RÉSUMÉ ANALYTIQUE. Inégalités, croissance et redistribution budgétaire

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Transcription:

RÉSUMÉ ANALYTIQUE Le creusement des inégalités et la croissance économique timide dans de nombreux pays ont polarisé l attention sur les politiques visant à stimuler une croissance inclusive. Si certaines inégalités sont inéluctables dans un système économique fondé sur le jeu du marché, des inégalités trop fortes peuvent fragiliser la cohésion sociale, créer des clivages politiques et, à terme, freiner la croissance économique. La présente édition du Moniteur des finances publiques examine la manière dont les politiques budgétaires peuvent contribuer à atteindre les objectifs de redistribution. Elle s intéresse à trois questions importantes : les taux d imposition dans le haut de l échelle des revenus, l instauration d un revenu de base universel et le rôle des dépenses publiques dans l éducation et la santé. Inégalités, croissance et redistribution budgétaire Les inégalités mondiales, mesurées pour tous les citoyens du globe sans tenir compte des frontières nationales, ont reculé au cours des dernières décennies, ce qui s explique par une forte croissance des revenus dans certains grands pays émergents comme la Chine et l Inde. Toutefois, la situation en matière d inégalités à l intérieur des pays est contrastée : si les inégalités de revenu se sont creusées dans la plupart des pays développés, la tendance a été plus inégale dans les autres groupes économiques. Les inégalités ont en réalité diminué dans près de la moitié des pays pour lesquels des données sont disponibles. Les mécanismes qui sous-tendent le creusement des inégalités varient aussi selon les périodes et les régions. Les innovations technologiques, qui favorisent des niveaux de qualification plus élevés, sont un facteur prépondérant. La croissance économique est fondamentale. Dans bon nombre de pays, la croissance a fait en sorte que le creusement des inégalités soit compatible avec une amélioration des niveaux de vie pour les ménages de l ensemble des déciles de la répartition des revenus, malgré des différences notables entre les pays concernant le degré de partage de la croissance. Ces situations diverses et les analyses empiriques semblent indiquer qu il n existe pas de corrélation négative systématique entre l accélération de la croissance et la réduction des inégalités. Les écarts d inégalités entre les groupes économiques et dans le temps sont en grande partie imputables aux différences de politiques budgétaires de redistribution. Dans les pays développés, les impôts et transferts directs diminuent les inégalités de revenu d environ un tiers en moyenne, les trois quarts de cette réduction provenant de transferts. Dans les pays en développement, la redistribution budgétaire est nettement plus limitée, ce qui s explique par une fiscalité et des dépenses moins élevées et moins progressives et par le recours plus important à des impôts indirects régressifs. Progressivité de l impôt sur le revenu et des transferts

La progressivité de la fiscalité et des transferts est une composante essentielle d une redistribution budgétaire efficiente. Dans le haut de l échelle des revenus, des taux marginaux de l impôt sur le revenu qui augmentent avec les niveaux de revenu peuvent assurer une progressivité plus marquée. Si divers instruments peuvent renforcer la progressivité dans le bas de l échelle des revenus, la présente édition du Moniteur des finances publiques se penche sur le revenu de base universel (RBU), qui constitue un transfert identique à l ensemble de la population. Ce projet, qui a fait l objet de nombreux débats récemment, est actuellement expérimenté dans plusieurs pays. Dans l ensemble, le bon dosage d impôts et d instruments de transfert progressifs doit tenir compte de la situation de chaque pays, dont les moyens administratifs, l efficacité du dispositif de protection existant, les pressions budgétaires sous-jacentes et les préférences sociales. La progressivité en haut... Dans quelles proportions les taux d imposition marginaux (et moyens) doivent-ils augmenter avec les revenus? La théorie de la fiscalité optimale recommande des taux marginaux d imposition nettement plus élevés que les taux actuels, qui ont tendance à diminuer, pour ceux qui perçoivent les plus hauts revenus. Une progressivité moins marquée pourrait-elle être une réponse aux craintes liées aux effets potentiellement négatifs de la progressivité sur la croissance? Les résultats empiriques ne valident pas cet argument, du moins pour des niveaux de progressivité qui ne sont pas excessifs. Par conséquent, les pays développés dont l impôt sur le revenu des personnes physiques (IRPP) est relativement peu progressif ont peut-être la possibilité de relever les taux marginaux d imposition supérieurs sans entraver la croissance économique. Différents types d impôts sur la fortune peuvent aussi être envisagés. Les pays émergents et les pays en développement à faible revenu devraient s employer à élargir progressivement le champ d application de l IRPP et à augmenter les impôts indirects, dont les droits d accise sur les produits de luxe et les biens de consommation qui créent des externalités négatives comme l énergie produite à partir de combustibles fossiles, l alcool et le tabac, afin de dégager des financements pour des dépenses progressives. Comment faut-il taxer les revenus du capital (y compris les bénéfices, intérêts et plusvalues)? Les revenus du capital sont répartis de manière plus inégale que ceux du travail. Leur part dans le total des revenus a augmenté au cours des dernières décennies. Ils sont souvent taxés à un taux plus bas (et en recul) que les revenus du travail. Une taxation suffisante des revenus du capital s impose pour protéger la progressivité globale du système de l impôt sur le revenu, en réduisant les incitations à requalifier les revenus du travail en revenus du capital et à travers un traitement plus uniforme des différents types de revenus du capital. De nombreux pays devraient s attacher à réduire les possibilités de fraude et d évasion fiscales. Les impôts sur la propriété immobilière sont à la fois équitables et efficaces. Le recours à ces impôts demeure insuffisant, mais ils peuvent nécessiter des investissements non négligeables dans des équipements

administratifs, en particulier dans les pays en développement à faible revenu.... et en bas de l échelle Le RBU suscite un intérêt grandissant de la part des milieux universitaires, des dirigeants et des citoyens, et plusieurs pays sont en train de l expérimenter sous différentes formes. Si certains pays ont déjà mis en place certains éléments d un RBU (comme les allocations universelles pour enfant à charge et les pensions sociales), aucun pays n a pour le moment instauré un RBU qui concerne l ensemble de sa population. Les partisans du RBU font valoir qu il peut lutter plus efficacement contre la pauvreté et les inégalités que des programmes sous condition de ressources en cas de restrictions de l information, de frais de gestion élevés et d autres obstacles (la réprobation sociale par exemple) qui limitent la perception de prestations. D autres considèrent le RBU comme un instrument permettant de remédier à une baisse des revenus plus marquée et à l incertitude créée par l impact de l évolution technologique (notamment l automatisation) sur les emplois. Il est aussi recommandé comme un moyen de susciter l adhésion aux réformes structurelles. Les opposants soulignent que l universalité induit une déperdition injustifiée de prestations au profit de catégories touchant des revenus plus élevés. Le coût budgétaire élevé lié au RBU fait naître des craintes quant à la faisabilité du projet et au risque d éviction d autres dépenses prioritaires qui favorisent une croissance inclusive. Les adversaires du RBU jugent aussi problématique la déconnexion du revenu et de l activité. Est-il opportun d instaurer un RBU? Dans quelles conditions pourrait-il être souhaitable et comment doit-il être financé? Ou les pouvoirs publics doivent-ils privilégier le renforcement de leurs capacités pour utiliser des transferts sous condition de ressources? La capacité d un RBU à se substituer à un système de prestations sociales en place dépendra des résultats de ce dispositif ainsi que des moyens administratifs des autorités et des perspectives d améliorer le ciblage. Dans les pays en développement, où il est plus probable que le système de prestations en place soit très sommaire et où la protection des catégories percevant des revenus plus faibles peut être très limitée, l instauration d un RBU peut être une solution pour les pays qui souhaitent consolider leurs filets de protection à court terme. Toutefois, pour être efficace et préserver la viabilité des finances publiques, ce renforcement devra être financé par des hausses efficientes et équitables d impôts ou des réductions de dépenses, comme la suppression des subventions universelles aux prix ou l élargissement de l assiette de l impôt sur la consommation, y compris via des taxes sur la consommation qui génèrent des externalités négatives. L insuffisance des capacités pour mobiliser des recettes peut être un facteur important qui pèse sur la mise en place d un dispositif de protection universel. À l autre extrémité, pour les systèmes offrant des prestations généreuses, une large protection et une forte progressivité, le remplacement du système existant par un RBU se

traduirait par une réduction sensible des prestations pour de nombreux ménages touchant des revenus moins élevés, scénario probable dans les pays développés. Il est donc préférable d axer les efforts sur la poursuite du renforcement des systèmes en place en s attaquant directement à toutes les failles restantes des dispositifs de protection sociale, en raison des critères à remplir ou d une perception partielle, et à travers des subventions salariales bien pensées à destination des bas revenus pour les inciter à travailler. Par conséquent, l instauration d un RBU dans ces conditions devra être motivée par d autres facteurs, par exemple améliorer la garantie des revenus dans le contexte de la précarité grandissante de l emploi imputable aux évolutions technologiques rapides et à l automatisation ou susciter l adhésion de la population et de la classe politique aux réformes structurelles, par exemple la suppression des subventions alimentaires ou à l énergie et l élargissement de l assiette de l impôt sur la consommation. Le coût budgétaire d un RBU dépendra du niveau auquel il est fixé. Ainsi, s il était fixé à 25 % du revenu par habitant médian, le coût budgétaire s élèverait à quelque 6-7 % du PIB dans les pays développés et à 3-4 % du PIB dans les pays émergents et en développement. L impact sur les inégalités, avant le financement, serait considérable dans tous les pays : un indice d inégalité, le coefficient de Gini, diminuerait de cinq points en moyenne. Qui plus est, la réduction de la pauvreté dans les pays émergents et en développement serait sensible. Cependant, l impact net d un RBU en termes de redistribution dépendra de son mode de financement. La présente édition du Moniteur des finances publiques analyse un RBU avec des exemples concrets de pays et s appuie sur des méthodes de microsimulation et un modèle d équilibre général pour tenir compte des réactions comportementales, du financement et de l arbitrage entre équité et efficience. Faire face aux inégalités dans l éducation et la santé Les investissements dans l éducation et la santé peuvent contribuer à réduire les inégalités de revenu à moyen terme, à remédier à la persistance de la pauvreté d une génération à l autre, à améliorer la mobilité sociale et, à terme, à favoriser une croissance durable et inclusive. Pour autant, les services d éducation et de santé de nombreux pays présentent encore de grosses lacunes. Combler ces lacunes permettra aussi de lutter contre les inégalités dans d autres domaines, comme les disparités entre filles et garçons et entre les régions. Malgré les progrès dans l éducation, des écarts de scolarisation considérables subsistent entre les groupes socioéconomiques dans pratiquement tous les pays en développement. Dans l ensemble, même lorsque les enfants de familles défavorisées sur le plan socioéconomique sont inscrits dans les systèmes éducatifs, leurs résultats d apprentissage sont nettement moins bons que ceux des élèves issus de milieux plus aisés, ce qui s explique par la qualité médiocre de l enseignement.

S agissant des résultats en termes de santé, les disparités ne se réduisent pas dans de nombreux pays. Dans les pays développés, l écart d espérance de vie entre les hommes ayant suivi des études supérieures et ceux qui ont fait des études secondaires ou inférieures est compris entre quatre et quatorze ans environ et s est même creusé dans certains pays. Le ratio entre le taux de mortalité infantile dans le premier quintile socioéconomique et celui du dernier quintile a augmenté dans environ la moitié des pays émergents et des pays en développement, ce qui s explique principalement par des progrès plus lents dans les catégories défavorisées. Si les avancées en matière d assurance maladie ont contribué à améliorer les résultats sur le plan de la santé, des différences notables subsistent dans certains pays émergents et dans de nombreux pays à faible revenu. Les résultats en termes de santé sont de plus en plus déterminés par des facteurs autres que les soins de santé, parmi lesquels la nutrition, l éducation et les habitudes de vie saines, notamment dans les pays développés. Pour remédier aux inégalités qui subsistent, il faudra mieux cibler les dépenses publiques consacrées aux catégories défavorisées afin d améliorer l accès à une éducation et à des soins de santé de qualité. Cela accroîtra aussi l efficience globale.