Université de Ngaoundéré.. Conférence-débat débat: Surliquidité des banques dans la CEMAC et rationnement du crédit aux PME : que faire face à ce paradoxe? Présentation : J. Calvin A. (Cadre de banque; D.E.A en Macroéconomie) 1
Sommaire PARTIE 1 : DEFINITION DES CONCEPTS PARTIE 2 : SOURCES DE LA SURLIQUIDITE PARTIE 3 : CONSEQUENCES DE LA SURLIQUIDITE PARTIE 4 : SURLIQUIDITE ET INSUFFISANCE DE CREDIT : QUE FAIRE? 2
PARTIE 1 : DEFINITION DES CONCEPTS I- De la notion de surliquidité II- Existe il un rationnement du crédi t dans la CEMAC? 3
I- De la notion de surliquidité Après avoir défini la notion de (sur)liquidité, nous donnerons quelques statistiques de la CEMAC. I-1- Définition I-2- Quelques chiffres 4
I-1- Définition de la notion de surliquidité La surliquidité p eut être appréhendée sous deux angles: L optique microéconomique (capacité de financement) L optique macroéconomique (réserves à la banque centrale) 5
I-1-1- L optique microéconomique Au niveau d une banque, la notion de liquidité est appréhendée à travers la trésorerie (capacité de financement). Celle-ci est la somme de trois éléments: solde des opérations de la clientèle; excédent des ressources permanentes sur les immobilisations; solde des divers. 6
I-1-1- L optique microéconomique (suite) Toutefois, rappelons une notion qui peut prêter à confusion, celle de ratio de liquidité. Ce ratio permet au superviseur de s assurer qu une banque est en mesure de faire face aux demandes de la clientèle à tout moment (surtout en cas de rush). Le ratio de liquidité donne aussi la capacité de résistance de la banque en cas de crise. Ratio de liquidité = disponibilités à vue ou à moins d un mois exigibilités à vue ou à moins d un mois 7
I-1-2- L optique macroéconomique La liquidité bancaire est définie comme l ensemble des réserves des banques à la banque centrale: réserves obligatoires placements en appel d offre négatif dépôts en compte courant encaisses 8
I-1-2- L optique macroéconomique (suite) Ainsi, dépôts en compte courant + encaisses = réserves libres ou réserves non rémunérés ou liquidité excédentaire ou surliquidité 9
I-2- Quelques chiffres de la liquidité Évolution de la liquidité bancaire dans la CEMAC 2003-2008 2008 (Millions F CFA) Mois Réserves libres absolu % Réserves obligatoires absolu % janv-03 342 065 85 533 janv-04 338 504-1,04 120 295 40,64 janv-05 422 953 24,95 139 316 15,81 janv-06 681 624 61,16 173 418 24,48 janv-07 1 004 922 47,43 232 725 34,20 janv-08 1 040 592 3,55 381 044 63,73 10 Source:BEAC
I-2- Quelques chiffres de la liquidité (suite) Evolution de la liquidité bancaire dans la CEMAC 2003-2008 1 200 000 Réserves (millions F CFA) 1 000 000 800 000 600 000 400 000 200 000 Réserves libres Réserves obligatoires - 2003 2004 2005 2006 2007 2008 Janvier (année en cours) 11 Source: BEAC
I-2- Quelques chiffres de la liquidité (suite) Comme on peut le constater dans ce graphique, la surliquidité bancaire s est accrue d une manière exponentielle de 204,21% entre 2003 et 2008. On note cependant une pause entre 2007 et 2008, où elle n a progressé que de 3,55%. 12
II- Existe il un rationnement du crédit dans la CEMAC? Notons de prime à bord qu il n y a pas de rationnement de crédit. Car l expression «rationnement» renvoie à une décision administrative de freiner le crédit. Nous parlerons plutôt d insuffisance de crédit. Dans un premier temps, nous présenterons quelques chiffres, puis nous évoquerons les raisons de l insuffisance dans l octroi des crédits. 13
II-1- Quelques chiffres comparatifs des crédits au secteur privé 50 40 Crédit au secteur privé (Pourcent du PIB) Asie en développement 30 20 Europe en développement 10 0 Afrique sub-saharienne 1 CEMAC 1980 1985 1990 1995 2000 2005 1 Excluding Afrique du South Sud Africa. exclu 14 Source: FMI
II-1- Quelques chiffres comparatifs des crédits au secteur privé (suite) 15 Le crédit au secteur privé rapporté au PIB plafonne autour de 7% depuis plus de 10 ans, soit l un des plus faibles du monde en développement. Il n a rien de comparable avec les 40-50% de l Asie en développement. Les raisons de ce retard sont multiples et les responsabilités partagées entre les différentes parties prenantes: banques, PME, État, etc.
II-2- Contraintes dans l octroi des crédits Ces contraintes seront examinées sous trois angles: II-2-1- Les banques II-2-2- Les PME II-2-3- Les institutions 16
II-2-1- Contraintes dans les banques commerciales coût (rémunération du capital + prime de risque): plafonné par le taux débiteur maximum; prise de risque limité. présence des asymétries d information (peu d informations financières sur les PME); faiblesse de l intermédiation bancaire (Ressources courtes vs emplois longs): dépôts à court terme entraînent les crédits à court terme; manque et/ou insuffisance de garantie; 17
II-2-2- Contraintes dans les PME Détournement des crédits; Projets non bancables; Secteurs d activité non porteurs; Défaut de comptabilité fiable; Manque de transparence; Non respect des engagements. 18
II-2-3- Contraintes dans les institutions Faiblesse du système judiciaire et juridique; Environnement des affaires peu incitatif; 19
PARTIE 2 : SOURCES DE LA SURLIQUIDITE 20 La surliquidité dans la CEMAC a connu deux sources selon les périodes. De 1995 à 1999, les crédits aux gouvernements (accordés par la BEAC dans le cadre des avances statutaires) ont constitué la principale source de surliquidité. Mais de 2000 à 2008, la surliquidité est nourrie par les revenus tirés l envolée des prix du pétrole sur le marché international.
PARTIE 2 : SOURCES DE LA SURLIQUIDITE (suite) 2 0 0 % 1 5 0 % 1 0 0 % E n p o u rc e n t d e la b a s e m o n é ta ire C ré d it a u x g o u v e rn e m e n ts (n e t) Éléments explicatifs de la surliquidité F in d e la d o m in a n c e f is c a le A v o irs e x té rie u rs n e ts 5 0 % 0 % -5 0 % -1 0 0 % 1 9 9 5 1 9 9 6 1 9 9 7 1 9 9 8 1 9 9 9 2 0 0 1 2 0 0 2 2 0 0 3 2 0 0 4 2 0 0 5 2 0 0 6 21 Source: BEAC
PARTIE 2 : SOURCES DE LA SURLIQUIDITE (suite) La principale raison de la surliquidité dans la zone CEMAC est donc la flambée des prix des hydrocarbures sur le marché international. Ce qui a entraîné: Une rentrée importante des devises ; Un rapatriement plus régulier des recettes d exportation via le canal bancaire par les États; 22 Une accumulation des réserves de change.
PARTIE 2 : SOURCES DE LA SURLIQUIDITE (suite) Evolution du Taux de couverture e xtérieure (T.C.E.) de 2000 à 2007 % 120 100 80 60 40 20 T.C.E(%) 0 2000 2001 2002 2003 2004 2005 2006 2007 Année 23 Source: BEAC Le minimum statutaire du TCE est de 20%
PARTIE 2 : SOURCES DE LA SURLIQUIDITE (suite) Comment les avoirs extérieurs nets influencent-ils l inflation? A travers la masse monétaire! Concrètement, ce poste n'est qu'une contrepartie de la masse monétaire, c'est-à-dire un des éléments à partir desquels elle est créée. La dynamique du commerce extérieur (prix du baril et quantités échangées) en accroissant les réserves poussera certainement la masse monétaire vers le haut, d'où les tensions inflationnistes (à volume de richesse identique). 24
PARTIE 2 : SOURCES DE LA SURLIQUIDITE (suite) Concrètement, soit l équation de l'approche monétaire de la balance des paiements suivante: %MM = %AEN + %CE + %CNG + %APN. Avec MM: masse monétaire; AEN: Avoirs extérieurs nets;(1) CE: Crédits à l économie;(2) CNG: Crédits nets au gouvernement;(3) APN: Autres postes nets.(4) 25
PARTIE 2 : SOURCES DE LA SURLIQUIDITE (suite) (4) Est considéré comme nul; (3) Est connu et fixé (avances de la BEAC aux Trésors fixées à 20% des recettes budgétaires internes de l année précédente); Ainsi, toute variation de (1), pour un niveau de (2) contrôlé (taux directeurs et réserves obligatoires), entraîne une variation de la masse monétaire. 26
CONSEQUE NCES DE LA SURLIQUIDITE PARTIE 3 : CONSEQUENCES DE LA Nous avons dénombré cinq conséquences de la surliquidité: I- inflation; II- appréciation du taux de change réel; III- fuite des capitaux; IV- inefficacité de la politique monétaire; V- indiscipline budgétaire. 27
I- Tension inflationniste elle peut menacer la stabilité bancaire; elle grève le bilan des banques; elle réduit l efficacité de la politique monétaire en empêchant le bon fonctionnement des canaux de transmission. 28
II- Appréciation du taux de change ré el Le taux de change réel est le taux de change nominal corrigé du rapport entre les prix chez le partenaire extérieur et les prix domestiques (cotation à l incertain). Lorsque les prix domestiques se situent à un niveau supérieur aux prix extérieurs, il y a appréciation du taux de change réel; ce qui entraîne une perte de compétitivité de l économie domestique. 29
II- Appréciation du taux de change ré el (suite) 30 En d autres termes, si l inflation de la CEMAC est supérieure à l inflation de la zone Euro (son principal partenaire économique), le taux de change réel entre le F CFA et l Euro s apprécie, bien que le taux de change nominal soit fixe. Il y aura donc perte de compétitivité extérieure des économies de la CEMAC.
III- Risque de fuite des capitaux Dans une situation de surliquidité, si les détenteurs de capitaux ne trouvent pas d emplois bancables, la tentation est grande de les faire fructifier ailleurs que dans la sous région. Ce qui fait augmenter le risque de sorties plus importantes de capitaux. 31
IV- Impact négatif sur les politiques des banques Répudiation : refus de recevoir l épargne des clients par les banques; Risque d augmentation des créances douteuses (accroissement des mauvais crédits); Violation des règles prudentielles. 32
V- Indiscipline budgétaire Face à un afflux massif de revenus non (ou mal) anticipés, les états se lancent dans de grands projets dans l achèvement est incertain. Car tout reflux des revenus espérés entraîne l arrêt des travaux. Cette politique pro-cyclique dénote d un manque de stratégie de développement bien pensé. 33
PARTIE 4 : SURLIQUIDITE ET INSUFFISANCE DE CREDIT : QUE FAIRE? Le problème peut être analysé à deux niveaux : macroéconomique et microéconomique. I- Aspect macroéconomique 34 II- Aspect microéconomique
I- Aspect macroéconomique L aspect macroéconomique se basera sur trois axes: I-1- La politique monétaire I-2- La politique budgétaire I-3- Les réformes structurelles 35
I-1- La politique monétaire Il est préconisé la poursuite de la politique monétaire engagée consistant en la: stérilisation des avoirs extérieurs par le relèvement des coefficients des réserves obligatoires; ponction de la liquidité par les appels d offre négatifs; 36
I-1- La politique monétaire (suite) politique des taux d intérêts; mise en place d une politique d openmarket avec l émission des titres publics. 37
I-1- La politique monétaire (suite) Cette politique est vigoureuse depuis 2007: 1, 6 0 0 1, 4 0 0 1, 2 0 0 M il l i a r d s d e f r a n c s C F A R é s e r v e s d e s b a n q u e s 1, 0 0 0 8 0 0 6 0 0 R é s e r v e s o b l ig a t o i r e s e t a p p e ls d 'o f f r e n é g a t i f s 4 0 0 2 0 0 0 2005Q1 2005Q2 2005Q3 2006Q1 2006Q2 2006Q3 2006Q4 2004Q4 2005Q4 2007Q1 2007Q2 2007Q3 38 Source: BEAC
I-2- La politique budgétaire Trois pistes sont à explorer au niveau de la politique budgétaire: améliorer de la qualité de la dépense; mener une politique budgétaire contra-cyclique; renforcer l intermédiation par la recapitalisation des banques (augmentation de leurs fonds propres); émission des titres publics. 39
I-3- Les reformes structurelles Amélioration du système judiciaire et de l environnement des affaires; Renforcement du marché interbancaire pour une meilleure gestion de la trésorerie des banques (open market); Mise en place d une centrale des bilans; Création des banques d investissement; Création des sociétés de capital risque. 40
I-3- Les reformes structurelles (suite) Création d une centrale des impayées; Mise en place d une centrale d informations financières; Reforme des systèmes de paiement. 41
II- Aspect microéconomique Tous les acteurs économiques ont un rôle à jouer dans la recherche des solutions au problème paradoxal observé dans la CEMAC: II-1- L état II-2- La BEAC et la COBAC II-3- Les banques II-4- Les PME 42
II-1- L état C est l acteur principal dans tout le processus. Quelques actions à mener par l état: Encadrement et assistance des PME ; Politique ambitieuse de moyen et long terme pour la promotion des PME, par secteur d activités ; 43
II-1- L état (suite) Recyclage des excédents budgétaires par l augmentation des ressources longues des banques publiques ou para-publiques; Bonus fiscal pour les banques les plus engagées au financement des PME, au cas les ressources le permettraient. 44
II-2- La BEAC et la COBAC Ces deux institutions devraient: Renforcer la réglementation bancaire en s appuyant sur les standards internationaux (comité de Bâle) ; Envisager la possibilité d ouvrir (en cas de besoin) un guichet spécial pour refinancer les banques ayant accordé les crédits aux PME; Faire des prévisions de liquidité et déterminer les objectifs de ponction; 45
II-2- La BEAC et la COBAC (suite) Dynamiser le marché régional des titres publics par: les certificats de dépôt (appel d offres négatif); les obligations du trésor (qui serviront de référence sur le marché : benchmarking) 46
II-3- Les banques Les banques ont intérêt à octroyer des crédits aux PME. Pour cela, elles devraient: Créer des structures de conseil aux PME ; Mener des politiques volontaristes de crédit aux PME; 47
II-4- Les PME Principaux acteurs du développement de la sous région, pour être crédibles, les PME devraient: Tenir une comptabilité fiable ; Cibler les secteurs d activité porteurs ; Promouvoir la bonne gouvernance et la transparence; Revoir la structure des sociétés (dépasser la sphère familiale pour aller vers de véritables sociétés anonymes). 48
CONCLUSION La surliquidité est un phénomène réel dans la CEMAC. Elle est alimentée par les excédents de revenus tirés de la flambée des prix des hydrocarbures. Pendant ce temps, les PME éprouvent des difficultés de trouver le financement de leurs activités. Il est préconisé: de mener une politique monétaire qui garantisse la maîtrise de l inflation, et par conséquent la stabilité du système bancaire; 49
CONCLUSION (suite) une politique budgétaire qui lisse ses dépenses dans le temps (contra-cyclique); que les banques mènent des politiques moins averse au risque, en utilisant des outils de prévision et de gestion du risque; que les PME donnent des signaux positifs par des systèmes comptables fiables; 50
CONCLUSION (suite) que l État : agisse du côté des banques (publiques et para-publiques) en les recapitalisant pour leur donner des ressources longues et fournisse des garanties aux PME, en tirant les leçons des échecs passés (cas du FOGAPE au Cameroun). 51
FIN MERCI POUR VOTRE AIMABLE ATTENTION Contact: azojeca@yahoo. @yahoo.co.uk Site web beac: www.beac beac.int 52