Mise en contexte : Le Centre d écologie urbaine de Montréal

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Les quartiers verts, nouveau mode de vie de l avenir par Owen Rose, président, Luc Rabouin, directeur général et Marie-Hélène Armand, conseillère en urbanisme, Centre d écologie urbaine de Montréal. Conférence prononcée le 1er décembre 2009 Mise en contexte : Le Centre d écologie urbaine de Montréal C est en 1996 que le Centre d écologie urbaine de Montréal (CÉUM) a vu le jour dans Milton-Parc. Dès sa fondation, le CÉUM s est rapidement dédié à la participation citoyenne, à la démocratie municipale et à l aménagement urbain durable à Montréal. Ainsi, le Centre propose des alternatives écologiques, des solutions d aménagements verts, des moyens de communiquer les bonnes pratiques durables pour modifier la façon de concevoir et de gérer la Ville et favoriser une cohabitation plus harmonieuse en milieu urbain. La création de tels projets collectifs doit nécessairement inclure la participation du public pour leur mise en œuvre et leur réussite. Le CÉUM produit à la fois des travaux théoriques mais aussi des travaux pratiques sur le terrain dans le cadre d une pensée communautaire. Les idées et l expertise ressortant des expérimentations sur le terrain sont publiées pour faciliter la transmission du savoir. Le Centre se penche actuellement sur les îlots de fraîcheur en cherchant à déminéraliser la ville dans des quartiers comme le Plateau-Mont-Royal. Dès cet été, le CÉUM créera une terrasse-éducative sur le toit de l immeuble où il est situé pour démontrer la possibilité de verdir les toits de la ville de Montréal pour moins de 100$. Le CÉUM a aussi coordonné l organisation de cinq Sommets citoyens qui invitaient les citoyens à venir discuter de sujets comme la justice sociale, l inclusion, l aménagement urbain, la culture, la démocratie, etc. En fait, toutes ces actions se basent sur le principe de l écologie sociale qui soutient que les problèmes environnementaux sont liés aux problèmes sociaux. Ces deux dimensions doivent donc être traitées conjointement. En appliquant cette approche au milieu urbain, il est possible d influer sur l aménagement d un milieu pour créer des quartiers verts. Le contexte des quartiers verts Pourquoi construire des quartiers verts? Qu en est-il de leur utilité pour la population? Quel bénéfice une ville trouverait-elle à promouvoir ce genre d aménagement? Avec le 61

recul, il est évident que certaines méthodes récentes de planification ont provoqué une dégradation des quartiers centraux et péricentraux dans les grandes villes comme Montréal. Ceci a favorisé un exode d une tranche importante de la population vers les banlieues ou vers de nouvelles villes en vue d y trouver un cadre de vie plus approprié. Ce mouvement a affecté ces grandes villes en les privant d une part active de leur population. Sur le plan économique, cette situation a provoqué d importantes fuites commerciales et résidentielles vers les couronnes des agglomérations. Ainsi, le principe de quartier vert cherche à renverser cette tendance en favorisant la création de quartiers urbains attractifs pour ces populations. En d autres termes, cela signifie de créer des milieux de vie agréables qui permettront de ramener des populations vers les centres urbains par la valorisation de la vie urbaine et de ses atouts comme le commerce de proximité, la facilité de transport ou la vie culturelle animée. Donc, le quartier vert se trouve à être une des réponses aux différentes situations conflictuelles engendrées par l étalement urbain, soit la fuite des entreprises et des individus vers les banlieues, la raréfaction des espaces verts et naturels, le rétrécissement des terres arables, la difficulté d accès à une alimentation saine de proximité et le maintien démographique des grandes agglomérations. De plus, le quartier vert permet de réduire les îlots de chaleur, de favoriser des quartiers plus agréables à la vue, de réduire les bruits ambiants et la pollution atmosphérique. Sur le plan sanitaire, il favorise des milieux plus propices à la marche et aux transports actifs améliorant la santé de ses citoyens. Enfin, sur le plan social, le quartier vert engendre une hausse de la qualité de vie, un développement de la vie communautaire, une recrudescence de l inclusion des individus et une amélioration de la sécurité. On comprendra que, par la notion de quartier vert, on cherche avant tout à accroître la qualité de vie des citoyens. L un des principes est évidemment de repenser les espaces publics. Ces milieux, qui servent à la fois d espace de circulation et de lieu de rencontre ou d échange, ont été malmenés durant les dernières décennies. En fait, l arrivée massive de l automobile dans les espaces publics a nui à la création et au maintien de microcosmes conviviaux. Les rues se sont transformées en de véritables tuyaux de circulation où l automobile a pris une place démesurée. En somme, maintes fois, l idéal de fluidité automobile a primé sur la qualité des aménagements publics et sur leur convivialité pour les piétons. Ainsi, revoir la conception et l aménagement des rues en changeant cette mentalité selon laquelle la route n est qu un espace de circulation et non un espace de socialisation est essentiel dans un projet de quartier vert. Le Centre d écologie urbaine de Montréal s inspire d expériences menées dans diverses villes, notamment Copenhague, Londres, Stockholm, San Francisco, New York et Paris. Ces exemples permettent de proposer des outils inspirants pour Montréal et les autres villes du Québec. Le cas de la démolition d une autoroute en bordure de la mer à San 62

Francisco en est un. En effet, la démolition de cette infrastructure a amené une réduction de la capacité routière, restreignant ainsi l usage de l automobile tout en permettant la réappropriation des berges. Cette opération urbanistique a permis de créer une valeur ajoutée à la ville en contribuant à la création d un espace plus convivial pour ses habitants. Cet exemple pourrait nous inspirer dans nos choix d aménagement, notamment dans le cas de la rue Notre-Dame sur les bords du fleuve St-Laurent. Les woonerfs néerlandais sont aussi à l étude par le CÉUM. Un woonerf est une rue ou un secteur d un quartier aménagé de manière à accorder la priorité aux piétons et aux transports doux comme le vélo. La configuration en tant qu espace partagé, les mesures d apaisement de la circulation et une limite de vitesse très basse visent à assurer la sécurité de tous les usagers et la quiétude du secteur. Les woonerfs sont donc des aménagements qui recherchent à minimiser l impact du passage de véhicules dans des milieux résidentiels. De telles pratiques seraient possibles à Montréal dans le cadre de la création de quartiers verts sécuritaires pour les citoyens. Quelle est la ville que nous voulons? Ces quelques exemples démontrent les nombreuses possibilités que peut prendre la forme d une ville et de ses quartiers. Ils nous interrogent aussi sur nos propres pratiques d aménagement du territoire. Voulons-nous une ville plus fluide ou une ville à vocation humaine? Pour l instant, Montréal semble voguer entre ces deux réalités avec des projets comme le réaménagement de l échangeur Turcot ou de la rue Notre-Dame permettant une facilité de déplacement automobile et, en contrepartie, la mise en place de milieux piétonniers comme la rue Ste-Catherine durant la période estivale. Certaines villes ont fait leur choix il y a de cela longtemps. Par exemple, Portland en Oregon a décidé très tôt de favoriser le transport collectif et d appliquer des projets de piétonisation de son centre-ville. Ceci a contribué à améliorer la qualité de vie pour l ensemble de la population et d en faire une ville progressive dans ce domaine. Pour le Centre d écologie urbaine de Montréal, le choix est évident : Il faut privilégier des aménagements durables, comme des quartiers verts. De tels quartiers influeraient sur la santé des citoyens de la ville. On peut aisément imaginer qu un quartier vert ayant incorporé des transports doux contribuerait à combattre plus efficacement l obésité et d autres maladies liées à la sédentarité. Bref, nombreux seraient les avantages pour des citoyens vivant dans ce genre de milieu. C est pourquoi le Centre d écologie urbaine de Montréal s est donné comme mandat de démontrer la faisabilité de tels projets en 63

contexte québécois en développant un modèle d intervention misant sur les solutions d aménagement urbain favorables aux transports actifs. Projet Quartiers verts, actifs et en santé L un des projets phares du CÉUM est incarné par le projet Quartiers verts, actifs et en santé qui vise à «repenser l environnement bâti en faveur de la marche, du vélo et des autres modes de déplacements actifs pour tout le monde, mais avec une attention particulière pour les enfants et les jeunes.» Le projet ne cherche pas à sensibiliser la population aux bienfaits des déplacements actifs. Le CÉUM estime que, si l environnement urbain est doté des infrastructures nécessaires permettant d accomplir ce genre d activités, les citoyens prendront eux-mêmes l initiative d adopter les modes de transports actifs. Le projet Quartiers verts, actifs et en santé vise les objectifs suivants : 1. Sensibiliser les élus, les citoyens et les professionnels aux problèmes posés par des aménagements inadéquats et les informer des solutions potentielles à privilégier; 2. Susciter la volonté politique nécessaire à la mise en place de ces changements; 3. Amorcer un changement des pratiques professionnelles en aménagement. Un tel projet ne peut être mené avec succès que si l ensemble des acteurs du milieu conjuguent leurs efforts dans sa réalisation notamment, en s assurant l appui de la population aux modifications proposées à son milieu de vie. Il est essentiel de travailler en étroite collaboration avec les citoyens pour effectuer la mise en place de ces changements car un quartier vert peut prendre de nombreuses années avant de se réaliser (10 à 15 ans) et demande une mise à niveau constante durant cette période. C est dans ce contexte que le CÉUM désire avant tout promouvoir la participation citoyenne par une implication au sein des projets, par des séances d information, par des consultations publiques mais surtout par la participation des citoyens à l élaboration de leur nouveau milieu de vie. Dans cette démarche d échange entre les différents acteurs, le CÉUM tient pour acquis que les citoyens disposent d un savoir important sur leur quartier. La participation permet de miser sur ces connaissances et de les intégrer dans les différentes étapes du projet de quartier vert. De plus, elle permet de légitimer les décisions si celles-ci s appuient sur les connaissances mêmes des citoyens. Afin de compléter le savoir citoyen par des connaissances techniques, des professionnels de l aménagement sont aussi appelés à contribuer. Ainsi, pour la réalisation d un projet de quartier vert, le CÉUM préconise une 64

approche qui tient compte à la fois des aspirations et de la volonté des citoyens et des restrictions budgétaires, techniques et urbaines du milieu. Vision d un Quartier vert, actif et en santé C est principalement par la mise en place d aménagements appropriés que les changements d habitudes, essentiels pour un quartier vert, pourront être réalisés. En effet, le design d une rue ou d une place détermine son utilisation future et, d une certaine façon, conditionne le comportement des citoyens dans ce milieu. C est pourquoi le Centre d écologie urbaine de Montréal préconise certaines mesures au sein des quartiers verts. Notamment, la mise en place de milieux apaisés pour favoriser les déplacements actifs et instaurer un climat de sécurité. Cet aménagement permettrait de rendre le quartier plus actif et engendrerait des retombées appréciables sur la santé. C est en favorisant un design pour les piétons et les cyclistes (large trottoir, passage sécurisé, verdure, piste cyclable, point de repos, etc.) et en mettant en place des mesures de restriction de l usage de l automobile qu un tel milieu pourrait être possible. Il ne faut pas voir les rues comme des couloirs de circulation, mais bien comme des espaces de vie et de socialisation. En ce sens, un aménagement apaisé pourrait contribuer à favoriser les liens sociaux et à améliorer le cadre de vie. Les questions de mobilité restent primordiales pour l aménagement d un quartier vert. Sans éliminer l utilisation de l automobile dans un tel quartier, il est possible de mieux accorder ce moyen de transport avec le milieu. En effet, en jouant sur la forme de la trame urbaine, le mobilier, la présence d arbres, etc., on contribue à créer un milieu protecteur pour le piéton et à réduire les nuisances dues au bruit. Dans des aménagements comme les woonerfs ou les zones 30, le conducteur est invité à prendre en considération la présence de nombreux piétons dans son environnement. Ceci engendre une diminution de la vitesse de parcours au profit des passants et des résidents. Le verdissement des quartiers permet quant à lui de favoriser la création d îlots de fraîcheur dans la ville. Ces aménagements contribuent à contrôler les pluies de ruissellement, à atténuer la pollution sonore, à améliorer l aspect visuel de l ensemble et affecte positivement la perception des passants. Le verdissement de parcours piétons favorise l adoption de la marche par les citoyens grâce à l attrait esthétique de l aménagement. En cherchant à améliorer la connexion entre les différents espaces verts et les lieux de loisir ou de consommation, on contribue à créer des espaces de circulation qui sont agréables à traverser. Évidemment, de telles réalisations doivent être appuyées par la participation citoyenne. En incluant les citoyens dans les différents projets, on s assure de leur bonne compréhension des enjeux d aménagement relatifs à la mise en place d un quartier vert et 65

de la prise en compte de leurs aspirations pour leur milieu de vie. Des principes comme la marchabilité, la densité, la cyclabilité ou la mixité des fonctions doivent être assimilés par les individus, mais aussi par les autorités de l arrondissement ou de la Ville. Un quartier vert doit être un exemple concret de ces quelques principes pour modifier en profondeur les manières et la perception d aménagement des autorités. Les projets pilotes à Montréal de Quartiers verts, actifs et en santé : Parc-Extension et Mercier-Est Mais comment faire la démonstration de la faisabilité de ces aménagements à court, moyen et long termes dans le contexte montréalais? Le Centre d écologie urbaine de Montréal s est penché sur la question, dès 2009, avec l intention de planifier, dans le cadre de projets pilotes, des Quartiers verts, actifs et en santé dans des quartiers montréalais avec l aide de leurs citoyens. Le CÉUM s est basé essentiellement sur son propre savoir et sur les meilleures pratiques expérimentées ici et à l étranger pour réaliser les projets pilotes comportant chacun trois phases : Phase 1 : La compréhension du quartier Phase 2 : L exploration des solutions d aménagement Phase 3 : La décision d avenir pour le quartier De tels projets comportent de nombreux défis, notamment en terme de participation citoyenne à une démarche de planification urbaine. Comment inclure les citoyens dans une réflexion au sujet de leur quartier pour qu ils puissent, à terme, s approprier le projet et le porter jusqu à sa réalisation? Comment déterminer les sites à considérer pour la mise en place d un quartier vert? Quelle échelle doit-on privilégier? Agir à l échelle du quartier d appartenance, en évitant de se limiter aux unités de voisinage délimitées par les grandes artères, est évidemment un facteur de succès. En janvier 2009, le Centre d écologie urbaine de Montréal a procédé à un appel de propositions pour lancer une mobilisation des groupes travaillant aux questions d aménagement à l échelle des quartiers. Ces organismes étaient invités développer un 66

projet et à mobiliser la population et les représentants de leur arrondissement pour la planification d un quartier vert dans leur milieu. Cette approche permettait au CÉUM de s assurer de l appui de la population et de l arrondissement pour la réalisation du projet. Les critères de sélection s articulaient autour de la composition de l équipe, des composantes du quartier, des besoins des résidents, de l ouverture à la participation citoyenne et des ressources disponibles. Les deux territoires sélectionnés furent Parc- Extension et Mercier-Est. Puisque la morphologie et la composition ethnique étaient différentes dans les deux quartiers, le Centre a développé deux approches adaptées au contexte en développement durable et en participation citoyenne. La phase 1 du projet consistait à mettre en commun les constats et les revendications qui émanaient des différentes analyses en termes d aménagement pour les transports actifs. Une analyse de terrain et documentaire fut effectuée pour prendre en considération l ambiance des rues, les densités de population, les temps de parcours, les lieux de destination, l accessibilité aux parcs, la qualité de la foresterie urbaine, les zones de frontière, la sécurité urbaine, la mixité des usages, la qualité des lieux nocturnes et les limites au développement de transports actifs. Dans un même temps, des activités publiques étaient mises en place pour informer la population et stimuler la participation citoyenne aux projets de quartiers verts. Différentes activités d exploration urbaine furent organisées pour capter l ambiance et la culture du quartier grâce à des marches dans la ville avec les citoyens (promenade de Jane). Les lieux dangereux à aménager en priorité et les espaces de transit utilisés pour les déplacements ont notamment été ciblés. Ensuite, le CÉUM a exploré différentes possibilités d aménagement pour ces quartiers par le biais d ateliers d idéation et d ateliers de design avec les citoyens. Ceci a permis d identifier les zones problématiques et de cibler des solutions à préconiser pour ces milieux. De plus, divers groupes ont été consultés, soit les aînés, les jeunes, les femmes, etc., pour obtenir la vision de l ensemble de la population. Les priorités pour chacun des quartiers, comme le réaménagement de la rue Notre-Dame dans Mercier-Est ou l aménagement sécuritaire des corridors scolaires dans Parc-Extension ont ainsi été établies. Enfin, le CÉUM et ses différents partenaires ont élaboré un plan de Quartier vert, actif et en santé avec diverses actions concrètes à prioriser. Ces actions provenaient des attentes 67

et des besoins exprimés par les citoyens. Le CÉUM a raffiné les propositions grâce à son expertise professionnelle. Les plans de Quartiers verts, actifs et en santé ont été lancés au printemps 2010. Conclusion De tels projets de quartiers verts ne peuvent pas être conçus uniquement par des spécialistes. Pour bâtir une nouvelle communauté, il faut la participation de tous les acteurs, notamment des citoyens. C est par l initiative et la créativité de ces derniers qu il est possible de cerner les enjeux d aménagement à prioriser pour un quartier vert. Le spécialiste apporte son point de vue professionnel permettant de pallier à des difficultés techniques. En somme, le Centre d écologie urbaine de Montréal, par ses actions, nous démontre qu il est possible de créer des quartiers verts dans des environnements déjà construits et que ces quartiers ne s adressent pas seulement à des populations plus aisées avec des moyens financiers importants. En fait, il ne s agit que d adapter les pratiques d aménagement aux besoins des individus. Les conséquences ont été démontrées. Un design intelligent engendre une panoplie d externalités positives pour la population. Parc- Extension et Mercier-Est deviendront de véritables laboratoires d une nouvelle approche urbanistique préconisant la créativité des citoyens et la concertation. La fierté d une population à la construction d un projet n est-elle pas la première étape de l élaboration d un quartier vert? 68