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Psoriasis (123) Professeur Philippe Berbis Mars 2005 1. Introduction Le psoriasis est une dermatose fréquente, touchant en France environ 2% de la population. Il s'agit d'une dermatose chronique, évoluant par poussées. La physiopathogénie est encore mal connue. Un facteur génétique est très probablement impliqué, mais encore mal défini. Le psoriasis est caractérisé par un trouble de l'homéostasie épidermique (hyperprolifération kératinocytaire, troubles de la différenciation) ainsi que par des phénomènes inflammatoires dermo-épidermiques complexes. 2. Diagnostic Positif 2.1. Forme Habituelle (psoriasis dit "vulgaire") 2.2. Aspects cliniques 2.2.1. Lésion élémentaire Erythémato-squameuse Bien limitée Arrondie, ovalaire ou polycyclique. La couche squameuse superficielle est blanchâtre, terne, d'épaisseur inégale. Elle recouvre plus ou moins complètement l'érythème sous-jacent. Le grattage méthodique des squames entraîne de manière caractéristique un blanchiment (signe de la "bougie"). L'érythème sous-jacent a une couleur variant du rose au rouge vif. Le psoriasis n'est classiquement pas prurigineux. Un prurit peut cependant parfois s'observer dans certains contextes psychologiques ou en cas d'eczématisation. 2.2.2. Dimension des lésions Selon la taille des lésions on parlera de : Psoriasis en points ( punctata ) Psoriasis en gouttes ( guttata ) Psoriasis nummulaire ( quelques cm) Psoriasis en plaques (plusieurs cm). 2.2.3. Topographie 2.2.3.1. Topographies habituelles Les zones "bastions" sont constituées par les régions du tégument exposées au frottement : coudes, genoux, région lombo-sacrée, bords cubitaux des avant-bras, régions pré-tibiales. Le phénomène de Köbner est l'expression de lésions psoriasiques sur des traumatismes cutanés (stries de grattage, cicatrices, zones de vaccination.) DCEM 2 Module 8 1

L'atteinte du cuir chevelu est fréquente, et se manifeste généralement par des plaques circonscrites, très squameuses. Les cheveux traversent ces squames sans être cassés ( à la différence des teignes mycosiques ) : le psoriasis n'est pas alopéciant. A la lisière du cuir chevelu, les lésions sont souvent inflammatoires, érythémato-squameuses, débordant plus ou moins sur le front, en couronne. Dans certains cas, l'ensemble du cuir chevelu est atteint, formant un véritable casque psoriasique. L'atteinte des ongles est également classique et peut se manifester de façon diverse : dépressions cupuliformes (ongles "en dés à coudre"), onycholyse avec décollement distal, hyperkératose sous-unguéale, leuconychie, péri-onyxis rouge et squameux. 2.2.3.2. Autres localisations Atteinte des plis (psoriasis dit "inversé") : inter-fessier, axillaires, sous mammaires, ombilical, inter -orteils, inguinaux, rétro-auriculaires. Elle se présente généralement comme un intertrigo bien limité, rouge vif, lisse, brillant, parfois macéré. Atteinte du visage : rare chez l adulte, parfois difficile à différencier avec une dermatite séborrhéique. L'atteinte du conduit auditif externe est classique. Atteinte palmo-plantaire : elle peut prendre plusieurs aspects : taches érythématosquameuses bien limitées, kératodermie (carapace kératosique parfois fissuraire), pulpite sèche. Atteinte muqueuse : rare, elle peut s'exprimer par des aspects de langue géographique ou au niveau génital par des taches érythémateuses, non squameuses. En cas d'atteinte de l'ensemble du tégument, on parlera de psoriasis universalis, à distinguer de l'érythrodermie (Cf infra) 2.3. Aspects anatomo-pathologiques La pratique d'une biopsie n'est généralement pas nécessaire pour établir le diagnostic de psoriasis, souvent évident cliniquement. Lorsqu'un examen anatomopathologique est demandé, l'aspect associe au niveau épidermique. une hyperkératose parakératosique une acanthose épidermique la présence de micro-abcès à polynucléaires (dits de Munro-Sabouraud) un allongement des papilles dermiques avec de véritables crêtes épidermiques élargies en "battant de cloche" à leur extrémité inférieure. Au sein du derme, on note un infiltrat lymphocytaire T CD4+ en phase aiguë. 3. Formes Cliniques 3.1. Psoriasis pustuleux 3.1.1. Psoriasis pustuleux localisé Le plus souvent palmo-plantaire, il s'exprime par des pustules jaunâtres, évoluant par poussées, sur un fond érythémateux. Le retentissement fonctionnel est souvent important. Un forme particulière est constituée par l'acrodermatite pustuleuse de Hallopeau ( atteinte pustuleuse chronique de l'extrémité d'un doigt, s'étendant progressivement sans tendance spontanée à la guérison ). DCEM 2 Module 8 2

3.1.2. Psoriasis pustuleux généralisé Dans la forme généralisée ( type von Zumbusch ) le tableau est grave, préoccupant et peut mettre en jeu le pronostic vital sur des terrains fragilisés. Le pronostic a été transformé par les rétinoïdes (cf infra) 3.1.2.1. Circonstances déclenchantes : Elles sont principalement médicamenteuses (sevrage brutal d'une corticothérapie générale, à éviter formellement, sauf nécessité absolue, au cours du psoriasis), salicylés 3.1.2.2. Aspects cliniques : Début brutal Fièvre élevée (40 C) Altération de l'état général. Erythème généralisé, parfois oedémateux, se recouvrant rapidement de centaines de pustules superficielles, non folliculaires, blanc laiteux, confluentes (lacs pustuleux). Evolution par poussées successives. Arthralgies Evolution spontanée en quelques jours vers une desquamation scarlatiniforme, en larges lambeaux, avec constitution d'un tableau d'érythrodermie érythématosquameuse. Aspects biologiques : Hyperleucocytose franche à polynucléaires neutrophiles. Syndrome inflammatoire net Hypocalcémie Prélèvements bactériologiques et hémocultures négatives ( l'aspect pustuleux traduit l'expression "caricaturale" du psoriasis (cf aspects anatomopathologiques supra) et non une surinfection). D'autres formes cliniques sont parfois observées, moins spectaculaires : psoriasis pustuleux généralisé annulaire, psoriasis pustuleux "régional". 3.2. Erythordermie psoriasique L'ensemble du tégument devient brutalement érythémato-oedémateux, puis squameux (desquamation abondante). Il n'y a pas (ou très peu) d'intervalles de peau saine. L'état général est altéré (fièvre, asthénie). Des complications peuvent survenir : surinfection, troubles de la thermorégulation, troubles hydro-électrolytiques et protéiques. L'érythrodermie psoriasique est souvent la conséquence de facteurs thérapeutiques (corticothérapie générale, béta-bloquants, sels de lithium, sels d'or plus rarement). 3.3. Arthropathie psoriasique 20% environ des psoriasiques développent une arthropathie, qui peut précéder (rarement) l'expression cutanée. On distingue 3 tableaux cliniques : Mono ou oligoarthrite pouvant toucher n'importe quelle articulation. Polyarthrite pouvant présenter des aspects communs avec la Polyarthrite Rhumatoïde (PR). Le Waaler Rose et le Latex sont négatifs et l'atteinte touche préférentiellement les inter-phalangiennes distales (proximales au cours de la PR). DCEM 2 Module 8 3

Atteinte axiale, adoptant une symptomatologie proche de la spondylarthrite ankylosante (sacro-iléite + atteinte vertébrale). L'association avec l'antigène HLA B27 est fréquente dans cette forme. 3.4. Psoriasis de l'enfant Chez le nourrisson, le psoriasis touche volontiers la région des couches. Chez l'enfant, le psoriasis aigu, en gouttes, succède volontiers à une infection rhinopharyngée streptococcique. L'atteinte du visage est moins rare que chez l'adulte. Les formes graves (psoriasis pustuleux généralisé, érythrodermie, arthropathie) sont possibles mais très rares. 3.5. Psoriasis et infection par le VIH le psoriasis peut s'observer au cours de l'infection par le VIH. L'aspect est en règle plus sévère, la résistance au traitement plus importante. 4. Evolution 4.1. Age de début Le psoriasis peut débuter à tout âge, les pics de fréquence étant l'adolescence et l'âge adulte jeune. Des débuts précoces s'observent volontiers dans les formes familiales. 4.2. Profil évolutif Il s'agit d'une dermatose chronique, dont l'expression peut persister toute la vie. L'évolution est caractérisée par des poussées de fréquence variable. Parmi les facteurs déclenchants, il faut retenir. Les facteurs psychologiques (stress) Les facteurs médicamenteux : béta-bloquants, sels de lithium, anti-paludéens de synthèse, Interferon Alpha, parfois anti-inflammatoires non stéroïdiens (liste non exhaustive). Les facteurs climatiques (le psoriasis s'améliore spontanément au cours des saisons ensoleillées). Les facteurs infectieux (infection streptococcique ORL chez l'enfant). Il est important de considérer, dans la prise en charge, l'importance du retentissement du psoriasis sur la qualité de vie du patient. 4.3. Complications En dehors des formes graves, des complications peuvent émailler l'évolution du psoriasis : Surinfection (bactérienne rare, plus fréquente (plis) par Candida albicans). Eczématisation : survenue d'un suintement, d'un prurit intense (rechercher une sensibilisation à un topique médicamenteux). DCEM 2 Module 8 4

5. Diagnostic Différentiel 5.1. Dans les formes habituelles L'aspect clinique est souvent très évocateur. On pourra discuter dans certaines formes moins typiques : Une syphilis secondaire (TPHA et VDRL très positifs) Un Pityriasis rosé de Gibert (caractère éruptif, plus finement squameux, et surtout transitoire : guérison spontanée en 6 semaines). Une dermatite séborrhéique faite de squames plus grasses et touchant préférentiellement les zones riches en glandes sébacées (région médio-faciale et médio-thoracique, cuir chevelu). Un parapsoriasis en gouttes, ou en plaques ( pouvant être l'expression précoce d'un lymphome cutané : importance de la biopsie dans les formes atypiques ). 5.2. Dans les formes particulières Psoriasis des plis : diagnostic différentiel avec un intertrigo mycosique ou bactérien. Psoriasis palmo-plantaire : diagnostic différentiel avec des kératodermies palmoplantaires d'autre origine (eczéma, lichen, paranéoplasiques). Erythrodermie : diagnostic différentiel avec une toxidermie, un lymphome cutané (syndrome de Sézary). Psoriasis pustuleux généralisé : diagnostic différentiel avec une pustulose exanthématique aiguë généralisée (forme particulière de toxidermie médicamenteuse). Rhumatisme psoriasique : diagnostic différentiel avec la Polyarthrite Rhumatoïde dans les formes périphériques et avec la Spondylarthrite ankylosante dans la forme axiale. 6. Traitement 6.1. Règles générales Aucun traitement ne permet une guérison complète de la dermatose. Notion de «capital thérapeutique» à gérer souvent sur le long terme. Nécessité d une bonne relation médecin-malade. Prise en compte impérative, quelle que soit l étendue des lésions, du retentissement sur la qualité de vie. Prise en compte des effets secondaires potentiels à court et à long terme des traitements ( information du patient ). Nécessité d un soutien (ou d une prise en charge) psychologique. 6.2. Moyens thérapeutiques 6.2.1. Thérapeutiques locales 6.2.1.1. Dermocorticoïdes leur efficacité est liée à leurs propriétés inflammatoires et cytostatiques. Formes galéniques : pommades (lésions sèches), crèmes (plis), lotions (cuir chevelu). Règles d utilisation : o Optimisation de l efficacité par l occlusion (pénétration accrue) o Une seule application par jour suffisante dans la plupart des cas (effet réservoir de la couche cornée). DCEM 2 Module 8 5

o Dès amélioration significative : espacement progressif (risque d effet rebond en cas de sevrage brutal). o Eviter les traitements prolongés o risque d épuisement pharmacologique (tachyphylaxie). o risque d effets secondaires locaux (atrophie cutanée, rôle pro-infectieux) voire systémiques (hypercortiscisme iatrogène, freinage de l axe hypothalamohypophyso-surrénalien) en cas d application étendue à une grande surface, sous occlusion (nourrisson surtout). o Eviter les dermocorticoïdes fluorés chez l enfant et sur le visage (risque accru d effets secondaires). o Contrôle strict du nombre de tubes utilisés. Contre-indication en cas de surinfection. 6.2.1.2. Dérivés de synthèse de la vitamine D Rationnel : action anti-proliférative et différenciante de la vitamine D3 sur le kératinocyte. Molécules disponibles : o calcipotriol (Daivonex ) : crème, pommade, lotion o tacalcitol(apsor ): pommade Conduite du traitement : o 2 applications par jour (calcipotriol), 1 application par jour ( tacalcitol) o Efficacité manifeste à 6 semaines chez les répondeurs. Par rapport aux dermocorticoïdes : o efficacité globalement comparable, bien que moins rapidement obtenue. o pas d effet secondaire atrophiant, ni de tachyphylaxie o irritation cutanée parfois. Contre indication : hypercalcémies, grossesse. Association possible avec les dermocorticoïdes. 6.2.1.3. Autres thérapeutiques locales 6.2.1.3.1. Acide salicylique Il s agit d une molécule kératolytique qui peut être utile, utilisée dans un excipient gras (vaseline), pour décaper des lésions très squameuses en préalable d un traitement par dermocorticoïdes ou dérivés de la vitamine D. Règles d utilisation : Jamais de traitement prolongé. Arrêt dès le décapage obtenu. Eviter chez l enfant (risque d intoxication salicylée par passage transcutané). Ne pas dépasser la concentration de 3 % (5 % en cas d utilisation très limitée (paumes, plantes). 6.2.1.3.2. Tazarotène (Zorac ) Il s agit d un nouveau rétinoïde (Cf infra) topique dont l utilisation est réservée à des psoriasis très limités (< à 10 % de la surface corporelle). Un effet irritant peut être observé. 6.2.2. Photothérapie L action bénéfique du soleil sur l évolution du psoriasis a servi de base à l utilisation des ultra-violets (UV) en thérapeutique. DCEM 2 Module 8 6

Faculté de Médecine de Marseille 6.2.2.1. Modalités PUVAthérapie : association d un psoralène photosensibilisant (8 méthoxy psoralène (Meladinine ) ou 5 methoxy psoralène (Psoraderm ) et d une irradiation UVA (320-400 nm). Modalités pratiques : administration per os du psoralène 2 heures avant l irradiation 3 séances par semaine. Dosimétrie UVA précise fonction du phototype. Possibilité d utiliser le psoralène en bain (Balnéo-PUVA). Résultats : rémission dans environ 80 % des cas après 20 à 30 séances. Photothérapie UVB à spectre étroit (TL 01 : 311 313 nm) ne nécessitant pas la prise de psoralène préalable. Efficacité comparable à la PUVAthérapie. 6.2.2.2. Effets secondaires 6.2.2.2.1. A court terme, les risques sont essentiellement un érythème plus ou moins intense (surdosage, prise concomitante de médicaments photosensibilisants (contre-indiqués). 6.2.2.2.2. A long terme, les UV sont responsables d un vieillissement prématuré du tégument et favorisent surtout la survenue de cancers cutanés (carcinomes, mélanomes). La photothérapie : est contre-indiquée en cas d antécédent de cancer cutané est à éviter de principe chez l enfant nécessite un compte minutieux de la dosimétrie (ne pas dépasser un total de 1500 joules/cm 2 d UVA en doses cumulatives). Nécessite une surveillance prolongée du tégument des patients traités. Est contre-indiquée chez la femme enceinte. Enfin, un examen ophtalmologique normal sera exigé avant de débuter une PUVAthérapie (risque de cataracte). 6.2.3. Rétinoïdes par voie générale (acitrétine : Soriatane ) Il s agit d un dérivé de synthèse de la vitamine A. Cette vitamine est connue pour ses propriétés anti-prolifératives et différenciantes sur les épithéliums pathologiques. Modalités d utilisation : administration per os, en une prise quotidienne, à la posologie moyenne de 35 mg/jour chez l adulte. Indications préférentielles : psoriasis pustuleux (blanchiments très fréquents en quelques semaines), psoriasis érythrodermique, kératodermies palmoplantaires invalidantes. Au cours des psoriasis en plaques étendues, l acitrétine entraîne rarement un blanchiment en monothérapie (peu d efficacité sur la composante érythémateuse) et nécessite l association à un traitement topique (dermocorticoïdes, dérivé de la vitamine D) ou à la photothérapie. Effets secondaires : le principal est la tératogénicité faisant contre-indiquer l acitrétine chez la femme enceinte et rendant impératif une contraception efficace chez la femme en âge de procréer 1 mois au moins avant le début du traitement, pendant toute la durée du traitement et pendant une période de 2 ans après l arrêt du traitement (compte tenu des données pharmacocinétiques). Autres effets secondaires : Cliniques : chéïlite, sécheresse cutanéo-muqueuse, desquamation, chute capillaire, prurit. DCEM 2 Module 8 7

Biologiques : hyperlipidémies, élévations des transaminases, rendant nécessaire une surveillance régulière de ces paramètres sous traitement. L utilisation de l acitrétine chez l enfant rend nécessaire une surveillance attentive des paramètres de la croissance et du développement osseux. Contre-indications : Grossesse, femme en âge de procréer n ayant pas de moyen de contraception efficace, anomalies du bilan hépatique, du bilan lipidique 6.2.4. Methotrexate Rationnel : effet anti-mitotique et immunosuppresseur. Posologie : 10 à 25 mg par semaine, à atteindre progressivement, soit en une injection musculaire, soit par voie orale (dose répartie en 3 prises à 12 heures d intervalle). Surveillance régulière hématologique (risque de cytopénie), hépatologique et pulmonaire (risque de fibrose) indispensable. L administration au long cours de méthotrexate peut favoriser le développement d une fibrose hépatique. Une ponction biopsie hépatique avec analyse anatomopathologique est nécessaire après une dose cumulée d 1.5 grammes. Nombreuses interactions médicamenteuses L efficacité du méthotrexate est souvent spectaculaire dans les formes graves de psoriasis. Compte tenu de ses nombreux effets secondaires potentiels, ce traitement doit être considéré comme une thérapeutique d exception, réservée à l adulte, pour des formes cutanées et /ou articulaires sévères, évolutives et résistantes aux thérapeutiques plus classiques. Les principales contre-indications du méthotrexate sont les anomalies de l hémogramme, les anomalies du bilan hépatique, l insuffisance rénale, l existence d une infection évolutive, des antécédents néoplasiques. 6.2.5. Cyclosporine ( Neoral ) Rationnel : propriétés immunosuppressives Efficacité dans les formes les plus sévères en 4 à 6 semaines. Posologie : débuter à 2.5 mg/kg/j, en deux prises par jour, puis adapter en fonction de l efficacité ( maximum : 5 mg/kg/j). Effets secondaires : néphotoxicité d autant plus fréquente que le traitement est prolongé, Hypertension artérielle. Surveillance régulière impérative : TA, créatininémie, bilan hépatique. La cyclosporine est contre-indiquée en cas d HTA non traitée, d anomalies du bilan rénal, d antécédent de néoplasie, d infection évolutive ; A plus long terme : rôle favorisant évoqué dans la survenue de lymphomes ou de carcinomes. Comme le méthotrexate, la cyclosporine est un traitement d exception, destiné à «passer un cap difficile «, pendant quelques semaines, et ne peut en aucun cas constituer un traitement de fond compte-tenu des effets secondaires ( retour à un traitement plus classique dès amélioration). 6.3. Indications Elles dépendent : de la gravité du psoriasis, du retentissement sur la qualité de vie du patient, des contre-indications éventuelles, des antécédents du patient. 6.3.1. Formes peu étendues : Traitement topique après décapage des lésions en cas de squames importantes. DCEM 2 Module 8 8

Dérivés de la Vitamine D en première intention Dermocorticoïdes si échec ou en cas d aspect très inflammatoire ou eczématisé. 6.3.2. Formes éythémato-squameuses étendues : Photothérapie, ou Association acitrétine photothérapie, ou acitrétine traitement topique, ou photothérapie traitement topique. Méthotrexate ou cyclosporine en troisième intention seulement, après échec des traitements classiques cités ci-dessus. indication de l acitrétine 6.3.3. Psoriasis pustuleux : 6.3.4. Erythrodermie psoriasique : Selon les cas : acitrétine, ou méthotrexate ou cyclosporine acitrétine 6.3.5. Kératodermie palmo-plantaire invalidante : 6.3.6. Rhumatisme psoriasique invalidant : méthotrexate ou cyclosporine Quelle que soit l option thérapeutique choisie, la prise en compte du retentissement psychologique doit être mise en œuvre tout au long du suivi. DCEM 2 Module 8 9