L enseignement des langues modernes dans la Fédération Wallonie-Bruxelles. Les propositions des FDF



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Transcription:

Note L enseignement des langues modernes dans la Fédération Wallonie-Bruxelles Les propositions des FDF Caroline Persoons Députée FDF Joëlle Maison Échevine de l enseignement Corinne François Échevine de l enseignement Et avec la collaboration des : Jeunes FDF 1

I. Introduction : Avec la place centrale de notre pays au cœur de l Europe, les impératifs liés à la mondialisation et la présence des nombreux européens qui vivent et travaillent dans notre capitale, nul doute que la connaissance d une ou de plusieurs langues favorise le développement d une économie compétitive, constitue un atout précieux pour accéder au marché de l emploi et permet une plus grande ouverture aux autres cultures. Pourtant, trop de disparités relatives à la connaissance des langues existent entre les Régions et les Communautés qui composent notre pays. Actuellement, le constat est sans appel : la connaissance des langues dans la Fédération Wallonie-Bruxelles est insuffisante par rapport aux objectifs européens. Pour rappel, le Conseil Européen de Barcelone avait fixé en 2002 l objectif d «améliorer la maîtrise des compétences de base, notamment par l enseignement d au moins deux langues étrangères dès le plus jeune âge ( )». Le Conseil de l Union européenne estime également que chaque citoyen européen devrait maîtriser trois langues : sa langue maternelle, une langue à portée internationale et une langue de proximité ou minoritaire. Dès lors, déterminés à promouvoir l ouverture vers le monde et bien conscients des enjeux économiques liés à l apprentissage des langues, les FDF souhaitent mettre en avant leurs propositions fortes pour améliorer significativement la connaissance des langues et la connaissance de deux langues supplémentaires à la langue de l enseignement. Parallèlement, les FDF rappellent combien la maîtrise de la langue d enseignement est un facteur essentiel pour la construction des apprentissages et l assimilation des compétences de base permettant de mieux lutter contre le décrochage scolaire. C est pourquoi, il faut tenir compte de la situation spécifique des primo-arrivants dans le débat relatif aux langues. Dans le sondage réalisé par les Jeunes FDF sur l apprentissage des langues, 33% des jeunes interrogés placent la maîtrise de la langue de l enseignement en tête de leurs priorités et ils sont 21,9 % à mettre l accent sur la maîtrise d une langue supplémentaire qui est trop souvent repoussée au lendemain II. Constats en Fédération Wallonie Bruxelles: Des résultats en dessous des objectifs européens Notre maîtrise des langues étrangères, que nous appellerons «langues modernes» au long de ce texte, en Fédération Wallonie-Bruxelles, est très mauvaise, surtout lorsqu on se compare aux autres pays de l Union Européenne. En Fédération Wallonie-Bruxelles, nos résultats sont en-dessous de la moyenne européenne. Alors que le pourcentage moyen d Européens unilingues est de 44% : 57% des Wallons sont unilingues, 28 % des personnes résidant en Flandre sont unilingues. A Bruxelles, 38 % de la population ne parle que le français ou le néerlandais. Si l on analyse le pourcentage de la population qui se déclare trilingue, ici encore, les résultats obtenus par 2

la Wallonie sont très moyens avec seulement 7% de la population qui se déclare trilingue français, néerlandais, anglais. Les résultats relativement bons de la Belgique reposent donc largement sur le plurilinguisme des néerlandophones. 1 L étude européenne des compétences en langues 2 nous indique que le pourcentage d élèves en Fédération Wallonie-Bruxelles qui atteint ou dépasse le niveau B1 (utilisateur indépendant) en anglais n est que de 29%, tandis que la moyenne européenne se situe à 42% 3. Seule éclaircie au tableau, pour le niveau A2 4 ), le taux de réussite en FWB oscille entre 41 et 65%, quand la moyenne européenne est située à 35 à 72 % 5. Pas d utilisation en FWB des outils européens Le cadre européen commun de référence pour les langues (CECR) constitue, en Europe, la base pour l élaboration de programmes de langues vivantes, de référentiels, d examens, de manuels,... Force est de constater que la FWB est le seul pays de l Union européenne (avec le Royaume-Uni) où le CECR est totalement absent de l enseignement obligatoire, alors qu il se généralise dans le milieu académique et professionnel. La Ministre en charge de l enseignement obligatoire vient à peine d engager un travail sur l intégration du CECR dans les référentiels inter-réseaux existants. L utilisation du Portfolio européen des langues qui suit l étudiant au long de son parcours est également une piste intéressante, trop souvent négligée par les enseignants. Les premiers apprentissages trop tardifs Dans la plupart des systèmes éducatifs européens, l apprentissage obligatoire d une première langue étrangère débute entre 6 et 9 ans 6. Cette obligation en Fédération Wallonie-Bruxelles est plus tardive et ne commence qu à 10 ans. Il est pourtant démontré qu un des facteurs de succès dans l apprentissage des langues est le temps global qui y a été consacré et la durée d apprentissage. Les résultats du sondage des Jeunes FDF ne disent pas autre chose. Les participants sont 43% à plaider pour l apprentissage d une langue étrangère dès la maternelle et 31 % dès le primaire. La proportion de temps consacré aux cours de langues sur l ensemble de l enseignement primaire est donc, sans surprise, parmi les plus faibles : 2,4% en FWB comme en Slovaquie, seule l Autriche obtient ici un score plus faible (2,2%). Heureusement, 41% des 128 écoles visitées dans l enseignement primaire 7 organisent des activités d éveil ou d apprentissage avant le début obligatoire des cours de langues. 1 Ginsburgh, v., & Weber, s. (2006). La dynamique des langues en Belgique. Version initiale regards économiques, p. 42. 2 First European survey on language competences. Final report. Office des publications de l Union européenne, Luxembourg, 2012. 3 Christiane Blondin et Florent Chenu, «L apprentissage des langues : mise en perspective européenne de la situation en Fédération Wallonie-Bruxelles», 2013, p.12. 4 A2 = «Niveau de Survie», sous le niveau B1. 5 Christiane Blondin et Florent Chenu, Ibid., p.12. 6 Christiane Blondin et Florent Chenu, Ibid., p. 14. 3

Discrimination entre filières L apprentissage des langues varie selon l école, la filière et même l option choisie par l élève. Les constats ne sont pas bons, mais ils deviennent interpellants quand on aborde les autres filières que l enseignement général. Dans l enseignement de qualification en FWB, les élèves sont 48 % à ne suivre aucun cours de langue étrangère 8 et seulement 14% à étudier deux langues. Dans l enseignement professionnel, l enseignement d une langue étrangère n est pas généralisé. Au niveau du troisième degré de l enseignement secondaire, «si certains élèves ont l occasion d apprendre jusqu à trois langues étrangères parfois en y consacrant 12 heures de l horaire hebdomadaire, d autres, dans certaines sections de l enseignement qualifiant, n ont plus aucun cours de langue au troisième degré» 9. Une récente thèse analysant l enseignement de transition 10 montre le manque de cohérence entre écoles quant aux objectifs poursuivis et le manque d outils adéquats. Les étudiants perdent donc toutes les connaissances acquises dans les huit premières années de l enseignement. La pénurie d enseignant : le recours aux articles 20 plus fréquent en Fédération Wallonie-Bruxelles Pénurie oblige, les pouvoirs organisateurs ont bien souvent recours à des articles 20, soit des professeurs qui ne sont pas détenteurs d un titre pédagogique et qui n ont pas de formation pédagogique. Les étudiants peuvent ainsi se retrouver dans des situations ubuesques et avoir comme professeur de néerlandais une secrétaire de formation dont on justifiera la présence par le seul fait qu elle ait étudié trois ans en Flandre Il y a des domaines où l absence de méthodologie entraîne inévitablement des désastres : l enseignement des langues est l un d entre eux. L absence de continuité et de cohérence au sein du système scolaire Le régime linguistique de l enseignement est fondé sur le principe de territorialité, c'est-àdire sur base de l existence de quatre régions linguistiques 11 et non sur le principe du libre choix de la langue de l enseignement. Plusieurs études déplorent les incohérences et la rupture des parcours dans les langues étudiées. 12 Le choix de la langue est laissé à 7 Rapport de l inspection de l enseignement 2012, p.22. 8 Christiane Blondin et Florent Chenu, ibid., p.16. 9 Rapport établi par le Service général de l Inspection au terme de l année scolaire 2010-2011, p22. 10 D. Etienne, «Enseignement et apprentissage des langues étrangères en Communauté française de Belgique : quel(s) profil(s) seuil(s) pour les apprentissages en langues étrangères au sortir des humanités de transition? Essai de régulation», 2011. 11 La région de langue française, la région de langue néerlandaise, la région bilingue de Bruxelles-Capitale et la région de langue allemande. 12 Blondin, Fagnant et Goffin, «L étude internationale des compétences en langues», 2008 ; D. Etienne, «Enseigner les langues étrangères. Quels sont nos objectifs et nos priorités?» 4

l établissement : en Wallonie, la première langue moderne enseignée peut être le néerlandais, l anglais ou l allemand. En cas de changement d école, l élève pourra être confronté à d importantes difficultés avec un décrochage à la clé. La suite du parcours de l enfant dépend des cours de langue organisés dans l établissement et de la filière fréquentée. Si en Communauté flamande, tous les élèves apprennent d abord le français, auquel s ajoute l anglais au 1 er degré du secondaire, la Fédération Wallonie-Bruxelles est moins cohérente : l apprentissage d une première langue moderne à Bruxelles débute en 3 ème primaire et en 5 ème primaire en Wallonie. Dans notre sondage, 24% des sondés indiquent qu il y a un problème de continuité dans le parcours : lorsqu ils changent de classe, d école ou même de région, les élèves étudient des thèmes déjà vus ou changent de langue (néerlandais à anglais par exemple) et 38 % souhaitent que l on regroupe les élèves par niveaux en langue de façon plus souple. Encore quelques lacunes au niveau de l immersion linguistique L immersion constitue un moyen d augmenter la période d apprentissage d une langue cible et d atteindre un niveau de compétence élevée. On comprend donc aisément les raisons qui poussent le «marché scolaire» à développer cette catégorie bien particulière d école. L atout offert par cet enseignement est indéniable : les élèves qui terminent leurs études après un parcours en immersion linguistique ont un niveau de connaissance linguistique nettement plus élevé que les autres. Depuis 1998, l immersion a été autorisée en FWB dans l enseignement fondamental et secondaire. Dès 2007, le décret relatif à l immersion linguistique a défini le cadre dans lequel ce système pouvait s organiser au niveau fondamental et secondaire (général, qualifiant et de transition). Pour l année 2013, la part des implantations organisant l immersion en FWB est de 15,9 % et 16.859 élèves sont inscrits en immersion dans le fondamental et 10.608 dans le secondaire 13. Le nombre d établissements en immersion a augmenté d année en année : 171 dans l enseignement fondamental dont 11 à Bruxelles et 160 en Wallonie ; 142 dans l enseignement secondaire, dont 19 à Bruxelles et 123 en Wallonie 14. Malgré ce succès grandissant, l enseignement en immersion doit encore être amélioré. De fait, le rapport de l Inspection de 2010 et les différentes enquêtes récentes réalisées par les jeunes FDF auprès des directions d écoles en Fédération Wallonie-Bruxelles ont mis en évidence une série de lacunes ou de difficultés concrètes: - Les programmes de disciplines enseignés dans la langue cible ne sont pas entièrement couverts. En 2010, près de 50% des classes en immersion linguistique n arrivent pas à couvrir le programme prévu (40% en secondaire tant en immersion Bruxelles : De Boeck, Coll. Action! 2011 ; Poulain, 2002. 13 Compte-rendu de la Commission de l Education Parlement de la Fédération Wallonie-Bruxelles 2013, p.17. 14 Compte-rendu de la Commission de l Education Ibid. 5

précoce qu en immersion tardive). L apprentissage de la langue d immersion se fait donc au détriment de la discipline enseignée ou se marque par le manque de maîtrise du vocabulaire technique et scientifique visé en français ; - Le nombre plus faible d établissements en immersion à Bruxelles par rapport à la Wallonie (21 écoles secondaires dans toute la Province du Hainaut, contre seulement 19 à Bruxelles); - L absence d établissement en immersion dans l enseignement de qualification ou technique ; - L immersion en anglais au niveau de l enseignement primaire n est pas autorisée à Bruxelles et dans certaines communes à facilités de Wallonie ; - Les écoles rencontrent des difficultés à recruter des locuteurs natifs porteurs des titres adéquats pour la discipline enseignée et la langue cible ; - La difficulté d intégrer des candidats enseignants en immersion dans les équipes pédagogiques existantes; - La connaissance variable des locuteurs natifs des programmes utilisés en Fédération Wallonie-Bruxelles ; - L impossibilité d accorder un accès prioritaire à une école en immersion où un élève dont un frère/une sœur, ainsi que tout autre mineur résident sous le même toit fréquente déjà l école. Nous espérons que ces chiffres s amélioreront dans le rapport de l Inspection qui devrait être publié sous peu. 6

III. Nos propositions en 4 axes pour améliorer l apprentissage des langues : 1. Un apprentissage précoce 1. Généraliser en Wallonie l apprentissage d une seconde langue dès la 3 ème primaire. Depuis 1998, l enseignement des langues a été rendu obligatoire en 5 ème et 6 ème primaire dans les écoles situées en Wallonie. A Bruxelles, le néerlandais est enseigné dès la 3 ème primaire. Il est primordial d insister sur la nécessité d entamer un apprentissage le plus précoce possible et donc d aligner les écoles sur Bruxelles, à savoir l enseignement d une seconde langue (néerlandais, anglais ou allemand en fonction du libre choix des écoles) dès la 3 ème primaire. Les FDF souhaiteraient le mettre en place dès la 1 ère conscients des implications budgétaires liées à ce choix. primaire, mais nous sommes Concrètement, en termes de volume d apprentissage, cela signifie augmenter le nombre d heures à 3 périodes d enseignement en 3 ème et 4 ème années primaires et à 5 périodes d enseignement en 5 ème et 6 ème primaires. On estime le coût de cette mesure d harmonisation à 35 millions d euros. 2. Financer à 100% les périodes dédiées à l'enseignement des langues. À Bruxelles, les heures de néerlandais imposées par la loi du 30 juillet 1963 ne sont pas financées en totalité par la FWB, malgré l obligation fédérale d enseigner le néerlandais dès la 3 ème primaire! Par conséquent, les pouvoirs organisateurs assurent, bien souvent sur fonds propres, la part non assumée par la FWB et assument parfois jusqu à 4/5 ème de la charge. Les FDF estiment qu au regard de l importance de l apprentissage d une seconde langue de façon précoce, qui plus est, imposée par le fédéral, il s agit d une question de priorités politiques. 3. Généraliser un programme d éveil aux langues dès la 3 ème maternelle (dès le cycle 5-8 ans). Cet éveil aux langues n est pas un «cours de langue» à proprement parler, il s agit plutôt de sensibiliser de manière ludique les plus jeunes à la diversité linguistique et culturelle. Cette approche renforce chez l enfant l ouverture d esprit, développe sa curiosité d apprendre et le sens du respect de l autre. Il faut continuer de mettre en place les nombreux outils didactiques qui ont été mis au point dans le cadre des programmes EVLANG, JA-LING et d EOLE, qui constituent d ores et déjà une base solide. L expérience pilote menée dans quelques écoles a confirmé qu il ne fallait pas pour cela engager des professeurs qui connaissaient déjà la langue, puisque la majorité des enseignants ont estimé en fin d année qu il n était pas indispensable pour eux de connaitre eux-mêmes plusieurs langues pour organiser les activités étant donné que la plupart des supports fournissaient les informations nécessaires. 15 15 C. BLONDIN et C. MATTAR, «Cinq équipes éducatives s engagent dans l éveil aux langues projet pilote dans l enseignement fondamental en Communauté française», rapport final juillet 2004, Université de Liège, p. 74. 7

4. Permettre l apprentissage précoce d une troisième langue dans les écoles dès le niveau fondamental (5 ème primaire). Les FDF estiment qu il faut commencer la 3 ème langue dès la 5 ème primaire. A Bruxelles, qui est une métropole internationale, capitale de l Union européenne, qui accueille de nombreux citoyens venus du monde entier, il est essentiel d apprendre l anglais. Pour preuve, «si la connaissance et l apprentissage de l anglais se généralisent dans toute la Belgique, aux dépens parfois de l autre langue nationale, le statut international de Bruxelles et ses populations étrangères font de l anglais la langue vecteur incontournable». 16 En Wallonie, il est également essentiel d enseigner le néerlandais, dans les écoles où la seconde langue serait l anglais ou l allemand. A ce propos, les FDF ont déposé, successivement au parlement bruxellois et au parlement de la Fédération Wallonie-Bruxelles, une résolution relative à l apprentissage des langues étrangères, dès l enseignement fondamental (dès la 5 ème primaire) ou à tout le moins dès le 1 er degré du secondaire afin de mettre en œuvre un apprentissage précoce d une troisième langue. 2. Valoriser l apprentissage des langues et définir les objectifs à atteindre 5. Valoriser les apprentissages des langues dans les diplômes et certificats obtenus pendant la scolarité en faisant passer un examen certificatif aux élèves au terme de leur scolarité. Valoriser l apprentissage par un certificat, c est aussi motiver les élèves dans leur apprentissage des langues. Or que constate-t-on? Ni le CEB de fin de primaire, ni le Certificat d études secondaires ne mentionnent les langues apprises ou le niveau atteint par l élève. Encore une fois, la FWB fait figure d exception. Un examen organisé par le Selor ou un examen qui utilise les systèmes de certification européens (CECR) devrait être organisé au terme du niveau secondaire pour pouvoir s en servir sur le marché de l emploi. 6. Atteindre en dernière année de l enseignement secondaire de l enseignement général le niveau de connaissance B2 (Niveau «Autonome») et atteindre en dernière année de l enseignement secondaire de l enseignement technique et professionnel le niveau de connaissance B1 (Niveau «Seuil» avec un début d autonomie). Bien qu encore peu connus de grand public, les niveaux de connaissance du cadre européen commun de référence pour les langues (CECR) sont des outils dont il faut se servir. Utilisés dans le milieu académique et professionnel, ils permettent d être compris rapidement par un employeur qui cherche à déterminer le niveau de maîtrise d un candidat. Le niveau B2 du CECR se caractérise par un niveau où «l'étudiant peut comprendre le contenu essentiel de sujets concrets ou abstraits dans un texte complexe, y compris une discussion technique dans sa spécialité. Il peut communiquer avec un degré de spontanéité et d'aisance telle qu'une conversation avec un locuteur natif ne comportant de tension ni pour l'un ni pour l'autre. Il peut s'exprimer de façon claire et détaillée sur une grande gamme de 16 La Libre Belgique du 5 mai 2007 ; Ph. VAN PARIJS, «Bruxelles capitale de l Europe : les nouveaux défis linguistiques», Brussels Studies, numéro 6, 3 mai 2007. 8

sujets, émettre un avis sur un sujet d'actualité et exposer les avantages et inconvénients de différentes possibilités». Ce niveau permet dès lors aux élèves de disposer d une bonne base de connaissance pour ensuite s orienter vers le monde professionnel ou vers des formations plus spécialisées. Dans le qualifiant, nous visons le niveau B1 avec un début d'autonomie et une orientation «métier» permettant à l élève de se débrouiller dans la matière qu il pratique. On l a vu, certains élèves n ont aucun cours de langue dans l enseignement professionnel. Un décret voté récemment les rend carrément facultatifs dans les deux dernières années du degré professionnel 17. Dans cette filière technique et professionnelle, il faut s atteler à un niveau de connaissance axée «métier». 3. Moderniser l apprentissage des langues 7. Donner la possibilité d organiser des autres cours de langues modernes dès la 5ème et 6ème secondaire (arabe, chinois, russe, ). Cette initiation à d autres langues doit être autorisée dans les écoles secondaires qui font le choix de miser sur des langues dont l importance grandit. 8. Opter pour des dispositifs pédagogiques à hautes valeurs ajoutées et créer une plateforme en ligne à destination des enseignants, enfants et adultes avec des outils ludiques interactifs. Les cours traditionnels ou encore «magistraux» sont révolus. Les enseignants qui veulent transmettre leurs savoirs et surtout capter l attention de leurs élèves en sont convaincus. Une pédagogie active doit être généralisée en recourant aux nouveaux outils de transmission de la matière tels que les nouvelles technologies. En matière d apprentissage des langues, cette méthode semble tout particulièrement indiquée pour améliorer la connaissance des élèves. L élève découvre les langues étudiées à l aide d outils fournis par l enseignant : vidéos en ligne, podcast d émissions, 9. Généraliser les cours de langues dans les études supérieures notamment par le biais de plateformes informatiques. Les programmes de certaines facultés universitaires ou écoles supérieures prévoient l obligation de suivre des cours de langues ou des cours en langue étrangère. Très souvent, la connaissance d une langue étrangère (anglais, néerlandais, allemand ou espagnol) est même un pré-requis à l entrée dans l enseignement supérieur. Par ailleurs, plusieurs universités ou instituts font l effort d offrir à leurs étudiants la possibilité de suivre des formations linguistiques facultativement et parfois, moyennant des coûts supplémentaires. Mais trop souvent, de nombreux étudiants du supérieur ne sont plus, au cours de leurs études, mis en contact avec une langue étrangère et perdent les compétences acquises durant l enseignement obligatoire. Il conviendrait dès lors 17 Décret n 559 (2013-2014) voté le 4 décembre 2013, modifiant les grilles horaires dans la section de qualification de l enseignement secondaire ordinaire de plein exercice( ). 9

d encourager les écoles et les Universités à organiser pour tous les étudiants de l enseignement universitaire ou supérieur l obligation de suivre une formation linguistique, étant entendu qu ils auront la liberté de choix de la langue. Pour limiter les coûts, les FDF préconisent d investir dans des outils tels que les plateformes Internet ou les séances on line, telles que proposées ci-dessus. 4. Promouvoir et améliorer l enseignement en immersion 10. Promouvoir l immersion linguistique et la permettre en anglais dès le primaire à Bruxelles et dans les communes à facilités en Wallonie. A condition de couvrir le programme des disciplines enseignées dans la langue cible, les FDF sont favorables à l immersion et souhaitent inviter chaque commune à mettre en place un projet d enseignement en immersion dans au moins un établissement sur son territoire. Toutefois, nous regrettons, par exemple, que l immersion linguistique en anglais ne soit pas autorisée dans l enseignement primaire à Bruxelles et dans les communes à facilités en Wallonie. En effet, l article 12, 3 du décret prévoit que «dans la Région de Bruxelles- Capitale et dans les communes visées à l article 3 de la loi du 30 juillet 1963 (ndlr les communes à statut linguistique spécial), la langue moderne dans laquelle peut être organisée l immersion dans l apprentissage d une langue est le néerlandais». C est regrettable, car les rapports de l inspection démontrent que lorsque l on débute l immersion en secondaire, c est-à-dire très tardivement, le niveau des élèves s en ressent. C est pourquoi, les FDF souhaitent, par une modification du décret, corriger cette lacune. Nous proposons également d accorder une priorité d accès aux élèves dont un frère/une sœur ainsi que tout autre mineur résidant sous le même toit fréquentant déjà l école en immersion. Il faut combler la lacune selon laquelle «aucune priorité ne peut être accordée à un élève dont un frère/une sœur, ainsi que tout autre mineur résidant sous le même toit fréquente déjà l école». Cette mesure nous semble discriminatoire et particulièrement dérangeante pour des parents qui pourraient se voir obligés d inscrire leurs enfants dans des écoles différentes et de provoquer des inégalités de traitement des enfants au sein d une même famille. A titre informatif, la Communauté flamande accorde au contraire comme première priorité d inscription la fratrie; ceci déforce bien évidemment notre enseignement en immersion. 11. Conclure un accord de reconnaissance mutuelle des titres pédagogiques obtenus par les enseignants pour qu ils puissent enseigner dans l autre Communauté. Nous demandons un accord de coopération entre les Communautés permettant aux enseignants de travailler de l autre côté de la frontière linguistique en disposant d une équivalence des diplômes. Aujourd hui outre le fait que le salaire perçu en Flandre est légèrement supérieur à celui versé par la FWB, bien des professeurs compétents se voient contraints d accepter les conditions inhérentes aux personnes relevant de l article 20 (notamment un salaire moins élevé). Bien sûr, il est essentiel que les enseignants aient une bonne connaissance tant des programmes appliqués dans l autre Communauté, que de la langue de l enseignement, mais l objectif doit être une simplification des procédures. 10

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