Aide à la mise en œuvre des programmes d enseignement moral et civique (EMC) - Collège (cycles 3 et 4) et lycées

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Transcription:

Aide à la mise en œuvre des programmes d enseignement moral et civique (EMC) - Collège (cycles 3 et 4) et lycées Les nouveaux programmes d enseignement moral et civique (EMC) sont publiés au BO spécial n 6 du 25 juin 2015 ( http://www.education.gouv.fr/pid25535/bulletin_officiel.html?pid_bo=32675 ). L horaire dédié à cet enseignement est d une demi-heure hebdomadaire, soit environ 18 heures annuelles, au collège comme au lycée. Au lycée, dans la voie générale, l EMC se substitue aux heures d ECJS ; dans la voie technologique, la demi-heure est prise sur la dotation horaire de l établissement consacrée aux groupes à effectifs réduits (l horaire de l histoire-géographie n est donc pas modifié et demeure à 2h00 hebdomadaires en séries STMG, STIDD, STL et STDAA et 1h30 hebdomadaire en série STSS). Au lycée, pour l ensemble des séries, l EMC est dispensé en groupe à effectif réduit, et cet enseignement peut être assuré par les professeurs de toutes les disciplines. Au collège, l EMC est de la responsabilité du professeur d histoire-géographie. Les finalités de ce nouveau programme Ce nouveau programme a pour finalité de faire partager les valeurs de la République, quelles que soient les croyances et les convictions des élèves et de leur famille, afin de permettre un «vivre ensemble» dans la République démocratique, laïque, sociale. La dimension morale permet d aider l individu à construire des jugements moraux ou à les discuter à l aide d arguments. Cet enseignement de la morale ne peut être que laïque c'est-à-dire promouvant une morale commune à tous et non confessionnelle, transmettant des valeurs utiles à tous pour vivre ensemble en démocratie. La dimension civique vise à la formation du citoyen. Il s agit donc de renouer l individu et le commun, de réarticuler le moral et le civique, la personne et le citoyen, de retrouver les conditions pour faire communauté : mobiliser le principe d intérêt général, former le jugement moral du sujet. La citoyenneté dans une démocratie ne se construit que si s articulent des connaissances (de valeurs, de lois, de principes, de contradictions,.) et la mise à l épreuve de ces connaissances à travers des résolutions de problèmes, des débats, des dilemmes, des pratiques, des engagements. L objectif de l enseignant est de susciter une adhésion raisonnée, rationnelle, intellectualisée mais aussi sensible, aux valeurs de la République, en prenant appui sur la confrontation à des situations qui interrogent l élève, le conduit à exprimer un jugement moral en référence à des valeurs et des principes partagés par tous, à construire des arguments, à faire preuve de sens critique. A ce titre, la démocratie présente des contradictions, des limites, des tensions, des débats qu il est inutile de cacher sous peine de discréditer l enseignement moral et civique. Les élèves ne sont pas dupes et sont capables de ressentir ce qui ressort de la rhétorique scolaire et ce qui procède de la réalité qu ils éprouvent au quotidien. Il faut au contraire préparer les jeunes à envisager ces questions sensibles à l aide d un appareil intellectuel, moral et civique qui leur permettra d agir de façon citoyenne. En ce sens, l enseignement est donc moral et non moralisateur. Le professeur fait preuve de neutralité, dans l esprit de la laïcité, il respecte les croyances et les opinions des élèves et des familles, mais n accepte pas pour autant toutes les opinions et tous les arguments. Il défend, explique, justifie les valeurs de la République et condamne les propos ou les

attitudes punies par la loi, toujours en donnant une dimension éducative à son propos et son engagement. Le programme d EMC, un tournant dans la conception des programmes Le programme tel qu il est présenté au BO du 25 juin marque une rupture significative à plusieurs titres. Les programmes sont conçus et présentés par cycles pour l école et le collège (cycle 2 du CP au CE2 ; cycle 3 du CM1 à la 6 ème ; cycle 4 de la 5 ème à la 3 ème ), et pour l ensemble des trois années du lycée. Pour la première fois, au collège, ils ne sont donc pas présentés année par année. Il y a donc nécessité dans chaque établissement, d opérer une progression et une programmation au sein de chacun des cycles. Pour la classe de 6 ème, dernière année du cycle 3, la concertation doit s opérer avec les écoles du secteur. En raison de la publication tardive de ces programmes, on comprendra que pour cette première année de mise en œuvre, il ne puisse pas se réaliser un tel travail avec les professeurs des écoles. Chaque équipe fera donc au mieux, en choisissant ce qui lui parait le plus opportun d étudier avec les élèves de 6 ème durant cette année. En revanche, il est indispensable que le conseil écoles-collège se saisisse de cette question importante dès cette année, afin qu à la rentrée 2016, un traitement cohérent du programme d EMC au cycle 3 soit mis en œuvre. Pour le cycle 4, au-delà de cette première année qui aura inévitablement un caractère d improvisation, il est indispensable que chaque équipe définisse quels objets d enseignement (colonne centrale du programme) elle entend particulièrement étudier pour chaque année. Certes un même objet d enseignement peut être abordé à plusieurs reprises au sein du cycle (par exemple «La loi et la démocratie représentative», «les différentes formes de discrimination», «L exercice de la citoyenneté dans une démocratie», ), mais il serait dommageable pour la formation des élèves qu un même objet soit abordé à de nombreuses reprises tandis que d autres soient négligés. Les programmes privilégient dans leur présentation les compétences à acquérir. Au collège, on entre dans le programme par des «Objectifs de formation», au nombre de 9, déclinés par des verbes : Identifier et exprimer en les régulant ses émotions et ses sentiments S estimer et être capable d écoute et d empathie Se sentir membre d une communauté Comprendre les raisons de l obéissance aux règles et à la loi dans une société démocratique Comprendre les principes et les valeurs de la République française et des sociétés démocratiques Développer les aptitudes à la réflexion critique : en recherchant les critères de validité des jugements moraux ; en confrontant ses jugements à ceux d autrui dans une discussion ou un débat argumenté Différencier son intérêt particulier de l intérêt général S engager et assumer des responsabilités dans l école et dans l établissement Prendre en charge des aspects de la vie collective et de l environnement et développer une conscience citoyenne, sociale et écologique La présentation des programmes propose ensuite dans la première colonne de lecture, à gauche, des «Connaissances, capacités et attitudes visées». Les objets d enseignement, qui constituaient auparavant l élément majeur voire unique des programmes, n apparaissent que dans un second temps. Il est donc clair que le programme n est plus là pour indiquer au professeur ce qu il doit faire mais ce que l élève doit savoir et savoir-faire. On pourra se reporter à la rubrique ci-dessous «Architecture nouvelle des programmes».

Au lycée, 4 compétences majeures sont identifiées et présentées en premier lieu, même si la présentation des programmes se fait toujours année par année, et avec des entrées par thèmes («La personne et l Etat de droit», «Egalité et discrimination», ). Ces 4 compétences majeures sont : Identifier et expliciter les valeurs éthiques et principes civiques en jeu Mobiliser les connaissances exigibles Développer l expression personnelle, l argumentation et le sens critique S impliquer dans le travail en équipe On les retrouve pour chaque thème abordé et pour chaque année du lycée, montrant clairement, comme au collège, que la priorité est donnée dans la présentation des programmes aux compétences attendues des élèves. On pourra se reporter à la rubrique ci-dessous «Architecture nouvelle des programmes». Ces évolutions majeures dans la présentation des programmes ne sont pas dues au hasard. Elles manifestent donc les préconisations à prendre en compte mais elles indiquent aussi un nouveau regard sur le métier d enseignant. Ce dernier est considéré comme un expert pour les enseignements dont il a la charge et non comme un exécutant. Il est donc dorénavant inutile de lui faire connaitre, heure par heure ou séance par séance ce qu il doit faire. On précise les grands objectifs que la Nation lui fixe (en l occurrence les grandes compétences attendues des élèves recevant cet enseignement), et c est au professeur, grâce à son expertise, de fixer les modalités d organisation de son enseignement : programmation et progression pour chaque année comme pour l ensemble du cycle, choix des pratiques pédagogiques les plus adaptées. Une architecture nouvelle des programmes Au collège : 1) On commence par préciser quels sont les 9 grands objectifs de formation, déclinés à travers 4 dimensions ; à ce niveau, le professeur n a pas de choix possible, les 9 objectifs s imposent et les 4 dimensions sont croisées en permanence : Cycles 3 et 4 La sensibilité Le droit et la règle Le jugement L engagement Identifier et exprimer en les régulant ses émotions et ses sentiments S estimer et être capable d écoute et d empathie Se sentir membre d une communauté Comprendre les raisons de l obéissance aux règles et à la loi dans une société démocratique Comprendre les principes et les valeurs de la République française et des sociétés démocratiques Développer les aptitudes à la réflexion critique : en recherchant les critères de validité des jugements moraux ; en confrontant ses jugements à ceux d autrui dans une discussion ou un débat argumenté Différencier son intérêt particulier de l intérêt général S engager et assumer des responsabilités dans l école et dans l établissement Prendre en charge des aspects de la vie collective et de l environnement et développer une conscience citoyenne, sociale et écologique 2) Pour atteindre ces objectifs, les élèves doivent maîtriser des connaissances, des capacités et attitudes qui sont exprimées dans la colonne de gauche des programmes ; tout n est pas maîtrisable au cours de la même année, le professeur opère donc des choix, mais en fin de cycle, l ensemble doit avoir été abordé et maîtrisé.

3) Ces connaissances, capacités et attitudes se construisent à l occasion de l étude d objets qui sont proposés en colonne centrale ; tous ces objets ne sont pas abordables en une année, le professeur opère donc des choix, mais en fin de cycle, tous les objets ont été étudiés ; cependant, une étude peut traiter en même temps de plusieurs objets mentionnés dans le programme (ex : au cycle 4, «Les principes d un Etat démocratique» et «L exercice de la citoyenneté dans une démocratie» peuvent être abordés ensemble) et un même objet peut être traité en classe à l occasion de plusieurs études (ex : au cycle 4, «La loi et la démocratie représentative» sera certainement abordé à régulièrement tout au long du cycle, tout comme «Les principes de la laïcité»). 4) Le professeur choisit les démarches pédagogiques qui lui semblent les plus efficaces pour que les élèves atteignent les objectifs de formation, maitrisent les capacités, connaissances et attitudes visées, éprouvent les quatre dimensions du programme (sensibilité, norme, jugement, engagement). Pour ce faire, le professeur dispose d une totale liberté ce qui signifie qu il doit aussi faire preuve d imagination (on pourra se reporter à la rubrique «Une pédagogie spécifique de l EMC»). Au lycée : 1) Le professeur doit garder en permanence en tête les 4 grandes compétences indiquées par le programme, que tout lycéen doit avoir construit progressivement durant ses trois années de second cycle et maitriser en fin de classe de Terminale : - Identifier et expliciter les valeurs éthiques et les principes civiques en jeu - Mobiliser les connaissances exigibles - Développer l expression personnelle, l argumentation et le sens critique - S impliquer dans le travail en équipe A ce niveau le professeur n a pas de choix possible, ces compétences s imposent à tous. De même, si elles ne sont pas exprimées explicitement, les quatre dimensions qui éclairent le programme de collège (la sensibilité, la norme, le jugement, l engagement) doivent aussi se manifester et s articuler dans l enseignement de l EMC au lycée. 2) Ces compétences se construisent au travers de deux grands thèmes par an : - en seconde : «La personne et l Etat de droit» ; «Egalité et discrimination» - en première : «Exercer sa citoyenneté dans la République française et l Union européenne» ; «Les enjeux moraux et civiques de la société de l information» - en terminale : «Pluralisme des croyances et laïcité» ; «Biologie, éthique, société et environnement» A ce niveau, le professeur n a pas de choix possible, ces thèmes s imposent à lui. Cependant, ces thèmes étant très vastes, les objets d études qui les incarnent peuvent être fort divers. 3) Ces thèmes permettent d aborder des connaissances : elles sont indispensables pour la compréhension du thème et elles contribuent à la construction des 4 grandes compétences visées (cf. ci-dessus). A ce niveau, le professeur dispose de choix dans la sélection et la hiérarchie de ces connaissances. Ainsi, au sein du thème «Biologie, éthique, société et environnement», si la classe travaille sur les OGM dans l alimentation, les questions du consentement du patient et du rôle du Comité consultatif national d éthique n ont pas leur place. 4) Des démarches pédagogiques adaptées à la construction de ces compétences et à la maîtrise de ces connaissances, impliquant fortement l élève et la classe, sont mises en place par le professeur. Si les débats argumentés, l interdisciplinarité et le partenariat constituent des démarches privilégiées, le professeur dispose d une grande liberté pour choisir les stratégies pédagogiques qui seront les plus efficaces.

Un exemple en classe de 4 ème (cycle 4) Le travail préalable de programmation au sein du cycle 4 avec l équipe pédagogique de l établissement conduit l ensemble des professeurs à aborder le thème de l égalité filles-garçons en classe de 4 ème. Cet objet d étude apparait à de nombreuses reprises au sein du programme, sous des formes variées (CF. tableau ci-dessous), permet d appréhender de nombreuses capacités et connaissances, et répond bien aux 9 objectifs de formation. Points du programme liés au thème «L égalité filles-garçons» La sensibilité Comprendre que l aspiration personnelle à la liberté suppose de reconnaitre celle d autrui Le droit et la règle Identifier les grandes étapes du parcours d une loi dans une démocratie représentative Le jugement Expliquer les différentes dimensions de l inégalité, distinguer une inégalité d une discrimination L engagement Expliquer le sens et l importance de l engagement individuel ou collectif des citoyens dans une démocratie Connaissance de soi et respect de l autre, en lien avec l éducation affective et sexuelle L identité personnelle, l identité légale La loi et la démocratie représentative Les différentes dimensions de l égalité Les différentes formes de discrimination (par exemple sexiste) L exercice de la citoyenneté dans une démocratie (conquête progressive, droits et devoirs des citoyens, rôle du vote, évolution des droits des femmes dans l histoire et dans le monde Au sein de cette programmation commune, un professeur décide de consacrer l intégralité du temps entre deux vacances scolaires (soit 7 semaines, donc 4 heures) à cette question, au regard des nombreuses compétences et connaissances mises en œuvre et de problèmes récurrents concernant la relation filles-garçons au sein de la classe. En revanche, un autre professeur du même établissement, qui a déjà longuement travaillé sur la loi et son élaboration dans une démocratie, décide de ne consacrer que 2 heures à ce thème. Pour le professeur qui a choisi de consacrer 4 heures au thème, les étapes sont les suivantes : - 1 ère heure : après accord du chef d établissement et du CA, le professeur a été autorisé à réaliser préalablement un certain nombre de photographies au sein ou aux abords de l établissement (séparation spontanée filles-garçons dans la cour au moment des récréations et activités différenciées, photographie des femmes de service, photographie de la salle des professeurs où hommes et femmes occupent une place à peu près équivalente, photographie du principal et de son adjoint (si c est la configuration existant au collège!), mamans à la sortie de l école voisine, ) ; ces photographies sont présentées aux élèves qui sont invités à réagir spontanément en s exprimant sur une affiche murale ; on analyse les réactions exprimées en distinguant ce qui relève de l émotion, du sentiment, de l argument ; on met en évidence différentes formes d inégalités et de discriminations. - 2 ème heure : un travail de recherche (CDI, salle ou équipement informatique) sur le thème «Que dit la loi en France à propos de l égalité hommes-femmes?», à l aide d un questionnement élaboré par le professeur (repérer les grands principes dans la Déclaration universelle des droits de l homme et la Constitution ; des lois qui promeuvent l égalité entre les sexes ; des étapes historiques de cette conquête de l égalité) ; on termine la séance, en référence à l heure précédente, en mesurant l écart entre les principes, la loi et la réalité. - 3 ème heure : Des pistes pour aller vers l égalité hommes-femmes, filles-garçons ; les élèves travaillent en groupe et sont invités à formuler deux propositions destinées à promouvoir l égalité filles-garçons

au sein du collège et deux propositions pour promouvoir l égalité hommes-femmes à l échelle nationale ; pour chaque ensemble de propositions, les élèves précisent comment ils vont s y prendre pour que leurs propositions prennent une valeur institutionnelle (comment est prise une décision au collège jusqu à un vote du CA, comment s effectue le parcours de la loi en France). - 4 ème heure : les élèves doivent individuellement rédiger un texte sur l égalité filles-garçons ou hommes-femmes, à partir d éléments de guidage proposés par le professeur (dans un premier paragraphe vous indiquerez quels sont les grands principes concernant l égalité hommes-femmes dans une démocratie comme la France ; dans un deuxième paragraphe, vous préciserez la réalité de la situation des femmes en France en matière d égalité avec les hommes et l écart entre la réalité et les principes ; dans un troisième paragraphe, vous proposerez des mesures susceptibles de renforcer cette égalité). Pour le professeur qui a choisi de consacrer 2 heures au thème, les étapes sont les suivantes : - 1 ère heure : Réalisation d un spot radiophonique court, destiné à lutter contre les stéréotypes sexistes et promouvant l égalité homme-femme ou fille- garçon (travail en groupes) - 2 ème heure : chaque groupe présente sa production en expliquant ses choix et en indiquant pourquoi il lui parait important de faire porter l effort sur l aspect retenu par le groupe ; la séance se termine par un exposé à caractère historique du professeur montrant quelques grandes étapes de la conquête de droits par les femmes, mais montrant aussi les limites de la loi et la nécessité de faire évoluer les mentalités. Les élèves sont évalués sur la qualité du spot, sa justification et sa présentation. Les élèves sont invités à rencontrer le chef d établissement afin d examiner avec lui la façon de faire connaitre ces spots à la communauté scolaire. Une pédagogie spécifique de l EMC Les programmes d EMC invitent à articuler valeurs, savoirs et pratiques. Les valeurs et les savoirs (juridiques, historiques, scientifiques, philosophiques, littéraires, ) guident nos actions, leur donnent du sens, permettent l autonomie de la pensée tout en veillant à l intérêt général. Mais ces valeurs et ces savoirs, tout comme leur enseignement, ont besoin d être éprouvés dans des situations concrètes et pratiques. C est la condition pour échapper au moralisme. La pédagogie mise en œuvre au collège comme au lycée doit donc manifester cette articulation entre valeurs, savoirs et pratiques. C est aussi une exigence de la culture de l engagement préconisée par les programmes. Il s agit de rendre les valeurs désirables en montrant leur pertinence pour le vivre ensemble, leur capacité à satisfaire l intérêt de la personne et l intérêt général. C est la confrontation de ces valeurs à la réalité, à la pratique, au concret qui peut donner de «la valeur aux valeurs». La pédagogie de l EMC doit donc assumer cette dimension active fondée sur l engagement. C est aussi la raison pour laquelle le travail avec la vie scolaire sera souvent indispensable (cf. plus loin le parcours citoyen). Les activités que l on pouvait autrefois observer dans les classes et qui tendaient à multiplier des petits exercices de quelques minutes à l issue desquels on dégageait quelques éléments de «morale républicaine», sur le mode de l exhortation, n ont plus lieu d être. Les «cahiers d activités» sont en contradiction avec la nouvelle approche des programmes. Ces derniers suggèrent quelques pistes pédagogiques susceptibles de proposer aux élèves une confrontation entre les valeurs, les savoirs et les pratiques. Au collège : travail à partir d un récit, fictionnel ou non, jeux de rôle, recherche documentaire, médiation scolaire, engagement dans une action, production d une affiche, d un spot télévisé ou radiophonique, d une page numérique, élaboration de propositions à formuler au CA, au maire, au député, etc., étude d un article de presse, analyse d un stéréotype, élection, participation aux

instances de l établissement, création d un club, élaboration d une performance scénique, débats argumentés, discussions à visées philosophiques, dilemme moral, Au lycée : études de situations réelles ou fictives, rencontre avec des acteurs (de la justice, de la recherche médicale) ou des victimes (de discriminations, d emprises sectaires, ), analyses historiques, études de cas, débats argumentés, réalisation d un dossier, analyse d un débat politique ou institutionnel, participation aux instances de l établissement D une manière générale, on valorisera les démarches coopératives qui montrent l efficacité de ce type de travail, tout en mettant en valeur la solidarité aux dépens de la compétition. Dans tous les cas, le professeur doit veiller à l adaptation entre ses objectifs et ses choix didactiques. Il veille également, quelle que soit la stratégie pédagogique adoptée, à mettre en œuvre des apprentissages et non des activités. Il doit susciter le questionnement, l expression de la sensibilité (enthousiasme, indignation, colère, ), l argumentation, le sens critique et l engagement de l élève, de façon à ce qu il apprenne à élaborer une posture citoyenne face aux événements actuels ou à venir. Exemple de dilemme moral au cycle 4 Point du programme abordé : Le jugement : penser par soi-même et avec les autres Objectifs de formation 1. Développer les aptitudes à la réflexion critique : en recherchant les critères de validité des jugements moraux ; en confrontant ses jugements à ceux d'autrui dans une discussion ou un débat argumenté. 2. Différencier son intérêt particulier de l'intérêt général. Connaissances, capacités et attitudes visées Objets d'enseignement 1/a - Expliquer les différentes dimensions de l'égalité, - Les différentes dimensions de l'égalité 2/b - Comprendre que deux valeurs de la République, la liberté et l'égalité, peuvent entrer en tension. - Les libertés fondamentales (libertés de conscience, d'expression, d'association, de presse) et les droits fondamentaux de la personne.. Le dilemme est proposé à la classe par l intermédiaire d un récit fictionnel au cours duquel un groupe de personnes sans domicile s installe dans un appartement inoccupé, à la grande colère du propriétaire de l appartement. A l issue de ce récit, on demande aux élèves de porter un jugement moral sur la situation décrite. Pour les aider, on met à leur disposition des documents, notamment la Déclaration universelle des droits de l Homme (Article 17 : 1. Toute personne, aussi bien seule qu'en collectivité, a droit à la propriété. 2. Nul ne peut être arbitrairement privé de sa propriété. Et Article 25 : 1. Toute personne a droit à un niveau de vie suffisant pour assurer sa santé, son bien-être et ceux de sa famille, notamment pour l'alimentation, l'habillement, le logement, les soins médicaux ainsi que pour les services sociaux nécessaires), un extrait de la Déclaration des droits de l Homme et du citoyen (Art. 17. La propriété étant un droit inviolable et sacré, nul ne peut en être privé, si ce n'est lorsque la nécessité publique, légalement constatée, l'exige évidemment, et sous la condition d'une juste et préalable indemnité.) Les élèves sont invités à construire un jugement moral sur la situation décrite en s appuyant sur des arguments. Un cours débat vient clore la séance. Au lycée, en classe de seconde Dans le cadre de l EMC, les élèves abordent le thème «Egalité et discrimination». Le professeur propose aux deux groupes d EMC de la classe, après accord du chef d établissement et du CA, de concevoir et préparer «Une journée de lutte contre les discriminations» au sein de l établissement. Cette journée pourrait éventuellement se tenir durant la semaine d éducation contre le racisme et l antisémitisme (mars). Mais la journée peut aborder d autres formes de discriminations et se tenir

plus tard dans l année. Les élèves effectuent un travail de recherche afin de définir le contenu de la journée. Puis ils élaborent l organisation de la journée (table ronde, film, témoignages, forum des propositions, ). Ils peuvent se faire aider par des professeurs de diverses disciplines, par la vie scolaire, la Maison des lycéens et le CVL. L évaluation porte sur la compréhension des problématiques, l engagement des élèves et sur la qualité de la journée. L évaluation de l EMC Comme tout enseignement, l EMC doit être évalué afin de s assurer de la réalisation des apprentissages. Cette évaluation ne peut se limiter à un contrôle de connaissances parce qu elle doit aussi mesurer l identification, la compréhension, et l adoption des valeurs, le sens critique, la capacité à formuler des jugements moraux argumentés, l engagement des élèves. On imagine mal dans ces conditions une évaluation qui se contenterait de vérifier la maîtrise de quelques connaissances (les symboles de la République, la liste de quelques valeurs ou principes, ). Cette évaluation doit être plus qualitative, viser les compétences (notamment au collège celles formulées dans les 9 «Objectifs de formation», et au lycée celles exprimées dans la colonne «Compétences»), s inscrire dans la continuité, procéder par échanges et auto-évaluation (par exemple : évaluer un élève sur la base de son engagement dans un dispositif ou une action de l établissement, en l interrogeant sur les raisons de son engagement, sur les valeurs liées à cet engagement, sur le regard critique que l on peut porter sur l action, ), laisser place à des procédures spécifiques voire originales, s inscrire dans des stratégies d évaluation formative, Il faut montrer que la communauté éducative porte un regard attentif à ce que fait et dit l élève, et que l EMC ne constitue pas une discipline scolaire dans laquelle on peut être «bon» ou «mauvais» comme on le serait en mathématiques ou en anglais. Au DNB, l EMC sera évalué. A ce jour, les modalités de cette évaluation et les objets d étude sur lesquels pourrait reposer l évaluation ne sont pas précisés. Ces informations devraient rapidement être communiquées au cours de l année. L EMC, un élément du parcours citoyen L EMC participe d un parcours citoyen qui s étend de l école élémentaire à la classe de terminale. Ce parcours comprend bien entendu l EMC, qui en constitue la colonne vertébrale, mais aussi l éducation aux médias et à l information prenant en compte les enjeux du numérique et de ses usages, la participation des élèves à la vie sociale de l établissement et de son environnement (CVC, CVL, associations, journaux, ), la préparation en amont de la «Journée défense et citoyenneté», la participation aux différents dispositifs proposés durant l année (semaine de l engagement, semaine de lutte contre le racisme et l antisémitisme, semaine du développement durable ), dispositifs spécifiques aux établissements, L EMC lui-même a été pensé globalement du cycle 2 à la Terminale. Il a été articulé avec le Socle commun de connaissances, de compétences et de culture qui prévoit dans son domaine 3 «La formation de la personne et du citoyen». Cet EMC doit constituer un projet collectif, porté par l ensemble de la communauté éducative, au collège comme au lycée. Ce projet collectif s exprime dans les liaisons avec les disciplines qui ont toutes une dimension civique, avec la vie scolaire qui peut inviter régulièrement l élève à confronter ses pratiques ou ses comportements avec les valeurs et les savoirs abordés en EMC, ou encore dans les liaisons avec les différents temps forts de la vie de l établissement (Conseil de vie lycéenne, Conseil de vie collégienne, l association sportive, la maison des lycéens, les élections, ).

Continuités et nouveautés Le programme d enseignement moral et civique marque donc une rupture avec les programmes d éducation civique et d ECJS : l accent mis sur les compétences à acquérir par les élèves et non sur les thèmes que le professeur doit aborder ; l articulation indispensable entre d une part principes, valeurs et connaissances, et par ailleurs pratiques et engagement ; l intégration de la dimension morale qui permet l affirmation du sujet et de son jugement moral alors que les précédentes approches privilégiaient trop exclusivement l émergence de ce que doit penser le groupe, l ensemble, le commun ; l intégration de l EMC dans un ensemble plus vaste qui constitue le parcours citoyen de l élève. Cependant, l éducation civique et l ECJS ont aussi permis la construction de compétences civiques par nos élèves durant de nombreuses années. Si ces précédentes approches sont aujourd hui questionnées et approfondies, elles ont aussi permis la construction d un socle solide sur lequel nous pouvons nous appuyer pour notre enseignement moral et civique. Comme les programmes précédents, l EMC s appuie lui aussi sur la connaissance des grands textes fondateurs de la démocratie (Déclaration des droits de l Homme et du citoyen, Déclaration universelle des droits de l Homme, Constitution,.), sur la transmission des valeurs de la République, sur le souci d impliquer les élèves. Comme dans les précédents programmes, les approches strictement institutionnelles ont été écartées, la dimension laïque réaffirmée avec vigueur, le privilège accordé aux études de cas et aux débats argumentés réaffirmé avec force. Nous avons construit un socle solide sur lequel nous devons nous appuyer pour approfondir la démarche de formation du citoyen.