La formation continue dans les universités depuis 1968



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Transcription:

Jacques Denantes 540 Département des Sciences de l Education Université de Paris X Nanterre La formation continue dans les universités depuis 1968 Cette recherche s inscrit dans le cadre d une thèse, dont le sujet est l étude du changement social que provoque le développement de la formation continue dans les universités. L engagement, souvent réaffirmé, des pouvoirs publics en faveur de ce développement contraste avec les difficultés qu il rencontre dans la plupart des universités. Une recherche historique portant sur la période 1968/2002 me conduit à situer ces difficultés dans la résistance de la structures «configuration universitaire» à s ouvrir aux particularités de la formation continue, et dans le fait que cette ouverture n a pas déclenché une demande sociale de formations conduisant aux diplômes universitaires. L insertion de la formation continue dans les structures de la configuration universitaire La configuration universitaire Je me réfère à C.Musselin 1, qui a décrit trois mondes en interaction, celui des universités, celui du système universitaire national et celui de la profession universitaire, dont la réunion constitue ce qu elle appelle «la configuration universitaire». En France, les universités sont en position de subordination par rapport aux deux partenaires. Il y a d un côté le ministre et la direction de l enseignement supérieur, «dont les modes de pilotage sont à la fois centralisés, orientés vers la standardisation de l enseignement universitaire et guidés par des critères qui privilégient les préférences propres à chaque discipline» 2. Ce partenaire maîtrise l ensemble des ressources affectées à la formation initiale et à la recherche, décide les créations d emplois, rémunère directement sur son budget les personnels titulaires et distribue aux universités leurs crédits de fonctionnement. D autre part il y a la profession universitaire, qui, «organisée en filières verticales, hiérarchiques et centralisées» 3, gère les affectations et les carrières des personnels enseignants, dans le cadre des sections disciplinaires de la CCU (devenue CNU). Les relations entre les deux centres aboutissent à une cogestion de l ensemble du système, la situation de faiblesse des universités étant «générée par la parfaite adéquation entre les structures organisationnelles (les facultés) et les structures professionnelles (les disciplines)» 4. La procédure des contrats d établissement, qui a été instituée en 1989 5, «a amorcé un changement en profondeur» 6 de ce fonctionnement. Les contrats, qui sont passés entre le ministère et chaque université, ne portent que sur 5% des budgets de fonctionnement, mais ces 5% «représentent la part sur laquelle il existe des marges de manœuvre» 7. Au moment de leur institution, une nouvelle direction du ministère avait pour mission de les négocier dans la perspective d amener chaque université à définir un projet d établissement aboutissant «à la 1 C.Musselin «La longue marche des universités françaises», ed. puf Paris 2001 2 C.Musselin, 2001, p. 156 3 C.Musselin, 2001, p. 156 4 C.Musselin, 2001, p. 156 5 Circulaire n 89-079 du 24 mars 1989 6 C.Musselin, 2001, p. 105 7 C.Musselin, 2001, p. 181/182

2 rédaction d un projet commun qui ne soit pas une somme de projets d UFR» 8. Cette direction a disparu, mais la procédure contractuelle maintient des relations directes entre les universités et le ministère. 1989 marque un changement des conditions dans lesquelles la configuration universitaire a réagi à l insertion de la formation continue. L insertion de la formation continue dans la configuration universitaire de 1968 à 1989 Au niveau des universités, la loi de 1968 avait situé la formation continue parmi les missions des universités, et celle de 1971 avait spécifié que les établissements du système public d éducation devaient inscrire la formation continue dans le cadre de conventions à passer avec des financeurs. Il s agissait d une nouvelle activité à inscrire dans le fonctionnement d une structure organisée en vue de produire de la formation initiale. Cette dernière était à la charge de l Etat, qui payait directement le personnel titulaire pour le mettre à la disposition des universités, et qui finançait leur fonctionnement sur la base d une dotation annuelle. En formation continue, les universités devaient trouver au coup par coup des financeurs, et négocier avec eux des conventions, chacune définissant des tâches à remplir dans un délai donné. Le personnel titulaire affecté à ces tâches serait, ou bien remboursé au budget de l université, ou bien rémunéré en heures supplémentaires, et du personnel hors statut serait recruté pour assurer les celles que ne pouvait ou ne voulait assumer le personnel titulaire. En 1972, le ministère a incité les universités à se lancer dans la formation continue, en leur proposant des contrats d assistance initiale, pour financer l amorce d une prospection. Ces contrats ont permis la mise en place de missions de formation continue, auxquelles le ministère a laissé entrevoir une triple mission, de formation directe, de formation de formateurs et de recherche sur la formation. Mais la priorité donnée à l allongement de la durée des études initiales a confronté les universités à un accroissement massif du nombre d étudiants : les nouveaux postes d enseignants titulaires ont bénéficié en priorité à la formation initiale, de sorte qu il a fallu recruter un grand nombre de personnels hors statut pour faire face au développement de la formation continue. Pour la formation de formateurs, le ministère a mis en place un dispositif destiné aux GRETA de l enseignement secondaire, mais sans faire appel aux universités. Quant à la recherche, la décision a été prise en 1974 de supprimer l INFA 9, qui avait été créé pour animer, au plan national, la recherche sur la formation des adultes. En octobre 1985, un décret a spécifié les dispositions à prévoir pour l organisation des activités de formation continue dans l enseignement supérieur. Il laissait ouvert le choix de donner à chaque composante de l université la responsabilité de ses activités de formation continue, ou de la concentrer dans un service, mais il consacrait ensuite un chapitre à définir les conditions dans lesquelles l université pouvait créer un service commun chargé du développement de la formation continue. Dans tous les cas, les dépenses et les recettes de la formation continue devaient être regroupées dans une comptabilité, qui les récapitulerait dans une état à présenter en équilibre. Lorsque les recettes étaient suffisamment garanties, le décret prévoyait la création d emplois gagés de personnels titulaires, à condition de rester dans la limite du total des emplois inscrits à la loi de finance. Faute d emplois gagés, il laissait ouverte la possibilité de recruter des non-titulaires sur les ressources propres de la formation continue, mais la loi de 1984 imposait des contrats à durée déterminée pour tous les nouveaux recrutements. La loi de 1984 avait aussi institué la validation des acquis professionnels pour accéder aux études supérieures, et un décret de juin 1985 a précisé que la responsabilité de sa mise en 8 C.Musselin, 2001, p.125/126 9 Institut National pour la Formation des Adultes

3 œuvre était confiée aux présidents d universités. La loi de 1984 rappelait enfin le monopole de l Etat pour la collation des grades et des titres universitaires, dont l attribution résultait des diplômes nationaux délivrés par les universités. La corporation universitaire a été sollicitée de prendre en compte les particularités des activités de formation continue, afin de ne pas pénaliser les carrières des enseignants titulaires qui s y engageaient. Cette pénalisation résultait de l impossibilité d inscrire la plupart des activités dans les limites d une discipline, et de faire valoir des recherches qu il soit possible d évaluer dans le cadre de cette discipline. Les sollicitations ont été faites et renouvelées sans succès, notamment en 1974, par le ministre et par la commission formation du SNESup, et en 1982, par le rapporteur de la coordination des missions de formation continue, qui parlait à Reims en présence du ministre. L insertion de la formation continue dans la configuration universitaire après 1989 La contractualisation des relations avec l Etat a ouvert aux universités la possibilité de globaliser leurs engagements, et les textes instituant la validation des acquis ont confirmé que la responsabilité de sa mise en œuvre était confiée aux présidents d université. Après le décret de 1985 qui organisait l accès aux études supérieures, la loi de 1992 décidait que des parties de diplômes pourraient faire l objet de validations à partir de l expérience, et celle de 2002 fondait l attribution d une partie ou de la totalité d un diplôme sur l analyse de l expérience professionnelle. La corporation universitaire a persisté dans son refus de prendre en considération les activités de formation continue dans l évaluation des enseignants. En 1997, le directeur de l enseignement supérieur attribue ce refus à une minorité pour laquelle, «hors le dossier scientifique, point de salut». En 1998, l IGAEN constate que l engagement des enseignants chercheurs dans la formation continue est perçu comme un facteur de dévalorisation, ce qui dissuade la majorité d entre eux de s y impliquer, et nécessite de faire appel à un grand nombre de personnels hors statut. L abstention des enseignants-chercheurs se traduit aussi dans le retard à la mise en œuvre de la validation instituée par la loi de 1992, qui apparaît aux inspecteurs comme «un devoir délaissé, tant est minime son application» 10. Au niveau des universités, elles sont quelques-unes à avoir inscrit la formation continue dans les orientations de leur contrat avec le ministère. L université de Lille 1 s est dotée d un service commun chargé de promouvoir le développement de la formation continue dans l ensemble des composantes. En fonction des prestations qu il leur fournit, il négocie avec elles des modalités de partage des recettes de la formation continue. Plutôt que des actions spécifiques de formation continue, il s efforce de promouvoir l adaptation des formations initiales afin de les ouvrir aux adultes, et il anime la mise en œuvre des procédures de validation des acquis. Cela a commencé par une commission, qui examinait tous les dossiers établis en vue d une admission dans une formation au titre du décret de 1985. L application de la loi de 1992, puis celle de 2002 a conduit à multiplier les jurys, chacun constitué pour l examen d une demande individuelle de validation. L université a affecté une partie de son contingent d heures supplémentaires au fonctionnement des jurys. L absence d une demande sociale en faveur du développement des formations diplômantes 10 Rapport IGAEN n 98-0014 de février 1998, p.4

4 Dans le marché de la formation, la spécificité des universités est leur capacité à délivrer des diplôme nationaux, qui se traduisent en grades et en titres universitaires. Ceux-ci apportent une reconnaissance sociale, d où l idée récurrente d une seconde chance, qui serait ouverte aux adultes par la formation continue. Cependant beaucoup d obstacles dissuadent les adultes de tenter cette seconde chance. La validation des acquis a été instituée pour stimuler la demande, mais sa mise en œuvre dans les universités n a commencé à devenir mesurable qu à partir de 1998. Le développement de la formation continue jusqu en 1998 A partir de 1972, les effectifs inscrits en formation continue se sont accrus rapidement pour atteindre 287.000 en 1998. Mais, entre 1980 et 1984, la durée moyenne des formations est de 120 h, ce qui signifie une proportion importante d actions courtes d adaptation ne visant pas des diplômes. Par contre, 18% du chiffre d affaires sont financés par les bénéficiaires eux-mêmes, et des enquêtes montrent qu un nombre important d adultes font le choix de s inscrire directement en formation initiale, en payant les droits d inscription des étudiants. En 1986, une circulaire estime leur nombre entre 150.000 et 200.000 11, leur nombre variant suivant la définition donnée à l expression «étudiants hors-âge». La procédure pour obtenir un congé de formation est lourde et incertaine. Il faut négocier le congé avec l employeur, trouver une formation qui convienne, remplir les conditions de niveau pour être admis, trouver enfin des ressources pour financer la formation et percevoir une rémunération. L ESEU 12, devenu DAEU 13, a été institué pour ceux qui n avait pas leur baccalauréat, mais sa préparation allonge encore le temps à passer en formation. Bien que présentant le congé comme un droit, la loi de 1971 était restée imprécise sur son financement, et il a fallu attendre les années 1982 pour que soient mis en place les organismes paritaires chargés de gérer les fonds qui lui étaient affectés. Mais dans un contexte de fort chômage, la promotion sociale n était pas une priorité, et ces fonds n ont été alimentés que par une petite fraction de la taxe à la formation professionnelle. Dans de telles conditions, il n y avait aucune raison se stimuler, au plan national, une demande qu il n aurait pas été possible de satisfaire En 1998, les niveaux d activité en formation continue sont très variables suivant les universités. L université de Lille 1, qui réalise, de loin, le plus gros chiffre d affaire, a mis en place, à la fin des années 1980, un service commun dont une des fonctions est l accueil et l information des adultes, qui envisagent de s engager en formation continue. La formation continue avec VAP à partir de 1998 La validation des acquis a été instituée, en 1985, pour faciliter l accès à des formations conduisant à des diplômes de l enseignement supérieur. Elle a été étendue, en 1992, à des parties de diplômes de l enseignement supérieur et de l enseignement technologique. Enfin la loi de 2002 a institué la reconnaissance des compétences professionnelles par un titre, un diplôme ou un certificat de qualification (CQP). A partir des années 1980, les partenaires sociaux avaient mis au place de nouvelles certifications, qui étaient basés sur la notion de compétence, et le ministère de l Education avait adapté les diplômes de l enseignement professionnel et de l enseignement technique, pour la prendre en compte. L institution de la validation de 1992 et surtout celle de 2002 ont déclenché une forte demande pour ces diplômes 14. 11 Circulaire de la DES du 31 mars 1989 12 Examen Spécial d accès à l Enseignement Universitaire 13 Diplôme d Accès aux Etudes Universitaires 14 Je me réfère à un exposé présenté par A.M.Charraud au séminaire du GEHFA sur la validation des acquis qui s est tenu le 09/12/2003 à l ETSUP

5 Il ne s est encore rien produit de tel dans l enseignement supérieur. Alors qu en 1998, le nombre d adultes inscrits en formation continue atteint 287.000, il n est décidé que 8400 validations au titre du décret de 1985, et 1035 au titre de la loi de 1992. Les statistiques plus récentes font apparaître un taux élevé d accroissement des demandes de validation, mais la question n est pas tranchée, à l intérieur de la configuration universitaire, de savoir si la nouvelle loi de 2002 sera interprétée comme l ouverture d une seconde chance d obtenir les diplômes de la formation initiale, ou si «elle sera considérée comme le levier de transformation progressive des systèmes de formation vers la recherche d une meilleure articulation entre l acquisition des savoirs académiques et l expérience» 15. En conclusion Avec le développement des démarches de validation des acquis de l expérience, la formation continue interpelle les trois mondes de la configuration universitaire. Pour le système universitaire national, l interpellation porte sur la définition des diplômes de l enseignement supérieur et, pour la profession universitaire, sur le bien fondé d un système de reconnaissance uniquement fondé sur la recherche dans le cadre d une discipline. Quant aux universités, elles se trouvent confrontées à la responsabilité qui leur a été attribuée en matière de validation des acquis. 15 Citation d un article de J.Aubret dans un article intitulé «La validation des acquis de l expérience», in revue Savoirs, n 1, 2003-1, p.58