Historique du système des minima sociaux en France Julie Labarthe (DREES) Journée d étude franco-allemande, 7 février 2011
Introduction Il existe aujourd hui 8 minima sociaux en France 3,5, millions de foyers bénéficiaires fin 2009 9 % de la population française est couverte par un minimum social 17 milliards de dépenses d allocations en 2008, soit 0,9 % du PIB Ces allocations garantissent un revenu minimum sont non contributives Elles se différencient notamment par : leurs conditions d éligibilité le calcul et le niveau de leurs montants leur relation à l insertion professionnelle
Introduction : plan de l intervention La construction progressive d un revenu minimum : 1956-2002 : des minima catégoriels au filet de sécurité é procuré par le RMI La critique du système à la fin des années 1990 et le processus de réforme des minima sociaux Comment éviter les trappes à inactivité et améliorer le retour à l emploi des bénéficaires en capacité de travailler? Comment rendre le système plus cohérent?
Construction progressive d un droit à un revenu minimum 1956-1975 : les personnes en incapacité de travailler La protection sociale, basée sur une logique contributive dans le cadre professionnel, doit assurer les personnes en capacité de travailler Les premiers minima concernent les personnes en incapacité de travailler : Les personnes âgées avec des droits à la retraite insuffisants : le minimum vieillesse en 1956 Les invalides : le minimum invalidité (ASI) en 1957 les personnes handicapées : l AAH en 1975
1976-1980 : les personnes fragilisées par les ruptures familiales Multiplication des situations d isolement des personnes ayant des enfants à charge (ruptures familiales) l Création de minima pour personnes isolées l API en 1976 l assurance veuvage en 1980
1979-19841984 : les chômeurs en fin de droits Apparition du chômage de masse et de longue durée => assistance pour les chômeurs non couverts l ASE en 1979 L augmentation du chômage met en péril la situation financière de l assurance chômage Les partenaires sociaux réduisent la durée d indemnisation du chômage => augmentation du nombre de chômeurs en fin de droits Scission du régime d indemnisation d du chômage en 1984 un régime assurantiel financé par les cotisations un régime de solidarité, financé par l Etat (ASS et AI)
1988 : les exclus du système de protection sociale et la création du RMI L approche catégorielle montre ses limites : des personnes avec peu de ressources restent de côté, notamment des hommes seuls d âge actif Après des expériences locales, le RMI est créé : Il est le dernier filet de sécurité pour les plus de 25 ans ou les personnes ayant des enfants à charge En contrepartie, les bénéficaires s engagent à suivre des actions d insertion, accompagnés par la collectivité Le RMI est pérennisé é en 1992 après la parution du rapport du comité d évaluation du RMI
2001-2002 : les difficultés particulières d insertion pour les seniors Dans un contexte de chômage très élevé, création du RSO dans les DOM : pour les bénéficiaires du RMI depuis plus de deux ans âgés de plus de 50 ans qui s engagent à quitter définitivement le marché du travail Création d une nouvelle allocation chômage, l AER, pour les personnes ayant cotisé 160 trimestres à l assurance vieillesse mais ayant moins de 60 ans, dont la plupart seront dispensées de recherche d emploi
D autres aides améliorent la situation des plus modestes Les allocations logement sont ciblées sur les ménages locataires ou accédants à revenus modestes et sont cumulables avec les minima sociaux (à un forfait près) ciblées sur les familles en 1948 1972 : élargissement aux personnes âgées, infirmes, travailleurs de moins de 25 ans 1978 : tous les ménages logeant dans des logements conventionnés ou bénéficiant de certains prêts étendue progressive du champ des bénéficiaires éfi i i jusqu au bouclage en 1993 puis harmonisation des barèmes au début des années 2000 La CMU créée en 1999 pour garantir une assurance maladie à tous les résidents réguliers et stables en France financement de la complémentaire pour des personnes à revenus modestes
La critique du système des minima sociaux à la fin des années 1990 Le nombre de bénéficiaires du RMI est beaucoup plus élevé que prévu et ne diminue pas malgré l amélioration de la conjoncture du marché du travail Conçu comme un dispositif temporaire, ses bénéficaires peuvent y rester longtemps, ce qui montre leurs difficultés d insertion professionnelle Le débat se focalise sur deux aspects : l existence possible de trappes à inactivité la complexité du sytème des minima sociaux et plus généralement, les incohérences du système de protection sociale
Les difficultés d insertion sur le marché du travail Les bénéficiaires de minima sociaux, notamment du RMI, pourraient être enfermés dans leur statut en raison d une faible incitation financière à travailler, qui peut être accentuée par l existence de droits connexes Il faut cependant garder à l esprit les autres freins à la reprise d emploi : problèmes de santé, de transport, de modes de garde, déficit de formation Et les motivations autres que financières iè à la reprise d emploi
Améliorer le retour à l emploi des bénéficiaires de minima sociaux d âge actif 1998 : réforme de l intéressement du RMI et extension aux autres minima sociaux d âge actif (API, ASS, AI) Limiter les effets de seuil réforme de la TH, de l impôt sur le revenu modification du barème des allocations logement Prime pour l emploi en 2001 => gains financiers plus importants pour les personnes reprenant un emploi au moins à temps partiel, faibles pour les personnes à temps très partiel
Améliorer le retour à l emploi des bénéficiaires de minima sociaux d âge actif Trois grandes réformes : 2003 : décentralisation du RMI plus impliquer les conseils généraux pour améliorer l insertion linsertion (référent) création du CI-RMA 2005 : deux contrats aidés ciblés sur les bénéficiaires du RMI, de l API, de l ASS et de l AAH : contrat d avenir dans le secteur non marchand et CI-RMA dans le secteur marchand 2006 l i l t à l l i t l d it t 2006 : loi sur le retour à l emploi et les droits et devoirs des bénéficaires de minima sociaux
Améliorer les ressources des personnes ne pouvant travailler Parallèlement au renforcement de l incitation à la reprise d emploi pour les bénéficiaires du RMI, de l API et de l ASS Revalorisation des minima pour les personnes en incapacité de travailler AAH, minimum vieillesse : objectif de revalorisation de 25% en cinq ans
Simplifier le système global des minima sociaux De nombreux minima avec une variabilité dans les montants maximaux bases ressources (période de référence, nature des resources retenues) prises en compte de la composition familiale droits connexes durées les prises en compte dans la durée d assurance pour la retraite accompagnements proposés Rapprochement RMI, API et ASS via l intéressement, lescontratsaidés aidés Suppression de l AER, programmation de celle de l AV
Le RSA s inscrit dans la lignée de ces évolutions tout en introduisant une rupture Fusion du RMI et de l API Le RSA rend le travail financièrement plus intéressant en remplaçant les dispositifs d intéressement par un mécanisme pérenne qui i garantit que le revenu augmente quand les revenus d activité s améliorent qui compense la faiblesse des revenus d activité pour l ensemble des travailleurs pauvres en supprimant les droits connexes Organise l accompagnement des bénéficiaires en privilégiant le plus possible l accompagnement professionnel par le service public de l emploi Concerne aussi les jeunes sans enfants à charge, laissés de côté depuis leur exclusion de l AI en 1992.
Conclusion La complexité du système français des minima sociaux est le fruit d une construction historique, mais tend dà se réduire Deux catégories de minima sociaux se sont finalement constituées les minima pour les personnes en incapacité de travailler (minimum vieillesse l ASI, l AAH) avec des montants plus élevés Les minima sociaux dont les bénéficiaires sont tenus de s insérer (RSA, ASS, AI-ATA) Le RSO et l AV occupent une place à part La question de la revalorisation des minima sociaux La question de la revalorisation des minima sociaux est aussi posée : permettent-ils de mener une vie digne?
Sources Emmanuelle Nauze-Fichet, 2010, Historique des minima sociaux, in Les minima sociaux 2009-2010, années de transition, ouvrage DREES http://www.sante-sports.gouv.fr/les-minima-sociaux- et-le-rsa
Nombre d allocataires au 31/12/2009 2009 Revenu de solidarité active (RSA) socle 1 313 920 Revenu minimum d'insertion (RMI) 139 394 Revenu de solidarité (RSO) 12 764 Allocation de parent isolé (API) 29 763 Allocation de solidarité spécifique (ASS) 346 150 Allocation équivalent retraite - remplacement (AER) 59 685 Allocation temporaire d'attente (ATA) (1) 34 810 Allocation aux adultes handicapés (AAH) 883 337 Allocation supplémentaire d'invalidité (ASI) 91 917 Minimum vieillesse 582 890 Allocation veuvage (AV) 5 800 Ensemble 3 500 430 RSA "activité seul" 416 234