Le contrôle effectif de l activité des prescripteurs et la responsabilité encourue Caroline KAMKAR Docteur en droit Avocat au Barreau de LILLE CABINET KAMKAR & WILLIATTE AVOCATS
1) L information préalable et la réalisation du contrôle de l activité d un professionnel de santé Lorsqu il fait l objet de l analyse de son activité au sens de l article L. 315-1-IV du code de la sécurité sociale, le professionnel concerné est informé de l existence du contrôle et également du fait que ses patients peuvent être entendus ou examinés par le service du contrôle médical. En effet, l article R315-1-1 du code de sécurité sociale précise que : «Lorsque le service du contrôle médical procède à l'analyse de l'activité d'un professionnelde santé, - il peut se faire communiquer, dans le cadre de cette mission, l'ensemble des documents, actes, prescriptions et éléments relatifs à cette activité. - Il peut, en tant que de besoin, entendre et examiner ces patients. Il en informe au préalable le professionnel, sauf lorsque l'analyse a pour but de démontrer l'existence d'unefraude ( )»
Attention : - les patients entendus dans le cadre du contrôle de l activité doivent l être par des agents assermentés, - Les assurés ne doivent pas subir une contraintes ou des pressions, - Les attestations doivent être écrites et rédigées de la main de l assuré concerné, sauf incapacité de ce dernier.
2) L information à l issue de l analyse d activité : la notification des griefs retenus A l issue de l analyse d activité la CPAM, informée par le contrôle médical sur la seule nature administrative des anomalies, notifie au praticien, par LRAR, les griefs retenus à son encontre. De plus l article R315-1-2 du code de la sécurité sociale précise que : «A l'issue de cette analyse, le service du contrôle médical informe le professionnel concerné de ses conclusions. La caisse notifie au professionnel les griefs retenus à son encontre, par lettre recommandée avec demande d'avis de réception. Dans le délai d'un mois qui suit la notification des griefs, l'intéressé peut demander à être entendu par le service du contrôle médical.»
3) L entretien «confraternel» Dans le délai d un mois qui suit la notification des griefs, le professionnel de santé peut demander à être entendu par le service du contrôle médical. Le professionnel de santé a toujours la possibilité d être assisté d un membre de sa profession ou d un avocat lors de cet entretien (article D.315-1 du code de la sécurité sociale). NB: il est important que le confrère soit un spécialiste reconnu et compétent en la matière. Il s agit de discussions médicales à l appui des dossiers médicaux
Cet entretien fait l'objet d'un compte-rendu qui est adressé, par lettre recommandée avec demande d'avis de réception, au professionnel de santé dans un délai de quinze jours. A compter de sa réception, le professionnel de santé dispose d'un délai de quinze jours pour renvoyer ce compte-rendu signé, accompagné d'éventuelles réserves. A défaut, il est réputé approuvé, ce qui ne lui interdira cependant pas de contester ultérieurement les griefs retenus devant la section des assurances sociales du conseil régional de l Ordre (SAS).
À l expiration des délais prévus La CPAM renonce à poursuivre le professionnel de santé contrôlé La CPAM saisit la section des assurances sociales du conseil de l Ordre.
4) La saisine de la section des assurances sociales (SAS) L introduction de l instance L instruction de l affaire par le rapporteur Une procédure écrite et contradictoire : - Procédure écrite - Procédure contradictoire - Clôture de l instruction
5) Les manquements entraînant sanction A) Exemples de fautes sanctionnées Manquements aux obligations légales, réglementaires et déontologiques : La prescription, à près d'une centaine d'assurés sociaux, de traitements comportant des associations dangereuses de substances : CE, 30 janv. 2002. Le fait de ne pas avoir tenu compte des données acquises de la science, telles qu'elles résultent notamment des recommandations de bonnes pratiques élaborées par l'agence nationale d'accréditation et d'évaluation en santé en prescrivant un traitement à des doses ne respectant pas celles de la posologie d'entretien : CE, 4 oct. 2010
A également été considéré comme fautif le fait d'avoir établi des prescriptions sans examen du patient : CE, 15 déc. 1995. Le non-respect de la nomenclature générale des actes professionnels sera considéré comme fautif, notamment: Le fait d'inscrire sur une feuille de soins un coefficient non conforme à la nomenclature même si la nomenclature apparaît inadaptée, car tant qu'elle est en vigueur, elle doit être respectée, le praticien pouvant le cas échéant rechercher un accord avec la caisse dans les cas non prévus par ce texte réglementaire ou lorsqu'il présente des difficultés d'interprétation
B) Exemples d abus Cotations abusives Prescriptions abusives Actes abusifs Honoraires abusifs
6) Moyens à développer dans la défense des intérêts du médecin A) La forme Les vices de formes La vérification du délai de trois mois La vérification de la composition de la SAS B) Les éléments à apporter au dossier date de thèse, spécialités, DU, DPC chiffre d affaires SNIR (Système national inter régime) ou relevé annuel d honoraires et RIAP (relevé individuel d activité et de prescriptions) secteur d exercice mode d exercice (seul ou en association, masse commune des honoraires, remplaçant), présence d une secrétaire, jours et horaires de consultation type de patientèle (âge, CMU-AME )
7) Les sanctions encourues devant la section des assurances sociales Les sanctions sont déterminées à l'article L.145-2 du Code de la sécurité sociale auquel renvoie l'article R. 145-8 du même code pour ce qui concerne les auxiliaires médicaux. Il s'agit de : l'avertissement ; le blâme, avec ou sans publication ; l'interdiction temporaire ou permanente, avec ou sans sursis, du droit de donner des soins aux assurés sociaux ; dans le cas d'abus d'honoraires, le remboursement à l'assuré du trop-perçu ou le reversement aux organismes de sécurité sociale du trop remboursé, même s'il n'est prononcé aucune des sanctions prévues ci-dessus. Les deux dernières sanctions prévues susvisées peuvent faire l'objet d'une publication.
ZOOM sur l interdiction de donner des soins L'interdiction du droit de donner des soins aux assurés sociaux a fait l'objet d'une interprétation très large par le Conseil d'état. Elle a été considérée comme édictant une interdiction de donner des soins à toute personne ayant la qualité d'assuré social sans distinction : CE, 23 févr. 1951. Et qu'elle relève du régime général ou d'un autre régime de sécurité sociale : CE, 4 déc. 1964.
Recommandations: - Justifier toute prescription hors AMM - Renseigner le dossier du patient - Préciser l absence d alternative thérapeutique efficace - Mentionner sur les prescriptions «NR»