Qu est-ce qu elle nous montre? Description des répondants et résultats généraux Pour quoi faire une enquête sur la PrEP? En France, et contrairement aux Etats-Unis depuis juillet 2012, l utilisation d un traitement anti-vih (prophylaxie pré-exposition (PrEP)) par des personnes séronégatives de manière préventive n est toujours pas autorisée. Jusqu à présent, il n existait pas de données en France sur les caractéristiques (genre, âge, pratiques, etc.) des personnes qui seraient potentiellement intéressées par cette outil et qui, si cela était disponible, auraient l intention d en bénéficier dans le cadre d une offre globale de prévention (accompagnement, dépistages réguliers, counselling). La plupart des études se sont centrées sur l intérêt de prendre la PrEP, qui est un concept assez large, mais peu sur celui de l intention, qui est plus concret. Dans cette enquête deux questions ont été posées pour différencier ces deux concepts : «êtes vous intéressé(e) pour utiliser la PrEP comme moyen de prévention» ; «avez-vous l intention de bénéficier de la PrEP (dans le cadre d une offre globale de prévention) dès qu elle sera autorisée?». Pour recueillir des données à ce sujet, AIDES a lancé une enquête en 2014 dans le but de caractériser les personnes séronégatives qui connaissent, qui sont intéressées et qui auraient l intention d utiliser la PrEP (dans ou hors dispositif). La méthodologie Un questionnaire visant à évaluer plusieurs dimensions (sociodémographiques, comportementales, pratiques de prévention) a été proposé en version papier aux personnes venant se faire dépister à AIDES du 31 mars au 13 avril 2014 (un questionnaire non-répondant a été proposé aux personnes refusant de remplir l enquête). Le questionnaire était également disponible sur plusieurs sites Internet (en majorité des sites LGBT : Yagg, CitéGay, Gayroméo, XtremBoy, Gayvox, Têtu, Dialh, Planetroméo) et relayé sur les réseaux sociaux pendant le mois de mai 2014. Qui a participé à l enquête? 3024 personnes ont répondu au questionnaire : 928 au questionnaire papier lors des actions de dépistage de AIDES (52 % après le dépistage, 82 % l ont rempli de manière autonome, 50 % se trouvaient en Ile de France) et 2096 au questionnaire web.
QUI A REPONDU A L ENQUETE? 65,1 % des répondants étaient des hommes. La moitié des répondants avait 32 ans ou plus. 88 % des répondants étaient nés en France, 64,4 % avaient un diplôme d études supérieures, 54 % se déclaraient en couple au moment de l enquête. Effectif total : 3024 Médiane (min ; max) N (%) 32 (15 ; 87) Âge Lieu de résidence (N=2915) N (%) Ile de France 1770 (60,7%) Genre (N=3013) Autres régions 1145 (39,3%) Homme 1960 (65,1%) Femme 1037 (34,4%) Situation familiale (N=2998) Personne trans 16 (0,5%) En couple 1618 (54%) Célibataire 1380 (46%) Classe d'âge (N=3010) Parentalité (N=2999) Moins de 25 ans 708 (23,5%) Sans enfants 2357 (78,6%) Entre 25 et 29 ans 578 (19,2%) Avec enfants 642 (21,4%) Entre 30 et 39 ans 830 (27,6%) Entre 40 et 49 ans 538 (17,9%) Diplôme le plus élevé (N=2998) 50 ans et plus 356 (11,8%) Etudes supérieures 1930 (64,4%) Baccalauréat 547 (18,2%) Pays de naissance (N=2994) BEP/CAP 399 (13,3%) France 2634 (88%) Aucun diplôme 122 (4,1%) Etranger 360 (12%) Ressources financières (N=2991) Orientation sexuelle (N=2730) Vraiment à l'aise 109 (3,6%) Homme hétéro 527 (19,3%) Plutôt à l'aise 532 (17,8%) Femme hétéro 789 (28,9%) Ca va 913 (30,5%) FSF 100 (3,7%) C'est juste 821 (27,4%) HSH 1298 (47,5%) Difficilement 440 (14,7%) Trans 16 (0,6%) Avec dettes 176 (5,9%)
Zone de naissance pour le personnes nées à Amériques 14% l'étranger Asie 3% Les répondants hétérosexuels nés à l étranger sont plus fréquemment nés en Afrique (78,6 % des hommes hétérosexuels nés à l étranger et 64,5 % des femmes nées à l étranger viennent d Afrique vs. 26,8 % des HSH nés à l étranger ; p<0,001). Europe 26% Afrique 57% Les HSH nés à l étranger viennent plus fréquemment d Europe que les hétérosexuels (43,6 % des répondants HSH sont nés en Europe vs 13,6 % des hommes hétéro ; p<0,001). COMPARAISON ENTRE POPULATIONS CLES Les populations clés questionnées par l enquête Flash PrEP sont significativement différentes dans un ensemble de variables. Les HSH sont significativement plus nombreux que les autres populations à déclarer des relations sexuelles en échange d argent, avoir eu des partenaires occasionnels, avoir eu une infection sexuellement transmissible (IST) au cours des 12 derniers mois et avoir eu recours à un traitement d urgence (TPE) au cours des 12 derniers mois. Les femmes sont plus nombreuses à déclarer avoir un partenaire principal et à être en couple. Finalement, les hommes hétérosexuels sont plus souvent nés à l étranger, ont plus souvent des enfants et se sont plus souvent injectés des drogues que les femmes et les HSH. Hommes hétérosexuels Femmes HSH P-value S'être injecté-e des drogues 28 (5,3%) 23 (2,2%) 39 (3%) p=0,004 Avoir reçu de l'argent, des biens ou de la drogue en échange de rapports sexuels 5 (1%) 14 (1,5%) 66 (5,1%) p<0,001 Avoir un partenaire principal 334 (64,6%) 647 (71,7%) 624 (48,3%) p<0,001 Avoir un (des) partenaire(s) occasionnel(s) 268 (51,8%) 321 (35,2%) 1078 (83,3%) p<0,001 Avoir eu une IST (12 derniers mois) 16 (3,1%) 63 (6,2%) 163 (12,6%) p<0,001 Avoir eu recours au TPE (12 derniers mois) 6 (1,2%) 7 (0,7%) 69 (5,3%) p<0,001 Être né-e à l'étranger 127 (24,1%) 95 (9,2%) 103 (8%) p<0,001 Être en couple 254 (48,5%) 559 (54,4%) 535 (41,2%) p<0,001 Avoir des enfants 173 (32,9%) 311 (30,2%) 128 (9,9%) p<0,001 Avoir un diplôme d'études supérieures 245 (46,6%) 693 (67,3%) 911 (70,3%) p<0,001 Être à l'aise ou très à l'aise financièrement 81 (15,5%) 187 (18,2%) 344 (26,6%) p<0,001
RESULTATS GENERAUX La connaissance, la perception de la PrEP comme un moyen de prévention adaptée, l utilisation de la PrEP sauvage, l intérêt pour la PrEP comme moyen de prévention et l intention de prendre la PrEP dans le cadre d une offre globale de prévention ont été interrogées. Un tiers des répondants déclarent que la PrEP est un moyen de prévention adaptée et 4,5 % ont déjà eu recours à la PrEP sauvage. N Oui % échantillon total N=3024 Connaissance PrEP 3010 1011 33,4 % Connaissance PrEP aux USA 2977 463 15,3 % PrEP comme moyen de prévention adapté 2977 949 31,4 % PrEP sauvage 3000 136 4,5 % Intérêt pour la PrEP (très et assez intéressé) 2991 1483 49 % Intention de bénéficier de la PrEP (dans le cadre d une offre globale de prévention) 1284 Oui sans hésiter 336 11,1 % Oui mais besoin d'information 773 25,6 % CONNAISSANCE DE LA PREP Cette enquête montre le faible niveau d information autour de l existence de cet outil de prévention. Les HSH sont significativement plus nombreux à déclarer déjà connaître la PrEP (17,9 % des femmes, 33,1 % des hommes hétérosexuels et 46 % des HSH). La plupart des personnes qui connaissaient la PrEP ont obtenu l information par les médias ou par une association. 23,4 % des HSH disent l avoir connu via l essai «ANRS Ipergay» (http://www.ipergay.fr/). Moyen de connaissance (plusieurs réponses possibles) PVVIH Autre (entourage, formation) Ipergay Médecin Association Média 6% 11,8% 16,3% 18,5% 35,9% 44,9% 0 10 20 30 40 50 INTERET ET INTENTION D UTILISER LA PREP Dans l ensemble de l échantillon (N=3024) : 49 % déclarent être très ou assez intéressés pour utiliser la PrEP comme moyen de prévention contre le VIH (26,6 % de HSH, 12,6 % de femmes, 7,7 % d hommes hétérosexuels). 36,7 % ont l intention de bénéficier de la PrEP, dès qu elle sera autorisée, dans le cadre d une offre globale de prévention (21,2 % de HSH, 8,5 % de femmes, 5,6 % d hommes hétérosexuels) : 11,1 % le feraient «sans hésiter» et 25,6 % le feraient «mais auraient besoin de plus d information» avant.
Les personnes qui ne sont pas intéressées par la PrEP, le sont en majorité car elles sont déjà satisfaites de leurs pratiques de prévention actuelles. Raisons du non intérêt pour utiliser la PrEP (N=1427) N (%) Je suis satisfait-e de mes pratiques de prévention actuelles 619 (43,4%) Je ne veux pas prendre de médicaments 594 (39,4 %) J ai besoin d'informations supplémentaires sur le Truvada et ses effets 516 (36,2 %) Ca ne répond pas à mes besoins de prévention 463 (32,4 %) Je ne veux pas prendre de médicaments tous les jours 400 (28 %) Je n'ai pas confiance dans l'efficacité de la PrEP 207 (14,5 %) Autres raisons (être en couple stable, effets sur l'organisme, risques pour les autres IST et augmentation des pratiques à risques) 172 (12,1 %) J ai besoin de réfléchir 130 (8,6 %) Je ne veux pas payer pour ce moyen de prévention 100 (7 %) J'ai entendu des propos négatifs sur le Truvada 35 (2,3 %) J'ai peur d'être mal vu-e 13 (0,9 %) LIEU ET PRIX SOUHAITES PAR LES PERSONNES INTERESSEES PAR LA PREP Les personnes intéressées par la PrEP étaient invitées à donner leurs préférences en termes de lieu de délivrance du Truvada et de prix pour un mois de PrEP. L hôpital, que ce soit dans un service spécifique ou dans un service classique, est le lieu de délivrance de PrEP le moins souhaité par les répondants. En revanche, une délivrance dans un cabinet de médecine de ville, dans un dispensaire (de type Centre de dépistage anonyme et gratuit) et dans un local associatif intéressent respectivement plus d un quart des répondants. La majorité des répondants est prête à payer jusqu à 20 euros par mois pour la PrEP (47,4 %) et un quart des répondants ne sont pas prêts à payer. Lieu de délivrance (N=1466) Prix (N=1462) Hôpital, dans un service classique 9 % Hôpital, dans une partie réservée Pas de préférences Local associatif 10,5 % 25 % 26,5 % Plus de 20 euros 27,2% Pas prêt à payer 25,4% Dispensaire en ville (CDAG) Cabinet de médecine de ville 29,5 % 34 % 20 euros 47,4%
QUELQUES CHIFFRES A RETENIR 3 024 personnes ont répondu à l enquête 65,1 % d hommes, 34,4 % de femmes et 0,5 % de personnes trans 12 % sont nés à l étranger 47,5 % se déclarent HSH 33,6 % disent connaître l existence de la PrEP avant d avoir complété le questionnaire 4,5 % ont déjà utilisée la PrEP sauvage 49,6 % des répondants se disent très ou assez intéressés pour utiliser la PrEP comme moyen de prévention 11,1 % de l échantillon total (N=3024) disent avoir l intention «sans hésiter» d utiliser la PrEP dans le cadre d une offre globale de prévention 47,4 % des personnes intéressées par la PrEP se disent prêtes à payer jusqu à 20 euros pour un mois de prévention par le Truvada CONCLUSION L enquête Flash PrEP n est pas représentative de la population. Néanmoins, les résultats présentés dans ce document sont les premiers à décrire en France le niveau de connaissance de la prophylaxie pré-exposition, l intérêt et l intention d y avoir recours dès qu elle sera disponible dans un échantillon important. On remarque que seul un tiers des personnes déclare connaître la PrEP avant le questionnaire. Quand les personnes sont questionnées sur leur «intérêt» pour la PrEP comme moyen de prévention, les résultats indiquent que la moitié des répondants est intéressée. Cependant, seulement une personne sur dix de l échantillon global déclare avoir l intention «sans hésiter» d entrer dans une offre globale de prévention pour bénéficier de la PrEP. Nous souhaiterions que les instances sanitaires s inspirent de l accompagnement global de santé déjà existant dans le projet ANRS-Ipergay lorsque la PrEP sera autorisée. Ces résultats montrent le besoin de communiquer de manière ciblée auprès des différents publics cibles : ceux qui ne connaissent pas encore cet outil et pour qui il pourrait être bénéfique, ceux qui sont intéressés par la PrEP mais qui n ont pas l intention d entrer dans l offre globale, et ceux qui déclarent avoir besoin de plus de renseignements pour utiliser la PrEP dans un cadre d offre de prévention plus large. Nous remercions : les 3024 personnes qui ont répondu à l enquête les partenaires qui ont bien voulu la diffuser le réseau AIDES pour la passation du questionnaire Contact : Daniela Rojas Castro Coordinatrice de recherche communautaire à la Mission Innovation Recherche Expérimentation de AIDES drojas@aides.org