Nous verrons que le fait de ne pas voir les parents à l école ne veut pas dire qu ils ne soutiennent pas la réussite scolaire de leurs enfants.

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Transcription:

La littérature scientifique nous apprend que le niveau de participation des familles immigrantes dans les instances décisionnelles ou dans les activités scolaires qui ne sont pas directement liées à leurs enfants est plus faible que celui des natifs. Leur niveau de participation dans les activités scolaires qui sont directement liées à leurs enfants est plus élevé mais reste plus faible que celui des natifs. Nous verrons que le fait de ne pas voir les parents à l école ne veut pas dire qu ils ne soutiennent pas la réussite scolaire de leurs enfants. Nous examinerons les conditions qui permettraient à l école de renforcer tant ses collaborations avec les familles immigrantes que la capacité de ces familles à soutenir la réussite de leurs enfants. Pour commencer, allons voir ce qui se cache derrière le concept de famille. Plus de 86% des immigrants qui arrivent depuis 10 ans ont planifié leur immigration; ils ont été sélectionnés par le Québec pour leur capacité d intégration; ils ont un profil favorable en termes de qualification, de scolarisation et de maitrise de la langue commune. 60% connaissent le français en arrivant et beaucoup l apprennent durant les premières années de résidence. 69% des immigrants de 25 ans et plus détiennent un diplôme universitaire. On a donc plus de 86% d immigrants sélectionnés. Les 14 autres % sont issus de l immigration humanitaire. Pour les réfugiés proportionnellement plus nombreux en région, les enjeux sont accrus puisqu ils sont arrivés pour sauver leur vie et celle de leurs enfants, de façon non planifié et qu ils n ont souvent pas choisi leur destination. Les défis en termes de santé physique, mentale et de scolarisation sont énormes. 81.5% des réfugiés publics (qui ont transité par des camps de réfugiés) sont allophones. 70% ont un niveau d étude inférieur ou égal au secondaire. Les cas de sousscolarisation voir d analphabétisme ne sont pas rares. Mme Mc Andrew nous a expliqué que les jeunes issus de la seconde génération performaient mieux que ceux de première génération mais aussi que les natifs. Les p. 1

familles de première génération présentent en effet des facteurs de protection et de risque plus marqués que celles de seconde génération. Regardons de plus prêts quels sont ces facteurs. On peut identifier 5 principaux facteurs de risque Les circonstances de la migration ont un impact sur la dynamique familiale et l exercice des compétences parentales durant la phase d adaptation. L adaptation à la société québécoise varie selon qu on a planifié ou non son immigration, que la famille est arrivée ensemble ou non. Les conditions socio-économiques difficiles limitent l accès aux ressources matérielles et culturelles nécessaires à la réussite scolaire. Le chômage, le cumul d emplois précaires déqualifiés et la pauvreté des personnes immigrante ont été largement documentés. Troisième facteur, le manque de maitrise de la langue commune qui constitue un obstacle à plusieurs niveaux : suivi scolaire de l enfant, accès aux services, compréhension de la société d accueil et du système scolaire, exercice du rôle parental et possibilité d une relation égalitaire avec l école. Les différences de compréhension de l école, de l apprentissage, de la discipline, du rôle des filles et des garçons constituent un autre facteur de risque. Enfin, le sur engagement des familles immigrantes sur le marché du travail joue en leur défaveur. Ces facteurs de risque bien réels ne doivent pas nous amener à développer une vision déficitaire des familles immigrantes car elles présentent aussi des facteurs de protection puissants. L importance accordée à l éducation dans les stratégies familiales, leurs attentes plus élevés que les natifs quant à l accès à des études post-secondaires, l importance accordée aux activités éducatives. On constate par exemple un recours plus fréquent à des tuteurs scolaires communautaires ou privés Des cultures d origine qui convergent avec des exigences de la culture scolaire (respect de l autorité, statut social élevé des enseignants ) p. 2

Une culture de solidarité et d entraide familiale, l accès à des réseaux qui permettent de soutenir l établissement dans le pays d accueil ou de garder des liens avec le pays d origine. Pour renforcer les facteurs de protection et combler les lacunes émanant des facteurs de risque, il est essentiel que l institution scolaire offre une réponse adéquate. Or, ces facteurs se combinent selon des configurations très variées d une famille à l autre. Autrement dit, la famille immigrante n existe au sens où ce n est pas un groupe homogène qui requiert une stratégie unique des acteurs scolaires. Alors pour conclure cette première partie je dirais que s adapter à la diversité exige de pouvoir gérer la complexité. La littérature nationale et internationale permet de dégager un certain nombre de conditions gagnantes pour les intervenants scolaires Développer la connaissance du personnel scolaire sur le vécu des familles immigrantes Tabler sur les forces importantes des familles Offrir des mesures compensatoires pour pallier les problèmes que rencontrent les familles. On parle ici de services complémentaires offerts dans les écoles par les psychologues, les travailleurs sociaux, les agents responsables des liens avec les parents ou encore les agents responsables des partenariats avec la communauté Reconnaitre la légitimité des parents immigrants ou des personnes ayant leur confiance comme interlocuteurs de l école. Rester ouvert à une variété de modèles de relation entre l école et la famille. Ces deux derniers points sont étroitement reliés. Les adaptations des établissements à la réalité immigrante peuvent passer par des adaptations de l horaire, la traduction de certains documents, le recours à des interprètes ou encore des accommodements liés à des questions religieuses ou culturelles. Ces adaptations peuvent aussi prendre la forme de modèles inhabituels de relation entre l école et les familles. p. 3

Mmes Vatz Laaroussi, Kanouté et Rachédi ont étudié des cas d élèves réfugiés et immigrants qui réussissent en dépit d un profil de départ peu favorable. Ces études de cas leur ont permis d identifier 6 modèles de collaboration où s articulent les stratégies familiales pour soutenir la réussite des jeunes et les stratégies des acteurs scolaires. Premier modèle, l implication assignée où l école définit seule les conditions de participation des parents. C est le modèle le plus connu. La collaboration avec espace de médiation où l école fait appel à des agents de liaison, des ICS, des ICSI et autres agents d accompagnement. La collaboration fusionnelle où les acteurs scolaires sortent des murs de l école pour entrer en relation de proximité avec les familles Ce modèle est plus présent dans les régions d accueil des réfugiés publics en dehors de Montréal. La collaboration distance assumée. L école ne voit pas les parents qui délèguent à la famille élargie, la communauté ethnique ou religieuse le suivi scolaire de l enfant. Cette stratégie peut être perçue comme de la non-coopération voir du repli identitaire. Néanmoins, selon les auteurs, elle peut s avérer efficace à condition d être reconnues et valorisées par les milieux en jeu. La collaboration partenariale relation d égal à égal. La collaboration en quête de visibilité. Modèle intermédiaire. Tous ces modèles sont intéressants puisqu ils ont favorisé la réussite des jeunes. Mais sommes-nous prêt à envisager des relations inhabituelles avec les familles immigrantes? La réponse vous appartient. Pour mettre en place ces conditions gagnantes, plusieurs commissions scolaires ont développé des partenariats avec le réseau des organismes communautaires mandatés par le Ministère de l Immigration et des communautés culturelles pour accueillir et accompagner les familles réfugiées et immigrantes dans leur intégration. Ces collaborations s articulent autour de trois enjeux. Les liens écoles, famille, communauté. À l heure où je vous parle, les commissions scolaires des 12 régions d accueil des réfugiés publics ont recours à des intervenants communautaires scolaires interculturels ou ICSI. p. 4

Les collaborations entre les familles immigrantes, l école et la communauté On trouve aussi des ICSI ailleurs (Montréal, Lac Saint Jean ). Les commissions scolaires qui se sont dotées d ICSI l ont fait pour diverses raisons, j en nommerais cinq : Les ICSI bénéficient d une relation de confiance avec les familles qui ont été accueillies et accompagnées par les intervenants de l organisme dans leur parcours d intégration au Québec. Ils partagent avec leur équipe de travail une expertise en immigration (connaissances légales, des impacts des parcours migratoires sur les dynamiques familiales, des étapes du processus d adaptation, etc.). Leur approche est globale. Leurs interventions visant l intégration et la réussite de l enfant mais aussi l intégration et la réussite des membres de la famille. Leurs interventions ciblent la famille mais aussi les acteurs scolaires dans une optique d adaptation réciproque propre au modèle interculturel. Ils ne sont ni des acteurs scolaires, ni des membres de la famille mais connaissent leurs cadres de références respectifs et ont donc la posture adéquate pour faciliter le rapprochement et assurer la médiation interculturelle entre ces deux acteurs. Concernant le rapprochement interculturel et le support aux apprentissages scolaires, j aurais aimé vous parler de 4 initiatives qui illustrent la richesse des collaborations école et organisme d accueil des immigrants. Mais je ne ferais que les évoquer. La bonne nouvelle c est que vous pouvez aller sur notre site Internet pour en savoir plus et écouter ce que vos pairs disent de ces initiatives. Concernant le rapprochement interculturel, nous avons documenté deux initiatives. La première vise l accompagnement des équipes-écoles dans leur adaptation à la diversité culturelle. La seconde vise l accompagner les jeunes dans le développement d un vivre ensemble respectueux des différences. Concernant le support aux apprentissages scolaires, nous avons documenté deux initiatives. La première vise des familles immigrantes nouvellement arrivées au Québec et la seconde des réfugiés allophones. p. 5