Chapitre 7 Gouverner la France depuis 1946



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Transcription:

CONCEPTION ET MISE EN PAGE : PAUL MILAN IMPRESSION DU 28 avril 2015 Chapitre 7 Gouverner la France depuis 1946 Table des matières 1 L État sous la IV e République (1946-1958) 3 1.1 La refondation de l État......................... 3 1.2 L extension des pouvoirs de l administration............. 3 1.3 Une instabilité politique aux conséquences limitées......... 4 2 L Etat gaullien 4 2.1 La constitution de la V e République................... 4 2.2 Une puissance publique à son apogée................. 4 2.3 L irruption de la crise économique................... 5 3 Le repli de l État français 5 3.1 Le retrait progressif de la sphère économique............. 5 3.2 La montée de l Europe et des régions.................. 5 3.3 Un recul limité de la puissance publique................ 6 JACQUES EL ALAMI 1 HISTOIRE TERM ES

TABLE DES MATIÈRES Chronologie Histoire politique 1946-1958 : IV e République en France 1958 : Election de De Gaulle à la présidence et début de la Vème République 1962 : Réferendum sur l élection du président de la République au suffrage universel 1969-1974 : Présidence de Georges Pompidou 1974-1981 : Présidence de Valéry Giscard D Estaing 1981-1995 : Présidence de François Mitterrand (première alternance politique) 1986-1988 : Première cohabitation 1993-1995 : Seconde cohabitation 1995 : Election de Jacques Chirac 1995-2002 : Troisième cohabitation 2000 : Loi sur la parité 2000 : Instauration du quinquennat 2002 : Jacques Chirac réélu contre Jean-Marie Le Pen 2007 : Election de Nicolas Sarkozy 2008 : Réforme constitutionnelle qui renforce les pouvoirs du Parlement 2011 : Le Sénat passe à gauche pour la première fois depuis 1958 2012 : Election de François Hollande État et administration 1945 : Création de la Sécurité sociale 1945 : Création de l ENA 1945 : Grandes nationalisations 1946 : Création du Commissriat au Plan 1947 : Loi sur les HLM 1963 : Création de la DATAR 1967 : Premier plan informatique ("Plan Calcul") 1982 : Lois de décentralisation 1986 : Privatisations d entreprises publiques 1988 : Création du RMI (aujourd hui RSA) 2003 : Nouvelle loi de décentralisation. La décentralisation devient un principe constitutionnel. JACQUES EL ALAMI 2 HISTOIRE TERM ES

1 L ÉTAT SOUS LA IV E RÉPUBLIQUE (1946-1958) Introduction En France, l État a précédé la nation. La France a toujours été dirigée par un État fort. Tous les régimes qui se sont succédés depuis le Moyen Âge (la monarchie capétienne, Napoléon...) ont constamment renforcé les pouvoirs de l État et de l administration. Après la Libération, les compétences de l État augmentent encore de façon importante. Puis, avec la V e République, l État devient tout-puissant et le président agit comme un "monarque républicain". Cependant, à partir des années 1970, en raison de la décentralisation, de l intégration européenne et de la mondialisation, l État français commence à s affaiblir. 1 L État sous la IV e République (1946-1958) 1.1 La refondation de l État De 1944 à 1946, la France est dirigée par le Gouvernement Provisoire de la République Française (GPRF) dirigé par De Gaulle qui est à la fois chef du gouvernement et de l État. Le nouveau gouvernement a une tâche énorme à mener à bien tout en accentuant son effort de guerre : reprendre le contrôle des régions libérées où des pouvoirs de fait se sont imposés, faire cesser l épuration sauvage, rétablir les communications... De Gaulle effectue de grands voyages pour réinstaller une administration sur tout le territoire (des commissaires de la République, des CRS...). Le GPRF applique le programme du Conseil National de la Résistance (CNR). Il procède à des nationalisations dans les secteurs-clés : le crédit (BNP, Crédit lyonnais...), l énergie (houillères, électricité), les transports (Air France), l industrie (Renault). Il pose les bases du modèle social français : lois sur les comités d entreprises, sur la Sécurité sociale, sur les HLM... 1.2 L extension des pouvoirs de l administration Continuant l exemple de Vichy, l État embauche massivement des fonctionnaires pour appliquer sa politique économique et sociale. Il publie le Statut de la fonction publique (1946) qui garantit aux agents la sécurité de l emploi, le droit de faire grève et de créer des syndicats. Pour recruter des fonctionnaires, il crée des Instituts d Études Politiques (IEP). Les hauts fonctionnaires sont issus de l École Nationale d Administration (ENA). Les énarques vont jouer un rôle capital dans la reconstruction du pays et dans l expansion économique des Trente Glorieuses car ils assurent la continuité de l action publique et atténuent considérablement les effets de l instabilité politique. Les énarques soudés par un puissant esprit de corps vont constituer rapidement l essentiel du personnel politique et administratif. Les pouvoirs publics vont diriger la reconstruction et la modernisation de la France. En 1946, De Gaulle crée le Commissariat au Plan pour planifier l action de l État en matière économique. L État dirigiste lance de grands projets (barrages, autoroutes, centrales nucléaires...). Le service public emploie 10 % des actifs. JACQUES EL ALAMI 3 HISTOIRE TERM ES

2 L ETAT GAULLIEN 1.3 Une instabilité politique aux conséquences limitées Dès la Libération, les anciens partis politiques (PCF, PS-SFIO...) renaissent et retrouvent une grande audience. Pour rédiger une nouvelle constitution, une première Assemblée Constituante est élue. De Gaulle s oppose aux partis car il veut un pouvoir exécutif fort. Les députés veulent maintenir la suprématie du Parlement. De Gaulle démissionne en Janvier 1946. Il fait rejeter par le peuple le premier projet mais il ne peut empêcher l adoption du second projet de constitution. La IV e République naît en 1947. Le régime est très vite caractérisé par une forte instabilité. Le scrutin proportionnel permet à de nombreux partis d être représentés au Parlement et il ne permet pas la constitution de majorités stables. 22 gouvernements se succèdent en 11 ans et un seul dépasse les 18 mois d existence. Au début, l instabilité a des effets limités car les hauts fonctionnaires sont efficaces. D autre part, les postes-clés sont souvent occupés par les mêmes hommes : entre 1944 et 1954, deux hommes de grande valeur occupent le Quai d Orsay : Georges Bidault et Robert Schuman. La personnalité la plus marquante de cette période demeure Pierre Mendès-France qui a réglé le sort de l Indochine et préparé la décolonisation du Maghreb. Mais la IV e République est incapable de régler le conflit algérien, ce qui va provoquer sa chute. 2 L Etat gaullien 2.1 La constitution de la V e République Le 13 mai 1958, la population d Alger se révolte contre le gouvernement de Paris. L armée impose le retour de De Gaulle pour empêcher l indépendance de l Algérie. L homme du 18 juin fait rédiger une nouvelle constitution qui respecte les principes républicains mais qui renforce considérablement les pouvoirs de l exécutif et de son chef. Le pouvoir législatif est étroitement contrôlé par l exécutif qui fixe la durée des sessions et l ordre du jour des assemblées. Le président est qualifié de "monarque républicain" ; il est chef des armées et maître absolu de la politique étrangère. Il a le droit de dissoudre l Assemblée nationale et de consulter le peuple par référendum. En 1962, De Gaulle gagne un référendum qui prévoit l élection du président au suffrage universel. Les parlementaires sont élus au scrutin majoritaire uninominal à deux tours, ce qui donne au président des majorités stables et disciplinées. 2.2 Une puissance publique à son apogée La puissance de l État est à son zénith. De Gaulle dispose du pouvoir et des moyens financiers (forte croissance économique oblige) nécessaires pour mener à bien de grands projets. Dans le domaine économique, l État distribue d importantes subventions et il encourage la concentration des grandes entreprises comme ELF (secteur pétrolier). Il lance de grands projets industriels : développement du nucléaire, de l aéronautique, de l informatique ("Plan calcul")... L Etat soucieux de prestige international construit l avion Concorde et le paquebot France. De Gaulle modernise le secteur de la santé (création des CHU) et les universités (après le mouvement de Mai 1968). Il crée une administration spéciale (la DA- TAR) pour mener une politique d aménagement du territoire (création des villes JACQUES EL ALAMI 4 HISTOIRE TERM ES

3 LE REPLI DE L ÉTAT FRANÇAIS nouvelles...). André Malraux lance de grands chantiers culturels : création des MJC, rénovation des quartiers historiques (le Marais à Paris). Durant cette période, les hauts fonctionnaires et les "technocrates" jouent un rôle essentiel. Ces experts diplômés des grandes écoles font partie des cabinets des ministres et appliquent les décisions des hommes politiques (Paul Delouvrier chef de la DATAR). Souvent, ils se présentent aux élections et entament des carrières politiques (Giscard d Estaing, Jacques Chirac, Laurent Fabius...). 2.3 L irruption de la crise économique Après la démission de De Gaulle (1969), le pouvoir passe d abord à Georges Pompidou (1969-1974) puis à Valéry Giscard d Estaing (1974-1981). Les deux hommes qui ont servi le Général continuent son œuvre. Cependant, à partir de 1973, la France est frappée par la crise. La facture énergétique s envole, l inflation rogne le pouvoir d achat des ménages qui réduisent leur consommation. Le chômage augmente régulièrement. Les recettes classiques keynésiennes (déficit public, plans de relance) n ont aucun effet durable. Le gouvernement pratique un "stop and go" (alternance de plans de relance et de rigueur) inefficace. Les économistes libéraux qui s inspirent de l école de Chicago, dénoncent les actions coûteuses et inutiles de l État. Ils appellent à une libéralisation de l économie : démantèlement de l État-providence, réduction des impôts et des dépenses publiques, flexibilité de l emploi... 3 Le repli de l État français 3.1 Le retrait progressif de la sphère économique En 1981, une alternance politique se produit. Le candidat du Parti socialiste, François Mitterrand, s installe à l Élysée. Le changement de majorité n affecte en aucune façon le fonctionnement de l État. Mitterrand, qui avait pourtant dénoncé sans relâche les grands pouvoirs du président, semble s accommoder de ses nouvelles prérogatives. Il tente une politique de relance et de nationalisations qui se solde par un échec. Les partenaires européens de la France exigent un changement de politique. Mitterrand qui croit profondément au projet européen est contraint de s incliner. A partir de 1983, Jacques Delors, ministre des finances mène une politique de rigueur budgétaire dont la conséquence directe est la remontée du chômage. En 1986, la droite gagne les élections législatives et Jacques Chirac devient Premier ministre : c est la première cohabitation. Le ministre des finances Edouard Balladur lance un grand mouvement de privatisation d entreprises publiques. Mitterrand est réélu en 1988, mais le mouvement de libéralisation est inexorable. L État n est plus un producteur. Il n a que peu d influence sur les FTN qui se sont mondialisées. Il ne peut plus empêcher les fermetures d usines ou les délocalisations. Il se consacre à ses tâches régaliennes : sécurité, justice, éducation, formation professionnelle, défense... 3.2 La montée de l Europe et des régions En 1982, Gaston Defferre fait voter les lois de décentralisation. L État confie aux collectivités territoriales (communes, départements, régions) d importantes com- JACQUES EL ALAMI 5 HISTOIRE TERM ES

3 LE REPLI DE L ÉTAT FRANÇAIS pétences : construction et entretien des établissements scolaires, construction d autoroutes, distribution des aides sociales (RSA...). En 2003, une nouvelle vague de décentralisation se produit et le principe de la décentralisation est inscrit dans la constitution. Les pouvoirs de l État sont aussi amoindris par l intégration européenne. En 1993, le marché commun est remplacé par un marché unique et les questions majeures (le droit de la concurrence, les taux de TVA...) sont désormais traitées par la Commission européenne ou par la Cour Européenne de Justice. En 1992, le traité de Maastricht prévoit la création d une monnaie européenne et depuis cette date, l euro est géré par la Banque Centrale Européenne qui est totalement indépendante des gouvernements. Une grande partie du travail des parlementaires français consiste à transcrire dans le droit français les directives européennes. La crise économique et financière de 2008 accentue cette tendance car les 28 renforcent la coordination des politiques économiques et budgétaires. La commission européenne dispose désormais d un droit de regard sur les budgets des États et elle empiète sur les prérogatives des Parlements. 3.3 Un recul limité de la puissance publique Cependant, la place de l État reste importante en France. Contrairement au Royaume- Uni ou aux États-Unis, l Etat en France est vu comme un protecteur ou un régulateur. Les partenaires sociaux n ont pas l habitude du dialogue social et ils préfèrent souvent l affrontement à la négociation. Lors des conflits sociaux, c est souvent le médiateur nommé par l État qui débloque la situation. Les dirigeants politiques de gauche comme de droite sont plus des étatistes que des libéraux. Ils considèrent qu un Etat fort est nécessaire pour limiter les excès du libéralisme. D ailleurs, en 2008, c est l Etat par son intervention qui a sauvé le système bancaire et qui a ainsi évité un dramatique assèchement du crédit. Malgré le poids insoutenable de la dette, malgré l ampleur des prélèvements obligatoires, l État mène toujours des politiques de solidarité ou de cohésion territoriale. L État qui a perdu des fonctions s en est trouvé d autres comme la défense de l environnement et la mise en œuvre du développement durable. Conclusion La tradition d un Etat fort est fortement enracinée dans la culture française. Depuis 1945, la population a accepté une importante fiscalité pour conserver des services publics de qualité. Cependant, les partenaires de la France (Allemagne) pour rétablir leur compétitivité et réduire leur endettement ont fortement réduit les avantages sociaux et le périmètre de l Etat. Devant la crise des finances et de l économie, les dirigeants français, quelle que soit leur couleur politique, pourront difficilement échapper à des décisions impopulaires. JACQUES EL ALAMI 6 HISTOIRE TERM ES