Synthèse du marché Big Data 2012-2013. www.bigdataparis.com. Un évènement organisé par :



Documents pareils
Introduction Big Data

Business Intelligence et Data Visualisation

À PROPOS DE TALEND...

Ad-exchanges & RTB (avec la participation de Fabien Magalon, La place

Introduction Que s est-il passé en 2014? Qu attendre de 2015?

Vision prospective et obstacles à surmonter pour les assureurs

Comment réussir son projet de Master Data Management?

Webinar EBG Nouvelles perspectives d'exploitation des données clients avec le big data

BIGDATA AN 3 : UNE NOUVELLE ERE DE B.I.

Big Data. Concept et perspectives : la réalité derrière le "buzz"

Le Cloud et le Big Data annoncent le retour en grâce de la donnée consommateur

#BigData Dossier de presse Mai 2014

Performances Veille. Système d Information. Semaine 25 du 18 au 24 juin Numéro 228

S e r v i r l e s clients actuels de maniè r e e f f ic a ce grâce a u «Co n s u m er Insight»

Les ressources numériques

L Edition Pilotée XL

SÉRIE NOUVELLES ARCHITECTURES

Stratégies gagnantes pour les prestataires de services : le cloud computing vu par les dirigeants Dossier à l attention des dirigeants

QU EST-CE QUE LE DECISIONNEL?

Des données à la connaissance client. A la découverte de la plateforme de connaissance client knowlbox

Les Ressources Humaines à l heure du Big Data : progrès, perspectives et limites CORNERSTONE WHITEPAPER

AXIAD Conseil pour décider en toute intelligence

20 ans du Master SIAD de Toulouse - BigData par l exemple - Julien DULOUT - 22 mars ans du SIAD -"Big Data par l'exemple" -Julien DULOUT

De la captation de données à la Datavisualisation

LE DISPLAY RÉVOLUTION. De l achat d espace publicitaire classique à la gestion d audience ciblée. Janvier 2012 LIVRE BLANC ACXIOM.

GT Big Data. Saison Bruno Prévost (Safran), Marc Demerlé (GDF SUEZ) CRiP Thématique Mise en œuvre du Big Data 16/12/14

Cette première partie pose les enjeux de la BI 2.0 et son intégration dans le SI de l entreprise. De manière progressive, notre approche situera le

En route vers le succès avec une solution de BI intuitive destinée aux entreprises de taille moyenne

LA PLENIERE D OUVERTURE

transformer en avantage compétitif en temps réel vos données Your business technologists. Powering progress

DÉPLOIEMENT DE QLIKVIEW POUR DES ANALYSES BIG DATA CHEZ KING.COM

Les compétences clés en 2015 La révolution du Big Data souffle sur les métiers du commerce et du marketing

Les 10 grands principes de l utilisation du data mining pour une gestion de la relation client réussie

LIVRE BLANC. Smart data, scoring et CRM automatisé : Comment acquérir, qualifier et convertir ses prospects en clients

Big Data et Marketing : les competences attendues

DEMANDE D INFORMATION RFI (Request for information)

tendances du marketing BtoB à adopter sans tarder.

Le FAQ de Syntec Conseil en Relations Publics 2014

Comment valoriser votre patrimoine de données?

Suite Jedox La Business-Driven Intelligence avec Jedox

Big data* et marketing

NewPoint IT Consulting BIG DATA WHITE PAPER. NewPoint Information Technology Consulting

pour Une étude LES DÉFIS DES DSI Avril 2013

Mobilités 2.0 : connaître pour mieux agir

CONFERENCE TECHNOM AIDE IBM

Chapitre 9 : Informatique décisionnelle

PRATIQUES ET USAGES DU NUMÉRIQUE DANS LES PME ET TPE

DATA QUERY : MODÉLISATION AVANCÉE DE VOS DONNÉES

SOCIAL CRM: DE LA PAROLE À L ACTION

Big data et données géospatiales : Enjeux et défis pour la géomatique. Thierry Badard, PhD, ing. jr Centre de Recherche en Géomatique

Les performances des banques en ligne chinoises en 2010 par Arthur Hamon - Asia Pacific Area Manager & Alain Petit - Responsable Benchmarks & Etudes

LES ENTREPRISES PROSPÈRES SE TRANSFORMENT GRÂCE À DES SOLUTIONS SAP FLEXIBLES

Pour une entreprise plus performante

GÉRER La force de l image. Business Intelligence

1 er Avril 2015 Data Science & Big Data Etat de l art Donner plus d intelligence aux données

P résentation. L ensemble des concepts et des outils de la Gestion des Ressources Humaines. La Gestion des Ressources Humaines (collection Les Zoom s)

Entreprise et Big Data

Forum CXP. Le logiciel dans tous ses états! 14 juin Paris

Dématérialisation et mobilité

Comment toucher les décideurs

Xi Ingénierie. La performance technologique au service de votre e-commerce. Comment exploiter les cookies sur vos applications web en toute légalité?

Nos Solutions PME VIPDev sont les Atouts Business de votre entreprise.

Le rôle d un CRM dans la gestion intégrée des services à la clientèle

TOP. année promet d être BIG (Business Intelligence Growth) PRINCIPALES TENDANCES EN MATIÈRE DE SOLUTIONS DÉCISIONNELLES POUR 2013

Analytics Platform. MicroStrategy. Business Intelligence d entreprise. Self-service analytics. Big Data analytics.

Les participants repartiront de cette formation en ayant une vision claire de la stratégie et de l éventuelle mise en œuvre d un Big Data.

La Chaire Accenture Strategic Business Analytics de l ESSEC

Partie I Stratégies relationnelles et principes d organisation... 23

ERP SURVEY ÈRE ENQUÊTE EN FRANCE AUTOUR DE LA SATISFACTION DES UTILISATEURS D ERP ET DE PROGICIELS DE GESTION

BIG DATA en Sciences et Industries de l Environnement

Sage 30 pour les petites entreprises

Panorama des solutions analytiques existantes

IBM Software Big Data. Plateforme IBM Big Data

LES RESEAUX SOCIAUX SONT-ILS UNE MODE OU UNE REELLE INVENTION MODERNE?

Data 2 Business : La démarche de valorisation de la Data pour améliorer la performance de ses clients


QUICK GUIDE #1. Guide du pilotage par la performance pour les distributeurs automobiles

Esri LOCATION ANALYTICS

IBM Social Media Analytics

SOMMAIRE. Portraits des intervenants Portraits des animateurs Conférence, Débat et Échanges #$%&'(!)(*+,!-$*./)(*-(!"0!1,2*!34"0!5!!

La Business Intelligence & le monde des assurances

PRÉSENTE SES SERVEURS L ESPACE LE PLUS INNOVANT POUR FAIRE TRAVAILLER VOS DONNÉES EN TEMPS RÉEL

Enquête Individus 2014 : smartphone, tablette & cloud. Nicolas Deporte Observatoire du GIS M@rsouin. Bretagne 2012 (Marsouin)

L ATTRIBUTION EN MARKETING DIGITAL

1 Actuate Corporation de données. + d analyses. + d utilisateurs.

Les activités numériques

Big Data et l avenir du décisionnel

Le Tag Management à l ère du Smart Data

accompagner la transformation digitale grâce au Big & Fast Data Orange Business Services Confidentiel 02/10/2014

«LES FRANÇAIS & LA PROTECTION DES DONNÉES PERSONNELLES» Etude de l Institut CSA pour Orange. Février 2014

Titre : La BI vue par l intégrateur Orange

Solocal Group Solocal Group pilote ses audiences via un ensemble de tableaux de bord complètement automatisés grâce à l API AT Internet.

SMARTPHONES ET VIE PRIVÉE

Stages ISOFT : UNE SOCIETE INNOVANTE. Contact : Mme Lapedra, stage@isoft.fr

Le terme «ERP» provient du nom de la méthode MRP (Manufacturing Ressource Planning) utilisée dans les années 70 pour la gestion et la planification

l E R P s a n s l i m i t e

Transformez vos données en opportunités. avec Microsoft Big Data

PRESS RELEASE. La première Demand Side Platform française est une DSP mobile netadge, la performance RTB, au service des stratégies media mobile

COMMUNIQUE DE PRESSE CONJOINT MODELLIS & DATAVALUE CONSULTING

Transcription:

2012-2013

S O M M A I R E A ETUDE DU MARCHE BIG DATA I. Le Big Data, du concept à la mise en œuvre...p 03 1) Le Big Data : quelques rappels sur un phénomène 2) Le Bilan année 1, bilan et perspectives II. Le Big Data, du data deluge à l exploitation de la donnée...p 05 1) La nature de la donnée 2) Le traitement de la donnée : des innovations en plein essor 3) L analyse de la donnée : quels changements? III. Le Big Data, quels usages?...p 06 1) Les usages marketing 2) Le management des opérations et de la supply chain 3) L usage exploratoire 4) L apparition de services innovants IV. Les principales questions entourant le Big Data...P 08 1) Enjeux stratégiques a) Comment mettre en place le Big Data au sein de son entreprise? b) Quel business model? Quels apports économiques du Big Data? 2) Enjeu RH : le recrutement des data scientists 3) Enjeux technologiques a) La qualité de la donnée b) La sécurité des données 4) Enjeu réglementaire : la protection des données personnelles V. Vers de nouveaux marchés L impact du Big Data...P 11 1) La Dataviz 2) L Open Data 3) L Internet des Objets B INTERVIEWS D EXPERTS I. Jean-Marie Messager, SOPRA CONSULTING : Etat des Lieux du Big Data...P 13 II. Pierre Delort, ASSOCIATION NATIONALE DES DSI : Le Chief Data Officer...P 14 III. Fiche Projet de Mathieu Gras, SFR : La mise en place d un service de publicité géolocalisée...p 15 C ARTICLES D EXPERTISE I. Mouloud Dey, SAS FRANCE...P 16 II. Steven Totman, SYNCSORT...P 17 III. Sanjay Poonen, SAP...P 18 2

A. ETUDE DU MARCHE BIG DATA I. Le Big Data, du concept à la mise en œuvre 1) Le Big Data : quelques rappels sur un phénomène Le Big Data s est imposé dans la sphère du management à la faveur d un rapport de Mc Kinsey paru sur ce sujet en mai 2011. Déjà auparavant, quelques expérimentations issues du milieu de la recherche avaient permis d évoquer cette thématique (cf la revue Nature en 2008). En quoi consiste le Big Data? Comme le décrit Mc Kinsey, le Big Data est une réponse à l explosion des données observée dans l univers numérique (Internet, RFID, mobile) : il permet de capter celles-ci, de les traiter à très grande vitesse et de les rendre ainsi exploitables pour les entreprises et les organisations, quelle que soit la nature de cette donnée. Economiquement comme technologiquement, le Big Data apporte une avancée réelle dans l appareil décisionnel de l entreprise car il inscrit la donnée au cœur même de la décision et se décline en multiples usages indispensables pour permettre à l entreprise d accroître ses marges : meilleure connaissance du client, ajustements des flux physiques, détection d erreurs Mc Kinsey a énoncé une règle très simple pour reconnaître un produit Big Data : la règle des 3V. Ces 3V correspondent aux termes suivants : - Volume : des volumes de données conséquents, de l ordre du téra-, du péta-, voire de l exaoctet (10 18 octets) - Variété : des données de natures très diverses, qu il s agisse de vidéos, de logs, de mails, etc - Vélocité : une vitesse de traitement accélérée pouvant même aller jusqu au temps réel Par la suite, les experts du sujet ont eu tendance à rajouter un 4e V à cette définition, celui de Valeur; en effet, le Big Data se définit par une valorisation de la donnée, c est-à-dire une transformation de celle-ci en information qui générera par la suite d importants bénéfices. Le Big Data s appuie sur un socle technologique solide en plein essor (cf partie II) mais dispose d applications très économiques (cf partie III) qui lui ont permis de réaliser un véritable buzz en 2012 : les décideurs de tous bords (et pas seulement les informaticiens ou statisticiens) se sont penchés sur la question, intrigués par la promesse du Big Data et par l exemple de nombreux projets développés outre-atlantique. En France, l année 2012 a été marquée par l apparition des premières expériences matures de Big Data. Pour autant, le Big Data n en est qu à ses débuts, ce qui explique que de nombreuses questions restent encore à l étude (cf partie IV) et que d autres marchés se développent dans son sillage (cf partie V). Bienvenue dans l ère du déluge de données! 3

2) Le Bilan année 1, bilan et perspectives Avant de revenir plus concrètement sur ces différents aspects, il est utile de faire le point sur les développements de ce phénomène en France et dans les autres pays. Des rapports sont en effet parus sur la question en 2012, permettant d y voir plus clair dans la mise en application du Big Data : les études IDC de juin, août et septembre 2012, respectivement pour SAP, Hitachi et EMC, ont donné des indications sur les besoins des entreprises, la maturité de leurs projets et les perspectives annoncées. Il ressort de ces études que le Big Data est encore à l état de projet pour la majorité des entreprises françaises et européennes : en effet, 33% des entreprises britanniques avaient mis en place des solutions Big Data ou prévoyaient de le faire dans les 12 mois, alors qu en Allemagne (18%), en Russie (10%) et en France (8%), les chiffres étaient bien plus bas. Le coût des infrastructures reste un frein régulièrement évoqué pour expliquer la lenteur du déploiement du Big Data. Cependant une bonne majorité des entreprises ont conscience de l intérêt du Big Data et de la problématique soulevée par l explosion des données : pour elles, il s agit surtout de réduire les coûts en maîtrisant les données d activité (cité par 40% des sondés) mais d autres apports du Big Data sont bien identifiés parmi lesquels la gestion et la planification des budgets, l analyse des risques ou la création de nouveaux marchés. Au total, IDC estime que la vente de solutions Big Data devrait passer de 3,2 milliards de $ en 2010 à 16,9 milliards de $ en 2015, soit un taux de croissance annuelle de près de 40%. Le marché du Big Data se structure donc peu à peu en France et en Europe et le terme «Big Data» est désormais largement reconnu ; qu il s agisse de petites entreprises spécialisées ou de grandes compagnies d envergure mondiale, l analyse de données multiples est devenue un critère de développement important en 2012, essentiellement dans les secteurs banque, telecom et secteur public. les chiffres Evolution du marché en milliards de dollars - Source : IDC 3.2 en 2010 Quantité de nouvelles données par zones géographiques enregistrées en 2010, en petaoctets 16.9 en 2015 (est.) 250 Mds $ de potentiel annuel pour l administration publique Européenne, l équivalent du PIB Grec 60 % du potentiel de hausse de la marge opérationnelle pour les commerces de détail USA 3.500 Amérique Latine 50 Europe 2.000 Moyen-Oriant et Afrique 200 Inde 50 Chine 200 300 400 Japon Reste de l Asie Pacifique 4

II. Le Big Data, du data deluge à l exploitation de la donnée Avant d être un phénomène économique, le Big Data est avant tout un processus technologique qui vise à transformer une donnée brute en information directement exploitable par l entreprise. Les outils à l œuvre lors de ce processus constituent la réelle innovation de ces dernières années. 1) La nature de la donnée A l origine du Big Data, il y a la matière de base : la data. Cette donnée, issue des différents supports que sont Internet, les smartphones ou les capteurs RFID, est de plus en plus variée. En cause : l apparition de formats plus complexes comme les vidéos mais également l expansion d une donnée davantage qualitative, «de contenu», issue par exemple des réseaux sociaux et des forums de discussion. Ce déferlement de données, qualifié de «déluge» dans le langage consacré, contraint les technologies à évoluer et à traiter des données qui ne sont pas structurées ; on parle de données non structurées, voire parfois de données multi-structurées. Au-delà du volume de ce data deluge, c est la nature de ces données qui est souvent mise en avant : la donnée brute, directement extraite de l activité ou de l opinion de l internaute apporte une information qui, si elle est bien traitée, promet à son détenteur de suivre pas à pas les comportements des clients et les opérations de l entreprise. 2) Le traitement de la donnée : des innovations en plein essor Afin de s adapter à cette contrainte représentée par la diversité des données et afin d absorber les grands volumes observés, les éditeurs ont développé des solutions de bases de données adaptées à cet environnement. Historiquement, c est au début des années 2000 que, confrontés les premiers à ces problèmes, les chercheurs de Google ont développé un mode de calcul fondé sur la parallélisation massive et permettant de traiter de grands volumes de données : MapReduce. 5

Par la suite, c est la fondation Apache qui a décliné ce mode de calcul sur une plateforme Open Source nommée Hadoop, véritable librairie de calculs parallèles permettant de traiter des données non structurées. Hadoop est rapidement devenue la référence en matière de parallélisation des big data, et les éditeurs se sont employés à adapter l offre initiale Open Source Hadoop en solution commerciale, customisée en fonction des applications clientes et des indicateurs de performance. C est aujourd hui la principale offre qu on retrouve sur le marché, soit au travers de solutions Cloud soit par le biais d appliances (boîtier hardware intégrant la technologie Hadoop). D autres briques s ajoutent ensuite à Hadoop pour spécialiser le traitement : Hive, Pig, Cassandra Ce sont des systèmes de gestion de bases de données non relationnelles distribuées, utilisant des modalités de requête NoSQL, qui dépassent donc les codifications du langage SQL. Ce mouvement NoSQL (Not Only SQL) est d ailleurs une des autres caractéristiques majeures de l avènement du Big Data. Ces différents outils permettent donc de traiter tous types de données, dans des quantités très volumineuses, et en un temps limité. La problématique du temps réel est d ailleurs de plus en plus prégnante dans les offres des éditeurs, qu il s agisse de traitement sur des serveurs dédiés ou de traitement in-memory (dans la mémoire de l ordinateur). 3) L analyse de la donnée : quels changements? Le traitement de la donnée effectué ne constitue pas pour autant un but en soi : à l issue du traitement, la donnée est simplement lissée, triée, elle n a pas encore révélé tout son potentiel. C est ici que l intervention d analystes spécialisés, les data scientists, prend toute son importance : ceux-ci peuvent interpréter les données, les croiser, les remettre en perspective et proposer des représentations directement compréhensibles pour les niveaux décisionnels. La Business Intelligence, discipline de l entreprise consacrée de longue date à l analyse des données à des fins de pilotage et de reporting s enrichit désormais de l apport des Big Data : la saisie de données multiples provenant de sources internes comme externes, apporte un éclairage nouveau sur les chiffres et autorise davantage d exploration des comportements statistiques. Le datamining en format Big Data a donc de beaux jours devant lui à condition que les compétences requises soient présentes au sein de l entreprise pour analyser correctement les données. 6

III. Le Big Data, quels usages? Cette donnée transformée en information devient dès lors un outil incomparable pour les différents métiers qui l utilisent: c est au stade opérationnel qu elle apporte réellement de la valeur à l entreprise, conduisant celle-ci à mieux gérer l activité et à accroître ses parts de marché, tout en assurant un sursaut d innovation pour les grandes comme les petites structures. 1) Les usages marketing L usage le plus répandu du Big Data se situe probablement du côté du marketing, et plus encore sur le terrain du digital. Les données multiples partagées sur le Web sont en effet un gisement inépuisable pour les entreprises qui cherchent à mieux connaître leurs clients et à communiquer avec eux de façon plus ciblée. Le Big Data apporte ainsi une précision plus forte dans la segmentation des clients et dans le message qui leur est adressé : personnalisation en ligne, reciblage, publicité temps-réel via le RTB, analyse de sentiment les méthodes abondent pour identifier au plus fin les besoins de l internaute et lui communiquer en temps réel une réponse à ses attentes. Un phénomène qu on observe également dans le domaine offline : en magasin, dans la grande distribution, des études sont menées pour déterminer les prix les plus appropriés en fonction des populations, mais également les préférences géolocalisées des clients et visiteurs. Un outil qui s avère déterminant lorsqu il s agit de comprendre les chiffres de ventes, région par région, et d évaluer ainsi la performance des forces commerciales. Là où le Big Data s avère véritablement innovant par rapport à un outil marketing classique (de type CRM), c est dans l analyse des données qualitatives : grâce au traitement des données géolocalisées ou des données sociales, les responsables marketing ont désormais la possibilité de pousser leur message au plus près de l utilisateur, dans sa sphère de préférences ou sur son itinéraire géographique. Une révolution dans le domaine du marketing qui aiguise de nombreuses curiosités! 7

2) Le management des opérations et de la supply chain Mais le Big Data a également des usages internes à l entreprise, notamment dans le suivi de l activité et la détection des erreurs ; en effet, agréger les données de production et les analyser en temps réel permet aux décideurs de piloter plus précisément leur entreprise et de réagir dans les plus brefs délais si des erreurs ou des pannes sont détectées. Ces dispositifs sont particulièrement actifs dans le domaine des télécoms, des transports, de la logistique ou de la production industrielle, où le suivi au plus près des flux et des équipements est un facteur clé d efficacité. A ce titre, le développement des outils de localisation autorise là encore les projets les plus ambitieux, puisque le monitoring géographique de la supply chain permet de contrôler en permanence le bon déroulé des opérations et conduit à une réponse immédiate si des anomalies sont détectées. Enfin, comme pour tout outil de pilotage, le caractère prédictif du Big data joue un rôle non négligeable : en analysant les données météo, techniques ou de trafic, les responsables logistiques sont capables de déterminer leur niveau de stocks, la maintenance de leurs équipements et d adapter la production à venir en fonction de ces données externes. 3) L usage exploratoire Le Big Data est avant tout un outil manipulé par les chercheurs pour détecter parmi les immenses jeux de données liés au vivant des informations significatives qu ils pourront analyser et modéliser. C est ainsi que des programmes Big Data ont vu le jour dans la génomique, l imagerie médicale ou, au-delà, dans l exploration des sous-sols et même de l espace. L idée est que le croisement de pétaoctets de données permet de plonger au cœur de l infiniment petit et de déterminer ainsi en des temps réduits le comportement de particules infimes observées au cœur du vivant. Un potentiel de recherche impressionnant qui fait basculer les laboratoires et les directions R&D des entreprises dans une autre dimension. Même les sciences sociales sont concernées puisque l observation de comportements macroéconomiques au sein de populations entières permet de déceler des signaux faibles pouvant être généralisés, et autoriser ainsi la prédiction. 4) L apparition de services innovants Enfin le dernier usage du Big Data, déjà évoqué au cœur des autres domaines d activité, concerne les services innovants : concrètement, il s agit des métiers et des pratiques liés au temps réel et à la localisation qui permettent de créer des prestations totalement nouvelles auprès du consommateur final. On retrouve ces innovations dans le tourisme, le transport ou encore la distribution, avec une prégnance des PME dans la production de ces nouveaux services. L utilisateur a à disposition, sur son smartphone, une information qui lui permet d adapter ses usages : par exemple dans le domaine des loisirs, la possibilité de savoir en temps réel le nombre de places restantes dans les théâtres environnants est un service totalement nouveau qui facilite pourtant beaucoup la prise de décision du consommateur et le remplissage des salles pour les guichetiers! 8

IV. Les principales questions entourant le Big Data Si le Big Data s est imposé au cours de cette année 2012, il n en reste pas moins l objet de nombreux questionnements, et notamment sur les aspects technologiques, éthiques ou encore économiques qu il comporte. L année dernière, le débat portait essentiellement sur le caractère réellement novateur du Big Data, par rapport à l analyse de données traditionnelle effectuée depuis de nombreuses années déjà ; cette interrogation ayant été partiellement balayée par l observation de projets innovants issus du Big Data, les questions se tournent maintenant vers d autres enjeux, plus techniques. 1) Enjeux stratégiques :. A commencer par des enjeux stratégiques. Le Big Data répond en effet à un désir de performance des organisations et à une volonté de créer des opportunités de croissance dans un contexte relativement morose pour l économie. Or cette volonté impose de réfléchir en terme de coûts des équipements et en terme d organisation des tâches. Et par-dessus tout, il importe de se poser la question des bénéfices exacts retirés de cette implémentation. a) Comment mettre en place le Big Data au sein de son entreprise? Les entreprises qui choisiront de s équiper de technologies Big Data seront fatalement amenées à réfléchir sur leurs besoins : où le Big Data est-il nécessaire? Où n est-il pas indispensable? Si tous les départements de l entreprise ne retirent pas le même profit de l analyse de leurs données, l investissement en technologies Big Data devra être ciblé et adapté aux différentes activités de l entreprise. Cette question s impose également lorsqu il s agit d évaluer les ressources humaines nécessaires pour travailler la donnée ; les métiers ont-ils besoin d accéder au Big Data de la même façon que les directions informatiques? Comment s organise la remontée d informations et selon quel objectif temporel? Une organisation optimale devra alors être définie, pour s assurer que l objectif initial du Big Data (à savoir la réduction du temps de prise de décision) soit effectivement atteint. Pour certaines entreprises, cette organisation optimale des équipes recouvrera une approche décentralisée dans laquelle les métiers opérationnels seront chargés du traitement de leurs propres données et seront directement en lien avec le terrain pour cela. Mais pour d autres sociétés, l optimisation passera par la création d un service central dédié à la donnée, qui se chargerait de traiter l ensemble des Big Data de l entreprise avant de rebasculer l information vers les services. A cet effet, on parle de plus en plus d un nouveau poste en création dans les majors américaines : celui de Chief Data Officer, autrement dit un responsable des données de l entreprise dont le rôle serait de transmettre au comité de direction les observations et analyses appuyées sur les données, et ce afin d éclairer davantage la prise de décision. 9

b) Quel business model? Quels apports économiques du Big Data? Au-delà de cette analyse organisationnelle et financière, le Big Data pose également une question de fond sur le bénéfice qu il apporte à son utilisateur. Nous avons vu les différents usages du Big Data mais il est souvent difficile d avoir une analyse économique de ces usages : concrètement, quelle valeur l entreprise «Big Data» va-t-elle générer? Les indicateurs sont multiples : on peut considérer ainsi que les opérations de ciblage marketing seront susceptibles d augmenter le chiffre d affaires de l entreprise, là où l agrégation de données internes permettra en revanche de suivre l activité et de détecter les erreurs, avec pour conséquence la limitation des coûts. Mais d autres analyses montrent que le véritable gain du Big Data réside dans les parts de marché : mettre en place une organisation Big Data permet de prendre le dessus par rapport à ses concurrents en termes de diffusion des messages et de captation d audience l essentiel étant bien sûr de se situer aux avant-postes. Enfin, beaucoup s accordent sur le fait que la véritable création de valeur du Big Data réside dans l apport d innovation et de nouveaux services que celui-ci encourage. Bien que difficilement mesurable économiquement, il induit une valeur ajoutée démultipliée par l effet de réseau (notamment dans les télécoms ou les médias). 2) Enjeu RH : le recrutement des data scientists Autre enjeu qui se présente aux entreprises utilisatrices du Big Data, qu elles soient petites ou grandes : la montée en compétences pour absorber le savoir-faire nécessaire à la pratique du Big Data. Concrètement, les profils les plus recherchés sont ceux des data scientists et des data analysts. Les uns comme les autres sont détenteurs d un bagage à la fois statistique, technique et opérationnel, le data analyst étant certainement encore plus au contact du terrain que son homologue data scientist, plus orienté ingénieur. Leur rôle au sein de l entreprise est de traiter les données d activités et de prospection en les liant à une prise de décision «business» opérationnelle. Un enjeu réside dans la formation de ces experts de la donnée : en effet, les écoles commencent tout juste à proposer des formations en lien avec ce métier et les entreprises communiquent fréquemment sur le manque de profils disponibles. 3) Enjeux technologiques : Les enjeux technologiques du Big Data ont beaucoup évolué entre 2011 et maintenant : en 2011, en effet, les experts se penchaient davantage sur la question de la volumétrie, du stockage ou encore de la nature non-structurée des données traitées. Ces enjeux de base pour le Big Data semblent aujourd hui surmontés, laissant place à d autres préoccupations. 10

a) La qualité de la donnée La question qui a occupé le devant de la scène en 2012 est celle de la qualité des données : en effet, les utilisateurs du Big Data ont constaté que le traitement de grands volumes de données pouvait accroître le nombre d erreurs si les données n étaient pas intègres à la base. De nombreuses anomalies pouvaient en effet entacher la véracité des données et du traitement : le fait que des données soient en doublons, le fait qu elles proviennent de mauvaises sources, ou encore qu elles soient déjà obsolètes un aléa encore amplifié par le fait que les données proviennent de plus en plus de sources externes. Pour contrer cela, les intégrateurs ont développé de nouvelles solutions qui permettent de mieux percevoir la source de la donnée et de réduire le taux d erreur. Des fournisseurs spécialisés dans l analyse et le nettoyage de la donnée externe ont également vu le jour. Mais l analyse humaine reste quoi qu il en soit indispensable et la montée en compétence, évoquée précédemment, présente à ce titre un intérêt stratégique pour l entreprise. b) La sécurité des données D autre part, le second enjeu directement connecté à l explosion des données est celui de la confidentialité et de la sécurité : en stockant des données stratégiques sur lesquelles elle compte appuyer ses décisions, l entreprise s expose à des phénomènes de cybercriminalité et de piratage. Les administrations publiques sont également fortement concernées par cette préoccupation. Les solutions de stockage sur serveurs et dans le Cloud doivent de ce fait répondre à ce risque d insécurité sur les réseaux ; mais même au sein de l organisation, des systèmes de protection sont nécessaires afin de limiter l accès aux données aux seules personnes qui en démontrent le besoin. On rejoint ici la problématique organisationnelle décrite plus haut : comment planifier la remontée d informations? 11

4) Enjeu réglementaire : la protection des données personnelles Enfin, la dernière problématique récurrente lorsque l on évoque le Big Data est celle de la protection des données personnelles. En effet, l utilisation massive de données issues des actes d achat des consommateurs, ou de leurs historiques sur internet, ou encore de leur géolocalisation, contraint les organismes de protection comme la CNIL à être vigilants, et les entreprises à se conformer précisément à ces recommandations. La législation est d ailleurs en pleine évolution sur ces sujets : la Commission Européenne a ainsi fait paraître en janvier 2012 un projet de règlement visant à réformer l accès aux données personnelles sur Internet. Ce projet est à l étude et des avancées prochaines sont prévues (on a d ores et déjà mis en place, sur certains sites internet, une autorisation préalable de l internaute pour l exploitation des cookies). C est principalement par ces dispositifs d autorisations que les entreprises se prémunissent contre une utilisation abusive des données (ex : «l opt-in» pour les services géolocalisés) mais le critère principal est également l anonymisation des données, essentiellement dans des activités de profiling et de segmentation. Quels que soient les leviers retenus par les organismes réglementaires, il est primordial pour les consommateurs et pour les entreprises que la protection des données soient assurée : en effet, toute faille dans ces dispositifs risquerait d altérer la confiance des usagers, ce qui limiterait dès lors l impact et le pouvoir d innovation du Big Data. 12

V. Vers de nouveaux marchés L impact du Big Data Comme tout nouveau marché en structuration, le Big Data entraîne dans son sillage d autres segments d activité connexes, dont certains l ont d ailleurs parfois précédé. Leurs degrés de maturité sont divers mais ils possèdent tous un lien assez fort avec le Big Data dont ils s enrichissent mutuellement. 1) La Dataviz La dataviz, autrement appelée datavisualisation, s est développée au croisement de la statistique et du design. Sa valeur ajoutée réside dans la représentation de la donnée et la communication de son contenu aux décideurs opérationnels et au grand public. L idée est de rendre l accès à la décision beaucoup plus immédiat grâce à une représentation hiérarchisant clairement les enjeux : la datavisualisation procède donc à la fois d une analyse et d une mise en forme graphique. Une exigence renforcée dans un contexte Big Data où l avalanche de données produit une importante contrainte de restitution et de mise en perspective. Il importe donc aux fournisseurs de dataviz de présenter des qualités à la fois techniques, statistiques et créatives ; pour l instant, on retrouve surtout les acteurs de la dataviz dans des petites structures à dimension fortement innovante. Les grands éditeurs commencent à s approprier ces outils mais ceuxci restent encore le fait de quelques entreprises historiquement spécialisées dans la représentation graphique. Le véritable enjeu pour ce marché est de produire des outils directement en lien avec la perception du destinataire de l information ; en effet, c est en créant des ergonomies adaptées à leur utilisateur que les dataviz pourront s implanter durablement dans le champ décisionnel des entreprises et des organisations. A la fois en tant qu outil de communication, et en tant qu aide à la décision. Pour l instant, le champ d utilisation est surtout orienté BtoC, les créations les plus ambitieuses s imposant par le biais du datajournalisme ; cependant la multiplication des supports (tablettes, smartphones, etc...) ainsi que la quête de temps réel sont autant d éléments qui militent en faveur d un développement rapide de ce secteur. 13

2) L Open Data L Open Data s est développé bien en amont du Big Data ; en ce sens, il le précède Mais il est aussi et surtout une part intrinsèque du Big Data par le flot d informations qu il véhicule. Concrètement l Open Data recouvre l ouverture gratuite des données publiques et privées au grand public et aux entreprises. Soit la mise en ligne d informations statistiques et fonctionnelles jugées utiles aux destinataires de l information (ex : les temps d attente de métro et RER pour les usagers des transports publics, les indicateurs démographiques et sociologiques de certaines zones géographiques, etc ). L objectif principal de l Open Data est double : il vise à créer des nouveaux services auprès du citoyen et à limiter ainsi les pertes d efficacité liées aux asymétries d information. Cette dernière dimension de «bonne gestion» transparaît notamment dans les démarches Open Data lancées par les administrations publiques: leur volonté d ouvrir les données souligne un effort de transparence qui les oblige vis-à-vis de leurs administrés (ex : révéler les temps d attente sur les hotlines administratives conduira les organisations publiques à entreprendre des efforts pour réduire et limiter ces temps d attente). Quant à la dimension «nouveaux services», elle se retrouve dans le domaine du grand public mais également dans celui du BtoB : en ouvrant leurs données anonymisées à d autres acteurs, notamment des partenaires ou des organisations intégrées dans la même chaîne de valeur qu eux, les entreprises fournissent un surcroît d informations qui, transformée par les savoir-faire des partenaires, pourra générer de l innovation dans leur propre écosystème Un procédé largement gagnant-gagnant! Si l Open Data est autant lié au Big Data, c est parce que l ensemble des données mises en circulation par l Open Data participent aujourd hui au data deluge auquel répond le Big Data. La notion de création de valeur à partir de l analyse de la donnée, chère au Big Data, est également bien présente ; aujourd hui, des entreprises spécialisées se sont créées exclusivement autour de la question de l Open Data, traitant et analysant des volumes très importants de données publiques afin de les valoriser et de les revendre par la suite. Les entreprises font d ailleurs de plus en plus appel à ces données externes qui enrichissent bien souvent leur vision stratégique. L Open Data s affirme donc comme un terrain de développement important du Big Data, car la donnée qu il véhicule est considérée comme fiable, intègre, nettoyée de ses imperfections, ce qui répond à l enjeu récurrent de qualité des données. 14

3) L Internet des Objets Enfin, dans une vision davantage prospective, on associe souvent le Big Data à un phénomène innovant en plein développement technologique : l Internet des Objets. L Internet des Objets recouvre l échange d informations entre objets connectés qu il s agisse d outils traditionnels de mobilité (ex : tablettes tactiles), de capteurs embarqués ou d objets du quotidien. L Internet des Objets reprend et prolonge les technologies RFID et M2M déjà à l œuvre dans des environnements professionnels et grand public. Les potentialités ouvertes par l Internet des Objets sont importantes en terme de temps réel et de synchronisation : en connectant de multiples objets sur des applications conjointes, les développeurs espèrent ainsi augmenter la systématisation des process et diminuer les pertes liées au manque de coordination des outils. Par-dessus tout, l Internet des Objets offre une promesse d intégration optimale de l information au cœur même de l environnement direct des utilisateurs : en effet, en utilisant des supports variés directement implantés au cœur de l activité, et reliés par un même système de transmission, l Internet des Objets garantit une importante simplification des usages. Ce développement de l Internet de l Objet implique forcément des transferts de données massifs et extrêmement rapides dans le temps, ce qui revient à la problématique du Big Data et conditionne l essor de ce nouveau secteur à une maîtrise totale du traitement Big Data. En ce sens, le déploiement de ce type d outils est encore en phase de recherche et d expérimentation mais constitue un des secteurs de développement les plus attractifs des années à venir. 15

B. INTERVIEWS D EXPERTS Interview de Jean-Marie Messager, directeur de la practice BI chez Sopra Consulting 1. Le Big Data a gagné une véritable notoriété au cours de l année écoulée quelles sont les entreprises et les secteurs qui se sont montrés les plus sensibles à ce sujet? Ce sont aujourd hui les secteurs qui génèrent naturellement beaucoup de données. On retrouve notamment le secteur des télécoms, la finance, la distribution, mais aussi l industrie. Cela pourrait être aussi le cas de la santé ou des administrations. En terme de métiers, le Marketing et la Logistique sont attirés par les apports du Big Data, d autres semblent en prendre conscience (les ressources humaines par exemple). 2. Pour quels usages les entreprises s intéressent-elles au Big Data? On connaît certains exemples d applications business du Big Data : par exemple, une tarification qui s adapte en temps réel en fonction de la demande, ou encore l anticipation du comportement des consommateurs en fonction des prévisions météorologiques, ou bien le pilotage de processus industriel ou de chaîne logistique complexe les exemples sont nombreux et variés. Cependant, toutes les entreprises ne s intéressent pas aux mêmes usages du Big Data, elles n ont pas toutes les mêmes besoins. Nous pouvons répartir ces usages suivant 4 axes : 1) accéder à toutes les données sans limites, rapidement, ce qui permet d optimiser les processus opérationnels, 2) accélérer les prises de décisions, 3) utiliser les nouvelles et futures sources de données (capteurs, objets connectés, données issues des réseaux sociaux, de l open data, etc ), 4) être capable d offrir de nouveaux services et usages auprès des clients, des partenaires et/ou du grand public. Dans tous les cas de figure, une analyse de la valeur dans le contexte de l Entreprise (en examinant ses processus opérationnels) est nécessaire pour orienter les projets. D autre part, on s est rendu compte que les entreprises s intéressent aussi au Big Data pour réduire les coûts (démocratisation des technologies de grande base de données). 3. Passée la question du Pourquoi vient celle du Comment... Avez-vous des conseils à donner sur l intégration du Big Data en entreprise? Là encore, il faut se demander où se trouvent réellement les besoins et identifier les opportunités. Une analyse de la valeur est indispensable en entrée pour orienter les projets. Il me semble important que la réflexion soit menée par les métiers avec une implication de l IT. Sur le plan technique, il est nécessaire qu il y ait une anticipation de l appropriation de ces nouvelles technologies (Hadoop, MPP, NoSQL, in Memory, ), pour garantir leur insertion dans le SI de l Entreprise. Cette anticipation peut se traduire par des études ou développement de prototypes dans le contexte de l Entreprise. Pourquoi? Pour mesurer l effort de transformation, éviter le choc «culturel» et sensibiliser les équipes techniques internes aux nouvelles solutions et méthodes possibles avec le Big Data. Utiliser les possibilités du Cloud Computing permet de faciliter ces approches (investissement, délais) et l appropriation de ces nouvelles technologies. 16

4. Quelles évolutions avez-vous pu noter en l espace d un an sur le front du Big Data? On remarque d abord que ce sont les entreprises qui nous sollicitent et non l inverse, comme auparavant : cela prouve une véritable prise de conscience. Elles sont aidées en cela par l apparition de concepts et marchés connexes, comme l Open Data ou l Internet des Objets, qui imposent progressivement la donnée au centre de l activité De façon générale, il y a une véritable curiosité sur le sujet, même si les entreprises ont l impression de découvrir un nouveau monde avec le Big Data. C est peut-être pour cette raison qu elles semblent pour l instant plus séduites par le discours sur la réduction des coûts et l optimisation opérationnelle que sur la création de nouveaux usages et d innovation. 17

Interview de Pierre Delort, président de l Association Nationale des DSI 1) Cette année, les conversations autour du Big Data ont beaucoup mentionné l apport d une nouvelle fonction dans l entreprise, celle de Chief Data Officer. Comment définiriezvous ce personnage? Quel est son rôle? La principale fonction d un Chief Data Officer est d augmenter ce qu on appelle les «data-informed decisions» ; en d autres termes, le rôle d un CDO est de faciliter l accès aux données lors de la prise de décision. Là où certaines orientations stratégiques sont souvent prises par vision ou intuition, la création d un poste de CDO permettra d appuyer davantage les décisions sur des éléments objectifs, les données, traitées par des méthodes statistiques solides. Pour cela, le Chief Data Officer doit assumer une fonction transversale afin d acquérir une excellente connaissance de l entreprise, qu il s agisse de process, de métiers, d enjeux business mais également du vocabulaire propre à chaque activité. Il est donc au cœur des différents sujets de l entreprise et s appuie sur une équipe d analystes et d informaticiens pour agréger cette information et la rendre accessible au niveau décisionnel. 2) En quoi est-il lié aux DSI? Est-ce une émanation de la fonction de DSI ou bien est-il différent? Et quelles sont les compétences supplémentaires qu il doit développer? Pour moi, il est assez naturel et légitime qu en phase d initialisation de la fonction de CDO, ce soit le DSI qui assure le leadership de cette mission. En effet, la fonction de DSI est transversale et caractérisée par une proximité avec les équipes en charge des datawarehouses qui disposent des meilleures connaissances sur les données. A travers le DSI, on peut considérer que les éventuelles créations ou modifications apportées au business par les décisions prises seront rapidement intégrées au datawarehouse pour suivi et amélioration. Cela permettra de procéder en temps de cycle court, ce qui me semble important. Cependant, avec la maturité de cette fonction, il est probable que le Chief Data Officer migre vers les métiers opérationnels, directement en lien avec l activité Il faudra alors arbitrer en fonction d une réelle globalité et d un besoin de transversalité. Concernant les compétences supplémentaires à développer, en plus des compétences techniques, il est fondamental pour moi que le CDO présente une très forte connaissance des statistiques inductives. Mais il importe tout autant qu il possède des qualités de pédagogie et de communication, afin de faciliter la compréhension des statisticiens par les décideurs et de transmettre les informations le plus clairement possible au cœur de l appareil décisionnaire. Dernière chose : l humilité et l ouverture! En effet, il lui faudra accepter que la décision se prenne également sur des éléments subjectifs, issus d une «vision» davantage que d une analyse statistique. Le chef d entreprise a besoin d être tourné vers l avenir et les données ne sont qu une restitution du passé charge au CDO d accepter cette limite! 3) Les entreprises françaises ont-elles conscience de la nécessité de créer ce nouveau poste? Où en est-on dans la mise en place de cette fonction? Et qu en pensent les DSI : sont-ils prêts? Les entreprises françaises sont encore dans un stade de relative curiosité mais gardent une certaine méfiance : en effet, ce n est pas dans la culture française de faire confiance à des approches trop statistiques, trop déterministes. Les anglo-saxons sont davantage pragmatiques et intègrent plus facilement les concepts de corrélations et d inductions. Cependant, la prise de conscience se fait jour peu à peu en France et nous constatons au sein de l Association Nationale des DSI que les discussions sont de plus en plus nombreuses autour de cette approche: les DSI ont compris qu il leur fallait passer d un support «process» hérité des ERP à un support «décision» orienté par la data. En pratique, ce sont les laboratoires de Recherche qui sont les plus en avance sur la question et qui seront certainement pionniers pour expérimenter une inflexion du rôle de DSI vers celui de CDO! 18

Interview de Mathieu Gras, Responsable Services Géolocalisés chez SFR La mise en place d un service de publicité géolocalisée Présentation du projet Notre projet de publicité géolocalisée a été lancé il y a environ deux ans alors que nous cherchions à nous développer sur de nouvelles activités ; de nombreux annonceurs sont venus nous voir pour nous faire part de leur intérêt vis-à-vis du support mobile pour transmettre de l information promotionnelle aux usagers. Certaines technologies d analyse de données en temps réel (notamment géographiques) avaient atteint un stade de maturité qui nous permettait d envisager des actions dans ce domaine. Concrètement, il s agit de récupérer des informations de géolocalisation du porteur du téléphone et de lui transmettre des contenus publicitaires en fonction de sa situation géographique : par exemple, s il entre dans un centre commercial, il sera particulièrement attentif à toute offre qui pourrait lui être faite venant d un des distributeurs présents sur les lieux, l avantage de notre solution étant qu elle est compatible avec 100% des téléphones et ne nécessite pas le téléchargement d une quelconque application. La régie publicitaire de SFR oriente les messages en temps réel en fonction des données de géolocalisation et selon des segmentations effectuées au préalable par un Ad Server. Bien entendu, toutes ces opérations sont menées avec l accord de l usager, qui signale par un «Opt-In» initial son consentement vis-à-vis de ce type de messages. Sur le plan technologique, les solutions que nous avons décidé d utiliser proviennent de la société Intersec, éditeur français de solution innovantes et spécialiste de la gestion de données Big Data pour les Télecoms. Les premiers résultats sont réellement encourageants ; nous observons un fort intérêt commercial des annonceurs pour ce type de plateforme! Vous avez parlé d une équipe dédiée vous travaillez donc exclusivement sur le Big data? Vous n êtes pas directement intégrés dans les équipes opérationnelles? Non, et c est une particularité qui nous a semblé fortement innovante et mobilisatrice : nous avons créé une équipe consacrée exclusivement à l exploitation de la donnée. Notre but est double : améliorer notre capacité opérationnelle en traitant et en analysant les données internes, mais également développer de nouvelles activités externes : en effet, les données que nous récupérons en tant qu opérateur représentent une forte valeur ajoutée, que nous pouvons exploiter. La technologie Big Data nous permet de voir cette donnée avec une dimension supplémentaire, la même donnée peut être exploitée totalement différemment par une Direction Marketing ou une Direction Commerciale Notre force est d avoir la vision globale sur cette donnée ; ainsi en ciblant précisément leur besoin nous pouvons la mettre en forme au format souhaité. Justement, à part la publicité géolocalisée, quels sont les autres projets que vous menez? Actuellement, nous apportons notre soutien aux équipes opérationnelles sur la détection des fraudes ; notre analyse permet de faire ressortir des anomalies statistiques, ces données sont ensuite mises à disposition pour les équipes expertes qui peuvent confirmer ou infirmer des fraudes. Cette capacité d analyse unique au sein de SFR nous permet de signaler ces anomalies aux différentes Directions et ainsi d intervenir très rapidement pour réduire les pertes. Mais nous travaillons également sur des services statistiques comme par l exemple l information auprès des collectivités locales pour déterminer des taux d affluence lors de festivals, événements culturels ou dans les transports en commun. C est une information très précieuse pour eux! Quant à nous, ce type d initiatives nous permet de transformer peu à peu notre réseau d un centre de coût en un centre de profit. C est une tendance lourde qu on observe d ailleurs de plus en plus en Europe et à l international. Les télécoms sont à l avant-garde du Big Data dans ce domaine! 19

C. ARTICLES D EXPERTISE Mouloud DEY, Directeur des Solutions et Marchés Emergents SAS France C est dans un contexte économique, social et environnemental difficile que les Big Data s octroient progressivement une légitimité auprès des décideurs des plus grandes instances internationales. Pendant qu aux Etats-Unis l administration Obama y alloue $200 millions pour catalyser les initiatives de recherche et développement, le gouvernement français inscrit les Big Data dans le cadre de ses investissements d avenir consacrés au développement de la société numérique. Les entreprises ne sont pas en reste et, même si la plupart d entre elles s interrogent sur les meilleures approches, les Big Data sont désormais reconnues comme un levier important pour l innovation, susceptible d engendrer à la fois de nouveaux modèles économiques et d importants gains de productivité. Ce n est pas la taille qui compte, mais les relations Des études récentes montrent que les entreprises les plus performantes sont celles qui complètent l intuition de leurs décideurs dans des processus métiers instrumentés par des solutions analytiques. En effet «Big Data» ne signifie nullement «Better Data» et, bien que ce soit la partie la plus visible du phénomène, ce n est pas tant la taille des données qui compte mais leurs relations. La valeur additionnelle qu on peut retirer des nouvelles formes de données (en particulier des données non structurées) vient essentiellement des perspectives nouvelles et des possibilités d expérimentation résultant de leurs combinaisons à l infini avec les données plus traditionnelles de l entreprise. Nous sommes au commencement d une ère où toutes les activités professionnelles et personnelles des individus deviennent numériques mais seules les entreprises qui sauront adapter leurs systèmes d informations à ces nouvelles perspectives pourront réellement en capter la valeur. Big data, big challenges De ce fait, les directions des systèmes d information (DSI) ont un rôle de levier à jouer dans la création de cette valeur et de nombreux défis à relever. Le premier défi relève de la gouvernance des données. Il s agit notamment d éviter de se laisser déborder par des initiatives isolées de directions métiers tentées par les sirènes associées aux nouvelles sources de données (médias et réseaux sociaux, géolocalisation, open data, ) sans se soucier du volume, de la sécurité, de la qualité, du degré de fraîcheur et de pertinence de ces nouvelles formes de données. Le second défi relève de la nécessaire adaptation des services et des infrastructures techniques aux nouveaux besoins des directions métiers. La relative perméabilité entre usages professionnels et usages personnels a consacré le concept «Bring Your Own Device» (BYOD) déjà perçu comme une difficulté dans un certain nombre d entreprises. L usage devenu presque banal du Cloud Computing pourrait consacrer la généralisation du «Bring Your Own Cloud», voire du «Bring Your Own Data» pour des utilisateurs métiers progressivement habitués, par leurs usages personnels, à consommer des services élastiques dans le nuage plus que des applications. Data as a Service En effet, s il est aisé de maîtriser les besoins en infrastructure des applications décisionnelles traditionnelles très automatisées, il est aujourd hui plus difficile d anticiper les charges et capacités associées aux Big Data du fait des aspects fortement expérimentaux de ce genre de projet. Les DSI devront proposer l accès et l analyse de ces données sous forme de services agiles, suffisamment séparées des applications décisionnelles actuelles pour ne pas fragiliser les infrastructures existantes mais néanmoins assez proches pour bénéficier également de la richesse des informations parfois dormantes accumulées depuis de nombreuses années dans les entrepôts de données. 20