EXAMEN DE JURISPRUDENCE

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1 REVUE CRITIQUE DE JURISPRUDENCE BELGE 573 EXAMEN DE JURISPRUDENCE (1979 a 1990) (I) LES SOCI:ETES COMMERCIALES PAR PIERRE van 0MMESLAGHE PROFESSEUR ORDINAIRE A L'UNIVERSITE LmRE DE BRUXELLES ET XAVIER DIEUX MAiTRE DE CONFERENCES A L'UNIVERSITE LmRE DE BRUXELLES TABLE DES MATIERES DE LA PREMIERE PARTIE CHAPITRE PREMIER. - DEFINITIONS. - REGLES GENERALES SECTION Ire.- DEFINITION DES SOCIETES COMMERCIALES I. Societes et associations. - Principe et criteres de la distinction. Ibis. (suite). - Activites commerciales ou lucratives permises. - Activites << accessoires )), - Defmition. (1) Les precedents examens de jurisprudence sur les societes commerciales ont ere publies dans la Revue, 1951, p. 129 et 1954, p. 203, par J. VANRYN , p. 59, 1962, p. 359, 1967, p. 277, 1973, pp. 315 et 511, 1981, p. 221, par J. VANRYN et P. VAN 0MME SLAGHE. Le Professeur Van Ryn a estime ne pas pouvoir prendre part a la redaction du present examen, compte tenu de la preparation en cours du tome des Principes de droit commercial, consacre au societas commerciales, en collaboration avec le Professeur Heenen. R.O.J.B. - 4e trim. 1992

2 574 REVUE CRITIQUE DE JURISPRUDENCE BELGE 2. Societe et association (suite).- Sanction de la violation du principe de la specialite legale. 3. Societe et association (suite). - Activite reelle contraire a l'objet statutaire. - Faillite des ASBL. 4. Societes civiles, societes commerciales et societes civiles a forme commerciale. 5. Societes civiles a forme commerciale. - Choix de la forme sociale. - Controle de la Cour d'arbitrage. 6. Societe d'interet public a forme commerciale. - Autorite administrative. SECTION 2.- LE CONTRAT DE SOCIETE 7. La liberte d'association. 8. Elements specifiques du contrat de societe. - Generalites. 9. Les apports et l'affectio societatis. 10. Simulation d'une societe sous les dehors d'un autre contrat. 11. Sanction applicable en cas d'absence d'un element essentiel a toute societe. - Defaut d'afjectio societatis. 12. Defaut d'affectio societatis. - Souscription fictive ou simulee. -Droit penal. 13. Partage des benefices et des pertes. - Prohibition des pactes Ieonins. 14. Application aux operations de <<portage>>. 15. Societe d'une personne. 16. Cause illicite et fraude paulienne. CHAPITRE II. - LES SOClETES COMMERCIALES DEPOURVUES DE LA PERSONNALITE JURIDIQUE. - LA SOCIETE MOMENTANEE ET LA SOCIETE EN PARTICIPATION 17. La societe momentanee. - Objet determine. 18. Societe momentanee (suite). -Absence de personnalire. 19. Societe momentanee (suite). - Solidarite entre les associes. - Consequences processuelles. 20. Faillite d'un associe. - Liquidation des droits des associes. -Clause de liquidation. - Opposabilite aux tiers. 21. Suite.- Situation en!'absence de clause particuliere dans les statuts. 22. Societe en participation. - Absence de personnalite juridique. - Consequences fiscales.

3 REVUE CRITIQUE DE JURISPRUDENCE BELGE 575 CHAPITRE III. - LES SOClETES DOTEES DE LA PERSONNALITE JURIDIQUE: LA PERSONNALITE MORALE. - REGLES GENERALES SECTION l re. - AUTONOMIE PATRIMONIALE ET RELATIVITE DE LA PERSONNE MORALE 23. Personnalite juridique et autonomie patrimoniale. - Generalites. - Inapplication aux succursales. 24. Autonomie patrimoniale et responsabilite limitee. - Les lettres de confort ou de patronage. 25. Relativite de la personnalite morale. - Les groupes de societes. 26. Relativite de la personnalite morale. - Extension de la faillite de la societe au <<maitre de I' affaire>>. -Action en comblement de passif. SECTION 2. - ET CAPACITE SPECIALITE 27. Capacite et specialite legale. - Liberalite consentie par une societe commerciale. - Societe en liquidation. 28. La specialite statutaire. - Inopposabilite a la societe des actes excedant l'objet social. - Article 63bis et 130 des lois coordonnees sur les societes commerciales. 29. Emploi des langues. SECTION 3. - LES ORGANES DES PERSONNES MORALES 30. Les organes sociaux.- Repartition legale des competences.- Engagement de la societe a l'egard des tiers. 31. Nomination irreguliere d'un organe. -Consequences. 32. Intervention des organes en cette qualite.- Engagement de la societe et absence d'engagement personnel de l'organe. 33. Representation de la personne morale par des mandataires.- Mandat apparent. 34. Representation des societes en justice. - Procedure devant le Conseil d'etat. 35. Suite. - Mandat ad litem. - Effets. 36. Identification de la societe a ses organes. - Autres consequences du point de vue processuel. - Representation passive des personnes morales.- Enquetes. 37. Les engagements pris au nom d'une societe en formation. 38. Responsabilite penale des personnes morales. SECTION 4. - LA DENOMINATION SOCIALE 39. Protection de la denomination sociale selon le droit des societes. 40. Autres protections de la denomination sociale. - Loi sur les pratiques du commerce. - Loi uniforme sur les marques.

4 576 REVUE CRITIQUE DE JURISPRUDENCE BELGE 41. Inaction prolongee de la societe demanderesse. - Sanction. SECTION 5.- LE SI:EGE SOCIAL 42. Prise en consideration du siege social <<reel 1>. -Droit judiciaire prive. 43. Deplacement du siege social. - Validite et opposabilite aux tiers. SECTION 6. - (( NATIONALITE I) DES PERSONNES MORALES 44. Generalites. - Systeme du siege social reel. -Lex societatis. 45. (Suite). - Transfert a l'etranger du siege reel d'une societe beige. SECTION 7.- LES CADRES LEGAUX OBLIGATOIRES. - ET DE PUBLICITE. - LES REGLES DE FORME LA SOCIETE EN NOM COLLECTIF IRREGULIERE 46. Constitution d'une personne morale par l'effet de la loi.- Les societes en nom collectif irregulieres. - Conditions. 47. Caractere ostensible de la societe en nom collectif irreguliere. - La raison sociale. 48. (Suite). - Personnalite juridique de la societe en nom collectif irreguliere. 49. Sanction de l'irregularite de la societe : annulation. - Conditions. - Effets. 50. Regularisation des societes nulles. - Consequences. 51. Consequences de l'irregularite de la societe en nom collectif.- Fins de non-recevoir. 52. Application de!'article 17 des lois coordonnees sur les societes commerciales aux societes en nom collectif irregulieres. 53. Article 17 lois. coord. (suite). - Consequences de la faillite de la societe. 54. Faillite d'un associe.- Consequences. 55. <<Societe de fait 1> et societe apparente. 56. Portee et sanctions des regles de publicite. - Sanctions de leur inaccomplissement en matiere de modification des statuts. CHAPITRE IV. - LES SOCIETES DE PERSONNES DOTEES DE LA PERSONNALITE JURIDIQUE. - LA SOCIETE EN NOM COLLECTIF ET LA SOCIETE EN COMMANDITE SIMPLE 57. Attribution de la qualite de commer9ant aux associes en nom. - Notion d'associe actif en droit fiscal et en matiere de securite sociale. R.O.J.B. - 4e trim. 1992

5 REVUE CRITIQUE DE JURISPRUDENCE BELGE Dissolution de la societe en nom collectif par la volonte unilaterale d'un associe. - Appreciation de l'exercice de cette faculte au regard du principe de la bonne foi. 59. Exclusion d'un associe. - Dissolution judiciaire en vertu de!'article 1871 du Code civil. - Refus de proroger la societe dont le terme echo it. 60. Consequences de la dissolution d'une societe en nom collectif et d'une societe en commandite simple. - Application des articles 178 et suivants des lois coordonnees. 61. Cession de parts d'interet dans une societe en commandite simple. A vertissement. - Le present examen de jurisprudence couvre une periode a l'issue de laquelle les lois coordonnees sur les societes commerciales ont fait l'objet de modifications importantes, resultant en particulier de la loi du 18 juillet 1991 et des Titres VII et VIII de la loi du 20 juillet 1991 portant des dispositions sociales et diverses. Il sera fait reference a ces dispositions nouvelles, et aux commentaires dont elles ont deja fait l'objet, dans la mesure ou!'analyse des decisions ci-dessous examinees le justifie. D'autre part, la periode couverte par le present examen a ete marquee par un developpement important de la legislation et de la reglementation financieres et les regles nouvelles qui en resultent sont a divers egards concurrentes des lois coordonnees sur les societes c9mmerciales dans lesquelles elles penetrent d'ailleurs parfois (voy. les interessantes observations sur ce point de E. WIJMEERSCH, <<The effects of the regulation of securities markets on company law within the EEC >>, in European Company Law [1991], p. 61 et suivantes). Ces developpements se sont accompagnes d'un renforcement remarquable des pouvoirs de la Commission bancaire, devenue la Commission bancaire et fmanciere. Il nous a paru indispensable par consequent d'etendre le present examen aux decisions et aux prises de position de cette autorite, en rapport avec le droit des societes, telles qu'elles sont revelees parses Rapports annuels. Comme on le verra, nombre de celles-ci ont inspire l'reuvre legislative recente, laquelle sera pareillement evoquee lorsque le commentaire le justifie. Cette observation concerne naturellement, pour l'essentiel, la societe anonyme.

6 578 REVUE CRITIQUE DE JURISPRUDENCE BELGE CHAPITRE PREMIER. - DEFINITIONS. - REGLES GENERALES SECTION lre.- DEFINITION DES SOCIETES COMMERCIALES 1. SOCI:ETES ET ASSOCIATIONS.- PRINCIPE ET CRITERES DE LA DISTINCTION. - La distinction consacree traditionnellement par notre droit entre les societes, civiles ou commerciales, d'une part, et les associations, d'autre part, continue a faire couler beaucoup d'encre. Le caractere fuyant de la notion de <<but lucratif >>, qui en constitue le critere de base, ne permet guere d'esperer pour un proche avenir la paix judiciaire et doctrinale. Voir en particulier, pour la peri ode que no us examinons : J. RoNSE, << Kan een VZW failliet verklaard ~ >>, Melanges Fr. Duman, p H. LAGA, note sous Gand, 14 avrill986, R.D.C.B., 1988, p COIPEL, (( Le role economique des A.S.B.L. au regard du droit des societes et de la commercialite>>, in Les A.S.B.L. - Evaluation critique d'un succes, C.D.V.A., 1985, p. 93 a Note sous Bruxelles, 16 mai 1984, J.T., 1985, p << Les A.S.B.L. et la faillite- Mise au point a propos de l'etude de J. 't Kint >>, R.P.S., 1986, p J. 'T KINT, << Les A.S.B.L. et la faillite >> R.P.S., 1985, p J. PROSMAN, << Les A.S.B.L. peuvent-elles exercer des activites de nature economique ou commerciale ~ >>, R.D.C.B., 1984, p D. DE GREEF, << Faillite d'une A.S.B.L. >>, Jur. Falc., , p M. WoLFCARIUS, << Les activites commerciales des A.S.B.L. >>, R.P.S., 1979, p Un premier point ne prete pas a contestation : la forme de!'association, et particulierement celle de!'association sans but lucratif, a laquelle la loi du 27 juin 1921 octroie la personnalite juridique, est inadequate lorsque le groupement est constitue pour!'exploitation d'une activite dans le but de realiser des profits et de les repartir entre ses membres (cfr not. les motifs des decisions suivantes : Anvers, 6 janvier 1987, F.J.F., 1988, p Liege, 28 novembre 1986, R.P.S., 1988, p Mons, 6 decembre 1979, Bull. Contr., 1982, p R.O.J.B. - 4e trim. 1992

7 REVUE CRITIQUE DE JURISPRUDENCE BELGE 579 Bruxelles, 22 novembre 1979, Pas., 1980, II, Comm. Liege (ref.), 20 novembre 1986, R.D.C.B., 1987, p Comm. Liege, 28 juillet 1983, Jur. Liege, 1984, p Comm. Bruxelles, 27 juin 1983, R.P.S., 1983, p. 283, confirme par Bruxelles, 16 mai 1984, J.T., 1985, p. 391 et la note Col PEL). Pareil objet est celui d'une societe, civile ou commerciale (infra, n 4). Vice versa, le principe de la specialite legale (2) ne permet pas de doter les societes d'un objet desinteresse. Selon l'article 1832 du Code civil, la societe implique en effet << la mise en commun de quelque chose en vue de partager le benefice qui pourra en resulter >} (<< Examen >}, 1973, p. 320, no , p. 277, n , p. 59, n 1). Mais la jurisprudence recente se montre souvent incertaine lorsqu'il s'agit de preciser le caractere desinteresse que doit presenter l'objet de }'association sans but lucratif. Suivant certaines decisions, l'exercice d'une activite, commerciale par nature, consistant en l'accomplissement d'operations correspondant objectivement a l'une ou l'autre des categories d'actes enumeres par les articles 1 er et 2 du Code de commerce, est, en soi, incompatible avec le statut d'association sans but lucratif, sans qu'il faille rechercher si le but poursuivi par les membres de!'association est l'enrichissement de celle-ci ou la repartition entre eux des benefices realises. Invoquant l'autorite de DEMEUR (cette Revue, 1948, p. 26, note sous cass., 30 decembre 1946, precite), un jugement du tribunal de commerce de Bruxelles enonce de la sorte << qu'une A.S.B.L. ne devait pas dans l'esprit du legislateur etre autorisee a exercer une activite de nature commerciale meme sans but de lucre>} (civ. Bruxelles, 6 juin 1984, R.P.S., 1984, p Adde, quoique moins explicitement, Bruxelles, 11 mai 1981, R.P.S., 1982, p. 142, confirmant comm. Bruxelles, 5 novembre 1979, R.P.S., 1981, p Comm. (2) Voy., sur le principe de la specialite legale, et sur celui de la specialite statutaire : P. VAN OMMESLAGHE, ((Observations sur les limites imposees a l'activite des personnes morales en droit compare>>, cette Revue, 1958, p. 286, specialement no 3 et 4. - Adde Ph. QuERTAINMONT, <<La protection des deposants d'une banque faillie par l'institut de reescompte et de garantie et la regie de l'egalite des citoyens devant la loi >>, cette Revue, 1984, p. 649, no 4. -A. BENoiT-MoURY, <<Representation des societes des capitaux et limitations relatives a I' objet social>>, cette Revue, 1989, p. 385, no 3.

8 580 REVUE CRITIQUE DE JURISPRUDENCE BELGE Bruxelles, 3 juillet 1986, R.P.S. 1987, p. 76 et la note critique J. 'T KINT. -Dans le meme sens semble-t-il : WOLFCARIUS, op. cit.) A l'appui de cette analyse, on peut faire valoir que, selon!'opinion la plus generalement re~me,!'article 1 er, al. 2, de la loi du 27 juin 1921 subordonne!'octroi aux A.S.B.L. de la personnalite juridique a <<deux conditions)}- ne pas se livrer a des operations commerciales ou industrielles et ne pas chercher a procurer a ses membres un gain materiel-, qui doivent etre cumulees (DEMEUR, op. cit. - J. 'T KINT, << Les associations sans but lucratif>> [2e ed.], n VANRYN et HEENEN, t. rer, 2e ed., n 44 et la note 2). Selon cette interpretation, en consequence, le seul fait d'accomplir habituellement des actes rentrant dans la definition des articles 2 et 3 du Code de commerce serait interdit a une A.S.B.L.. Cette conception ne peut etre accueillie a notre avis. En definissant comme il l'a fait le champ d'application de cette loi, le legislateur a entendu interdire!'exploitation d'activites commerciales au nouveau type de personne morale qu'il offrait aux groupements desinteresses de droit prive, parce que ces activites trouvaient deja dans le droit des societes commerciales!'armature qui leur etait destinee. Or, les societes commerciales impliquent, comme toute societe, la repartition des profits entre leurs associes ou a tout le moins leur enrichissement par suite des plus-values acquises par leurs actions ou parts suite a l'accroissement du patrimoine social. On ne saurait done faire abstraction de cet element dans la determination du champ d'application de la loi (voy. en ce sens!'analyse minutieuse des travaux preparatoires de la loi faite par Col PEL, etude citee, in Les A.S.B.L. - Evaluation critique d'un succes, nos 109 et suiv.). L'accomplissement d'actes rentrant dans!'enumeration des articles 2 et 3 du Code de commerce n'est interdit a une A.S.B.L. que si celle-ci les accomplit comme le ferait une societe, c'est-a-dire avec un but lucratif. Par un arret du 19 janvier 1973, certes vivement critique par la meilleure doctrine (VAN RYN et HEENEN, <<Esprit de lucre et droit commercial>>, cette Revue, 1974, p. 325), mais auquel s'attache l'autorite des decisions de la Cour de cassa-

9 REVUE CRITIQUE DE JURISPRUDENCE BELGE 581 tion, cette haute juridiction a d'ailleurs considere que la presomption de commercialite qui s'attache aux actes que le Code de commerce repute commerciaux est renversee s'il est etabli qu'ils ont ete accomplis sans esprit de lucre (cass., 19 janvier 1973, Pas., 1973, I, 492 et la note W.G. - En ce sens egalement cass., 25 fevrier 1935, precite). Suffit-il, pour qu'elle enfreigne la loi, que l' A.S.B.L. ait pour objet de poursuivre ses activites suivant les methodes commerciales, en vue de constituer un excedent des recettes sur ses depenses, selon la definition de la commercialite professee par MM. VANRYN et HEENEN (<<Esprit de lucre et droit commercial>>, cette Revue, 1974, p. 325) - et done en vue d'accroitre son patrimoine - sans s'attacher a verifier a quelles fms sont affectees ces recettes excedentaires ( cfr comm. Bruxelles, 7 fevrier 1984, R.P.S., 1984, p. 302, a propos de!'association de consommateurs Test-Achats)? A notre avis, cette conception n'est pas davantage conforme aux intentions du legislateur (cfr CoiPEL, op. cit. nob 109 et suiv.) ni a la summa divisio entre les associations et les societes. La societe implique!'intention de procurer aux membres de la societe un benefice, meme si celui-ci peut consister dans l'economie d'une depense ou d'une charge (en ce sens egalement : VAN R YN et HEENEN, << Esprit de lucre et droit commercial >>, cette Revue, 1974, p. 325, specialement no 5. - Adde, sur!'affirmation du principe selon lequel le benefice peut consister en l'economie d'une charge ou d'une depense : note P. CoPPENS, sous Anvers, 4 decembre 1984, R.P.S., 1986, p. 142.) Cette conception - traditionnelle (DE PAGE, t. V, 2e ed., n 46)- de la societe a ete confirmee en France a!'occasion de!'adoption de la loi du 4 janvier 1978 reformant les dispositions du Code civil sur la societe. (Encycl. Dalloz, Droit civil, V 0 Societe, par G. LAGARDE, n 20.- V 0 Association, par G. Sousr, nob 12 et suiv.- Adde Y. GuYON,<< De la distinction des societes et des associations depuis la loi du 4 janvier 1978 >>, Melanges P. Kayser, p. 121.) La distinction entre la societe et!'association depend done de!'affectation donnee a l'excedent des recettes sur les depenses recherche par hypothese. R.O.J.B. - 4e trim. 1992

10 582 REVUE CRITIQUE DE JURISPRUDENCE BELGE Si cet excedent est destine a etre reparti entre les membres du groupement, il ne fait pas de doute que l'on se trouve en presence d'une societe et non d'une association. Comme le releve a juste titre, selon nous, le president du tribunal de commerce de Liege dans la decision deja citee du 20 novembre 1986, (R.D.C.B., 1987, 467) la situation est la meme si les membres tirent parti de l'activite de l'a.s.b.l. en leur fa veur parce qu 'elle les dispense de certaines charges ou depenses - comme des depenses de formation professionnelle. II s'agit en effet d'une forme de benefice selon la conception moderne citee ci-dessus (contra sur ce dernier point : CoiPEL, op. cit. n 8 55 et suiv. [3]). La loi est egalement enfreinte, selon les intentions du Iegislateur de 1921, si!'association tend simplement a accroitre son patrimoine et a s'enrichir elle-meme - ce qui aboutit d'ailleurs indirectement a l'enrichissement de ses membres. Comme l'a montre M. Coipel, le legislateur de 1921 a entendu a cet egard eviter la reconstitution de la mainmorte. C'est en ce sens sans doute que l'on peut tenter d'interpreter la jurisprudence bien connue de la Cour de cassation selon laquelle le regime fiscal favorable que le legislateur reserve aux A.S.B.L. en tant que telles est lie a l'exercice par elles d'activites depourvues d'esprit de lucre, ce qui suppose - selon les decisions citees ci-dessous- que!'association ne recherche ni son propre enrichissement (4) ni celui de ses membres (cass., 25 fevrier 1935, Pas., 1935, I, juillet 1937, Pas., 1937, I, decembre 1946, Pas., 1946, I, novembre 1948, Pas., 1948, I, janvier 1952, Pas., 1952, I, 285, avec les conclusions de M. le procureur general Ganshof van der Meersch, alors avocat general avril 1952, Pas., 1952, I, octobre 1953, Pas., 1954, I, fevrier 1954, Pas., 1954, I, er juin 1965, Pas., 1965, I, avril 1967, Pas., 1967, I, 981). II faut cependant faire preuve de prudence a ce propos, car (3) Pour cet auteur seul le benefice provenant d'une repartition entre les membres serait a prendre en consideration en matiere de specialite legale d'a.s.b.l. a!'exclusion de la simple economie de charge. La notion de benefice serait alors differente de celle admise en matiere de societe (cfr aussi no 50) Toutefois!'attribution de remunerations excessives aux membres serait constitutive d'une repartition de benefices (no 63). (4) C'est nous qui soulignons. R.O.J.B. - 4e trim. 1992

11 REVUE CRITIQUE DE JURISPRUDENCE BELGE 583 l'unite et la clarte de la pensee et de la terminologie ne caracterisent pas cette jurisprudence (COIPEL, op. cit., nos 148 et suiv.) En revanche, le seul fait de rechercher un excedent des recettes sur les depenses, meme par des methodes comptables ou de gestion modernes, n'est pas en soi contraire au statut legal de!'association sans but lucratif, si ces excedents sont affectes au but desinteresse que!'association doit se fixer. (En ce sens: VANRYN et HEENEN, t. Ier, 2 6 ed., n 44 injine.) On ne comprendrait d' ailleurs pas pourquoi les associations sans but lucratif seraient condamnees, a peine d'enfreindre la loi, a utiliser des methodes de gestion artisanales plutot qu'a user de methodes modernes. lbis. (suite). - AcTIVITES COMMERCIALES OU LUCRATIVES PERMISES. - ACTIVITES << ACCESSOIRES >>. - DEFINITION. - Mais quelle sera alors la limite acceptable et dans quelle mesure une A.S.B.L. qui accomplit des operations qualifiees commerciales par la loi ou qui exploite des activites lucratives de nature civile pourra-t-elle echapper ala critique? Comment d'autre part pourra-t-elle renverser la presomption de but de lucre, selon!'expression de la Cour de cassation? Selon M. Coipel, il suffirait que l'a.s.b.l. affecte ses benefices- sans prejudice d'une mise en reserve possible des montants necessaires a assurer la stabilite de sa gestion - a un but (<superieur>>, (expression que l'auteur prefere a celle de (<but desinteresse )) qu'il estime ambigue) (op. cit., nos 132 et suiv). A notre avis, cette conception est trop large : il suffirait que n'importe quelle entreprise affecte ses benefices non point a ses membres ni a l'accroissement de son patrimoine mais a tel objectif desinteresse qu'elle poursuivrait d'autre part- voire meme qui serait poursuivi par un tiers a qui elle verserait ses benefices- pour qu'elle echappe a toutes les regles qui regissent les entreprises et puisse entrer en concurrence avec d'autres entreprises dans des conditions anormales- notamment quant a ses charges fiscales ou aux obligations resultant du droit commercial.

12 584 REVUE CRITIQUE DE JURISPRUDENCE BELGE La jurisprudence ne va d'ailleurs pas aussi loin. Elle resout cette question par le recours ala notion d'activite lucrative accessoire- ce qui nous parait en defmitive un temperament raisonnable. Conformement a la jurisprudence de la Cour de cassation (cass., 16 fevrier 1954, precite octobre 1953, precite.- 22 avril 1952, precite janvier 1952, op. cit., avec les conclusions de M. le procureur general Ganshof van der Meersch, alors avocat general.- 20 avril1947, Pas., 1947, I, juillet 1937, precite.- voy. aussi cass., 6 mars 1987, Pas., 1987, I, fevrier 1987, Pas., 1987, I, 709), une activite lucrative n'est pas incompatible avec le statut des A.S.B.L. a la condition qu'elle demeure accessoire. Mais la de:fmition de ce caractere prete lui aussi a discussions (voy. a ce propos l'etude precitee de M. COIPEL, in Les A.S.B.L. - Evaluation critique d'un succes, specialement nos 83 et suiv., qui expose de fac;on circonstanciee les diverses opinions en presence, dans le detail desquelles nous ne pouvons entrer ici). D'une maniere generale, la jurisprudence recente demeure fidele a une conception stricte de cette notion, consacree par la jurisprudence de la Cour supreme ci-dessus evoquee : il faut non seulement que l'activite lucrative soit mains importante que l'activite principale desinteressee et que les benefices qui en resultent soient affectes a cette activite principale, mais aussi qu'il s'agisse la d'un moyen << necessaire >>, voire << indispensable>>, ala realisation du but desinteresse que s'est fixe le groupement (Bruxelles, 22 novembre 1979, Pas., 1980, II, 15 relatif a la fabrication de produits alimentaires par certaines congregations religieuses. - Comm. Mons [ref.], 22 mai 1987, R.P.S., 1988, p. 154 et la note J. 'T KINT. - Comp. Anvers, 25 octobre 1979, R. W., , col et comm. Gand, 24 avril 1986, R.D.O.B., 1988, p. 571 et la note LAGA, precitee). A ce titre, l'activite accessoire s'oppose a << l'activite lucrative d'appoint >> qui demeure interdite aux A.S.B.L.. L'activite d'appoint ne presente pas avec l'activite principale le caractere de dependance ou de necessite qui caracterise l'activite

13 REVUE CRITIQUE DE JURISPRUDENCE BELGE 585 accessoire. (Note 'T KINT sous comm. Mons [ref.], 22 mai 1987 cite ci -dessus). 2. SociETE ET ASSOCIATION (suite).- SANCTION DE LA VIO LATION Du PRINCIPE DE LA SPECIALITE LEGALE.- Pour determiner si un groupement constitue une societe ou une association, il faut avoir egard a son objet social, tel qu'il resulte de ses statuts, ainsi que l'a rappele la Cour d'appel de Bruxelles, dans son arret du 10 fevrier 1988 (R.P.S., 1988, p Voy. aussi Liege, 28 novembre 1986, R.P.S., 1988, p Bruxelles, 8 fevrier 1979, J.T., 1979, p. 540). La violation du principe de la specialite legale qui apparait le cas echeant, ala lecture des statuts, soit qu'une association ait ete constituee pour }'exploitation d'une activite lucrative, soit, inversement, que l'objet attribue a une societe ne presente pas un tel caractere, implique, selon ces decisions, la requalification du groupement de la maniere qu'impose la nature de son objet. Plus exactement selon nous, il s'agit de!'application de la theorie de la conversion des actes nuls : le groupement nul est converti en un groupement valable, correspondant a }'intention des parties (en ce sens, civ. Bruxelles, 6 juin 1984, R.P.S., 1984, p Examen, 1973, p. 320, no 1 et les ref. a!'application ainsi faite en jurisprudence de cette theorie ainsi qu'a l'etude de base du regrette professeur RoNSE, parue au T.P.R., 1965, p. 199 : << Gerechtelijke conversie van nietige rechtshandelingen >>, T.P.R., 1965, p. 199). Toute reference a l'activite reellement exercee sous le couvert du groupement n'est cependant pas exclue, pour!'application de cette sanction : d'une part, c'est en fonction de cette activite que la nature du groupement peut etre determinee, lorsqu'il s'agit d'un groupement <<de fait>> (VANRYN et HEE NEN, t. Ier, 2e ed., n 354). D'autre part, lorsque les statuts pretent a interpretation, l'activite effectivement exploitee par le groupement permet d'eclairer la portee de l'objet social, conformement au droit commun des obligations (VAN 0MME SLAGHE, << Examen de jurisprudence- Les obligations>>, cette Revue, 1986, p. 170, n , p. 500, n 44). R.O.J.B. - 4e trim. 1992

14 586 REVUE CRITIQUE DE JURISPRUDENCE BELGE 3. SoCIETE ET ASSOCIATION (suite). - ACTIVITE REELLE CONTRAIRE A L'OBJET STATUTAIRE. FAILLITE DES A.S.B.L.. - Par leurs arrets precites des 10 fevrier 1988 (R.P.S., 1988, p. 151) et 28 novembre 1986 (R.P.S., 1988, p. 140), les Cours d'appel de Bruxelles et de Liege ont, a juste titre, dissipe la confusion souvent entretenue entre la meconnaissance du principe de la specialite legale - qui consiste a creer une association pour!'exploitation d'un objet ressortissant au droit des societes- et l'exercice effectif d'une activite lucrative, le plus souvent commerciale, sous le couvert d'une association, <<au mepris des statuts de celle-ci >>. Ce dernier comportement est sanctionne par la dissolution judiciaire de!'association, aux termes de!'article 18 de la loi du 27 juin 1921 (memes decisions). Encore cette sanction speciale n'elimine-t-elle pas le droit commun et les tribunaux de commerce ne se refusent plus a declarer la faillite de groupements constitues en A.S.B.L., mais qui exercent en realite une activite commerciale, des lors que la cessation de leurs paiements et l'ebranlement de leur credit sont etablis. Les conditions de la declaration de faillite, dans de telles situations, demeurent cependant discutees. De fac;on quelque peu expeditive sur le plan juridique, une decision retentissante du tribunal de commerce de Bruxelles a ainsi prononce la faillite de I' A.S.B.L. <<Royal Union Saint-Gilloise >> (13 octobre 1976, R.P.S., 1976, p Dans le meme sens : comm. Bruxelles, 3 juillet 1986, R.P.S., 1987, p. 76 et la note justement critique de J. 'T KINT). La faillite d'une association sans but lucratif est pourtant inconcevable, puisqu'en tant que telle!'association n'est pas commerc;ante au sens de!'article 442 du Code de commerce (en ce sens egalement, voy. not. les etudes precitees de M. RONSE et de Mme LAGA. - Adde P. CoPPENS et Fr. T'KINT, << Examen de jurisprudence - Les faillites, les concordats et les privileges>>, cette Revue, 1991, p. 289, n 7). Suivant d'autres decisions, la declaration de faillite du groupement suppose done que!'association soit prealablement requalifiee en societe commerciale et plus particulierement en societe en nom collectif, irreguliere le cas echeant (Bruxelles, 11 mai 1981, R.P.S., 1982, p. 142 et la note, confirmant

15 REVUE CRITIQUE DE JURISPRUDENCE BELGE 587 comm. Bruxelles, 5 novembre 1979, R.P.S., 1981, p Comm. Liege, 28 juillet 1983, Jur. Liege, 1984, p. 176 et la note P.H. - Comp. comm. Bruxelles, 21 fevrier 1990, R.P.S., 1990, p. 287, reforme par comm. Bruxelles, 27 avril 1990, R.P.S., 1990, p. 291 et la note Fr. T'KINT. - Liege, 28 novembre 1986, R.D.C.B., 1987, p. 514, confirmant partiellement comm. Liege, 26 janvier 1984, precite. - Comm. Bruxelles, 6 juin 1984, R.P.S., 1984, p. 309). Deux situations doivent, a notre avis, etre distinguees plus precisement : ou bien les membres de!'association exploitent, parallelement a celle-ci et de maniere durable et ostensible, une activite commerciale, ou bien!'association exploite ellememe cette activite. Dans le premier cas- rare en pratique-, il n'y a pas d'inconvenient a appliquer directement au groupement la theorie des cadres legaux obligatoires, avec pour consequence qu'une societe commerciale existe, de force en quelque sorte, en marge de!'association (infra, n 8 46 et suivants). Dans la seconde situation au contraire, l'activite commerciale de 1' A.S.B.L. et le passif generateur de la cessation des paiements ne peuvent etre imputes a une societe commerciale distincte formee entre les membres de!'association, puisque les dettes ont ete contractees par!'association dans le cadre d'une activite commerciale exploitee par celle-ci. Un simple redressement de qualification ne constitue pas la demarche appropriee, dans la mesure ou l'objet statutaire desinteresse de!'association correspond bien a celui d'une A.S.B.L., meme si, dans les faits, il a ete viole. Faut-il en deduire que toute declaration de faillite doit etre exclue dans pareil contexte 1 Nous ne le crayons pas. D'une part, le juge peut, selon les circonstances, faire apparaitre le caractere purement fictif de!'association, ou debusquer derriere!'association ostensible purement apparente, une societe commerciale, irreguliere le cas echeant, conformement aux principes qui regissent traditionnellement la simulation dans notre droit (VAN 0MMESLAGHE, << Abus de droit, fraude aux droits des tiers, fraude a la loi l), cette Revue, 1976, p. 303, specialement no 22). Il s'agit d'une application de!'action en declaration de simulation, fondee sur le principe general de R.O.J.B. - 4e trim. 1992

16 588 REVUE CRITIQUE DE JURISPRUDENCE BELGE droit fraus omnia corrumpit (sur ce principe general, voy., outre la mercuriale celebre de M. le procureur general Ganshof van der Meersch sur le texte de la loi et les principes generaux du droit, J.T., 1970, p F. DuMON, << Billijkheid en recht- Enkele overwegingen >>, Medelingen van Koninklijke Akademie voor wetenschappen, letteren en schone kunsten van Belgie, Klasse der Letteren, 1980, no 5, p Cass., 16 juin 1987, Pas., 1987, I, janvier 1968, Pas., 1968, I, 649) ou, selon DE PAGE, sur les articles 7 et 8 de la loi hypothecaire [t. II, 3e ed., no 641]). D'autre part- et independamment de la constatation dans le chef des membres du groupement de toute intention frauduleuse - les theories correctrices developpees recemment par notre droit, telles que l'abus de droit, particulierement sous la forme de l'abus de la personnalite morale, Ia bonne foi ou Ia << rechtsverwerking >> (5), permettraient d'expliquer que les membres d'une association qui auraient exploite, sous le couvert de celle-ci, une activite incompatible avec son objet desinteresse et qui l'auraient ainsi detournee de la fmalite que la loi lui assigne, fussent dechus du benefice de la personnalite juriclique et de la division patrimoniale qui s'y attache normalement, en sorte qu'ils devraient repondre du passif de }'association (comp., en matiere d'extension de faillite, infra, n 26 et Examen, 1981, p. 373, no 31) (6). (5) L'introduction de ce concept dans le droit beige a fait l'objet, on le sait, d'une importante jurisprudence des juges du fond et de plusieurs an ets de la Cour de cassation, dans le detail desquels nous ne pouvons entrer ici. (Cfr cass., 12 mai 1989, Pas., 1989, I, Cass., 17 mai 1990, Pas., 1990, I, 1061 ; cette Revue, 1990, 595 et note HEE NEN. - Cass., 16 novembre 1990, Act. Dr., 1991, 202 et note MoREAU-MARGREVE. - Cass., 20 fevrier 1992, inedit.) Le premier soussigne reviendra sur cette question a!'occasion de la publication des lec;ons qu'il a donnees a l'universite de Gand dans le cadre de Ia Chaire Francqui sur la bonne foi. En toute hypothese, l'abus de droit ou le principe de!'execution de bonne foi peuvent justifier les solutions retenues notamment par des juges du fond sur Ia base de la << rechtsverwerking 1>. (6) Cette sanction, decoulant du droit commun, ne doit pas etre confondue avec l'inopposabilite de Ia personnalite morale qui est susceptible de decouler de l'article 26 de la loi du 27 juin 1921 en cas de violation des articles 3, 9, 10 et 11 de Ia meme loi, inopposabilite dont la Cour de cassation parait avoir refuse de deduire un engagement personnel des membres de!'association a l'egard des tiers a raison des dettes contractees pour lecompte de!'association a l'egard de ceuxi-ci (cass., 10 decembre 1981, cette Revue, 1986, p. 5 et la note E. WIJMEERSCH, specialement no 31, selon lequell'inopposabilite de la personnalite morale n'entraine pas telle quelle la decheance de la division patrimoniale). R.O.J.B. - 4e trim. 1992

17 REVUE CRITIQUE DE JURISPRUDENCE BELGE 589 Mais, comme en matiere d' extension de la faillite d'une societe commerciale au <<maitre de I' affaire>>, la faillite des membres de!'association, apres accomplissement des demarches prealables ci-dessus esquissees, postule que toutes les conditions de la faillite soient reunies dans leur chef (Examen, 1981, lac. cit.- X. DIEUX, <<La responsabilite des associes en matiere de societes commerciales >>, in La responsabilite des associes, organes et preposes des societes [ Ed. du Jeune Barreau de Bruxelles], p. 57, specialement p. 68 et les references a la jurisprudence de la Cour de cassation en ce sens). 4. SocrETES CIVILES, societes commerciales ET societes CIVILES A FORME COMMERCIALE. - Sont commerciales les societes qui ont pour objet l'accomplissement d'actes reputes commerciaux par les articles 1 er, 2 et 3 du Code de commerce (Examen, 1981, p. 226, n 1.- VANRYN et HEENEN). Bien entendu, toutes les societes, qu'elles soient civiles ou commerciales poursuivent un but de lucre. C'est egalement sur la base de ses statuts, et de la definition de l'objet socialqu'ils comportent (comp. supra, no 2), que se determine la nature civile ou commerciale d'une societe (comm. Bruxelles, 8 juillet 1986, R.P.S., 1986, p Comm. Tournai, 30 septembre 1981, J.C.B., 1982, p Comm. Bruxelles [ref.], 4 fevrier 1981, J.T., 1981, p. 275 et la note L. DE BROUWER. - Note M.W. sous comm. Liege, 30 janvier 1989, T.R. V., 1989, p CoiPEL, << Dispositions communes a toutes les formes de societes commerciales >>, Rep. Not., t. XII, L. II, nos 6 et suiv.). L'activite reelle peut toutefois etre prise en consideration, pour les groupements <<de fait>> ou lorsqu'il s'agit d'interpreter des statuts ambigus (supra, n 2. -VAN RYN et HEENEN, t. 1 er, 2e ed., n 354). En principe,!'acquisition de la personnalite juridique, selon l'une des formes que reconnaissent et organisent les lois coordonnees sur les societes commerciales, suppose done que l'activite que le groupement se donne pour objet soit de nature commerciale. Toutefois, l'on sait que, depuis une loi du 14 juin 1926 (article 212 des lois coordonnees sur les societes commerciales), les societes civiles peuvent << emprunter les formes de R.O.J.B. - 4e trim. 1992

18 590 REVUE CRITIQUE DE JURISPRUDENCE BELGE societes commerciales >>, sans << perdre >> leur caractere civil (VAN RYN et HEENEN, t. rer, 2e ed., n a COIPEL, op. cit., n 9). Selon un arret de la Cour d'appel de Gand du 4 mars 1982 (R. W., , col. 2143), un tel emprunt n'implique pas seulement la soumission de la societe civile a toutes les dispositions des lois coordonnees sur les societes commerciales determinant les conditions de constitution et de fonctionnement de la societe commerciale dont elle a revetu la forme (sur cette consequence traditionnelle : comm. Bruxelles, 9 mars 1981, J.T., 1981, p. 385) ; il entraine aussi!'application des lois speciales dont l'objet est d'assurer la protection du public, en relation avec le fonctionnement des societes commerciales, tel l'arrete royal n 22 du 24 octobre 1934 portant interdiction a certains condamnes et faillis d'exercer certaines fonctions ou activites. Par contre, les societes civiles a forme commerciale demeurent justiciables des tribunaux civils. Elles beneficient du regime de la preuve reglementee, tel qu'il resulte du Code civil. Elles ne peuvent pas etre declarees en faillite (VAN RYN et HEENEN, t. rer, 2e ed., n 359). Bien entendu, cette soustraction de la societe civile a forme commerciale au droit commercial general suppose que l'objet de la societe soit de nature civile. S'il est commercial, la pretendue societe << civile >> a forme commerciale constitue une veritable societe commerciale, integralement soumise au droit commercial (Examen, 1981, p. 228, no 3). C'est ce que rappelle a bon droit un jugement du tribunal de commerce de Liege du 30 janvier 1989 (T.R. V., 1989, p. 215 et la note M.W., precitee). 5. SocrmT:Es CIVILES 1 FORME commerciale. -CRoix DE LA FORME sociale.- CoNTROLE DE LACouR n'arbitrage. Les fondateurs d'une societe civile, qui souhaitent lui donner une forme commerciale, sont en principe libres du choix de cette forme parmi toutes celles que reconnaissent les lois coordonnees sur les societes commerciales. Le legislateur peut toutefois restreindre ce choix. Encore faut-il que pareille contrainte n'emporte pas de contrariete au

19 REVUE CRITIQUE DE JURISPRUDENCE BELGE 591 principe de l'egalite des Belges devant la loi et au principe de non-discrimination tels qu'ils sont respectivement consacres par les articles 6 et 6bis de la Constitution. Depuis l'entree en vigueur de la loi speciale du 9 janvier 1989, la Cour d'arbitrage est competente pour annuler des dispositions legales contrevenant aces dispositions constitutionnelles (voy. not. Ph. QuER TAINMONT, M. UYTTENDAELE et Ph. DE BRUYCKER, << Chronique de jurisprudence et de legislation- LaCour d'arbitrage >>, Adm. Publ., 1989, p. 77, n F. DELPEREm eta. RAS SON-ROLAND, Recueil d'etudes sur la Cour d'arbitrage (1990), n Pour d'autres cas possibles d'intervention de la Cour d'arbitrage en droit prive, voy. J. DELVA et F. MEERS CHAUT, << Overzicht van rechtspraak- De rechtspraak van de arbitragehof ten behoeve van de private rechtspraktijk >>, T.P.R., 1990, p. 679). LaCour d'arbitrage a ainsi ete appelee a verifier la compatibilite avec ces principes du nouvel article 3 de l'arrete royal n 143 du 30 decembre 1982 fixant les conditions auxquelles les laboratoires medicaux doivent repondre en vue de!'intervention de }'assurance maladie dans les prestations de biologie clinique, tel qu'il a ete modifie par!'article 17 de la loi-programme du 30 decembre Cette disposition nouvelle prevoit notamment que les medecins traitants ne peuvent se grouper pour!'exploitation d'un laboratoire, que dans << une societe civile ayant emprunte la forme d'une societe privee a responsabilite limitee, d'une societe en nom collectif ou d'une societe cooperative>>. Les parties requerantes en postulaient l'annulation, en faisant valoir qu'il en resultait (< une inegalite serieuse entre les differentes categories d'exploitants de laboratoires de biologie clinique >> qui- selon elles- n'etait << ni en rapport avec le but legalement poursuivi ni justifiee par des donnees objectives>>. Par unimportant arret du 13 octobre 1989 (J.L.M.B., 1989, p J.T., 1990, p. 2 et la note D. LAGASSE.- T.R. V., 1990, p. 221 et obs. N. HoLLANDERS DE 0UDERAEN), la Cour a refuse de faire droit a cette partie de la requete en annulation, apres avoir rappele, dans des termes devenus classiques (Ph. QuERTAINMONT, Droit administratif de l'economie (1987), nos 32 et suiv.), que << les regles constitutionnelles de l'egalite

20 592 REVUE CRITIQUE DE JURISPRUDENCE BELGE des Belges et de la non-discrimination n'excluent pas qu'une difference de traitement soit etablie selon certaines categories de personnes pour autant que le critere de differenciation soit susceptible de justification objective et raisonnable >), et que <<!'existence d'une telle justification doit s'apprecier par rapport au but et aux effets de la norme consideree >). II s'ensuit que<< le principe d'egalite est viole lorsqu'il est etabli qu'il n'existe pas de rapport raisonnable de proportionnalite entre les moyens employes et le but vise >>. Le rapport de proportionnalite n'est pas vide par la disposition legale attaquee, selon!'analyse de la Cour, car la contrainte qui en resulte pour les laboratoires exploites par une societe de droit prive est objectivement et raisonnablement justifiee au regard du but poursuivi, - a savoir << la transparence du secteur et le controle de l'identite des associes et de la structure des laboratoires qui demandent!'intervention de!'assurance maladie, dans la perspective de la lutte contre la surconsommation >). Les parties requerantes pretendaient aussi que les restrictions apportees a leur choix etaient disproportionnees par rapport au but recherche, des lors qu'il est possible de prevoir" dans les statuts d'une societe anonyme que les actions doivent rester nominatives et que!'interdiction d'acceder a ce statut etait de nature a priver les laboratoires de droit prive de certaines sources de financement. La Cour rejette egalement cet argument, considerant qu'il ne lui appartient pas<< d'apprecier si une mesure etablie par la loi est opportune et souhaitable >) et que << c'est au Iegislateur qu'il revient de determiner les mesures a prendre pour atteindre le but qu'il s'est fixe>). L'arret poursuit en repetant a cet egard que<< le controle de la Cour sur la conformite des lois, decrets et ordonnances aux articles 6 et 6bis de la Constitution porte sur le caractere objectif de la distinction,!'adequation des mesures au but recherche et!'existence d'un rapport raisonnable entre les moyens employes et l'objectif vise>). Mais << la Cour n'a pas a examiner en outre si l'objectif poursuivi par le legislateur pourrait etre atteint ou non par des mesures legales differentes >).

21 REVUE CRITIQUE DE JURISPRUDENCE BELGE 593 On souscrit certes sans reserve a!'affirmation de ces principes generaux, qui correspondent tres largement ala doctrine de l'egalite et de la proportionnalite que se sont progressivement forges le Conseil'd'Etat et la Cour de cassation (D. LA GASSE, op. cit., n Adde 0. DAURMONT et D. BATSELE, << Cinq annees de jurisprudence du Conseil d'etat relative aux principes generaux du droit administratif>>, Adm. Publ., 1990, p. 292, n 208). Il est toutefois permis de se demander s'ils devaient necessairement conduire la haute juridiction a refuser d'examiner le grief formule par les requerantes. Ce rejet parait impliquer que, meme si le principe de proportionnalite requiert un rapport raisonnable entre les moyens employes et l'objectif vise, il ne saurait amener la Cour a verifier le choix fait par le legislateur entre deux ou plusieurs mesures susceptibles de realiser pareillement l'objectif qu'il s'est souverainement fixe, afm de s'assurer que le moyen choisi comporte la moindre restriction au principe de l'egalite. Il y a la une restriction, quelque peu arbitraire a nos yeux, au champ d'application du principe de l'egalite et de la proportionnalite, pourtant affirme par ailleurs comme une premisse de base de notre ordre juridique (7). Au regard du droit commercial, il etait patent en l'espece que!'interdiction faite aux laboratoires de droit prive de revetir la forme d'une societe anonyme n'etait pas necessaire pour atteindre l'objectif de transparence recherche, des lors quecomme le soutenaient les requerantes - il est possible d'empecher une telle societe d'emettre des titres au porteur. On eut done prefere que, plutot que de repousser de maniere abstraite le moyen au nom de l'impossibilite d'un controle d'opportunite sur la substance des mesures adoptees par le legislateur, la Cour se pronon<;at sur le caractere excessif ou non de!'exclusion de cette forme sociale, a la lumiere du but poursuivi par la disposition legale en cause (voy. egalement, en faveur d'une appreciation plus concrete du principe de proportionna- (7) On observera que Ia Cour de justice des Communautes par exemple se livre frequemment a de pareilles analyses par rapport aux objectifs du Traite de Rome. Adde W. VAN GERVEN, <<Principe de proportionnalite, abus de droit et droits fondamentaux >, J.T., 1992, p. 305.

22 594 REVUE CRITIQUE DE JURISPRUDENCE BELGE lite, M. UYTTENDAELE, <<La Cour d'arbitrage depuis 1989 : une Cour constitutionnelle a vocation limitee? >>, J.T., 1991, p X. DELGRANGE, << Les articles 6 et 6bis de la Constitution, des dispositions longues portees >>, Rev. Reg. Dr., 1990, p. 422). C'est ce qu'au demeurant elle a fait, dans la suite de ce meme arret a propos de griefs formes par les requerantes a l'encontre d'autres dispositions de la meme loi, en relation avec le principe de la liberte d'association (infra, no 7). Bien evidemment ces principes s'appliquent aussi aux societes commerciales (A. BENOiT-MOURY, << Dix ans de jurisprudence en matiere de societes >>, Actualites du droit, 1991, p. 9, n 10). 6. SOCIETE D'INTERET PUBLIC l FORME COMMERCIALE. - AuTORITE ADMINISTRATIVE.- Selon une technique analogue a celle qu'illustre!'article 212 des lois coordonnees sur les societes commerciales (supra, no 4), le legislateur peut aussi autoriser les pouvoirs publics a s'associer sous la forme d'une societe commerciale, meme si l'objet du groupement consiste dans la gestion d'un service public ou dans l'accomplissement d'une mission d'interet general (VAN RYN et HEENEN, t. II, n 1149 et n a Ph. QuERTAINMONT, Droit administratif de l'economie (1987), p. 178 et suivantes, avec une abondante bibliographie concernant ce sujet delicat. - Adde : X. DIEUX, << Les entreprises publiques et le droit commercial [a la lumiere de la loi du 21 mars 1991 portant reforme de certaines entreprises publiques autonomes] >>, in Les entreprises publiques autonomes [1992], p. 98). Selon!'opinion generalement re~me, elles demeurent d'ailleurs des personnes de droit public en depit de leur forme commerciale (VAN RYN et HEENEN, t. II, no Adde les articles 37 et suivants de la loi du 21 mars 1991 portant reforme de certaines entreprises publiques economiques, qui organisent le statut de la <<societe anonyme de droit public>>). C'est ainsi que la loi du 1 er mars 1922 (aujourd'hui remplacee par la loi du 22 decembre 1986) a permis aux associations de communes de revetir la forme d'une societe commerciale (R.P.D.B., Compl. t. V, V 0 Association de communes, par Lou VEAUX, n Voy., en ce sens egalement,!'article 5 de la loi du 22 decembre 1986). De nombreuses intercommunales se R.O.J.B. - 4e trim. 1992

23 REVUE CRITIQUE DE JURISPRUDENCE BELGE 595 sont constituees, sur cette base, en societes cooperatives (VAN RYN et HEENEN, t. II, n 1179). L'article 3 de la loi du 22 decembre 1986 confirme que les intercommunales sont des personnes morales de droit public. Elles sont regies par les lois relatives aux societes commerciales pour autant que les statuts n'y derogent pas en raison de la nature speciale de!'association (cfr VANHAEVERBEEK, Les intercommunales, nos 39, 42, 61 et suiv.). Toutefois, selon!'article 3 de la loi, << elles n'ont pas un caractere commercial)) - ce qui signifie qu'elles ne sont pas des commer<;ants du seul fait qu'elles ont revetu une forme prevue par les lois coordonnees. Mais cela n'exclut pas qu'elles puissent accomplir des actes commerciaux et relever a ce titre du tribunal de commerce (cass., 17 fevrier 1938, Pas., 1938, I, 52. -VAN HAEVERBEEK, op. cit., n 43) Un arret du Conseil d'etat du 2 decembre 1981 (R.P.S., 1982, p. 36 et la note J. 'T KINT) rejette!'exception d'irrecevabilite que, se prevalant de la forme commerciale qu'elle avait adoptee, une intercommunale opposait a un recours en annulation dirige par une A.S.B.L. tierce contre une decision de son assemblee generale modifiant ses statuts. Selon l'arret, - et conformement a une jurisprudence constante du Conseil d'etat- l'intercommunale est une autorite administrative, meme si elle a adopte la forme d'une societe cooperative, avec pour consequence que les decisions unilaterales qu'elle prend comme telle sont susceptibles de recours devant la haute juridiction administrative, conformement a!'article 14 des lois coordonnees sur le Conseil d'etat (VANHAEVERBEEK, op. cit., no 43.- cfr dans le meme sens : C.E., 21 juin 1985, n ) Cette analyse est d'autant plus justifiee que la qualite d'autorite administrative, au sens de cette disposition legale, n'est pas reservee aux personnes de droit public et qu'elle peut etre attribuee a des personnes de droit prive, en fonction des effets et de la nature de l'acte litigieux, sans qu'elles perdent pour autant leur personnalite de droit prive (G. BoLAND, <<La notion d'autorite administrative)>, Adm. Publ., 1988, p Novelles, Droit administratif, t. IV, nos 938 et suiv., Speciale- R.O.J.B. - 4e trim. 1992

24 596 REVUE CRITIQUE DE JURISPRUDENCE BELGE ment no Avis de M. l'auditeur KREINS, precedant C.E., 15 fevrier 1989, Adm. Publ., 1989, p. 296). Le Conseil d'etat ajoute toutefois qu'il n'est pas competent <<dans les cas ou la possibilite existe pour les interesses d'introduire devant une juridiction de l'ordre judiciaire une action pouvant aboutir a un resultat equivalant a celui d'un recours pour exces de pouvoir >>. Tel est le cas par exemple si un associe- par exemple une commune- d'une societe cooperative intercommunale, agissant en cette qualite, pretend obtenir l'annulation des decisions d'une assemblee generale. Le droit commun des societes commerciales s'applique en pareil cascar aucune disposition legale speciale n'y deroge. La contestation doit alors etre introduite devant une juridiction de l'ordre judiciaire (8). SECTION 2. - LE CONTRAT DE SOCI:ETE 7. LA LIBERTE D 'ASSOCIATION. - Le principe de la liberte d'association, tel qu'il est garanti par!'article 20 de notre Constitution, est applicable en matiere civile et commerciale. Il implique que (<nul ne peut etre contraint de faire partie d'une association ou de ne pas en faire partie >> (article 1 er de la loi du 24 mai 1921 garantissant la liberte d'association. - Fr. DELPEREE, Droit constitutionnel, t. Ier, 2e ed., n 145). La Cour d'arbitrage n'est pas directement investie d'un controle a cet egard, mais la portee des pouvoirs qu'elle se reconnait sur la base de la loi speciale du 9 janvier 1989 (supra, n 5) l'a conduite a verifier, auregard des articles 6 et 6bis de la Constitution, si les restrictions que le Iegislateur apporte a cette liberte ne sont pas disproportionnees par rapport a l'objectif qu'il s'est fixe. Dans!'affirmative, les dispositions legales en cause contreviennent au principe de l'egalite et de la non-discrimination entre les Belges. (8) L'arret fait allusion a Ia competence du tribunal de commerce prevue par!'article 547, 1, du Code judiciaire. Il s'agit a notre avis d'une erreur, puisque cette disposition ne concerne que les << societes de commerce)) et non les societes civiles a forme commerciale. (FETTWEIS, La competence, n 314 et les ref.) Or, meme sous l'empire de la loi du 1 er mars 1922, il etait precise que les intercommunales empruntant la forme d'une societe commerciale ne perdaient pas leur caractere civil. R.O.J.B. - 4e trim. 1992

25 REVUE CRITIQUE DE JURISPRUDENCE BELGE 597 C'est ainsi que, par son arret precite du 13 octobre 1989 (supra, n 5 et les references aux commentaires que la decision a deja suscites), elle a considere que les dispositions de!'article 17 de la loi-programme du 30 decembre 1989 concernant les conditions d'exploitation des laboratoires de biologie clinique imposaient a ces derniers des contraintes disproportionnees par rapport aux objectifs recherches, en exigeant que toute personne effectuant des prestations de biologie clinique dans ces laboratoires soit associee dans la societe creee pour!'exploitation du laboratoire. Pareille entrave a la liberte d'association contrevenait aux articles 6 et 6bis de la Constitution selon la conception que s'en fait la Cour, a l'instar de la Cour de cassation et du Conseil d'etat (supra, no 5). La meme appreciation est portee par la Cour en ce qui concerne!'interdiction faite par le meme article 17 aux societes exploitant un laboratoire de devenir associees dans toute autre societe. 8. ELEMENTS SPECIFIQUES DU CONTRAT DE SOCIETE.. G:ENERALITES. - Se fondant sur l'article 1832 du Code civil, un arret de la Cour de cassation du 6 janvier 1983 (Pas., 1983, I, 527) rappelle la defmition classique de tout contrat de societe, qui suppose des apports de la part de chaque associe, dans le but de realiser et de partager les benefices qui resulteront de l'activite commune, ainsi que l'affectio societatis. En l'espece, les juges du fond avaient exclu que des conventions de rapprochement entre une societe de personnes a responsabilite limitee et une societe anonyme aient pu entrainer la formation entre elles d'une societe, au motif que la premiere n'avait pas ((cede)) ala seconde l'integralite de son patrimoine tant activement que passivement. Cette motivation pour le moins singuliere ne pouvait evidemment echapper a la censure de la Cour supreme. 9. LES APPORTS ET L'<< AFFECTIO SOCIETATIS>>. -Pour que l'on se trouve en presence d'apports, susceptibles de donner naissance a une societe entre leur auteurs, il faut que 1' objet des apports soit soumis aux aleas sociaux. Il n'y a pas d'apport et done pas de societe, mais un simple pret, lorsqu'une partie met a la disposition de l'autre une R.O.J.B. - 4e trim. 1992

26 598 REVUE CRITIQUE DE JURISPRUDENCE BELGE somme d'argent aux termes d'une convention prevoyant, outre le paiement d'un interet, le remboursement du capital en une ou plusieurs fois, independamment des resultats de l'activite au financement de laquelle l'argent est affecte et meme si cette activite s'avere deficitaire (Bruxelles, 21 mars 1987, R.P.S., 1988, p. 135, confrrmant comm. Bruxelles, 19 novembre 1985, R.P.S., 1988, p voy. egalement comm. Verviers, 22 octobre 1984, R.P.S., 1986, p. 76). La solution est tout a fait classique (Examen, 1967, p. 283, no 4). Le seul fait que le preteur re9oive des informations sur!'evolution des affaires de son cocontractant ne suffit pas pour que l'on puisse conclure a 1' existence d'une societe. De meme, le fait de mettre ala disposition d'une societe un terrain en vue de!'exploitation par celle-ci d'un camping n'implique pas un apport, meme en simple jouissance, des lors qu'en contrepartie, le proprietaire s'assure le paiement d'une redevance ou d'un loyer periodique independant du resultat de!'exploitation du camping. C'est ce que la Cour d'appel de Bruxelles a decide, par arret du 25 juin 1985 (R.P.S., 1987, p. 69), rappelant a cette occasion que la soumission necessaire de l'apport aux aleas sociaux s'applique aux apports en jouissance, aussi bien qu'aux apports en propriete, et que le risque porte alors sur la remuneration de la jouissance transferee ala societe (en ce sens : cass., 5 septembre 1961, Pas., 1962, I, 29 et la note W.G.). Selon l'arret, ni le fait que le bailleur etait actionnaire de la societe preneuse, ni le fait que la bail stipulait le nombre minimum d'emplacements a offrir aux campeurs, le loyer consistant en une redevance indexee de 2000 francs par emplacement de 100m 2, n'etaient en l'espece susceptibles de denaturer la convention de bail, des lors que la redevance etait due, alors meme que la societe preneuse ne serait pas parvenue a louer le moindre emplacement. Un arret de la Cour d'appel d'anvers du 12 avril 1984 (R.P.S., 1985, p. 41) exclut aussi qu'il ait pu exister, entre une societe anonyme acquereuse de terrains a lotir et le vendeur de ceux -ci, une societe en participation, en depit du fait que le prix de vente avait ete stipule payable en deux fois : une premiere partie du prix, immediatement exigible, etait calculee sur la base d'un prix unitaire au m 2, tandis qu'un solde devait R.O.J.B. - 4e trim. 1992

27 REVUE CRITIQUE DE JURISPRUDENCE BELGE 599 etre ulterieurement paye ((en tenant compte du prix de revente, soit avant soit apres le lotissement mais egal au quart du prix de revente, eventuellement diminue des frais d'installation >>. Pareille stipulation n'avait pas pour effet de transformer!'operation en un apport en societe car la propriete des terrains avait ete defmitivement transferee a la societe par l'effet du contrat. La clause revenait en realite a determiner le solde du prix d'une vente dans les conditions que prevoient les articles 1591 et 1592 du Code civil. L'arret ajoute que le fait que le paiement du solde du prix dependait de la revente des terrains par la societe acquereuse ne soumettait pas le vendeur aux aleas inherents a!'exploitation et ala revente de ceux-ci, puisqu'en aucune maniere!'operation ne pouvait se solder par un debit a sa charge. Cet argument est sans doute plus contestable dans la mesure ou les articles 1853 et 1855 du Code civil n'imposent pas que les associes contribuent de la meme maniere et dans la meme proportion aux pertes (VAN RYN, t. Ier, pe ed., n DE PAGE, t. V, 2e ed., n 71). La societe en participation aurait pu porter precisement sur les chances de plus-values en cas de revente. En tout cas,!'existence d'une societe etait exclue, pour le motif que, dans les circonstances de la cause, aucune affectio societatis n'avait anime les parties : a aucun moment!'intervention du vendeur dans la gestion de!'affaire ou le controle de celle-ci n'avait ete envisagee. L'espece illustre l'utilite reconnue par la doctrine classique au concept d'affectio societatis : en depit de sa formulation un peu vague et de son evidente inadequation pour caracteriser la societe unipersonnelle, il traduit, dans les categories traditionnelles de societes, la vocation de chaque associe a participer au fonctionnement de la societe, dans le respect des modalites que la loi ou les statuts organisent, et il permet de distinguer la societe d'autres contrats qui n'impliquent pas une telle vocation, alors pourtant qu'ils comportent une clause de participation aux benefices (VAN RYN, t. Ier, 1 re ed., n Examen, 1962, p. 60, no 3.- A. BENOIT-MOURY, Chronique precitee, Actualites du droit, 1991, p. 14, sub litt. d). Plusieurs autres decisions le placent d'ailleurs au premier rang des criteres sur la base desquels!'existence d'un contrat R.O.J.B. - 4e trim. 1992

28 600 REVUE CRITIQUE DE JURISPRUDENCE BELGE de societe entre les parties est appreciee : V oy. Liege, 22 fevrier 1980, R.P.S., 1980, p Civ. Bruxelles, 24 novembre 1987, J.T., 1988, p. 501, considerant que la communaute d'interets qui resulte du concubinage n'implique pas en soi une affectio societatis entre les concubins (dans le meme sens : cass. fr., 9 novembre 1981, R.P.S., 1982, p. 85). - Anvers, 19 janvier 1984, R.P.S., 1984, p. 273, qui precise que le fait qu'un associe detienne 249 des 250 parts sociales n'est pas en soi exclusif de l'affectio societatis. - Comm. Bruxelles, 21 juin 1988, J.L.M.B., 1988, p. 1327, opposant l'affectio societatis caracterisant une cooperative de taxis au lien de subordination existant entre une societe et des taximen engages sous contrat de travail. - Bruxelles, 8 juin 1984, R.P.S., 1985, p. 45 concernant!'interpretation d'une clause de remboursement aux associes de leurs creances dans une societe momentanee. 10. SIMULATION D'UNE SOCrE~TE SOUS LES DEHORS D'UN AUTRE CONTRAT. - Un arret de la Cour d'appel de Mons du 10 mai 1978 (Bull. Contr., 1980, 235) constate la simulation d'un contrat de societe en participation sous les dehors d'un bail - pour en deduire ensuite des consequences sur le regime fiscal des revenus per~ms par les associes. Un bail apparent avait ete conclu entre une S.P.R.L. et l'associe majoritaire de celle-ci, portant sur la jouissance et!'exploitation d'une carriere de craie. Une S.P.R.L. avait ete constituee par l'exploitant de cette carriere de craie, son epouse et un tiers, - lequel avait souscrit dix parts sur cinq cents. L'associe majoritaire avait cede la quasi-totalite de ses actifs non immobilises a la societe pour un prix comprenant l'apurement par la societe du passif de l'entreprise d'exploitation de la carriere. L'apport portait egalement sur la permission d'exploitation - element indispensable pour que la societe puisse poursuivre cette activite. D'autre part, l'associe majoritaire avait poursuivi, parallelement aux activites de la societe, une politique d'acquisition des proprietes entourant le terrain deja exploite, dans le but d'en permettre!'exploitation par la societe egalement lorsque la premiere carriere serait epuisee.

29 REVUE CRITIQUE DE JURISPRUDENCE BELGE 601 Selon la Cour, il en resulte une association en participation entre << le requerant et la societe (qui) se sont groupes en vue d'exploiter en commun les terrains appartenant au requerant >>. <<La societe, en s'engageant ales exploiter, a fait apport de son activite, tan dis que le requerant a fait apport no tamment de la permission d'exploiter une miniere qui lui avait ete octroyee anterieurement a la constitution de la societe, des connaissances qu'il avait acquises au cours de son exploitation personnelle et de la jouissance des terrains ainsi que des batiments et du materiellourd necessaires a l'entreprise >}. Encore fallait-il constater, pour etre complet, qu'il existait entre le requerant et sa S.P.R.L. une veritable intention de repartir des benefices et des pertes (supra, no 10). De maniere tres contestable a nos yeux, l'arret deduit cette premiere condition de la vocation de l'associe majoritaire a prendre part aux repartitions de benefices decidees par l'assemblee generale de la S.P.R.L. Quant ala contribution aux pertes, il n'est pas requis, enonce la Cour, qu'elle fasse l'objet d'une clause expresse qui en fixe les modalites. L'affirmation est exacte en droit (Examen, 1973, p. 326, no 3). Mais il faut que le principe de la contribution aux pertes soit etabli. Or, dans les circonstances concretes de la cause, la constitution d'une societe a responsabilite limitee pour }'exploitation des carrieres nous parait demontrer precisement que le requerant avait voulu echapper aux aleas de l'entreprise. 11. SANCTION APPLICABLE EN CAS D'ABSENCE D'UN ELE MENT ESSENTIEL.A TOUTE societe. - DEFAUT D'<< AFFECTIO SOCIETATIS>>. - Encore ne faut-il point se meprendre sur la sanction qui peut etre attachee a }'absence d'affectio societatis. Comme nous l'indiquons ci-dessus, le juge doit conclure a }'inexistence d'une societe entre des parties lorsque les circonstances de fait souverainement appreciees par lui ne font apparaitre aucune affectio societatis entre elles (voy. aussi J. RoNsE, De vennootschapswetgeving, 1973, no 198). La situation est totitefois differente pour les societes visees par l'article 13ter des lois coordonnees sur les societes commerciales, c'est-a-dire les societes anonymes, les societes privees a responsabilite limitee et les societes en commandite par R.O.J.B. - 4e trim. 1992

30 602 REVUE CRITIQUE DE JURISPRUDENCE BELGE actions (9). Celles-ci ne peuvent etre annulees que pour l'une des causes limitativement prevues par le texte. Or, nile defaut d'affectio societatis, nile caractere fictif ou simule de la societe ne sont compris parmi ces causes de nullite (Examen, 1981, p. 232, n 5). Tout au plus, le defaut d'affectio societatis pourrait-il indirectement justifier la nullite de la societe, par application de!'article 13ter, 4, dans la mesure ou tousles souscripteurs sauf un en auraient ete depourvus et auraient agi pour compte d'un seul fondateur (Examen, 1981, loc. cit , p. 291, n 11. -Contra : Fr. T'KINT, << L'extension de faillite >), cette Revue, 1981, p. 52, no 12, qui se refere, erronement nous semble-t-il, a l'autorite de M. L. SIMONT, R.P.S., 1974, p. 210, n 89). Meme en ce cas, la societe ne saurait toutefois etre consideree comme inexistante ou fictive compte tenu du nouveau regime des nullites institue par la loi du 6 mars 1973 (Examen, 1981, no 5 p. 232 et les ref.). Ces subtilites ne sont pas toujours aper~mes clairement par la jurisprudence. C'est ainsi qu'en vue de la determination du taux de la taxation du revenu retire par un associe de la cession de son portefeuille d'assurances a la S.P.R.L. qu'il venait de constituer avec un tiers, un arret de la Cour d'appel de Liege du 19 mai 1982 (R.P.S., 1983, p. 246) continue - a tort, comme le releve Mme BENOIT-MOURY (Chronique precitee, Actualites du droit, 1991, p. 16, sub litt. c) - a appliquer a pareille societe les principes de la simulation, pour la declarer inexistante a l'egard de!'administration des contributions directes. La Cour deduit des conditions du fonctionnement effectif de la societe que << les elements indispensables a tout contrat de societe>> faisaient defaut et que les conventions entre associes << ne peuvent avoir pour resultat, comme en l'espece, d'enlever au contrat de societe son caractere essentiel, c'est-a-dire!'interet commun entre les associes >>. De telles enonciations ne pouvaient justifier que la personnalite morale de la S.P.R.L. fut ecartee au profit du fisc. Elles n'auraient meme pas pu entrai- (9) Le meme regime est applicable aux societes cooperatives depuis la loi du 20 juillet 1991 : art. 144 nouveau des lois coord. R.O.J.B. - 4e trim. 1992

31 REVUE CRITIQUE DE JURISPRUDENCE BELGE 603 ner une annulation de la societe, sur la base de!'article 13ter, 40. De manif~re plus exacte, le President du tribunal de premiere instance de Bruxelles, siegeant en refere, decide qu'en depit de l'aveu fait, au cours d'une instruction penale, par l'un des deux fondateurs d'une S.P.R.L., de ce que l'autre associe n'etait qu'un prete-nom de complaisance, la societe n'en constitue pas moins << au regard de la loi une personne juridique distincte >> et qu'il appartiendra au juge competent d'en prononcer la nullite (28 mars 1985, R.P.S., 1986, p. 162). L'administration de la T.V.A. ne pouvait done deduire de cet aveu la fictivite ou!'inexistence de la societe, pour imputer a l'associe en cause les dettes de la S.P.R.L. Toutefois, contrairement ace qu'enonce la meme decision, ce n'est pas le caractere fictif de la societe qui est susceptible de justifier la nullite de la societe, mais, selon!'article 13ter, 4, des lois coordonnees sur les societes commerciales, la constatation de!'absence d'au moins deux fondateurs valablement engages. Une confusion analogue est faite par le tribunal de pe instance de Neufchateau (J. des saisies), lorsqu'il affirme, a propos d'une societe anonyme de droit luxembourgeois regie par une disposition analogue a!'article 13ter de la loi belge, et en se referant d'ailleurs au jugement precite du tribunal de 1 re instance de Bruxelles, que << la personnalite juridique distincte d'une societe subsiste tant qu'une decision judiciaire n'en a pas reconnu le caractere fictif et partant la nullite >> (16 septembre 1986, R.P.S., 1987, p. 269). On souscrit en revanche sans reserve a un autre considerant de la meme decision, selon lequel <<dire qu'une societe est fictive, c'est reconnaitre qu'elle n'existe pas; or!'article 13ter des lois coordonnees sur les societes commerciales ne prevoit pas!'absence d'affectio societatis, comme etant une cause de nullite d'une societe anonyme>>. Dans une espece originale ou une compagnie d'assurances, pour refuser sa couverture en execution de!'assurance de la responsabilite civile du proprietaire d'un camion, invoquait que la victime de!'accident etait en realite une societe anonyme fictive derriere laquelle se dissimulait son assure, le tribunal de commerce rappelle en revanche, de maniere irrepro-

32 604 REVUE CRITIQUE DE JURISPRUDENCE BELGE chable, que (< la nullite de la societe ne pourrait resulter que d'une decision judiciaire et n'aurait de toutes fa<;ons pas d'effet retroactif >> et << qu'il est aussi unanimement reconnu depuis la loi du 6 mars 1973 que le caractere fictif d'une societe resultant le plus souvent de }'absence d'affectio societatis ne constitue plus une cause de nullite car }'article 8 (de la directive communautaire du 9 mars 1968 dont!'article 13ter est inspire), soit!'article 13ter nouveau des lois coordonnees sur les societes commerciales, ne la reprend pas parmi les quatre causes qu'il enumere limitativement )), Mais, comme le precise le jugement sans toutefois donner de suite concrete a cette reserve, eu egard aux circonstances de l'espece, les regles nouvelles n'excluent pas que la decheance du benefice de la personnalite morale puisse etre decretee sur la base d'autres fondements, telle que la theorie de l'abus de droit (supra, n 3. - Examen, 1981, p. 273, n X. DIEux, <<La responsabilite civile des associes en matiere de societes commerciales >>, in La responsabilite des associes, organes et preposes des societes (1991), p. 57, specialement no 3). 12. D:EFAUT D'<< AFFECTIO societatis>>. - SouscRIPTION FICTIVE ou SIMULEE.- DROIT PENAL.- Comme expose dans la precedente chronique (Examen, 1981, p. 234, no 6 et les references), la souscription de complaisance au capital d'une societe est susceptible de constituer un faux penalement punissable. Les poursuites de ce chef sont le plus souvent dirigees contre les personnes qui acceptent de preter leur nom en vue de la constitution d'une societe, alors qu'elles ne sont animees d'aucune affectio societatis et qu'il n'existe en realite qu'un seul fondateur (supra, n 8). Mais, selon une doctrine maintenant bien etablie, cette interposition de personnes n'est pas, en soi, un faux punissable (voy. en particulier J.-L. DuPLAT, <<Aspects nouveaux du droit de la banqueroute, du droit penal comptable et du droit penal des societes >>, in Evolution recente du droit commercial et economique (1978), p. 412 et suiv. - Fr. RoGGEN, <<Faux fiscal, faux penal, usage et prescription>>, in Droit penal des affaires (1991- Ed. du Jeune Barreau de Bruxelles), p Adde Anvers, 5 decembre 1986, confirmant corr. Anvers, 23 juin 1986, F.J.F., 1987, no 87/46, p. 84). Conformement au droit

33 REVUE CRITIQUE DE JURISPRUDENCE BELGE 605 commun dont la Cour de cassation a rappele encore recemment la teneur,!'infraction penale de faux suppose que!'alteration, materielle ou intellectuelle, de la verite s'accompagne d'une intention frauduleuse ou d'une intention de nuire et qu'elle soit susceptible de porter prejudice a des tiers (cass., 27 septembre 1988, Pas., 1989, I, Comp. en France, M. DELMAS-MARTY, Droit penal des affaires, t. II, p. 65 et suiv.). Faisant application de ces principes, un jugement du tribunal correctionnel de Bruxelles considere que les conditions du faux penal sont reunies lorsque la souscription de complaisance a pour but de soustraire aux investigations du fisc et, par voie de consequence, a une eventuelle taxation, l'oi igine des deniers au moyen desquels la pretendue societe est constituee, ainsi que les revenus que les activites exploitees sous le couvert de celles-ci sont susceptibles de produire (25 juin 1986, R.P.S., 1986, p. 234). Le meme tribunal avait deja fixe sa jurisprudence en ce sens, dans un jugement du 19 decembre 1980 (R.P.S., 1981, p. 53), relaxant les prevenus en depit de leur aveu du caractere factice de la souscription de l'un d'entre eux, au motif que << le seul fait de ne pas avoir ete anime de l'intention de constituer une societe ne constitue pas, dans le chef des comparants complaisants' l 'intention frauduleuse de procurer a soi-meme ou a autrui un avantage illicite» et <<que le caractere fictif d'une societe n'est pas en soi de nature a causer prejudice aux tiers>>. 13. PARTAGE DES BENEFICES ET DES PERTES. - PROHIBI TION DES PACTES LEONINS. - Le partage entre associes des benefices ou des pertes qui resulteront de l'activite sociale est, lui aussi, un element essentiel a toute societe (supra, n 1. - Adde cass., 21 avril 1983, Pas., 1983, I, Liege 19 mai 1982, R.P.S., 1983, p. 246, precite), etant entendu que le benefice peut consister dans l'economie d'une perte (VAN RYN, t. Ier, pe ed., n P. COPPENS, note precitee sous Anvers, 4 decembre 1984, R.P.S., 1986, p A. BENOiT MouRY, Chronique precitee, Actualites du droit, 1991, p. 13, sub litt. c). Est en consequence interdite, aux termes de l'article 1855, al. 2, du Code civil, la clause dite <<leonine>> qui attribue a l'un R.O.J.B. - 4e trim. 1992

34 606 REVUE CRITIQUE DE JURISPRUDENCE BELGE des associes la totalite des benefices, ou celle qui affranchit un associe de toute contribution aux pertes (VAN RYN, t. Ier, pe ed., n DE PAGE, t. V, 2 6 ed., n Examen, 1967, p. 285, n 5). Tel n'est pas le cas, decide le tribunal de commerce de Verviers par un jugement du 22 octobre 1984 (R.P.S., 1985, p. 76, precite), de la stipulation suivant laquelle l'un des deux associes, detenteur de la moitie des parts emises par une S.P.R.L. constituee en vue de la realisation d'operations de lotissement, s'assure le versement d'un interet sur sa mise de fonds indexee, outre le dividende en proportion de sa participation au capital social. D'une part,!'article 1855 du Code civil ne prohibe pas les clauses prevoyant une repartition inegalitaire des benefices. Or, en l'espece, l'autre associe << gardait sa vocation au partage des benefices pour autant que ceux-ci depassent les 12% accordes par priorite >> au beneficiaire de la clause. D'autre part, l'associe demeurait expose aux pertes, dans la mesure ou la clause ne lui assurait pas le remboursement de son apport quels que fussent les resultats sociaux (J. LIMPENS, note sous Gand, 22 janvier 1944, cette Revue, 1947, p. 248). Suivant!'analyse classique, la violation de!'article 1855 du Code civil entraine non seulement la nullite de la clause leonine mais aussi la nullite de la societe tout entiere, puisque la repartition entre tous les associes des benefices et des pertes tient a I' essence du contrat de societe (VAN RYN, t. Ier, 1 reed., n 337). L'article 13ter des lois coordonnees sur les societes commerciales deroge a ce principe en matiere de societes anonymes, de societes privees a responsabilite limitee et de societe en commandite par actions de meme que!'article 144 nouveau de ces memes lois en matiere de societes cooperatives. Les clauses leonines sont, dans le cas de ces societes, simplement reputees non ecrites. Selon!'opinion traditionnelle, la prohibition qu'edicte!'article 1855 du Code civil interesse l'ordre public (DE PAGE, t. V, 2e ed., no 70- Examen, 1967, p. 385, no 5). Un arret de la Cour d'appel de Bruxelles du 3 decembre 1986 le confirme (R.P.S., 1987, p. 45 avec la note D. VAN GERVEN, confrrmant comm., 6 janvier 1982, R.P.S., 1982, p Supra, n 9),

35 REVUE CRITIQUE DE JURISPRUDENCE BELGE 607 rejetant ainsi la these defendue par MM. RoNSE, NELISSEN GRADE et VAN HuLLE, selon laquelle il s'agirait d'une disposition simplement imperative, avec pour consequence que la nullite qui la sanctionne ne serait que relative ( << Overzicht van rechtspraak - Vennootschappen >>, T.P.R., 1986, p. 859, no 4. - Sur le concept de loi imperative par opposition a l'ordre public : voy., outre l'etude de M. le conseiller MEEUS, << La notion de loi imperative et son influence sur la procedure en cassation et I' office du juge >>, cette Revue, 1988, p P. VAN 0MMESLAGHE, << Examen de jurisprudence- Les obligations>>, cette Revue, 1986, p. 95, nos 37 et suiv. et les ref. X. DIEUX, << Le contrat- Objet et instrument de dirigisme >>, in Les obligations contractuelles [1984], p. 259). 14. APPLICATION AUX OPERATIONS DE <<PORTAGE>>. - Par son arret precite du 3 decembre 1986 (R.P.S., 1987, p. 45 et la note D. VAN GERVEN. - Cette Revue, 1989, p. 553 et la note CoiPEL, << Reflexions sur le portage d'actions au regard de!'article 1855 du Code civil- Le porteur et le lion>>.- Voy. aussi comm. Bruxelles [ref.], 8 fevrier 1988, R.D.C.B., 1988, p. 540, specialement p. 548) (10), la Cour d'appel de Bruxelles a fait une exacte application de ces principes a une operation complexe dont l'objet reel etait de soustraire aux aleas sociaux une souscription a une augmentation de capital. En l'espece, une importante augmentation de capital en numeraires devait etre decretee, en vue de moderniser!'instrument industriel d'une societe, mais l'un des souscripteurs ne disposait pas des liquidites necessaires pour couvrir!'integralite de sa part. La S.N.I. avait accepte de prendre en consequence une participation dans le capital, a concurrence du montant pour lequel ce souscripteur n'aurait pas pu suivre les autres actionnaires. Dans les jours precedant l'assemblee generale, la S.N.I. avait obtenu d'une societe a portefeuille un engage:r;nent d'acheter a terme toutes les actions qu'elle allait souscrire, pour un prix fixe a la valeur de souscription augmentee d'un interet. Cette societe avait d'autre part consenti au souscripteur auquella S.N.I. avait accepte de se substituer (10) Un pourvoi a ere dirige contre cet arret mais les parties ont mis fin au litige avant que Ia Cour de cassation se soit prononcee.

36 608 REVUE CRITIQUE DE JURISPRUDENCE BELGE pour partie, une option d'achat portant sur ces memes titres, a la levee de laquelle ce dernier s'etait engage, par une autre convention du meme jour et aux memes conditions de prix. L'autre actionnaire qui devait prendre part a!'augmentation de capital garantissait!'execution de cet engagement. Confirmant les appreciations du premier juge (comm.. Bruxelles, 6 janvier 1982, R.P.S., 1982, p. 58, precite), la Cour d'appel a considere que ces conventions, apparemment distinctes les unes des autres puisqu'elles n'etaient pas conclues entre les memes parties et qu'elles avaient ete convenues a des dates differentes, dissimulaient en realite une seule et meme operation aux termes de laquelle un actionnaire affranchissait la S.N.I. de toute contribution aux pertes sociales. On ne se trouvait done pas en presence de!'assurance par un tiers de I' apport en cause, ce qui est traditionnellement autorise ( cass. fr., 9 juin 1890, D., 1890, I, 409 et la note PLANIOL. - Note CorPEL precitee, specialement no Voy. aussi cass. fr., 10 fevrier 1981, Rev. Soc., 1982, p. 98 et la note MERLE), mais d'un veritable pacte leonin prohibe comme tel par!'article Conformement a la doctrine classique (Examen, 1967, p. 285, n 35. -DE PAGE, t. V, 2e ed., n R.P.D.B., V 0 Societe [Oontrat de], nos 354 et HOUPIN et Bos VIEUX, Traite, t. Ier, 7e ed., n PLANIOL et RrPERT, t. XI, n Pre et KREHER, t. Ier, nos 56 et suiv. - LYON-CAEN et RENAULT, t. II, n 46.- EsCARRA et RAULT, t. Ier, no Hourn, << Chronique >>, R.T.D.Co., 1979, p BASTIAN, note sous cass. fr., 9 avril 1941, J.O.P., n SCHMIDT, note sous Paris, 30 octobre 1976, Rev. Soc., 1977, p Encycl. Dalloz, Societes, V 0 Societe, par DIDIER et SAINT-ALARY, n 58), la Cour decide que!'article 1855 du Code civil prohibe non seulement les clauses leonines introduites dans les statuts, mais plus generalement toutes les conventions, meme extrinseques aux statuts, anterieures ou posterieures a ceux-ci, par lesquelles un associe affranchit un autre de toute participation aux pertes sociales. Cet arret - quoiqu' en tous points conforme aux solutions les plus classiques - a suscite une certaine emotion parmi les praticiens.

37 REVUE CRITIQUE DE JURISPRUDENCE BELGE 609 N ombreux sont en effet ceux qui y voient une con damnation de toutes les operations de <<portage>>, c'est-a-dire des operations aux termes desquelles une personne accepte, moyennant remuneration, de detenir temporairement la propriete d'actions, soit a!'occasion de la fondation de la societe, soit a!'occasion d'une augmentation de capital, soit a la faveur d'une vente, en s'assurant, aux termes de dispositions contractuelles qui s'analysent le plus souvent en une option de vente (<<put>>), qu'elle pourra, a l'echeance convenue, retroceder les titres et en recuperer le prix d'acquisition ou de souscription, eventuellement augmente d'un interet (D. SCHMIDT, << Les operations de portage de titres de societes >>,in Les operations fiduciaires [1984], p. 29). Il s'ensuit que le porteur, au terme de!'operation de rachat ne subit pas les pertes eventuellement accusees par les titres et que l'on peut se demander dans queue mesure cette convention n'est pas contraire a!'article 1855 du Code civil. La question est certes delicate et elle fait l'objet d'appreciations discordantes de la part des chambres commerciales et civiles de la Cour de cassation de France (voy. note Tl. FoRSCHBACH, sous cass. fr., 10 janvier 1989, D., 1990, J., p. 250). Nous croyons pour notre part que l'arret de la Cour d'appel de Bruxelles precite ne condamne toutes les operations de portage. Cet arret ne concerne que les conventions conclues entre souscripteurs, a!'occasion de la constitution de la societe ou d'une augmentation de son capital, lorsqu'elles ont pour effet de garantir a l'un d'entre eux qu'il recuperera sa mise quels que soient les resultats des activites sociales. De telles conventions sont incompatibles avec la notion meme de contrat de societe ou, dans l'analyse institutionnelle de la societe anonyme, avec les notions de souscription et d'apports (supra, no 9). Leur nullite est parfaitement justifiee dans la conception actuelle de la societe. Mais ces regles ne nous paraissent pas devoir s'appliquer aux transactions portant sur des actions deja emises par des societes anonymes, qu' elles soient con clues entre actionnaires ou avec des tiers. L'arret de la Cour de Bruxelles ne traite en aucun cas de cette hypothese. L'achat d'actions se realise en R.O.J.B. - 4e trim. 1992

38 610 REVUE CRITIQUE DE JURISPRUDENCE BELGE marge de!'institution (11) et il n'en modifie aucun des elements essentiels sur le plan juridique. Dans des cas frequents, particulierement lorsque le titre est cote en bourse, l'achat d'actions est, d'autre part, lie a des mobiles de speculation a court terme, totalement etrangers au fonctionnement de la societe, et que notre droit ne prohibe pastels quels. La pratique du report, en tant qu'elle comporte une revente a terme par le reporteur au reporte, a un prix superieur au prix d'acquisition (VAN RYN et HEENEN, t. IV, 2 6 ed., nos 286 et 289) devrait d'ailleurs etre condamnee, si l'on devait etendre!'application de!'article 1855 du Code civil aux operations par lesquelles l'acheteur s'assure du rachat des titres par le vendeur a un prix au moins egal au prix d'acquisition. Nul n'a jamais rien soutenu de tel (12) et nous n'apercevons pas les raisons qui commanderaient qu'un sort different soit reserve aux operations de portage des lors qu'elles n'ont pas pour objet d'assurer a un souscripteur une garantie contre tout risque de perte emanant d'un autre actionnaire. Dans le substantiel commentaire qu'il a consacre a l'arret de la Cour de Bruxelles que nous analysons (op. cit., cette Revue, 1989, p. 553), M. Coipel suggere la reception par notre droit d'une conception restrictive de!'article 1855 du Code civil, fondee sur une interpretation teleologique de la volonte du legislateur. Selon lui, la prohibition des pactes leonins s'expliquerait par le souci d'eviter le triomphe de la loi du plus fort. II s'agirait d'une prefiguration de la theorie de la lesion qualifiee,!'article 1855 presumant, mais d'une maniere qui n'est pas irrefragable, que la clause leonine est le resultat d'un abus des passions, des besoins, des faiblesses ou de!'inexperience d'autrui (voy. specialement les nos 32 et suiv. de l'etude precitee). (ll) Elle n'implique en particulier aucun apport nouveau et ne modifie pas les apports anterieurement consentis. Or, ce que Ia loi defend, ecrivent avec precision BAu DRY-LA,CANTINERIE et BARDE (De la societe, du pret et du depot, 3 6 ed., n 279) c'est de convenir qu'un associe retirera son apport intact d'une societe dont les operations se soldent en definitive par un deficit. - (C'est nous qui soulignons). (12) Adde!'arrete royal du 10 avril 1991 relatif a Ia creation et a!'organisation de Ia Bourse beige des <<futures >> et des << options>>, qui organise un marche presupposant que }'engagement de vendre ou d'acheter a terme un actif fmancier (en ce compris des actions) a un prix predetermine n'est pas contraire a!'article 1855 du Code civil.

39 REVUE CRITIQUE DE JURISPRUDENCE BELGE 611 La proposition est ingenieuse, mais elle nous parait reposer sur une interpretation de la volonte du legislateur pour le moins divinatoire. L'application du critere de l'abus des passions, des faiblesses, des besoins ou de!'inexperience d'autrui, propre a la lesion qualifiee (voy. pour plus de details, VAN 0MMESLAGHE, << Examen de jurisprudence- Les obligations>>, cette Revue, 1986, p. 78, n , p. 452, no 17), nous parait d'autre part quelque peu forcee dans le contexte habitue! des operations de portage qu'illustre parfaitement l'espece commentee, et tres eloignee des realites de la pratique des affaires. Comment, de plus, une societe pourrait-elle subsister entre le (( porteur )) et les autres actionnaires, a supposer que la presomption d'abus soit renversee? Pour l'admettre, notre savant collegue est oblige de remettre en cause, non seulement le caractere d'ordre public de!'article 1855 du Code civil, mais en outre le principe selon lequel le partage des benefices et des pertes est un element essentiel du contrat de societe (op. cit., n 33). Sa demonstration a cet egard nous a toutefois laisses perplexes (13). 15. Socd~TE D'UNE PERSONNE.- La loi du 14 juillet 1987, abondamment commentee (14), a introduit dans notre droit la societe d'une personne. Selon!'article 1832 du Code civil, dans sa redaction nouvelle, une societe peut desormais etre consti- (13) En <1 l'absence d'abus d'une position de force, ecrit notre eminent collt3gue, il faut faire confiance au contrat et considerer que les deux parties y trouvent quelque part leur compte. Telle est la conception liberale dans laquelle baigne le Code civil : la loi du contrat est censee realiser la meilleure allocation des ressources. >> Cette conception du partage des benefices et des pertes nous parait tres abstraite et elle ne permet guere de discerner la specificite du contrat de societe. (14) Voir, outre les etudes rassemblees sous la direction de H. MICHEL, in La S.P.R.L. unipersonnelle- Approche tmorique et pratique [1988), J. VANRYN, <(La societe unipersonnelle dans le cadre du droit des societes et du droit de l'entreprise >>, J.T., 1988, p H. BRAECKMANS et E. WIJMEERSCH, De eenpersoonsvennootschap (1988). - J. LIEVENS, De eenpersoons-b.v.b.a. (1988). - J.-P. BoURS et alii, De l'entreprise individuelle a la societe- Les raisons d'un choix (1987). - M. WIJCKAERT, etude au T.R. V., 1988, p Th. AFSCHRIFT et L. DE HEMPTINNE, <1 La loi du 14 juillet La societe unipersonnelle >>, J.T., 1987, p J.-P. BoURS, <I La societe d'une personne a responsabilite limitee >>, J.T., 1987, p H. MICHEL, <1 Projet de loi concernant la societe unipersonnelle a responsabilite limitee >>, R.N.B., 1987, p J.-P. RENS, ((La societe d'une personne a responsabilite limitee >), T. Not., 1987, p P. MAEYAERT, <I Projet de loi concernant la societe d'une personne a responsabilite limitee >>, R.D.O.B., 1987, p Dans la litterature anterieure a I' adoption de la loi : J. VANRYN, (( L'entreprise d'une personne a responsabilite limitee >>, J.T., 1985, p P. VAN 0MME SLAGHE, (I L'entreprise d'une personne a responsabilite limitee- Quels choix fondamentaux? >>,Melanges Ronse, p B. VAN BRUYSTEGHEM, <I L'entreprise d'une personne a responsabilite limitee >>, R. W., , col

40 612 REVUE CRITIQUE DE JURISPRUDENCE BELGE tuee, non seulement par deux ou plusieurs personnes, mais aussi, <<dans les cas prevus par la loi, par acte de volonte d'une personne qui affecte des biens a l'exercice d'une activite determinee )), Il est ainsi devenu loisible a quiconque d'affecter une fraction de son patrimoine a!'exploitation d'une activite civile ou commerciale, sous la forme d'une societe privee a responsabilite limitee (article 116, al. 2, des lois coordonnees sur les societes commerciales). Sous reserve de!'application d'autres lois speciales (15), la constitution en solitaire d'une societe commerciale sous une autre forme demeure done interdite et, selon un arret bien connu de la Cour de cassation du 13 janvier 1978 (Pas., 1978, I, 543 et la note A.T. - Examen, 1981, p. 460, no 109), il s'agit meme d'une interdiction qui touche a l'ordre public interne, encore que la reconnaissance dans notre droit des societes unipersonnelles etrangeres ne soit plus contraire a notre ordre public international (meme arret. - voy. aussi Ph. DE PAGE et B. VAN DE WALLE DE GHELCKE, << Les personnes morales etrangeres et l'ordre public international belge >>, R.P.S., 1979, p L. GANSHOF, << Vers une societe d'une personne en droit belge >>, cette Revue, 1979, p. 44). Pour que la question de la reconnaissance d'une personne morale etrangere se pose en ces termes, il faut toutefois que l'on se trouve en presence d'une personne morale unipersonnelle dont la nature correspond a celle d'une societe selon la conception de notre droit (supra, n 1). Une << familienstiftung >> valablement creee sous l'empire du droit du Liechtenstein ne repond pas a cette condition et son regime juridique ne saurait done etre apprecie au regard du droit belge des societes. La Cour d'appel de Bruxelles le decide tres exactement, dans un arret du 28 fevrier 1985 (R.P.S., 1985, p. 191), rendu en matiere fiscale mais a la lumiere de considerations tout a fait generales tenant a la nature de l'objet de la fondation en cause. C'est ce dont ne s'etaient pas aper~ms les juges (15) Voy. aussi }'article 3Bexies de Ia loi du 2 avril 1962 telle que modifiee par Ia loi du 4 aout 1978 qui autorise Ia S.N.I. a creer des filiales specialisees unipersonnelles (G. KEUTGEN, << Les entreprises publiques et le droit des societes )>, in Melanges Ronse, p Adde les articles 37 et suivants de Ia loi du 21 mars 1991 portant reforme de certaines entreprises publiques autonomes (Bupra, no 6).

41 REVUE CRITIQUE DE JURISPRUDENCE BELGE 613 du fond dans!'affaire qui a donne lieu a l'arret precite de la Cour de cassation (Examen, 1981, loc. cit.). 16. CAUSE ILLICITE ET FRAUDE PAULIENNE.- La question de savoir si la cause illicite, a l'instar de <<I' objet illicite ou contraire a l'ordre public)) expressement vise par le texte fran ~ais de!'article 13ter, est une cause de nullite des societes visees par cette disposition continue a faire l'objet d'hesitations (Examen, 1981, p. 239, no 8 et les references. - Adde L. SIMONT' (< Les regles relatives a la publicite, aux nullites et aux actes accomplis au nom d'une societe en formation>>, in Les societes commerciales, 1985, Editions du Jeune Barreau de Bruxelles, p. 59, specialement n COIPEL, Dispositions communes a toutes les formes de societes commerciales, nos 60 et suiv.). II existe une difference entre le texte fran~ais et le texte neerlandais de la loi sur ce point, ce dernier visant non pas <<I' objet social>> mais << het werkelijke doel >> (voy. outre les etudes citees ci-dessus, RONSE, De vennootschapswetgeving, 1973, nos 156 et suiv.). Mais l'on ne saurait en inferer que la cause illicite doit etre comprise parmi les cas de nullite limitativement enumeres. La cause s'entend en effet subjectivement des mobiles determinants poursuivis par les parties (VAN 0MMESLAGHE, << Observations sur la theorie de la cause dans la jurisprudence et la doctrine modernes >>, cette Revue, 1970, p. 328), meme si ceuxci peuvent, selon les circonstances, se confondre avec la seule expectative par chaque partie de la prestation promise par I' autre (VAN 0MMESLAGHE, << Examen de jurisprudence - Les obligations>>, cette Revue, 1986, p. 87, n 31.- P.-A. FoRIERS, << L'objet et la cause du contrat >>, in Les obligations contractuelles [1984], p. 138). Bien entendu, il n'y a pas d'inconvenient a prononcer la nullite de la societe lorsque le mobile illicite se confond avec l'objet illicite, mais dans les autres cas, la nullite nous parait exclue, compte tenu des objectifs poursuivis par les auteurs de la directive et par le Iegislateur beige (Examen, 1981, loc. cit.). N ous souscrivons done sans reserve aux critiques formulees par M. L. SIMONT a l'encontre d'un arret de la Cour d'appel d'anvers du 14 mars 1983 (R.P.S., 1983, p. 308), qui annule

42 614 REVUE CRITIQUE DE JURISPRUDENCE BELGE une societe anonyme au motif qu'elle avait ete constituee, dans le but illicite de soustraire le patrimoine des associes aux actions de leurs creanciers, sans constater que l'objet de la societe, c'est-a-dire les activites sociales, statutaires ou effectives, de la societe etait lui-meme illicite. Cette solution ne devrait plus faire 1' objet d'hesitations a l'avenir, puisque la Cour de justice l'a elle consacree, par arret du 13 novembre 1990 (R.D.O.B., 1991, p. 875 et la note Col PEL). Selon cette decision, les mots << l'objet de la societe>>, tels qu'employes par!'article 11 de la directive du 9 mars 1968 (( doivent etre compris comme se referant a l'objet de la societe, tel qu'il est decrit dans l'acte de constitution ou dans les statuts >>. Il s'ensuit que << la declaration de nullite d'une societe ne pourrait pas resulter de l'activite qu'elle poursuit effectivement, telle que par exemple, spolier les creanciers des fondateurs». M. Coipel, tout en approuvant cette decision, se demande (( s'il est heureux qu'une societe puisse, sans etre menacee dans son existence, se livrer a une activite illicite des l 'instant ou ses statuts sont pudiquement rediges. N e faudrait-il pas, pour suit-il, prevoir en pareil cas une possibilite de dissolution com me c 'est le cas en droit hollandais ou encore en matiere d'a.s.b.l.? >> (note citee). Tout correctif n'est en realite pas exclu par notre droit. D'une maniere generale, la constitution d'une societe a responsabilite limitee a d'ailleurs pour but et pour effet une division patrimoniale que la loi autorise. Mais les creanciers d'un associe peuvent diriger une action paulienne contre les apports consentis a la societe par leur debiteur, mais ils doivent, a cette fin, etablir dans le chef de ce dernier une fraude au sens de!'article 1167 du Code civil, - la fraude ne resultant pas ipso facto de la division patrimoniale inherente a la forme de la societe choisie (Examen, 1973, p. 333, no 7.- CoiPEL, op. cit., n 67-3). Un arret de la Cour d'appel d'anvers du 9 novembre 1981 (R. W., , col. 442) fait une application, implicite mais correcte, de ces principes, en declarant recevable et fondee l'action en distraction dirigee par une S.P.R.L. a l'encontre d'une saisie mobiliere pratiquee sur des biens dont elle se pretendait proprietaire, au motif qu'il n'etait pas prouve que la societe avait ete constituee par la saisie dans le dessein de

43 REVUE CRITIQUE DE JURISPRUDENCE BELGE 615 soustraire les biens saisis au recours de ses creanciers. La Cour constate en l'espece que les creances justifiant la saisie etaient nees plus de cinq ans apres la fondation de la societe en sorte qu'aucun lien ne pouvait exister entre les deux (sur la condition d'anteriorite de la creance par rapport a l'acte juridique attaque selon!'article 1167 du Code civil : voy. X. DIEUX, << Le contrat, Objet et instrument de dirigisme >>, in Les obligations contractuelles [1984], p. 253, no 14). CHAPITRE II. - LES SOCIETES COMMERCIALES DEPOURVUES DE LA PERSONNALITE JURIDIQUE. LA SOCIETE MOMENTANEE ET LA SOCIETE EN PARTICIPATION 17. LA societe MOMENTANEE.- OBJET DETERMINE.- La societe momentanee est reservee aux groupements constitues en vue de la realisation d'une ou de plusieurs operations << determinees >> (article 172 des lois coordonnees sur les societes commerciales). Selon une sentence arbitrale rendue le 15 janvier 1985, l'on ne saurait done voir une societe momentanee dans une convention generale de collaboration d'une duree de cinq annees visant a (< promouvoir' etudier' preparer et negocier' et eventuellement realiser des usines de production de peintures >>, dans les pays en voie de developpement. Il s'agit plutot d'un contrat cadre en execution duquel des contrats de societe momentanee devaient etre conclus (Entr. et Dr., 1986, p. 231). Dans d'autres situations, l'exercice d'une activite commerciale, de maniere durable et ostensible, sous le couvert d'une <<societe momentanee >> peut justifier la degenerescence de cette societe en societe en nom collectif irreguliere, par application de la theorie des cadres Iegaux obligatoires (infra, n 8 46 et suiv.). 18. SOCIETE MOMENTANEE (suite). -ABSENCE DE PERSON NALITE. - L'article 192 des lois coordonnees sur les societes commerciales en once une consequence de 1' absence de person- R.O.J.B. - 4e trim. 1992

44 616 REVUE CRITIQUE DE JURISPRUDENCE BELGE nalite juridique de la societe momentanee, lorsqu'il dispose que << les associes momentanes seront assignes directement et individuellement >>. Un jugement du tribunal de commerce de Liege considere que << le non-respect de cette disposition, a defaut de texte formel, ne peut entrainer la nullite de!'exploit introductif d'instance >>, dans une espece ou le demandeur avait assigne une association momentanee, comme telle, aux cotes d'une societe anonyme (18 janvier 1980, R.P.S., 1980, p. 161). La surseance est ordonnee pour permettre au demandeur d'appeler ala cause les associes. Cette indulgence ne s'impose cependant pas et le tribunal peut decreter sans attendre l'irrecevabilite de!'action erronement introduite contre (< la societe momentanee >> (en ce sens comm. Courtrai, 19 janvier 1988, T.R. V., 1989, p. 66 avec les substantiels commentaires de S. STIJNS et' P. CALLENS). Pour qu'un associe auquel on reclame!'execution d'une obligation contractee dans le cadre de!'exploitation de la societe momentanee, puisse etre condamne, il faut, soit que!'obligation resulte de la loi, soit qu'elle provienne d'un acte accompli par une personne qui avait le pouvoir d'engager les associes. Le seul fait qu'un associe contracte une dette dans le cadre de!'exploitation de la societe n'a pas pour effet d'engager les autres s'il ne dispose du mandat necessaire a cette fin (V. SI MONART, L'association momentanee [1989], no 37). Mais la theorie de l'apparence permet souvent d'echapper ace formalisme si les conditions en sont reunies. C'est ce qu'a decide le tribunal de commerce de Courtrai, dans le jugement precite, faisant application de la theorie moderne de l'apparence, detachee de toute faute aquilienne et fondee sur la seule erreur legitime du tiers. II admet que le mari d'une associee ait pu engager les associes, dans le cadre de l'activite sociale en depit de!'absence de mandat, des lors que, selon une pratique qui demeure repandue dans notre pays, son nom figurait comme celui de son epouse dans la denomination sous laquelle les activites sociales etaient exploitees (sur la theorie de l'apparence, voy., outre la note precitee de Mme STIJNS et de M. CALLENS et les references qu'elle comporte aux etudes nombreuses en la matiere.- P. VAN 0MME SLAGHE, << L'apparence comme source autonome d'obligation et

45 REVUE CRITIQUE DE JURISPRUDENCE BELGE 617 le droit beige>>, Rev. dr. int. et dr. comp., 1983, P. A. FoRIERS, << L'apparence, source autonome d'obligations ou application du principe general de!'execution de bonne foi (a propos de l'arret de la Cour de cassation du 20 juin 1988) >>, J.T., 1989, p Comp. J. VANRYN et X. DIEUX, <<La bonne foi dans le droit des obligations>>, J.T., 1991, p. 289). Vice versa, la societe momentanee en tant que telle ne devient pas titulaire des creances qui resultent de!'exploitation des activites sociales et elle ne saurait etre partie demanderesse a l'instance en recouvrement de ces creances. Dans un jugement du 28 avril1982, le tribunal de commerce de Mons rejette cependant tout formalisme excessif a cet egard et re<;oit l'action, apres avoir constate que la redaction de!'assignation revelait clairement l'identite des associes, en sorte qu'il etait permis d'en deduire que l'action etait introduite par eux (Entr. et Dr., 1984, p. 1). 19. SOCI:ETE MOMENTANEE (suite).- SOLIDARITE ENTRE LES ASSOCIES. - CoNSEQUENCES PROCESSUELLES. - U n arret de la Cour d'appel d'anvers justifie par la solidarite passive qui existe entre les associes momentanes, en vertu de!'article 175 des lois coordonnees sur les societes commerciales,!'application de I' article 6, 1, de la Convention de Bruxelles du 27 septembre 1968 concernant la competence judiciaire et!'execution des decisions judiciaires en matiere civile et commerciale (12 decembre 1979, R.D.C.B., 1984, p. 23). Puisque les associes sont solidairement tenus, le creancier peut tous les attraire devant le tribunal du domicile de l'un d'entre eux, pourvu que tous soient domicilies sur le territoire d'un Etat contractant et soient done lies par la convention. La solidarite cree incontestablement le lien de connexite requis pour!'application de cette competence << derivee >>, aux termes d'un recent arret de la Cour de justice des Communautes europeennes (C.J.C.E., 27 septembre 1988, J.T., 1989, p. 214 et la note M. EKELMANS). 20. FAILLITE D'UN ASSOCIE. - LIQUIDATION DES DROITS DES ASSOCIES. - CLAUSE DE LIQUIDATION. - 0PPOSABILITE AUX TIERS.- Par unimportant arret du 28 fevrier 1985 (cette Revue, 1987, p. 571 et la note A. LIMPENS, << Reflexions sur la

46 618 REVUE CRITIQUE DE JURISPRUDENCE BELGE compensation, l'indivisibilite, la connexite et le privilege dans le cadre de la faillite d'un associe momentane >), J.T., 1986, p. 578 et la note Fr. T'KINT.- J-M. NELISSEN GRADE,<< Compensatie na faillissement en vereffening van tijdelijke vennootschappen >), Melanges Ronse, p. 287), la Cour de cassation a rejete le pourvoi que les curateurs a la faillite d'un associe avaient dirige contre une decision de la Cour d'appel de Bruxelles du 10 novembre 1983 (R.P.S., 1984, p. 33 et la note P. CoPPENS, conf. comm. Bruxelles, 17 mars 1982, J.C.B., 1982, p Entr. et Dr., 1983, p. 20 et la note Ch. LE COMTE), par laquelle cette derniere avait fait application d'une clause relative a la liquidation des rapports entre associes en cas de dissolution, contenue dans un contrat de societe momentanee. En l'espece, la societe avait ete constituee pour la realisation de travaux publics et ceux-ci avaient ete poursuivis par l'un des deux associes apres la faillite de l'autre, en vertu d'une clause du contrat de societe qui l'y autorisait. Plusieurs montants avaient ete payes par lui a des creanciers conformement au principe de la solidarite passive entre associes. La meme clause prevoyait qu'en cas de continuation des travaux par la partie non faillie, il y avait lieu a liquidation defmitive de la situation de le partie defaillante, en tenant compte notamment <<de l'avancement des travaux faits, des installations amenagees, des sommes versees pour la duree de l'entreprise et d'une equitable evaluation des benefices eventuels en fm de travaux et jusqu'au moment de la defaillance >), et en portant <<au debit de l'associe defaillant les frais supplementaires de financement et autres que l'autre associe devrait exposer pour la poursuite de l'entreprise >). Pareille stipulation tendait, selon!'analyse de la Cour d'appel, (<a permettre a l'associe non failli d'obtenir les moyens necessaires pour l'achevement des chantiers et d'eviter que le maitre de l'ouvrage n'use de son droit a indemnisation pour rupture du contrat d'entreprise >). La portee de la clause est, selon la Cour, la suivante : <<en stipulant que le produit des creances de l'associe failli ne reviendrait a ce dernier qu'apres liquidation prealable des droits et obligations des associes, les associes ne convenaient R.O.J.B. - 4e trim. 1992

47 REVUE CRITIQUE DE JURISPRUDENCE BELGE 619 pas d'un regime de liquidation des avoirs du failli, favorable a l'associe non failli, mais s'engageaient uniquement a conserver aux creances resultant de leur activite anterieure ala faillite, le caractere d'avances qu'elles avaient objectivement avant que le concours et la faillite ne mettent fm a }'association momentanee >>. Cette clause ne creait done pas <<de lien factice entre, d'une part, les creances de l'associe non failli a l'egard du maitre de l'ouvrage et, d'autre part, les dettes qu'il pouvait avoir contractees a l'egard de son associe ou encore a l'egard d'autres tiers : ce lien resultait de la nature meme de }'association momentanee et des stipulations d'indivisibilite qui en resultaient )), L'arret en deduit que (< ne viole pas les regles imperatives du droit de la faillite, l'indivisibilite stipulee entre parties, qui a pour effet que leurs creances sur un tiers font l'objet d'une entree en compte, qui ne repose pas sur une base factice mais objective et qui trouve sa source dans leur volonte de permettre la realisation, meme apres faillite, de l'entreprise en vue de laquelle fut constituee }'association momentanee; une telle convention n'a pas pour objet d'assurer a l'associe non failli un droit preferentiel sur les creances du failli a l'egard du maitre de l'ouvrage )) (dans le meme sens encore: comm. Bruxelles [ref.], 30 septembre 1986, inedit, en cause Delens c. Sotrahy. - Comm. Mons, 28 avril 1982, Entr. et Dr., 1984, p. 1). Les curateurs se sont pourvus en cassation en faisant valoir : - que ladite clause n'etait pas opposable a la faillite, eu egard au principe de la relativite des conventions (C. civ., art. 1165) - que }'absence de personnalite juridique de la societe momentanee implique que les droits nes de l'activite sociale a l'encontre des tiers se fixent immediatement dans le patrimoine de chaque associe en fonction de sa part, en sorte que la clause d'indivisibilite ne saurait, en }'absence de cause legale de preference, realiser une affectation de ces actifs au desinteressement de l'autre,

48 620 REVUE CRITIQUE DE JURISPRUDENCE BELGE - et que la clause ne pouvait avoir pour effet de permettre une compensation entre les creances des associes contre un tiers et les dettes solidaires des associes contre d'autres tiers. La Cour supreme n'a pas cru devoir accueillir ces moyens, a juste titre a notre avis. L'article 1165 du Code civil, tel qu'il est interprete par la doctrine et par la jurisprudence, n'a pas pour consequence d'autoriser les tiers a ignorer!'existence des conventions auxquelles ils sont etrangers et leurs effets internes entre les parties, meme si!'execution proprement dite des obligations contractuelles ne peut evidemment etre reclamee par des tiers ou a leur encontre (P. VAN 0MMESLAGHE, (( Examen de jurisprudence- Les obligations>>, cette Revue, 1986, p. 183, nos 81 et suiv , p. 502, n 46). La stipulation d'indivisibilite est done en principe opposable aux tiers creanciers de chacun des associes et elle ne cesse pas de l'etre, par suite de la faillite de l'un d'eux, des lors que cette faillite ne met pas fin a l'etroite connexite et a l'interdependance qui unit les creances et les dettes des associes momentanes qui justifie pareille clause. II s'agit d'une consequence de la nature meme de!'association momentanee et de la stipulation d'indivisibilite. II n'en resultait aucun privilege sans texte : un tel privilege implique en effet que l'on affecte le produit de la realisation de certains actifs au paiement de certaines dettes. La circonstance qu'un mecanisme de droit des obligations puisse entrainer un avantage preferentiel pour un creancier n'implique pas en soi!'existence d'un privilege. Sans pouvoir les discuter ici en detail dans la mesure ou elles relevent du droit de la faillite et des suretes, nous pensons que les solutions consacrees ainsi par la Cour supreme et les premisses qui les justifient sont parfaitement exactes (voy. sur les rapports entre l'autonomie de la volonte et les causes de preference, notamment a propos des stipulations d'indivisibilite : P. VAN 0MMESLAGHE, << Suretes issues de la pratique et autonomie de la volonte >>, in Les suretes [1983], p. 345, no 9. - << Les suretes nouvelles issues de la pratique - Developpe- R.O.J.B. - 4e trim. 1992

49 REVUE CRITIQUE DE JURISPRUDENCE BELGE 621 ments recents >>, in Le droit des suretes [1992], p. 377, nos 8 et suiv.). D'une maniere generale, l'arret a ete accueilli favorablement par la doctrine, en depit de quelques reserves formulees, specialement quant a la reference faite en l'espece par la Cour a!'institution de la compensation entre dettes connexes. Ainsi Mme Limpens (op. cit., specialement n Voy. aussi Fr. T'KINT, op. cit., no 18, qui parle de compensation<< triangulaire >>) critique-t-elle I' arret, au motif que les creances et les dettes entre lesquelles une interdependance est reconnue en l'espece n'existaient pas entre les memes parties. En realite, il ne s'agissait pas d'apprecier individuellement la legitimite d'une compensation entre les dettes des associes a l'egard de tiers et leurs creances a l'egard d'autres tiers, mais celle d'une compensation entre le droit de chaque associe a sa quote-part de toute somme per~me en remuneration des activites communes et son obligation de contribuer aux dettes sociales. Ce sont des lors des droits et des obligations entre associes, decoulant du contrat de societe, qui deviennent les articles d'un compte unique de liquidation etabli entre les parties (cfr sur cette question: P. VAN 0MMESLAGHE, << Le Droit et la Comptabilite - Reflexions sur les effets juridiques du compte>>, Journ. dr. fisc., 1977, p. 321.) Une solution analogue a ete consacree a propos d'une clause tres semblable par le President du tribunal de commerce de Bruxelles, siegeant en refere le 30 septembre 1986 et par un arret de confirmation de la Cour de Bruxelles du 30 juin 1987 (inedits, arret de la 16e ch. de la Cour, RG 659/86, en cause DelevsfSotrahy). 21. SUITE.- SITUATION EN L'ABSENCE DE CLAUSE PARTICU LIERE DANS LES STATUTS. - A notre avis, semblable solution doit d'ailleurs etre appliquee meme en l'absence d'une stipulation expresse d'indivisibilite (contra : V. SIMONART, L'association momentanee, no 283) : d'une maniere generale, les curateurs a la faillite d'un associe momentane ne peuvent pretendre a!'attribution de la quote-part de ce dernier dans les creances issues de l'activite sociale qu'apres imputation des R.O.J.B. - 4e trim. 1992

50 622 REVUE CRITIQUE DE JURISPRUDENCE BELGE montants pour lesquels cet associe doit contribuer aux dettes. LaCour de cassation souligne a juste titre a cet egard, dans l'espece precitee, a la suite de la Cour d'appel, que le lien qui existe entre les creances et les dettes contractees dans le cadre de l'activite pour laquelle la societe a ete formee (< resulte de la nature meme de!'association momentanee >>, la clause expresse d'indivisibilite ne faisant que confirmer cette consequence naturelle, sans creer de lien(< factice )) entre les creances et les dettes en cause. Selon la conception usuellement re~me dans notre droit en effet, la faillite d'un associe entraine la dissolution de la societe momentanee (VAN RYN, t. Ier, pe ed., n 305) et l'etablissement d'un compte entre les associes (VAN RYN, << Les methodes de groupement des societes en droit beige>>, in Rapports belges au VIle congres international de droit compare, p. 161). Les differentes dettes et creances deviennent des articles de ce compte et peuvent, de ce fait, etre compensees nonobstant la faillite. Les regles relatives a la liquidation des societes commerciales dotees de la personnalite juridique ne s'appliquent pas telles queues en la matiere, quoiqu' elles ne soient pas incompatibles avec le regime des societes depourvues de personnalite (Examen, 1981, p. 307, n , p. 389, no Conclusions de M. l'avocat general Mahaux precedant cass., 18 mars 1954, R.P.S., 1954, p. 306). Mais, conformement au droit commun des societes, meme depourvues de la personnalite juridique, chaque associe ne devient titulaire d'une creance envers les autres qu'a concurrence des montants disponibles pour les repartitions, apres apurement des dettes et charges dans la mesure ou chacun est tenu d'y contribuer (DE PAGE, t. V, 2e ed., n Comp., a propos des societes dotees de la personnalite : VAN RYN, t. II, 1 re ed., no 1043). D'autre part, le compte qu'implique le denouement des relations entre associes est, comme en matiere de liquidation d'une succession (Code civil, art. 1872) un compte indivisible (VAN 0MMESLAGHE, << Le droit et la comptabilite - reflexions sur les effets juridiques du compte>>, cite J.D.F., 1977, p. 301, no 8. - Voy. toutefois les reserves for- R.O.J.B. - 4e trim. 1992

51 REVUE CRITIQUE DE JURISPRUDENCE BELGE 623 mult~es par M. HEENEN, a l'encontre de la generalisation du principe de l'indivisibilite a tous les comptes autonomes : << Les comptes de depot a vue et les comptes courants- Une comparaison juridique >>, in Etudes offertes a R. Henrion, p. 407). D'ailleurs, les operations accomplies au travers de la societe momentanee doivent faire l'objet d'une comptabilite distincte, conformement a!'article 3, al. 2, de la loi du 17 juillet 1975 relative a la comptabilite des entreprises (VAN 0MMESLAGHE, op. cit., no 12), sur la base de laquelle les comptes finals sont etablis afm de determiner la position definitive de chaque associe a l'egard des autres. Il en resulte une (( personnalite comptable >> de!'association qui survit pour les besoins de sa liquidation (sur le concept de personnalite comptable, voy.!'interessante etude de GORE, (( Personnalite juridique et personnalite comptable >>, in La comptabilite et le droit [C.D.V.A ], p. 21), a l'instar de la survivance de la personnalite juridique des societes dissoutes qui en sont dotees (VAN RYN et HEENEN, t. II, p e ed., n et suiv.). On peut s'interroger sur la compatibilite de la solution adoptee par la Cour de cassation, dans son arret precite -, a fortiori si l'on doit, comme nous le pensons, lui conferer une portee generale - avec un arret anterieur du 30 mars 1962 (Pas., 1962, I, 842). Suivant cette decision, la societe momentanee est depourvue de personnalite juridique, avec pour consequence que les condamnations obtenues par les curateurs a la faillite d'un associe, meme si elles trouvent leur source dans la mise en rnuvre de droits resultant d'affaires pour lesquelles!'association avait ete constituee, tombent dans la masse de la faillite et ne se partagent pas de plein droit entre les associes. Ceux-ci sont simplement creanciers de leur quotepart dans la faillite. Mais la solution eut ete differente - et les principes ci-dessus exposes eussent du etre appliques, nous semble-t-il- si les trois associes en cause avaient agi ensemble comme demandeurs plutot que de laisser ce soin a l'un d'entre eux (Examen, 1967, p. 325, n 35). 22. SOCIETE EN PARTICIPATION. - ABSENCE DE PERSONNA LITE JURIDIQUE.- CoNSEQUENCES FISCALES.- Le regime fis- R.O.J.B. - 4e trim. 1992

52 624 REVUE CRITIQUE DE JURISPRUDENCE BELGE cal des benefices realises par les societes en participation a donne lieu a deux arrets de la Cour de cassation, accueillis avec reserve par la doctrine (cass., 19 fevrier 1976 et 3 juin 1976, cette Revue, p. 163 et la note critique de J. KIRKPATRICK et M. VAN DER HAEGEN; J.D.F., 1979, p. 82 et la note P.-A. FoRIERS. - Adde J. KIRKPATRICK, << Examen de jurisprudence- Les impots sur les revenus et les societes >>, cette Revue, 1988, p. 628, n S. VAN CROMBRUGGE, (< Le regime des associations commerciales momentanees et en participation>>, R.G.F., 1986, p. 213). Selon le second arret en particulier, <<!'association en participation n'ayant pas de personnalite juridique distincte de celles des associes, les benefices realises dans son exploitation doivent etre consideres comme acquis directement par les associes et apprecies dans leur chef au regard de l'impot, notamment d'apres la nature de leur mise (mise de fonds, mise en commun d'exploitation d'immeubles, etc.) et de leur participation a!'exploitation ( comme associe actif ou comme associe non actif) >>. La premiere partie de cette proposition est assurement exacte, puisqu'elle decoule de!'absence de personnalite juridique de la societe en participation - dont on doit tirer les consequences normales sur le plan fiscal. En revanche, la distinction proposee selon la nature de la mise des associes et de leur participation a!'exploitation aboutit a reintroduire en la matiere la distinction entre les associes actifs et les associes passifs alors que le legislateur de 1962 avait eu!'intention de la sup primer (KIRKPATRICK et van DER HAEGHE, note precitee. - P.-A. FoRIERs, note citee, et les ref. - VAN 0ROMBRUGGE, etude citee specialement p Sur la controverse : COPPENS et BAILLEUX, Droit fiscal, p. 297 et suiv.) La solution a neanmoins ete reprise telle quelle par un arret de la Cour d'appel de Mons du 10 mai 1978 (Bull. Contr., 1980, p. 235) qui en fait application apres avoir constate la simulation d'une association en participation sous les dehors d'un bail. (Sur ce dernier point : supra, no 10.) R.O.J.B. - 4e trim. 1992

53 REVUE CRITIQUE DE JURISPRUDENCE BELGE 625 CHAPITRE III. - LES SOClETES DOTEES DE LA PERSONNALITE JURIDIQUE : LA PERSONNALITE MORALE. - REGLES GENERALES SECTION 1 re. - AUTONOMIE PATRIMONIALE ET RELATIVITE DE LA PERSONNE MORALE 23. PERSONNALITE JURIDIQUE ET AUTONOMIE PATRIMO NIALE. - GENERALITES. - INAPPLICATION AUX SUCCUR SALES. -Bien que!'attribution de la personnalite morale ne soit pas!'unique moyen de realiser l'autonomie d'un patrimoine, comme le confirme l'exemple de certains droits etrangers qui reconnaissent et organisent des patrimoines d'affectation (voy. P. VAN 0MMESLAGHE, (< L'entreprise personnelle a responsabilite limitee - Quels choix fondamentaux 1 >>, Melanges Ronse, p Cl. CHAMPAUD, << L'entreprise personnelle a responsabilite limitee >>, R.T.D.Co, 1979, p P. SERLOOTEN, (< L'entreprise personnelle a responsabilite limitee >>, D., 1985, Chron., p. 107), elle demeure dans notre droit le moyen le plus commode pour atteindre ce resultat (VAN RYN, (< L'entreprise personnelle a responsabilite limitee >>, J.T., 1985, p Supra, no 15). La Cour de cassation a rappele cette consequence classique de!'attribution de la personnalite morale a un groupement par un arret du 27 avril 1987 (Pas., 1987, I, 999, et la note 2). En l'espece, la Cour du travail de Liege avait rejete!'action en declaration d'arret commun introduite par une societe a l'encontre de l'etat beige en sa qualite d'actionnaire majoritaire. Le litige opposait cette societe a l'un de ses employes. II concernait la liquidation d'une prime, dont les conditions avaient ete revues sur la base de desirs exprimes par l'etat comme condition a sa prise de participation. A l'appui de sa decisio~, la Cour du travail avait invoque que << l'etat beige, actiom1aire majoritaire de la societe, est partie integrante dans le present conflit et que la decision qui intervient a l'egard de la societe le concerne des lors, sans qu'il y ait lieu de declarer le jugement commun >>. R.O.J.B. - 4e trim. 1992

54 626 REVUE CRITIQUE DE JURISPRUDENCE BELGE La cassation etait inevitable : comme le rappelle la Cour supreme, << une societe anonyme a une personnalite juridique et un patrimoine distincts de ceux des associes >>. L'arret d'appel n'avait done pas legalement justifie sa decision, <<en rejetant la demande de declaration d'arret commun au seul motif que l'etat est actionnaire majoritaire de la societe demanderesse >>. Application correcte egalement du principe de l'autonomie patrimoniale, par un jugement du juge de paix de Saint-Nicolas, qui rejette une demande en apposition de scelles sur les biens meubles composant l'actif d'une S.P.R.L., formee par l'heritier legal de l'associe majoritaire de la societe. Cet heritier pretendait que l'associe survivant continuait a gerer!'exploitation au mepris de ses droits. Les biens sociaux ne peuvent etre consideres comme dependant de la succession, pour!'application de!'article 1148 du Code judiciaire, l'heritier demandeur ayant recueilli dans la succession de son pere des parts sociales et non point les actifs mobiliers faisant partie du patrimoine distinct de la societe (J. de paix Saint-Nicolas, 9 octobre 1981, R.P.S., 1983, p. 91). Mais l'autonomie patrimoniale suppose la creation d'une veritable personnalite juridique distincte et non point seulement la constatation d'une << personnalite commerciale ou comptable >>. Les actifs et les dettes d'une succursale, meme exploitee a l'etranger et dotee dans la realite economique d'une structure commerciale et comptable propre, sont des lors compris dans la masse de la faillite de la societe beige dont ils forment juridiquement une partie integrante (comm. Bruxelles, 28 avril 1980, J.O.B., 1980, p. 417). Le principe de l'universalite de la faillite complete la base juridique de pareille solution (P. CoP PENS et Fr. T'KINT, << Examen de jurisprudence- Les faillites, les concordats et les privileges>>, cette Revue, 1991, p. 396, n 68). 24. AUTONOMIE PATRIMONIALE ET RESPONSABILITE LIMI TEE. - LES LETTRES DE CONFORT OU DE PATRONAGE. - A la division patrimoniale consecutive ala creation d'une personne morale, s'ajoute souvent, quoique pas necessairement, une limitation de la responsabilite des associes a leurs apports. Les R.O.J.B. - 4e trim. 1992

55 REVUE CRITIQUE DE JURISPRUDENCE BELGE 627 actionnaires de la societe anonyme, les commanditaires, les associes dans une societe privee a responsabilite limitee et les associes dans les cooperatives lorsque les statuts le prevoient (16), beneficient de pareil regime, comme chacun le sait. Des correctifs peuvent toutefois etre apportes ala responsabilite limitee que consacrent ainsi les lois coordonnees sur les societes commerciales, par le jeu de l'autonomie de la volonte. II arrive qu'un ou plusieurs associes majoritaires, ou qui sont en mesure d'exercer sur la conduite des affaires sociales une influence determinante, prennent des engagements personnels vis-a-vis de certains creanciers de la societe, soit par contrat, soit aux termes d'engagements par declaration unilatera.le de volonte. La validite de ces derniers dans notre droit ne nous parait plus contestable (voy., sur la controverse que nous croyons aujourd'hui apaisee : VAN 0MMESLAGHE, << Examen de jurisprudence - Les obligations>>, cette Revue, 1988, p. 47, n VAN RYN, (( L'engagement par volonte unilaterale, J.T., 1984, p VAN 0MMESLAGHE, << L'engagement par declaration unilaterale de volonte >>, J.T., 1982, p Col PEL, <<La theorie de!'engagement par volonte unilaterale >>, cette Revue, 1980, p. 65). Encore faut-il que le document invoque par le creancier soit libelle de maniere telle qu'il puisse en resulter un engagement juridique veritablement contraignant, conformement au droit commun des obligations (voy. 0PPETIT, << L'engagement d'honneur >>, D., 1979, Chron., p. 107). II faut ensuite apprecier l'objet et la portee reels de!'engagement pris, en respectant les regles d'interpretation des conventions edictees par le Code civil, en ce compris!'article 1162 (comm. Valenciennes, 19 janvier 1988, R.P.S., 1988, p. 183), auxquelles la jurisprudence de la Cour de cassation a attribue la valeur de regles contraignantes pour le juge (VAN 0MMESLAGHE, << Examen de jurisprudence- Les obligations>>, cette Revue, 1986, p. 166, nos 71 et suiv.). (16) Le regime nouveau des societes cooperatives, tel qu'il resulte des articles 160 et suivants de la loi-programme du 20 juillet 1991, confrrme davantage cette situation en distinguant formellement les societes cooperatives a responsabilite limitee et les societes cooperatives a responsabilite illimitee. R.O.J.B. - 4e trim. 1992

56 628 REVUE CRITIQUE DE JURISPRUDENCE BELGE En principe, les << lettres de patronage>> ou <<de confort >>, dont la typologie est d'ailleurs tres diversifiee (BELLIS,<< Typologie des lettres de patronage>>, Rev. Banque, 1982, p PouLLET, <<La lettre de patronage>>, D.P.C.I., 1981, p TERRAY, <<La lettre de confort >>, Rev. Banque, 1980, p BELLIS et csrts, Les lettres de patronage [ Feduci]. - 0BERMULLER, <<Die Patronatserklariing >>, Z.G.R., 1975), ne peuvent etre assimilees a des cautionnements ni a des garanties abstraites, puisque le recours a cette formule originale implique que les parties n'ont pas entendu se placer dans les cadres connus du droit civil ou du droit bancaire. Toutes sortes de constructions sont des lors concevables, allant de!'engagement de reprendre la charge de certaines dettes, jusqu'a celui de faire << ses meilleurs efforts>> pour que la societe puisse faire face a ses obligations, en passant notamment par!'obligation de maintenir une participation d'une certaine importance ou d'autres obligations, de resultat le cas echeant. Le tribunal de commerce de Dinant a du se livrer a une analyse de cette nature dans un jugement du 23 juin 1987 (Rev. Reg. Dr., 1988, p. 52 et la note ANTOINE et PouLLET. - J.T., 1988, p. 392 et la note ANTOINE et PouLLET). L'actionnaire preponderant d'une societe avait ecrit au banquier de celle-ci que les ouvertures de credit consenties par ce dernier a la filiale recueillaient son approbation et qu'il etait <<dans les principes fondamentaux de (sa) politique de faire en sorte que (le banquier) n'encoure aucune perte du fait de ses operations realisees avec la filiale >>. La lettre poursuivait encore en ces termes : << N ous vous confrrmons que no us ferons tout le necessaire pour que notre filiale dispose d'une tresorerie suffisante pour lui permettre de faire face, a bonne date, a ses engagements envers votre etablissement au titre des concours precites. Notre engagement restera en vigueur jusqu'au remboursement integral des concours vises ci-avant (...) >>. Plus loin,!'auteur de la lettre precisait en outre que : << Nous vous confirmons que notre intention est, pendant toute la duree du present engagement, de maintenir notre participation dans cette societe a un niveau au moins egal a celui que nous detenons actuellement >>. R.O.J.B. - 4e trim. 1992

57 REVUE CRITIQUE DE JURISPRUDENCE BELGE 629 Selon le tribunal, de telles declarations font naitre dans le chef de leur auteur un engagement de resultat justifiant la mise en oouvre de sa responsabilite civile si la filiale n'est pas en mesure de rembourser le credit, sauf demonstration d'une cause d'exoneration ou de justification. La faillite n'est pas en soi un cas de force majeure, des lors que l'impossibilite de l'eviter n'est pas etablie, et l'indemnite a laquelle la banque peut pretendre est egale au montant du credit non rembourse. La meme analyse severe avait deja ete admise par un jugement du tribunal de commerce de Bruxelles du 30 octobre 1985 (R.D.O.B., 1987, p. 64 et la note), a propos d'un << working capital agreement >> affecte au soutien d'un credit consenti a la filiale belge d'une societe americaine. La convention prevoyait dans cette affaire que << zolang NV... (Belgium) een schuld heeft t. a.v. de NMKN : a) zal... (Amerika) de enige eigenaar blijven van de huidige en toekomstige kapitaalsaandelen van haar dochteronderneming ; b) zal... (Amerika) erover waken dat de NV... (Belgium) over voldoende liquiditeit, zal beschikken om haar verbintenissen nate komen t. a.v. NMKN; c) zal... (Amerika) erover waken dat de NV... (Belgium) al het noodzakelijke doet of dat dit gedaan wordt om het volwaardig bestaan van de vennootschap te verzekeren >>. La convention prevoyait en outre expressement sous la forme d'une clause penale le versement par la societe-mere a la ban que des deniers restant dus par la filiale, comme sanction du non-respect des engagements contractes de la sorte. 25. RELATIVITE DE LA PERSONNALITE MORALE. - LES GROUPES DE soci:et:es.- On sait que notre loi sur les societes ne comporte pas de reglementation globale specifique aux groupes de societes et que!'harmonisation a l'echelle europeenne du droit des societes a cet egard continue a se faire attendre, puisque la neuvieme directive sur les groupes demeure actuellement a l'etat de proposition et que son avenir reste incertain (voy. BuxBAUM et HoPT, Legal harmonization and the business entreprise, p. 187 qui renvoient a l'abondante litterature existante en la matiere que nous ne pouvons songer a reproduire ici. - Adde, cependant, pour la periode la plus recente, les deux substantiels ouvrages parus dans la collection

58 630 REVUE CRITIQUE DE JURISPRUDENCE BELGE du Centre d'etudes des groupes d'entreprises : Droits et devoirs des societes meres et de leurs filiales, 1985, et Aspects des groupes d'entreprises, 1989, ainsi que la substantielle bibliographie etablie par MM. WIJMEERSCH et KRUITHOF, The law of groups of companies - An international bibliography, 1991). Les socit~tes appartenant a un groupe restent done en principe soumises au droit commun. Toutefois, la realite que constituent les groupes des societes a ete largement prise en compte par notre droit dans des reglementations diverses (pour un expose d'ensemble, voy. VAN 0MMESLAGHE, <<Rapport general>>, in Droits et devoirs des societes meres et de leurs filiales, precite, p. 59 a Adde sur differents aspects du droit des groupes, les differentes etudes comprises dans Aspects des groupes d'entreprises, cite.) : - surveillance des societes a portefeuille par la Commission bancaire et fmanciere en vertu de!'arrete royal de pouvoirs speciaux no 64 du 10 novembre 1967 ; - nombreux aspects de la pratique de cette autorite tant en ce qui concerne les groupes en tant que tels que les relations entre societes membres d'un groupe ; - reglementation des comptes consolides; regles du droit comptable applicables aux societes prises individuellement destinees a faire apparaitre les relations de groupe; - regles sur les cessions de participation de controle ou les offres publiques d' achat prevues par la loi du 2 mars 1989 relative a la publicite des relations importantes dans les societes co tees en bourse et reglementant les offres pu bliques d'acquisition et par son arrete d'application du 8 novembre 1989; - regles sur la (< transparence >} edictees par la meme loi du 2 mars 1989 et ses textes d'application dont!'arrete royal du 10 mai 1989; -dispositions diverses du droit des societes faisant intervenir la notion de filiale ; - controle prudentiel de certains groupes de societes comme tels notamment sur le plan international; - reconnaissance du phenomene pour!'application des regles sur la concurrence notamment en droit europeen (voy a

59 REVUE CRITIQUE DE JURISPRUDENCE BELGE 631 ce propos : P. VAN 0MMESLAGHE, (( Le reglement sur le controle des operations de concentration entre entreprises et les offres publiques d'acquisition >>, en cours de parution aux Cah. dr. eur., 1991, notamment nos 9 et suiv. sur les notions de concentration, de controle et de personnes liees). Par nature, le groupe de societes, meme si l'on reconnait en droit son existence, suppose le respect de la personnalite juriclique individuelle de toutes les societes membres du groupe et des effets qui y sont normalement attaches, notamment du point de vue patrimonial (civ. Anvers, 20 decembre 1988, R. W., , col. 23). A juste titre, certaines theses suivant lesquelles le groupe de societes devrait se traduire par la reconnaissance d'une personnalite unique du groupe sont rejetees tant par la pratique que par la jurisprudence et par la majorite de la doctrine : ce serait la nier la specificite de la concentration par la constitution d'un groupe et la Iegitimite de cette methode ( cfr p. VAN 0MMESLAGHE, etude citee au meme paragraphe, nos 73 et suiv. et les ref.) La jurisprudence recente tend meme a admettre la caracteristique fondamentale du groupe de societes, a savoir!'existence d'un <<interet de groupe>> distinct de l'interet des societes qui composent!'ensemble et qu'il est legitime de poursuivre. La question de savoir dans quelle mesure l'interet de groupe peut prevaloir sur l'interet individuel d'une societe comprise dans le groupe demeure delicate (P. VAN 0MMESLAGHE, Rapport general cite, nos 39 et SUiV, et les ref. notamment a la jurisprudence fran<;aise.) Un jugement du tribunal de commerce de Bruxelles du 27 avril1978 (R.P.S., 1978, 276), confirme par la Cour d'appel par un arret du 16 juin 1981 (R.P.S., 1981, 145) apres avoir releve que deux societes avaient concludes accords de cooperation ayant abouti a une integration d'une partie importante de leurs activites, a decide que les administrateurs de l'une des societes avaient pu Iegitimement estimer que, en raison de cette integration, il etait de l'interet de celle-ci d'aider l'autre societe en vue de prevenir les repercussions qu'aurait entrainees la defaillance de cette derniere (voy. Examen, 1981, no 71, p. 400 sur cette affaire). R.O.J.B. - 4e trim. 1992

60 632 REVUE CRITIQUE DE JURISPRUDENCE BELGE Un jugement du tribunal de commerce de Liege du 13 octobre 1981 (R.P.S., 1982) admet qu'une societe puisse venir au secours d'une autre societe faisant partie du meme groupe mais a certaines conditions qu'il tente de definir : << une certaine permeabilite patrimoniale peut toutefois etre admise lorsqu'une societe aide momentanement une autre societe, ala condition que les sacrifices ne soient pas hors de proportion avec les possibilites reelles de l'entreprise qui les consent et qu'ils n'entrainent pas de difficultes graves que leur caractere excessif permet de prevoir au moment ou la decision est prise>>. Selon le tribunal, lorsque ces conditions ne sont pas remplies,!'assistance apportee par une societe a une autre, notamment sous la forme de la dation en garantie d'elements d'actif peut etre critiquee par les creanciers, par exemple en intentant une action paulienne. Le recours pourrait aussi etre fonde sur l'abus de majorite ou aboutir ala mise en cause de la responsabilite des administrateurs. Dans certaines situations,!'application du droit commun peut conduire a une condamnation de la societe-mere aux cotes de sa filiale. Par exemple, le tribunal de commerce de Bruxelles condamne solidairement une societe et sa filiale, sur la base des principes qui regissent la responsabilite precontractuelle, au motif que la filiale avait rompu intempestivement, a!'initiative de la societe mere, des pourparlers entames avec un tiers. Meme si cette derniere n'etait pas partie ala negociation en tant que telle, son initiative formait une faute commune avec la rupture intempestive dont s'etait rendue coupable la filiale, selon!'appreciation des faits de la cause par le juge (comm. Bruxelles, 3 fevrier 1988, J.T., 1988, p. 516). Une societe qui en controle une autre peut en certains cas etre condamnee a supporter les dettes de cette derniere et, dans!'hypothese, ou elle est incapable de faire face a celles-ci, etre declaree en faillite. Mais ce << percement du voile de la personnalite morale>>, selon!'expression anglo-americaine, suppose que la societe mere ait meconnu la personnalite juridique propre de sa filiale et que les circonstances de la cause soient suffisamment caracterisees pour que la decheance du benefice R.O.J.B. - 4e trim. 1992

61 REVUE CRITIQUE DE JURISPRUDENCE BELGE 633 de l'autonomie patrimoniale et de la responsabilite limitee se justifie, conformement aux principes qui se sont progressivement degages de la jurisprudence et de la doctrine relatives a!'extension de la faillite au <<maitre de!'affaire>> (infra, no 26) (Liege, 15 novembre 1983, Jur. Liege, 1984, p Comm. Liege, 24 janvier 1984, Jur. Liege, 1984, p. 131). Le seul fait qu'une societe en controle une autre ne suffit evidemment pas a justifier!'application de pareille sanction (cass. fr., 24 mai 1982, R.P.S., 1983, p. 90). La meconnaissance des << regles du jeu >> par la societe mere peut parfois conduire a ecarter la personnalite morale de la filiale, a l'effet de justifier la compensation entre une dette de la filiale vis-a-vis d'un creancier et la dette de ce meme creancier envers la societe mere (comm. Bruxelles [ref.], 27 mai 1986, R.P.S., 1986, p. 225). 26. RELATIVITE DE LA PERSONNALITE MORALE. - EXTEN SION DE LA FAILLITE DE LA SOCIETE AU <<MAITRE DE L'AF FAffiE >>.-AcTION EN COMBLEMENT DE PASSIF.- Les precedentes chroniques - et particulierement les deux dernieres (Examen, 1981, p. 261 a 283, nos 27 et suiv , p. 356 a 368, nos 20 et suiv.) - relataient l'extraordinaire developpement de la theorie de!'extension de la faillite d'une societe au <<maitre de!'affaire>>, par la doctrine et par la jurisprudence des decennies soixante et soixante-dix. Cette description se terminait par une analyse des arrets rendus par la Cour de cassation en 1978 et en 1979 (infra), qui confirmaient!'importance acquise par cette matiere au cours de ces periodes, tout en enonc;ant les conditions de!'extension en des termes qui paraissaient de nature a donner un serieux coup de frein a!'expansion de cette theorie. Cette impression s'est concretisee dans les annees que couvre le present examen, et elle est accusee encore par le redressement de la conjoncture economique qui a caracterise cette periode (DIEUX, << La responsabilite des associes en matiere de societes commerciales - Evolutions recentes >>, etude citee, p. 57, nos 2 et 3.- P. CoP PENS et Fr. T'KINT, Examen de jurisprudence precite, cette Revue, 1991, p. 301, no 5).

62 634 REVUE CRITIQUE DE JURISPRUDENCE BELGE Quelques rares decisions prononcent la faillite du << maitre de I' affaire>>, apres celle de la ou des societes exploitees par lui a son avantage personnel, sur la base de constatations de fait etablissant la combinaison de plusieurs des criteres degages par la jurisprudence anterieure pour justifier une telle extension (DIEUX, loc. cit.) : capitalisation insuffisante de la societe, absence de fonctionnement ou fonctionnement irregulier des organes sociaux, depassement des pouvoirs conferes par les statuts ou par les organes de la societe, confusion des comptes de l'associe preponderant et des comptes de la societe, absence de comptabilite reguliere, utilisation des deniers de la societe pour l'apurement de dettes personnelles ou, inversement, paiement de creanciers sociaux au moyen d'actifs personnels sans justification juridique serieuse, utilisation d'actifs sociaux comme des actifs propres, conclusion en nom personnel de contrats interessant l'entreprise exploitee par la societe, etc. (Bruxelles, 26 mars 1980, R.P.S., 1980, p Comm. Bruxelles, 6 janvier 1982, R.P.S., 1982, p. 199, reforme par Bruxelles, 8 decembre 1982, R.P.S., 1982, p Comm. Courtrai, 29 fevrier 1980, R.P.S., 1980, p. 325 et note P.O. - Comm. Liege, 15 janvier 1980, R.P.S., 1980, p. 157). La reunion de plusieurs de ces indices est generalement necessaire pour asseoir la conviction du juge du fond (comm. Bruxelles, 19 mars 1980, R.P.S., 1980, p Comm. Namur, 15 octobre 1981, Rev. Reg. Dr., 1982, p. 39). Le seul fait qu'un associe detienne une participation preponderante dans le capital de la societe, en sorte qu'illa controle sans partage, est insuffisant (comm. Liege, 15 janvier 1989, R.P.S., 1982, p. 160). De meme, en cas de scission d'une societe commerciale entre une societe d'exploitation et une societe recueillant les actifs immobiliers de la societe scindee, la faillite de la premiere ne peut etre etendue ala seconde, si une confusion des comptes et des patrimoines, etablissant que les associes n'ont pas donne a la scission toutes les consequences qu' elle implique normalement, n'est pas concretement demontree (Liege, 19 juin 1980, R.P.S., 1980, p. 176). Dans les cas ou les conditions de!'extension de la faillite sont realisees a la lumiere de ces differents criteres, il faut

63 REVUE CRITIQUE DE JURISPRUDENCE BELGE 635 appliquer les principes enonces par la Cour de cassation, dans ses arrets des 26 mai 1978, 1 er juin et 26 octobre 1979 (Pas., 1978, I, Pas., 1979, I, Pas., 1980, I, Adde Fr. T'KINT, << L'extension de faillite >>, cette Revue, 1981, p. 52), et rappeles ensuite par ses arrets des 12 fevrier 1981 (R.P.S., 1981, p. 106), 11 septembre 1981 (R.P.S., 1982, p. 126) et 9 decembre 1982 (Pas., 1983, I, 448). Les trois conditions de la faillite du maitre de!'affaire doivent etre reunies dans son chef et il appartient au juge du fond de les constater, sans que la realisation de ces conditions puisse se deduire automatiquement des criteres rappeles cidessus. En particulier, le maitre de!'affaire ne peut etre declare en faillite que s'il est personnellement commer<;ant, conformement au droit commun. Cette qualite peut certes resulter de!'exploitation du commerce de la societe dont il etait le maitre. Mais en ce cas, sa faillite ne peut etre declaree plus de six mois apres celle de la societe, puisque l'activite commerciale aura cesse a partir de cette date. La Cour d'appel de Bruxelles et le tribunal de commerce de Courtrai le rappellent dans leurs decisions citees ci-dessus (adde Mons, 9 novembre 1988, R.P.S., 1989, p Liege, 16 janvier 1987, R.D.C.B., 1987, p septembre 1981, R.P.S., 1982, p Comm. Bruxelles, 9 septembre 1980, R.P.S., 1980, p. 210). L'application stricte des articles 437 et 442 de la loi sur les faillites implique meme que les actes du (<maitre de!'affaire>>, etablissant sa qualite personnelle de commer<;ant sous le couvert de la societe, aient ete accomplis dans les six mois qui precedent sa propre declaration de faillite, ce qui reduit encore sensiblement la possibilite d'appliquer la doctrine de!'extension (en ce sens : Bruxelles, 15 decembre 1981, R.P.S., 1982, p. 100 reformant comm. Bruxelles, 8 septembre 1980, R.P.S., 1980, p Comm. Nivelles, 4 juin 1985, R.D.C.B., 1986, p. 711). Lorsque!'extension de la faillite est prononcee, la jurisprudence de la Cour de cassation ci-dessus evoquee et l'impossibilite de constater!'inexistence ou le caractere fictif de la societe (article 13ter des lois coord.- Supra, nos 10 et 11) empechent que les patrimoines de la societe et du maitre de!'affaire

64 636 REVUE CRITIQUE DE JURISPRUDENCE BELGE soient reunis en une masse unique, sauf lorsque la confusion a ete telle qu'il en resulte une impossibilite materielle de les distinguer (Examen, 1981, p. 356, no 20.- Liege, 15 novembre 1983, Jur. Liege, 1984, p Comm. Liege, 23 octobre 1979, R.P.S., 1980, p Comm. Mons, 12 novembre 1979, R.P.S., 1980, p. 292). SECTION 2. - SPECIALITE ET CAP A CITE 27. CAPACITE ET SPECIALITE LEGALE. - LIBERALITE CONSENTIE par UNE SOCIETE COMMERCIALE. - SOCIETE EN LIQUIDATION. -Par son important arret du 13 avril 1989, sur lequel nous reviendrons a propos des pactes de votation dont il a fondamentalement bouleverse le regime, la Cour de cassation a conflrme sa jurisprudence anterieure, fermement etablie, selon laquelle <<pour tousles actes juridiques que n'exclut pas sa nature d'etre moral, la capacite d'une societe dotee de la personnalite juridique est en principe la meme que celle d'une personne physique si la loi ne l'a pas restreinte >> (Pas., 1989, I, Voy. aussi cass., 31 mai 1957, R.P.S., 1957, p. 289, avec les conclusions de M. le procureur general Hayoit de Termicourt. - Cette Revue, 1958, p. 289 et la note P. VAN 0MMESLAGHE, ((Observations sur les limites imposees a l'activite des personnes morales en droit compare>>.- Cass., 17 mai 1962, Pas., 1962, I, 1054). Aucune disposition legale n'interdit a une S.P.R.L. d'etre proprietaire d'actions representatives du capital d'une societe anonyme ni de prendre une part active a la gestion de celle-ci, le cas echeant par l'exercice des fonctions d'administrateur (cass., 15 decembre 1980, Pas., 1981, I, Examen, 1967, p. 300, n 17). Une restriction generale ala capacite des personnes morales, ou plus exactement aux pouvoirs de leurs organes, resulte du principe de la specialite legale (supra, n 1 et note 2). Les societes commerciales ne peuvent etre constituees qu'en vue de!'exploitation d'une activite dans un but de lucre. En droit fiscal, il en resulte que toutes les depenses de la societe, de meme que toutes ses recettes, sont de nature pro- R.G.J.B. - 4e trim. 1992

65 REVUE CRITIQUE DE JURISPRUDENCE BELGE 637 fessionnelle et doivent etre traitees comme telles pour!'application de l'impot sur les revenus. Les depenses et charges doivent etre deduites des revenus pour autant que toutes les autres conditions de la deductibilite soient remplies (cass., 13 avril 1978 Pas., I, 899 et les concl. du proc. gen. Krings. Cass., 3 juin 1983, Pas., 1983, I, KIRKPATRICK,<< Examen de jurisprudence - Les impots sur les revenus et les societes >>, cette Revue, 1985, p. 625, no 54). Comme le decide exactement la Cour d'appel de Liege, par arret du 4 juin 1980 (R.P.S., 1981, p. 205), la societe conserve, apres sa dissolution, son caractere commercial ainsi que sa personnalite morale pour les besoins de sa liquidation (VAN RYN et HEENEN, t. II, n 1047). Le principe de la specialite legale continue par consequent a s'appliquer pendant le periode de liquidation, et les liquidateurs ne peuvent faire donation des actifs immobiliers de la societe a des tiers (sur!'interdiction de principe pour une societe de consentir une liberalite : VAN RYN, t. Ier, 1 re ed., n 366). En l'espece, une donation avait ete consentie par le liquidateur d'une societe cooperative a une A.S.B.L., conformement a une decision de l'assemblee generale extraordinaire des cooperateurs decretant la dissolution de la societe. LaCour en deduit une fraude aux anciens articles 118 et suivants du Code des impots sur les revenus, consistant dans la dissimulation d'une attribution en nature des immeubles aux associes, suivie d'une donation par eux a l'a.s.b.l., en sorte que la taxation d'un boni de liquidation est justifiee. La decision est critiquee, sous ce dernier aspect, par M. KIRKP.A TRICK, lequel fait valoir, mais de maniere un peu trop absolue a nos yeux, que le caractere simule de la donation ne pouvait etre deduit de la nullite de l'acte accompli par les liquidateurs (op. cit., cette Revue, 1987, p. 303, no 110). En realite, les tiers peuvent prouver la simulation par toutes voies de droit et les juges du fond pouvaient a notre avis deduire par presomptions le caractere artificiel et simule de l'acte ostensible, a partir des elements en justifiant la nullite par application du principe de la specialite legale (VAN 0MME SLAGHE, << Examen de jurisprudence - Les obligations>>, cette Revue, 1988, p. 125, n 49). R.O.J.B. - 4e trim. 1992

66 638 REVUE CRITIQUE DE JURISPRUDENCE BELGE Independamment de ses eventuelles consequences fiscales, la violation du principe de la specialite legale implique!'absence de tout engagement de la societe envers les tiers qui voudraient profiter de l'acte accompli irregulierement (Examen, 1973, p. 342, n , p. 337, n , p. 363, n 7). Comme le rappelle Mme BENOIT-MouRY ( << Representation des societes de capitaux et limitations relatives a l'objet social)>, cette Revue, 1989, p. 387, no 11), les amenagements apportes au principe de la << specialite statutaire )> par la loi du 6 mars 1973, sont sans effet sur les sanctions de la << specialite legale)). En particulier, les tiers ne peuvent se prevaloir de!'article 63bis des lois coordonnees sur les societes commerciales, pour reclamer a la societe!'execution d'un acte accompli au mepris de la specialite legale. La solution decoule de!'article 9.1 de la directive communautaire (VAN 0MMESLAGHE, <<La premiere directive du 9 mars 1968 en matiere de societes )>, Cah. Dr. Eur., 1969, p. 629, no 32). C'est done a tort que, statuant a propos d'une liberalite consentie par une societe anonyme a la famille d'un ancien administrateur, sous la forme d'une pension extra-legale, la Cour d'appel de Bruxelles a cru pouvoir decider qu'independamment des mobiles interesses ou non qui avaient pu animer!'octroi de cet avantage, << la societe est liee par les actes juridiques que ses organes posent, meme si ces actes ne repondent pas a I' objet social)> (10 mars 1982, R.P.S., 1984, p. 265). Si!'octroi d'une liberalite excede l'objet social, ce n'est point seulement en raison de la definition qu'en donnent les statuts, mais parce que la loi elle-meme interdit en principe a une societe commerciale d'accomplir des actes desinteresses. De maniere plus exacte, le meme arret rappelle, conformement a une jurisprudence et a une doctrine bien etablies, que!'interdiction faite aux societes commerciales d'accomplir des actes a titre gratuit n'est toutefois pas absolue et inconditionnelle. D'une part, un mobile interesse, meme indirect, suffit pour que l'acte, intrinsequement gratuit, soit valable ; tel est le cas, lorsque!'attribution d'un avantage a un administrateur ou a sa famille est destinee a stimuler sa diligence et sa competence.~'

67 REVUE CRITIQUE DE JURISPRUDENCE BELGE 639 Exa au profit de la societe (cass., 13 avril 1989, precite. - men, 1962, p. 364, n 8). D'autre part,!'attribution de ces memes avantages peut, selon les circonstances, etre analysee comme!'execution d'une obligation naturelle (comm. Bruxelles, 24 mai 1984, R.P.S., 1984, p Examen, 1958, p. 77, no 23). 28. LA SPECIALITE STATUTAIRE. - lnopposabilite A LA SOCIETE DES ACTES EXCEDANT L'OBJET SOCIAL. - ARTI CLES 63bis ET 130 DES LOIS COORDONNEES SUR LES SOCIETES COMMERCIALES. - Selon le droit commun des societes commerciales, le principe de la specialite statutaire implique que la societe n'est pas engagee par les actes accomplis par ses organes en violation de l'objet social, pour la realisation duquella societe est constituee. Reciproquement, la societe ne peut puiser de droits dans une convention etrangere a son objet social et les tiers peuvent done se refuser a executer des engagements resultant d'une convention etrangere a l'objet statutaire de leur cocontractant (Examen, 1981, p. 248, no Cass., 21 mai 1957, cette Revue, 1958, p. 383 et la note VAN 0MMESLAGHE, precitee, specialement nob 7 et suiv.). Par derogation ala premiere de ces regles, les articles 63bis et 130 des lois coordonnees disposent respectivement que la societe anonyme et la societe privee a responsabilite limitee sont engagees par les actes de leurs organes d'administration qui excedent l'objet social, sauf si la societe etablit la mauvaise foi du tiers, resultant de ce qu'il savait que l'acte depassait l'objet social ou ne pouvait!'ignorer,- sans que la seule publication des statuts suffise a constituer cette preuve (L. SI MONT, <(La loi du 6 mars 1973 modifiant la legislation relative aux societes commerciales 1>, R.P.S., 1974, p. 1, nob 57 et suiv.). Mais la doctrine demeurait divisee quant a!'incidence de ces textes sur la seconde regie. Suivant une premiere these, defendue en particulier par M. HEENEN ( <( La representation de la societe anonyme et de la societe de personnes a responsabilite limitee 1>, Services interbancaires, 1976, n 11, p. 16 et 17), seulle tiers de mauvaise foi peut se degager de ses obligations envers la societe, en invoquant que les organes de celle-ci ont meconnu les limites tra- R.O.J.B. - 4e trim. 1992

68 640 REVUE CRITIQUE DE JURISPRUDENCE BELGE cees par son objet statutaire. Ce droit serait correlatif au droit pour la societe de se degager de la convention dans cette hypothese. La plupart des autres commentateurs de la loi ont au contraire soutenu que, comme les autres restrictions statutaires au pouvoir du conseil d'administration de la societe anonyme ou des gerants de la S.P.R.L., les limitations decoulant de la defmition de l'objet social n'ont d'effet que dans l'ordre interne, en sorte que les tiers - qu'ils soient de bonne ou de mauvaise foi- ne peuvent les opposer ala societe (L. SIMONT, op. cit., n J. RoNSE, De vennootschapswetgeving, 1973, n M. VAN DER HAEGHEN et 01. VERBRAECKEN, << L'adaptation de la legislation belge ala premiere directive de la CEE en matiere de societes >>, J.T., 1974, p. 132, no 31). La Cour de cassation s'est ralliee a cette seconde analyse, par un arret de principe du 12 novembre 1987 (cette Revue, 1989, p. 385 et l'importante note precitee de Mme BENOIT MouRY. - R.D.C.B., 1988, p. 500 et obs. M. GREGOIRE. - T.R. V., 1988, p. 127 et note LIEFSOENS.- R.P.S., 1989, p. 42 et la note D. MouGENOT). Comme dans l'espece tranchee par l'arret precite du 31 mai 1957, il s'agissait de determiner quelle suite devait etre donnee aux pretentions formulees par une societe tendant au paiement de commissions promises par une autre societe en contrepartie de la mission que celle-ci lui avait confiee. La societe debitrice des commissions avait conclu, sans succes devant les juges du fond, a l'irrecevabilite de cette pretention, au motif que!'operation excedait l'objet social de la societe demanderesse. La Cour supreme rejette le pourvoi dirige contre l'arret attaque, considerant << qu'il resulte de!'article 63bis des lois coordonnees sur les societes commerciales que, si 1' acte est etranger a l'objet social ou depasse celui-ci, les limites statutaires des pouvoirs des organes ayant qualite pour representer la societe n'ont plus, en principe, qu'un effet purement interne et ne peuvent des lors etre invoquees par les tiers>). Par arret du 18 mars 1981 (Pas., 1981, II, 82), la Cour d'appel de Mons avait exprime le meme point de vue, dans une autre espece ou une partie a un contrat de vente plaidait la nullite de celui-ci, parce qu'il excedait l'objet social de la R.O.J.B. - 4e trim. 1992

69 REVUE CRITIQUE DE JURISPRUDENCE BELGE 641 societe acquereuse, avec l'espoir de pouvoir recuperer les biens vendus, en depit de la faillite de cette derniere et de la decheance de l'action en resolution pour defaut de paiement du prix qui en decoulait. Encore qu'elle accentue la difference de regime entre les societes visees par les articles 63bis et 130 des lois coordonnees sur les societes commerciales et les autres, qui demeurent soumises a toutes les consequences du principe de la specialite statutaire, cette solution nous parait devoir etre approuvee. Elle concorde tout ala fois avec les conceptions de base de la directive, selon lesquelles les restrictions statutaires aux pouvoirs des organes d'administration ne sortissent en principe leurs effets que dans l'ordre interne de la societe (BENOIT-MOURY, op. cit., specialement n 12), et avec!'analyse - consacree dans notre droit par la Cour de cassation des son arret du 31 mai 1957 (precite) - qui voit dans la specialite statutaire une restriction au pouvoir des organes plutot qu'une limite a la capacite de la personne morale (VAN 0MMESLAGHE, op. cit., specialement, n Contra : M. GREGOIRE, op. cit., pour qui l'arret precite aurait considere la specialite statutaire comme tenant ala capacite de la societe). En outre il aurait ete paradoxa! de reserver un sort meilleur au tiers de mauvaise foi qu'au tiers de bonne foi, comme l'aurait implique!'interpretation des textes proposee par M. Heenen. A l'appui de celle-ci, notre eminent collegue invoquait le precedent de la loi britannique de 1972 qui a mis en concordance le droit anglais avec la premiere directive du Conseil (loc. cit.). Mais comme il le relevait lui-meme fort justement, tant le tiers de bonne foi que le tiers de mauvaise foi peuvent opposer a la societe le depassement de son objet social, selon la solution retenue par le droit anglais apres!'adoption de cette loi. On peut s'interroger sur la portee de la reserve dont la Cour supreme a assorti la doctrine qu'elle enonce. Selon l'attendu reproduit ci-dessus, ce n'est << qu'en principe >> que l'effet des restrictions statutaires aux pouvoirs du conseil d' administration, decoulant de la definition de l'objet social, reste cantonne dans l'ordre interne de la societe. Mme Benoit-Moury en infere que ces termes << pourraient ouvrir la voie a certaines excep-

70 642 REVUE CRITIQUE DE JURISPRUDENCE BELGE tions >>.A notre avis, la seule exception que l'arret reserve ainsi de maniere implicite est celle qui resulte des articles 63bis et 130 eux-memes, en tant qu'ils permettent a la societe - et a elle seule - d'opposer ses statuts aux tiers de mauvaise foi. Cette reserve ne pourrait s'interpreter comme laissant ouverte!'interpretation proposee par M. Heenen : la Cour affirme en effet que les restrictions statutaires a l'objet social ne peuvent etre invoquees par les tiers sans faire a cet egard aucune difference suivant qu'ils sont de bonne ou de mauvaise foi, ni directement ni indirectement a travers les motifs du juge du fond auxquels l'arret se refere. 29. EMPLOI DES LANGUES. - Par arrets des 6 novembre 1981 (Pas., 1982, I, 347) et 9 juin 1989 (Pas., 1989, I, 1087), la Cour de cassation a confirme les distinctions - tres critiquables a nos yeux- qu'elle avait enoncees en 1978 (13 mars 1978, Arr. cass., 1978, p. 803 avec les conclusions partiellement contraires de M. le procureur general Dumon, alors premier avocat general), a propos de!'application de l'article 4 de la loi du 15 juin 1935 concernant l'emploi des langues en matiere judiciaire, lorsque la partie defenderesse qui postule le changement de langue est une personne morale (voy. aussi cass., 15 septembre 1983, Pas., 1984, I, 48). Selon ces arrets,!'ignorance ou la connaissance insuffisante de la langue dans laquelle la procedure a ete introduite, par la personne morale qui en postule le changement doit etre appreciee differemment selon que la personne morale comparait en personne, c'est-a-dire par un organe competent pour la representer en justice (infra, nos 34 et 35) ou par un mandataire, << notamment >> par un avocat (voy. toutefois I' article 728 du Code judiciaire). Dans le premier cas, la connaissance de la langue s'apprecie dans le chef de l'organe en question, alors << qu'elle doit se deduire de l'activite de la defenderesse et notamment de la langue employee en fait pour son activite >>, dans le second cas. Les juridictions de fond paraissent s'etre inclinees devant cette solution (trib. trav. Bruxelles, 29 septembre 1986, J.T.T., 1986, p Comp. comm. Gand, 12 janvier 1989, T.G.R., 1989, p. 18). Elle presente!'inconvenient de faire une difference entre la capacite des personnes morales et celle des

71 REVUE CRITIQUE DE JURISPRUDENCE BELGE 643 personnes physiques que n'imposent ni la loi ni la nature des choses et elle peut conduire a une veritable violation des droits de la defense (Examen, 1981, p. 245, no 13). SECTION 3.- LES ORGANES DES PERSONNES MORALES 30. LES ORGANES SOCIAUX. - REPARTITION LEGALE DES COMPETENCES. - ENGAGEMENT DE LA SOCIETE A L'EGARD DES TIERS. - Sous reserve des delegations speciales de pouvoirs a des mandataires dans la mesure ou la loi ne les interdit pas, la volonte de la personne morale est exprimee par les organes dont elle est dotee par le legislateur et il appartient a ce dernier d' organiser la repartition des competences entre les differents organes qu'il institue (P. VAN 0MMESLAGHE et L. SI MONT, <<La notion de l'organe statutaire et la repartition des pouvoirs par le conseil d'administration de la societe anonyme)), cette Revue, 1964, p. 74, specialement n 9). La Cour de cassation (28 janvier 1985, R.P.S., 1986, p. 117 et la note D. MouGENOT) a du rappeler le premier de ces principes de base, dans une espece ou un membre du personnel d'une societe anonyme poursuivait a l'encontre de cette derniere!'execution d'une clause dite de << garantie d'emploi )) figurant dans une convention par laquelle plusieurs actionnaires, declarant agir tant en leur nom personnel qu'au nom des autres actionnaires et de la societe elle-meme, avaient cede une partie des actions representatives du capital de celle-ci a deux societes fram;aises. LaCour d'appel en avait deduit que la societe etait engagee personnellement par la clause en question, puisque toutes les parties a la convention, avant comme apres la cession des actions, representaient la totalite du capital de la societe, sans constater par ailleurs que tous ou certains des actionnaires etaient investis d'un mandat qui leur aurait permis d'engager la societe. La decision meconnaissait ainsi la regie selon laquelle, sous reserve d'eventuels mandats, la societe n'est valablement engagee envers les tiers que par les organes que la loi investit. de pouvoirs a cette fin. R.O.J.B. - 4e trim. 1992

72 644 REVUE CRITIQUE DE JURISPRUDENCE BELGE Le second principe que nous rappelons ci-dessus a ete applique par un jugement du tribunal de commerce de Liege du 21 decembre 1982 (R.P.S., 1983, p. 93). Une societe anonyme avait augmente son capital, pour partie par des apports en nature consentis par un premier groupe d'actionnaires et pour partie par une souscription en especes partiellement liberee faite par un autre groupe. Deux ans plus tard, le conseil d'administration avait accepte que la liberation du solde de!'apport en especes (< soit realisee par la dation en paiement d'une ligne de deroulage >> et il avait decide de soumettre!'evaluation de celle-ci a un reviseur d'entreprises. A juste titre, le tribunal denie toute valeur a cette decision. C'est l'assemb!ee generale qui est competente pour determiner les conditions des augmentations de capital qu'elle decrete, en particulier!'objet des souscriptions et des apports, et les actionnaires << ne peuvent invoquer les decisions du conseil d'administration pour aller a l'encontre de ce que l'assemblee generale a decide>>. Selon le tribunal civil de Bruxelles (13 fevrier 1981, R.P.S., 1984, 41 et note CoPPENs), la liberation d'une souscription en especes par!'apport d'un bien en nature constitue une novation par changement d'objet qui releve de la competence de l'assemblee generale. Mais, a notre avis, cette operation se heurte en toute hypothese a une objection fondamentale : lorsqu'une souscription a ete faite en especes et que, partant, les formalites prevues pour assurer la protection de la societe et des tiers en matiere de souscription en nature n'ont pas ete accomplies, la liberation de cette souscription doit avoir lieu de la maniere prevue. La dation en paiement ou la novation, meme decidee par l'assemblee generale, permettrait de faire l'economie de ces formalites. Meme si celles-ci etaient accomplies lors de la decision nouvelle prise par l'assemblee, des tiers auraient pu entretemps traiter avec la societe sur la foi d'un capital souscrit et a liberer en especes. (Cfr les reserves exprimees par M. Coppens dans sa note precitee.) N ous croyons des lors que la seule fa<;on de realiser cette operation correctement consiste a reduire le capital, en observant les formalites prescrites par la loi a ce propos, en dispensant les souscripteurs de faire leur apport et a reaugmenter

73 REVUE CRITIQUE DE JURISPRUDENCE BELGE 645 celui-ci par la souscription en nature. Telle est d'ailleurs la consequence qui decoule de!'analyse de!'operation en une novation : la novation suppose d'une part!'extinction de!'obligation ancienne. En espece, il s'agit de la dispense de!'obligation de liberer les apports en especes et une telle dispense est precisement visee par!'article 72bis des lois coordonnees. Elle implique d'autre part la naissance d'une obligation nouvelle, -a savoir!'obligation de souscrire et de liberer!'apport en nature qui est elle-meme soumise a des regles specifiques. La solution ainsi consacree par le tribunal demeure valable, apres!'introduction du capital autorise dans notre droit par la loi du 5 decembre 1984 (art. 33bis, 2, des lois coordonnees sur les societes commerciales. - Voy. not. a ce propos G. HoRs MANS et Fr. T'KINT, << Les apports, le capital et!'augmentation de capital>>, Ann. Fac. Dr. Louvain, 1985, p. 113). Au contraire, la liberation d'un apport en especes par la voie d'une compensation legale avec une creance de l'actionnaire contre la societe est licite, puisque celle-ci equivaut a un double paiement, sans que l'objet de la souscription s'en trouve par consequent modifie (VAN RYN, t. Ier, 1 re ed., no Examen, 1973, p. 386, no , p. 326, n 37bis). 31. NoMINATION IRREGULIERE n'un ORGANE. - CoNsE QUENCES. - L'arret du 18 mars 1981 de la Cour d'appel de Mons (Pas., 1981, II, 82), cite ci-dessus a propos des sanctions de la violation du principe de la specialite statutaire (supra, n 28), se prononce aussi sur les consequences qui doivent etre attachees aux irregularites affectant la nomination d'un organe. Selon!'article 13, alinea 2, des lois coordonnees sur les societes commerciales, tel qu'il resulte de la loi du 6 mars 1973, << l'accomplissement des formalites de publicite relatives aux personnes qui, en qualite d'organe, ont le pouvoir d'engager les societes, rend toute irregularite dans leur nomination inopposable aux tiers, a moins que la societe ne prouve que ces tiers en avaient connaissance )} (voy. L. SIMONT, etude precitee, R.P.S., 1974, p. 63, nos 62 et suiv. et << Les regles relatives a la publicite, aux nullites et aux actes accomplis au nom R.O.J.B. - 4e trim. 1992

74 646 REVUE CRITIQUE DE JURISPRUDENCE BELGE d'une societe en formation>>, in Les societes commerciales [1985], p. 75). Un probleme analogue a celui qu'a pose!'interpretation de!'article 63bis (supra, no 28) est laisse en suspens par ce texte : les tiers avec lesquels la societe a contracte a!'intervention d'un organe irregulierement designe peuvent-ils, quant a eux, opposer cette irregularite a la societe? La Cour d'appel de Mons repond a cette question par la negative : de meme que les tiers ne peuvent se prevaloir d'un depassement de l'objet social par les organes de la societe avec lesquels ils ont traite, ils ne peuv{mt opposer a celle-ci l'irregularite qui entache la nomination de ces organes. Cette solution doit etre approuvee par analogie avec celle que la Cour de cassation a consacree par l'arret du 12 novembre 1987 commente ci-dessus (supra, n 28). Reste la question des effets dont il convient d'assortir une annulation de la nomination irreguliere de l'organe. Avec la majorite des auteurs qui se sont le plus recemment prononces a cet egard (L. SIMONT, loc. cit.- J. RoNSE, op. cit., n 282. M. VAN DER HAEGHEN et Cl. VERBRAECKEN, op. cit., p. 130, n 24), nous pensons que la nullite doit produire ses effets ex nunc. Cette solution s'imposait deja avant la mise en concordance de notre droit avec la premiere directive europeenne en matiere de societes, pour des motifs IU~s aux inconvenients de la retroactivite dans les cas ou la nullite porte atteinte a des situations acquises auxquelles s'attachent des interets multiples (VAN 0MMESLAGHE, Le regime des societes par actions et leur administration en droit compare, n L. SIMONT, << Les administrateurs 'de facto' et les enseignements des droits anglais et americains >>, cette Revue, 1966, p. 462, no Contra : P. DE HARVEN, note sous cass., 19 fevrier 1940, cette Revue, 1948, p. 295). Tel est aussi!'esprit de la directive, qui renforce la pertinence de cette solution sous!'empire du droit nouveau (VAN 0MMESLAGHE, <<La premiere directive du Conseil du 9 mars 1968 en matiere de societes >>, Oah. Dr. Eur., 1969, p. 619, n 34). Comme le rappelle M. SIMONT (op. cit., in Les societes commerciales [1985], p. 77), il est loisible a la societe de ratifier

75 REVUE CRITIQUE DE JURISPRUDENCE BELGE 647 l'acte accompli par un organe irregulierement designe, sans que cette ratification puisse toutefois porter atteinte a des droits acquis par des tiers dans l'intervalle, conformement ala jurisprudence bien connue de la Cour de cassation en la matiere (cass., 6 fevrier 1953, Pas., 1953, I, P. VAN 0MMESLAGHE et L. SIMONT, <<La notion de l'organe statutaire et la repartition des pouvoirs par le conseil d'administration des societes anonymes >>, cette Revue, 1964, p. 74, n 6). Ces principes s'appliquent, meme lorsque l'irregularite en cause resulte de la meconnaissance d'une regie d'ordre public (L. SIMONT, loc. cit.), comme par exemple d'une violation de!'article 3bis nouveau de!'arrete royal no 22 du 24 octobre 1934 portant interdiction pour certains condamnes ou faillis de participer a 1' administration ou a la surveillance de certaines societes, qui donne competence au tribunal de commerce pour prononcer pareille interdiction a charge des dirigeants de droit ou de fait qui ont commis une faute grave et caracterisee ayant contribue a la faillite de la societe (art. 87 de la loi du 4 aoftt 1978 de reorientation economique. -G-A. DAL, (( Les effets de la faillite sur la personne du failli et les interdictions professionnelles >>, in L'entreprise en difficulte [1981], p Pour des applications de cette disposition, voy. A. BENOIT MauRY, Chronique de jurisprudence precitee, Actualites du droit, 1991, p. 91, n 38). Statuant par application des articles 1 er et 3 de I' arrete royal precite, un arret de la Cour d'appel de Bruxelles a precise une autre consequence qui peut resulter de l'irregularite commise dans la designation d'un organe (12 fevrier 1985, R.P.S., 1985, p. 187). En l'espece, une S.P.R.L. avait ete fondee par deux personnes physiques et la premiere, sachant que!'autre etait un failli non rehabilite, avait neanmoins concouru a sa designation en qualite de gerant statutaire de la societe. La gestion de celle-ci s'etait, selon les constatations de la Cour, revelee desastreuse et la faillite avait dft etre prononcee. Selon!'arret, le cofondateur d'une societe commet une faute aquilienne en concourant a la designation d'un failli non rehabilite comme gerant et cette faute se trouve dans une relation de causalite avec l'insuffisance d'actifs resultant de la mauvaise gestion du R.O.J.B. - 4e trim. 1992

76 648 REVUE CRITIQUE DE JURISPRUDENCE BELGE gerant, des lors que sans cette faute, ce dernier n'aurait pas eu la possibilite de gerer l'entreprise. Le curateur est done en droit de poursuivre a charge de cet associe la reparation du dommage cause a la masse par la mauvaise gestion du gerant irregulierement designe, a concurrence de l'insuffisance d'actifs, sur la base des articles 1382 et 1383 du Code civil (sur la recevabilite de l'action en responsabilite introduite par le curateur en cette qualite, depuis l'arret de la Cour de cassation du 12 fevrier 1981 [cette Revue, 1983, p. 5 et la note HEENEN], voy. P. CoPPENS et Fr. T'KINT, << Examen de jurisprudence Les faillites, les concordats et les privileges>>, cette Revue, 1991, p. 346, nos 31 et suiv.). 32. INTERVENTION DES ORGANES EN CETTE QUALITE. ENGAGEMENT DE LA SOCIETE ET ABSENCE D'ENGAGEMENT PER SONNEL DE L'ORGANE.- Les societes dotees de la personnalite juridique sont engagees directement par les actes accomplis par leurs organes agissant en cette qualite, conformement a la theorie de 1' organe. La meme theorie implique que la societe est responsable des fautes aquiliennes commises parses organes dans l'exercice de leurs competences, sur la base des articles 1382 ou 1383 du Code civil, et non point sur la base de l'article 1384, alinea 3, du meme Code, sans qu'il en resulte toutefois une immunite personnelle de l'organe vis-a-vis du tiers prejudicie (cass., 27 octobre 1982, Pas., 1983, I, 278 et la note E.K juin 1982, Pas., 1982, I, Adde Fr. GLANSDORFF, << Reflexions sur la theorie de l'organe >>,in La responsabilite des pouvoirs publics [1991], p J. VAN RYN et X. DIEUX, << La responsabilite des administrateurs ou gerants d'une personne morale a l'egard des tiers>>, J.T., 1988, p. 401). Par arret du 9 novembre 1987 (Pas., 1988, I, T.R. V., 1988, p. 355 et la note M. WIJCKAERT), la Cour de cassation ajoute que << lorsque les administrateurs d'une societe anonyme, organes de celle-ci agissant dans l'accomplissement de leurs fonctions legales ou statutaires, ont, dans le but de recueillir des souscriptions d'actions emises en vue d'augmenter le capital social, pratique des manrnuvres dolosives qui ont vicie le consentement des souscripteurs, ceux -ci sont recevables a intenter contre la societe anonyme elle-meme une

77 REVUE CRITIQUE DE JURISPRUDENCE.BELGE 649 action en nullite d'une telle souscription >> (comp. Examen, 1973, p. 388, no 35). Les manreuvres dolosives des organes commises en vue de la conclusion d'un acte juridique par la personne morale sont done imputables a cette dernii~re. Bien entendu, l'annulation de la souscription est susceptible de justifier en outre une responsabilite des administrateurs en vertu de l'article 35 des lois coordonnees sur les societes commerciales. Par contre, les organes ne sont pas personnellement engages aux termes des contrats qu'ils concluent pour la personne morale, ainsi que le rappelle l'article 62 des lois coordonnees sur les societes commerciales pour ce qui concerne la societe anonyme (Examen, 1981, p. 253, no 20). Encore faut-il que 1' organe agisse en cette qualite et que le tiers puisse se rendre compte que la personne physique avec laquelle il contracte ne prend pas!'engagement en cause a titre personnel. C'est ce que rappellent un arret de la Cour d'appel de Bruxelles du 30 mars 1983 (R.P.S., 1984, p. 31) et un arret de la Cour d'appel de Liege du 25 juin 1981 (R.P.S., 1982, p. 86), - ce dernier ajoutant toutefois, <(de maniere aussi singuliere que critiquable >>, comme l'observe M. SIMONT (Etude citee, in Les societes commerciales [1985], p. 71, n 10), <( qu'une societe anonyme, etre moral, est par sa nature impuissante a commander verbalement soit par telephone, soit autrement >>. Le juge du fond doit determiner en queue qualite la personne physique a agi en verifiant in concreto quelle a ete a cet egard!'intention reelle des parties (Examen, 1981, p. 252, no 18). Contrairement ace que suggere le sommaire precedant la publication de l'arret precite dans la Jurisprudence de Liege (1982, p. 9), le seul fait que l'une des formalites, enumerees en matiere de societes anonymes par l'article 81 des lois coordonnees sur les societes commerciales, n'a pas ete respectee n'est pas en soi determinant. La sanction que constitue la responsabilite personnelle de la personne physique a!'intervention de laquelle la societe est intervenue, telle qu'elle est prevue par l'article 82, n'est pas automatique (Liege, 12 janvier 1984, R.P.S., 1985, p. 248) : elle suppose que le tiers ait pu croire qu'il traitait avec une personne obligee personnellement par les engagements pris et qu'il demontre en outre que, sans cette R.O.J.B. - 4e trim. 1992

78 650 REVUE CRITIQUE DE JURISPRUDENCE BELGE erreur, il n'aurait pas contracte ou n'aurait contracte qu'a d'autres conditions (Examen, 1973, p. 355, no L. SI MONT, etude citee, in Les societes commerciales [1985], p. 71, n 10). L'omission de!'indication du numero d'immatriculation au registre du commerce, prescrite par!'article 81 pour les societes anonymes et par!'article 138 pour les S.P.R.L. n'est pas sanctionnee par les articles 82 et 138bis (Mons, 18 mars 1981, Pas., 1981, II, 82, precite). II en est de meme de Ia formalite prevue par!'article 138bis, alinea 3, selon laquelle le gerant d'une S.P.R.L. doit faire preceder ou faire suivre sa signature de!'indication de Ia qualite en laquelle il agit (comm. Bruxelles, 18 mars 1986, R.D.C.B., 1987, p. 451). Sous reserve de!'application de l'article 10, 4, des lois coordonnees sur les societes commerciales, Ia societe n'est valablement representee parses organes, que pour autant que les pouvoirs de ceux-ci n'aient pas pris fm. Une societe ne peut cependant pas etre depourvue d' organes (Examen, 1967, p. 308, n 26), et il appartient au gerant d'une S.P.R.L., au terme de ses fonctions, de poursuivre l'accomplissement de son mandat jusqu'a ce qu'il ait ete pourvu a son remplacement (Examen, 1967, p. 308, no , p. 79, n , p. 216, n 23). Le Conseil d'etat a applique ces principes, dans une affaire ou l'etat beige faisait valoir que!'ensemble des actes administratifs et de procedure relatifs a des autorisations d'exploitation accordees a une S.P.R.L., sur Ia base du reglement general sur Ia protection du travail, <( devait etre annule ab initio>>, pour le motif que le mandat du gerant de Ia societe etait expire au moment de l'accomplissement de tous ces actes et qu'aucun acte de renouvellement n'avait ete depose au greffe du tribunal de commerce. Selon!'arret (24 juin 1980, Rec., 1980, p. 837), cette circonstance n'est pas de nature a priver Ia societe de toute possibilite d'action aussi longtemps que le gerant n'a pas ete remplace. Encore les pouvoirs du gerant ne peuvent-ils <( survivre >> de Ia sorte que dans Ia mesure ou son intervention est indispensable pour permettre a Ia societe d'accomplir les actes neces- R.O.J.B. - 4e trim. 1992

79 REVUE CRITIQUE DE JURISPRUDENCE BELGE 651 saires a la sauvegarde de ses interets (voy. en matiere de societes anonymes, L. SIMONT, << Les administrateurs de facto et les enseignements du droit anglo-americain >>, cette Revue, 1966, p. 462, no 12). S'il existe plusieurs gerants, c'est a ceux qui restent en fonctions qu'il appartient d'accomplir ces actes. Le Conseil d'etat s'exprime done de maniere trop peu nuancee, lorsqu'il enonce, pour rejeter!'objection de l'etat belge, << qu'il est generalement admis qu'un gerant non remplace peut agir valablement tant qu'il n'est pas remplace >>. 33. REPRESENTATION DE LA PERSONNE MORALE PAR DES MANDATAffiES.- MA.NDAT APPARENT.- Si les societes dotees de la personnalite juridique agissent a!'intervention de leurs organes legaux, cela n'exclut pas qu'elles puissent aussi etre representees par des mandataires, titulaires de delegations speciales de pouvoirs. Un organe ne peut toutefois decider de deleguer la generalite de ses pouvoirs a un tiers (voy. sur cette interdiction, en matiere de societes anonymes :VAN 0MMESLAGHE, Les societes par actions et leur administration en droit compare, no VAN 0MMESLAGHE et SIMONT, <<La notion d'organe statutaire et la repartition des pouvoirs par le conseil d'administration de la societe anonyme>>, cette Revue, 1964, p Dans les societes de personnes, 1~ meme regle s'explique par le caractere personnel des pouvoirs du gerant : Liege, 16 janvier 1901, Pas., 1901, II, 175). Le droit commun du mandat s'applique dan.s ces situations. 11 en resulte que le mandataire n'est pas engage personnellement s'il a contracte au nom du mandant (L. SIMONT, J. DE GAVRE et P.-A. FoRIERS, Examen de jurisprudence, cette Revue, 1986, p. 406, no 235). Dans le cas contraire, la representation ne joue evidemment pas et le tiers n'a d'action qu'a l'encontre du mandataire qui n'a pas devoile sa qualite (ibid.). 11 en est ainsi, suivant le tribunal de 1 re instance de Bruxelles, lorsque le directeur du <<marketing>> d'une societe anonyme conclut un contrat de publicite, sans protester contre une mention figurant dans un document precontractuel emanant de l'autre partie, selon laquelle << il prenait toutes les responsabilites en son nom personnel>>, alors meme que ce directeur avait signe le contrat defmitif en cette qualite (29 fevrier 1980, R.G.J.B. - 4e trim. 1992

80 652 REVUE CRITIQUE DE JURISPRUDENCE BELGE R.P.S., 1980, p Liege, 25 juin 1981, R.P.S., 1982, p. 86, precite). II est bien entendu loisible a la societe de ratifier l'acte accompli par le mandataire au-dela de ses pouvoirs, ou par une personne demunie du moindre pouvoir de representation. La ratification peut etre tacite, pourvu qu'elle soit certaine. On peut transposer ace propos les criteres relatifs aux renonciations tacites a propos desquelles il existe une jurisprudence abondante et bien connue de la Cour de cassation (VAN 0MME SLAGHE, << Rechtsverwerking en afstand van recht >>, T.P.R., 1980, p << Examen de jurisprudence - Les obligations>>, cette Revue, 1988, p. 142, n 230). Tel est indiscutablement le cas, ainsi que l'admet la Cour d'appel de Liege dans un arret du 8 janvier 1982 (R.P.S., 1982, p. 149), lorsque le contrat passe par un employe de la societe n'a fait l'objet d'aucune protestation de la part de quiconque parmi les representants autorises de celle-ci et qu'il a au contraire ete execute pendant deux annees. Dans d'autres cas,!'engagement de la societe par une personne sans pouvoir ou qui excede ses pouvoirs est fonde sur la theorie de l'apparence, et plus particulierement sur celle du mandat apparent qui en est une illustration ( comm. Bruxelles, 18 mars 1986, R.D.C.B., 1987, p Comm. Verviers, 15 mars 1982, R.P.S., 1982, p Comm. Bruxelles, 18 novembre 1981, R.P.S., 1982, p Comm. Bruxelles, 18 juin 1981, J.C.B., 1982, p Sur la theorie de l'apparence ad generalia, voy.!'important arret de la Cour de cassation du 20 juin 1988, J.T., 1989, p. 547 et la note P.-A. Fo RIERS, qui renvoie a la litterature anterieure). 34. REPRESENTATION DES SOCI:ETES EN JUSTICE.- PROCE DURE DEVANT LE CONSEIL D'ETAT. - Les errements de la jurisprudence du Conseil d'etat relative a la representation des societes anonymes devant sa section d'administration, statuant au contentieux de l'annulation sur la base de!'article 14 de ses lois organiques, illustrent un certain nombre d'incomprehensions a propos du regime de la representation en justice des societes dotees de la personnalite juridique, deja denoncees par deux excellentes notes respectivement de Mme LAGA (<<De Raad van Staat en het annulatieberoep ingesteld door een R.O.J.B. - 4e trim. 1992

81 REVUE CRITIQUE DE JURISPRUDENCE BELGE 653 handelsvennootschap >>, T.R. V., 1988, p. 173) et de M. NELIS SEN GRADE(<< De vertegenwoordiging van de NV en de BVBA bij het instellen van een annulatieberoep voor de Raad van Staat>>, R.D.C.B., 1987, p. 202). Une mise au point nous parait s'imposer, tant du point de vue du droit des societes qu'au regard des n3gles de procedure, parfois serieusement malmenees a notre avis (voy. sur!'ensemble des principes exposes ci-dessous, J. RoNsE, << Proceshandelingen van en tegen vennootschappen >>, in Actuele problemen van gerechtelijk privaatrecht [1976], p. 87). D'une maniere generale, les societes dotees de la personnalite morale sont valablement representees en justice par leurs organes et ceux-ci s'identifient ala personne morale, par application de la theorie de l'organe (supra, no 32). II est done tres generalement admis que la societe comparait personnellement par ses organes devant les tribunaux de l'ordre judiciaire, conformement aux articles 728 et 753 du Code judiciaire en particulier (Examen, 1973, p. 347, n 8 16 et 17.- P. COPPENS, << La comparution en personne des societes commerciales et la controverse issue de!'article 728 du Code judiciaire >>, R.P.S., 1970, p. 149). En vertu de!'article 54, alinea 4, des lois coordonnees sur les societes commerciales, les organes de la societe anonyme, qui s'identifient a elle dans ses relations avec les tiers et en justice, comprennent non seulement le conseil d'administration et le delegue a la gestion journaliere dans les limites de sa competence, mais aussi ceux des administrateurs auxquels les statuts ont regulierement confie un pouvoir general de representation de la societe (L. SIMONT, op. cit., no 45.- MAEIJER et RoNSE, De vertegenwoordiging van rechtspersonen naar N ederlands en Belgisch recht [1978], p. 53). Ces principes de base sont applicables devant la section d'administration du Conseil d'etat. Ils tiennent ala theorie de l'organe en general, ainsi qu'aux mecanismes de representation mis en place par!'article 54 des lois coordonnees sur les societes commerciales, pour ce qui concerne les societes anonymes. La procedure devant cette section de la haute juridiction administrative ne presente pas de specificite qui justifie- R.O.J.B. - 4e trim. 1992

82 654 REVUE CRITIQUE DE JURISPRUDENCE BELGE rait que l'on y derogeat (dans le meme sens, notes LAGA et NELISSEN GRADE, precitees). Les arrets du Conseil d'etat, selon lesquels le conseil d'administration de la societe anonyme serait seul competent pour decider de!'introduction d'une requete en annulation contre un acte ou un reglement d'une autorite administrative ou contre une decision contentieuse administrative, a!'exclusion de ceux des administrateurs auxquels les statuts attribuent un pouvoir general de representation de la societe conformement a }'article 54, alinea 4, meconnaissaient done, a notre avis de maniere flagrante, cette derniere disposition (8 octobre 1985, Pas., 1988, IV, juillet 1981, Rec., 1981, p. 1149, dont les motifs sont particulierement obscurs au regard du droit des societes). A l'appui de la solution consacree par ces arrets, on a cependant fait valoir que la directive europeenne de 1968 et la loi beige du 6 mars 1973 distinguent entre la gestion interne, necessairement collegiale sous la seule reserve eventuelle de la gestion journaliere, et le pouvoir de representation dans l'ordre externe. On en a deduit que la decision d'intenter une action en justice doit toujours etre prise par le conseil d'administration, dans la mesure ou elle interesse aussi l'ordre interne de la societe (voy., outre l'arret precite du 8 octobre 1985, un arret du 14 septembre 1984, Pas., 1987, II, 27.- En ce sens : VAN CoMPERNOLLE, << L'action en justice des societes et groupements >>, T.P.R., 1980, p. 105 et 106). Cette opinion nous parait toutefois contraire ala theorie de 1' organe, qui implique que la personne a laquelle la qualite d'organe est reconnue s'identifie ala societe dans ses relations avec les tiers (supra, no 32). Comment expliquer des lors que cette personne ne puisse engager la societe qu'en justifiant d'une decision prealablement prise par un autre organe? C'est ce que nous n'apercevons pas. Sans doute cette exigence etait-elle formulee, sous l'empire du droit anterieur, a propos de la clause de double signature, puisque celle-ci ne comportait qu'une presomption simple de deliberation conforme prealable du conseil d' administration (VAN 0MMESLAGHE et SIMONT, <<La clause d'organe statutaire et la repartition des pouvoirs par le conseil d'administration R.O.J.B. - 4e trim. 1992

83 REVUE CRITIQUE DE JURISPRUDENCE BELGE 655 de la societe anonyme>>, cette Revue, 1964, p. 72). Mais ceux auxquels la signature sociale etait ainsi attribuee n'etaient pas des organes (ibid.) et la loi de 1973 a precisement simplifie ce regime artificiel et complexe, a!'inspiration du droit allemand (VAN 0MMESLAGHE, <<La premiere directive du conseil du 9 mars 1968 en matiere de societes >>, Oak. Dr. Eur., 1969, p LAGA, op. cit.). Fort heureusement, par un arret du 10 decembre 1986 (publie avec les etudes precitees de Mme LAGA et de M. NELIS SEN GRADE, ainsi qu'a la R.P.S., 1987, p. 25, avec les obs. de Mme BENOi'T-MOURY), le Conseil d'etat est revenu sur ce point a une conception plus exacte des choses, considerant que la clause des statuts qui investit un ou plusieurs administrateurs de pareils pouvoirs << cree un organe >> competent en soi pour decider de!'introduction d'une requete en annulation. D'autres inexactitudes subsistent neanmoins dans la jurisprudence de la haute juridiction administrative. Comme indique ci-dessus, le delegue ala gestion journaliere est indiscutablement un organe de la societe et la gestion journaliere comporte l'intentement des actions en justice se rapportant aux actes qui rentrent dans ses limites, a apprecier in concreto en fonction de l'objet social (BENOIT-MOURY, Note sous C.E., 3 am1t 1984 [deux especes], R.P.S., 1985, p. 18, specialement p. 30 et 31). C'est done a tort, nous parait-il, que par un arret du 18 septembre 1984, le Conseil d'etat reitere sa jurisprudence anterieure selon laquelle la decision d'introduire une action en justice, et particulierement une requete tendant a l'annulation d'un acte administratif, ne peut aucunement (<< geenszins >>) etre consideree comme un acte de gestion journaliere (comp. VAN CoMPERNOLLE, op. cit., p. 105). Sans doute est-il rare que!'introduction d'un tel recours reponde aux criteres de la gestion journaliere tels que la Cour de cassation les a definis ( actes commandes par les besoins de la vie quotidienne de la societe et ceux qui, tant en raison de leur peu d'importance qu'en raison de la necessite d'une prompte solution, ne justifient pas!'intervention du conseil d'administration : cass., 17 septembre 1968, Pas., 1969, I, 61), mais on ne peut l'exclure d'une maniere inconditionnelle et absolue.

84 656 REVUE CRITIQUE DE JURISPRUDENCE BELGE De meme, on est surpris de lire, dans!'arret pn3cite du 3 aout 1984 que << le conseil d'administration ne peut deleguer legalement le pouvoir qui lui appartient de decider d'introduire un recours devant le Conseil d'etat>>. Cette affirmation meconnait le principe selon lequel la delegation journaliere peut etre confiee par le conseil d'administration a un de ses membres ou a des tiers, meme lorsque les statuts ne comportent aucune autorisation expresse a cette fm (VANRYN, t. rr, 1 re ed., n 646). De plus, la societe peut aussi designer un ou plusieurs mandataires speciaux pour l'intentement des procedures et pour leur poursuite (L. SIMONT, <<La loi du 6 mars 1973 modifiant la legislation sur les societes commerciales >>, R.P.S., 1974, p. 1, n 8 41, 50 et 61.- VAN 0MMESLAGHE et SIMONT, (<La notion de l'organe statutaire et la repartition des pouvoirs par le conseil d'administration des societes anonymes >>, cette Revue, 1964, p. 74, no 3 et la note 9. - Cass., 9 fevrier 1978, Pas., 1978, I, 669). A defaut d'identification entre la societe et son mandataire, celui-ci ne peut comparaitre personnellement pour la societe et il doit confier cette mission a un avocat, sous la forme du traditionnel mandat ad litem dont les avocats ont conserve en principe le monopole. 35. SuiTE.- MANDAT <<AD LITEM>>.- EFFETS.- Tres discutable aussi nous parait!'affirmation, souvent repetee par la haute juridiction administrative, selon laquelle il lui appartient de verifier, meme d'office, que!'introduction de la requete en annulation a bien ete decidee par l'organe competent de la societe avant!'expiration du delai fixe pour!'introduction du recours, alors meme que la requete est signee par un avocat qui represente la societe a!'audience : suivant cette jurisprudence, il appartient a ce dernier d'etablir que la decision prealable a son intervention a ete regulierement prise (en ce sens, outre les decisions citees ci-dessus : C.E., 7 mars 1980, Rec., 1980, p novembre 1980, Rec., 1980, p juillet 1981, Rec., 1981, p decembre 1981, Rec., 1981, p octobre 1982, Rec., 1982, p fevrier 1983, Rec., 1983, p decembre 1983, Rec., 1983, p janvier 1986, R. W., et la note LAMBRECHTS).

85 REVUE CRITIQUE DE JURISPRUDENCE BELGE 657 Selon les articles 440 et 848 du Code judiciaire, l'avocat titulaire d'un mandat ad litem est presume avoir ete regulierement investi des pouvoirs necessaires pour!'introduction et la poursuite de la procedure. 11 n'a pas a justifier d'une procuration. Cette presomption n'est pas irrefragable mais il appartient a la partie qui pretend la renverser de rapporter la preuve de son allegation. LaCour de cassation a confirme fermement ces principes (cass., 9 fevrier 1978, Pas., 1978, I, Dans le meme sens encore, cass., 18 decembre 1984, Pas., 1985, I, Note J-F. RoMAIN sous Mons, 23 mars 1989, R.D.C.B., 1990, p. 326). Leur fondement se trouve dans<< l'etat, le caractere et la discipline>> de la profession d'avocat (Rapport du commissaire royal ala reforme judiciaire, Pasin., 1967, p. 383) et, a tous ces points de vue, les conditions d'exercice de celle-ci ne sont pas differentes devant la section d'administration du Conseil d'etat. Certains arrets font valoir que les regles relatives a!'introduction des recours devant le Conseil d'etat sont d'ordre public (voy. aussi LAMBRECHTS, Geschillen van bestuur [1988], p. 198). Mais cette observation n'implique pas que l'on doive s'ecarter des principes consacres par le Code judiciaire. Tout au plus ce caractere pourrait-il justifier que le Conseil d'etat declarat d'office la requete irrecevable s'il apparaissait du dossier que le recours n'a effectivement pas ete introduit dans le delai par la ou les personnes competentes pour le faire ( organes ou mandataires). (Dans le sens que nous defendons : N ovelles, Droit administratif, t. VI, no Sur le moyen souleve d'office par le juge, voy. l'etude de M. le conseiller MEE"US, <<La notion de loi imperative et son incidence sur la procedure en cassation et sur l'office du juge >>, cette Revue, 1988, p. 498, n 26.) De plus, nombre de recours introduits devant les juridictions de l'ordre judiciaire interessent egalement l'ordre public sans que la Cour de cassation ait ecarte en ce cas les principes ci-dessus exposes. Tel est le cas par exemple de la procedure en matiere d'impots sur les revenus- qui n'est pas regie directement par le Code judiciaire et interesse a!'evidence l'ordre public. Le Conseil d'etat s'est montre plus respectueux de la tradition, dans differentes decisions relatives a la recevabilite de

86 658 REVUE CRITIQUE DE JURISPRUDENCE BELGE recours introduits par des S.P.R.L., rappelant in terminis que << lorsque la requete introductive d'instance porte la signature d'un avocat inscrit au tableau de I' ordre et declarant a voir ete commis a cet effet, il y a presomption d'introduction valable du recours>> (C.E., 13 avril 1978, Rec., 1978, p fevrier 1979, Rec., 1979, p juin 1980, Rec., 1980, p juin 1987, T.R. V., 1988, p. 110 et note K. LEE NAERTS), - ce qui n'exclut pas que la requete puisse etre declaree irrecevable lorsqu'il est etabli par le dossier que }'introduction de la requete n'a pas ete decidee par l'organe competent, comme nous le disons ci-dessus (C.E., 11 juin 1980, Rec., 1980, p. 757) (17). A vrai dire la difference de traitement entre la S.P.R.L. et la societe anonyme nous apparait egalement difficilement comprehensible. 36. IDENTIFICATION DE LA SOCIETE A SES ORGANES. AUTRES CONSEQUENCES DU POINT DE VUE PROCESSUEL. REPRESENTATION PASSIVE DES PERSONNES MORALES. ENQUETES. - Considerant que les liquidateurs sont les << organes >>de la societe en liquidation (VANRYN et HEENEN, t. II, peed., n 1062), la Cour de cassation decide que le pourvoi en cassation ou l'appel dirige contre le liquidateur en cette qualite sont censes diriges contre la societe elle-meme (cass., 23 janvier 1978, Pas., 1978, I, decembre 1977, Pas., 1978, I, 469 et les notes. - Trav. Liege, 15 septembre 1982, Jur. Liege, 1983, p. 101). On ne saurait approuver, des lors, un jugement du tribunal de 1 re instance de Liege, selon lequel la tierce opposition notifiee aux liquidateurs en cette qualite n'emporte pas citation de la societe a comparaitre au sens de!'article 1125 du Code judiciaire, au motif que la societe dissoute conserve sa personnalite morale pour les besoins de sa (17) L'arret se prononce ainsi implicitement sur la portee qui doit etre attribuee devant le Conseil d'etat a la clause statutaire d'attribution d'un pouvoir conjoint de representation generale a deux gerants. Deux autres arrets (C.E., 18 juin 1985, Pas., 1988, IV, novembre 1987, T.R. V., 1988, p. 358 et note K. GEENS) se prononcent egalement sur cette question, sur laquelle nous reviendrons en detail dans le chapitre consacre aux S.P.R.L., dans la mesure ou elle concerne }'interpretation qu'il faut donner a l'article 130 des lois coordonnees sur les societes commerciales dans toutes ses applications.

87 REVUE CRITIQUE DE JURISPRUDENCE BELGE 659 liquidation (11 mai 1979, Jur. Liege, 1980, p. 21 et la note DE LEVAL). Inventant un principe selon lequel <<nul ne peut etre temoin dans sa propre cause)>, le tribunal de 1 re instance de Namur refuse d'entendre comme temoin le gerant d'une S.P.R.L., dans le cadre d'une procedure introduite par elle a l'intervention de ce dernier (3 juin 1988, Rev. Reg. Dr., 1988, p. 413). C'est oublier que le juge peut parfaitement ordonner la comparution personnelle d'une partie en vue de confronter ses dires a ceux de la partie adverse ou d'autres temoins (art. 992 et suiv. du Code judiciaire. - FETTWEISS, Manuel de procedure civile, n 549), les temoignages n'ayant d'ailleurs pas d'autre force probante que celle qui s'attache aux presomptions que le juge estime pouvoir en deduire, conformement a l'article 1353 du Code civil (MouGENOT, <<La preuve)>, in Rep. Not., 1990, n et 226). 37. LES ENGAGEMENTS PRIS AU NOM D'UNE SOCIETE EN FOR-. MATION.- L'article 13bis des lois coordonnees sur les societes commerciales a une portee tout a fait generale : il s'applique a tous les engagements pris au nom d'une societe en formation, << de quelque nature qu'ils soient, y compris done ceux qui resultent de la violation d'un contrat conclu au nom de la societe)>, ainsi que le precise la Cour du travail de Bruxelles (24 juillet 1979, R.P.S., 1980, p. 46). Il en resulte que l'indemnite eventuellement due en cas de resiliation d'un contrat de travail pour un motif grave conteste par le travailleur, doit etre supportee par la societe, une fois celle-ci formee dans le delai de deux ans que prevoit cette disposition et si elle a repris les engagements decoulant du contrat de travail conclu en son nom, meme si le licenciement est intervenu avant sa constitution (meme decision). De meme, lorsque des polices sont souscrites aupres d'une compagnie d'assurance par les promoteurs d'une societe d'entreprise de construction en formation, pour la couverture des risques lies ala responsabilite civile de l'entreprise et aux accidents du travail, ces promoteurs sont tenus au paiement des primes, par application de }'article 13bis, meme si la societe n'a jamais ete constituee, des lors que la compagnie n'a jamais ete avertie de cette situation (Anvers, 19 janvier 1984,

88 660 REVUE CRITIQUE DE JURISPRUDENCE BELGE R.D.C.B., 1984, p. 616). En l'espece, les polices avaient pris cours, pratiquement immediatement apres leur signature, en sorte qu'il existait un risque assure, avant!'expiration des delais fixes par!'article 13bis. Une question - controversee dans la doctrine beige - concerne le caractere suspensif ou resolutoire de la condition a laquelle!'engagement personnel des promoteurs est subordonne, dans le systeme issu de la premiere directive. Plusieurs auteurs estiment qu'il s'agit d'une condition suspensive, en sorte que!'engagement personnel des promoteurs depend du defaut de constitution de la societe dans les deux ans de!'engagement pris ou de!'absence de reprise de celui-ci dans les deux mois de la constitution de la societe (L. SIMONT, etudes citees, in R.P.S., 1974, p. 69, no 67 et dans Les societes commerciales, p. 85, no M. VAN DER HAEGHEN et 01. VERBRAECKEN, etude citee, J.T., 1974, p. 129, no J. 'T KINT, note sous comm. Marche-en-Famenne, 16 novembre 1981, p. 162). Selon MM. RoNSE (De vennootschapswetgeving, 1973, n 105) et CoiPEL (Regles communes a toutes les societes commerciales, op. cit., no 234), les promoteurs sont au contraire immediatement tenus sous reserve de la reprise des engagements par la societe, dans les delais prevus. Les droits etrangers dont les auteurs de la premiere directive se sont inspires invitent ala consecration de cette seconde solution (VAN 0MMESLAGHE, etude citee, in Cah. Dr. Eur., 1969, p. 629, nos 35 et suiv.) et nous ne voyons pas que le texte de!'article 13bis de la loi, pas plus d'ailleurs que!'article 7 de la directive, consacre la doctrine opposee. Le jugement precite du tribunal de commerce de Marche-en-Famenne se prononce dans le sens que nous suggerons, dans une espece ou il s'agissait de determiner quel effet il convenait de donner a une convention de cession de fonds de commerce conclue entre une societe en formation et une societe concordataire, sous la condition de!'homologation du concordat. Celle-ci etant intervenue, le promoteur est condamne au paiement de la partie du prix ainsi devenue exigible conformement aux termes du contrat, sans qu'il faille attendre la constitution de la societe et la reprise par elle des engagements souscrits en son nom. R.O.J.B. - 4e trim. 1992

89 REVUE CRITIQUE DE JURISPRUDENCE BELGE 661 Dans cette affaire, le promoteur avait commence provisoirement a exploiter le fonds sous le couvert d'une convention provisoire approuvee par le juge delegue. L'espece illustre neanmoins les graves inconvenients qui pourraient resulter de la these adverse, dans des situations de ce genre, des lors qu'elle pourrait rendre impossible en pratique!'exploitation du fonds de commerce cede dans des conditions normales, jusqu'a ce que la societe ait ete effectivement constituee. Le report de!'engagement personnel des promoteurs a!'expiration du delai de deux ans fixe par!'article 13bis rendrait egalement impossible la conclusion de contrats synallagmatiques a prestations successives avec effet immediat, que l'on rencontre pourtant frequemment en pratique. L'arret precite de la Cour d'appel d'anvers du 19 janvier 1984 en offre une illustration. Pour des raisons semblables, nous ne croyons pas pouvoir approuver un jugement du tribunal de 1 re instance de N amur du 7 novembre 1989 (R.P.S., 1990, p. 285), selon lequell'article 13bis ne concerne que les engagements contractes au nom d'une societe en formation a!'exclusion des (< droits >) acquis dans les memes conditions, avec pour consequence que dans le cas ou la societe n'est jamais constituee, le promoteur ne peut passe prevaloir a l'egard de l'autre partie des droits decoulant de l'acte accompli au nom de la societe en formation. Cette interpretation purement litterale de!'article 13bis, condamnee par la meilleure doctrine beige (L. SIMONT, etude citee, R.P.S., 1974, p. 68), meconnait l'interdependance reciproque qui caracterise les droits et les obligations decoulant de la plupart, sinon de toutes, les operations conclues dans la perspective de la constitution d'une societe commerciale (Baux, contrats de travail, contrats d'approvisionnement, d'achat, d'assurance, etc.). Un arret de la Cour d'appel d'anvers (15 juin 1987, T.R. V., 1988, p. 218), que la Cour de cassation a refuse de censurer (17 avril 1989, T.R. V., 1989, p. 319 et la note J.-L. SNYERS), considere que la reprise par une S.P.R.L. d'un contrat conclu en son nom alors qu'elle etait en voie de formation, pour!'acquisition du fonds de commerce qu'elle devait exploiter, ne peut resulter de la seule constitution ulterieure de la societe. Les promoteurs pretendaient que cette constitution emportait

90 662 REVUE CRITIQUE DE JURISPRUDENCE BELGE en soi la reprise tacite du contrat, parce que la societe n'aurait pu realiser son objet sans devenir proprietaire du fonds de commerce en question. Ce sout?mement est rejete, l'objet social de la S.P.R.L. en l'espece n'etant pas limite par les statuts a!'exploitation de ce fonds de commerce determine. La Cour d'appel avait ajoute, de maniere superflue, que la reprise du fonds de commerce par la societe, ainsi que des engagements decoulant du contrat d'achat, aurait requis une decision de l'assemblee generale statuant dans les conditions prevues pour les quasi-apports. Cette exigence decoule expressement de l'article 120quater, alinea 1 er, introduit dans les lois coordonnees sur les societes commerciales par la loi du 5 decembre 1984 (G. HoRSMANS et Fr. T'KINT, <( Les apports, le capital et!'augmentation de capital>>, Ann. Fac. Dr. Louvain, 1985, p. 113, no 19). Elle ne s'impose bien entendu que si les promoteurs deviennent fondateurs, associes ou gerants, ce qui ne se produit pas necessairement meme si le cas est frequent. Comme l'observe M. Snyers dans sa note precitee,!'application de!'article 120quater en l'espece etait toutefois hors de propos, car tous les delais prevus par l'article 13bis etaient depuis longtemps expires, lorsque la loi du 5 decembre 1984 est entree en vigueur. 38. RESPONSABILITE PENALE DES PERSONNES MORALES. - La Cour de cassation demeure fidele au principe selon lequel les personnes morales n'encourent pas de responsabilite penale, de sorte que les infractions commises par les societes commerciales doivent etre reprimees dans le chef des personnes physiques par lesquelles elles agissent, notamment leurs organes ou leurs preposes (Examen, 1981, p. 258, no 25) : 15 avril 1989, Pas., 1989, I, Cass., 9 octobre 1984, Pas., 1985, I, mai 1982, Pas., 1982, I, octobre 1980, Pas., 1981, I, decembre 1978, Pas., 1979, I, 424. Encore faut-il que!'infraction puisse etre personnellement imputee a la personne physique poursuivie. En vertu de ce principe, qui tient a!'essence subjective de la responsabilite penale, il ne suffit pas de constater que telle ou telle personne physique est un organe de la societe ou un prepose affecte a telle ou telle activite pour que cette personne doive automati-

91 REVUE CRITIQUE DE JURISPRUDENCE BELGE 663 quement repondre des infractions constatees dans le cadre de!'exploitation de l'objet social (memes arrets). Par son arret precite du 21 octobre 1980, la Cour de cassation a rappele dans cet esprit la solution traditionnellement admise en matiere de banqueroute, selon laquelle l'organe d'une societe faillie, en l'espece le gerant d'une S.P.R.L., peut etre condamne pour banqueroute, encore qu'il ne soit pas lui-meme commer9ant, s'il a personnellement accompli en cette qualite les actes constitutifs de!'infraction (Examen, 1981, loc. cit.). Ces memes principes impliquent aussi que le prepose charge de }'application sur un chantier de mesures de securite arretees par l'administrateur-delegue d'une societe anonyme soit penalement responsable des accidents dus a un defaut de surveillance, a!'exclusion de cet administrateur-delegue, des lors que ce dernier etait in specie fonde a croire a une diligence normale de la part de son subordonne (B:r;-uxelles, 26 juin 1980, R. W., , col Sur la liceite de pareille delegation : P. DELATTE, <<La question de la responsabilite penale des personnes morales en droit belge >>, R.D.P., 1980, p. 191, specialement p. 205). Mais la delegation a un subalterne de taches dont l'accomplissement est reglemente par des dispositions legales assorties de sanctions penales n'immunise pas absolument l'organe de sa responsabilite penale et les peines peuvent etre prononcees a sa charge lorsque!'infraction lui demeure in concreto imputable en depit de cette delegation, par exemple parce qu'il a omis de donner les instructions necessaires, qu'il s'est desinteresse de leur execution, ou qu'il a manque a une obligation de surveillance (corr. Bruxelles, 14 janvier 1986, Pas., 1986, III, Corr. Bruges, 30 avril 1980, J.T.T, 1983, p. 120). Par un arret du 23 mai 1990, la Cour de cassation etend tres logiquement le champ de ces regles aux dirigeants de fait (R.D.P., 1990, p et la note) : << les infractions commises dans ou a l' occasion de la gestion d'une societe commerciale, enonce la Cour, peuvent avoir comme auteurs penalement responsables ceux qui, en fait, gerent cette societe, meme s'ils n'en sont pas des organes >>. Comme le precise le professeur R. LEGROS, l'imputabilite judiciaire de!'infraction n'est pas limitee aux organes ou preposes et le juge doit << rechercher la

92 664 REVUE CRITIQUE DE JURISPRUDENCE BELG E personne qui, dans la realite des choses, est cause de l'etat infractionnel dans lequel a ete mise la societe>> (<< Le droit penal dans l'entreprise >>, J.T.T., 1977, p. 169, specialement p. 173). La controverse concernant la responsabilite penale des personnes morales elles-memes demeure neanmoins vive dans la doctrine moderne (voy., outre les etudes citees dans le precedent Examen, 1981, loc. cit., L. FRANQOIS, <<Implications du Delinquere sed non punire potest», Melanges Legros, p P. BALATE, etude citee in R.D.P., 1980, p F. VAN REMOORTERE, <<La question de la responsabilite penale des personnes morales en droit de l'environnement >>, R.D.P., 1991, p. 311, ainsi que les etudes de J. D'HAENENS, J. VERHAEGEN et B. DEJEMEPPE, in ((Aspects particuliers de la reforme du droit penal>>, Ann. Fac. Dr. Louvain, 1983, p. 59 et suiv.). Elle s'est refletee dans les travaux de la Commission de reforme du Code penal (R. LEGRos, <<Observations sur le rapport de juin 1978 de la Commission pour la revision du Code penal>>, J.T., 1980, p. 17, specialement no 8. - Voy. aussi!'article 55 de l'avant-projet de Code penal finalement issu de ces travaux). Sans aller jusqu'a remettre en cause le principe de l'irresponsabilite penale des personnes morales, plusieurs auteurs denoncent certaines consequences qui en sont parfois trop hativement deduites. Ainsi, par son arret du 26 juin 1990, la Cour d'appel de Bruxelles a considere, a propos de l'etat beige mais en vertu de regles pareillement applicables aux personnes morales de droit prive, que la reparation du dommage cause par une infraction ne peut etre poursuivie devant le juge repressif a charge d'une personne morale, lorsque!'infraction a ete commise par un de ses organes agissant en cette qualite (R.G.A.R., 1991, n 11767). Cette solution est tout a fait classique et conforme a la tradition. Mais comme le montre M. Fr. GLANSDORFF (<< Reflexions sur la theorie de l'organe >>, in La responsabilite des pouvoirs publics [1991], p. 61, specialement n 3), elle repose sur une interpretation exagerement restrictive de la notion de << personne civilement responsable >> au sens du Code d'instruction criminelle. Elle procede en outre d'une logique R.G.J.B. - 4e trim. 1992

93 REVUE CRITIQUE DE JURISPRUDENCE BELGE 665 deductive tres abstraite, qui conduit a conferer ala fiction de!'identification de la personne morale a ses organes une portee etrangere aux besoins pour lesquels la jurisprudence et la doctrine ont jadis cree cette fiction (sur le procede de la fiction et les abus qu'il suscite sou vent en ce sens : VAN 0MMESLAGHE et SIMONT, (<La notion de l'organe statutaire et la repartition des pouvoirs par le conseil d'administration des societes anonymes >>, cette Revue, 1964, p. 74, specialement note 23.- Sur le caractere (< fictif )) de!'identification de la personne morale a ses organes et les besoins auxquels elle repond, J. VANRYN et X. DIEUX, <<La responsabilite des administrateurs ou gerants d'une personne morale a l'egard des tiers>>, J.T., 1988, p. 403). SECTION 4. - LA DENOMINATION SOCIALE 39. PROTECTION DE LA DENOMINATION SOCIALE SELON LE DROIT DES SOCIETES. - Selon les articles 28 et 117 des lois coordonnees sur les societes commerciales, la denomination des societes anonymes et des societes privees a responsabilite limitee << doit etre differente de celle de toute autre societe>>. << Si elle est identique, enoncent les memes dispositions, ou si sa ressemblance peut induire en erreur, tout interesse peut la faire modifier et reclamer des dommages et interets, s'il y a lieu>>. Ces regles expriment un principe assurant a toutes les societes commerciales la protection de leur denomination (Examen, 1981, p. 250, n 17), ainsi que le confirme implicitement un jugement du tribunal de commerce de Liege du 18 decembre 1987 statuant sur la demande introduite par une societe cooperative << Datasoft Management>> a l'encontre d'une S.P.R.L. <<Data soft Production>> (J.L.M.B., 1988, p. 437 et la note approbative de M. le conseiller PARMENTIER). Elles s'appliquent a la denomination sociale telle qu'elle resulte des statuts, laquelle peut etre differente du nom commercial utilise par la societe pour!'exploitation de son fonds de commerce (P. DE VROEDE et M. FLAMEE, Precis de droit economique belge [1991], nos 1893 et suiv.). Le nom commercial beneficie en tant que tel d'une protection sur la base de l'ar- R.O.J.B. - 4e trim. 1992

94 666 REVUE CRITIQUE DE JURISPRUDENCE BELGE ticle 8 de la convention de Paris dans sa version de Stockholm du 14 juillet 1967 et sur la base de la loi sur les pratiques du commerce (articles 23, 8, et 93 de la loi du 14 juillet 1991 sur les pratiques du commerce et sur!'information et la protection des consommateurs) (ibid., Bruxelles, 13 decembre 1985, R.D.C.B., 1987, p. 422). La protection de la denomination sociale n' est pas reservee aux denominations originales ou qui se caracteriseraient par un certain degre de creativite. Encore faut-il que la denomination soit suffisamment distinctive : l'emploi d'un vocable banalise a force d'emplois repandus par de multiples societes n'implique aucune appropriation par l'une d'elles du vocable en cause et il n'est pas susceptible, tel quel, de la protection que dispensent les lois coordonnees sur les societes commerciales (comm. Liege, 20 fevrier 1986, R.D.C.B., 1987, p. 537, a propos du mot << Star >>). Traditionnellement, l'on considere que!'application des articles 28 et 117 suppose simplement un risque de confusion resultant de la ressemblance entre les denominations et que ce risque doit etre apprecie dans l'abstrait (Examen, 1981, p. 249, n VAN RYN, t. rer, 1 re ed., n P. MAEYAERT et G. BoGAERT, << Handelsnaam - Vennootschapsnaam- Merk- Bescherming en onderlingen conflicten >>, R.D.C.B., 1990, p. 190, specialement p. 204). II est indifferent que les societes soient ou non des concurrentes, qu'elles exploitent ou non des entreprises semblables ou qu'elles aient une implantation ou un rayon geographique identiques ou comparables. Le risque de confusion entre les deux denominations, prises en elles-memes, doit exister selon!'appreciation de l'homme moyen normalement attentif (Bruxelles, 16 janvier 1990, R.D.C.B., 1990, p Comm. Audenarde, 11 juin 1985, R. W., , col Comm. Liege, 28 janvier 1981, R.P.S., 1982, p Comm. Bruxelles [ref.], 9 octobre 1981, R. W., , col et la note J. SLOOT MANS). II appartient au juge du fond de l'apprecier souverainement (cass., 13 mai 1983, Pas., 1983, I, 1031). C'est done a tort qu'un jugement du tribunal de commerce de Gand du 3 decembre 1984 (R.P.S., 1985, p. 317) a cru devoir faire reference a l'identite approximative de l'objet

95 REVUE CRITIQUE DE JURISPRUDENCE BELGE 667 social des societes en conflit pour apprecier le risque de confusion entre leurs denominations. On ne saurait davantage approuver un arret de la Cour d'appel de Liege du 21 septembre 1990 (R.P.S., 1990, p. 283) qui enonce, d'une maniere aussi inexacte que peremptoire, que << le risque de confusion (en l'espece entre la denomination d'une S.P.R.L. et celle d'une societe anonyme) doit etre apprecie a la lumiere de toutes les circonstances de fait et ne peut dependre uniquement de la ressemblance entre les vocables>>. Deduisant les consequences de la premisse erronee qu'elle avait ainsi posee, la Cour conclut a!'absence de confusion, dans les circonstances de la cause, apres avoir constate que l'aire geographique et la clientele des deux entreprises etaient differentes, meme si leurs objets statutaires etaient partiellement identiques. 40. AUTRES PROTECTIONS DE LA DENOMINATION SOCIALE. - LOI SURLES PRATIQUES DU COMMERCE.- LOI UNIFORME SUR LES MARQUES.- Les deux decisions ci-dessus evoquees (supra, no 39) ont ainsi confondu la protection de la denomination sociale assuree par les lois coordonnees sur les societes commerciales et celle qui resulte des articles 20, 3, ou 54, de la loi sur les pratiques du commerce alors en vigueur (comp. G. WA LEWIJK, << Problemes lies au choix de la denomination sociale >>, R.N.B., 1986, p. 515, qui parle ace propos d'un << deplacement jurisprudentiel >>). La partie qui fonde sa demande sur la loi sur les pratiques du commerce ne doit pas etablir que le defendeur est un concurrent (P. DE VROEDE et M. FLAMEE, op. cit., n 1612 et nos 1885 et suiv.). Mais illui incombe de demontrer in concreto la confusion ou le risque de confusion qui resulte de la publicite ou de!'utilisation de la denomination auxquelles elle demande qu'il soit mis fin. Lorsque la demande se base sur!'article 54 (actuellement 93), il faut en outre que!'utilisation de la denomination d'une autre societe soit de nature a porter atteinte aux interets de celle-ci (P. DE VROEDE et M. FLAMEE, op. cit., nos 1614 et 1884). Dans les deux cas, des elements tels que l'objet social, la nature de la clientele, l'aire d'exploitation de l'activite commerciale en cause devront etre done etre pris en consideration

96 668 REVUE CRITIQUE DE JURISPRUDENCE BELGE pour!'appreciation de!'incidence de la ressemblance ou de l'identite des denominations sociales sur les interets de la societe demanderesse. L'appreciation du juge est a cet egard la meme, qu'il s'agisse de censurer une ressemblance entre deux denominations sociales ou une confusion entre un nom commercial et une denomination sociale (comm. Mons, 4 mars 1988, J.L.M.B., 1988, p Comm. Bruxelles, 29 avril 1985, lng. Cons., 1985, p Comm. Bruxelles, 9 octobre 1981, R. W., , col et la note J. SLOOTMANS, precitee. - Comm. Bruxelles, 22 decembre 1980, J.C.B., 1982, p Comm. Gand, 15 avril 1980, Entr. et Dr., 1981, p. 9 et la note K. VER BERNE. - Comm. Bruxelles, ll decembre 1978, J.C.B., 1980, p. 210). Une autre source de contrainte, en matiere de denomination sociale comme en matiere de nom commercial, peut resulter de la loi uniforme sur les marques du 30 juin 1969 (voy. a cet egard!'excellent expose de H. VAN LIER, (< Conflits entre les denominations sociales, les noms commerciaux et les marques>>, J.C.B., 1979, p. 51). D'une part, dans les conditions de!'article 13, A, de cette loi, le titulaire d'une marque peut s'opposer a!'utilisation par un tiers de cette marque ou d'un signe ressemblant, no tamment sous la forme d'une denomination sociale ou d'un nom commercial (VAN LIER, op. cit., n 5 et les references nombreuses citees en note Adde Anvers, 9 novembre 1983, lng. Cons., 1983, p Comm. Bruxelles, 19 juin 1981, Ing. Cons., 1981, p. 303). D'autre part, une societe commerciale peut obtenir l'annulation d'une marque, lorsque le deposant a tente de s'approprier de mauvaise foi sa denomination, selon les articles 4, 6, et 14, B, de la loi uniforme, ou encore dans les cas de depot deceptif au sens de!'article 4, 2, de la meme loi (VAN LIER, op. cit., nos 13 et suiv. - Adde Anvers, 7 septembre 1982, Ing. Cons., 1983, p. 103). Un tel depot peut egalement constituer un acte de concurrence deloyale, que le juge peut censurer sur la base de!'article 54 de la loi sur les pratiques du commerce (comm. Bruxelles, 2 mars 1984, Ing. Cons., 1984, p. 189). Bien entendu, 1' action en nullite suppose que la denomination presente le degre d'originalite requis de toute marque, a

97 REVUE CRITIQUE DE JURISPRUDENCE BELGE 669 la difference de I' action fondee sur les articles 28 ou 117 des lois coordonnees sur les societes commerciales (supra, no 39). 41. INACTION PROLONGEE DE LA SOCIETE DEMANDE RESSE. - SANCTION. - Un jugement du tribunal de commerce de Bruxelles du 25 avril 1983 (R.P.S., 1985, p. 60 et la note P. KILESTE) rappelle << qu'une societe qui estime que la ressemblance entre la denomination d'une societe et la sienne peut induire en erreur, doit agir rapidement sous peine d'etre dechue de son droit exclusif sur la denomination qu'elle s'est choisie; qu'une inaction prolongee est en effet de nature a demontrer que le danger de confusion n'est pas reel et qu'il a ete benevolement accepte >> (Examen, 1973, p. 343, n 13). La decheance s'explique, objectivement et independamment de toute acceptation de la part de la societe demanderesse, par le (<droit acquis )) a la denomination qui nait dans le chef de l'autre societe a la suite de!'utilisation par elle de la denomination litigieuse, sans protestation. On peut egalement voir dans cette regie une application particuliere de la << rechtsverwerking >>. La Cour d'appel d'anvers s'est ecartee de ces principes, dans une espece tres particuliere, concernant une societe, constituee en 1939 et qui utilisait depuis lors dans sa denomination le patronyme Lachapelle, parallelement a une autre societe constituee en 1906 par des membres de la meme famille et dont la denomination comportait egalement ce patronyme. En 1960, cette derniere avait ete liquidee et le fonds de commerce avait ete cede a une nouvelle societe, fondee par des membres de la famille Lachapelle et par des tiers, laquelle avait repris une denomination semblable. Apres la faillite de cette societe et a la suite de diverses peripeties, une nouvelle societe <<Lachapelle>> avait ete creee en 1982, sans le concours cette fois de membres de la famille. Par arret du 24 decembre 1984 (R.D.O.B., 1987, p. 700), la Cour considere que, dans de telles circonstances,!'inaction de la societe fondee en 1939 par des membres de la famille Lachapelle, pendant toute la periode ou l'autre societe <<Lachapelle>> comportait des membres de cette meme famille, ne peut entrainer la

98 670 REVUE CRITIQUE DE JURISPRUDENCE BELGE decheance des recours propres a assurer la protection de sa denomination. SECTION 5.- LE SI:EGE SOCIAL 42. PRISE EN CONSIDERATION DU SI:EGE SOCIAL <<REEL>>. - DROIT JUDICIAIRE PRIVE. - Le siege social joue, pour les societes commerciales dotees de la personnalite juridique, le role du domicile des personnes physiques (VAN RYN, t. Ier, pe ed., n 374) et, pour!'application des diverses dispositions legales qui s'y referent, c'est au siege social ((reel)) qu'il faut avoir egard, c'est-a-dire au lieu ou se concentre effectivement la conduite des affaires sociales (Examen, 1981, p. 260, no 26). Le plus souvent, il correspond a!'indication qui figure dans les statuts mais il n'en est pas toujours ainsi (ibid.). Ces regles ret;oivent de frequentes applications en droit judiciaire, particulierement lorsqu'il s'agit de determiner ou doit etre faite la signification d'un exploit. Le tribunal de commerce de Bruxelles les a rappelees a une grande banque qui concluait a la nullite d'un exploit de citation que le demandeur n'avait pas signifie a son siege social statutaire d' Anvers. Le jugement releve que si les assemblees generales de la societe en cause se tenaient bien a ce dernier endroit, toutes << les decisions essentielles et determinantes >> de la vie de celle-ci etaient prises par son comite de direction a Bruxelles,!'ensemble de!'organisation administrative et comptable de la societe se trouvant en outre localise a ce meme endroit (9 janvier 1985, J.T., 1985, p Voy. aussi comm. Namur, 20 mars 1980, Rev. Reg. Dr., 1980, p. 245). Par arret du 22 mai 1986 ( et dans une autre affaire qui concernait la meme banque!), la Cour de cassation a d'autre part dissipe une equivoque qui pouvait resulter des articles 35 et 42, 5, du Code judiciaire, considerant que la signification au siege d'operation ou au siege administratif, en l'espece confondus, n'est permise << qu'a defaut de siege social>> (Pas., 1986, I, 1149). Encore faut-il, pour qu'il en resulte une irrecevabilite de la demande (en l'espece un pourvoi en cassation), R.O.J.B. - 4e trim. 1992

99 REVUE CRITIQUE DE JURISPRUDENCE BELGE 671 que la partie defenderesse etablisse que l'irregularite a nui a ses interets (meme arret). 43. DEPLACEMENT DU SIEGE SOCIAL. - V ALIDITE ET OPPO SABILITE AUX TIERS. - La Cour de cassation a rendu, le 20 septembre 1990, un curieux arret concernant le transfert du siege d'une societe a!'occasion de sa mise en liquidation (R.D.C.B., 1991, p. 25 et la note justement perplexe de E. POTTIER). L'assemblee generale d'une S.P.R.L. dont le siege etait etabli a Nismes avait decrete la dissolution anticipee de celle-ci et, d'un meme contexte, elle avait decide de fixer le ((siege de la liquidation>> a Mons. Cette derniere decision avait fait I' objet de la publicite requise et il n'etait pas allegue que le nouveau siege etait fictif. Neanmoins, la Cour d'appel de Liege avait considere qu'une notification faite a Nismes par!'administration fiscale, sur la base de!'article 256, alinea 2, du Code des impots sur les revenus, etait valable. La Cour supreme refuse de censurer cette decision, au motif << qu'en vertu de!'article 178, alinea 1 er, des lois coordonnees sur les societes commerciales, les societes commerciales continuent d'exister apres leur dissolution jusqu'a la cloture de la liquidation et que, partant, elles conservent en depit de cette dissolution leur siege social avec tous les effets qu'une telle situation implique >>. En verite, lorsqu'une societe est dissoute, elle ne conserve sa personnalite juridique que pour les besoins de sa liquidation (VAN RYN et HEENEN, t. II, n 1049). L'etablissement d'un <<siege de la liquidation>>, different du siege social ou cessent d'etre prises les decisions interessant la vie sociale, implique done un transfert implicite mais certain du siege social (PoT TIER, loc. cit.). Suivant une interpretation suggeree par Mme BENOIT MauRY (Chronique precitee, in Actualites du droit judiciaire, 1991, p. 59), cet arret << limiterait la competence de l'assemblee apres la decision de dissolution>>, mais on se demande a quel titre cette limitation se justifierait. A notre avis, l'assemblee generale statuant dans les conditions prescrites pour les modifications aux statuts est competente pour decreter un transfert R.O.J.B. - 4e trim. 1992

100 672 REVUE CRITIQUE DE JURISPRUDENCE BELGE du siege social et ce principe s'applique a l'assembh~e decrete la dissolution de la societe (18). Le deplacement du siege social n'est en principe opposable aux tiers que s'il a fait l'objet de la publicite que prescrivent les lois coordonnees sur les societes commerciales (depot au greffe du tribunal de commerce et publication aux annexes du M oniteur belge) et les lois coordonnees sur le registre du commerce (VAN RYN, t. Ier, Fe ed., n VAN RYN et HEE NEN, t. Ier, 2e ed., n L. SIMONT, etude citee, in Les societes commerciales [1985], p. 63 et suiv.). Il faut aussi que le deplacement corresponde a une realite (supra, n 36). Toutefois, l'accomplissement de ces formalites ne semble pas suffire, suivant un arret de la Cour de cassation du 1 er fevrier 1982 (Pas., 1982, I, 688), lorsque le deplacement du siege social intervient alors qu'une procedure judiciaire est en cours : << si la societe en cause n'avertit pas la partie adverse qu'elle a transfere son siege social au cours de la procedure, la signification du jugement peut valablement etre faite au lieu du siege social indique par les pieces de la procedure>>. On cherche en vain le fondement legal de cet ajout aux formalites de publicite ci-dessus evoquees. En particulier, il ne nous parait pas que!'article 1133 du Code judiciaire, selon lequelle dol d'une partie donne ouverture ala requete civile, qui (18) Mme BENOIT-MOURY fait a cette occasion allusion aux hesitations qui ant vu le jour, ala suite de }'entree en vigueur de la loi du 5 decembre 1984 (art. 30 nouveau des lois coordonnees sur les societes commerciales), quanta la validite de la clause statutaire, frequente en matiere de societes anonymes, selon laquelle le siege social peut etre deplace par simple decision du conseil d'administration (voy. aussi, du meme auteur, <I L'adaptation du droit beige a la deuxieme directive europeenne de coordination du droit des societes )>, R.P.S., 1984, p. 215). Cette clause demeure licite a notre avis, pour autant que l'autorisation ne porte pas sur un deplacement du siege dans un autre pays ou dans une autre region linguistique. (Sur!'intervention necessaire de l'assemblee generale en cas de transfert dans une autre region linguistique : RAUCQ, ((Societe anonyme)), Rep. Not., no BouCKAERT, <1 Verandering van zetel van vennootschap )), T.R. V., 1988, 191). Le fait que, sur le plan des regles de forme, l'<1 acte constitutif)> aussi bien que l'extrait depose au greffe et publie aux annexes du Moniteur belge doivent desormais mentionner le siege social, dans un but d'informer les tiers, n'implique pas que la doctrine anterieure concernant la determination de l'organe competent pour decreter un transfert du siege social dans l'ordre interne doive etre abandonnee (F. BoucKAERT, <1 Verandering van de zetel van de vennootschap- Statutenwijziging ofbesluit van de bestuursorganen 1 )), T.R. V., 1988, p L. DABIN, <I L'evolution des conditions de constitution des societes anonymes et des societes privees a responsabilite limitee )), in Les societes commerciales [1985], p. 7, n 36 in fine). En France, la loi du 24 juillet 1966 regie expressement cette question (art. 99 et 125) : Encycl. Dalloz, Societes, V 0 Siege social, par E. LE GALL, no 118 et suivants. R.O.J.B. - 4e trim. 1992

101 REVUE CRITIQUE DE JURISPRUDENCE BELG E 673 puisse etre invoque a l'appui de cette solution, dans la mesure ou!'absence de divulgation directe a la partie adverse du transfert du siege social est sans incidence sur la solution du litige (contra : RoNSE, NELISSEN GRADE, VAN HuLLE, LIE YENS et LAGA, << Overzicht van rechtspraak - Vennootschapsrecht >>, T.P.R., 1986, p. 911, no 55.- Surles conditions de la requete civile en cas de dol d'une partie, voy. note LINSMEAU sous Mons, 1 er juin 1982, J.T., 1985, p. 608). La situation se presente dans des conditions differentes, lorsqu'il existe une discordance entre les mentions resultant de ces diverses formalites, par exemple parce que l'immatriculation au registre du commerce n'a pas ete modifiee alors que la modification du siege a ete publiee aux annexes du M oniteur bezge, ou encore lorsque le transfert du siege s'est, dans la realite des chases, deroule d'une fac;on equivoque. Les tiers peuvent alors s'en tenir a la situation initiale (cass., 24 decembre 1982, Pas., 1983, I, Anvers, 22 mai 1979, R.P.S., 1980, p Civ. Bruxelles [saisies], 1 er juin 1987, R.D.O.B., 1988, p. 222). L'equivoque cree une apparence trompeuse pour les tiers et la reparation en nature de la negligence dont elle resulte justifie que le deplacement dont se prevaut la societe leur soit declare inopposable (memes decisions. - Dans le meme sens, VAN RYN et HEENEN, t. rer, 2e ed., Zoe. cit. - L. SIMONT, Zoe. cit.). SECTION 6. - (( NATIONALITE )) DES PERSONNES MORALES 44. GENERALITES. - SYSTEME DU SIEGE SOCIAL REEL. << LEx SOCIETATIS >>. - A notre avis, les personnes morales de droit prive ne peuvent exister qu'au sein des ordres juridiques etatiques ou, eventuellement, en vertu d'instruments internationaux specifiques (19). (19) Par exemple, la personnalite morale pourrait etre conferee a une societe de type europeen en vertu d'un reglement qui creerait cette institution. Pour les groupements europeens d'interet economique : cfr infra, note 20.- Sur la circonstance que la personnalite morale ne se con(}oit pas en dehors des ordres juridiques qui la creent : C. justice CEE, 27 septembre 1988, cite infra au texte. R.O.J.B. - 4e trim. 1992

102 674 REVUE CRITIQUE DE JURISPRUDENCE BELGE La personnalite morale est une technique, qui s'apparente a la fiction, utilisee en vue de!'organisation et du fonctionnement de certains groupements (VAN 0MMESLAGHE et SIMONT, <<La notion d'organe statutaire et la repartition des pouvoirs par le conseil d'administration de la societe anonyme>>, cette Revue, 1964, p. 74 et la note VAN 0MMESLAGHE, <<Observations sur les limites imposees a l'activite des personnes morales en droit compare>>, cette Revue, 1958, p A. BENOiT-MouRY, <<Representation des societes de capitaux et limitations relatives a I' objet social>>, cette Revue, 1989, p. 387, n 3.- Adde B. BoUCKAERT, ((Corporate personality : Myth, fiction or reality~ >>, R.P.S., 1990, p. 201) (20). Cette fiction doit necessairement etre mise en rnuvre par un legisla teur. On resume souvent cette idee, quoique de man1ere assez impropre, en evoquant la (< nationalite )) de la societe (conclusions de M. le procureur general Dumon, alors avocat general, precedant cass., 12 novembre 1965, R.P.S., 1966, p. 136, specialement p P. MAYER, Droit international prive, 3e ed., n 1019). En realite, il s'agit seulement par lade definir l'ordre juridique etatique dont la societe tient sa personnalite morale et sous!'empire duquel elle est organisee et fonctionne. Comme l'exprime M. VAN RYN dans le commentaire magistral qu'il a consacre a l'arret precite de la Cour de cassation du 12 novembre 1965 (<<Consequences du transfert en Belgique du siege social d'une societe etrangere et du transfert a l'etranger du siege social d'une societe belge >>, cette Revue, 1966, p. 399, specialement n 16), la pretendue (< nationalite )) d'une personne morale- et d'une societe commerciale en particulier- (20) Le reglement du Conseil de Ia CEE no 2137/85 du 25 juillet 1985 relatif a!'institution d'un groupement europeen d'interet economique conf'rrme cette analyse : selon son article 1 er, 3, il appartient aux Etats membres de determiner si les groupements immatricules dans leurs registres ont on non Ia personnalite juridique, en depit du caractere directement applicable du reglement affrrme par!'article 43. Au regard de l'ordre juridique beige, c'est ainsi!'article 1 er de Ia Ioi du 12 juillet 1989 qui << octroie 1> Ia personnalite juridique aux groupements immatricuies en Belgique (voy. G. WALEWIJCK, << Le groupement d'interet economique en Belgique,> R.N.B., 1990, p. 174, specialement p J. REMACLE, << Les GEIE et GIE 1> J.T., 1990, p J.-L. LonoMEZ, Les groupements d'interet economique europeens, fraru;ais et belges, 1989).

103 REVUE CRITIQUE DE JURISPRUDENCE BELGE 675 est << le lien qui rattache l'etre moral au pays dont la loi regit son statut >>. Plusieurs systemes de rattachement se rencontrent : theorie du siege social reel, theorie de l' (( incorporation >>, theorie du controle (conclusions precitees de M. le procureur general Dum on. - Adde : BuxBAUM et HoPT, Legal harmonization and the business entreprise [1988], p. 62 et suiv.). Le premier de ces systemes est consacre par!'article 197 des lois coordonnees sur les societes commerciales : les societes dont le siege social reel est etabli en Belgique sont belges, ou plus exactement existent selon le droit beige et sont soumises a ce droit (voy. l'excellente note de R. PRIOUX, sous Bruxelles, 11 fevrier 1988, R.G.D.C., 1989, p. 482). Vice versa, les societes etablies dans un pays etranger sont regies par les lois de ce pays, pour ce qui concerne leur existence, leur organisation et leur fonctionnement, ce qui n'exclut d'ailleurs pas que leur personnalite soit << reconnue >>par le droit beige et que ces societes puissent acquerir des droits, contracter des obligations et ester en justice en Belgique (article 196 des lois coordonnees sur les societes commerciales). LaCour de cassation a fait une application irreprochable de ces principes, dans un arret du 11 janvier 1979 (Pas., 1979, I, 521}, accueillant une fin de non-recevoir opposee a un pourvoi introduit au nom d'associations de fait composees des membres de ((covers)) regroupant les participants a des syndicats d'assureurs sur laplace de Londres. Conformement aux conclusions de M. l'avocat general Velu (lac. cit.), la Cour enonce que << la capacite des societes ou des associations commerciales d'ester en justice en Belgique est, en regie, determinee par le droit etranger >>. Or, il resultait en l'espece des informations sur le droit anglais, recueillies a!'initiative du parquet general, que cette capacite n'etait pas reconnue par ce droit aux groupements en cause. En revanche, la question de savoir si!'exploit identifiait suffisamment les membres des syndicats pour que le pourvoi puisse etre considere comme regulierement introduit en leur nom, faute de pouvoir l'etre au nom des associations de fait formees entre eux, relevait de la procedure civile beige et il n'aurait pu etre supplee a d'eventuelles insuffisances a cet

104 676 REVUE CRITIQUE DE JURISPRUDENCE BELGE egard en appliquant le droit anglais (meme arret). En l'espece cette identification a ete jugee insuffisante et le pourvoi declare irrecevable. Application correcte egalement de ces principes par un arret de la Cour d'appel de Bruxelles du 9 mars 1988, dont il resulte qu'il appartient ala lex societatis de determiner le regime particulier des engagements pris au nom des societes en formation (J.T., 1988, p. 606). 45. (Suite). - TRANSFERT A L'ETRANGER DU SIEGE REEL D'UNE societe BELGE. - Statuant sur la recevabilite d'une requete en annulation introduite par une S.P.R.L. a l'encontre du retrait des autorisations administratives dont elle etait titulaire pour!'exploitation d'une entreprise de transports, le Conseil d'etat s'est prononce sur les consequences susceptibles de resulter du transfert du siege d'une societe beige aux Pays Bas (29 juin 1987, T.R. V., 1988, p. 110 et la note K. LE NAERTS). En l'espece,!'administration avait retire ala societe requerante les autorisations en cause au motif qu'elle la soup9onnait d'avoir deplace son siege social reel aux Pays-Bas. L'Etat beige se fondait sur ce meme SOUP90n pour conclure a l'irrecevabilite de la requete en annulation de sa decision, considerant que la societe n'etablissait son existence ni au regard du droit beige ni au regard du droit neerlandais. Le Conseil d'etat rejette la fm de non-recevoir, en enon9ant qu'il ne resulte d'aucune disposition de la loi beige qu'une societe qui transfere son siege social a l'etranger cesse d'exister comme personne morale au regard du droit beige. D'autre part, dans les circonstances de la cause, la societe ne pouvait avoir perdu sa personnalite juridique au regard du droit beige et en avoir acquis une autre, au motif que le transfert du siege social allegue par l'etat beige etait purement materiel et n'avait pas ete regulierement decrete par l'organe social competent. La haute juridiction administrative a pris ainsi parti sur une importante controverse qui divise depuis longtemps la doctrine beige, concernant les effets en droit beige du transfert a l'etranger du siege social d'une societe dotee de la personnalite

105 REVUE CRITIQUE DE JURISPRUDENCE BELGE 677 juridique (voy., outre l'etude precitee de M. VAN RYN, cette Revue, 1966, p. 399, les conclusions, precitees egalement, de M. le procureur general DuMoN, R.P.S., 1966, p. 136 et les nombreuses references citees aux pages 161 et suiv.). L'importance et la complexite du probleme auraient merite, a notre avis, que la Haute juridiction justifie de maniere plus circonstanciee la solution qu'elle a adoptee, sans se horner a une affirmation quelque peu peremptoire. En affirmant qu'un tel transfert n'implique pas en soi que la societe cesse d'etre une personne morale du point de vue du droit beige, le Conseil d'etat adopte en fait la position defendue par M. le procureur general DuM ON, dans ses conclusions precitees, notamment au nom d'une certaine (< realite )) de la personnalite juridique (R.P.S., 1966, p. 167 a 169). Mais une telle doctrine heurte de front l'analyse a laquelle la Cour de justice des Communautes europeennes s'est ellememe ralliee (27 septembre 1988, T.R. V., 1989, p. 194 et la note J. STUYCK), selon laquelle, en tant que procede de technique juridique destine a doter certains groupements d'une armature et d'un corps de regles organiques appropries a leur fonctionnement, la personnalite morale est inseparable des ordres juridiques etatiques qui l'instituent, sans lesquels elle n'existerait pas (supra, n 44). Selon la Cour de justice (op. cit., n 19), <<it should be borne in mind that, unlike natural persons, companies are creatures of law, and, in the present state of community law, creatures of national law. They exist only by virtue of the varying national legislation which determines their incorporation and functioning>>. En ce sens, l'enseignement professe par M. VAN RYN (op. et lac. cit.), selon lequel une societe beige est implicitement mais necessairement dissoute par l'effet du transfert de son siege a l'etranger, nous parait conserver toute son exactitude, des lors que le droit beige attache au siege reelles consequences resumees par le mot de (< nationalite )). La situation peut etre differente sous l'empire d'autres systemes, tel celui de!'incorporation. Ainsi l'arret de la Cour de justice releve-t-il que le regime anglais autorise le transfert de

106 678 REVUE CRITIQUE DE JURISPRUDENCE BELGE!'administration centrale vers un autre pays, sous reserve de certaines restrictions notamment en matiere fiscale (21). Le rapprochement des ordres juridiques des Etats membres de la Communaute economique europeenne etait invoque par M. le procureur general DUMON a l'appui de sa doctrine (op. cit., R.P.S., 1966, p. 164 et 165). Il etait toutefois a l'epoque insuffisant pour justifier qu'une societe conserve sa personnalite morale en depit du fait qu'elle quittait l'ordre juridique dont elle etait!'emanation pour acceder ala vie juridique dans un autre Etat, comme l'eminent magistrat le preconisait (en ce sens VAN RYN, op. cit., nos 18 a 20). Il est frappant de constater que tant la Commission que la Cour de justice - malgre leur interpretation teleologique du traite et leur souci constant de favoriser!'integration du marche commun - considerent que les divergences des ordres juridiques dont dependent les societes demeurent trop importantes pour consacrer la possibilite du passage d'un ordre juriclique a l'autre sans qu'une convention internationale regle la question (cfr art. 220 du traite). Meme la ratification et l'entree en vigueur de la convention du 29 fevrier 1968 sur la reconnaissance mutuelle des societes et personnes morales seraient insuffisantes a cet egard, car cette convention ne regle pas cette question specifique. La premiere des deux affirmations contenues dans l'arret precite du Conseil d'etat ne nous parait des lors pas admissible. La seconde l'est tout aussi peu dans la mesure ou le Conseil d'etat parait subordonner ala decision formelle d'un organe social le transfert du siege d'une societe a l'etranger et les consequences qui sont susceptibles d'en resulter en ce qui concerne son regime juridique. Selon l' article 197 des lois coordonnees sur les societes commerciales rappele ci-dessus (supra, (21) Comme le releve M. Lenaerts dans sa note precitee sous l'arret du Conseil d'etat, le changement de regime juridique resultant du transfert a l'etranger du siege reel d'une societe beige peut etre affecte par!'application de la theorie du renvoi si l'etat d'accueil applique lui-meme le systeme de!'incorporation ou du siege statutaire et que le siege statutaire demeure situe en Belgique (note, citee n 4). Encore!'application de la theorie du renvoi souleve-t-elle nombre de questions que nous ne pouvons examiner ici et il nous paraitrait hasardeux de justifier, par ces motifs, la solution consacree par le Conseil d'etat, alors que celui-ci ne fait pas la moindre allusion a une telle analyse. - Cfr dans le meme sens : la note PRroux, citee au texte.

107 REVUE CRITIQUE DE JURISPRUDENCE BELGE 679 no 44), c'est la localisation du siege social reel, et non point celle du siege statutaire, en cas de discordance entre les deux, qui determine_ si la societe est <<beige>>. Aucune decision formelle d'un organe social n'est done necessaire pour modifier!'emplacement du siege reel et le transfert du siege social (<reel>) n'est pas dans ses effets subordonne a une modification prealable des statuts. Dans le systeme qui implique la dissolution de la societe par suite du deplacement de son siege a l'etranger, la decheance de la personnalite morale est une consequence que la loi attache ala situation materielle qui resulte de ce deplacement et que la loi apprehende telle quelle, a l'instar de!'acquisition de plano par certains groupements de la personnalite par application de la theorie des cadres legaux obligatoires (infra, n 46). SECTION 7. - LES CADRES LEGAUX OBLIGATOIRES - LES REGLES DE FORME ET DE PUBLICITE- LA SOCIETE EN NOM COLLECTIF IRREGULIERE 46. CONSTITUTION D'UNE PERSONNE MORALE PAR L'EFFET DE LA LOI. - LES SOCIETES EN NOM COLLECTIF IRREGU LIERES. - CONDITIONS. - Par arrets du 26 octobre 1989 (Pas., 1990, I, 247) et du 20 janvier 1984 (Pas., 1984, I, 553), la Cour de cassation a confrrme sa jurisprudence, fermement fixee depuis son arret de principe du 17 mai 1968 consacrant en audience pleniere la theorie des cadres legaux obligatoires (Pas., 1968, I, 1074 avec les conclusions de M. le procureur general Ganshof van der Meersch. - Adde cass., 28 juin 1968, Pas., 1968, I, mars 1972, Pas., 1972, I, juin 1976, Pas., 1976, I, 1124). Selon cette theorie, il se forme, par la volonte du legislateur, une societe en nom collectif dotee d'une personnalite juridique propre entre les personnes qui exploitent ensemble une activite commerciale de maniere continue sous une raison sociale, des lors que ces personnes n' ont pas regulierement fait le choix d'une autre forme sociale (Examen, 1981, p. 284, no , p. 370, no 23). (Voy., pour un exemple ou la premiere condition, consistant dans la poursuite d'une activite commer- R.O.J.B. - 4e trim. 1992

108 680 REVUE CRITIQUE DE JURISPRUDENCE BELGE ciale continue et collective, n'etait pas remplie : comm. Louvain, 20 septembre 1988, R.P.S., 1989, p. 209). D'innombrables decisions en font application, pour en deduire les consequences qui s'y attachent, particulierement sous l'angle de la responsabilite des associes en raison des dettes contractees par la societe ou sous l'angle de la recevabilite des actions en justice introduites par ou contre la societe ou les associes ut singuli (infra, nos 50 et suivants). Pour pouvoir conclure a!'existence d'une telle societe, le juge du fond doit constater d'une part la reunion des conditions requises pour la formation de toute societe (supra, n 8) et d'autre part!'existence des elements constitutifs d'une societe en nom collectif au sens de!'article 15 des lois coordonnees sur les societes commerciales (cass., 26 octobre 1989, precite). Les faits doivent done etablir non seulement l'exercice par deux ou plusieurs personnes d'une activite commerciale, de maniere durable et sous une raison sociale, eventuellement tacite (Examen, 1981, p. 284, no 36), mais aussi la volonte << d'une part de mettre une chose en commun et d'autre part de partager les benefices ou les pertes resultant de l'activite ainsi exercee )) (meme arret, par reference a la motivation de la decision attaquee). Tout controle de la Cour de cassation sur cette appreciation n'est pas exclu : le juge du fond doit fonder sa decision sur des elements de fait legalement pertinents pour reconnaitre ou exclure, dans les circonstances soumises a son appreciation,!'existence d'une societe en nom collectif irreguliere. Par son arret precite du 20 janvier 1984, la Cour de cassation a du rappeler qu'il ne suffit pas que deux commer9ants exploitant ensemble une activite commerciale se soient fait immatriculer chacun separement au registre du commerce pour exclure qu'une societe ait ete creee entre eux, (< puisque cette inscription peut avoir lieu, en vertu de!'article 5 des lois relatives au registre du commerce, dans le cas d 'une societe en nom collectif>>. Comme le rappelle la Cour d'appel de Gand (26 mars 1976, R.P.S., 1981, p. 39 et la note P. CoPPENS), il ne se cree pas une societe en nom collectif irreguliere entre les heriters d'un commer9ant decede qui, a titre conservatoire, poursuivent R.O.J.B. - 4e trim. 1992

109 REVUE CRITIQUE DE JURISPRUDENCE BELGE 681 ensemble!'exploitation de l'entreprise de leur auteur pendant une courte periode. La prolongation de cette situation, jointe a des conditions d'exploitation de!'affaire revelatrices d'un animus societatis, peut toutefois justifier, selon les circonstances!'application de la theorie des cadres legaux obligatoires (Examen, 1973, p. 373, no 24). Un raisonnement semblable est tenu a propos des experiences dites << d'autogestion >> quelquefois tentees par les travailleurs d'une entreprise en difficultes. C'est ainsi que selon une ordonnance du 20 mars 1979 du President du tribunal de commerce de Bruxelles siegeant en refere, si (( l'activite economique des travailleurs frappes par une fermeture d'entreprise peut paraitre un accessoire de leur droit de greve, non commercial au sens strict, pendant le delai necessaire pour parer aux consequences immediates d'une fermeture heurtant leur droit au travail, cette activite economique change de nature lorsqu'elle revet un caractere permanent>> (R.P.S., 1979, p. 200). Cette permanence peut transformer l'activite en une veritable activite commerciale et engendrer une societe en nom collectif irreguliere entre les travailleurs en cause, dans les conditions enoncees ci-dessus. L'ordonnance parait considerer qu'il peut en etre ainsi, meme dans!'hypothese ou la continuation des activites par les travailleurs est autorisee par le juge competent dans le cadre d'une procedure de liquidation collective legalement organisee (en l' espece une faillite). Telle n'est pas la solution que retient le tribunal de commerce de Liege, par jugement du 17 mai 1983 (R.P.S., 1984, p. 63) : pour exclure!'existence d'une societe en nom collectif irreguliere entre les travailleurs a!'initiative desquels les activites d'une entreprise de transports avaient ete poursuivies alors qu'une requete en concordat judiciaire avait ete deposee, le tribunal releve << qu'il n'apparait pas que l'autogestion ait ete decidee contre le gre du tribunal ou de la societe puisqu'elle a fait l'objet d'un accord acte a l'assemblee concordataire du 24 juin 1975 >>. Ces decisions ne nous paraissent guere convaincantes sur le plan du droit des societes et nous pensons que deux situations doivent etre distinguees plus nettement.

110 682 REVUE CRITIQUE DE JURISPRUDENCE BELGE Dans le cas ou la poursuite de l'activite par les travailleurs a ete regulierement autorisee - par le tribi.mal de la faillite en vertu de!'article 475 de la loi sur les faillites ou par le juge delegue dont l'autorisation est necessaire en vertu de!'article 11 des lois coordonnees sur le concordat judiciaire -, les activites sont exploitees dans le cadre de la societe faillie ou concordataire conformement a la loi, en sorte que la theorie des cadres Iegaux obligatoires est inapplicable. L'intervention eventuelle des travailleurs ne constitue qu'une modalite de l'exercice des pouvoirs au sein de la societe. Les profits sont d'ailleurs taxes a l'impot des societes dans ce cas (P. CoPPENS et Fr. T'KINT, << Exam en de jurisprudence - Les faillites, les concordats et les privileges>>, cette Revue, 1991, p. 323, n 18). Bien entendu, il faut une autorisation en bonne et due forme emanant de l'autorite judiciaire competente. 11 ne suffrrait pas de constater que la poursuite des activites a eu lieu sans opposition du tribunal ou de la societe, contrairement ace qu'enonce le jugement precite du tribunal de commerce de Liege. Lorsqu'au contraire la poursuite des activites a lieu sans base legale, au prix d'un coup de force, les travailleurs s'approprient sans titre le fonds de commerce de la societe qui les emploie et ils l'exploitent en commun en creant une societe en nom collectif irreguliere. Cette societe est illicite en raison de cette appropriation- independamment des discussions relatives au caractere licite ou non de!'occupation de l'usine qui l'accompagne le plus souvent (pour une synthese de la contraverse, voy. P. FRANQOIS, Theorie des relations collectives du travail en droit belge [1980], n 8 84 et suiv.- Adde V. VANNES et F. LAGASSE, <<Occupation d'entreprise, voie de fait et pouvoir judiciaire >> J.T.T., 1988, p. 105). Elle n'en existe pas moins, en depit de cette illegalite, sauf a appliquer le regime des nullites prevu par les articles 13quater et suivants des lois coordonnees (infra, no 49) ARACTERE OSTENSIBLE DE LA SOCIETE EN NOM COLLEC TIF IRREGULIERE.- LA RAISON SOCIALE.- L'application de la theorie des cadres legaux obligatoires suppose que les associes exploitent l'activite commerciale commune de maniere ostensible, en sorte que les tiers sachent qu'ils traitent avec le groupement en tant que tel et non point avec l'un ou l'autre

111 REVUE CRITIQUE DE JURISPRUDENCE BELGE 683 membre de celui-ci individuellement (supra, n 48 et les references citees). En principe la societe en nom collectif se manifeste aux yeux des tiers par sa raison sociale (VAN RYN, t. Ier, pe ed., n et suiv.). Mais la raison sociale peut etre tacite et resulter par exemple de!'utilisation du nom des associes dans les rapports que le groupement noue avec les tiers (conclusions precitees de M. le procureur general Ganshof Van Der Meersch, avant cass., 17 mai 1968, Pas., 1968, I, 1074, specialement p VAN RYN, op. cit., no 422). Par un arret du 17 mars 1988 (Pas., 1988, I, 861), la Cour de cassation precise que l'exigence d'une raison sociale, tacite le cas echeant, requise pour qu'il existe une societe en nom collectif irreguliere, n'interesse que les relations du groupement avec les tiers. Le juge du fond n'est au contraire pas tenu de (( relever!'existence d'une raison sociale >>, pour conclure a!'existence d'une societe en nom collectif irreguliere entre plusieurs personnes <<qui ont uni leurs activites professionnelles dans le cadre d'un bureau fiscal, comptable et d'assurances >>, lorsque le litige concerne << la liquidation de l'avoir de la societe entre parties >>. L'affirmation nous semble un peu trop categorique. Elle repose apparemment sur la these exposee dans un Ecrit posthume de Pirmez ( << De la defmition legale et des caracteres essentiels de la societe en nom collectif >>, R.P.S., 1895, p. 99). Conformement a cette these, on professe, en effet, que la raison sociale ne tient pas a!'essence de la societe en nom collectif mais seulement a sa nature et qu'elle n'est en defmitive qu'un element secondaire parmi ceux qui caracterisent ce type de societe (FREDERICQ, t. IV, n R.P.D.B., V 0 Societe en nom collectif, n 33). Cet enseignement est reproduit dans les conclusions de M. le procureur general Ganshof van der Meersch, precedant l'important arret du 17 mai 1968 (loc. cit.), et il est invoque en note a l'appui de l'arret du 17 mars 1988 ci-dessus evoque. Mais il faut a notre avis en preciser la portee. Selon l'<< Ecrit >> precite de Pirmez, la raison sociale presente un caractere secondaire parmi les conditions d'existence d'une R.O.J.B. - 4e trim. 1992

112 684 REVUE CRITIQUE DE JURISPRUDENCE BELGE societe en nom collectif parce qu'elle peut etre tacite et resulter de l'activite collective ostensible. L'absence de toute raison sociale, meme tacite, signifie au contraire que la societe ne s'est pas manifestee comme telle aux yeux des tiers en sorte qu'elle n'a pas de caractere ostensible. En ce cas, il ne saurait exister de societe en nom collectif irreguliere, meme entre les parties. Cette societe ne pourrait d'ailleurs pas se distinguer d'une societe en participation par exemple. Par definition meme, la societe en nom collectif irreguliere implique l'exercice en commun d'une activite commerciale qui se manifeste comme telle envers les tiers. 48. (Suite) - PERSONNALITE JURIDIQUE DE LA SOCIETE EN NOM COLLECTIF IRREGULIERE. - La societe en nom collectif qui se forme de plano par application de la theorie des cadres legaux obligatoires est entachee d'irregularite, dans la mesure ou, par hypothese, les associes n'ont pas dresse l'ecrit que requiert!'article 4 des lois coordonnees sur les societes commerciales et ou ils n'ont pas procede aux formalites de publicite destinees a rendre la societe opposable aux tiers (art. 6 a 11 de ces memes lois. - Sur les consequences de cette irregularite, voy. infra, n 49). Mais cela ne l'empeche pas d'exister comme une personne morale distincte (voy. les arrets precites de la Cour de cassation.- Adde cass., 17 mars 1972, Pas., 1972, I, 665). L'attribution de la personnalite juridique aux societes en nom collectif irregulieres implique leur soumission a toutes les regles concernant la dissolution et la liquidation des societes commerciales do tees de pareille personnalite. Les associes ne deviennent done pas proprietaires des actifs sociaux par le seul effet de la dissolution de la societe ; ce transfert s 'opere a la cloture de la liquidation, comme l'indique un jugement du tribunal de commerce de Liege (19 fevrier 1979, R.P.S., 1980, p Sur ces principes, ad generalia, voir l'etude classique de J. HEENEN, <<Nature des droits de l'associe sur l'actif d'une societe commerciale avant et apres la dissolution>>, cette Revue, 1953, p. 291). Les relations juridiques nouees avec les tiers par le pretendu << groupement de fait>> ainsi dote de la personnalite n'entrainent de droits et d'obligations que dans le chef de ce dernier, R.G.J.B. - 4e trim. 1992

113 REVUE CRITIQUE DE JURISPRUDENCE BELGE 685 sous reserve de!'application des articles 17 et 189 des lois coordonnees sur les societes commerciales. Les associes ut singuli ne peuvent done agir personnellement en justice contre des debiteurs de la societe, en depit de l'irregularite de celle-ci. Quelques decisions persistent a declarer ces actions irrecevables faute pour les demandeurs de disposer de la qualite ou de!'interet requis pour leur intentement (Bruxelles, 10 avril 1984, R. W., , col Civ. Huy, 1 er fevrier 1984, Pas., 1984, III, 54). D'autres considerent plus exactement qu'il s'agit d'une veritable exception au fond, tenant a!'absence de toute relation juridique entre les demandeurs et les debiteurs de la societe (comm. Audenarde, 24 octobre 1985, R.D.C.B., 1987, p Liege, 4 avril 1979, R.P.S., 1980, p En ce sens, voy. les conclusions precitees de M. le procureur general Ganshof van der Meersch, specialement p Examen, 1981, p. 287, n 38). 49. SANCTION DE L'IRREGULARITE DE LA SOCIETE : ANNULA TION. - CoNDITIONS. - EFFETS. - L'annulation de la societe, en raison du vice de forme resultant de la meconnaissance de!'article 4 des lois coordonnees, produit, sans retroactivite, les memes effets qu'une dissolution, conformement aux articles 13quater et 13quinquies issus de la loi du 6 mars La nullite doit etre prononcee par justice et la societe annulee conserve sa personnalite pour les besoins de sa liquidation, comme dans tous les autres cas de dissolution (VAN RYN et HEENEN, t. II, 1 reed., nos 1044 et suiv.). Depuis!'introduction de ces dispositions dans notre droit, la nullite ne produit plus aucun effet ex tunc, meme lorsqu'elle est demandee par un tiers (L. SIMONT, etude citee, R.P.S., 1974, p. 218, n 95 in fine. - Sur le regime anterieur particulierement complexe, voir VAN RYN, t. Ier, 1 l'l" ed., nos 584 et suiv.). C'est done de maniere impropre que, dans un arret du 20 decembre 1983, R.P.S., 1984, p. 270), la Cour d'appel de Liege, se referant a l'arret precite de la Cour supreme du 17 juin 1976, enonce que <<la societe qui forme a l'egard des tiers une individualite juridique distincte de celle des associes existe des sa formation, meme irreguliere, aussi longtemps que

114 686 REVUE CRITIQUE DE JURISPRUDENCE BELGE sa nullite n'en est pas demandee (22) >>, apres avoir pourtant correctement enonce que (( selon l'article 13quater nouveau la nullite ne produit ses effets qu'a dater de la decision qui la prononce >>. En realite, depuis!'introduction dans notre droit de cette disposition, la date de la demande en nullite est indifferente : c'est au prononce de celle-ci qu'il faut avoir egard. La reforme des lois coordonnees sur les societes commerciales intervenue en 1973 et particulierement les articles 13quater et 13quinquies precites ont entraine egalement la suppression de l'option dont disposaient auparavant les tiers, a propos des consequences qu'illeur etait permis de deduire de l'irregularite formelle de la societe avec laquelle ils avaient traite : ils pouvaient soit en reconnaitre!'existence soit en poursuivre l'annulation avec effet retroactif (VAN RYN, t. rer, pe ed., n 386). Ignorant completement cette reforme, un singulier jugement rendu par le tribunal de commerce de Bruxelles le 29 janvier 1986 (R.D.C.B., 1987, p. 696) rejette!'exception opposee par up_ associe a l'action que dirigeait contre lui un creancier, tendant au paiement d'une somme due en execution d'une operation realisee par la societe en nom collectif irregulie:re formee entre le defendeur et ses freres. Le tribunal se fonde sur l'option que les tiers pouvaient exercer avant 1973, en se referant ala doctrine anterieure. Il en deduit en l'espece que le creancier pouvait valablement introduire son action contre un associe ut singuli, choisissant ainsi de ne pas reconnaitre!'existence de la societe irreguliere! En realite, seuls les articles 17 et 189 des lois coordonnees sur les societes commerciales eussent du etre appliques, mais personne ne semble y avoir songe... (infra, no 52). 50. REGULARISATION DES SOCIETES NULLES. - CONSE QUENCES.- Le principe consacre en 1973, selon lequell'annulation d'une societe commerciale produit les memes effets qu'une dissolution (supra, no 49), implique que la societe peut etre regularisee aussi longtemps que la nullite n'a pas ete decretee par justice (Examen, 1981, p. 292, no Voy. (22) Souligne par nous.

115 REVUE CRITIQUE DE JURISPRUDENCE BELGE 687 auss1 la note de J.-M. NELISSEN GRADE sous Liege, 16 juin 1973, R.P.S., 1974, p. 147). Une fois que la societe regularisee a fait l'objet des formalites de publicite auxquelles la recevabilite de ses actions en justice est subordonnee, elle peut poursuivre ses debiteurs. Encore faut-il qu'il s'agisse bien d'une veritable regularisation de la societe entachee de vices et non point de la constitution reguliere, a cote de celle-ci, d'une autre societe a laquelle le patrimoine de la premiere serait apporte ou cede (Examen, 1981, loc. cit.- VAN BRUYSTEGEM, note sous J. de P. Menin, 18 avril 1984, R. W., , col. 1394). Par arret du 14 octobre 1988, la Cour d'appel de Gand a precise quel effet il faut attacher a la regularisation d'une societe en nom collectif formee par application de la theorie des cadres legaux obligatoires, lorsqu'elle intervient pour permettre!'assignation de la partie adverse a comparaitre devant une cour d'appel statuant sur renvoi apres cassation (T.R. V., 1989, p. 209 et la substantielle etude de Mme LIEFSOENS, ((Procedurele implicaties van de regularisatie van een onregelmatig opgericht v.o.f. in de loop van een rechtsgeschil >}). Comme l'enonce l'arret, la societe n'acquiert aucune qualite pour proceder elle-meme a pareille assignation, si la procedure qui a abouti ala cassation a ete introduite, non point par la societe irreguliere, mais par les associes ut singuli. 51. CoNSEQUENCES DE L'IRREGULARITE DE LA socr:ete EN NOM COLLECTIF. - FINS DE NON-RECEVOIR. - Les vices de forme dont la societe en nom collectif irreguliere est affectee, et particulierement l'inaccomplissement des formalites de publicite prevues par l'article 10 des lois coordonnees sur les societes commerciales, entrainent l'irrecevabilite des actions introduites par la societe, conformement a l'article 11 de ces memes lois. La solution est classique (Examen, 1981, p. 287, n 38 et les references a la doctrine et a la jurisprudence anterieures). Cette fin de non-recevoir ne doit pas etre confondue avec!'exception qui peut etre opposee a une action introduite par les associes ut singuli pour le recouvrement des creances de la societe (supra, no 48). Il est loisible au defendeur de renoncer a invoquer la fin de non-recevoir deduite de!'article 11. Cette renonciation peut

116 688 REVUE CRITIQUE DE JURISPRUDENCE BELGE etre tacite pourvu qu'elle soit certaine, conformement a la jurisprudence bien connue de la Cour de cassation (supra, no 33). Tel est le cas lorsque le defendeur noue le debat au fond en premiere instance sans faire valoir le moyen. Celui-ci ne peut pas etre invoque, pour la premiere fois, en degre d'appel (civ. Arion, 14 mars 1978, Jur. Liege, 1979, p. 172, qui semble toutefois avoir en l'espece confondu!'exception deduite de!'article 11 des lois coordonnees sur les societes commerciales et!'exception au fond que les debiteurs de la societe peuvent opposer aux associes agissant ut singuli). Si, de plus, la societe de fait n'est pas immatriculee au registre du commerce, il en resulte une autre fin de non-recevoir deduite de!'article 41 des lois coordonnees concernant le registre du commerce, ainsi que le constate le jugement precite dans l'espece en cause. II s'agit ici d'une formalite qui interesse l'ordre public et il appartient au juge de soulever le moyen d'office s'il echet, en sorte qu'une nouvelle assignation est necessaire apres regularisation de sa situation par la partie demanderesse (VAN RYN et HEENEN, t. Ier, 2e ed., n Comp. comm. Termonde, 18 mai 1982, R.P.S., 1984, p. 181, consacrant pour ce meme motif l'irrecevabilite de!'action introduite par un associe en nom contre un autre. - Anvers, 8 avril1987, Pas., 1987, II, 151, offrant un exemple d'application de!'article 42 de ces lois, moins severe que!'article 41, dans la mesure ou!'absence de mise en muvre de la fin de nonrecevoir avant toute defense au fond entraine decheance de celle-ci). La regie s'applique aux demandes reconventionnelles aussi bien qu'a la demande principale (J.-J. BoELS, << L'incidence du defaut d'immatriculation au registre du commerce sur la procedure>>, J.T., 1965, p. 17, specialement no 12). La demande reconventionnelle peut etre introduite par voie de conclusions, en degre d'appel le cas echeant, pour autant qu'elle se fonde sur un acte ou un fait invoque dans la citation ou qu'elle constitue une defense a!'action principale selon la jurisprudence de la Oour de cassation (VAN CoMPERNOLLE, << Examen de jurisprudence- Droit judiciaire prive [Les voies de recours]>>, cette Revue, 1987, p. 115, n 47). La regularisation de la societe et son inscription au registre du commerce

117 REVUE CRITIQUE DE JURISPRUDENCE BELGE 689 avant le depot de conclusions d'appel formulant une demande reconventionnelle entrainent la recevabilite de celle-ci (voy. en ce sens, encore que dans des termes inutilement complexes a notre avis : Liege, 20 decembre 1983, R.P.S., 1984, p. 270). 52. APPLICATION DE L' ARTICLE 17 DES LOIS COORDONNEES SURLES SOCIETES COMMERCIALES AUX SOCIETES EN NOM COL LECTIF IRREGULI:ERES. - Le juge qui constate!'existence d'une societe en nom collectif, meme irreguliere, entre deux ou plusieurs personnes, doit, conformement au droit commun, leur appliquer!'article 17 des lois coordonnees sur les societes commerciales, en sorte que ces personnes sont solidairement responsables entre elles et avec la societe des dettes contractees par cette derniere (VAN RYN, t. Ier, pe ed., n 409). Le tribunal de commerce de N eufchateau rappelle ce principe dans un jugement du 17 mars 1979 (Bull. Ass., 1984, p. 651). En l'espece, les deux associes en nom qu'une compagnie d'assurances avait cites en justice concluaient a l'irrecevabilite de l'action au motif que la societe irreguliere comportait quatre associes dont deux n'etaient pas a la cause. Le jugement rejette a juste titre ce soutenement, mais il enonce de maniere moins heureuse qu'en raison de la solidarite qu'institue I' article 17' le creancier peut choisir librement celui des debiteurs qu'il lui plait de poursuivre, conformement a!'article 1203 du Code civil. Cette regie du droit civil doit etre nuancee en matiere de societe en nom collectif : sans doute le creancier n'est-il pas tenu de mettre a la cause tous les associes; mais l'article 189 des lois coordonnees sur les societes commerciales deroge au droit commun de la solidarite en interdisant la condamnation des associes sans qu'il y ait condamnation de la societe (VAN RYN, op. et loc. cit.- Examen, 1967, p. 325, no 34). Les plaideurs eussent ete mieux inspires en soulevant ce moyen. Traditionnellement l'on considere neanmoins qu'il ne faut pas faire preuve d'un formalisme excessif dans I' application de!'article 189 :!'assignation des associes ne doit pas etre precedee d'une assignation distincte de la societe et la condamnation de l'une et des autres peut resulter du meme jugement, pourvu que celle de la societe precede dans le dispositif celle des associes (VAN RYN, op. et loc. cit.). R.O.J.B. - 4e trim. 1992

118 690 REVUE CRITIQUE DE JURISPRUDENCE BELGE La Cour d'appel de Mons ajoute que lorsque l'un des associe~s a ete declare en faillite, l'autre peut etre poursuivi par le curateur en paiement des dettes sociales, conformement a!'article 17 des lois coordonnees sur les societes commerciales, sans que!'article 189 impose une condamnation prealable de la societe (< car le passif social a ete verifie lors de la faillite du premier associe et aucune contrariete dans la determination du passif n'est des lors a craindre >} (31 mai 1988, J.L.M.B., 1988, p. 1317). En l'espece, la societe n'avait pas non plus ete declaree en faillite (sur la possibilite de postuler la faillite d'un associe en nom sans declaration de faillite prealable de la societe, infra, no 54). Cette solution, deja admise par un arret anterieur de la Cour d'appel de Bruxelles, pour les memes motifs (19 juin 1963, R.P.S., 1969, p. 88 et la note P. CoPPENS), nous parait contestable. Il resulte certes des travaux preparatoires de!'article 189 que le but poursuivi par le legislateur a ete (< d'eviter des contrarietes de jugement >}, en ne laissant pas<< les actions s'attaquer aux individus isoles, avant qu'il soit statue sur!'obligation contractee par la collectivite >} (GuiLLERY, Les lois des 18 mai 1873 et 28 mai 1886 sur les societes, t. II, no 184, t. III, no 512). Mais nous n'apercevons pas pourquoi il faudrait attribuer a!'admission d'une creance dans le cadre d'une faillite, soit par le curateur soit par jugement, une autorite superieure a celle de tout autre jugement, en sorte que tout risque de contrariete entre des decisions successives serait exclu. Ni les particularites du droit de la faillite ni le droit commun de la solidarite ne le justifient (VANRYN et HEENEN, t. IV, 1 reed., n P. COPPENS et Fr. T'KINT, (< Examen de jurisprudence - Les faillites, les concordats et les privileges>}, cette Revue, 1991, p. 374, no 49 et la reference a Anvers, 13 mars 1989, Pas., 1989, II, 238). La convention conclue entre deux associes a!'occasion de la retraite de l'un d'eux, aux termes de laquelle l'autre poursuit seul desormais les activites commerciales et declare supporter l'integralite des dettes de l'entreprise, n'a pas pour effet de liberer 1' associe qui se retire envers les creanciers anterieurs de la societe en nom collectif irreguliere, ainsi que le precise a bon

119 REVUE CRITIQUE DE JURISPRUDENCE BELGE 691 droit la Cour d'appel de Liege (16 octobre 1987, R.P.S., 1988, p Voy. aussi comm. Liege, 27 octobre 1982, R.P.S., 1982, p. 268). Pour aboutir a cette conclusion, en soi incontestable, l'arret avance toutefois, de fa<;on quelque peu obscure, que la societe en nom collectif irreguliere ne jouit pas de la personnalite juriclique meme si elle a une existence juridique pro pre et que l' associe retraite n'avait pu ignorer les engagements commerciaux pris par l'autre dans le cadre des activites communes. Comme nous l'exposons ci-dessus, la societe en nom collectif irreguliere dispose au contraire de la personnalite juridique comme toute societe en nom collectif, par l' effet de la loi (conclusions precitees de M. le procureur general Ganshof van der Meersch, specialement p. 1081). L'engagement personnel de chaque associe aux dettes sociales ne suppose pas davantage que l'associe poursuivi ait eu ou pu avoir connaissance des dettes contractees par ses pairs pour le compte de la societe de fait. 53. ARTICLE 17 LOIS. COORD. (suite.)- CONSEQUENCES DE LA FAILLITE DE LA societe.- Les associes en nom acquierent la qualite de commer<;ants par le fait de l'exercice en commun d'une activite commerciale sous le couvert d'une societe en nom collectif irreguliere (23) et, suivant un arret bien connu de la Cour de cassation du 15 decembre 1938 (Pas., 1938, I, 383), la declaration de faillite de la societe implique la constatation de l'etat de cessation des paiements et de l'ebranlement du credit de tous les associes (<en vertu de la nature meme de cette societe, dont la personnalite se confond pratiquement avec celle des associes >>. Leur faillite doit done etre prononcee comme une consequence de la faillite de la societe, encore que des jugements distincts soient necessaires et que chacune des faillites doive en principe etre liquidee individuellement (infra). La Cour de cassation le rappelle dans ses arrets des 23 novembre 1987 (Pas., 1988, I, 351) et 2 decembre 1983 (23) Dans les societes en nom collectif regulieres, les associes en nom aquierent la qualite de commer<;ant par le seul fait de la formation du contrat, meme s'ils ne participent pas a la gestion (VAN RYN, t. re, 1 re ed., no 407).

120 692 REVUE CRITIQUE DE JURISPRUDENCE BELGE (Pas., 1984, I, 372), tous deux rendus a propos de societes en nom collectif irregulieres (24). Les juges du fond appliquent frequemment cette regie (P. CoPPENS et Fr. T'KINT, << Examen de jurisprudence- Les faillites, les concordats et les privileges>>, cette Revue, 1991, p. 300, no 4. - Bruxelles, 14 septembre 1989, J.L.M.B., 1990, p. 382 et la note J. CAEYMAEX. - Anvers, 24 mai 1988, T.R. V., 1988, p. 362 et la note S. RAES et M. WIJCKAERT. - Liege, 27 juin 1985, Jur. Liege, 1985, p. 590, contre lequel etait dirige le pourvoi qui a donne lieu a!'arret precite du 23 novembre Comm. Liege, 20 octobre 1981, R.P.S., 1982, p. 166). On s'est demande si la faillite de la societe et celles des associes en nom, prononcees par ricochet, impliquaient la constitution d'une masse unique. Tel serait le cas suivant un arret de la Cour de cassation du 21 mai 1968, rendu sur conclusions conformes de M. l'avocat general Colard (Pas., 1968, I, 1097) : << Attendu que, lorsque la faillite distincte d'un associe d'une societe en nom collectif elle-meme declaree en faillite est prononcee, ces faillites ne forment qu'une seule masse, comprenant tant le passif de la societe que la passif propre de l'associe >> (en ce sens egalement, conclusions de M. l'avocat general CHARLIER precedant Liege, 22 janvier 1975, R.P.S., 1976, p. 192). Cette these ne nous parait pas pouvoir etre approuvee, sous reserve des cas dans lesquels une confusion inextricable des patrimoines rend impossible la liquidation distincte des faillites (comp. supra, n 26, a propos de!'extension de la faillite au maitre de!'affaire). Certes, comme l'indique la Cour de cassation, le passif de la faillite des associes en nom est compose non seulement de leurs dettes personnelles mais egalement des dettes contractees par la societe faillie (adde Mons, 27 mai 1980, J.C.B., 1981, p. 297). II s'agit d'une consequence evidente de!'article 17 des lois coordonnees sur les societes commerciales. Mais la societe n'est pas solidaire des engagements personnels des associes, en (24) Dans la seconde espece, I' existence de pareille societe avait ete deduite par le premier juge de la poursuite en Belgique, par les associes d'une Gmbh allemande, des activites de celle-ci, apres qu'un tribunal allemand en eut prononce la dissolution. R.O.J.B. - 4e trim. 1992

121 REVUE CRITIQUE DE JURISPRUDENCE BELGE 693 sorte que les creanciers de ceux -ci ne sauraient etre admis a produire leur creance a la faillite de la societe. De plus, la constitution d'une masse unique aurait pour consequence inadmissible de rendre les associes solidairement responsables des engagements personnels contractes par eux en marge de l'activite commune. C'est ce qu'observe la Cour d'appel de Bruxelles, dans son arret precite du 17 mai 1978 (J.C.B., 1979, p. 120), a propos des dettes d'un associe failli anterieures a!'exploitation en commun de l'activite deficitaire ou de dettes resultant d'infractions commises par lui. La constitution d'une masse unique serait difficilement conciliable avec la doctrine qui se degage d'un arret de la Cour de cassation du 11 juillet 1940 (Pas., 1940, I, 189), selon lequel le curateur ala faillite d'un associe en nom peut produire ala faillite de la societe les creances resultant d'operations que la societe a realisees avec cet associe comme avec tout tiers quelconque (voy. aussi cass., 4 fevrier 1958, Pas., 1958, I, 606). 54. FAILLITE n'un ASSOCIE. -CoNSEQUENCES. -La faillite d'un associe, en raison des engagements de la societe en nom collectif, peut aussi etre prononcee, en l'absence de declaration prealable de la faillite de la societe : le jugement de faillite n'emporte pas en soi de condamnation du failli mais la simple constatation dans son chef d'un etat caracterise par la cessation des paiements et l'ebranlement du credit, en sorte que l'article 189 des lois coordonnees sur les societes commerciales n'est pas applicable (VANRYN et HEENEN, t. IV, Feed., no Mons, 31 mai 1988, J.L.M.B., 1988, p. 1317, precite). La faillite d'un associe n'entraine d'ailleurs pas necessairement la faillite des autres associes et il faut apprecier individuellement la situation de chacun pour determiner s'il demeure ou non in bonis (Mons, 27 mai 1980, R.P.S., 1980, p. 284). Elle n'implique pas non plus la faillite de la societe, mais sa dissolution en raison du caractere intuitu personae de celle-ci, tout au moins lorsque tous les associes ne sont pas declares en faillite (HEENEN, << Partnership and other personal association for profits>>, in International Encyclopedia of Comparative Law, vol. XIII-1, n 8 54 et CLOQUET, Novelles, Droit commercial, t. IV, no 1300).

122 694 REVUE CRITIQUE DE JURISPRUDENCE BELGE Par contre, selon un jugement du tribunal de commerce de Bruxelles, du 17 mai 1978 (J.C.B., 1979, p. 120), la faillite d'une societe en nom collectif (< doit etre prononcee, meme d'office, des que ses associes sont eux-memes en faillite >>. Cette decision fait une application en quelque sorte commutative de la doctrine consacree par la Cour de cassation en 1938, dans le cas inverse ou c'est la faillite de la societe qui est en premier lieu prononcee (supra, n 53). Elle nous parait neanmoins difficilement conciliable avec un autre arret de principe de la Cour supreme, selon lequel la societe en nom collectif est dotee d'un patrimoine propre et conserve la propriete de ses actifs jusqu'a ce que sa liquidation soit cloturee (2 decembre 1952, cette Revue, 1953, p. 288 et la note HEENEN, precitee). L'existence de ce patrimoine implique qu'en depit de la dissolution de la societe par l'effet de la faillite des associes en nom, la societe ne se trouvera pas necessairement en etat de cessation des paiements. Dans la pratique - et specialement lorsqu'il s'agit d'une societe en nom collectif irreguliere - il est tres sou vent difficile sinon impossible de distinguer le patrimoine de la societe de celui des associes, mais il n'est pas pour autant permis d'affirmer comme une regie generale que la faillite des associes doit toujours et invariablement entrainer la faillite de la societe. C'est done a notre avis de maniere tout a fait appropriee qu'avant de confirmer la faillite d'une societe en nom collectif irreguliere a la suite de la faillite de trois de ses cinq associes, la Cour d'appel d'anvers prend soin, dans son arret precite du 24 mai 1988, de constater que tous etaient en etat de cessation des paiements. La faillite des deux autres associes pouvait ensuite etre prononcee, conformement a l'arret de la Cour de cassation du 15 decembre <<SociETE DE FAIT>> ET societe APPARENTE. - En marge de la theorie des cadres legaux obligatoires, qui suppose la realisation effective de toutes les conditions requises pour qu'il existe une societe en nom collectif avec toutes ses caracteristiques (supra, no 46), notre droit fait aussi une place aux societes simplement apparentes, conformement a la theorie generale de l'apparence qui a penetre progressivement dans la

123 REVUE CRITIQUE DE JURISPRUDENCE BELGE 695 doctrine et dans la jurisprudence moderne (voy. les references citees, supra, n 33 et specialement cass., 20 juin 1988, J.T., 1989, p et la note FoRIERS). La societe apparente constitue une illustration classique de la theorie de l'apparence (CALAIS-AULOY, Essai sur la notion d'apparence en droit commercial, nos 152 et suiv.- VAN 0MME SLAGHE, << Les societes de fait>>, J.T., 1957, p. 709, specialement no 9; << L'apparence comme source autonome d'obligations et le droit beige>>, R.D.I.D.C., 1983, p. 144, specialement p VAN GERVEN, Beginselen, Algemeen deel, n 80 et les references). Ses conditions d'applications sont differentes de celles de la theorie des cadres legaux obligatoires, dans la mesure ou le tiers ne doit pas etablir que la societe avec laquelle il pretend avoir traite remplit toutes les conditions requises pour son existence. Il suffit que ce tiers ait pu legitimement croire a!'existence d'une societe meme si, dans la realite, il n'en existait aucune (CALAIS-AULOY, Zoe. cit.- VAN 0MMESLAGHE, Zoe. cit.). LaCour d'appel de Liege a fait une application de cette doctrine, dans un arret du 28 octobre 1983 (R.P.S., 1984, p. 159). En l'espece, un commerc;ant s'etait fait immatriculer au registre du commerce en declarant qu'il exploitait l'entreprise pour laquelle l'immatriculation etait prise (<en association de fait>> avec son frere. Cela suffisait selon la Cour, pour qu'un creancier, induit en erreur par cette declaration, flit en droit de conclure a!'existence d'une societe en nom collectif irreguliere, sans qu'il fallut verifier si la declaration en question concordait avec la realite. La declaration cree une apparence trompeuse et son auteur doit en supporter les consequences. La notion de societe apparente est implicitement consacree par un arret de la Cour de justice des Communautes europeennes, selon lequel les dispositions de la section III de la premiere directive du Conseil du 9 mars 1968 en matiere de societes, concernant le regime des nullites, sont applicables aux sodetes qui ont fait l'objet des formalites de publicite requises par la legislation etatique dont elles ressortissent, alors meme qu'elles n'ont pas ete regulierement constituees au regard de cette legislation (C.J.C.E., 20 septembre 1988,

124 696 REVUE CRITIQUE DE JURISPRUDENCE BELGE T.R. V., 1988, p. 440 et les p{metrantes observations de K. GEENS}. Les tiers peuvent se prevaloir de!'existence apparente de ces societes, telles qu'elles ont ete publiees, aussi longtemps qu'elles n'ont pas perdu leur personnalite juridique conformement au regime de nullite prevu par!'article 12 de la directive. II en est ainsi meme dans les regimes juridiques ou les formalites de publicite sont en soi depourvues d'effet constitutif, comme c'est le cas en droit beige. 56. PORTEE ET SANCTIONS DES REGLES DE PUBLICITE. SANTIONS DE LEUR INACCOMPLISSEMENT EN MATIERE DE MODI FICATION DES STATUTS. -La seule consequence du defaut de publication aux annexes du Moniteur belge des extraits d'actes decrits par les articles 7 et 9 des lois coordonnees sur les societes commerciales est de rendre inopposables aux tiers les mentions non publiees, pour autant que celles-ci soient derogatoires au droit commun et que la societe ne puisse etablir que le tiers avec lequel elle a traite en avait connaissance (Examen, 1981, p. 294, n 41.- L. SIMONT, << Les regles relatives a la publicite, aux nullites et aux actes accomplis au nom d'une societe en formation>>, in Les societes commerciales, p. 59, nos 4 et suiv. - M. COIPEL, << Dispositions communes a toutes les formes de societes commerciales >>, in Rep. Not., t. XII, L. II, nos 147 et suiv.). L'inaccomplissement du depot de ces memes extraits au greffe du tribunal de commerce, en violation de!'article 10, 1 er, entraine en outre l'irrecevabilite des actions introduites par la societe, en vertu de!'article 11 (supra, n 51). II en resulte une inopposabilite aux tiers, non seulement des mentions non deposees, mais encore de la personnalite morale de la societe en tant que telle, aussi longtemps que la societe n'a pas ete regularisee (comp. E. WIJMEERSCH, <<De l'inopposabilite de la personne morale et de sa representation>>, cette Revue, 1986, p. 9, nos 24 et suiv.). Cette sanction ne s'applique pas a!'absence de depot d'une modification aux statuts (L. SIMONT, op. cit., no 8. -Contra : M. CoiPEL, op. cit., no 464). L'appel introduit par une societe en nom collectif, sous sa denomination nouvelle publiee mais

125 REVUE CRITIQUE DE JURISPRUDENCE BELGE 697 non deposee au greffe, est done recevable (Gand, 19 janvier 1988, T.R. V., 1988, p. 152 et note D. VAN GERVEN). CHAPITRE IV. - LES SOCIETES DE PERSONNES DOTEES DE LA PERSONNALITE JURIDIQUE. - LA SOCIETE EN NOM COLLECTIF ET LA SOCIETE EN COMMANDITE SIMPLE 57. ATTRIBUTION DE LA QUALITE DE COMMERQANT AUX ASSOCIES EN NOM.- NOTION D'ASSOCIE ACTIF EN DROIT FISCAL ET EN MATIERE DE s:ecurite socrale.- LaCour de cassation a rendu, le 23 fevrier 1987, un arret concernant la notion d'associe actif dans une societe en nom collectif, au sens de!'article 20, 2, c, du Code des impots sur les revenus et de!'article 3, 1 er, alinea 2, de l'arrete royal n 38 du 27 juillet 1967 organisant le statut social des travailleurs independants (J.T.T., 1987, p. 253). Selon cette derniere disposition, une presomption simple d'assujettissement au regime de securite sociale des travailleurs independants pese sur les associes actifs dans les societes de personnes au sens du droit fiscal. L'Inasti faisait valoir, a l'encontre d'un arret d'appel qui avait refuse de reconnaitre indistinctement cette qualite a tous les associes d'une societe en nom collectif, que << tous les associes d'une societe en nom collectif sont consideres comme etant des commer<;ants et sont done presumes exercer une activite commerciale sous une raison sociale >>. En s'exprimant de la sorte, le demandeur en cassation n'alleguait toutefois pas - selon la Cour - que les associes en nom sont necessairement des associes actifs pour!'application du droit fiscal et du droit de la securite sociale. Le moyen est des lors declare irrecevable. L'assimilation de la qualite d'associe actif a celle d'associe en nom que le demandeur en cassation suggerait aurait en tous cas du etre repoussee, a notre avis, meme a supposer le moyen recevable. Il n'y a en principe aucune raison d'affranchir le droit fiscal, nile droit de la securite sociale, des defrnitions du droit commun (P. VAN 0MMESLAGHE, Droit commun et droit fiscal [Conference prononcee a I' occasion du XXXe an-

126 698 REVUE CRITIQUE DE JURISPRUDENCE BELGE niversaire de l'ecole superieure des sciences fiscales en presence du ministre des Finances], J.D.F., 1989, p. 5). Mais il est loisible au legislateur, quoique cela soit peu souhaitable, de deroger a ce principe, par le recours a des concepts sui generis propres ala discipline en cause (J. KIRKPATRICK, (< Le droit fiscal se fonde sur les realites >>, J.P.D.F., 1969, p. 161). Or, ala difference du droit commercial, qui attribue la qualite de commer<;ant aux associes en nom sans avoir egard a leur participation personnelle aux activites sociales (cass., 15 decembre 1938, Pas., 1938, I, Examen, 1951, p. 150, no 44. -Supra, note 21), le droit fiscal- auquel renvoie le statut social des travailleurs independants- reserve la qualite d'associe actif aux associes qui, selon les constatations << de fait >> incombant au juge du fond, exercent au sein de la societe une activite <<effective>> revetant une certaine frequence ou permanence, en vue de faire fructifier un capital qui est le leur pour partie (Com. IR, nos 100/10 et suiv. - Cass., 8 janvier 1981, Pas., 1981, I, 497 et les notes.- S. VAN CROM BRUGGE, <<De hoedanigheid van gewoon werknemer voor een vennoot in een personenvennootschap >>, T.R. V., 1989, p. 134 et les references a la jurisprudence anterieure de la Cour de cassation egalement fixee en Ce sens). Des considerations semblables ont justifie le rejet par la Cour supreme de!'attribution automatique de la qualite d'associe actif aux associes commandites (cass., 21 janvier 1935, Pas., 1935, I, 125), dont la situation est comparable a celle des associes en nom du point de vue du droit des societes (VAN RYN, t. Ier, 1 re ed., n Art. 20 des lois coord.). 58. DISSOLUTION DE LA SOCI:ETE EN NOM COLLECTIF PAR LA VOLONTE UNILATERALE D 'UN ASSOCIE. - APPRECIATION DE L'EXERCICE DE CETTE FACULTE AU REGARD DU PRINCIPE DE LA BONNE FOI. - Selon!'article 1869 du Code civil, chaque associe peut mettre fin a la societe lorsque celle-ci a ete formee pour une duree indeterminee, <<par une renonciation notifiee a tousles associes >>. Nous y yoyons une illustration de la notion de (( partijbeslissing )) mise a jour par la doctrine : il s'agit d'une decision unilaterale dont les effets s'imposent en droit aux autres parties ala relation juridique en cause, celle-ci futelle de nature contractuelle (DIEUX, <<La responsabilite civile

127 REVUE CRITIQUE DE JURISPRUDENCE BELGE 699 des associes en matiere de societes commerciales - Evolutions recentes >>, in La responsabilite des associes, organes et preposes des associes [1991], p. 57, specialement p. 81 et 91). La meme disposition requiert que << cette renonciation soit de bonne foi et non faite a contretemps>>. Le president du tribunal de commerce d'audenarde siegeant en refere (29 octobre 1987, T.R. V., 1988, p. 68 et note J.R.) a rappele a cet egard les definitions traditionnelles de la mauvaise foi et de la renonciation a contretemps, que consacre l'article 1870 du Code civil : la renonciation est entachee de mauvaise foi lorsque l'associe qui en est l'auteur cherche a s'approprier seul le profit commun que la societe avait pour objet de realiser et elle est faite a contretemps lorsqu'elle compromet le but commun, alors qu'il suffirait qu'elle soit differee pour ne pas produire cet effet nefaste (voy. aussi, en ce sens, DE PAGE, t. V, n BAUDRY-LACANTINERIE et WAHL, Traite- De la societe, du pret et du depot, 3e ed., n et suiv.). Selon la Cour d'appel de Bruxelles (12 mars 1984, J.T., 1984, p. 515), l'associe qui manifeste le souhait de se retirer de la societe et d'en provoquer ainsi la dissolution n'exerce pas de mauvaise foi ni a contretemps la faculte que la loi lui reconnait, pour le seul motif qu'au cours de la negociation menee par lui avec son coassocie sur les conditions de la dissolution de la societe, il cherche a<< valoriser au maximum sa part dans l'affaire >>, ce (< meme si cette renonciation est defavorable ala societe en nom collectif >>des lors que l'associe en cause n'abuse pas de son droit. << En juger autrement interdirait a tout jamais a un associe de quitter une societe de personnes a duree indeterminee, ce qui serait contraire ala liberte voulue par le legislateur. >> Comme le constatait DE PAGE (loc. cit.), les articles 1869 et 1870 du Code civil constituent en effet des applications du droit commun. Selon celui-ci, les contrats a duree indeterminee peuvent etre resilies unilateralement par chacune des parties (VAN 0MMESLAGHE, << Examen de jurisprudence - Les obligations>>, cette Revue, 1988, p. 38, n 148), mais cette faculte ne peut etre exercee de maniere abusive (loc. cit.). C'est des lors dans la theorie generale de l'abus de droit, construite sur la base du principe de la bonne foi ou des principes gene-

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