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Transcription:

CA Reims Chambre Sociale 7 mai 2014 Centre Champagne Ardennes de l'habitat c/ Midelet Confirmation Décision attaquée : Jugement du CPH de Reims du 22 février 2013 Références au greffe : - Arrêt n 13-00776 La décision : D un jugement rendu le 22 février 2013 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de Reims, section industrie (n F 12/00069) A l'audience publique du 05 février 2014, où l'affaire a été mise en délibéré au 2 avril 2014, prorogé au 7 mai 2014 Madame Valérie Amand, conseiller rapporteur, a entendu les plaidoiries en application de l'article 945-1 du Code de procédure civile, les parties ne s'y étant pas opposées, et en a rendu compte à la cour dans son délibéré. Composition de la cour lors du délibéré : Madame Martine Conté, Président Madame Monique Douxami, Conseiller Madame Valérie Amand, Conseiller Greffier lors des débats : Madame Bénédicte Damont-, Adjoint administratif assermenté faisant fonction de greffier Arrêt : Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile, et signé par Madame Martine Conté, Président, et Madame Bénédicte Damont, Adjoint administratif assermenté faisant fonction de greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire. Faits et procédure : A compter du 1er mars 2010, M.FM né le a été engagé par la Sarl Centre Champagne Ardennes Habitat en qualité de chef applicateur d'abord en contrat à durée déterminée niveau III coefficient 125 de la convention collective nationale du travail mécanique du bois, des scieries, du négoce et de l'importation du bois, puis en contrat à durée indéterminée à compter du 1er septembre 2010, coefficient 150. Après convocation le 2 décembre 2011 à un entretien préalable à un éventuel licenciement fixé au 13 décembre 2011, il était licencié par lettre recommandée avec avis de réception en date du 20 décembre 2011 pour insuffisance professionnelle et pour faute. ALAIN BENSOUSSAN 2014 Page 1/7

Contestant cette mesure, il a saisi le conseil de prud'hommes de Reims pour voir dire son licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse et obtenir diverses réparations indemnitaires, ainsi qu'un rappel de primes à hauteur de 639 euros. Par jugement en date du 22 février 2013, le conseil de prud'hommes de Reims a considéré que le licenciement était dépourvu de cause réelle et sérieuse et a condamné la Sarl CCAH à payer, outre les dépens, les sommes suivantes : 13.000 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, 1.000 euros en application de l'article 700 du Code de procédure civile Le jugement a rejeté la demande de rappel de primes du salarié et la demande de l'employeur au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ; il a ordonné à l'employeur la remise sous astreinte d'une nouvelle attestation Pôle emploi. La Sarl CCAH a fait régulièrement fait appel de ce jugement. Moyens et prétentions des parties : Par conclusions transmises au greffe par RPVA le 18 juillet 2013, la Sarl CCAH demande à la cour d'appel d'infirmer le jugement, de débouter le salarié de ses demandes, et à titre reconventionnel de condamner le salarié à lui payer la somme de 1.600 euros en application de l'article 700 Code de procédure civile. Par conclusions transmises au greffe par RPVA le 24 janvier 2014, M.FM demande à la cour d'appel la confirmation du jugement en ce qu'il a reconnu le licenciement abusif mais son infirmation sur le rejet de son rappel de primes. A l'audience des débats du 5 février 2014, les parties ont soutenu oralement leurs conclusions auxquelles la cour fait expressément référence pour un plus ample exposé des moyens et prétentions des parties. Motivation : Sur le licenciement La lettre de licenciement qui fixe les termes du litige est ainsi rédigée : «Nous avons décidé de vous licencier pour les motifs suivants : comportements préjudiciables aux intérêts de notre société et insuffisance professionnelle. A l'occasion de l'exécution de votre contrat, vous avez à diverses reprises, fait montre d'un comportement non professionnel caractérisé et d'une insuffisance professionnelle. Aussi en date du 21 mars 2011 vous aviez fait l'objet d'un avertissement écrit. Puis d'un rappel à l'ordre du 4 octobre 2011 sur les directives à appliquer. Ceci n'a pas suffi à modifier votre attitude comme en attestent les faits suivants : Les 20 et 21 octobre 2011 vous avez effectué des travaux d'entourage de cheminée et de changement de tuiles chez Madame J. Le 27 octobre 2011 la cliente nous a remis un courrier dans lequel elle faisait part de son mécontentement quant à la qualité des travaux exécutés ce que nous n'avons pu que constater sur place. En effet le tour de cheminée était à refaire dans son intégralité et les tuiles changées l'ont été en dépit du bon sens engendrant un effet damier, ce que vous avez reconnu lors de notre entretien du 13 décembre 2011. ALAIN BENSOUSSAN 2014 Page 2/7

Le 21 novembre 2011, Monsieur B. chez qui vous aviez effectué des travaux d'isolation les 7 et 8 novembre 2011, nous a appelé pour se plaindre qu'une tuile de son toit avait été mal reposée. Un déplacement à son domicile a été nécessaire pour y remédier. Les 16, 17, 18 et 21 novembre 2011 vous avez effectué des travaux d'isolation chez Monsieur L. Le 5 décembre 2011, le client nous a téléphoné en remettant en cause la qualité des travaux réalisés par vos soins. Notre directeur technique s'est rendu sur place du 8 décembre 2011 et a constaté que des rails étaient non alignés et que le velux était mal posé. Le client est lui-même intervenu afin de remédier aux malfaçons. Le 24 novembre 2011, vous étiez en charge de réaliser les travaux de façade chez Monsieur Z. à Reims toute la journée. Or à 14 h 30, vous avez de votre propre initiative décidé de procéder à une ré intervention prévue chez Monsieur B. à Suippes, sans en parler à votre directeur technique qui est seul en charge de la programmation des chantiers. Le 28 novembre 2011, notre fournisseur Zolpan est passé sur le chantier sur lequel vous travailliez afin de récupérer le rouleau de trame. Sans vous poser d'autres questions, ni vous renseigner auprès de votre responsable hiérarchique, vous lui avez donné le rouleau de trame alors qu'il était indispensable pour la poursuite du chantier prévu le 29 novembre 2011. Qui plus est, vous n'avez pas trouvé utile de nous prévenir de votre décision. Le 8 décembre 2011, M. D., chez qui vous aviez effectué des travaux de traitement de bois les 1er et 2 décembre 2011 nous a appelé pour nous signaler qu'un chevron qui nécessitait d'être renforcé ne l'a pas été. Vous avez reconnu l'avoir «zappé», en effet vous n'en n'avez absolument pas fait mention sur le rendu du chantier. Une ré intervention a dû être réalisée le 9 décembre 2011. Le 12 décembre 2011, votre directeur technique vous a demandé d'aller travailler directement sur le chantier sur lequel vous étiez programmé, ce dernier s'occupant de se rendre chez notre fournisseur afin de s'approvisionner en matériaux pour ledit chantier. Cela permettait un gain de temps puisque pendant que le directeur technique s'occupait de l'approvisionnement, vous pouviez procéder à la protection et l'agencement du chantier. Là encore vous n'en avez fait qu'à votre tête puisque contrairement aux directives données, vous vous êtes rendu chez notre fournisseur avant même de vous rendre sur le chantier, afin de récupérer les matériaux prévus. Nous avons constaté que vous avez utilisé à maintes reprises à usage privatif et en dehors des heures de travail un véhicule de société. Ainsi, après vérification des relevés du matériel de géolocalisation il ressort que les 10, 11,13, 17,18, 20, 21, 24 octobre 2011,3, 7,8, 9, 10, 14, 15, 16, 17, 21, 22, 23, 24, 25, 28 novembre 2011, 1er et 2 décembre 2011, vous avez utilisé notre camionnette afin de réaliser des déplacements personnels. Vous avez d'ailleurs reconnu lors de notre entretien du 13 décembre 2011 déposer le matin votre fille à son école avec le véhicule de société. Nous vous rappelons que l'avenant à votre contrat de travail du 1er mars, définit clairement les obligations liées à l'usage des véhicules de notre société et qu'en l'espèce, vous avez sciemment dérogé aux dites obligations et ce malgré un courrier qui vous a été adressé le 4 octobre 2011. De surcroît le fait de véhiculer de façon habituelle une personne étrangère à la société pose un problème de responsabilité en cas d'accident et notamment de non couverture par les assurances. Là encore vous avez décidé de faire comme bon vous semble, faisant fi des intérêts de notre société. Nous vous rappelons que vous avez notamment comme devoir de respecter les termes de votre contrat travail, à savoir entre autre le respect des heures de travail ; il vous a donc été demandé comme à tous les ouvriers de procéder à la remise des fiches de rendu de chantier faisant apparaître les heures réelles d'arrivée et de départ de chantier sur lequel vous ALAIN BENSOUSSAN 2014 Page 3/7

travaillez. Or il est apparu qu'à plusieurs reprises vous nous avez remis des fiches de rendu de chantier fallacieuses. Ainsi : Le 12 octobre 2011 vous avez mentionné sur votre fiche de rendu de chantier avoir quitté le chantier sur lequel vous travailliez à 16 heures alors que le matériel de géolocalisation nous indique un départ à 14 h 10 ; Le 13 octobre 2011 vous avez mentionné sur votre fiche de rendu de chantier avoir quitté le chantier sur lequel vous travailliez à 16 heures alors que le matériel de géolocalisation nous indique un départ à 15 h 12 ; Le 18 octobre 2011 vous avez mentionné sur votre fiche de rendu de chantier avoir quitté le chantier à 15 h 30 alors que le matériel de géolocalisation nous indique un départ à 12 h 50 ; Le 19 octobre 2011 vous aviez mentionné sur votre fiche de rendu de chantier avoir quitté le chantier sur lequel vous travailliez à 15 h 30 alors que le matériel de géolocalisation nous indique un départ à 14 h 06 ; Le 28 octobre 2011 vous avez mentionné sur votre fiche de rendu de chantier avoir quitté le chantier à 16 heures alors que le matériel de géolocalisation nous indique par un 15 h 16 ; Le 22 novembre 2011 vous avez mentionné sur votre fiche de rendu de chantier avoir quitté le chantier sur lequel vous travaillez à 16 heures alors que le matériel de géolocalisation nous indique un départ à 15 h 04. L'ensemble de ces faits met en cause la bonne marche l'image de marque de la société désorganise notre service technique. Malheureusement il ne s'agit pas d'actes isolés puisque vous aviez déjà fait l'objet d'un avertissement et d'un rappel à l'ordre tel que précisé ci-dessus. Lors de notre entretien du mardi 13 décembre 2011 vous n'avez pas fourni d'explications permettant de modifier notre appréciation et d'envisager un quelconque changement. Aussi nous nous voyons dans l'obligation de mettre fin au contrat de travail en procédant à votre licenciement pour insuffisance professionnelle et pour faute.» L'insuffisance professionnelle reprochée au salarié doit être fondée sur des faits précis et vérifiables. En l'espèce, il sera relevé que Mme J. se plaint dans sa lettre du 27 octobre 2011 confirmée par courriel du 3 novembre 2011 essentiellement du retard dans l'exécution du chantier et son mécontentement ne cible pas spécifiquement M. M. ; en outre, les explications du salarié sur la nécessité de déposer un voile de couleur sur les tuiles pour éviter l'effet damier paraissent convaincantes. La mauvaise exécution du travail chez M. B. doit être relativisée, dès lors que le client atteste lui-même expressément du professionnalisme de M. M de sa satisfaction du travail accompli par lui comme il l'avait déjà précisé sur la fiche de réception de travaux et qu'il avait seulement appelé pour la remise en place d'une tuile légèrement mal emboîtée sans aucune fuite à déplorer. La réalité de la plainte d'un autre client M. L. pour un travail mal exécuté par M. M n'est pas établie, car le client lui-même a attesté clairement n'avoir jamais eu de conversation téléphonique avec le secrétariat de l'entreprise à propos des travaux d'isolation réalisés chez lui ; l'attestation de Mme S G., secrétaire de la société indiquant avoir été contactée par le client pour un rail mal posé par M. M est à cet égard suspecte, et d'autant moins crédible que l'attestante se trouve être la belle sœur du gérant de la Sarl Centre Champagne Ardennes ALAIN BENSOUSSAN 2014 Page 4/7

Habitat. De surcroît, aucune malfaçon ne peut être imputée à M.FM concernant ce chantier, puisque le client lui-même précise dans une attestation circonstanciée ( pièce 7) n'avoir eu qu'à se féliciter du travail accompli par M. M sur ce chantier fort bien mené avec conscience professionnelle, et indiquant que le contrôleur (M. V.) n'avait pu apprécier la qualité du travail de M. M lors de la pose du Velux, dès lors que lors du contrôle le chantier était terminé et que lui-même avait effectué des travaux pour remédier à un défaut du fabricant Velux. Cette attestation précise du client lui-même rend par la suite peu convaincante l'attestation de M. V. (pièce 13 de l'employeur), attestation établie manifestement pour les besoins de la cause, comme le laisse notamment entendre le fait que l'attestant reprend les affirmations de la lettre de licenciement. Madame Z., autre cliente atteste (pièce 8) également en faveur de M.FM en indiquant que les travaux avaient été exécutés correctement par M. M et avoir trouvé l'emplacement net et propre ; elle ajoute «une personne m'a été présentée comme le fournisseur de produits a emporté un rouleau de grillage.» Au vu de la seconde attestation de Mme Z. (pièce 21) qui indique que l'intimé est venu sur ordre de son employeur pour effectuer une pose de placo dans le grenier, il sera retenu que contrairement à ce qu'indique M. V., directeur technique, il s'est rendu à nouveau chez Mme Z. sur son ordre ; en outre, il est peu crédible que le salarié ait laissé un fournisseur emporter un rouleau de trame sans l'accord de son employeur, étant précisé qu'il n'est nullement reproché au salarié cette remise. S'agissant du chantier de M. D., il ressort de la fiche de réception en date du 2 décembre 2011 que ce client s'est déclaré «satisfait du travail des ouvriers» en sorte que la fiche de ré intervention du 9 décembre pour renforcement d'un chevron est insuffisante à imputer à M.FM une quelconque défaillance dans l'exécution de ce chantier. Il ressort de l'ensemble de ces éléments qu'aucun des reproches relatifs à la mauvaise exécution des chantiers tels que formulés dans la lettre de licenciement n'est établi et que l'insuffisance professionnelle du salarié n'est pas suffisamment caractérisée en l'espèce ; certes un précédent avertissement avait été adressé le 21 mars 2011 à M.FM concernant notamment son intervention sur trois chantiers ; mais outre que s'agissant d'un des trois chantiers (celui de Mme B.), M.FM rapporte la preuve que c'est à la demande expresse de la cliente que certains des travaux initialement prévus au devis n'avaient pas été faits, ainsi qu'en témoigne Mme B. (pièce 19 du salarié), et que le grief alors reproché n'est pas fondé, il reste que l'employeur lui-même indiquait «appréc(ier) dans sa globalité la qualité de vos interventions et prestations dans le cadre de vos fonctions» et qu'en tout état de cause, la mauvaise qualité des interventions postérieures à cet avertissement n'est nullement démontrée. S'agissant par ailleurs du non-respect par le salarié de la directive de l'employeur d'aller sur le chantier directement (de Mme Z.) sans passer préalablement chez le fournisseur, outre que cette directive n'est pas établie, l'attestation de M. V. précitée étant peu convaincante pour les raisons déjà évoquées plus haut, il ressort des explications du salarié corroborées par Mme Z. (pièce 10 du salarié) que ce dernier devait récupérer un nuancier pour pouvoir terminer les travaux de finition de la cliente. S'agissant des heures de fin de chantier, l'employeur prétend contester celles mentionnées par le salarié sur les fiches de chantier en se fondant sur les relevés du système de géolocalisation du véhicule utilisé par le salarié. Mais d'une part, selon l'article L1121-1 Code du travail, nul ne peut apporter aux droits des personnes et aux libertés individuelles et collectives des restrictions qui ne seraient pas justifiées par la nature de la tâche à accomplir ni proportionné au but recherché ; que l'utilisation d'un système de géolocalisation pour assurer le contrôle de la durée du travail n'est illicite que lorsque ce contrôle ne peut pas être fait par un autre moyen et il n'est pas justifié ALAIN BENSOUSSAN 2014 Page 5/7

lorsque le salarié dispose d'une liberté dans l'organisation son travail ; d'autre part un système de géolocalisation ne peut être utilisé par l'employeur pour toutes autres finalités que celles qui ont été déclarées auprès de la commission nationale de l'informatique et des libertés, et portées à la connaissance des salariés. En l'espèce le contrôle des horaires du salarié était fait par les fiches de chantier imposées au salarié et rendaient compte de l'activité de ce dernier et de l'amplitude horaire travaillée. En outre, l'employeur qui se borne à produire une déclaration simplifiée à la Cnil qui ne comporte pas la signature du déclarant et n'est pas accompagné d'un accusé de réception ne justifie pas de la réalité de la déclaration à la CNIL et pas davantage de l'utilisation déclarée à cette dernière. Enfin s'il résulte de la note de service du 23 mars 2011 (pièce 7) que l'employeur informait les salariés de la mise en place sur tous les véhicules de la société d'un matériel de géolocalisation, la seule finalité mentionnée et portée à la connaissance des salariés était celle de leur permettre «d'organiser au mieux et de faciliter l'ensemble de vos déplacements professionnels.» Les attestations de salariés (M. S., M. C.) versées aux débats par l'employeur établissent que ces derniers avaient seulement connaissance de l'existence d'un matériel de géolocalisation sur les véhicules de société, mais nullement qu'ils savaient que ce système serait utilisé par l'employeur pour contrôler leur durée de travail. Il se déduit de l'ensemble de ces éléments que l'utilisation des relevés de géolocalisation pour contrôler la durée du travail du salarié, c'est-à-dire à une autre fin que celle portée à la connaissance du personnel, est illicite et justifie que soient écartés ces moyens de preuve déloyaux. En outre, et à titre superfétatoire, ces relevés sont insuffisants établir que le salarié n'aurait pas effectué les horaires contractuellement prévus, puisqu'après l'exécution de certains chantiers le salarié devait repasser au siège de l'entreprise pour déménager ou ranger le camion et qu'en toute hypothèse l'employeur a réglé l'intégralité des heures réalisées par son salarié. Enfin s'agissant de l'utilisation à des fins personnelles du véhicule de société, le salarié a été sanctionné par un rappel à l'ordre le 4 octobre 2011 cette sanction a épuisé le pouvoir disciplinaire de l'employeur qui ne démontre pas que depuis le 4 octobre 2011 jusqu'au 2 décembre 2011 date du licenciement le salarié aurait à nouveau utilisé le véhicule de société à des fins personnelles. En définitive, aucun des griefs énoncés dans la lettre de licenciement n'apparaît fondé et c'est à juste titre que les premiers juges l'ont déclaré dépourvu de cause réelle et sérieuse. Le jugement sera donc confirmé sur ce point ainsi que sur le montant des dommages et intérêts alloués au salarié à hauteur de 13.000, montant justifié au regard de l'ancienneté, de l'âge du salarié au moment son licenciement, et de sa situation de chômage indemnisé et qui répare intégralement son préjudice, au demeurant non discuté par aucune des parties. S'agissant du rappel de primes sollicitées par le salarié, ce dernier réclame le paiement de la somme de 639 euros correspondant à des moins payés sur la prime de qualité ; mais il résulte du contrat de travail que la rémunération comportait «une prime brute variable de qualité et de présence d'un montant maximum de 200 euros par mois», étant précisé que «cette prime correspond à un objectif déterminé. Si celui-ci n'est pas accompli, celle-ci ne sera pas versée.» Si l'employeur ne justifie pas des objectifs assignés au salarié et pas davantage du fait qu'il ne les aurait pas remplis, le salarié n'établit pas ne pas avoir perçu au titre de la prime de qualité le maximum contractuel garanti par son contrat ; en effet, au vu des bulletins de paie produits, le salarié à perçu à plusieurs reprises des primes de qualité supérieures au maximum ALAIN BENSOUSSAN 2014 Page 6/7

contractuel de 200 euros (300 euros perçus en avril 2010, en mai 2010, 420 euros perçus en août 2010 notamment) venant en compensation des primes inférieures versées certains mois, en sorte qu'il est suffisamment établi que M.FM a été intégralement rempli de ses droits au titre de la prime contractuelle. Le jugement sera confirmé en ce qu'il a débouté le salarié au titre du rappel de prime. L'issue du litige commande de confirmer les dispositions du jugement relativement aux dépens et frais irrépétibles exposés en première instance et d'y ajouter la condamnation de la Sarl Centre Champagne Ardennes Habitat à payer les dépens d'appel, de payer à M.FM la somme de 1.000 euros au titre des frais irrépétibles exposés par l'intimé en appel et de débouter la Sarl Centre Champagne Ardennes Habitat de sa demande au titre de l'article 700 du Code de procédure civile. Par ces motifs : La cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire et après en avoir délibéré conformément à la loi, Confirme le jugement en toutes ses dispositions, Y ajoutant, Condamne la Sarl Centre Champagne Ardennes Habitat à payer à M.FM la somme de 1.000 euros en application de l'article 700 du Code de procédure civile, Déboute la Sarl Centre Champagne Ardennes Habitat de sa demande au titre de l'article 700 du Code de procédure civile, Condamne la Sarl Centre Champagne Ardennes Habitat aux dépens d'appel. ALAIN BENSOUSSAN 2014 Page 7/7