Contrôle génétique de la prolifération

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LE CANCER DE LA PROSTATE l avenir

Transcription:

PLACE DES BIOMARQUEURS DANS L UTILISATION DES THERAPIES CIBLEES Pr Mohamed HEBBAR Service d Oncologie Médicale CHU de LILLE 11 Octobre 2012

Contrôle génétique de la prolifération Anti-oncogènes Inhibition de la division cellulaire tels que: p53, Rb, WT1 on Oncogènes stimulation de la division cellulaire tels que: ras, Bcl2, c-myc. La division cellulaire est régulée, positivement et négativement, par l expression de nombreux gènes. Tout gène pouvant devenir transformant par mutation ou par surexpression est un oncogène

Contrôle génétique de la prolifération on Le CANCER est dû à des ALTERATIONS GENETIQUES qui perturbent l équilibre entre stimulation et inhibition de la prolifération cellulaire

Les oncogènes Gènes codant pour: - un facteur de croissance - un récepteur - une molécule de signal intra-cellulaire Activation des oncogènes passant par: - La surexpression ou l amplification - L altération génomique (mutation ou remaniement, à l origine d un signal de prolifération non régulable.)

Récepteurs de facteurs de croissance

Biomarqueurs et thérapies ciblées Cancer du sein CBNPC Cancer colorectal Tumeurs stromales gastro-intestinales (GIST)

Biomarqueurs et thérapies ciblées Cancer du sein CBNPC Cancer colorectal Tumeurs stromales gastro-intestinales (GIST)

Cancer du sein Historiquement: récepteurs hormonaux HER 2 exprimé par 20 % des adénocarcinomes du sein Impliqué dans la prolifération tumorale Pronostic spontané moins bon Mais pronostic transformé par l administration d Herceptin Evaluation systématique de l expression de HER 2 en IHC Recherche d une amplification génique si IHC ++

Biomarqueurs et thérapies ciblées Cancer du sein CBNPC Cancer colorectal Tumeurs stromales gastro-intestinales (GIST)

CBNPC Inhibiteurs de tyrosine kinase de l EGFR: gefitinib, erlotinib Expression EGFR en IHC: 70-90% des cas Augmente le taux de RO sous TKI? Pas d impact sur PFS et survie Amplification du gène (FISH) 40% des cas Pas de valeur prédictive claire

CBNPC Facteurs prédictifs d efficacité des TKI Adénocarcinome Femme Asiatique Pas de tabagisme Lié à une mutation dans le site tyrosine kinase (exons 18-21) Augmente le taux de RO, la PFS et la survie sous TKI Réduit l efficacité du cetuximab Utile en première ligne

CBNPC PTEN Akt PI3K K K Shc Grb2 Sos Ras Raf mtor FKHR GSK-3 Bad NF-κβ p27 NOYAU MAPK MEK1/2

CBNPC Mutations KRAS 15-30% des cas Mutuellement exclusives des mutations EGFR Valeur prédictive controversée

CBNPC Pao & Girard Lancet Oncol 2011;12:175-79

CBNPC Adénocarcinomes N= 589 patients PCR multiplex (SNaPshot) + FISH pour ALK >> thérapies géno-guidées pour 22% des patients stade IV Sequist 15 Ann Oncol 2011;22:2616-24

Stratégies thérapeutiques Soria Cancer Treatment Reviews 2011 16

Biomarqueurs et thérapies ciblées Cancer du sein CBNPC Cancer colorectal Tumeurs stromales gastro-intestinales (GIST)

Cancer colorectal métastatique Depuis la fin des années 80 20,4 (mois) 11 11,5 14 16,2 17,4 6 Pas de chimio 5-FU FUFOL LV5FU2 FOLFOX FOLFIRI FOLFIRI/ FOLFOX

Cetuximab (Erbitux) Anticorps monoclonal dirigé contre l EGFR

Cetuximab (Erbitux) 329 patients atteints de CCRM ayant progressé sous irinotécan Irinotécan + cetuximab Cetuximab Irinotécan + cetuximab si progression (Cunningham D. N Engl J Med 2004)

Cetuximab (Erbitux) 1 0,8 0,6 Irinotécan + cetuximab Cetuximab 0,4 0,2 p < 0.0001 0 0 2 4 6 8 10 12 Durée (mois)

REACTION CUTANEE Extrait de : Segeart S, Van Cutsem E. Ann Oncol 2005, 16: 1425-33

Cetuximab (Erbitux) AMM Européenne en juillet 2004 : CCRM exprimant EGFR, résistant à l irinotécan, en association à l irinotécan

OBSERVATION Homme de 38 ans Novembre 2001 : adénocarcinome rectal classé T3N0M0 Mai 2002 : métastases hépatiques UFT-Oxaliplatine FOLFIRI FOLFOX 7 FOLFIRI fort 5-FU-mitomycine C Xéloda

OBSERVATION Homme de 38 ans Novembre 2001 : adénocarcinome rectal classé T3N0M0 Mai 2002 : métastases hépatiques UFT-Oxaliplatine FOLFIRI FOLFOX 7 FOLFIRI fort 5-FU-mitomycine C Xéloda EGFR négatif

Oct 2004 Déc 2004

Oct 2004 Déc 2004

Oct 2004 Déc 2004

STATUT EGFR ET REPONSE n = 20 12 EGFR + 8 EGFR 4 réponses objectives 0 4 Hebbar M, et al. Anticancer Drugs 2006

FACTEURS BIOLOGIQUES Moroni 2005 8 amplifications chez 9 répondeurs 1 amplification chez 20 non répondeurs Lièvre 2006 Seule réponse complète: amplification EGFR

FACTEURS BIOLOGIQUES PTEN Akt PI3K K K Shc Grb2 Sos Ras Raf mtor FKHR GSK-3 Bad NF-κβ p27 NOYAU MAPK MEK1/2

MUTATIONS KRAS Liévre 2006 : série de 30 patients non muté : 17/30 RO : 68 % muté : 13/30 RO : 0 Résultats confirmés dans une série de 59 patients (di Fioré 2007) puis dans de nombreuses autres, toutes rétrospectives

2008 : modification de l AMM Utilisation du cetuximab et du panitumumab restreinte aux patients dont la tumeur ne comporte pas de mutation de KRAS Seulement 50 % des patients KRAS non muté tirent profit des traitement par anti-egfr => autres marqueurs??

CANCER COLORECTAL PTEN Akt PI3K K K Shc Grb2 Sos Ras Raf mtor FKHR GSK-3 Bad NF-κβ p27 NOYAU MAPK MEK1/2

MUTATIONS BRAF Retrouvée dans 5 % des CCR Associées à une résistance aux anti-egfr Mutations de BRAF et de RAS mutuellement exclusives Réversion de la résistance par anti-raf (sorafénib)?? (Di Nicolantonio et al, J Clin Oncol 2008)

CANCER COLORECTAL PTEN Akt PI3K K K Shc Grb2 Sos Ras Raf mtor FKHR GSK-3 Bad NF-κβ p27 NOYAU MAPK MEK1/2

EXPRESSION PTEN Diminution de l expression (IHC) dans 30 % des CCR Associée à une moindre efficacité des anti-egfr (Frattini et al, Br J Cancer 2007)

Biomarqueurs et thérapies ciblées Cancer du sein CBNPC Cancer colorectal Tumeurs stromales gastro-intestinales (GIST)

Gastro-Intestinal Stromal Tumors (GIST) Kystique Solide Solide Inflammatoire

Gastro-Intestinal Stromal Tumors (GIST) Masse solide de l estomac Masse dense de l estomac

Gastro-Intestinal Stromal Tumors (GIST) Métastases hépatiques Métastases hépatiques et péritonéales Métastases péritonéales et masse sous-cutanée

Gastro-Intestinal Stromal Tumors (GIST) Il y a 10 ans, survie médiane : Tumeurs résécables : 66 m Tumeurs localement avancées : 10-20 m Formes métastatiques : 9-12 m les GISTs sont résistantes à la radiothérapie les GISTs sont résistantes à la chimiothérapie (5% de RO) Plaat, J Clin Oncol 2000, 18, 3211

Gastro-Intestinal Stromal Tumors (GIST) Fonctionnement dérégulé : indépendant de la liaison du SCF au récepteur Transduction du signal Activation de la protéine de façon anarchique Prolifération cellulaire Inhibition de l apoptose Expression de KIT dans 95 % des cas Dans 90 % des cas, c-kit est muté 5 % : mutation PDGFRa

Imatinib (Glivec) Inhibiteur de l activité TK de c-kit, PDGFR et bcr-abl Phase I n = 36 tolérance : troubles digestifs, myalgies Réponses : 54 % Stabilisations : 34 % Phase III : 400 vs 600 mg/j (Demetri et al, NEJM 2002)

Avant Glivec Sous Glivec

Mutations de c-kit Ligand (SCF)-binding Extracellular Juxtamembrane EXON 9 (~20% of mutations) Intracellular Juxtamembrane EXON 11 (~75% of mutations) TK1 EXON 13 (~2-3% of mutations) Kinase insert TK2 EXON 17 (~2-3% of mutations)

Imatinib (Glivec) En cas de résistance 1) Augmenter la dose 2) SUTENT : inhibiteur oral multicible de TK (c-kit, PDGFR, VEGFR 1 à3) Phase III GIST résistants à l imatinib (versus placebo) SUTENT 50 mg/j pendant 4 semaines, puis 2 semaines d arrêt n = 312 PFS 27 vs 6 semaines Tolérance : asthénie, diarrhée, dépigmentation, Sd mains-pieds Plus efficace si mutation c-kit exon 9 (37 % RO vs 5 % si exon 11) (Demetri et al., Lancet 2006)

CONCLUSION Complémentarité clinique/biologie Stratégies de plus en plus personnalisées Vers des études pour des sous-groupes de patients de plus en plus petits?

Biologie moléculaire, expérience française, INCa 2011 Nowak, F. et al. Nat. Rev. Clin. Oncol, July 2012