Gestion du risque hémorragique en radiologie interventionnelle musculo-squelettique



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Transcription:

Gestion du risque hémorragique en radiologie interventionnelle musculo-squelettique Thibaut DELCHAMBRE 1, Vincent DUCOULOMBIER 2, Jean-François BUDZIK 1 Service d imagerie Médicale (1), service de Rhumatologie (2) Groupe Hospitalier de l Institut Catholique de Lille. Faculté Libre de Médecine.

PREAMBULE La radiologie interventionnelle musculo-squelettique Est pratiquée dans de nombreux centres de radiologie publics et privés en routine. Touche toutes les catégories de patients mais surtout au-delà de 40 ans, âge où des comorbidités peuvent apparaître. Reste peu évaluée en terme de risque procédural, en particulier hémorragique. Plusieurs contraintes plus ou moins contradictoires coexistent : Demande des patients (gestion de la douleur +++). Craintes médico-légales (gestes rachidiens essentiellement). Des situations variées sont concernées : Localisation du geste et matériel utilisé. Âge, comorbidités, traitements antiagrégants et anticoagulants. Nous avons recherché des références dans le cadre d une redéfinition de nos protocoles de prise en charge concernant la gestion du risque hémorragique. Ne trouvant pas de conduites à tenir claires, nous avons choisi de mener un travail dans le cadre d une démarche d amélioration des pratiques professionnelles.

NOS OBJECTIFS Prendre en compte la plupart des situations courantes. Simplifier les procédures en évitant les bilans biologiques superflus. Privilégier la sécurité du patient, notamment pour les gestes rachidiens. En se basant au maximum sur les données bibliographiques. Proposer des conduites à tenir quant à : - la prescription d un bilan de coagulation, - la gestion des traitements antiagrégants et anticoagulants, - la réalisation ou non du geste. selon des algorithmes simples permettant : - une gestion autonome par la secrétaire selon les protocoles établis, - une prise de décision rapide du radiologue.

NOTE Dans l optique de faciliter la lecture, nous avons utilisé : - le terme «AVK» pour tous les traitements anti-vitamine K - le terme «acide acétylsalicylique» ou «aspirine», sans détailler les noms commerciaux (ex: Kardégic) ni la posologie (la fonction anti-agrégante étant indépendante de la dose 1 ) - le «clopidogrel» (nom générique du Plavix) pour les autres anti-agrégants (ex : ticlopidine - Ticlid) Les «nouveaux anticoagulants oraux» (publication ANSM 2012 2 ) - le dabigatran etexilate commercialisé sous le nom de Pradaxa - le rivaroxaban (Xarelto ) et l apixaban (Eliquis ) sont mis sur le marché mais ne bénéficient d aucune recommandation concernant les gestes de radiologie interventionnelle. Ils n ont par ailleurs aucun antidote connu. Comme le stipule l Agence Nationale de Sécurité du Médicament 2, «Enfin, soulignons que l absence d antidote et de données validées concernant la surveillance biologique est préoccupante en cas de surdosage ou de nécessité d un geste chirurgical en urgence.» Nous ne traiterons pas de ces produits, mais ne pouvons que vous recommander la plus grande prudence en l absence de recul et de données fiables. 1 http://www-sante.ujf-grenoble.fr/sante/corpus/discplines/hemato/hemothromb/hp1/leconimprim.pdf 2 http://ansm.sante.fr/var/ansm_site/storage/original/application/901e9c291a545dff52c0b41365c0d6e2.pdf

MODE D EMPLOI Une navigation par lien hypertexte est proposée sur une partie du document. Cliquez directement sur les cartouches pour naviguer dans les arbres décisionnels. Une icône «maison» permet un retour au menu. Un cartouche gris en bas de l écran permet un aller simple à la conclusion. Arbre décisionnel médical (traitements et troubles de coagulation)

Liste des abréviations AAP : anti-agrégant plaquettaire. AC : anticoagulant. AT direct : antithrombine direct. AFSSAPS : agence française de sécurité sanitaire des produits de santé. AVK : anti-vitamine K. BSAD ; bourse sous acromio deltoïdienne. HBPM : héparine de bas poids moléculaire. HAS : haute autorité de santé. HNF : héparine non fractionnée. Hte : hématocrite. IAP : infiltration inter-articulaire postérieure. IV : intra veineuse. MT : médecin traitant. NFS-Pl : numération formule sanguineplaquettes. RI : radiologie interventionnelle. RIMS : radiologie interventionnelle musculo-squelettique. SRI : Société de Radiologie Interventionnelle. TCA : temps de céphaline activée. TP / INR : taux de prothrombine / international normalized ratio.

Arbre décisionnel pour la secrétaire (prise de rendez-vous) Arbre décisionnel médical (traitements et troubles de coagulation) Méthodologie et références

Arbre décisionnel pour la secrétaire (prise de rendez-vous)

INFILTRATIONS / ARTHROGRAPHIES Sternoclaviculaire Epaule Rachis Coude Poignet Main et doigts Hanche Genou Cheville Tarse, Soustalienne Avant-pied

Rachis Infiltration foraminale Infiltration épidurale Infiltration articulaire postérieure Saccoradiculographie Hiatus sacrococcygien

EPAULE Gléno-Humérale Tendon du biceps Acromioclaviculaire BSAD Ponction Aspiration

HANCHE Articulaire Conflit iliopsoas Tendons fessiers

GENOU Articulaire Kyste poplité Tendons

Infiltration épidurale/foraminale rachidienne Cervicale, lombaire (dont foramen sacré et hiatus) et thoracique. BILAN DE COAGULATION SYSTEMATIQUE ARRET IMPERATIF DE TOUT TRAITEMENT ANTIAGREGANT ou ANTICOAGULANT SI ACCORD DU MEDECIN TRAITANT Acide Acetylsalicylique (Aspirine) : 7 jours complets. Clopidogrel (Plavix) : 10 jours complets. AVK : relais par HBPM (pas d injection le jour du geste).

Infiltration articulaire postérieure rachidienne Cervicale, lombaire (dont foramen sacré) et thoracique. BILAN DE COAGULATION SYSTEMATIQUE ARRET SOUHAITABLE DE TOUT TRAITEMENT ANTIAGREGANT ou ANTICOAGULANT SI ACCORD DU MEDECIN TRAITANT SINON POSSIBLE SOUS ASPIRINE PREVENIR LE RADIOLOGUE Acide Acetylsalicylique (Aspirine) : 7 jours complets. Clopidogrel (Plavix) : 10 jours complets. AVK : relais par HBPM (pas d injection le jour du geste).

GESTE PERIPHERIQUE PROFOND Epaule articulaire, ponction-aspiration de calcifications de l épaule, Hanche, Ponction de kyste poplité. BILAN DE COAGULATION SYSTEMATIQUE ARRET SOUHAITABLE DE TOUT TRAITEMENT ANTIAGREGANT ou ANTICOAGULANT SI ACCORD DU MEDECIN TRAITANT SINON : POSSIBLE SOUS ASPIRINE PREVENIR LE RADIOLOGUE Acide Acetylsalicylique (Aspirine) : 7 jours complets. Clopidogrel (Plavix) : 10 jours complets. AVK : relais par HBPM (pas d injection le jour du geste).

GESTE PERIPHERIQUE SUPERFICIEL Acromio-claviculaire, BSAD, Coude, Main, Poignet, Doigts, Genou articulaire, Cheville, Pied, Tendons fessiers, Tendon du biceps. PAS DE BILAN DE COAGULATION Systématique PAS D INTERRUPTION systématique DES TRAITEMENTS ANTICOAGULANTS SI PRISE d AVK : SI ANTECEDENT A RISQUE : Maladie du sang, du foie PRESCRIPTION d un bilan PRESCRIPTION d un bilan PREVENIR LE RADIOLOGUE PREVENIR LE RADIOLOGUE

Arbre décisionnel médical (traitements et troubles de coagulation)

Classification des actes à risque hémorragique Risque hémorragique élevé : - Ponction-infiltration rachidienne cervicale ou lombaire, épidurale ou intradurale. - Ponction-infiltration rachidienne cervicale, foraminale. - Ponction-biopsie discale ou osseuse «profonde» - Cimentoplastie. Risque hémorragique faible : - Ponction-infiltration simple des articulations périphériques (hors coxofémorale et gléno-humérale). - Infiltration périarticulaire, dont BSAD. - Infiltration canalaire superficielle. Risque hémorragique modéré : Ponction-infiltrations : simple des articulations coxo-fémorales et glénohumérale rachidienne articulaire postérieure rachidienne dorsale costo-vertébrale Infiltration sacro-iliaque kyste poplité sterno-claviculaire Lavage articulaire d une articulation périphérique Ponction Capsulodistension Ponction-trituration de l épaule Biopsie synoviale Biopsie osseuse «superficielle» Infiltration canalaire profonde (type Alcock) Tenotomie percutanée Notre classification est une synthèse de celles de la HAS et de la SRI, secondairement corrigée suite au travail de Potet et al., au document AFSSAPS 2010 et à nos critiques. (cf chapitre méthodologie)

Gestion des traitements antiagrégants et anticoagulants Nécessité d anticipation d une anomalie du bilan de coagulation «tout venant», hors relais AVK : réception des résultats au moins 24h avant le geste (éviter le déplacement inutile du patient). Gestes à haut risque Gestes à risque modéré Clopidogrel Arrêt > 7 jours avant geste* Arrêt > 7 jours avant geste* Acide acétylsalicylique Arrêt > 7 jours avant geste* Ne pas arrêter** HBPM Pas d injection 24h avant Pas d injection 12h avant * ½ vie des plaquettes = 5 jours. D où 5 jours d arrêt = restitution de 50% du pool de plaquettes fonctionnelles. Nous préconisons 7j en anticipation des incompréhensions / défauts de compliance. ** Au rachis, seule l infiltration articulaire postérieure est dans ce cadre. Gestes à risque faible Ne pas arrêter Ne pas arrêter Pas d injection 12h avant Ce tableau est élaboré d après l article de Potet et al, basé initialement sur les recommandations de la SRI, puis modifié selon les données de l HAS, du document AFSSAPS 2010 et nos critiques. (cf chapitre méthodologie)

BIOPSIES OSSEUSES Nous faisons le choix de prescrire un bilan de coagulation systématique afin de mieux appréhender l environnement du geste (notamment la durée de surveillance post-procédure). RACHIS PERIPHERIQUE PROFOND PERIPHERIQUE SUPERFICIEL ARRET DE TOUT TRAITEMENT ARRET DE TOUT TRAITEMENT Aspirine : OK Arrêt des autres antiagrégants et des AVK

GESTES RACHIDIENS Infiltration rachidienne épidurale ou foraminale, articulaire postérieure, saccoradiculographie, hiatus sacro-coccygien, cimento/kypho - plastie. TP > 60%, INR < 1,5 Plaquettes > 80.000 1 SI ALLONGEMENT DU TCA AVIS HEMATOLOGIQUE 1 Données AFSSAPS Juin 2003, reprises sur le site de la SFAR. www.sfar.org

Gestes à risque modéré (= pour lesquels un bilan a été prescrit) Epaule articulaire, ponction-aspiration de calcifications de l épaule, Hanche, Ponction de kyste poplité, sterno-claviculaire, sacro-iliaque, capsulodistension, canalaire profonde. TP > 60%, INR < 1,5 Plaquettes > 50.000 SI ALLONGEMENT DU TCA AVIS HEMATOLOGIQUE

Gestes à risque faible ( = en cas d antécédent à risque ayant justifié la réalisation d un bilan de coagulation) Acromio-claviculaire, BSAD, Coude, Main, Poignet, Doigts, Genou articulaire, cheville, pied, tendons fessiers, tendon du biceps. TP > 60%, INR < 3 Plaquettes > 50.000 SI ALLONGEMENT DU TCA AVIS HEMATOLOGIQUE.

Méthodologie et références

Matériel et méthodes Ce travail est réalisé dans le cadre d une démarche d amélioration des pratiques professionnelles. Il se base sur : - une revue de la littérature scientifique. - les publications des agences gouvernementales et des sociétés savantes. - les échanges avec nos cliniciens correspondants, notamment cardiologues, neurologues, hématologues, traumatologues et rhumatologues. et bien sûr nos partis pris!

Balance bénéfices / risques Les gestes d infiltration ou d arthrographie sont réalisés à but fonctionnel (stratégie de diagnostic et/ou de gestion de la douleur). Ils ne sont jamais à réaliser dans l urgence pour ces raisons. Les conséquences hémorragiques peuvent être dramatiques sur le plan fonctionnel (rachis ++). L arrêt d un traitement antiagrégant ou anticoagulant doit être réfléchi car les conséquences peuvent être également dramatiques, engageant potentiellement le pronostic vital (thrombose de stent, récidive d accident thrombotique). La dimension médico-légale et la responsabilité du radiologue ne peuvent plus être ignorées ou minorées en 2013.

Données bibliographiques Le risque hémorragique des procédures interventionnelles percutanées a été discuté dans deux sources officielles. Des recommandations ont été édictées. Il s agit principalement de : - l Haute Autorité de Santé (France). - la Société de Radiologie Interventionnelle (USA). La HAS a publié en 2008 des recommandations sur la gestions des AVK. Une partie de ce texte concerne les actes à risque hémorragique. La SRI (société de radiologie interventionnelle) a défini une stratification du risque hémorragique des procédures interventionnelles percutanées réalisées en radiologie. Celles-ci ont ainsi été classées selon leur risque hémorragique (faible, modéré, fort). Elle édite ainsi des recommandations du comité de standardisation des pratiques de la SRI, basées sur un consensus d experts en RI des USA, sur des données de la littérature essentiellement anglo-saxonne. http://www.has-sante.fr/portail/upload/docs/application/pdf/2008-09/surdosage en avk situations à risque et accidents hemorragiques recommandations v2.pdf

Données bibliographiques : SRI Aucun geste de radiologie interventionnelle musculo-squelettique de routine n y est classé en tant que «procédure à haut risque hémorragique». Les données de la SRI concernant : - les «vertébroplastie, kyphoplastie, ponction lombaire, injection épidurale» peuvent être appliquées aux gestes de RIMS «rachidiens», sans distinction. - les «biopsie ou drainage intra ou rétro-péritonéal et thoracique» peuvent être appliqués aux gestes de RIMS «périphériques profonds à risque modéré». - les «biopsie, aspiration ou drainage superficiel» peuvent être appliqués aux gestes de RIMS «périphériques superficiels à risque faible».

Données bibliographiques risque hémorragique de l acte (selon HAS et SRI) Biopsie et apparentés : Rachis à haut risque - Discale. - Cimentoplastie. Rachis à risque modéré Périphérique à risque modéré - Synoviale : glénohumérale, coxo-fémorale - Osseuse. - Parties molles sousaponévrotiques. Périphérique à risque faible - Parties molles extraaponévrotiques. - Synoviale : pied - cheville / genou main - poignet / coude (dont kystes arthro-synoviaux) - Ténotomie percutanée. Ponction Infiltration ou lavage articulaire et apparentés : - épidurale ou intradurale cervicale ou lombaire. - foraminale cervicale. - Foraminale lombaire. - IAP. - Costo-vertébrale. - Sacro-iliaque. - Hiatus sacrococcygien. - Gléno-humérale - Coxo-fémorale - Kyste poplité - Sterno-claviculaire - Canalaire profonde (Alcock par exemple) - pied - cheville / genou - main - poignet / coude (dont kystes arthro-synoviaux) Infiltration périarticulaire et apparentés : - Hanche - Bassin - Epaule - Bourse ilio-psoas - BSAD - main - poignet / coude - pied - cheville / genou - tendon moyen fessier

Données bibliographiques conduite à tenir selon les traitements Numération plaquettaire - selon Shiffer et al, des biopsies osseuses médullaires pouvaient être réalisées pour des taux de plaquettes inférieurs à 20000/UL avec des opérateurs expérimentés, sans risque hémorragique accru. - de même plusieurs études (Howard et al, 2000 ; Vavricka et al) retrouvent un faible taux de complication après ponctions lombaires à taux de plaquettes inférieur à 25000 UL TCA Un TCA allongé justifie un avis du médecin biologiste : - nécessité de doser certains facteurs de coagulation? - évaluation du risque hémorragique en fonction de la procédure.

INR (source HAS) Données bibliographiques conduite à tenir selon les traitements La valeur de 1,5 (1,2 en neurochirurgie) peut être retenue comme seuil d INR endessous duquel il n y a pas de majoration des complications hémorragiques périopératoires. «Il est rappelé que les injections sous-cutanées peuvent être réalisées sans interruption des AVK, mais que les injections intramusculaires présentent un risque hémorragique et sont déconseillées.» «Toutefois, la prise d autres médicaments interférant avec l hémostase, ou l existence d une comorbidité, augmente le risque hémorragique et peut conduire à choisir l interruption de l AVK.» 2 < INR < 3 : possibilité de réalisation d ACTES A RISQUE FAIBLE. Hématocrite : ne semble pas être un paramètre pertinent car : Il n y a pas de consensus concernant sa nécessité de dosage. Il n y a pas de consensus pour une valeur seuil nécessitant de transfuser.

Données bibliographiques conduite à tenir selon les traitements TP /INR TCA Num Pl Gestes rachidiens à risque élevé. OUI OUI OUI* Gestes rachidiens à risque modéré et périphériques à risque modéré. OUI OUI si HNF IV OUI* Gestes périphériques à risque faible. Oui si sous AVK ou Hépatopathie chronique Oui si HNF IV Non en routine *La SRI ne recommande pas la numération plaquettaire en routine pour tous les gestes rachidiens, qu elle classe en risque modéré. Il semble cependant licite de la réaliser compte-tenu des données de l HAS sur le risque fonctionnel. Selon ces données, il ne nous semble pas pertinent de dissocier TP-TCA et plaquettes.

Données bibliographiques conduite à tenir selon les résultats TP /INR TCA Num Pl Gestes rachidiens à haut risque Correction si > 1.5 N Pas de consensus Transfusion recommandée si < 50000/UL Gestes rachidiens à risque modéré et périphériques à risque modéré Correction si > 1.5 N Pas de consensus Transfusion recommandée si < 50000/UL Gestes périphériques à risque faible Correction si > 2 N Pas de consensus Transfusion recommandée si < 50000/UL

Données bibliographiques Manque d essais contrôlés et d études randomisées de grande échelle. L extrapolation des données chirurgicales dans le domaine (bien décrites dans la littérature) à la radiologie interventionnelle semble peu reproductible et fiable. Recommandations basées sur la prise en compte d une seule anomalie isolée de l hémostase, sans prise en compte de l état clinique ou des antécédents des patients. Or, en routine, les comorbidités de patients souvent âgés, et/ou une altération combinée des différents paramètres de l hémostase (primitifs ou sur traitement modifiant l hémostase) doit nuancer la lecture des recommandations. Ceci aboutit à : critique des recommandations de la SRI 1 - une grande variété de pratiques cliniques entre les différents centres. - la personnalisation de la gestion du risque hémostatique en fonction des antécédents du malade, en concertation avec les médecins référents et/ou demandeurs de l acte. L aide de spécialistes de l hémostase peut elle aussi s avérer précieuse dans la gestion de ce risque. Les tableaux de la SRI sont une aide à la prise de décision dans l évaluation du rapport bénéfice du geste versus risque hémorragique encouru. 1 [Periprocedural management of hemostasis risk in interventional radiology]. Potet J, et al.. J Radiol. 2011 Jul-Aug;92(7-8):659-70.

Données bibliographiques : notre critique des classifications d actes Le risque d une infiltration coxo-fémorale est, selon la classification, plus important que celui d une infiltration d épaule. Prenant en charge beaucoup de patients corpulents, nous ne pensons pas qu il soit plus facile de comprimer efficacement un point de ponction à l épaule par rapport à la hanche chez ce type de patients. Le risque hémorragique et les conséquences d une biopsie osseuse ne nous semblent pas homogène. Exemple : calcaneus versus corps vertébral thoracique. Le risque d une infiltration sacro coccygienne est moins important qu une infiltration lombaire, elle-même moins risquée qu une infiltration cervicale. Ces trois gestes étant techniquement épiduraux, cette hiérarchie s efface devant le correctif AFSSAPS 2010 (cf diapositive suivante)

Données bibliographiques : AFSSAPS 2010 «Information importante de pharmacovigilance relative aux cas rapportés de paraplégie/tétraplégie au cours d injection radioguidée de glucocorticoïdes aux rachis lombaire et cervical». Cette note contre-indique l utilisation d Altim et d hydrocortancyl pour l injection épidurale chez : - Les patients présentant des troubles sévères de la coagulation - Les patients traités par : - anticoagulants, - ticlopidine, clopidogrel, autres antiagrégants plaquettaires, - agents anti- thrombotiques. Cette note, postérieure aux données SRI et HAS, n est de fait pas prise en compte dans celles-ci, mais elle est essentielle à connaître dans la mesure où elle introduit une CONTRE-INDICATION médicamenteuse. http://www.afssaps.fr/infos-de-securite/lettres-aux- professionnels-de-sante/casrapportes-de-paraplegie-tetraplegie-au-cours-d-injection-radioguidee-deglucocorticoides-aux-rachis-lombaire-et-cervical

Données bibliographiques problématique du rachis : cible épidurale vs articulaire postérieure. Les données issues de l AFSSAPS sont très claires concernant les voies épidurales, c est-àdire épidurale interlamaire et foraminale. La question des articulations zygapophysaires n est cependant ni discutée ni éludée. Même si la capsule articulaire constitue un obstacle anatomique théorique avec l espace épidural, une opacification épidurale est parfois rencontrée au cours d une infiltration articulaire postérieure. Le bénéfice fonctionnel pour le patient est à mettre en balance avec le risque hémorragique intra-canalaire, de fréquence non estimée, mais de conséquences potentiellement catastrophiques, engendrant un risque médico-légal pour le radiologue. Nous préconisons ainsi: - Une contre-indication au geste sous Clopidogrel et AVK. - Un arrêt de l acide acétylsalicylique si celui-ci est possible (prévention primaire vasculaire). - La réalisation du geste sous acide acétylsalicylique si l arrêt est estimé dangereux par le clinicien. Le radiologue prend dans ce cas la précaution d interrompre le geste dès la sensation de résistance traduisant la réplétion articulaire.

Données bibliographiques : forces et faiblesses FORCES : - identification et gradation du risque hémorragique - existence de données officielles FAIBLESSES : - se concentrent sur les gestes plus «lourds» (vertébroplastie) - ne prennent pas en compte certaines spécificités françaises (notification AFSSAPS 2010) - ne concerne pas directement la plupart des situations courantes (ex : geste sous HNF IV situation peu courante) - peu de conduites à tenir claires pour les situations courantes

CONCLUSION 1/2 Nous espérons que ce travail vous aidera dans votre pratique quotidienne. Il ne se veut pas exhaustif. Certaines situations nécessitent une évaluation par le radiologue et un échange avec les correspondants médicaux. Il vise à limiter les sollicitations du radiologue lors de la prise de rendez-vous en préservant une sécurité optimale du geste. Il ne faut pas perdre de vue que la plupart des gestes sont réalisés à but d amélioration fonctionnelle et ne doivent pas faire courir de risque inutile, hémorragique ou thrombotique.

CONCLUSION 2/2 Ce travail exprime l avis (voulu éclairé!) de deux professionnels curieux. Il ne constitue en rien une recommandation officielle ou opposable. Malgré notre attention, il contient possiblement des zones d ombre ou des incohérences. Nos partis pris sont évidemment discutables. Il se veut par contre une opportunité d échanges entre professionnels, concernant une problématique du quotidien. Nous vous invitons à critiquer ce travail via le système de commentaires disponibles. N hésitez pas à nous faire part de votre expérience, de vos habitudes et de vos désaccords (en les expliquant!).