproportionnée, qui dépasse les limites de son exercice normal et, lorsque ce droit trouve sa cause dans une convention, est contraire à l'exécution de bonne foi de cette convention. Or, il se déduit des motifs critiqués [du jugement attaqué] que la demanderesse, en contestant la demande de suppression de la pension alimentaire et, en conséquence, en demandant le maintien de celle-ci, n'exerce pas le droit à cette pension, qu'elle puise dans les conventions préalables au divorce par consentement mutuel des parties, de manière déraisonnable, disproportionnée, dépassant l'exercice de ce droit ou contraire à son exécution de bonne foi. L'avantage qu'elle retire de l'exercice de ce droit de même que le préjudice que peut causer au défendeur l'exercice de celui-ci ont été convenus en connaissance de cause. L'article 301 ancien du Code civil, en effet, autorisait les parties à prévoir, dans les conventions préalables à leur divorce par consentement mutuel, que la pension alimentaire convenue pouvait être modifiée ou supprimée par le juge, ce qu'elles ont omis de faire.

14 OCTOBRE 2010 C.09.0608.F/6 Si le montant de la pension due par le défendeur s'est accru en raison de l'indexation, c'est que celle-ci a été prévue dans les conventions. Il s'en déduit que la demanderesse n'abuse pas de son droit en demandant l'exécution de ces conventions, même si les revenus et charges des parties ont pu être modifiés, circonstance prévisible ou, à tout le moins, possible et dont les parties ont exclu, en n'insérant pas la clause visée ci-avant dans les conventions, qu'elle puisse être de nature à conduire à la modification ou à la suppression de la pension. Il s'ensuit qu'en supprimant la pension au motif que la demanderesse abuserait de son droit en s'opposant à la demande du défendeur et en demandant le maintien de la pension, [le jugement attaqué] ne justifie pas légalement sa décision (violation des articles 1134, spécialement alinéa 3, 1382 et 1383 du Code civil et du principe général du droit visé). L'article 23 de la Constitution ne saurait faire obstacle à l'exécution des conventions légalement conclues entre les parties. En décidant le contraire pour justifier la suppression de la pension alimentaire convenue, le jugement attaqué viole aussi cette disposition. III. La décision de la Cour La convention conclue sur la base de l article 1288, 4, du Code judiciaire, par laquelle un époux a contracté l obligation de payer à son conjoint une pension alimentaire, qui n est pas une dette d aliments légale, est soumise aux règles qui régissent les conventions. Si la convention légalement formée tient lieu de loi aux parties et ne peut être révoquée que de leur consentement mutuel ou pour les causes que la loi autorise, elle doit cependant être exécutée de bonne foi et sans abus de droit. L abus de droit consiste à exercer un droit d une manière qui excède manifestement les limites de l exercice normal de ce droit par une personne prudente et diligente. Tel est le cas spécialement lorsque le préjudice causé est sans proportion avec l avantage recherché ou obtenu par le titulaire du droit.

14 OCTOBRE 2010 C.09.0608.F/7 Le jugement attaqué constate qu à l appui de sa demande de suppression de la pension alimentaire qu il paie à la demanderesse sur la base de la convention préalable à leur divorce par consentement mutuel, le défendeur fait valoir que cette pension, fixée à partir du 1 er octobre 1979 à 8.500 francs, soit 210,71 euros, par mois, s élève actuellement, par le jeu de l indexation, à 568,91 euros par mois, ses propres revenus n étant que de 1.040,49 euros par mois, et que les revenus de la demanderesse se chiffrent à 1.050,10 euros par mois. Le jugement attaqué énonce que la demanderesse «continue d exiger le paiement de [cette] pension alimentaire [ ] alors que : - cette convention est ancienne de près de trente ans ; - elle a formé un nouveau ménage ; - elle bénéficie de revenus personnels équivalents à ceux de son exépoux ; - le paiement de cette pension alimentaire grève les revenus [du défendeur] au point de ne lui laisser que des ressources inférieures au revenu d intégration sociale pour une personne isolée, prévu par la loi du 26 mai 2002 remplaçant la loi du 7 août 1974 instituant le droit à un minimum de moyens d existence ; - rien n indique que cette situation soit d une quelconque manière imputable» au défendeur. Le jugement attaqué relève, en outre, que la poursuite de l exécution de la convention préalable au divorce des parties impliquerait, par la réduction des revenus qu elle laisserait au défendeur, la violation de son droit à mener une vie conforme à la dignité humaine, consacré par l article 23 de la Constitution. Sur la base de ces énonciations, le jugement attaqué a pu légalement considérer que la poursuite par la demanderesse de l exécution de ladite convention était constitutive d un abus de droit et ordonner la suppression de la pension litigieuse sans violer les articles 23 de la Constitution, 1134, 1382 et 1383 du Code civil ni méconnaître le principe général du droit qui prohibe l abus de droit.

14 OCTOBRE 2010 C.09.0608.F/8 Le moyen ne peut être accueilli. Par ces motifs, La Cour Rejette le pourvoi ; Condamne la demanderesse aux dépens. Les dépens taxés à la somme de six cent soixante-quatre euros vingt et un centimes envers la partie demanderesse et à la somme de cent seize euros soixante centimes envers la partie défenderesse. Ainsi jugé par la Cour de cassation, première chambre, à Bruxelles, où siégeaient le président Christian Storck, les conseillers Didier Batselé, Albert Fettweis, Christine Matray et Sylviane Velu, et prononcé en audience publique du quatorze octobre deux mille dix par le président Christian Storck, en présence de l avocat général Thierry Werquin, avec l assistance du greffier Patricia De Wadripont. P. De Wadripont S. Velu Chr. Matray A. Fettweis D. Batselé Chr. Storck