Surveillance des septicémies dans les hôpitaux belges (SEP) Rapport 2016
Surveillance des septicémies dans les hôpitaux belges (SEP) Rapport 2016 Données 2015 AUTEURS Els Duysburgh, MD, PhD Marie-Laurence Lambert, MD, PhD
Unité associée aux soins et antibiorésistance June 2016 Bruxelles, Belgique Édité par: Dr Boudewijn Catry Chef de service Rue J. Wytsmanstraat 14 1010 Bruxelles Numéro ISSN: 2506-9640 Contact: els.duysburgh@wiv-isp.be Le projet est financé par: Remerciements Les auteurs tiennent à remercier les hôpitaux participant à la surveillance, les membres du groupe de travail «septicémies» pour l aide apportée à l amélioration du protocole, ainsi que Sylvanus Fonguh, Xavier Pretlot et Cedric Malache pour leur contribution au développement de l outil informatique et Ledia Jani pour son aide à la mise en page de ce rapport.
Résumé Introduction Les septicémies survenant à l hôpital sont une source importante de morbidité et de mortalité. Beaucoup sont évitables, en particulier celles associées à un dispositif invasif. Le protocole de surveillance a été revu en profondeur en 2013, avec l accent mis sur l utilité de la récolte de données dans une perspective de prévention. Depuis 2014, la participation à la surveillance SEP est une obligation légale pour tous les hôpitaux aigus en Belgique. Cela implique l enregistrement de données standardisées pour chaque épisode de septicémie survenant 2 jours ou plus après admission du patient (par définition, septicémies associées à l hôpital) et ce pendant une période minimale de 3 mois par an. Ce rapport fait la synthèse des données de surveillance en Belgique disponibles en 2015. Résultats Participation des hôpitaux En 2015, 138 hôpitaux ont enregistré leurs données pour au moins 3 mois, et 79 (57%) ont enregistré des données pour toute l année (contre 53% en 2014). L enregistrement continu sert mieux l objectif de la surveillance comme outil de prévention. Incidences 1. Septicémies associées à l hôpital En 2015, l incidence moyenne des septicémies survenant 2 jours ou plus après l admission était de 8,0/10.000 journées d hospitalisation au niveau de tout l hôpital. L incidence moyenne des septicémies survenant 2 jours ou plus après admission dans une unité de soins intensifs était de 35,5/10.000 journées d hospitalisation aux soins intensifs. Ces chiffres sont comparables aux années précédentes. L incidence était plus élevée dans les hôpitaux universitaires que dans les autres hôpitaux, cependant la variation était élevée dans les 2 catégories d hôpitaux (Figure 1). L incidence la plus élevée était à Bruxelles, et similaire en Flandre et en Wallonie. Ces différences d incidence entre régions restent similaires après ajustement pour le nombre d hôpitaux universitaires. Figure 1 Distribution de l incidence des septicémies associées à l hôpital, hôpitaux universitaires vs autres hôpitaux, Belgique, 2015 4
2. Septicémies associées au cathéter veineux central Les septicémies associées au cathéter veineux central (CVC) sont catégorisées selon la probabilité que l infection soit effectivement due au CVC : origine CVC confirmée (confirmation microbiologique de la suspicion clinique), «probable» (pas de confirmation microbiologique de la suspicion clinique) ou «possible» (pas de suspicion clinique, pas d autre origine identifiée, CVC présent dans les 2 jours précédant le début de la septicémie). En 2015, ces catégories représentaient respectivement 43%, 35% et 22% des septicémies associées au CVC. L incidence des septicémies sur CVC a augmenté en 2015 en comparaison de 2014, du fait d une augmentation dans la catégorie «origine CVC probable» (Figure 2). Figure 2 Incidence moyenne des septicémies associées au cathéter veineux central au niveau de tout l hôpital, Belgique, 2013-2015 septicémies associées au cathéter veineux central/10.000 journées d hospitalisation 2.5 2.0 1.5 1.0 0.5 0.0 2013 2014 2015 Année Confirmée + probable + possible Confirmée + probable Confirmée 3. Incidences spécifiques des septicémies associées à l hôpital, selon les germes isolés L évolution des incidences spécifiques entre 2000 et 2015 pour les germes les plus fréquents isolés des hémocultures est illustrée par le graphique 3 qui montre l augmentation des Gram-négatifs (E. coli et K. pneumoniae) et la diminution de S. aureus comme germes en cause de la septicémie. L incidence des septicémies à K. pneumoniae a plus que doublé entre 2000 et 2015. Figure 3 Incidence moyenne des septicémies associées à l hôpital, selon le germe en cause. Belgique, 2000-2015 N/10.000 journées d hospitalisation 2.0 1.8 1.6 1.4 1.2 1.0 0.8 0.6 0.4 0.2 0.0 2000 2001 2002 2003 2004 2005 2006 2007 2008 2009 2010 2011 2012 2013 2014 2015 Année E. coli S. aureus K. pneumoniae P. aeruginosa E. faecalis 5
Description des épisodes de septicémie, 2015 En 2015, 7.545 épisodes de septicémies associées à l hôpital ont été enregistrés; 84% répondaient à la définition de cas «germe pathogène reconnu isolé d une hémoculture» ; et 15% à la définition : «contaminant de la peau isolé à partir de 2 hémocultures différentes». Un épisode sur 5 (20%) est survenu 2 jours ou plus après admission dans une unité de soins intensifs. La moitié des épisodes sont survenus 13 jours ou plus après admission à l hôpital. La moitié des patients avait au moins 70 ans. Près d un patient sur 5 est décédé (nos données ne permettent pas d établir un lien causal entre le décès et la septicémie). Les origines les plus fréquentes, au niveau de tout l hôpital, étaient un CVC (confirmé, probable, ou possible) 27% des septicémies associées à l hôpital et les infections urinaires (19%) (Figure 4). Aux soins intensifs, les origines les plus fréquentes étaient un CVC (36%) et une infection pulmonaire (24%). Pour 48% des septicémies associées à l hôpital l origine de l infection était confirmée bactériologiquement (même germe isolé des hémocultures, et de la source présumée de l infection). Un dispositif invasif était en cause directement (CVC) ou indirectement (cathéter urinaire, tube endotrachéal) dans 45% des septicémies associées à l hôpital et 62% des septicémies associées aux unités de soins intensifs. Figure 4 Origine présumée des septicémies associées à l hôpital, Belgique, 2015 Autre cathéter/ Manipulation invasive Cathéter veineux central* Inconnue 5% 27% 13% Secondaire à un autre site d'infection 54% * Inclus confirmée, probable et possible septicémies associées au cathéter veineux central Digestive - 13% Bris barrière muqueuse digestive 0.3% Autres - 7% Pulmonaire - 11% Site opératoire - 4% Urinaire - 19% Microorganismes et profils de résistance Les germes les plus fréquemment isolés en 2015 étaient E. coli (21%), S. aureus (11%), et S. epidermidis (11%). La moitié des hôpitaux n a rapporté aucun cas de septicémie à S. aureus résistant à la méthicilline (MRSA) (Tableau 1). 6 Les profils de résistance pour les phénotypes objets de la surveillance sont montrés dans le tableau 1. Entre 2013 et 2015, les changements suivants étaient statistiquement significatifs: pour S. aureus, diminution de la résistance à la méthicilline (21,1%-15,5%) et augmentation de la résistance aux glycopeptides (0,0%- 0,9%); pour E. coli et K. pneumoniae, augmentation de la résistance aux céphalosporines de 3e génération (respectivement 14,1%-17,3% et 25,7%-35,2%) et aux carbapénemes (respectivement 0,3%-0,9% et 2,4%- 5,9%). Les autres changements (s il y en avait) n étaient pas statistiquement significatifs.
Tableau 1 Résistance aux antibiotiques pour les germes isolés dans les septicémies associées à l hôpital, Belgique, 2015 1 Germes Hôpitaux % >=1 germe résistant Germes Antibiotique n resistant/n testés % (N=138) S. aureus Meti 141/912 16 49 Gly 8/912 1 1 6 E. faecalis Gly 2/376 1 1 E. faecium Gly 18/361 5 10 E. coli C3G 294/1,701 17 63 CAR 15/1701 1 8 K. pneumoniae C3G 198/562 35 46 CAR 33/562 6 12 E. cloacae C3G 110/298 37 41 CAR 10/298 3 7 P. aeruginosa CAR 58/376 15 28 Acinetobacter spp. CAR 6/133 5 4 GC3G, céphalosporines de 3e generation (cefotaxime, ceftriaxone, ceftazidim); CAR, carbapénèmes (imipenem, meropenem, doripenem); Gly, glycopeptides (vancomycin, teicoplanin); Meti, Methicillin Le futur de la surveillance SEP Un projet de validation de données est planifié pour 2017. Transition vers le nouvel outil pour la collecte de données en ligne (Healthdata) prévue en 2017. Points à retenir La participation à la surveillance des septicémies associées à l hôpital est obligatoire depuis 2014. Il y a une augmentation des hôpitaux qui participent à la surveillance toute l année (57% en 2015). L incidence moyenne des septicémies associées à l hôpital est relativement stable (8,0/10.000 journées d hospitalisation en 2015), et de manière assez constante : º º plus élevée dans les hôpitaux universitaires º º plus élevée à Bruxelles º º plus élevée dans les unités de soins intensifs (5 fois plus en 2014) Il existe une grande variabilité entre les hôpitaux, ce qui laisse à penser qu un important potentiel de prévention existe, et/ou un besoin de validation des données. L incidence des septicémies associées à un cathéter veineux central n a pas diminué ces dernières années. 7 1 Les tests positifs pour la résistance aux glycopeptides dans un laboratoire périphérique devraient idéalement être confirmés par le laboratoire de référence. Ce n est pas toujours le cas, et on ne peut donc exclure que certains tests positifs soient en réalité des faux-positifs.
Au total, 45% des septicémies associées à l hôpital en 2015 étaient associées de manière directe ou indirecte à un dispositif invasif (cathéter vasculaire, cathéter urinaire, tube endotrachéal). Il s agit là d une cible prioritaire pour la prévention. Les germes les plus fréquents sont E. coli et S. aureus. Depuis 2000, l incidence des septicémies à germes Gram negatifs (E. coli et K. pneumoniae) a augmenté. Depuis 2013, la résistance à la methicilline a diminué pour S. aureus et la résistance aux céphalosporines de 3e génération et aux carbapénèmes a augmenté pour E. coli et K. pneumoniae. Le rapport complet (en anglais) est disponible sur le site web (PHS Report 2016-017). 8
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