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Transcription:

8 OCTOBRE 2007 C.05.0496.F/1 Cour de cassation de Belgique Arrêt N C.05.0496.F FONDS COMMUN DE GARANTIE AUTOMOBILE, dont le siège est établi à Saint-Josse-ten-Noode, rue de la Charité, 33, demandeur en cassation, représenté par Maître Philippe Gérard, avocat à la Cour de cassation, dont le cabinet est établi à Bruxelles, avenue Louise, 523, où il est fait élection de domicile, contre AXA BELGIUM, société anonyme dont le siège social est établi à Watermael- Boitsfort, boulevard du Souverain, 25, défenderesse en cassation.

8 OCTOBRE 2007 C.05.0496.F/2 I. La procédure devant la Cour Le pourvoi en cassation est dirigé contre le jugement rendu le 10 juin 2005 par le tribunal de première instance de Namur, statuant en degré d appel. Par ordonnance du 5 juillet 2007, le président a renvoyé la cause devant la troisième chambre. Le conseiller Philippe Gosseries a fait rapport. L avocat général Thierry Werquin a conclu. II. Le moyen de cassation Le demandeur présente un moyen libellé dans les termes suivants : Dispositions légales violées - articles 1382 et 1383 du Code civil ; - articles 43, 46, 2, et 47 de la loi du 10 avril 1971 sur les accidents du travail ; - articles 31 et 32 de l'arrêté royal du 21 décembre 1971 portant exécution de certaines dispositions de la loi du 10 avril 1971 sur les accidents du travail. Décisions et motifs critiqués Après avoir fait les constatations suivantes : (1) «Le 19 décembre 1995, M. B., préposé de la société Cockerill Sambre, assurée auprès de la [défenderesse], a été victime d'un accident de la circulation sur le chemin du travail dont la responsabilité a été imputée à un conducteur demeuré inconnu» ; (2) «La présente procédure concerne le recours exercé par la [défenderesse] en sa qualité d'assureur-loi de l'employeur contre le [demandeur] qui ne conteste pas devoir intervenir en l'espèce. Celui-ci a délivré une quittance d'un montant de 266.404 francs en

8 OCTOBRE 2007 C.05.0496.F/3 faveur de la [défenderesse] qui estime cependant que ce montant est inférieur à ses débours. [La défenderesse] considère, en effet, qu'elle est subrogée à concurrence de la totalité de ses décaissements, y compris le montant des cotisations sociales et celui du précompte professionnel, ce que conteste le [demandeur] pour ce qui concerne les cotisations sociales» ; (3) «Le point en litige concerne les cotisations sociales. Le [demandeur] estime que, subrogé dans les droits de la victime, l'assureur-loi ne peut pas réclamer au responsable les cotisations sociales qui ne font pas partie de l'indemnisation en droit commun» ; (4) «Par ailleurs le montant réclamé par la [défenderesse] comporte également le salaire hebdomadaire garanti et un complément d'appointements qui correspondent à des obligations propres de l'employeur (Cockerill Sambre) et qui ne peuvent dès lors, selon le [demandeur], être récupérés par la [défenderesse] à sa place» ; (5) «Les pièces produites par la [défenderesse] permettent de constater que le montant de sa réclamation se décompose comme suit : - cotisations patronales : 87.796 euros, - complément d appointements : 45.342 euros, - salaire hebdomadaire garanti : 27.444 euros, - salaire hebdomadaire garanti : 41.166 euros, - salaire normal : 29.731 euros, - salaire normal : 66.323 euros, - salaire normal : 70.897 euros, - salaire normal : 68.610 euros, - salaire normal : 66.323 euros, - salaire normal : 4.574 euros, - frais de justice : 510 euros, soit un total de 508.206 euros» (lire : francs), le jugement attaqué, par confirmation du jugement dont appel, «dit l'action recevable et fondée ; en conséquence, condamne le [demandeur] à payer à la [défenderesse] la somme de 508.205 francs à majorer des intérêts compensatoires au taux légal depuis la date des décaissements» et condamne en outre le demandeur aux dépens. Le jugement attaqué fonde sa décision sur les motifs suivants : 1 ) «En l'espèce, la [défenderesse] démontre avoir retenu les cotisations de sécurité sociale que la victime est tenue de payer en application de l'article 43 de la loi du 10 avril 1971. L'accident s'étant produit sur le chemin du travail, c'est en effet la victime qui, à l'inverse de la situation existant en cas d'accident de droit commun, doit payer ses cotisations, l'assureur-loi n'étant tenu, en vertu de l'article 32 de l'arrêté royal du

8 OCTOBRE 2007 C.05.0496.F/4 21 décembre 1971, que de retenir ces cotisations ('ce que la victime aurait perdu s'il n'y avait pas eu un assureur-loi est le salaire brut, ce qui revient à l'assureur subrogé est donc une indemnité calculée sur la base du salaire brut, tel qu il est payé par cet assureur' [...]). Il est établi par les dispositions légales précitées et une jurisprudence constante que la [défenderesse] peut récupérer le montant total de ses débours, y compris les cotisations sociales qu'elle prouve avoir payées [...], pour autant que ces décaissements ne dépassent pas ce qui est dû suivant le droit commun» ; 2 ) «Pour évaluer ce qui est dû en droit commun, la comparaison doit se faire entre la totalité des indemnités en loi et le total des dommages et intérêts dus pour la réparation du même dommage en droit commun (comparaison in globo). [...] la réparation du dommage en droit commun implique que la partie lésée doit se retrouver dans la situation dans laquelle elle se serait trouvée si la faute n'avait pas été commise. Or, en l'espèce, si l'assureur-loi n'était pas intervenu, la perte subie par la victime aurait été équivalente au montant de son salaire brut, dès lors qu'elle est elle-même tenue au paiement des cotisations sociales en application de la loi du 10 avril 1971. Il est par conséquent établi que les charges qui grèveraient l'indemnité de droit commun à laquelle la victime aurait pu prétendre correspondent aux charges grevant la rémunération ordinaire de la victime». Griefs Conformément aux articles 43, alinéa 1 er, de la loi du 10 avril 1971 sur les accidents du travail et 31 de l'arrêté royal du 21 décembre 1971 portant exécution de certaines dispositions de cette loi, la victime d'un accident du travail qui bénéficie d'une indemnité versée par l'assureur-loi pendant son incapacité temporaire totale est tenue au paiement des cotisations personnelles dues en application des lois en matière de sécurité sociale. En vertu de l'article 32 dudit arrêté royal, ces cotisations sont retenues par l'assureur-loi qui les verse à l'institution chargée de leur perception. En vertu de l'article 47 de ladite loi, l'assureur-loi est subrogé dans les droits de la victime contre le responsable de l'accident ou contre son assureur de responsabilité civile ou

8 OCTOBRE 2007 C.05.0496.F/5 contre le Fonds commun de garantie automobile, tenus d'indemniser la victime suivant le droit commun des articles 1382 et 1383 du Code civil, à concurrence des débours effectués. Les cotisations de sécurité sociale que l'assureur-loi a versées pour la victime font partie des montants que l'assureur-loi a payés à celle-ci à titre d'indemnités. Toutefois, l'assureur-loi ne peut exercer son recours subrogatoire que dans la mesure où celui-ci ne dépasse pas le montant des dommages et intérêts que la victime aurait pu obtenir du chef de son dommage suivant le droit commun : selon l'article 47, 2, de la loi du 10 avril 1971, l'assureur-loi est en effet subrogé dans les droits que la victime ou ses ayants droit auraient pu exercer en vertu du droit commun, en cas de non-indemnisation conformément à l'article 46, 2, alinéa 1 er, selon lequel l'assureur-loi reste tenu du paiement des indemnités résultant de cette loi. Pour le calcul de l'indemnité due en droit commun, il ne faut pas tenir compte des cotisations de sécurité sociale dont la victime est redevable sur l'indemnité que lui a versée l'assureur-loi. Selon le droit commun, les dommages et intérêts destinés à compenser la privation de revenus professionnels pendant une incapacité temporaire totale de travail ne peuvent être calculés que sur la base du salaire brut comprenant les charges sociales, à défaut pour le juge de pouvoir constater une équivalence entre les charges sociales grevant la rémunération perdue et les charges sociales grevant l'indemnité de droit commun, dès lors que la victime en incapacité temporaire totale de travail conserve ses droits sociaux en l'absence de paiement de cotisations de sécurité sociale. Les cotisations de sécurité sociale dont la victime est redevable sur les indemnités qui lui sont versées par l'assureur-loi sont étrangères à ce calcul : il ne résulte pas de l'obligation de la victime d'un accident du travail de payer des cotisations sociales sur les indemnités reçues de l'assureur-loi qu'elle aurait été redevable de pareilles cotisations sur l'indemnité qui lui aurait été versée selon le droit commun en réparation de sa perte temporaire de revenus. En l'espèce, le jugement attaqué considère comme établi que «les charges qui grèveraient l'indemnité de droit commun à laquelle la victime aurait pu prétendre correspondent aux charges grevant la rémunération

8 OCTOBRE 2007 C.05.0496.F/6 ordinaire de la victime», aux motifs que «l'accident s'étant produit sur le chemin du travail, c'est [...] la victime qui, à l'inverse de la situation existante en cas d'accident de droit commun, doit payer ses cotisations [de sécurité sociale], l'assureur-loi n'étant tenu [...] que de retenir ces cotisations» (motif sub 1 ), et que, «si l'assureur-loi n'était pas intervenu, la perte subie par la victime aurait été équivalente au montant de son salaire brut, dès lors qu'elle est elle-même tenue au paiement des cotisations sociales en application de la loi du 10 avril 1971» (motif sub 2 ). Ainsi, tout en ne déniant pas qu'en cas d'accident de droit commun, la victime n'aurait pas dû payer de cotisations sociales (motif précité sub 1 ), le jugement attaqué tient compte, pour établir le montant de l'indemnité qu'aurait pu obtenir la victime en droit commun, montant à concurrence duquel l'assureur-loi peut prétendre être subrogé, de cotisations de sécurité sociale qui sont étrangères à l'établissement du dommage de la victime en droit commun. Dès lors, le jugement attaqué 1 ) condamne le demandeur à payer à la défenderesse, assureur-loi subrogé dans les droits de la victime, un montant supérieur au dommage dont celle-ci aurait pu obtenir la réparation selon le droit commun (violation des articles 1382 et 1383 du Code civil) ; 2 ) méconnaît l'objet des cotisations de sécurité sociale visées aux articles 43, alinéa 1 er, de la loi du 10 avril 1971, 31 et 32 de l'arrêté royal du 21 décembre 1971 (violation desdites dispositions) ; 3 ) méconnaît l'étendue de la subrogation de l'assureur-loi prévue aux articles 46 et 47 de la loi du 10 avril 1971 (violation desdites dispositions). III. La décision de la Cour En vertu de l article 47 de la loi du 10 avril 1971 sur les accidents du travail, l assureur-loi est subrogé dans les droits de la victime contre le tiers responsable de l accident ou son assureur dans les limites du montant de ses décaissements, d une part, et du montant que la victime aurait pu obtenir en droit commun, d autre part.

8 OCTOBRE 2007 C.05.0496.F/7 La partie subrogée dans les droits de la victime n est en droit d obtenir du tiers responsable de l accident ou de son assureur le remboursement des montants bruts qu elle a décaissés au profit de la victime à titre de revenus de remplacement que pour autant que le juge constate que l indemnité que la victime aurait pu obtenir en droit commun aurait été soumise à des charges équivalentes à celles grevant sa rémunération. Pour décider qu «il est [ ] établi que les charges qui grèveront l indemnité de droit commun à laquelle la victime aurait pu prétendre correspondent aux charges grevant [sa] rémunération» et, dès lors, étendre l action subrogatoire de la défenderesse aux cotisations sociales qu elle a supportées en qualité d assureur-loi, le jugement attaqué constate, d une part, que, s agissant d un accident sur le chemin du travail, la victime doit, «à l inverse de la situation existant en cas d accident de droit commun [ ], payer ses cotisations» et considère, d autre part, que, «si l assureur-loi n était pas intervenu, la perte subie par la victime aurait été équivalente au montant de son salaire brut, dès lors qu elle est elle-même tenue au paiement des cotisations sociales en application de la loi du 10 avril 1971». En considérant que des cotisations sociales grèvent la réparation en droit commun au motif qu elles sont dues par la victime en vertu de la législation sur les accidents du travail, le jugement attaqué ne justifie pas légalement sa décision. Le moyen est fondé. Par ces motifs, La Cour Casse le jugement attaqué ; Ordonne que mention du présent arrêt sera faite en marge du jugement cassé ;

8 OCTOBRE 2007 C.05.0496.F/8 fond ; Réserve les dépens pour qu il soit statué sur ceux-ci par le juge du Renvoie la cause devant le tribunal de première instance de Dinant, siégeant en degré d appel. Ainsi jugé par la Cour de cassation, troisième chambre, à Bruxelles, où siégeaient le président Christian Storck, les conseillers Daniel Plas, Christine Matray, Sylviane Velu et Philippe Gosseries, et prononcé en audience publique du huit octobre deux mille sept par le président Christian Storck, en présence de l avocat général Thierry Werquin, avec l assistance du greffier Jacqueline Pigeolet.