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2 L intelligence de l Information Négocier un contrat, nouer un partenariat, se développer à l international, lancer un nouveau produit, racheter un concurrent Toutes ces actions présentent des dangers. Mais elles constituent aussi de formidables opportunités si elles sont précédées, en amont, par une perception adéquate des risques liés à chaque situation. Au cœur de cette analyse, l information joue un rôle capital : qu il s agisse de détecter des signes annonciateurs de rupture, de défendre son patrimoine face à des visées hostiles, de promouvoir ses intérêts dans la compétition mondiale, le succès dépend de la capacité de chaque organisation à collecter, protéger, exploiter et valoriser l information stratégique. Défense & sécurité Technologies de l information Télécommunication Développement économique des territoires Énergie & développement durable Santé & pharmacie Transports Banque & assurance Matériaux C est cette compétence que la Compagnie Européenne d Intelligence Stratégique met, depuis 1997, au service de ses clients publics et privés. Avec une ferme volonté : proposer des solutions imaginatives, concrètes et opérationnelles. Olivier Darrason Président CEIS Compagnie Européenne d Intelligence Stratégique 280, boulevard Saint-Germain Paris France Tél. : (+33) Fax : (+33) ceis@ceis-strat.com Site internet :

3 Directeur de la rédaction Alexis Bautzmann Rédactrice en chef Téa Katukia Rédacteur chargé de la coordination et rédacteur cartographe Thomas Delage Rédacteur graphiste Jean-Nicolas Bruel Traduction Atlantique Traduction / Gabriela Boutherin Ont collaboré à ce numéro Isabelle Delumeau, Robert Dussey, Faure Essozimna Gnassingbé, Hugues Eudeline, Charles Kwenin, Carlos Lopes, Michel Luntumbue, Nora Mareï, Olivier Mélennec, Daria Mokhnacheva, Joseph Nguene Nteppe, Joseph Vincent Ntuda Ebode, Daniel Pauly, Marianne Péron-Doise, Virginie Saliou, Chris Trelawny, Thierry Vircoulon. Partenariats scientifiques Centre d Analyse et de Prévision des Risques Internationaux (CAPRI) (contact@capri-fr.org) Publicité Jean-Michel Rollant (rollant@areion.fr) Tél. : Fax : Abonnements & ventes au numéro Magazine Diplomatie Service Abonnements c/o Back-Office Press Privezac (France) Tél. : Fax : (contact@bopress.fr) Boutique en ligne Site internet Diffusion en kiosque Presstalis Tél. : Diffusion en librairie Pollen Diffusion Tél. : Placement et réassorts Destination Média Tél. : Dans quel kiosque trouver Diplomatie? Impression AUBIN Imprimeur Ligugé (France) Commission paritaire : 0718 K ISSN : X Dépôt légal : octobre 2016 Directeur de la publication Alexis Bautzmann Photo de couverture ( U.S. Navy / Luis R. Chavez Jr) Pour joindre la rédaction de Diplomatie Areion Group Magazine Diplomatie 91 rue Saint-Honoré Paris (France) Tél. : Fax : diplomatie@areion.fr Diplomatie spécial Octobre 2016 Diplomatie assume la responsabilité du choix des illustrations et de leurs légendes, de même que celui des intitulés et sous-titres des articles ci-dedans publiés. Les opinions exprimées dans les articles ou entretiens n engagent que leurs auteurs. Diplomatie est édité par Areion Group SAS au capital de euros 91 rue Saint-Honoré Paris (France) AREION GROUP, 2016 En application de la loi du 11 mars 1957 (art. 41) et du code de la propriété intellectuelle du 1 er juillet 1992, toute reproduction partielle ou totale à usage collectif de la présente publication est strictement interdite sans autorisation expresse de l éditeur. DIPLOMATIE SPÉCIAL éditorial editor s letter par / by Alexis Bautzmann La mer est-elle l avenir de l homme? À l heure où le déferlement de technologies nous renvoie l image d une mondialisation de plus en plus déconnectée des réalités géophysiques de notre planète, les vastes étendues maritimes s accordent rarement, dans notre imaginaire collectif, à l idée de progrès et de modernité. Il est vrai que nous en connaissons davantage sur le relief de Mars ou de la Lune que sur celui des fonds marins, alors même que notre la mer recouvre plus de 71 % de la surface de la Terre, qu elle abrite entre 50 % et 80 % des formes de vie de notre planète, et qu elle fournit la majeure partie de l oxygène que nous respirons, sans compter son rôle majeur dans la régulation du climat et des températures sur terre. La mer constitue par ailleurs l un des principaux facteurs de développement de nos sociétés, ce qui explique le besoin des populations humaines à s en rapprocher : la moitié de la population mondiale vit à moins de 60 kilomètres de la mer, et les trois quarts des grandes villes sont situées sur les côtes. Sans mer, point de mondialisation économique, 90 % des marchandises étant transportées par fret maritime. Au-delà, les immenses richesses énergétiques, alimentaires, pharmaceutiques ou simplement touristiques que concentre cet écosystème représentent un extraordinaire catalyseur de développement et de prospérité pour l humanité toute entière, et un immense défi pour le continent africain. Mais si 38 des 54 pays africains sont des États côtiers, l Afrique demeure en retrait dans la grande aventure économique maritime de ce siècle. Elle bénéficie pourtant d une assise territoriale de première grandeur, les zones maritimes sous juridiction africaine s étendant sur quelque 13 millions de kilomètres carrés. Le continent africain dispose ainsi de vastes ressources maritimes susceptibles de contribuer au développement durable de ses populations, alors même que plus de 90 % des importations et des exportations africaines transitent par mer et que la pêche constitue un apport vital à la sécurité alimentaire de plus de 200 millions d Africains. La mer, un espace hautement stratégique pour l Afrique, mais dont l exploitation durable et raisonnée demeure encore largement conditionnée à l instauration d un cadre règlementaire et sécuritaire qui fait aujourd hui défaut. La piraterie et la violence armée, les trafics d êtres humains, d armes et de drogue, les menaces naturelles (liées notamment au réchauffement climatique), ou encore l épuisement des ressources halieutiques sont autant de défis à surmonter pour qu une économie bleue émerge et prospère depuis les ports de Port-Saïd et Sokhna en Égypte à celui de Durban en Afrique du Sud, en passant par ceux de Lomé, Tanger, Le Cap, Djibouti, Abidjan, Radés ou encore Dar es Salam. C est dire l importance que revêt la prochaine session extraordinaire de la Conférence des chefs d État et de gouvernement de l Union Africaine, sur la sécurité maritime et le développement en Afrique à Lomé, le 15 octobre prochain, visant à l adoption d une charte permettant d assurer la sécurité et la sûreté maritimes en Afrique et à replacer les mers et les océans au cœur de l économie africaine, un thème auquel ce numéro spécial de Diplomatie est intégralement consacré. Is the sea the future of mankind? While the surge of new technologies reflects a globalization that appears to be more and more out of touch with the geophysical realities of our planet, the vast marine spaces are only rarely associated in our collective imagination with the idea of progress and modernity. Indeed, we know more about Mars or the Moon s landforms than about our own seabeds. This is despite the fact that more than 71 percent of the Earth s surface is covered in water, which hosts between 50 and 80 percent of the life forms on our planet and which provides most of the oxygen we breathe, not to mention its significant role in the regulation of climate and global temperatures. The sea is also a key factor in the development of our societies, which explains why human populations need to stay close to it: half the world s population lives within 60 kilometers of the sea and three quarters of the world s major cities are located along coasts. Without the sea there would be no economic globalization, as 90 percent of all merchandise is shipped via marine cargo. What s more, the immense energy, food, pharmaceutical and even tourism resources this ecosystem comprises are an extraordinary catalyst for development and prosperity to all mankind and represent a tremendous challenge for the African continent. Even while 38 of the 54 African countries are coastal states, Africa lags behind other parts of the world in the great maritime economic adventure of this century despite being a land base of utmost importance, as the maritime zones under African jurisdiction extend over 13 million square kilometers. The African continent has vast marine resources that are likely to help develop its economy, while more than 90 percent of the African imports and exports are seaborne and the fishing industry provides a vital contribution to the food security of more than 200 million Africans. The sea is a highly strategic area for Africa, but its sustainable and rational use depends to a large extent on the introduction of a regulatory and security framework that is currently lacking. Piracy and armed violence, human, arms and drug trafficking, natural threats (notably related to global warming) and the depletion of fishing resources are challenges which must be met to enable the emergence of a prosperous blue economy from the ports of Port-Said and Sokhna in Egypt to Durban in South Africa and Lomé, Tangier, Cape Town, Djibouti, Abidjan, Radés or Dar es Salaam. These challenges and the need for a framework to address them underpin the importance of the next extraordinary session of the Conference of Heads of State and Government of the African Union on the maritime security and development in Africa. This conference, which will be held in Lomé on 15th October, 2016, is intended to adopt a charter on maritime security and safety in Africa and bring seas and oceans back to the heart of the African economy: a particularly rich theme to which this special issue of Diplomatie is entirely dedicated. ÉCURITÉ MARITIME ET DÉVELOPPEMENT EN AFRIQUE Maritime Security and Development in Africa

4 SOMMAIRE SUMMARY DIPLOMATIE SÉCURITÉ MARITIME ET DÉVELOPPEMENT EN AFRIQUE MARITIME SECURITY AND DEVELOPMENT IN AFRICA SÉCURITÉ MAR ÉDITORIAL Par Alexis Bautzmann... p. 3 EDITOR S LETTER By Alexis Bautzmann SÉCURITÉ MARITIME ET DÉVELOPPEMENT EN AFRIQUE Par SEM Faure Essozimna Gnassingbé, président de la République togolaise... p. 6 MARITIME SECURITY AND DEVELOPMENT IN AFRICA From His Excellency Faure Essozimna Gnassingbé, President of the Togolese Republic ENTRETIEN Avec le Pr Robert Dussey, ministre togolais des Affaires étrangères, de la Coopération et de l Intégration africaine... p. 10 INTERVIEW With Professor Robert Dussey, Minister of Foreign Affairs, Cooperation and African Integration of Togo ANALYSE L économie bleue en Afrique... p. 16 ANALYSE Africa s Blue Economy SÉCURITÉ MARITIME MARITIME SECURITY... P. 20 ANALYSE Terrorisme maritime : quels risques pour l Afrique?...p. 22 ANALYSIS Maritime terrorism: What Are the Risks for Africa? ANALYSE La piraterie en Afrique : une inflation de solutions à côté du problème?...p. 28 ANALYSIS Piracy in Africa: an Inflation of Solutions alongside the Problem? ANALYSE Golfe de Guinée : le nouvel épicentre de la piraterie mondiale...p. 35 ANALYSIS Gulf of Guinea: the New Epicenter of World Piracy ANALYSE La piraterie somalienne : un état des lieux en demi-teinte...p. 40 ANALYSIS Somalian Piracy: A Mixed Situation ANALYSE Soutenir la sécurité maritime en Afrique...p. 45 ANALYSIS Supporting Maritime Security in Africa

5 ITIME ET DÉVELOPPEMENT LES DÉFIS CHALLENGES... P. 50 ANALYSE L Afrique face aux défis des migrations maritimes...p. 52 ANALYSIS Africa s Challenge of Maritime Migrations ANALYSE L Afrique face à la montée des océans : quelles conséquences?...p. 58 ANALYSIS Africa and the Rising Oceans: What Consequences? ANALYSE Les enjeux des aires marines protégées en Afrique...p. 63 ANALYSIS The Implications of Marine Protected Areas in Africa ANALYSE La pêche illégale le long de la côte ouest-africaine...p. 68 ANALYSIS Illegal Fisheries along West African Coast ANALYSE La pollution marine en Afrique : quelles conséquences?...p. 72 ANALYSIS Marine Pollution in Africa: What Consequences? EN AFRIQUE MARITIME SECURITY AND DEVELOPMENT IN AFRICA QUELLES STRATÉGIES? WHAT STRATEGIES?... P. 76 ANALYSE Quelle dynamique de construction du multilatéralisme sécuritaire dans le golfe de Guinée?...p. 78 ANALYSIS What Dynamic for the Construction of Multilateral Security in the Gulf of Guinea? ANALYSE La longue marche de l architecture africaine de sûreté et sécurité maritimes dans le golfe de Guinée...p. 84 ANALYSIS The Long March of African Maritime Safety and Security in the Gulf of Guinea ANALYSE La révolution portuaire africaine...p. 89 ANALYSIS The African Port Revolution ANALYSE «L Afrique bleue» : l ambition d un continent pour un développement sûr et harmonieux...p. 94 ANALYSIS Blue Africa : the Ambition of a Continent for Secure and Harmonious Development

6 Introduction Par SEM Faure Essozimna Gnassingbé, président de la République togolaise. From His Excellency Faure Essozimna Gnassingbé, President of the Togolese Republic. Sécurité maritime et développement en Afrique Photo ci-dessus : Faure Essozimna Gnassingbé, président de la République togolaise depuis mai 2005, prononce un discours devant l assemblée générale des Nations Unies, à New York, en septembre 2015, à l occasion du sommet des Nations Unies pour l adoption du Programme de développement pour l après ( UN Photo/Cia Pak) Above: Faure Essozimna Gnassingbé, President of Togo since May 2005, makes a speech before the general assembly of the United Nations in New York, in September 2015, on the occasion of the United Nations summit for the adoption of the post-2015 development program. ( UN Photo/Cia Pak) L e Togo est heureux d accueillir le Sommet extraordinaire de l Union africaine sur la sécurité et la sûreté maritimes et le développement en Afrique. La date du 15 octobre 2016 marquera, pour l Afrique tout entière, un jalon majeur dans sa marche vers la réalisation de sa destinée. Ce sommet, qui réunit les chefs d État et de gouvernement, vise à réfléchir aux voies et moyens susceptibles de créer les meilleures conditions de sécurité et de sûreté sur les mers et sur les océans d Afrique afin de garantir une exploration et une exploitation profitables de ces espaces pour nos peuples. Nul n ignore l enjeu et l importance que représentent les mers et les océans pour l humanité. En effet, les deux tiers de la surface du globe terrestre sont recouverts par la mer, élément si nécessaire, voire indispensable, à la vie sur terre. Les mers et les océans, ces biens si précieux et si vitaux, méritent notre protection afin que nous puissions tirer meilleur parti des ressources considérables qui s y trouvent. La mer et les océans sont une voie originelle, par excellence, d établissement de Maritime Security and Development in Africa T ogo is delighted to host the African Union Extraordinary Summit on maritime safety and security and development in Africa. For the whole of the African continent, the date of 15th October, 2016 will be remembered as a major milestone in the march toward fulfilling its destiny. This summit, which brings together heads of state and government, sets out to consider ways and means of creating the best conditions for safety and security on the seas and oceans of Africa, in order to guarantee profitable exploration and use of these spaces to the benefit of our different 6 Diplomatie - octobre 2016 Sécurité maritime et développement en Afrique

7 Introduction relations d amitié et de coopération entre les peuples et les États. Ils constituent, à n en point douter, les principaux vecteurs de la mondialisation, avec environ 90 % du commerce mondial transporté par voie maritime, d une part, et facteurs du développement durable, d autre part. Source d énergie et Cette place centrale des mers et des océans dans l existence et le progrès de l humanité n est plus à démontrer, d où l obligation impérieuse qui incombe à la communauté internationale en général et aux États africains en particulier d encourager et de prendre les dispositions adéquates pour assurer la sécurité et la sûreté des espaces maritimes. de richesses, les activités liées à la mer sont une composante importante de la croissance, nécessaire pour le développement et l émergence de nos pays. Cette place centrale des mers et des océans dans l existence et le progrès de l humanité n est plus à démontrer, d où l obligation impérieuse qui incombe à la communauté internationale en général et aux États africains en particulier d encourager et de prendre les dispositions adéquates pour assurer la sécurité et la sûreté des espaces maritimes. C est pourquoi la question de la lutte contre la piraterie maritime et les trafics illicites en tous genres transitant par la mer seront au cœur de nos discussions et des mesures The central role that seas and oceans occupy in the existence and progress of mankind needs no further demonstration. That s why there is a pressing obligation on the international community in general, and on the African countries in particular, to encourage and take adequate measures to ensure the safety and security of our maritime spaces. peoples. Nobody is blind to the issues and importance of the seas and oceans for humanity. Two thirds of the earth s surface is covered by water, a vital, indispensable, element of life on earth. The seas and oceans, so precious and so vital, are assets that deserve our protection to ensure we can make the very most of the resources they hold. The seas and oceans are one of the original and finest ways of initiating relations of friendship and cooperation between peoples and countries. They constitute beyond all doubt the main vehicle for globalization, with some 90% of world trade transported by sea, and they are also a major factor in sustainable development. The seas are a source of energy and riches, while activities linked with the sea are an important component of the growth that is so necessary to the development and emergence of our countries. The central role that seas and oceans occupy in the existence and progress of mankind needs no further demonstration. That s why there is a pressing obligation on the international community in general, and on the African countries in particular, to encourage and take adequate measures to ensure the safety and security of our maritime spaces. That s why the struggle against piracy and all types of seaborne illicit trafficking will be a core issue in our discussions and in the measures we need to envisage and implement to discourage the authors of these detrimental acts and disable their menace. Our examination of the issues of illegal, undeclared, unregulated fishing and the blue economy stands Photo ci-contre : En août 2016, le président Faure Gnassingbé présidait la 3 e réunion annuelle du Haut Conseil pour la mer (HCM), mis en place en 2014 afin de conduire la stratégie nationale de l action de l État en mer. ( Émile Kouton/AFP) Opposite: In August 2016, President Faure Gnassingbé presided over the 3rd annual meeting of the High Council for the Sea (HCM), set up in 2014 to lead the country s strategy for the State s action at sea. ( Émile Kouton/AFP) Diplomatie - october 2016 Maritim Security and Development in Africa 7

8 Introduction Photo ci-contre : Le Sommet extraordinaire de l Union africaine sur la sécurité et la sûreté maritimes et le développement en Afrique, organisé à Lomé, au Togo, entend faire de l espace maritime le levier principal du développement économique et social de l Afrique. ( sommetdelome.org) Opposite: The African Union extraordinary summit on maritime security and safety and development in Africa, organized in Lomé, Togo, intends to make the maritime space the main lever of the economic and social development of Africa. ( sommetdelome.org) Photo ci-dessous : Photographie du troisième terminal à conteneurs du port de Lomé (PAL) inauguré en octobre Avec navires commerciaux accostés au PAL en 2015, soit une augmentation de 25 %, le Togo se doit de protéger ses côtes et son port en eau profonde, le seul de la région, qui constitue un véritable pôle économique régional : il est en effet le seul port permettant d atteindre plusieurs capitales en un seul jour.( Issouf Sanogo/AFP) Below: Photography of the third container terminal of the port of Lomé (PAL) inaugurated in October With 1,399 commercial ships docking at the PAL in 2015, representing an increase of 25%, Togo must protect its coasts and deep-water port, the only one of the region, that is a true regional economic center: it is the only port to allow several capital cities to be reached in a single day. ( Issouf Sanogo/AFP) à envisager, voire à prendre pour décourager et mettre hors d état de nuire les auteurs de ces actes préjudiciables. L examen de la question de la pêche illicite, non déclarée et non réglementée, et de l économie bleue témoigne de l intérêt que nos pays accordent à leurs ressources marines, sources de richesses énormes pour nos populations. À cet égard, il faudra des initiatives africaines hardies pour décourager vigoureusement la pêcherie non autorisée et frauduleuse qui entraîne un manque à gagner énorme pour nos économies et réduit considérablement les possibilités de création d emplois pour notre jeunesse, gage fondamental de cohésion sociale, de paix et de sécurité dans une prospérité bien partagée. Les actions isolées ou individuelles ne pourront pas avoir d effets susceptibles de contenir efficacement les phénomènes malheureux et dommageables que connaissent nos espaces maritimes. Seules la mobilisation générale et des actions collectives volontaristes nous permettront de mieux protéger nos biens, si précieux, que constituent nos mers, nos océans et leurs ressources afin que les générations futures puissent également disposer de biens qui contribueraient à leur bienêtre et à leur plein épanouissement. L on comprend, dès lors, toute l importance que revêt le sommet de Lomé, appelé à initier un cadre d action collective, dynamique et efficace qui permettrait à l Union africaine et à l ensemble de ses États membres, à travers un instrument juridique fédérateur, la future «Charte de l Union africaine sur la sécurité et la sûreté maritimes et le développement en Afrique», de sécuriser leurs espaces maritimes, de valoriser et de faire fructifier davantage leurs ressources marines en faveur de leurs populations. C est dans ce sens que se tiendront, en prélude au sommet, de nombreuses activités, dont des tables rondes, qui offriront un cadre fructueux de réflexions, d échanges et d esquisses de pistes d actions novatrices et porteuses d avenir pour nos mers, nos océans et nos populations. De même, un village des partenaires accueillera des entreprises et des institutions internationales dont la présentation des savoir-faire et expériences contribuera indubitablement à enrichir et à rehausser la portée de cette rencontre panafricaine, ouverte sur le monde. Faure Essozimna Gnassingbé witness to the interest our countries attach to their marine resources, an immense source of riches for our populations. In this respect, bold African initiatives are needed to forcefully discourage unauthorized, unscrupulous fishing, which constitutes a huge opportunity cost to our economies and which considerably reduces our ability to create jobs for youths, a fundamental requirement for social cohesion, peace, and security in a properly shared prosperity. Isolated or individual actions have little chance of effectively containing the unwelcome and damaging phenomena that our maritime spaces are witness to. Only a general mobilization and deliberate collective action will enable us to better protect the precious assets of our seas, our oceans, and their resources, to guarantee future generations the ability also to enjoy these assets that contribute to their well-being and fully fledged development. The full implications and importance of the Lomé summit are therefore clear. It has been called in order to establish a framework for collective, dynamic, effective action that will enable the African Union and all its member states, through a unifying legal instrument the forthcoming African Union Charter on maritime safety and security and development in Africa to secure their maritime spaces, to promote and make better use of their marine resources in favour of their populations. This is the mood in which many activities will be taking place as a prelude to the summit, including roundthe-table discussions that will provide a productive platform for reflection and exchanges and for sketching out schemes for new actions defining the future for our seas, oceans, and populations. In the same vein, a conference partners village will be welcoming international companies and institutions, whose presentations of know-how and experience will doubtless contribute to enhancing and enriching the scope of this pan-african encounter, open to the world. Faure Essozimna Gnassingbé 8 Diplomatie - octobre 2016 Sécurité maritime et développement en Afrique

9 LE EL! UV ION N O IT ÉD Introduction CART le monde en cartes présente L ATLAS GÉOPOLITIQUE DE RÉFÉRENCE POUR DÉCRYPTER TOUTE L'ACTUALITÉ INTERNATIONALE Plus de 300 cartes et graphiques Un contenu éditorial et cartographique entièrement renouvelé! UNE CO-ÉDITION AREION GROUP / LES ÉDITIONS DU ROCHER 192 PAGES 22,50 EN VENTE EN LIBRAIRIE ET SUR Également en vente sur Internet Diplomatie - october 2016 Maritim Security and Development in Africa 9

10 Introduction entretien Avec le Pr Robert Dussey, ministre togolais des Affaires étrangères, de la Coopération et de l Intégration africaine. With Professor Robert Dussey, Minister of Foreign Affairs, Cooperation and African Integration of Togo. nterview De l impérieuse nécessité de protéger nos mers et nos océans à travers la charte de Lomé Photo ci-dessus : Robert Dussey, ministre des Affaires étrangères de la coopération et de l Intégration africaine du Togo depuis juin Ce dernier souligne l importance du Sommet de Lomé en rappelant que «jusqu à ce jour, l Afrique ne s est jamais réunie pour discuter et prendre des décisions concernant à la fois la sécurité et l économie bleue». ( Marcelo Camargo/Agencia Brasil) Above: Robert Dussey, Minister of Foreign Affairs, Cooperation and African Integration of Togo since June He emphasizes the importance of the Lomé Summit recalling that until now, Africa has never come together to discuss and make decisions concerning both security and the blue economy. ( Marcelo Camargo/Agencia Brasil) Le 15 octobre 2016, la capitale togolaise abritera le Sommet extraordinaire de l Union africaine sur la sécurité et la sûreté maritimes et le développement en Afrique. À cette occasion, le Pr Robert Dussey, ministre togolais des Affaires étrangères, de la Coopération et de l Intégration africaine, nous a accordé un entretien exclusif, portant notamment sur les objectifs majeurs de ce sommet. Les mers et océans sont si immenses (plus de 70 % de la surface de la Terre) et les défis qui leur sont liés encore plus grands Qu est-ce qui a motivé le challenge que la diplomatie togolaise veut relever à travers ce sommet? R. Dussey : Fruits de la bonté créatrice divine, les mers et océans n échappent pas à la règle de la coexistence du bien et du mal : en effet, voies de communication de grande importance, ils demeurent le lieu de survenance d actes prohibés tels que la piraterie et le trafic des êtres humains ; cadre essentiel de transactions commerciales substantielles et source de croissance pour les États, les espaces maritimes africains restent aussi marqués comme des endroits de réalisation de divers trafics ; espace de préservation de l équilibre écologique, On the Imperious Necessity of Protecting our Seas and Oceans through the Lomé Charter On 15th October, 2016, the capital of Togo will host the African Union Extraordinary Summit on Maritime Safety and Security and Development in Africa. On this occasion, Professor Robert Dussey, Togolese Minister of Foreign Affairs, Cooperation and African Integration granted us an exclusive interview covering the major objectives of this summit. The seas and oceans are so immense (covering over 70% of the Earth s surface) and the challenges related to them even greater What motivated the 10 Diplomatie - octobre 2016 Sécurité maritime et développement en Afrique

11 Introduction L objectif fondamental assigné à ce rendez-vous diplomatique majeur est de convenir des principes et de pratiques intelligentes et réalistes dont la mise en œuvre permettra un usage sûr et durable des multiples atouts portés par les espaces maritimes qui bordent l Afrique. les mers et océans subissent, avec une forte intensité, le phénomène de pollution qui détruit les ressources diverses dont ils sont pourvus, hypothéquant ainsi leur renouvellement au profit des générations futures ; zones d importance géostratégique avérée, les espaces maritimes sont parfois les endroits à partir desquels sont menées des entreprises de déstabilisation politique de pays. Conscients de la gravité des fléaux qui menacent le facteur important de développement économique que représentent les mers et océans, les chefs d État et de gouvernement de l Union africaine, réunis à Malabo en 2014, ont, dans un élan de responsabilité, convenu de tenir à Lomé une session extraordinaire de leur Conférence, à l issue de laquelle sera adopté le moyen approprié de conjuration du mauvais sort qui perturbe ces espaces. Depuis lors, les actions menées à l initiative du chef de l État togolais, S.E.M. Faure Essozimna Gnassingbé, et la parfaite collaboration entre la Commission de l Union africaine et le Togo ont permis d entrevoir la perspective du Sommet de Lomé avec assurance et précision ; l une des étapes les plus emblématiques du processus d élaboration du projet de charte sur la sécurité et la sûreté maritimes et le développement en Afrique a été sa validation par les experts gouvernementaux réunis à Addis Abeba, du 25 au 27 avril Ce processus atteindra, sous peu, son point d achèvement avec l adoption de la charte, le 15 octobre 2016, à Lomé, par la Conférence des chefs d État et de gouvernement de l Union africaine. Le Togo est diplomatiquement très actif ces dernières années, notamment avec l Union africaine. Fondamentalement, que visiez-vous par ce sommet? L objectif fondamental assigné à ce rendez-vous diplomatique majeur est de convenir des principes et de pratiques intelligentes et réalistes dont la mise en œuvre permettra un usage sûr et durable des multiples atouts portés par les espaces maritimes qui bordent l Afrique. Le défi du Sommet de Lomé sur challenge that Togolese diplomacy wished to meet through this summit? R. Dussey: A result of divine intervention, the seas and oceans cannot escape the rule of the coexistence of good and evil. As channels of communication of significant importance, they remain a forum for prohibited acts such as piracy and human trafficking. Although an essential framework for substantial commercial transactions and a source of growth for States, African marine spaces are also the location of diverse trafficking. A space for the preservation of an ecological equilibrium, the seas and oceans are greatly exposed to the phenomenon of pollution that destroys the various resources within them, endangering their renewal for future generations. Noted areas of geo-strategic importance, marine spaces are sometimes the places from which the political destabilization of countries is undertaken. Aware of the seriousness of the threats that plague the important factor of economic development represented by the seas and oceans, in a burst of responsibility the heads of State and Government of the African Union, united in Malabo in 2014, agreed to hold an extraordinary session of their conference in Lomé at the end of which would be adopted the appropriate instrument to combat this threat to these marine spaces. Since then, the actions undertaken on the initiative of the Togolese head of State, H.E. Faure Essozimna Gnassingbé, and the perfect collaboration between the Commission of the African Union and Togo enabled the perspective of the Lomé Summit to be viewed with assurance and precision. One of the most emblematic stages of the process of development of a draft charter on maritime safety and security and development in Africa was its validation by the governmental experts united in Addis Ababa from April 25th to 27th, Shortly, this process will attain completion with the adoption of the charter on 15th October, 2016 in Lomé by the Conference of the Heads of State and Government of the African Union. Photo ci-contre : Un bataillon camerounais d intervention rapide effectue des missions de contrôle dans le port de Douala, en ciblant notamment les saisies de drogue. À l instar de Cotonou (Bénin), Lomé (Togo) et Lagos (Nigéria), le port de Douala est devenu une des plaques tournantes du trafic de drogues, d où l enjeu majeur d endiguer les flux du trafic. ( US Navy/Joshua Davies) Opposite: A Cameroonian rapid intervention battalion carrying out stabilization operations in the port of Duala and notably drug seizure missions. Following Cotonou (Benin), Lomé (Togo) and Lagos (Nigeria), the port of Duala has become a hub for drug trafficking where much is now at stake to stem the flow. ( US Navy/Joshua Davies) Diplomatie - october 2016 Maritim Security and Development in Africa 11

12 Introduction Photo ci-contre : Le 21 février 2013, des soldats camerounais prennent d assaut un navire suspecté d acte de piraterie dans le cadre de l exercice maritime «Obangame Express». En mars 2016, le chef de la diplomatie togolaise rappelait que l impact de la criminalité en mer «ruine ce pilier économique vital qu est l espace maritime, dépasse tout entendement et est devenu un sujet majeur de préoccupation pour tous les gouvernements». ( DoD/ Jason Howard) Opposite: On 21th February, 2013, Cameroonian soldiers boarding a suspected pirate ship during naval exercise Obangame Express. In March 2016, the head of Togolese diplomacy recalled that the impact of criminal activity at sea undermines the vital economic pillar in the maritime domain, defies comprehension and has become a major concern for all governments. ( DoD/Jason Howard) la sécurité maritime réside dans l acceptation, par les différentes parties impliquées, du document final qui cristallisera la doctrine ainsi que les voies et moyens à travers lesquels l Afrique, soutenue par la communauté internationale, s engage, plus que jamais, à partir en croisade contre les porteurs de fléaux qui menacent ses espaces maritimes et leurs usagers. Il s agit de la Charte de l Union africaine sur la sécurité et la sûreté maritimes et le développement en Afrique. L adoption, le 15 octobre 2016, de cette Charte, code d action et de bonne conduite défini en vue de sauver et de sauvegarder les espaces maritimes africains et de capitaliser leurs atouts, marquera le plein succès du Sommet de Lomé. Aussi, appréhender le bien-fondé de ce texte exige-t-il de sacrifier à un exercice didactique qui consistera essentiellement à en relever la philosophie, les principes de référence, les objectifs, les moyens et les perspectives qui le sous-tendent. Justement, Monsieur le Ministre, pourriez-vous nous en dire un peu plus sur ce projet de charte, qui aurait beaucoup avancé d après nos informations? La première observation qu inspire la lecture du projet de charte est la conformité qu elle revendique vis-à-vis de textes majeurs de référence : les uns de portée générale tels que la Charte des Nations Unies, la Déclaration universelle des droits La préservation de l environnement est au cœur de la philosophie que porte le projet de charte de Lomé. Les changements climatiques, dans certaines de leurs manifestations, portent atteinte à l équilibre marin, avec la perspective d une raréfaction progressive des ressources halieutiques, en particulier. de l homme, l Acte constitutif de l Union africaine, la Charte africaine des droits de l homme et des peuples et l Agenda 2063 de l Union africaine ; les autres relatifs à divers aspects se rapportant directement ou indirectement à la protection des espaces maritimes. Par ailleurs, ce texte affirme son attachement à un certain nombre de règles de droit international, notamment la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer, la Stratégie africaine intégrée pour les mers et les Diplomatically, Togo has been very active these last years, in particular with the African Union. Fundamentally, what is your aim through this summit? The fundamental objective assigned to this major diplomatic rendezvous is to agree on intelligent and realistic practices and principles whose implementation will allow the safe and durable use of the many assets of the maritime spaces that border Africa. The challenges faced by the Lomé Summit on maritime safety and security resides in the acceptance by the different parties involved of the final document that will crystallize the doctrine and the ways and means through which Africa, supported by the international community, commits, more than ever, to engaging a crusade against those who endanger the maritime spaces and their users. This is the Charter of the African Union on Maritime Safety and Security and Development in Africa. The adoption, on 15th October, 2016 of this charter, a code of action and good conduct defined with a view to saving and safeguarding African maritime spaces and capitalizing on their assets, will mark the full success of the Lomé summit. Understanding the merits of this text will require understanding the philosophy, reference principles, objectives, means and perspectives that underlie it. Precisely, Mr. Minister, could you speak to us further on this draft charter which has made significant progress according to our information. The first remark one can draw from reading the draft charter is its compliance with major reference texts, some with a general scope such as the United Nations Charter, the Universal Declaration of Human Rights, the constitutive act of the African Union, the African Charter on Human and Peoples Rights, and Agenda 2063 of the African Union, others relating to various aspects directly or indirectly connected with the protection of maritime spaces. Furthermore, this text reaffirms its commitment to a certain number of rules of international law, in particular the United Nations Convention on the Law of the Sea, the integrated 12 Diplomatie - octobre 2016 Sécurité maritime et développement en Afrique

13 Introduction océans à l horizon 2050 (Stratégie AIM 2050), la Convention internationale pour la sauvegarde de la vie humaine en mer, la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale, la Charte africaine révisée des transports maritimes et la Convention de Nairobi sur la protection, la gestion et le développement de l environnement marin et côtier en Afrique de l Est. Le soubassement qu offre l ensemble des documents normatifs précédemment mentionnés et la diversité de ce cadre général de référence renforcent davantage les possibilités d action et d intervention contenues dans cet instrument de haute portée, les préservant ainsi de toute fragilité sur le plan juridique. Ainsi, en les reprenant, le projet de charte s approprie les valeurs nobles qui transcendent la diversité des multiples engagements de la communauté internationale, tels que la promotion de la paix, de la sécurité, du développement économique et social. Monsieur le Ministre, une charte est-elle suffisante pour protéger tous les compartiments des mers et océans, qui représentent 70 % de la surface de la Terre? En ce qui concerne l Afrique, ce projet de charte définit des objectifs qui vont de la lutte contre la piraterie et les trafics illicites sur les mers et océans à l intensification de la mise en œuvre de la Stratégie AIM 2050 en passant par la promotion de l économie bleue. Ces objectifs induisent un ensemble d actions concrètes dans plusieurs compartiments de la maîtrise des espaces maritimes en Afrique. Ainsi, le projet de charte de Lomé, perçu à ce titre, comme le cadre d harmonisation d un ensemble d actions cohérentes, a pour mérite essentiel de fédérer des mécanismes existants et régissant la matière. En premier lieu, le projet de charte conçoit la prévention et la répression de la criminalité maritime, de façon progressive, aux niveaux national et international. Au premier plan, la mise en place dans chaque État partie d un comité intersectoriel, l harmonisation des législations et la mobilisation des ressources permettront de renforcer les dispositifs nationaux de lutte contre la criminalité maritime. The fundamental objective assigned to this major diplomatic rendezvous is to agree on intelligent and realistic practices and principles whose implementation will allow the safe and durable use of the many assets of the maritime spaces that border Africa. African strategy for the seas and oceans to 2050 (2050 AIM strategy), the International Convention for the Safety of Life at Sea, the United Nations Convention against Transnational Organized Crime, the Revised African Maritime Transport Charter and the Nairobi Convention for the Protection, Management and Development of the Marine and Coastal environment of the East African Region. The foundations offered by all the above-mentioned normative documents and the diversity of this general reference framework further reinforces the possibilities of action and intervention contained in this wide-ranging instrument, ensuring its legal solidity. Referencing these texts, the draft charter adheres to the noble values that transcend the diversity of the multiple undertakings of the international community, such as the promotion of peace, safety and economic and social development. Mr. Minister, is a charter enough to protect all the compartments of the seas and oceans that represent 70% of the Earth s surface? As regards Africa, this draft charter defines the objectives that go from combatting piracy and illegal trafficking on the seas and oceans to the intensification of the implementation of the 2050 AIM strategy and including the promotion of the blue economy. These objectives entail a set of concrete actions in several compartments of the control of maritime spaces in Africa. Thus the essential value of the draft charter of Lomé, perceived as the framework for the harmonization of a set of coherent actions, is to federate existing and governing mechanisms. First, the draft charter conceives of the prevention and fight against organized maritime crime progressively at the national and international levels. It begins with setting up in each party State an inter-sector committee, the harmonization of legislations and mobilization of resources that will reinforce the national provisions for the fight against maritime organized crime. This will be followed by bilateral and pan- African cooperation erected as an instrument for action in synergy between the party States. The sharing of information and data, Photo ci-contre : Cérémonie d ouverture du Sommet de l Union africaine de Malabo, en juin C est à l occasion de ce rassemblement qu a été décidée l organisation à Lomé, au Togo, d un sommet extraordinaire de l Union africaine sur la sécurité et la sûreté maritimes et le développement en Afrique. ( Paul Kagame flickr) Opposite: Opening ceremony of the African Union Summit in Malabo, June It was in the course of this gathering that African leaders decided to hold an extraordinary summit at Lomé, in Togo, dedicated to maritime security and safety and development in Africa. ( Paul Kagame flickr) Diplomatie - october 2016 Maritim Security and Development in Africa 13

14 Introduction maritime coordination, the creation of research structures, setting up a maritime safety and security fund and legal assistance are the various aspects of the strategy for combatting organized crime at sea. Photo ci-dessus : La pêche constitue un apport vital à la sécurité alimentaire de plus de 200 millions d Africains. Lors d un événement organisé à Londres par Chatham House, en mars 2016, sur le thème de la piraterie dans le golfe de Guinée où il était invité, le chef de la diplomatie togolaise a rappelé la part prépondérante de l économie maritime dans l économie générale des États côtiers et insulaires, qui atteint au moins 70 % du PIB et constitue les trois quarts des ressources fiscales. ( Shutterstock) Above: The fishing industry provides a vital contribution to the food security of more than 200 million Africans. While attending an event organized in London by Chatham House in March 2016, on the theme of piracy in the Gulf of Guinea, the head of Togolese diplomacy recalled the predominant position of the maritime economic sector in the overall economy of coastal and island states, who depend on maritime activity for at least 70% of their GDP and 75% of their revenues. ( Shutterstock) Au second plan, la coopération bilatérale et panafricaine a été érigée comme instrument d action en synergie entre les États parties. Dans ce sens, le partage d informations et de renseignements, la coordination maritime, la création de structures de recherches, la mise en place d un Fonds de sécurité et de sûreté maritimes ainsi que l entraide judiciaire constituent les articulations de la stratégie de lutte contre la criminalité en mer. Aujourd hui, le Togo et l Union africaine travaillent ensemble à l adoption et à la signature de cette charte. Êtes-vous certain que les États joueront tous leur partition et engagement en cédant à leurs intérêts nationaux? Les États parties s engagent, ensuite, à travers le projet de charte, à promouvoir l économie bleue. Reposant essentiellement sur l exploitation des secteurs maritime et marin ainsi que des ressources dont ils regorgent, cette forme d économie est non seulement un facteur de développement économique, mais aussi une source d enjeux géostratégiques liés à la maîtrise des espaces maritimes et marins. En dehors des bénéfices susceptibles d être tirés de l exploitation des espaces maritimes africains comme voies de communication, lieux d échanges commerciaux ainsi que d exploration et d exploitation des richesses, minières ou autres, qui s y trouvent, le projet de charte présente l intérêt d encadrer la pêche et l aquaculture afin de préserver les générations présentes et à venir de l épuisement des ressources liées à ces deux activités. La promotion du tourisme côtier et maritime, l amélioration du commerce et de la compétitivité, la prévention de l exploitation illégale et du vol des ressources naturelles ainsi que le développement des infrastructures et équipements liés aux activités maritimes font également partie intégrante des actions que le projet de charte propose pour faire des mers et océans des espaces de pleine viabilité des économies africaines et de prospérité des peuples du continent. Le Sommet de Lomé va aborder plusieurs sujets, dont celui, très important, de la pollution marine A-t-elle pu trouver une place dans ce projet de charte? Absolument! La préservation de l environnement est au cœur de la philosophie que porte le projet de charte de Lomé. Les changements climatiques, dans certaines de leurs manifestations, Today, Togo and the African Union work together to ensure the adoption and signature of the charter, are you certain that the Sates will all play their role and make the commitment by foregoing their national interests? The party States undertake, through the draft charter, to promote the blue economy. Essentially resting on the exploitation of the maritime and marine sectors and the resources found there, this form of economy is not only a factor of economic development, but also a source of geostrategic challenges related to the control of maritime and marine spaces. Aside from the benefits likely to be drawn from the exploitation of African maritime spaces as channels of communication, places of commercial trading and the exploration and exploitation of natural riches found there, the draft charter controls fishing and aquaculture in order to preserve present and future generations from the depletion of resources related to these activities. The promotion of coastal and maritime tourism, improvement of trade and competitiveness, prevention of the illegal exploitation and theft of natural resources and the development of the infrastructures and equipment related to maritime activities are also an integral part of the actions the draft charter proposes in order to make the seas and oceans spaces viable for the African economies and the prosperity of the peoples of the continent. The Lomé summit will deal with several topics, including the very important topic of marine pollution Does it have a place in this draft charter? Absolutely! The preservation of the environment is at the heart of the philosophy recommended by the Lomé draft charter. Climate change, in some of its manifestations, affects the equilibrium of marine environments with the perspective of the progressive rarefication of halieutic resources in particular. The protection of diverse and varied biological species and the prohibition of the spilling of toxic waste are two essential tools the text offers to preserve Africa from the phenomenon of marine pollution. Furthermore, as part of the management of maritime disasters, it proposes an integrated multi-sector and multidisciplinary strategy, defined in a concerted way with the African Union Commission and international institutions such as the World Meteorological Organization, UNESCO and the International Maritime Organization.Regarding the protection of maritime territories and their users as well as the control of maritime borders, the draft charter proposes collaboration and cooperation between party States as an instrument for defining integrated strategies for combatting insecurity, human and drug trafficking on the seas and oceans. The pertinence of the text that will be subject to the approval of the States at the Lomé summit also resides in the emphasis placed on the communication aspect. Information, education, communication and awareness-raising aimed at 14 Diplomatie - octobre 2016 Sécurité maritime et développement en Afrique

15 Introduction portent atteinte à l équilibre marin, avec la perspective d une raréfaction progressive des ressources halieutiques, en particulier. Ainsi, la protection des espèces biologiques diverses et variées et l interdiction du déversement des déchets toxiques constituent deux outils essentiels que le texte offre pour préserver l Afrique du phénomène de pollution marine. Par ailleurs, dans le cadre de la gestion des catastrophes maritimes, il propose l élaboration d une stratégie multisectorielle et multidisciplinaire intégrée, définie de façon concertée avec la Commission de l Union africaine et des institutions internationales telles que l Organisation météorologique mondiale, l Organisation des Nations Unies pour l Éducation, la Science et la Culture ainsi que l Organisation maritime internationale. En ce qui concerne la protection des territoires maritimes et de leurs usagers ainsi que la maîtrise des frontières maritimes, le projet de charte propose aux États parties la concertation comme instrument de définition de stratégies intégrées de lutte contre l insécurité, le trafic d êtres humains et de drogues sur les mers et océans. La pertinence du texte qui sera soumis à l approbation des États au Sommet de Lomé réside également dans l accent mis sur la dimension communicationnelle. En effet, l information, l éducation, la communication et la sensibilisation à l endroit de tous les acteurs immédiats ou lointains de l économie bleue forment la stratégie de communication nécessaire à la réalisation des objectifs du projet de charte de Lomé. De même, ce texte met à contribution l expertise scientifique du monde universitaire africain qui, dans un esprit de coopération, est invité à jouer un rôle accru dans l élaboration et la consolidation de la vaste stratégie de promotion des ressources maritimes et marines qui est définie. Enfin, le projet de charte responsabilise les États parties à travers la création d un comité chargé d effectuer le suivi de sa mise en œuvre et de formuler les recommandations appropriées. On imagine que la diplomatie togolaise a mis les bouchés doubles et ratissé large dans le processus auprès des États pour cette charte Peut-être, trois mots qui vous ont guidé dans cette période d avant le sommet? Vous avez dit trois mots? Eh bien! Coopération, synergie et concertation : tel est le triptyque par lequel il convient d appréhender la philosophie qui se dégage des lignes du projet de charte sur la sécurité maritime. Le Sommet de Lomé s annonce comme l un des plus grands rendez-vous diplomatiques africains de l année Cette rencontre offre aux gouvernants du continent l occasion d effectuer un grand bond en avant. Elle sera la consécration matérielle de l idéal qui en est la pierre angulaire : la sauvegarde de la paix et de la sécurité pour le développement et la prospérité. À travers cette charte, le Togo est devenu un défenseur majeur des mers et océans mais en face, il y a certainement, Monsieur le Ministre, des esprits malveillants? Pour dissiper les esprits malveillants qui ne cessent de hanter nos mers et océans et instaurer le salut dans ces endroits au potentiel économique avéré, il est essentiel que le Sommet du 15 octobre 2016 fonde la charte de Lomé et l érige en un véritable instrument fondamental auquel devront se soumettre les différents usagers des espaces maritimes africains. all the immediate or distant players of the blue economy form the communication strategy necessary to the achievement of the objectives of the Lomé draft charter. Likewise, this text calls upon the contribution of scientific experts from the African university sector who, in a spirit of cooperation, are invited to play a greater role in the development and consolidation of the broad strategy of promoting maritime and marine resources defined therein. Finally, the draft charter underscores the accountability of party States through the creation of a committee in charge of monitoring its implementation and formulating the appropriate recommendations. One can imagine that Togolese diplomacy worked overtime and far and wide with the States on this charter Could you give us three words that guided you during this pre-summit period? You said three words, well then: Cooperation, synergy and working collaboratively: this is the triptych by which to understand the philosophy behind the draft charter of maritime safety. The Lomé summit promises to be one of the major African diplomatic meetings of This encounter offers the governments of the continent the opportunity to make a great leap forward. It will be the material consecration of the ideal which is its cornerstone: safeguarding peace and safety for development and prosperity. Through this charter, Togo has become a major defender of the oceans but Mr. Minister facing you there must be evil minds? To combat these evil minds that continue to haunt our seas and oceans and to instill hope in these areas of demonstrated economic potential, it is essential that the summit of 15th October, 2016 ratify the Lomé charter transforming it into a veritable fundamental instrument to which the different users of the African maritime spaces must submit. Photo ci-contre : Le 6 mai 2015, des officiers des marines béninoise, malgache, togolaise et ivoirienne se réunissent à Naples, en Italie, dans le cadre de la conférence annuelle de l Africa Partnership Station (APS), qui est une initiative de coopération internationale visant à renforcer les partenariats maritimes par le biais de la formation et des activités de collaboration en vue d améliorer la sécurité maritime en Afrique. ( DoD/ Daniel P. Schumacher) Opposite: On 6th May, 2015, Naval officers from Benin, Madagascar, Togo and the Ivory Coast gather in Naples, Italy for an annual conference of the African Partnership Station (APS), an international security cooperation initiative aimed at strengthening global maritime partnerships through training and collaborative activities in order to improve maritime safety and security in Africa. ( DoD/Daniel P. Schumacher) Diplomatie - october 2016 Maritim Security and Development in Africa 15

16 Introduction analyse Par Carlos Lopes, secrétaire général adjoint des Nations Unies, secrétaire exécutif de la Commission économique des Nations Unies pour l Afrique. By Carlos Lopes, United Nations Under-Secretary-General and Executive Secretary of ECA. analysis Photo ci-dessus : Carlos Lopes, secrétaire exécutif de la Commission économique des Nations Unies pour l Afrique (CEA), lors de l inauguration du pavillon Afrique à la COP21 à Paris, le 30 novembre ( ONU) Above: Carlos Lopes, Executive Secretary of the United Nations Economic Commission for Africa (ECA), during the inauguration of the Africa pavilion at COP21 in Paris, 30th November, ( ONU) L économie bleue en Afrique Le «monde bleu» se compose en Afrique d un vaste réseau de lacs, de rivières et d étendues marines riches en ressources naturelles. Trente-huit des 54 pays que compte l Afrique sont des États côtiers. Plus de 90 % des importations et des exportations africaines transitent par la mer, et plusieurs des corridors commerciaux les plus stratégiques de la planète sont situés en Afrique, renforçant le poids géopolitique du continent. L es eaux territoriales sous juridiction africaine totalisent quelque 13 millions de kilomètres carrés, et le plateau continental s étend sur environ 6,5 millions de km 2. Avec une superficie d à peine km 2, Maurice est l un des plus petits pays d Afrique et au monde, mais ses eaux territoriales en font un pays de 1,9 million de km 2, la taille de l Afrique du Sud. Autrement dit, sous la mer existe une autre Afrique. C est donc à juste titre que l Union africaine qualifie l économie bleue de «nouvelle frontière de la renaissance de l Afrique». Africa s Blue Economy Africa s «Blue word» is made of vast lakes and rivers and an extensive ocean resource base. Thirty-eight of the fifty-four African States are coastal States. More than 90 percent of Africa s imports and exports are conducted by sea and some of the most strategic gateways for international trade are in Africa, underscoring the geopolitical importance of the region. M aritime zones under Africa s jurisdiction total about 13 million square kilometres including territorial seas and approximately 6.5 million square kilometres of the continental shelf. Mauritius with its 1850 square kilometres is one of the smallest countries in Africa and in the world. However, with its territorial waters, it becomes a country with 1.9 million square kilometres, the size of South Africa. Therefore, we have another Africa under the sea. Quite rightly, the African Union 16 Diplomatie - octobre 2016 Sécurité maritime et développement en Afrique

17 Introduction Les étendues marines et aquatiques de l Afrique deviennent un thème incontournable du discours politique ; les ressources naturelles qu elles recèlent sont largement sous-exploitées, mais leur contribution potentielle à un développement durable et inclusif est désormais reconnue. Le «monde bleu» est plus qu un paramètre de l économie il appartient au patrimoine géographique, social et culturel de l Afrique. Pour le mettre au service de l Afrique d aujourd hui et de demain, il importe de mieux réaliser les immenses potentialités d un investissement et d un réinvestissement dans les domaines marin et aquatique du continent, et les bénéfices à tirer du paradigme d un développement bleu durable qui tournerait le dos aux prélèvements illégaux, à la dégradation de l environnement et à l épuisement des ressources naturelles. Exploitée à fond et correctement gérée, l économie bleue peut constituer une source de richesse capitale, et catapulter le continent sur la voie du développement durable. Les économies africaines continuent de croître à un rythme remarquable, grâce notamment à l exploitation et à la commercialisation des abondantes ressources naturelles terrestres dont est doté le continent. Mais il faut penser autrement si l on veut convertir cette croissance en progrès durable, associant répartition inclusive de la richesse et respect de l environnement, et prenant en considération les plus grandes exigences sociales. Cette ambition implique aussi la création d emplois de qualité pour répondre à la croissance démographique, grâce à une diversification de l économie et à des stratégies explorant les nouvelles frontières du développement et de l innovation. L économie bleue en offre l occasion. L Agence internationale de l énergie (AIE) estime par exemple que l énergie renouvelable des océans pourrait satisfaire 400 % de la demande mondiale actuelle d électricité. En 2010, selon d autres estimations, le chiffre d affaires des activités liées au monde de la mer s est élevé à milliards d euros, et il se montera chaque année à milliards d euros à l horizon L Afrique doit à l évidence adopter des stratégies holistiques et cohérentes pour exploiter le plein potentiel de l économie bleue. L économie bleue peut jouer un rôle essentiel dans la transformation structurelle de l Afrique, la croissance économique durable et le développement social. Elle concerne toutes les étendues d eau, y compris les lacs, les cours d eau et les nappes souterraines, sans oublier les mers et les côtes. Les principales branches de l activité économique de l Afrique basée sur les ressources marines et aquatiques sont aujourd hui la pêche, l aquaculture, le tourisme, les transports, le secteur portuaire, le secteur minier et le secteur de l énergie. Mais l approche de l économie bleue insiste aussi sur les interconnexions entre ces activités et les autres secteurs, elle prend en compte les filières émergentes et porteuses d avenir, et elle intègre d importantes considérations sociales comme l égalité hommes-femmes, la sécurité alimentaire et l accès à l eau, la réduction de la pauvreté, la préservation des ressources ou encore la création d emplois. L approche du développement de l économie bleue que nous prônons dans un guide pratique se fonde sur un usage durable et une gestion conservatoire des écosystèmes aquatiques et marins et des ressources qui leur sont associées. Elle se réfère aux principes d équité, de faible bilan carbone, d efficacité énergétique, d inclusion sociale et de développement sur une base élargie, avec la création d emplois comme centre de gravité. Elle mise sur un processus déterminé de coopération et d intégration régionales, elle considère la transformation structurelle du continent comme un impératif call the Blue Economy the «New Frontier of African Renaissance». Africa s aquatic and marine spaces are an increasingly common topic of political discourse; its natural resources have remained largely underexploited but are now being recognized for their potential contribution to inclusive and sustainable development. This «Blue word» is more than just an economic Space it is part of Africa s rich geographical, social, and cultural canvas. Through a better understanding of the enormous opportunities emerging from investing and reinvesting in Africa s aquatic and marine spaces, the balance can be tipped away from illegal harvesting, degradation, and depletion to a sustainable Blue development paradigm, serving Africa today and tomorrow. If fully exploited and well managed, Africa s Blue Economy can constitute a major source of wealth and catapult the continent s fortunes. Africa s economies continue to grow at remarkable rates, including through the exploitation of the rich endowment of land-based natural resources and commodity exports. Converting this growth into quality growth, through the generation of inclusive wealth, within environmental limits and respecting the highest social considerations, requires bold new thinking. It also involves the creation of jobs for a population on the rise. The Blue Economy offers that opportunity. For example, the International Energy Agency estimates that ocean renewable energy has a power potential sufficient to provide up to 400% of global current energy demand. Other estimates indicate that in 2010 the total annual economic value of maritime related activities reached 1.5 trillion euro. It is forecasted that by 2020, this figure will reach 2.5 trillion euro per year. Surely, Africa needs holistic and coherent strategies to harness this potential. All water bodies, including lakes, rivers, and underground water, in addition to seas and the coast are unique resources, yet neglected and often forgotten. The largest sectors of the current African aquatic and ocean-based economy are fisheries, aquaculture, tourism, transport, ports, Photo ci-dessus : Des pêcheurs préparent leurs bateaux à Teshie Beach, située dans la région du Grand Accra, capitale du Ghana. Selon Jamal Saghir, conseiller régional principal pour la région Afrique au sein de la Banque mondiale, «un tiers des populations du continent africain vit sur les côtes et 50 % des PIB de l Afrique de l Ouest dépendent de la mer». ( Sura Nualpradid) Above: Fishermen prepare their boats on Teshie Beach, located in the region of Greater Accra, capital of Ghana. According to Jamal Saghir, principal regional advisor for the Africa region at the World Bank, one third of the population of the African continent lives on the coasts and 50% of the GDP of West Africa depends on the sea. ( Sura Nualpradid) Diplomatie - october 2016 Maritim Security and Development in Africa 17

18 Introduction Photo ci-contre : Marché aux poissons dans un village de pêcheurs au Kenya. Selon la Commission économique des Nations Unies pour l Afrique (CEA), le potentiel de l économie bleue pourrait résoudre la question nutritionnelle et assurer la sécurité alimentaire de près de 200 millions d Africains par l apport vital de poissons de mer et d eau douce qui seraient actuellement sousexploités. ( Dietmar Temps) Opposite: Fish market in a fishing village in Kenya. According to the United Nations Economic Commission for Africa (ECA), the potential of the blue economy could solve nutritional issues and ensure the food security of nearly 200 million Africans via the vital contribution of saltwater and freshwater fish that are currently under-exploited. ( Dietmar Temps) du développement de l Afrique, et elle préconise une rupture totale avec les modèles de développement enclavé. Au contraire, en améliorant ses connexions avec les autres secteurs d activité, l économie bleue consacre les secteurs liés aux mers et aux eaux comme chaînon des services écosystémiques intégrés, basé sur l exploitation des ressources biologiques et non biologiques, au bénéfice de tous les États, qu ils soient côtiers, insulaires ou enclavés. Ses ressources biotiques doivent inciter l Afrique à développer la pêche, l aquaculture et la mariculture, et elles ouvrent de prometteuses perspectives aux industries chimiques, pharmaceutiques et cosmétiques. L extraction minière et les nouvelles sources d énergie sont les fondements d une industrialisation basée sur l exploitation des ressources naturelles, et elles placent l Afrique au cœur du commerce mondial des produits à valeur ajoutée, au lieu du rôle de simple fournisseur de matières premières brutes. Au cœur de ce scénario figure la nécessité de moderniser la logistique et le transport maritimes, les infrastructures portuaires et ferroviaires. Il s agit d améliorer leur fiabilité et leur efficience, avec le souci de tisser des liens entre l économie du continent et les chaînes de valeur nationales, régionales et mondiales, tout en promouvant le tourisme et les activités de loisirs, pour ne citer que ces secteurs. L Afrique offre de salutaires exemples de coopération aboutie entre pays maritimes, côtiers et riverains, ou de résolution pacifique des litiges. Ces modèles comptent des cas de délimitations et démarcations transnationales du domaine maritime. Une approche collaborative de la mise en œuvre de l économie bleue permettra une formulation commune d une vision partagée de la transformation socio-économique du continent. L approche de l économie bleue comme moteur du développement est inscrite dans le projet de l Union africaine intitulé «Agenda 2063 L Afrique que nous voulons». Nous observons que de plus en plus d États africains formulent des stratégies d économie bleue pour diversifier leurs économies et catalyser la transformation socioéconomique, en se basant sur leur expérience acquise de mise en œuvre des principes de l économie verte pour une transition vers une économie bas carbone. Carlos Lopes (Texte publié dans L économie bleue en Afrique : Guide pratique, Commission économique des Nations Unies pour l Afrique, Addis-Abeba, mars 2016 (avec l aimable autorisation des Nations Unies). coastal mining, and energy. Additionally, the Blue Economy approach emphasizes interconnectedness with other sectors, is responsive to emerging and frontier sectors, and supports important social considerations, such as gender mainstreaming, food and water security, poverty alleviation, wealth retention, and jobs creation. The Blue Economy can play a major role in Africa s structural transformation. The approach advocated is premised in the sustainable use, management and conservation of aquatic and marine ecosystems and associated resources. It builds on principles of equity, low carbon footprint, resource efficiency, social inclusion and broad-based development, with the jobs agenda at the centre of it all. It is anchored on strong regional cooperation and integration, considers structural transformation as an imperative for Africa s development and advocates for a complete departure from enclave development models. Instead, through better linkages to other sectors of the economy, it situates the aquatic and marine economies as part of integrated ecosystem services based on the harvesting of living and non-living resources, benefitting both costal, island states and landlocked countries. Biotic resources allow Africa to expand its fishing, aquaculture, mariculture sectors and foster the emergency of vibrant pharmaceutical, chemical and cosmetics industries. The extraction of mineral resources and the generation of new energy resources provide the feedstock to resource-based industrialisation and places Africa at the centre of global trade in value-added products, no longer a supplier of unprocessed raw materials. Central to this agenda, is the need to modernise Africa s maritime transport and logistics services, its port and railway infrastructure, improve its reliability and efficiency with the view to seamless link the continent s economies to national, regional and global value chains as well facilitate tourism and recreation activities, just to name a few. Africa has salutary examples of maritime, riparian and river-based cooperation and dispute settlement. This includes examples of maritime and transnational aquatic boundary delimitation and demarcation. A collaborative approach for the development of the Blue Economy will create the foundation for the formulation of shared visions for transformation. The Blue Economy development approach is an integral part of African Agenda Building on the experience with implementing Green Economy principles for a transition to low-carbon development, we are seeing an increasing number of African member States formulating Blue Economy strategies to diversify their economic base and catalyze socioeconomic transformation. Carlos Lopes (Text published in Africa s Blue Economy: A policy handbook, United Nations Economic Commission for Africa, Addis Ababa, march 2016 (courtesy of United Nations). 18 Diplomatie - octobre 2016 Sécurité maritime et développement en Afrique

19 Introduction ACTUELLEMENT EN KIOSQUE DIPLOMATIE N 82 SEPTEMBRE-OCTOBRE PAGES 8,95 Retrouvez nos publications en kiosque, librairie et sur Internet Numéro 01 Numéro 125 Numéro 50 Numéro 23 Numéro 06 Numéro 37 Numéro 82 Numéro 34 Numéro rue Saint-Honoré Paris (France) Tél. : +33(0) Fax : +33 (0) contact@areion.fr Diplomatie - october 2016 Maritim Security and Development in Africa 19

20 20 Diplomatie - octobre 2016 Sécurité maritime et développement en Afrique

21 Sécurité maritime Maritime Security ANALYSE Terrorisme maritime : quels risques pour l Afrique?...p. 22 ANALYSIS Maritime Terrorism: What Are the Risks for Africa? ANALYSE La piraterie en Afrique : une inflation de solutions à côté du problème?...p. 28 ANALYSIS Piracy in Africa: an Inflation of Solutions alongside the Problem? ANALYSE Golfe de Guinée : le nouvel épicentre de la piraterie mondiale...p. 35 ANALYSIS Gulf of Guinea: the New Epicenter of World Piracy ANALYSE La piraterie somalienne : un état des lieux en demi-teinte...p. 40 ANALYSIS Somalian Piracy: A Mixed Situation ANALYSE Soutenir la sécurité maritime en Afrique...p. 45 ANALYSIS Supporting Maritime Security in Africa Photo ci-contre : De 2005 à 2015, au moins 205 attaques de navires par des pirates ont été enregistrées dans le golfe de Guinée, faisant de la zone côtière s étendant du Sénégal à l Angola la nouvelle plaque tournante de la piraterie maritime en Afrique. ( Michael Wick) Opposite: From 2005 to 2015, pirates have attacked at least 205 ships in the Gulf of Guinea, turning the coastal zone between Senegal and Angola into Africa s new maritime piracy hub. ( Michael Wick) Diplomatie - october 2016 Maritim Security and Development in Africa 21

22 Sécurité maritime analyse Par Hugues Eudeline, ancien officier de Marine, conférencier et auteur de nombreuses études géostratégiques sur le terrorisme, dont Le dossier noir du terrorisme (L esprit du temps, décembre 2014). By Hugues Eudeline, former French Navy officer, lecturer, and author of many geostrategic studies on terrorism, including Le dossier noir du terrorisme* (L esprit du temps, Dec, 2014). * The hidden truth about terrorism. analysis Photo ci-dessus : Le navire Blue Marlin transporte l USS Cole, victime d un attentat le 12 octobre C est dès 1998 qu Oussama ben Laden, initiateur des opérations de terrorisme maritime, demande de préparer une attaque contre un pétrolier, puis change d avis l année suivante en visant d abord une cible militaire emblématique (USS The Sullivans, puis USS Cole). ( US Navy) Above: The ship Blue Marlin transports the USS Cole, victim of an attack on 12th October, It is beginning in 1998 that Osama ben Laden, initiator of maritime terrorism operations requested the preparation of an attack against an oil tanker, then changing his mind the following year by first targeting an emblematic military target (USS The Sullivans, then USS Cole). ( US Navy) Terrorisme maritime : quels risques pour l Afrique? L expression «terrorisme maritime» associe une forme de violence politique difficile à appréhender (1) à un espace méconnu. Pourtant, les océans constituent un élément clé de la mondialisation économique qui permet la majorité des échanges internationaux et donne accès aux énormes ressources minières, halieutiques et génétiques qu ils recèlent. C ette forme de violence s amplifie pourtant, à bas bruit, sous l effet de deux phénomènes qui se conjuguent. Le développement des technologies simplifiant la navigation et les moyens de télécommunications en haute mer profitent aux prédateurs alors que l importance et le nombre de leurs cibles s accroissent. Le terrorisme peut être décomposé en deux grandes catégories : le terrorisme stratégique et le terrorisme tactique. Lorsqu il s attaque à l économie d un pays ou d une région pour y générer une instabilité sociale de grande ampleur, il peut Maritime Terrorism: What Are the Risks for Africa? Maritime terrorism is an expression that combines a disconcerting form of political violence with unfamiliar surroundings (1). Our oceans are nonetheless a mainspring of economic globalization, enabling a majority of international exchanges as well as providing access to a huge stash of mineral, fishery, and genetic resources. T his form of violence is quietly increasing under the impetus of two phenomena. Predators seize upon the development of technologies that simplify navigation and telecommunication on the high seas, while their potential targets arrive in ever-increasing numbers and sizes. Terrorism comes in two main categories: strategic terrorism and tactical terrorism. When used to attack a country s or region s economy in the intent of causing major 22 Diplomatie - octobre 2016 Sécurité maritime et développement en Afrique

23 Maritime Security être qualifié de stratégique. Il choisit dans ce cas ses cibles moins pour ce qu elles représentent que pour l effet induit sur l économie. L autre, le terrorisme tactique, regroupe toutes les familles d actions nécessaires au fonctionnement des mouvements (financement, recrutement, soutien logistique) et aux modes d action destinée à influencer directement la population (attaques de cibles molles, de personnalités, opérations spéciales, de coercition et de séduction) (2). C est Oussama ben Laden qui va lancer les opérations de terrorisme maritime stratégique avant même le 11-Septembre. Le premier trouve sur mer un terrain de chasse particulièrement favorable puisque 90 % des échanges commerciaux y transitent, que 99 % des flux d information passent par les câbles sous-marins et que, après celle de la plaisance, l industrie de la croisière se développe rapidement. Le second peut mettre à profit ce gigantesque espace de liberté, particulièrement favorable aux actions clandestines, qui recouvre 71 % de la surface du globe. Cet article ne traitera que de l aspect stratégique. Enfin, pour agir sur mer et en particulier au large, les terroristes doivent disposer de d importants moyens nautiques et d endroits où les maintenir. Hormis dans les États faillis comme la Somalie et la Libye, il leur est difficile de disposer de bases au vu et au su de tout le monde : ce sont leurs sanctuaires qui en tiennent lieu. Leur efficacité sera fonction de leur capacité à en disposer. L Afrique est un continent immense, dont nombre de pays connaissent des difficultés politiques. Elle est bordée par deux océans et deux mers dont les caractéristiques extrêmement différentes induisent des situations tout aussi variées dans les États riverains. Les violences maritimes constituant un continuum, il n est pas toujours aisé de distinguer les activités des pirates de celles des trafiquants et des terroristes. Une collusion fréquente rapproche ces populations dont les motivations profondes devraient être antinomiques. De fait, lorsqu ils cohabitent sur une même côte, ils s accordent fréquemment pour éviter de se nuire et profiter de la synergie de leurs spécialisations réciproques, au prix d arrangements financiers en échange d une protection ou d autres avantages. L échec relatif des attaques contre l ennemi lointain C est Oussama ben Laden qui va lancer les opérations de terrorisme maritime stratégique avant même le 11-Septembre. La première tentative d attaque, qui visait la frégate social unrest, it can be considered strategic. The targets in this case are chosen less for their symbolism and more for their economic impact. The other category, tactical terrorism, encompasses the whole range of actions needed to keep these movements running (finance, recruitment, logistical support) along with actions aimed at directly influencing the population (attacks on soft targets, on celebrities, special operations, coercion, enticement) (2). Strategic terrorism has an ideal hunting ground at its disposal in the shape of the seas, since these carry 90% of all commercial exchanges across their surface as well as 99% of information flow through their underwater cables; and if that weren t enough, the leisure aspect the cruise industry in particular is undergoing high-speed development. As for the tactical form, it has the potential to take full advantage of a gigantic, free-roaming space covering 71% of the earth s surface and lending itself ideally to clandestine actions. This article nonetheless concentrates on the strategic aspect. To pursue their deeds at sea, especially the high seas, terrorists need access to significant seagoing facilities as well as ports to maintain them. Without resorting to failed states, like Somalia and Libya, they have a hard task on their hands trying to use bases seen and known by everybody, since these bases must serve as their sanctuaries. Africa is a vast continent, with many of its countries in political turmoil. It is surrounded by two oceans and two seas, each with its own characteristics, leading to very different situations in the countries bordering them. Maritime violence stretches across a continuous spectrum, in which piracy can be difficult to distinguish from drug running or terrorism. Collusion often exists between these different factions, even though they are polar opposites when it comes to motivation. When such groups operate on the same coastline, they often reach agreements in order to Lexique Le terme de «sanctuaire», couramment utilisé, est peu approprié puisque son étymologie lui confère un sens sacré en totale opposition à ce que représente un endroit où se préparent des opérations violentes, tout à la fois bases logistiques et de gestion, centres de planification, d entraînement, d endoctrinement et de commandement opérationnel. Le terme anglais de safe haven («refuge») est plus adapté. Nous conserverons cependant le terme «sanctuaire» pour simplifier la compréhension du texte. Words The term of sanctuary routinely used, is not very appropriate since its etymology endows it with a sacred meaning which is in complete opposition with what a place in which violent operations are prepared represents: logistical and management bases, planning, training, indoctrination and operational command centers. The English term of safe haven is more appropriate. However, here we will retain the term sanctuary to simplify the comprehension of the text. Photo ci-contre : Le porte-avions USS America traverse le canal de Suez. Alors que la péninsule égyptienne du Sinaï est le théâtre de nombreuses attaques terroristes, le canal de Suez fait l objet d une surveillance maximale en raison du symbole majeur que constituerait une attaque contre ce point de passage stratégique du commerce maritime mondial. ( US Navy) Opposite: The aircraft carrier USS America crosses the Suez Canal. While the Egyptian peninsula of the Sinai is the theatre of numerous terrorist attacks, the Suez Canal is under maximum surveillance due to the major symbol an attack against this strategic point of passage of world maritime trade would represent. ( US Navy) Diplomatie - october 2016 Maritim Security and Development in Africa 23

24 Sécurité maritime La synergie des violences maritimes en Afrique km Drogues Drogues Terrorisme Migrations OCÉAN ATLANTIQUE Golfe de Guinée Conception / Sources : Hugues Eudeline Détroit de Gibraltar Piraterie Terrorisme Migrations Terrorisme Différends Mer Méditerranée Canal de Suez Détroit de Bab el-mandeb ( AREION/CAPRI) Conflits Piraterie Terrorisme Migrations Golfe d'aden américaine The Sullivans, début 2000, a échoué. Elle fut suivie par celle, réussie, de l USS Cole, à quai, à Aden. C est ensuite le pétrolier français Limburg qui a été attaqué en 2002 à proximité de la côte yéménite. Le golfe d Aden où se sont déroulés ces événements est bordé au sud par la Somalie, pays failli où sévit le mouvement islamiste shebab (3) qui a fait allégeance à Al-Qaïda en Au Yémen, un conflit de haute intensité oppose une coalition arabe dirigée par l Arabie saoudite aux rebelles houthistes (chiites) depuis le 25 mars Un terrorisme islamiste sunnite très puissant et actif initialement représenté par le seul Al-Qaïda dans la péninsule arabique (AQPA) (4) constitue un troisième parti qui voudrait étendre le sanctuaire côtier qu il a conquis jusqu au détroit de Bab el-mandeb afin d y mener des actions de terrorisme stratégique contre les flux maritimes (5). Les shebabs, qui n ont pas d implantation forte de l autre côté du golfe d Aden, ne peuvent pas apporter de soutien direct à ce projet. Le golfe de Guinée, à l ouest de l Afrique, est le théâtre d une violence maritime qui ne cesse d empirer au fil des mois. OCÉAN INDIEN Plus au nord, le canal de Suez constitue un point de passage obligé des navires de commerce et de guerre. Ils doivent y transiter à petite vitesse et en convois, ce qui en fait théoriquement des cibles faciles. Dépourvu d écluses, il est difficile à bloquer. Même si on y coulait un ou plusieurs navires, le trafic ne serait coupé que pendant un temps limité, celui nécessaire au renflouement. Plusieurs attaques y ont cependant été Principale route maritime mondiale Point de passage stratégique Zone de synergie de violences maritimes avoid crossing each others paths and to draw synergy from their respective specializations, with for example financial arrangements made in exchange for protection or other favours. The relative failure of attacks against faraway enemies Osama bin Laden was the first to attempt maritime strategic terrorist operations, before the 11th September, 2001 attacks. The first such attempt was aimed at the American frigate The Sullivans early in 2000 and was a failure. A further attack, on the USS Cole berthed at Aden, succeeded. Next in line was the French tanker Limburg, attacked in 2002 off the coast of Yemen. All these took place in the Gulf of Aden, whose southern shore is defined by Somalia, the failed state that gave rise to Al-Shabaab (3), the Islamist movement that pledged allegiance to Al-Qaeda in In the Yemen, an intense conflict has been running since 25th March, 2015 between an Arab coalition, led by Saudi Arabia, and Houthi rebels (Shiites). A very powerful and active Sunni Islamist terrorist faction in the Arabian peninsula (AQAP), originally represented solely by Al-Qaeda (4), constitutes a third party, which is trying to extend the coastal sanctuary it has conquered all the way to the Bab el-mandeb strait in order to pursue strategic terrorist actions against shipping (5). Al-Shabaab is not well enough implanted on the other side of the Gulf of Aden to be able to directly support this plan. Further North, the Suez canal is an indispensable thoroughfare for both naval and merchant shipping. Ships are obliged to pass through in low-speed convoys, which in theory makes them sitting ducks. The canal does not however have any locks and is therefore difficult to jam. Even if one or more ships were sunk, traffic would be stopped for only as long as it took to refloat them. Despite this, several attacks have been attempted, including one on 31st August, Members of the Al-Furqan brigade, an affiliate of Al- Qaeda, took advantage of the political unrest in Egypt and its resulting turmoil to fire two warheads from an RPG-7 rocket launcher at a passing container ship, the Cosco Asia. The failure of this attack to cause any significant damage demonstrates the considerable protective measures implemented the canal is the country s third biggest source of foreign income after expatriate cash transfers and tourism. A new form of strategic terrorism against the West is developing in Libya, a failed state where the Islamic State organization (IS) has established itself along large stretches of coastline. On 19th February, 2015, the newspaper Il Messagero reported on threats received by the Italian government in which the terrorists would set hundreds of boats adrift carrying half a million migrants if European armed forces engaged in Libya. Direct IS control of even part of this stream of humanity should be taken very seriously, given the twofold advantage that their movement would obtain with few or no drawbacks: on one hand, the very lucrative traffic provides a regular income, while on the other 24 Diplomatie - octobre 2016 Sécurité maritime et développement en Afrique

25 Maritime Security menées, dont une le 31 août Mettant à profit la situation politique dégradée en Égypte et la désorganisation qui en a résulté, des membres du groupe islamiste Al-Furqan, de la mouvance Al-Qaïda, ont tiré deux roquettes de RPG-7 sur le porte-conteneurs Cosco Asia alors qu il transitait dans le canal. Le fait que cet attentat n ait pas occasionné de dégâts significatifs prouve l efficacité des mesures de protection considérables qui lui sont affectées. Le canal constitue en effet la troisième source de devises de l Égypte, après les transferts de fonds des expatriés et le tourisme. Une nouvelle forme de terrorisme stratégique contre l Occident se développe à partir de la Libye, pays failli où l État islamique s est implanté sur de grandes portions de côte. Le 19 février 2015, le journal Il Messagero s est fait l écho de menaces reçues par le gouvernement italien, selon lesquelles les terroristes voudraient laisser dériver des centaines de bateaux chargés de migrants en cas d engagement de forces militaires européennes en Libye. Le contrôle direct par l État islamique (EI) d une partie au moins du flux d êtres humains est à prendre très au sérieux en raison du double avantage qu il procure au mouvement, sans présenter d inconvénient : d une part, ce trafic des plus lucratifs offre des rentrées financières régulières ; d autre part, il amplifie l effet dévastateur sur une opinion publique déjà très divisée au sujet de la crise des migrants qui secoue l Europe. L effort et les risques encourus par les terroristes-passeurs sont négligeables en comparaison des avantages recherchés puisque les États sont dans l obligation morale et légale de sauver les migrants dès qu ils sont en danger sur mer, où qu ils s y trouvent, et de les accueillir. Tous ces éléments, associés aux pratiques d esclavage et de prises d otages pratiquées couramment en Syrie et en Irak, portent à penser que la menace a probablement déjà été mise en œuvre et qu une partie au moins des migrants est passée par les filières de l EI. L efficacité des attaques contre l ennemi proche La part du tourisme dans les économies des pays côtiers d Afrique est très importante. C est donc logiquement la grande vulnérabilité de cette industrie qui va être exploitée par les mouvements terroristes. Elle est l objet d attaques systématiques dans de nombreux pays africains auxquels les rentrées monétaires quelle apporte sont indispensables. Ce sont les lieux de villégiature en bord de mer qui sont visés prioritairement au Kenya, en Égypte, en Tunisie, mais également sur la côte atlantique. C est dans cette optique que les shebabs ont mené des actions à partir de la mer dans l archipel de Lamu, au Kenya. L enlèvement de la Française Marie Dedieu avait été précédé un mois plus tôt, dans les mêmes conditions, par celui de la Britannique Judith Tebbutt, au cours duquel son mari avait été tué. La première est morte en détention, la seconde a été relâchée sept mois plus tard après paiement d une rançon. Ces attaques ont porté un coup très dur à un pays où l industrie touristique génère 800 millions de dollars, au point qu il a contraint le Kenya à s engager dans une guerre de longue durée en Somalie contre un adversaire qui y très bien implanté. Osama bin Laden was the first to attempt maritime strategic terrorist operations, before the 11th September, 2001 attacks. hand it exacerbates the devastating rift in public opinion on the subject of the migrant crisis currently raging in Europe. The effort expended and the risks run by these smugglerterrorists pale into insignificance compared with the gains they stand to make, given that countries are morally as well as legally obliged to save and accommodate migrants in danger on the seas, no matter where they are. All these considerations, coupled with the slavery and hostage-taking that are currently rife in Syria and Iraq, might lead one to believe the threat is already being put into practice and at least some of the migrants have passed through the hands of the IS and its offshoots. The effectiveness of attacks against nearby enemies Tourism represents a very large share of the economy in the coastal African states. This logically means that the industry represents a vulnerability that could be exploited by terrorist movements. It has indeed been the object of ongoing attacks in many African countries who rely on it for their revenues. Seaside resorts have borne the brunt of the attack in Kenya, Egypt, Tunisia, as well as on the Atlantic side. This is the context in which Al-Shabaab carried out seaborne actions in Kenya s Lamu archipelago. The kidnapping of French tourist Marie Dedieu took place in the same conditions as that of British tourist Judith Tebbutt a month earlier, during which her husband was killed. Marie Dedieu died in captivity whereas Tebbutt was released after seven months upon payment of a ransom. These attacks were a heavy blow to a country whose tourist industry is worth 800 million dollars, Photo ci-dessous : Le 17 novembre 1997, 58 touristes étrangers et quatre Égyptiens sont massacrés à l arme blanche, par la Gama a Islamiya, à Louxor. L impact financier est énorme. L industrie du tourisme en Égypte perd plus de 2 milliards de francs en un mois et demi et restera durablement affectée. ( Daniel Fafard) Below: On November 17, 1997, 58 foreign tourists and four Egyptians were massacred with knives by Gama a Islamiya, in Luxor. The financial impact was enormous. The tourist industry in Egypt lost over 2 billion francs in one month and a half and would remain durably affected. ( Daniel Fafard) Diplomatie - october 2016 Maritim Security and Development in Africa 25

26 Sécurité maritime Photo ci-dessous : Le 4 août 2016, des membres des forces spéciales de la police ivoirienne escortent un homme soupçonné d avoir servi de chauffeur au commando terroriste ayant attaqué la station balnéaire de Grand-Bassam le 13 mars 2016, faisant 19 victimes et 33 blessés. L attaque a été revendiquée le soir même par Al-Qaïda au Maghreb islamique. ( AFP/Issouf Sanogo) Below: On August 4, 2016, members of the special forces of the Ivorian police escorted a man suspected of having served as chauffeur to the terrorist commando that attacked the seaside resort of Grand-Bassam on March 13, 2016, leaving 19 dead and 33 injured. Responsibility for the attack was claimed that evening by Al-Qaida in the Islamic Maghreb. ( AFP/Issouf Sanogo) C est également par le biais d une attaque indirecte contre une station balnéaire que l Égypte a été très durement frappée. Le crash, le 31 octobre 2015, de l A321 de la compagnie russe Metrojet, victime d une bombe embarquée à Charm el- Cheikh par un membre de l État islamique, a conduit au départ précipité, et probablement pour longtemps, des touristes de l ensemble du pays. En Tunisie, trois mois après l attaque du musée du Bardo, c est celle de l hôtel Riu Imperial Marhaba, le 26 juin 2015, qui a déclenché le départ précipité des touristes étrangers. Un homme armé a systématiquement abattu les personnes qui se trouvaient sur la plage ou dans la piscine, faisant 28 morts et 36 blessés. L attentat, organisé chez le voisin libyen, a été revendiqué par l État islamique. Le président tunisien, Béji Caïd Essebsi, a décrété l état d urgence. Depuis, les hôtels sont vides. C est le même type d action qui a été mené par Al-Qaïda au Maghreb islamique (AQMI) le 13 mars 2016, sur la plage de Grand-Bassam en Côte d Ivoire. Il s agissait d assassiner en masse la population sur un lieu de villégiature très prisé : 19 personnes y ont perdu la vie. Le golfe de Guinée et la malédiction des hydrocarbures Le golfe de Guinée, à l ouest de l Afrique, est le théâtre d une violence maritime qui ne cesse d empirer au fil des mois. Elle est complexe et sans équivalent dans le monde en raison d un environnement social et économique très spécifique où l exploitation des hydrocarbures prend le pas sur toutes les autres activités. En raison de la stratification des religions les musulmans sont essentiellement présents dans le Nord du Nigéria, le terrorisme islamiste de Boko Haram n est actif qu à l intérieur des terres et, pour l instant, totalement absent des espaces maritimes. La part politique de la violence qui s est In the West of Africa, the Gulf of Guinea is a theatre of maritime violence that worsens with every month that passes. to such an extent that Kenya was obliged to engage in a long war in Somalia against a deeply rooted opponent. Egypt also was hit extremely hard by an indirect attack against a seaside resort. An A321 airliner belonging to the Russian operator Metrojet crashed on 31st October, 2015 after an IS terrorist had boarded at Sharm el-sheikh carrying a bomb. This led to the hurried and probably long-term departure of tourists from all over the country. In Tunisia, three months after an attack on Tunis s Bardo museum, another attack at the Hotel Riu Imperial Marhaba on 26th June, 2015 triggered an early exodus of foreign tourists. An armed man indiscriminately gunned down people on the beach and in the swimming pool, killing 28 and injuring 36. Responsibility for the attack, hatched in neighbouring Libya, was claimed by the IS. The Tunisian president, Beji Caid Essebsi, proclaimed a state of emergency. Since then, the hotels have stood empty. A similar operation was executed by the organization Al- Qaeda in the Islamic Maghreb (AQIM) on 13th March, 2016 at Grand-Bassam beach in the Ivory Coast, where a mass murder of the population took place in a highly prized resort, resulting in the death of 19 victims. The Gulf of Guinea and the oil curse In the West of Africa, the Gulf of Guinea is a theatre of maritime violence that worsens with every month that passes. The region is complex and has no equivalent anywhere else in the world due to its very specific social and economic environment where oil extraction dominates every other business. Religion is very stratified here Muslims are found essentially in northern Nigeria and Boko Haram s brand of Islamist terrorism operates only in the interior, being totally absent from the coastal areas so far. The political element in the violence that has arisen in these coastal areas is therefore not of a religious nature. It profits from the country s petroleum windfall on one hand while targeting it on the other, and someone has ventured to coin the term petroterrorism to describe it. Attacks perpetrated at sea, usually put down to piracy, were for a long time focused on siphoning the tanks of ships held up for just as long as the operation took. Now the price of a barrel has taken a dive, the attackers prefer to take crews hostage, which has become a common practice in the region. The militants make big financial gains from their activities, allowing them to be much better equipped for combat than most other movements in the world with the notable exception of narcoterrorists. Until 2009, when it laid down its arms, the group called Movement for the Emancipation of the Niger Delta (MEND) was responsible for the lion s share of these violent actions, claiming a fairer share of the petroleum windfall. Then in 2016 a new organization appeared called the Niger 26 Diplomatie - octobre 2016 Sécurité maritime et développement en Afrique

27 Maritime Security développée dans les zones côtières n a donc pas de caractère religieux. Elle profite de la manne pétrolière du pays et la vise tout à la fois, ce qui permet d oser lui appliquer le néologisme de «pétroterrorisme». Les attaques menées en mer, généralement attribuées à la «piraterie», ont longtemps visé au siphonnage des cuves de bateaux détournés le temps nécessaire. Avec la baisse du prix du pétrole, c est à présent la prise d otages dans les équipages qui est privilégiée, une pratique courante dans la région. Grâce à l apport financier important que les militants tirent de leurs activités, leurs moyens de combat sont beaucoup plus importants que ceux de la plupart des autres mouvements dans le monde, à l exception notable du «narcoterrorisme.» Jusqu en 2009, date à laquelle il a rendu les armes, les actions violentes étaient principalement pratiquées par le Mouvement pour l émancipation du delta du Niger (MEND), qui réclamait une plus juste répartition de la manne pétrolière. En 2016 est apparue une nouvelle organisation, les Niger Delta Avengers. Pratiquant une stratégie similaire à celle de son prédécesseur, elle a rapidement conduit à réduire la production pétrolière du Nigéria à son plus bas niveau depuis trente ans. Quelles perspectives? Les terroristes ont toujours fait preuve d une réelle inventivité, d un véritable esprit d innovation tant tactique que technique ainsi que d une capacité à planifier très soigneusement leurs opérations majeures. Ces compétences rendent difficilement prévisibles leurs actions clandestines à court terme ; aussi estil important de rester vigilants dans tous les domaines et de ne jamais les sous-estimer. C est l outrance dans l action qui caractérise l État islamique. L accès à la mer Méditerranée, qu il a obtenu par le Sinaï et la Libye, lui confère une capacité de nuisance nouvelle dont il peut chercher à faire un usage opérationnel. L industrie de la croisière, qui connaît un essor rapide le long des côtes africaines, pourrait en faire les frais. Un développement plus rapide des moyens d action de l État en mer des pays africains serait une partie de la réponse. Hugues Eudeline Notes (1) Nous utiliserons une définition, fruit d une approche empirique à partir de l analyse de plusieurs milliers d actes de violence politique : «Entente, préparation, financement, désinformation, menaces ou actes de violence destinés à déstabiliser durablement l opinion publique pour contraindre un pouvoir et atteindre des objectifs politiques. Le terrorisme maritime concerne les actions effectuées sur la mer, à partir de la mer ou contre des objectifs du domaine maritime». (2) Cf. Hugues Eudeline, Le dossier noir du terrorisme. La guerre moderne selon Sun Tzu, Le Bouscat, L esprit du temps, (3) Harakat Al-Chabab Al-Moudjahidin («le mouvement des moudjahidines de la jeunesse»). Il est fortement implanté en Somalie. (4) Le 11 février 2015, un groupe de combattants de cette organisation a fait défection et annoncé son ralliement au chef de l EI. (5) Le 8 février 2010, Saïd al-chehri, alors numéro deux d AQPA, annonçait dans un message : «Si nous parvenons à prendre le contrôle de Bab el-mandeb et à le ramener dans le giron de l islam, ce sera une victoire éclatante.» Delta Avengers. Working to the same kind of strategy as its predecessor, it soon caused a drop in Nigeria s oil production to its lowest level for thirty years. What are the prospects? Terrorists have never been short on invention, exhibiting genuinely innovative minds on both the tactical and technical fronts, as well as an ability to meticulously plan major operations. These skills make it difficult to predict what clandestine actions they might undertake in the short term. It is therefore crucial to stay vigilant in all areas and to resist underestimating them. It s the extreme nature of their actions that characterizes the IS. Their access to the Mediterranean, which it obtains through Sinai and Libya, opens up a new potential for harassment that they can put to operational use. The cruise industry, currently witnessing a boom along the African coasts, could be the one to pick up the bill. The African countries showing more urgency in developing sea actions would go some way to answering the problem. Hugues Eudeline Notes (1) We use a definition derived from an empirical approach and based on the analysis of several thousand acts of political violence: Understanding, preparation, funding, disinformation, violent threats or actions intended to cause long-term instability of public opinion, in order to force a power to cooperate and thus achieve political goals. Maritime terrorism concerns actions at sea, from the sea, or against maritime objectives. (2) See Hugues Eudeline, Le dossier noir du terrorisme. La guerre moderne selon Sun Tzu, Le Bouscat, L esprit du temps, (3) Harakat al-shabaab al-mujahideen (Mujahideen Youth Movement). It has a solid footing in Somalia. (4) On 11th February, 2015, a group of fighters from this organization defected and announced its rallying to the head of the IS. (5) On 8th February, 2010, Said al-shehri, the AQPA number two at the time, issued a message: If we manage to take control of Bab el-mandeb and bring in into the lap of Islam, this will be a stunning victory. Photo ci-dessus : Des migrants illégaux attendent dans le port de Tripoli après avoir été repêchés en mer près des côtes libyennes. Pour empêcher l Europe d intervenir en Libye, l État islamique a menacé de provoquer un «chaos en Méditerranée» par l afflux de migrants. ( Xinhua/Hamza Turkia) Above: Illegal migrants wait in the port of Tripoli after having been rescued at sea near the coast of Libya. To prevent Europe from intervening in Libya, Isis has threatened to cause chaos in the Mediterranean with the influx of 500,000 migrants. ( Xinhua/Hamza Turkia) Diplomatie - october 2016 Maritim Security and Development in Africa 27

28 Sécurité maritime analyse Par Thierry Vircoulon, enseignant à Sciences Po Paris, chercheur associé au Programme Afrique subsaharienne de l IFRI et consultant d International Crisis Group pour l Afrique centrale. By Thierry Vircoulon, lecturer at Sciences Po Paris, associate researcher at the Sub-Saharan Africa Program of the IFRI (French Institute of International Relations) and consultant for the International Crisis Group for Central Africa. analysis Photo ci-dessus : Un groupe de soldats camerounais participe à une formation lors de l exercice naval annuel «Obangame Express», organisé en collaboration avec les États-Unis pour contribuer à améliorer la coopération entre les pays participants afin d accroître la sécurité maritime dans le golfe de Guinée. ( DoD/Felicito Rustique) Above: A group of Cameroonian soldiers participate in training during the annual naval exercise Obangame Express, organized in collaboration with the United States to contribute to improving cooperation between participating countries in order to increase maritime security in the Gulf of Guinea. ( DoD/ Felicito Rustique) La piraterie en Afrique : une inflation de solutions à côté du problème? L apparition de la piraterie dans le golfe d Aden et le golfe de Guinée, qui en sont devenus au début de ce siècle les épicentres, ne tient pas au hasard. Ces espaces présentent des similarités, mais aussi des différences qui font que la réponse au problème de la piraterie n y sera pas nécessairement la même. S i ces deux zones partagent le fait d être des espaces stratégiques recelant des ressources qui sont autant d opportunités pour les pirates, une autre similitude est que l épicentre de la piraterie est, dans chacune, un État problématique. Pour le golfe d Aden, il s agit de la Somalie. Depuis la chute du régime de Siad Barre en 1991, ce pays a sombré dans la guerre civile et est devenu, depuis dix ans, un nouveau théâtre de la guerre contre le terrorisme. Dans le golfe de Guinée, il s agit du Nigéria, souvent décrit comme un pétro-état failli. Dans le delta Piracy in Africa: an Inflation of Solutions alongside the Problem? The appearance of piracy in the Gulf of Aden and Gulf of Guinea, which at the start of this century became the epicenters, did not happen by chance. Although these spaces are similar their differences are such that the response to the piracy problem is not necessarily the same. While these two zones share the fact of being strategic spaces harboring resources that represent opportunities for pirates, another similarity is that the epicenter of piracy is, in each case, a problematic 28 Diplomatie - octobre 2016 Sécurité maritime et développement en Afrique

29 Maritime Security du Niger, d où provient l essentiel de la richesse du pays, l accaparement des rentes pétrolières par l élite dirigeante et les compagnies privées étrangères, accompagné de la paupérisation des populations du riche delta du Niger, ont exacerbé les tensions sociopolitiques et favorisé l émergence de groupes armés. La dégradation de l environnement, conséquence de l extraction de l or noir, a rendu de plus en plus difficiles l agriculture, la pêche et l élevage, moyens de subsistance des populations (1). La précarisation des communautés du delta du Niger a constitué un terreau propice au développement de réseaux de contrebande de pétrole, et on estime que leurs détournements représentent annuellement entre trois et huit milliards de dollars (2). Les problèmes sécuritaires de la Somalie et du Nigéria ont pris au fil du temps une dimension régionale et posent maintenant un sérieux dilemme à leurs voisins immédiats dont la criminalité maritime n est qu un des aspects. Par ailleurs, cette criminalité maritime évolue rapidement, tant dans sa géographie que dans ses techniques. Une menace similaire aux différences cruciales La première de ces différences tient à la géographie du crime. Dans le golfe de Guinée, la plupart des attaques se déroulent dans les eaux territoriales et/ou dans la zone économique exclusive des États de la région. Par conséquent, la lutte contre cette criminalité relève des États concernés qui, contrairement à la Somalie, ne sont pas considérés comme faillis, mais n ont qu une très faible capacité d action en mer. Cette distinction est importante, car elle impose une limite juridique claire et nette à une intervention internationale : dans le golfe d Aden, la communauté internationale a dû prendre directement les choses en mains et s est unie pour sécuriser la mer en déployant une armada navale inédite, réalisant ainsi la plus grande opération de coopération sécuritaire internationale du début du siècle ; dans le golfe de Guinée, ce sont les États de la région qui tentent de mettre en place une architecture régionale de sécurité maritime. Par ailleurs, dans cette dernière zone, s exprime souvent une souveraineté jalouse qui renvoie simultanément au passé colonial, aux antagonismes régionaux et à la volonté d affirmation d États qui n ont qu un demi-siècle d existence. Enfin, la géopolitique de la sous-région du golfe de Guinée est plus complexe que celle du golfe d Aden. On y recense en effet plus d une dizaine d États côtiers aux frontières maritimes indéfinies, disposant de gisements d hydrocarbures offshore et entretenant des relations anciennes et diverses. Les réponses sécuritaires dans le golfe d Aden et dans le golfe de Guinée ne peuvent donc qu être différentes. Plusieurs réponses sécuritaires en quête de coordination La piraterie dans le golfe de Guinée a déclenché trois types de réponses sécuritaires provenant des catégories d acteurs suivantes : le secteur privé, les gouvernements africains et les gouvernements occidentaux. Le secteur privé a été le premier à réagir en important en Afrique de l Ouest les leçons durement apprises en Afrique de l Est, à savoir le recours à une sécurité privée embarquée et à des méthodes de sécurité passive et active. L industrie maritime a formalisé pour la Somalie un guide anti-piraterie (3) qui détaille les techniques de sécurisation des navires, les mesures de prévention et la conduite à tenir en cas d attaque (procédures d urgence, moyens de communication, zone sécurisée, etc.). Elle recommande l emploi pour le golfe de Guinée de State. For the Gulf of Aden it is Somalia. Since the fall of the regime of Siad Barre in 1991, this country has entered a civil war and has become in the last ten years a new theater for the war against terrorism. In the Gulf of Guinea, it is Nigeria, often described as a failed petro-state. In the Niger Delta, cradle of most of the country s wealth, the monopolization of oil revenues by the executive elite and foreign private companies, accompanied by the pauperization of the populations of the rich Niger Delta, have exacerbated socio-political tensions and spurred the emergency of armed groups. The degradation of the environment resulting from the extraction of black gold has made agriculture, fishing and breeding, the means of subsistence of the populations (1) increasingly difficult. The growing fragility of the communities of the Niger Delta has formed a basis propitious to the development of oil contraband networks and it is estimated that the diversion each year represents three to eight billion dollars (2). The security problems of Somalia and Nigeria have over time taken on a regional dimension and now represent a serious dilemma for their neighbors of which maritime organized crime is only one aspect. Moreover, this maritime organized crime is quickly evolving both in terms of geography and techniques. A similar threat with crucial differences The first of these differences concerns the geography of crime. In the Gulf of Guinea, most of the attacks occur in the territorial waters and/or in the exclusive economic zone of the States of the region. As a result, the fight against this organized crime is the prerogative of the States concerned, which unlike Somalia are not considered as failed but only have a very weak capability for action at sea. This distinction is important for it imposed a clear and distinct legal limit to international intervention: in the Gulf of Aden, the international community had to take things in hand directly and Photo ci-dessous : Adoptée par le Conseil de l UE dans le cadre de la force navale européenne (EUNAFOR) et de la Politique de sécurité et de défense commune (PSDC) le 10 novembre 2008, l opération «Atalanta» est une armada internationale unique en son genre déployée dans l océan Indien. Cette opération a été prolongée jusqu en décembre L OTAN a de son côté mis en œuvre l opération «Ocean Shield» et d autres marines (Chine, Russie, Inde, Japon, etc.) sont venues apporter leur contribution à la sécurisation de cette zone. ( EU Naval Force) Below: Adopted by the EU council in the framework of the European Naval Force (EUNAFOR) and the Common Security and Defense Policy on 10th November, 2008, the Atalanta operation is a unique international armada deployed in the Indian Ocean. This operation was extended until December NATIO for its part has implemented the Ocean Shield operation and other navies (China, Russia, India, Japan etc.) have also contributed to securing this area. ( EU Naval Force) Diplomatie - october 2016 Maritim Security and Development in Africa 29

30 Sécurité maritime unite to secure the sea by deploying a naval armada, part of the largest international security cooperation operation of the early part of the century; in the Gulf of Guinea, it is the States of the region that attempt to set up a regional maritime security architecture. Moreover, in this last zone jealous sovereignty comes into play simultaneously re-echoing a colonial past, regional antagonisms and the desire of affirmation of the States that only have half a century of existence. Finally, the geopolitics of the sub-region of the Gulf of Guinea is more complex than that of the Gulf of Aden. There are more than ten coastal States with indefinite maritime borders, holding offshore oil deposits and maintaining old and diverse relations. The security response in the Gulf of Aden and the Gulf of Guinea can thus only be different. Photo ci-dessus : Des officiers de la Marine française rencontrent les autorités équatoguinéennes alors que le BPC Dixmude fait escale à Malabo, en Guinée équatoriale, dans le cadre de la mission française Corymbe et afin de préparer l exercice «NEMO» (Navy s Exercise for Maritime Operations). Ce dernier a rassemblé en septembre 2016 les unités de huit pays d Afrique de l Ouest avec pour objectif de développer la coopération entre les marines riveraines. ( Ministère de la Défense) Above: French Navy officers meet the authorities of Equatorial Guinea while the BPC Dixmude stops over in Malabo, Equatorial Guinea, as part of the French mission, Corymbe and in order to prepare the NEMO (Navy s Exercise for Maritime Operations) exercise. The latter united eight countries of West Africa in September 2016 in the aim of developing cooperation between the neighboring navies. ( Ministère de la Défense) méthodes similaires ainsi que des gardes privés (4). Soucieuse de s adapter à l évolution de la menace, l industrie maritime a élaboré un premier guide anti-piraterie en 2014 et une nouvelle version vient d être publiée en Les gouvernements de la sous-région et les gouvernements occidentaux ont opté pour une double réponse : la construction d une capacité d intervention en mer grâce à la coopération bilatérale ; la mise en place d une architecture régionale de sécurité maritime, conformément à la doctrine du régionalisme sécuritaire consacrée par l Architecture de paix et de sécurité africaine (APSA). Comme aucun État riverain du golfe de Guinée n est en mesure de faire face au défi transnational de l insécurité maritime, l Organisation des Nations Unies et l Organisation maritime internationale ont incité les États de la région à mettre en place une architecture régionale de sécurité maritime et une stratégie maritime intégrée à travers les résolutions 2018 (2011) et 2039 (2012). L impulsion régionale a été incarnée par le sommet de Yaoundé du 25 juin 2013, qui a consacré une volonté régionale de coopération. Parallèlement, certains pays de la sous-région, ayant pris conscience de l enjeu que représente le contrôle de leur espace maritime, se sont engagés dans la construction d une capacité d intervention en mer. Le Nigéria a acquis en mai 2014 deux patrouilleurs Sentinel, suivis de sept aéronefs en août, pour lutter contre la piraterie. La Côte d Ivoire est en train de créer sa marine et a acheté quarante navires à la France en janvier Le Cameroun attend la livraison de deux patrouilleurs chinois et a acquis fin 2013 une barge de débarquement et deux patrouilleurs espagnols. Après avoir reçu deux patrouilleurs américains en 2010, le Togo en a commandé deux autres à la France en Le Gabon vient de passer un accord avec la société franco-italienne de services spatiaux pour installer un système de surveillance pour lutter entre autres contre l insécurité maritime. Ces efforts pour développer des gardes côtières sont soutenus par les coopérations bilatérales française, britannique et américaine (à travers le programme Africa Partner Station) et, plus récemment, chinoise. Several security responses seeking coordination Piracy in the Gulf of Guinea has triggered three types of security responses from the following categories of players: the private sector, African governments and the western governments. The private sector was the first to react by importing into West Africa the lessons it learned the hard way in East Africa; that is the use of a private onboard security force and passive and active security methods. The maritime industry formalized anti-piracy guidelines (3) for Somalia that suggest techniques to secure ships, prevention measures and the behavior to adopt in case of attack (emergency procedures, communication means, secured zone etc.). It recommends the use of similar methods and private guards (4) for the Gulf of Guinea. Concerned with adapting to changes in the threat, the maritime industry developed an initial anti-piracy guide in 2014 and a new version has just been published in The governments of the sub-region and western governments opted for a dual response: the construction of intervention at sea capability through bilateral cooperation; the implementation of a regional maritime security architecture, in accordance with the regional security doctrine established by the African Peace and Security Architecture (APSA). Since no State neighboring the Gulf of Guinea is able to meet the transnational challenge of maritime insecurity, the United Nations and International Maritime Organization incited the States of the region to set up a regional maritime security architecture and integrated maritime strategy through resolutions 2018 (2011) and 2039 (2012). Regional impetus was incarnated by the Yaoundé summit of June 25, 2013, that established a regional desire for cooperation. At the same time, some countries of the sub-region, having become aware of the stakes represented by the control of their maritime space, undertook the construction of an intervention at sea capability. In May 2014, Nigeria acquired two Sentinel patrol boats following by seven aircraft in August to combat piracy. The Ivory Coast is in the process of creating its navy and purchased forty ships from France in January Cameroon is awaiting the delivery of two Chinese patrol boats and at the end of 2013 an unloading barge and two Spanish patrol boats. After having received two American patrol boats in 2010, Togo ordered two others from France in Gabon has just signed an agreement with the 30 Diplomatie - octobre 2016 Sécurité maritime et développement en Afrique

31 Maritime Security Les querelles de frontières maritimes dans une région toujours prometteuse en matière d exploration pétrolière offshore alimentent des suspicions plus ou moins avouées entre les États du golfe de Guinée. En 2014, pour la première fois, la marine chinoise a fait escale dans le golfe de Guinée et a participé à des exercices anti-piraterie avec celles du Cameroun et du Nigéria. La Chine vient aussi de rejoindre le club des formateurs des marines de la région en accueillant des marins des pays du golfe de Guinée (5). Enfin, sous la pression de leurs marines marchandes, certains gouvernements occidentaux intensifient leurs efforts de sécurisation dans le respect de la souveraineté des États côtiers. La France entretient une présence navale permanente dans le golfe de Guinée depuis 1990 (mission Corymbe) (6), mais les marines britannique et néerlandaise fréquentent aussi régulièrement les eaux du golfe de Guinée. Par ailleurs, les États-Unis envisagent d être plus présents par le biais de plates-formes militaires (7). Les marines française et britannique renforcent leur coordination dans le souci d améliorer la sécurité des navires marchands. Elles ont ainsi lancé en juin 2016 un mécanisme de contrôle naval volontaire pour la région, le Maritime Domain Awareness Trade-Gulf of Guinea (MDAT-GoG). Les navires marchands sont invités à se signaler à la Marine nationale et à la Royal Navy, qui connaîtront leur route et pourront plus rapidement intervenir en cas de besoin. Plus de solutions qu il ne faudrait? La diversité des solutions qui sont actuellement mises en œuvre ne garantit pas le succès de la lutte contre la piraterie dans cette partie du monde. En effet, toutes ces solutions manquent de coordination, voire sont parfois contradictoires, et se focalisent sur le crime et non sur ses causes. Trois ans après le sommet de Yaoundé, les progrès de la régionalisation de la sécurité maritime sont encore lents. La Communauté économique des États d Afrique centrale (CEEAC) et celle des États d Afrique de l Ouest (CEDEAO) ont toutes deux adopté une stratégie maritime intégrée, respectivement en 2009 et Cependant, si leurs centres régionaux ont tous deux été inaugurés, l architecture régionale de surveillance maritime n est pas encore opérationnelle. À l échelle régionale, le Centre interrégional de coordination de Yaoundé est censé s appuyer sur un centre dans chaque communauté économique, le CRESMAC et le CRESMAO (voir schéma). Bien que leur création représente une avancée, ces centres sont encore confrontés à des problèmes de fonctionnement (personnel, budget, etc.) et une certaine réticence de la part du secteur privé se fait sentir en matière de partage d informations. Cette initiative régionale bute sur le problème habituel du régionalisme sécuritaire en Afrique : une géopolitique plus complexe qu il n y paraît. Cette dernière est marquée par la compétition régionale, de faibles institutions régionales et un réflexe de méfiance collective à l égard de l hégémon nigérian. Les querelles de frontières maritimes dans une région toujours Franco-Italian space services company to install a surveillance system to combat maritime insecurity. These efforts to develop coast guards are supported by French, British and American bilateral cooperation (through the Africa Partner Station program) and more recently Chinese cooperation. In 2014 for the first time the Chinese navy stopped over in the Gulf of Guinea and participated in anti-piracy exercises the navies of Cameroon and Nigeria. China has also just joined the navy instructors club of the region by hosting seamen for the countries of the Gulf of Guinea. (5). Finally, under pressure from their merchant marines, certain western governments are intensifying their security efforts in compliance with the sovereignty of the coastal States. France has maintained a permanent naval presence in the Gulf of Guinea since 1990 (Corymbe mission) (6), but the British and Dutch navies also regularly frequent the waters of the Gulf of Guinea. Moreover, the United States intends to be more present through military platforms (7). The French and British navies are reinforcing their coordination in order to improve the security of merchant ships. In June 2016, they also launched a voluntary naval control mechanism for the region, the Maritime Domain Awareness Trade-Gulf of Guinea (MDAT-GoG). Merchant ships are asked to notify their presence to the French Navy and Royal Navy, who will then be aware of their route and will be able to more rapidly intervene if necessary. Les premiers pas de l architecture régionale de sécurité maritime Centre régional de sécurité maritime de l Afrique de l Ouest CRESMAO (En projet) Zones maritimes E - F - G CENTRE DE COORDINATION INTERRÉGIONAL More solutions than needed? The diversity of solutions currently implemented does not guarantee the success of the fight against piracy in this part of the world. All these solutions lack coordination, or may even be contradictory, and focus on crime not the causes. Three years after the Yaoundé summit, progress in the regionalization of maritime security is still slow. The Economic Community of Central African States (EECAS) and that of West Africa (ECOWAS) have both adopted an integrated maritime strategy, respectively in 2009 and However, while their regional centers were both inaugurated, the regional maritime surveillance architecture is still not operational. On a regional level, the Interregional Coordination Center of Yaoundé is supposed to be supported by a center G F Yaoundé, Cameroun E D B A Centre régional de sécurité maritime de l Afrique centrale CRESMAC Pointe-Noire, Congo Zones maritimes A - B - D Diplomatie - october 2016 Maritim Security and Development in Africa 31

32 Sécurité maritime Photo ci-dessous : Patrouilleur de type RPB 33 dont la Marine togolaise a commandé deux exemplaires afin de renforcer sa flotte, à l image de nombreux autres pays de la région, dans sa stratégie de lutte contre la piraterie maritime et afin de préserver le flux de navires vers son port, le seul en eau profonde de l Afrique de l Ouest. ( RaidcoMarine) Below: An RPB 33 type patrol boat, of which the Togolese Navy ordered two in order to strengthen is fleet, like many other countries in the region, in its strategy to combat maritime piracy and preserve the flow of ships to its port, the only deep-water port of West Africa. ( RaidcoMarine) prometteuse en matière d exploration pétrolière offshore alimentent des suspicions plus ou moins avouées entre les États du golfe de Guinée. Des différends interétatiques concernent principalement les frontières maritimes et les délimitations des plateaux continentaux et des zones économiques exclusives, et se Dans le golfe de Guinée, la criminalité maritime représente une extension de l économie criminelle du delta du Niger qui a pour arrièreplan des décennies d accaparement de la rente pétrolière par des élites locales et nationales aux dépens des populations, avec l assentiment des compagnies pétrolières. cristallisent sur l enjeu des hydrocarbures. Soucieux de voir leurs ambitions officiellement reconnues au niveau international, certains États de la région ont aussi déposé des dossiers d extension du plateau continental auprès du Secrétariat général des Nations Unies. De plus, le golfe de Guinée est divisé entre deux organisations régionales : la CEDEAO et la CEEAC la Commission du golfe de Guinée étant une coquille vide depuis sa création en En termes d action régionale, cette division institutionnelle implique une duplication des activités et des efforts de coordination. La sécurisation du golfe de Guinée exige de coordonner non seulement des États, mais aussi deux associations d États. Obtenir un accord relatif au partage de la charge financière est donc difficile. L instauration d une taxe spécifique a été débattue, mais rien n a encore été concrétisé, et ce type de mécanisme financier régional ne s est pas révélé concluant par le passé. Par in each economic community, the CRESMAC and CRES- MAO (see diagram). Although their creation represents an advance, these centers are still confronted with operating problems (personnel, budget, etc.) and a certain reticence on behalf of the private sector can be felt in terms of information sharing. This regional initiative is up against the habitual problem of security regionalism in Africa: more complex geopolitics than it might seem. The latter is marked by regional competition, weak regional institutions and a reflex of distrust with regard to Nigerian hegemony. Maritime border disputes in a region that is still promising in terms of offshore oil exploration nourish the more or less avowed suspicions between the States of the Gulf of Guinea. Inter-State disputes mainly concern the maritime borders and delimitations of the continental plateaus and exclusive economic zones and focus on hydrocarbons. Concerned with seeing their ambitions officially recognized at the international level, some States in the region have also filed for extensions of the continental plateau with the General Secretariat of the United Nations. Moreover, the Gulf of Guinea is divided between two regional organizations: ECOWAS and EECAS the Gulf of Guinea Commission being an empty shell since its creation in In terms of regional action, this institutional division involves the duplication of activities and coordination efforts. The securing of the Gulf of Guinea requires not only coordinating the States but also two State associations. Obtaining an agreement on sharing the financial load is thus difficult. The levying of a specific tax was debated but nothing has yet been decided and this type of regional financial mechanism has not proven to be conclusive in the past. Furthermore, the disproportion of Nigeria compared to its West African neighbors feeds a natural distrust that complicates regional cooperation with a country that is simultaneously the source of the problem and the key element of its solution. The other aspect of these responses is a marked tendency towards the marketing of maritime security. On the one hand setting up a coast guard by some countries of the sub-region represents commercial opportunities for the countries that maintain bilateral maritime cooperation. On the other hand, a true battle for control of the maritime security market is taking place in Nigeria. The different public organizations responsible for maritime security (Navy, Nigerian Maritime Safety and Security Agency, police, etc.) attempt to eliminate private players from this market while at the same time engaging in fierce competition against each other which hinders cooperation and prevents the establishment of effective security measures. Although Nigerian law prohibits private armed guards, they have proliferated and the authorities are trying to contain them. The Nigerian navy has recently declared that it will put an end to their activities (8). The line between private security companies and a militia is particularly thin in the Niger Delta: a self-defense group (the Nigerian Merchant Navy Coastal Defence Force) has contacted the government 32 Diplomatie - octobre 2016 Sécurité maritime et développement en Afrique

33 Maritime Security ailleurs, la disproportion du Nigéria par rapport à ses voisins d Afrique de l Ouest nourrit une méfiance naturelle qui complique la coopération régionale avec un pays qui est à la fois la source du problème et l élément clé de sa solution. L autre aspect de ces réponses est une tendance marquée à la commercialisation de la sécurité maritime. D une part, la mise sur pied d une garde côtière par certains pays de la sous-région représente des opportunités commerciales pour les pays qui entretiennent des coopérations maritimes bilatérales. D autre part, une véritable lutte pour le contrôle du marché de la sécurité maritime a lieu au Nigéria. Les différents organismes publics responsables de la sécurité maritime (marine nationale, Nigerian Maritime Safety and Security Agency, police, etc.) tentent d évincer les acteurs privés de ce marché et se livrent en même temps une féroce concurrence, ce qui entrave la coopération et empêche d instaurer des mesures de sécurité efficace. Bien que la loi nigériane interdise les gardes privés armés, ceux-ci ont proliféré et les autorités s efforcent de les contenir. La marine nigériane a récemment déclaré qu elle mettra fin à leurs activités (8). La frontière entre compagnies de sécurité privées et milices est particulièrement mince dans le delta du Niger : un groupe d autodéfense (la Nigerian Merchant Navy Coastal Defence Force) vient de proposer au gouvernement de contribuer aux efforts de sécurité (9). Toutes ces actions tendent à s attaquer aux manifestations du problème plutôt qu à ses racines. Elles se focalisent sur une réponse sécuritaire en mer (surveillance et interception) alors que la piraterie requiert un travail de police à terre pour identifier et démanteler les gangs de pirates. On oublie trop souvent qu avant d être un problème militaire, la piraterie maritime est d abord un problème policier qui reflète les failles des États dans lesquelles s insinue la criminalité organisée. À ce titre, le chantier de la coopération judiciaire régionale n en est qu à ses balbutiements dans ce domaine et ne bénéficie que de peu de ressources. Par ailleurs, dans le golfe de Guinée, la criminalité maritime représente une extension de l économie criminelle du delta du Niger qui a pour arrière-plan des décennies d accaparement de la rente pétrolière par des élites locales et nationales aux dépens des populations, avec l assentiment des compagnies pétrolières. Ce problème de gouvernance fait que l équation sécuritaire est plus difficile à résoudre dans cette zone que dans le golfe d Aden. Thierry Vircoulon Notes (1) Pétrole, pollution et pauvreté dans le delta du Niger, Amnesty International, juin (2) Kristina Katsouris et Aaron Sayne, Nigeria s Criminal Crude: International Options to Combat the Export of Stolen Oil, Chatham House, septembre (3) BMP4, Best Management Practices for Protection against Somalia Based Piracy, août (4) Organisation maritime internationale, Guidelines for Owners, Operators and Masters for Protection against Piracy in the Gulf of Guinea Region, (5) Hang Zhou et Katharina Seibel, «Maritime insecurity in the Gulf of Guinea: a greater role for China?», China Brief, vol. 15, n o 1, 9 janvier (6) autres-operations/operation-corymbe. (7) Megan Eckstein, «Marines considering new platforms to extend Africa reach, including the Gulf of Guinea», USNI News, 4 mars (8) «Nigeria warns of illegal security», Leadership, 27 août (9) Olugbenga Adanikin, «Group offers to safeguards Niger delta waterways», The Nation, 15 août to contribute to its security efforts (9). All these actions tend to tackle the manifestations of the problem rather than its root causes. They focus on a security at sea response (surveillance and interception) while piracy requires police work on land to identify and dismantle gangs of pirates. One too often forgets that before being a military problem, maritime piracy is first a police problem that reflects the failures of the States in which organized crime arises. In this respect, the regional legal cooperation project is only in its embryonic stage and has few resources. Furthermore, in the Gulf of Guinea, maritime organized crime represents an extension of the criminal economy of the Niger Delta whose background is decades of monopolization of oil revenues by local and national elites at the expense of the populations, with the acceptance of the oil companies. This problem of governance means that the security equation is more difficult to solve in this area than in the Gulf of Aden. Thierry Vircoulon Notes (1) Petroleum, pollution and poverty in the Niger Delta, Amnesty International, June (2) Kristina Katsouris and Aaron Sayne, Nigeria s Criminal Crude: International Options to Combat the Export of Stolen Oil, Chatham House, September (3) BMP4, Best Management Practices for Protection against Somalia Based Piracy, August (4) International Maritime Organization, Guidelines for Owners, Operators and Masters for Protection against Piracy in the Gulf of Guinea Region, (5) Hang Zhou and Katharina Seibel, Maritime insecurity in the Gulf of Guinea: a greater role for China?, China Brief, Vol. 15, Issue 1, 9 January (6) autres-operations/operation-corymbe. (7) Megan Eckstein, Marines considering new platforms to extend Africa reach, including the Gulf of Guinea, USNI News, 4 March (8) Nigeria warns of illegal security Leadership, 27 August (9) Olugbenga Adanikin, Group offers to safeguard Niger delta waterways, The Nation, 15 August Photo ci-dessus : Riche en pétrole, le golfe de Guinée est le théâtre de plusieurs différends frontaliers maritimes, en raison notamment de l absence de frontières clairement établies. Ainsi, en avril 2015, la Côte d Ivoire et le Ghana ont présenté leurs arguments devant le Tribunal du droit de la mer au sujet de la suspension des activités d exploration pétrolière dans une zone maritime qu ils se disputent. ( Gabrel) Above: Rich in oil, the Gulf of Guinea is the focus of several maritime border disputes, in particular due to the lack of clearly established borders. In April 2015, Ivory Coast and Ghana presented their arguments before the Law of the Sea Court regarding the suspension of oil exploration activities in a maritime zone they contest. ( Gabrel) Diplomatie - october 2016 Maritim Security and Development in Africa 33

34 Sécurité maritime ACTUELLEMENT EN KIOSQUE DSI HORS-SÉRIE N 50 OCTOBRE-NOVEMBRE PAGES 10,95 Retrouvez nos publications en kiosque, librairie et sur Internet Numéro 01 Numéro 125 Numéro 50 Numéro 23 Numéro 06 Numéro 37 Numéro 82 Numéro 34 Numéro rue Saint-Honoré Paris (France) Tél. : +33(0) Fax : +33 (0) contact@areion.fr Diplomatie - octobre 2016 Sécurité maritime et développement en Afrique

35 Maritime Security analyse Golfe de Guinée : le nouvel épicentre de la piraterie mondiale Par Olivier Mélennec, journaliste spécialisé défense et transport maritime, Le marin. By Olivier Mélennec, journalist specialized in defense and maritime transport, Le marin analysis Les actes de piraterie ont atteint au premier semestre 2016 leur plus bas niveau depuis 1995 dans le monde, selon le centre de veille sur la piraterie de l International Maritime Bureau (IMB), situé à Kuala Lumpur, en Malaisie. Principale exception à ce tableau général plutôt encourageant : le golfe de Guinée. L a criminalité maritime le long des côtes d Afrique de l Ouest et d Afrique centrale reste aujourd hui particulièrement préoccupante. En particulier, les enlèvements de marins en vue d obtenir le versement d une rançon se sont multipliés. Quarante-quatre kidnappings ont été recensés durant le premier semestre 2016, dont 24 au large du Nigéria, contre 10 dans la même période de «Le golfe de Guinée est aujourd hui la région du monde la plus dangereuse pour les marins, constate l ONG américaine Oceans Beyond Piracy. Les Gulf of Guinea: the New Epicenter of World Piracy In the first half of 2016, acts of piracy reached their lowest level since 1995 throughout the world, according to the piracy reporting centre of the International Maritime Bureau (IMB), located in Kuala Lumpur, Malaysia. The main exception to this rather encouraging picture: the Gulf of Guinea. M aritime organized crime along the coasts of west and central Africa today remains a topic of particular concern. The acts of kidnapping of seamen for ransom have been multiplied. Forty-eight kidnappings were recorded in the first half of 2016, 24 off the coast of Photo ci-dessus : Des officiers de la marine ghanéenne participent à un exercice naval avec la marine nigériane dans le cadre de l Africa Partnership Station (APS), une initiative américaine qui vise à améliorer la sécurité maritime en Afrique occidentale et centrale. D après le rapport du Bureau maritime international, sur le premier trimestre de 2016, le golfe de Guinée est la seule région du monde où les actes de piraterie sont en hausse. ( US Navy) Above: Ghanaian navy officers participate in an exercise with the Nigerian navy under Africa Partnership Station (APS), an American initiative that aims to improve maritime security in West and Central Africa. According to the report of the International Maritime Bureau for the first quarter of 2016, the Gulf of Guinea is the only region in the world where acts of piracy are growing. ( US Navy) Diplomatie - october 2016 Maritim Security and Development in Africa 35

36 Sécurité maritime Photo ci-contre : En mai 2016, des membres d équipage du LV Lavallée, déployé dans le golfe de Guinée dans le cadre de la mission Corymbe, participent à l exercice «Opia Toha» organisé par le Nigéria à l occasion du soixantième anniversaire de sa marine. Au même titre que les exercices «NEMO» organisés par la France, il a pour but de renforcer la capacité des pays riverains du golfe de Guinée à assurer la sécurité de leurs zones maritimes. ( ECPAD) Opposite: In May 2016, members of the crew of LV Lavallée, deployed in the Gulf of Guinea under the Corymbe mission, participate in the Opia Toha exercise organized by Nigeria on the occasion of the sixtieth anniversary of its navy. Like the NEMO exercises organized by France, its purpose is to reinforce the capabilities of the countries neighboring the Gulf of Guinea in ensuring the security of their maritime zones. ( ECPAD) pirates sont devenus plus violents et agressifs. Les attaques commencent souvent par un mitraillage de la passerelle de navigation pour intimider l équipage avant l abordage du navire.» Oceans Beyond Piracy a recensé 54 attaques de navires en mer en 2015 dans le golfe de Guinée, dont 29 se sont produites dans les eaux territoriales. Ces dernières ne sont donc pas considérées juridiquement comme des actes de piraterie aux termes de la Convention des Nations unies sur le droit de la mer, mais comme du brigandage maritime. Elles relèvent de la juridiction des États côtiers, contrairement aux actes de piraterie qui, eux, relèvent de la compétence universelle des États du pavillon. Le Nigéria, à l origine du phénomène L épicentre de cette criminalité maritime est manifestement le Nigéria. C est de là qu opèrent les principaux gangs qui s attaquent aux navires. Si jusqu en 2010, ils étaient surtout actifs dans les eaux nigérianes, ils ont depuis considérablement élargi leur rayon d action. Aujourd hui, la menace concerne l ensemble du golfe de Guinée, du Sénégal au Gabon, voire à l Angola. La piraterie apparaît ainsi comme un phénomène adossé à une vaste économie de contrebande solidement implantée au Nigéria et dans les pays alentour. Elle ne peut être dissociée des autres activités criminelles dans le golfe de Guinée que sont le narcotrafic, le trafic d armes et les filières d immigration clandestine. Ainsi, en février 2016, le tanker Maximus a été attaqué au large d Abidjan, en Côte d Ivoire. Il a été libéré à la suite d une intervention de la marine nigériane. Six pirates, tous nigérians, ont été arrêtés, un septième étant tué. Le commanditaire présumé était également nigérian. Il s agissait du propriétaire du petit tanker battant pavillon cambodgien ayant servi à délester le Maximus de sa cargaison. Ce phénomène de piraterie trouve son origine dans une vieille revendication politique. Au Nigéria, la tentative de sécession du Biafra, entre 1967 et 1970, région pétrolifère du Sud-Est du pays, a débouché sur une captation de la rente pétrolière par l armée et les élites au pouvoir. Dans les années 1990, le Mouvement pour l émancipation du delta du Niger (MEND) a réclamé une plus juste répartition des richesses issues de l exploitation du sous-sol. Ses moyens d action étaient les attaques contre les installations pétrolières et les prises d otages. L amnistie décrétée en 2009 par le gouvernement nigérian a permis la reconversion d une partie des insurgés en hommes d affaires, en bénéficiaires de bourses de formation ou d allocations diverses. Mais elle n a en rien résolu le problème de fond qui est celui de criantes inégalités socio-économiques. Nigeria, compared to 10 for the same period of Currently, the Gulf of Guinea is the most dangerous region in the world for seamen, observes the American NGO, Oceans Beyond Piracy. Pirates have become more violent and more aggressive. Attacks often begin with machine-gunning the navigation bridge to intimidate the crew before boarding the ship. Oceans Beyond Piracy recorded 54 attacks of ships at sea in 2015 in the Gulf of Guinea, 29 of which occurred in territorial waters. The latter are thus not legally considered acts of piracy according to the terms of the United Nations Convention on the Law of the Sea, but as maritime brigandage. They come under the jurisdiction of the coastal States, contrary to acts of piracy that are governed by the universal competency of the flag State. Nigeria, the source of the phenomenon The epicenter of this maritime organized crime is clearly Nigeria. It is from there that operate the main gangs that attack ships. While until 2010, they were especially active in the Nigerian waters, since then they have considerably expanded their range of action. Today, the menace concerns the entire Gulf of Guinea, from Senegal to Gabon, even to Angola. In February 2016, the tanker Maximus was attacked off the coast of Abidjan, Ivory Coast. It was freed following the intervention of the Nigerian navy. Six pirates, all Nigerian, were arrested, a seventh was killed. The person presumed to have ordered the attack was also Nigerian. He was the owner of the small tanker flying a Cambodian flag used to unload the cargo from the Maximus. The origin of this phenomenon of piracy is an old political feud. In Nigeria, the attempted secession of Biafra, from 1967 to 1970, an oil producing region of the southeastern part of the country, led to the capture of oil revenues by the Army and the elite in power. In the nineties, the Movement for the Emancipation of the Niger Delta (MEND) demanded a fairer division of wealth resulting from the exploitation of the subsoil. Its means of action were attacks against oil producing installations and hostage-taking. The amnesty decreed in 2009 by the Nigerian government allowed the reconversion of some of the insurgents into businessmen, beneficiaries of training scholarships or various allowances. But it did not solve the underlying problem which is that of strong socio-economic inequality. Piracy in the Gulf of Guinea there finds its most propitious breeding ground. 36 Diplomatie - octobre 2016 Sécurité maritime et développement en Afrique

37 Maritime Security La piraterie dans le golfe de Guinée trouve là son terreau le plus propice. Cette criminalité maritime cible tout particulièrement l industrie pétrolière, très présente au Nigéria (1). Elle présente deux grandes facettes. L enlèvement contre rançon (kidnap and ransom, K&R) vise principalement les navires supplies et les plates-formes pétrolières offshore. Les marins et personnels kidnappés sont emmenés à terre en attendant le versement d une rançon. Le détournement des cargaisons d hydrocarbures (oil bunkering) est l autre grande activité des pirates nigérians. Ils s attaquent aux navires transportant des produits pétroliers raffinés (essence, gasoil, kérosène), ceux-ci étant particulièrement vulnérables lors des opérations de transbordement (ship to ship) qui se font à couple, au mouillage ou à petite vitesse. Les produits raffinés ainsi détournés font l objet d une contrebande très active. Ils sont écoulés au Nigéria et dans les pays voisins, tels que le Bénin ou le Togo. Le dernier maillon de la chaîne est le vendeur à la sauvette qui propose l essence au litre sur le bord d une route. La piraterie apparaît ainsi comme un phénomène adossé à une vaste économie de contrebande solidement implantée au Nigéria et dans les pays alentour. Elle ne peut être dissociée des autres activités criminelles dans le golfe de Guinée que sont le narcotrafic, le trafic d armes et les filières d immigration clandestine. Les intérêts en jeu sont très importants. De véritables mafias se sont formées. Les acteurs économiques face à la menace La lutte contre cette forme de criminalité soulève toute une série de questions d ordre opérationnel, juridique, économique et, in fine, politique. Elle concerne de nombreux acteurs : États riverains, États du pavillon, organisations internationales, opérateurs économiques. Les compagnies pétrolières ont pris d importantes mesures pour assurer la protection de leurs salariés, de leurs installations, de leurs contractants et de leurs navires affrétés. En 2015, pour sécuriser ses cinq champs offshore au Nigéria, le groupe français Total a affrété 25 navires affectés à la sûreté, qui embarquaient des militaires ou des policiers nigérians. Les navires de transport de personnel (crewboats) sont escortés de même que les navires de soutien (supplies). Les pétroliers, chimiquiers ou méthaniers venant dans la région de la Bonny River bénéficient aussi d une escorte, qu ils naviguent à plein ou à vide. Total indique Sénégal Gambie Mauritanie Guinée S.L. Piracy thus appears to be a phenomenon supported by a vast contraband economy solidly established in Nigeria and neighboring countries. It cannot be disassociated from other criminal activities in the Gulf of Guinea which are arms trafficking and clandestine immigration streams. This maritime organized crime more particularly targets the oil industry, highly present in Nigeria (1). It has two major facets. Kidnap and ransom (K&R) mainly targets supply ships and offshore oil platforms. Kidnapped seamen and personnel are brought to land until the payment of their ransom. Oil bunkering is the other major activity of Nigerian pirates. They attack ships carrying refined petroleum products (gasoline, diesel oil, kerosene) as they are particularly vulnerable during trans-shipment operations that occur at low speed, docked or ship to ship. The refined products hijacked become part of a highly active contraband system. They are sold off Actes de piraterie maritime dans le Golfe de Guinée en 2016 Dakar Guinée-B. 1 : Guinée équatoriale 2 : Sao Tomé-et-Principe Liberia Principaux ports régionaux (2014) Types d attaques (entre le 01/01/16 et le 21/09/16) Tentative d attaque Abordage Cible de tirs Détournement San Pedro Source : ICC, IMB Piracy & Armed Robbery Map 2016 ( AREION/CAPRI) Bénin Ghana Togo Côte d Ivoire Abidjan Tema Lomé Golfe de Guinée Nigéria Cotonou Lagos Nigéria OCÉAN ATLANTIQUE 2 1 Douala 1 Cameroun Voir zoom Guinée éq. 2 Congo Gabon Pointe-Noire Angola 400 km R.D.C. Luanda Diplomatie - october 2016 Maritim Security and Development in Africa 37

38 Sécurité maritime in Nigeria and neighboring countries such as Benin or Togo. The last link in the chain is the curb-siders who offer gasoline per liter at the edge of the road. Piracy thus appears to be a phenomenon supported by a vast contraband economy solidly established in Nigeria and neighboring countries. It cannot be disassociated from other criminal activities in the Gulf of Guinea which are arms trafficking and clandestine immigration streams. The interests at play are important. Mafia organizations have been formed. Photo ci-dessus : Présentation du nouveau patrouilleur ivoirien CF Sékongo, dernier exemplaire d une série de trois patrouilleurs commandés par la marine ivoirienne pour sécuriser son espace maritime et combattre la piraterie, en plein essor dans la région, qui touche le pays depuis ( Angejaures) Above: Presentation of the Ivorian patrol boat CF Sékongo, latest in a series of three patrol boats ordered by the Ivorian navy to secure its maritime space and combat piracy which is in full swing in the region and which has been affecting the country since ( Angejaures) que ces mesures lui coûtent chaque année «plusieurs dizaines de millions de dollars (2)». Les compagnies maritimes essaient également de se prémunir des attaques et de leurs conséquences. Le groupe français CMA CGM, victime en 2013 du mitraillage du porte-conteneurs Africa Four, a réagi en prenant des mesures de protection passive, dont l aménagement d une citadelle sur ses navires, un local dont les portes peuvent être soudées. En cas d attaque, l équipage s y enferme avec des moyens de communication satellitaire pour attendre l arrivée des secours. Une logique transfrontalière difficile à surmonter Mais la principale parade trouvée pour mettre en échec les pirates somaliens, l embarquement de gardes armés sur les navires, est ici inopérante. Le Nigéria, comme les autres pays de la région, n autorise pas le recours aux sociétés privées de protection dans ce qu il considère être son espace de responsabilité, c est-à-dire non seulement dans ses eaux territoriales, mais aussi dans sa zone économique exclusive, soit jusqu à 370 kilomètres des côtes. Il faut donc traverser la zone à risques avant de pouvoir embarquer une équipe de protection. Les réseaux criminels ont une logique transfrontalière très en avance sur le niveau de collaboration des États de la région. Cette situation ubuesque est peu conforme au droit international qui considère que la zone économique exclusive fait partie de la haute mer. Mais elle continue de prévaloir. La loi française du 1 er juillet 2014 autorisant l embarquement de gardes armés dans les zones de piraterie n est donc pas d un grand secours pour les armateurs des navires battant pavillon français. Les réseaux criminels ont une logique transfrontalière très en avance sur le niveau de collaboration des États de la région. Un partage accru d informations et une coordination des actions en mer des États côtiers apparaissent indispensables pour espérer les mettre en échec. Sinon, les attaques se déplacent d une zone vers une autre. Les États d Afrique centrale ont pris les devants avec la création en 2009 d un centre régional de Economic players opposite the threat The fight against this form of organized crime raises a series of operational, legal, economic and finally political questions. It concerns many players: Neighboring States, flag States, international organizations and economic operators. Oil companies have taken significant measures to ensure the protection of their employees, facilities, contractors and chartered ships. In 2015, to secure its five offshore oil fields in Nigeria, the French group Total chartered 25 ships assigned to security that embarked military personnel or Nigerian policemen. Crew boats were escorted as were the supply ships. Oil, chemical or methane tankers coming from the Bonny River region are also escorted, whether they navigated loaded or not. Total has said these threats cost several tens of millions of dollars each year (2). Shipping companies also try to protect themselves against attacks and their consequences. The French group CMA CGM, victim in 2013 of the machinegunning of its container ship Africa Four, reacted by taking passive protection measures including the fit-out of a stronghold on its ships, a room whose doors can be welded. In case of attack, the crew locks itself in the stronghold with satellite communication means until the arrival of rescue. Trans-border logic difficult to surmount However, the main countermeasure found to thwart the Somali pirates, armed guards onboard the ships, here is inoperative Nigeria, like other countries in the region, does not allow the use of private security companies in what it considers to be its field of responsibility, that is not only its territorial waters but also its exclusive economic zone, in other words up to 370 kilometers from its coast. One must thus cross the zone at risk before being able to bring a security team onboard. This absurd situation is not in compliance with international law that considers that the exclusive economic zone is part of the high seas. But it continues to prevail. The French act of July 1, 2014 allowing onboard armed security guards in piracy areas is of little help for ship-owners whose ships fly the French flag. Organized crime networks have a trans-border logic that is well in advance of the degree of cooperation of the States of the region. Increased information sharing and coordination of actions at sea by the coastal States appear indispensable if there is to be a hope of thwarting the pirates. Otherwise, the attacks will move from one zone to another. The central African states have taken the initiative with the creation in 2009 of Regional Centre for Maritime Safety in Central Africa, the CRESMAC, in Pointe-Noire, in the Republic of the Congo. The response of the western African states came later as Nigeria long tended to view the issues of piracy as a domestic security matter. The principle of a center analogous to the 38 Diplomatie - octobre 2016 Sécurité maritime et développement en Afrique

39 Maritime Security la sécurité maritime, le CRESMAC, à Pointe-Noire, au Congo- Brazzaville. La réponse des États d Afrique de l Ouest a été plus tardive, car le Nigéria a longtemps eu tendance à traiter les questions de piraterie comme une affaire de sécurité interne. Le principe d un centre analogue au CRESMAC, implanté à Abidjan, a fini par être entériné. Mais celui-ci n est toujours pas opérationnel en L édifice institutionnel a, en principe, été parachevé avec la décision prise en 2013 de créer le Centre interrégional de coordination (CIC) à Yaoundé, au Cameroun. La solution militaire se heurte au frein juridique Les différents pays riverains ont aussi entrepris de muscler leurs marines. C est le cas du Sénégal, de la Côte d Ivoire ou encore du Cameroun qui ont commandé des patrouilleurs à des chantiers français. Ces pays bénéficient de l assistance des États du pavillon. La France joue un rôle essentiel. Elle déploie en permanence un bâtiment de la Marine nationale dans le golfe de Guinée dans le cadre de la mission Corymbe. Un accord signé en avril dernier prévoit aussi que huit actions de formation à la sécurité maritime seront réalisées au Nigéria d ici à la fin 2016 par les Éléments français au Sénégal (EFS). Les Européens sont CRESMAC, established in Abidjan, was finally ratified. But in 2016 it is still not operational. The institutional structure was completed with the decision made in 2013 to create the Interregional Coordination Center (ICC) in Yaoundé, Cameroon. The military solution up against the legal hindrances The various neighboring countries have also undertaken to strengthen their navies. This is the case of Senegal, the Ivory Coast or Cameroon who have ordered patrol boats from the French shipyards. These countries benefit from the assistance of the flag States. France plays an essential role. It permanently deploys a ship of its Navy in the Gulf of Guinea under the Corymbe mission. An agreement signed last April also provides for eight maritime security training sessions Ces efforts de dissuasion et de répression butent cependant sur des réalités locales qui évoluent trop lentement. Les réponses pénales ne sont pas à la hauteur du défi. de plus en plus mobilisés. Espagnols et Portugais réussissent, en conciliant leurs programmations navales, à aligner pratiquement un navire militaire à l année dans le golfe de Guinée. Ces efforts de dissuasion et de répression butent cependant sur des réalités locales qui évoluent trop lentement. Les réponses pénales ne sont pas à la hauteur du défi. «Malheureusement, l absence totale de poursuites à l encontre des pirates présumés sape les efforts régionaux pour dissuader les gangs de pirates», regrettait en mai 2016 Giles Noakes, responsable en chef de la sécurité au BIMCO, l une des principales organisations mondiales d armateurs. Les actes de piraterie n affectent pas seulement les compagnies pétrolières étrangères et les compagnies maritimes. Ils ont aussi des incidences économiques considérables sur les pays de la région. C est le cas en particulier de pays comme le Togo ou le Bénin dont l économie repose en grande partie sur les ports, en l occurrence Lomé et Cotonou. Les pays enclavés de l hinterland, comme le Mali ou le Niger, souffrent aussi, car la piraterie renchérit le coût du transport. La lutte contre la piraterie dans le golfe de Guinée apparaît comme une affaire de longue haleine. Elle est pourtant d une absolue nécessité. Il en va de la stabilité des pays d Afrique de l Ouest et d Afrique centrale. Olivier Mélennec Notes (1) Jusqu en 2016, le Nigéria était le premier exportateur de pétrole africain. Il vient d être détrôné par l Angola. (2) Le Marin du 23 janvier to take place in Nigeria by the end of 2016 dispensed by the Éléments français au Sénégal (EFS) (French presence in Senegal). European countries are increasingly mobilized. By conciliating their naval programs, Spain and Portugal succeed in sending one military ship a year to the Gulf of Guinea. These efforts of dissuasion and prevention are hindered by the local situation that evolves too slowly. Judicial response is not on a level with the challenge. Unfortunately the complete absence of legal action against presumed pirates undermines regional efforts to dissuade the pirate gangs regretted in May 2016 Giles Noakes, head of security at BIMCO, one of the principal world ship-owners organizations. Acts of piracy not only affect foreign oil companies and shipping companies. They also have an economic incidence on the countries of the region. This is the case in particular of countries like Togo or Benin whose economy is largely based on the ports, Lomé and Cotonou. The land-locked countries of the hinterland, like Mali or Niger, also suffer, for piracy raises the price of transport. The continuing fight against piracy in the Gulf of Guinea appears to be a long term issue. However it is absolutely necessary as the stability of the west and central African countries depends on it. Olivier Mélennec Notes (1) Until 2016, Nigeria was the leading exporter of African oil. It has just been surpassed by Angola. (2) Le Marin of January 23, Photo ci-dessus : Le 8 juin 2016, des policiers nigérians patrouillent près d une station-essence flottante dans l État du Delta. Cette riche région pétrolière pâtit de la chute des prix du pétrole, mais aussi de l insécurité liée à la présence de groupes armés qui font régulièrement exploser les installations. ( AFP/Stefan Heunis) Above: On 8th June, 2016, Nigerian police patrolled near a floating gasoline station in the State of the Delta. This rich oil-producing region is suffering from the drop in oil prices but also the insecurity connected with the presence of armed groups that regularly blow up the facilities. ( AFP/Stefan Heunis) Diplomatie - october 2016 Maritim Security and Development in Africa 39

40 Sécurité maritime analyse Par Marianne Péron-Doise, capitaine de frégate, dirigeant le programme «Sécurité maritime internationale» à l IRSEM (Institut de recherche stratégique de l École militaire). By Marianne Péron-Doise, navy commander directing the International Maritime Security program at IRSEM (Strategy Research Institute of École militaire). analysis Photo ci-dessus : Le 18 janvier 2014, des militaires français membres de la force navale européenne EU Navfor et des militaires japonais s approchent d un navire suspecté d être un bateau mère pour des activités de piraterie au large de la Somalie. ( EU NAVFOR) Above: On 18th January, 2014, French soldiers, members of the European naval force, EU Navfor, and Japanese soldiers approach a ship suspected of being a mother ship for acts of piracy of the coast of Somalia. ( EU NAVFOR) La piraterie somalienne : un état des lieux en demi-teinte Si on peut se féliciter des succès de la coalition navale internationale mise en place dès 2008 pour endiguer un phénomène alors croissant, il faut admettre que les racines de la piraterie n ont pas disparu. Elles restent le sousproduit d un État faible, la Somalie, en proie à la corruption et où l autorité du gouvernement central est battue en brèche. C hiffres à l appui, on peut estimer que la piraterie somalienne est éradiquée, ne constituant plus qu une menace résiduelle. En 2011, elle connaissait son apogée avec 176 attaques. Mais, depuis le début de 2016 (1), aucune attaque n a été enregistrée. Les régions du Puntland et du Galmudug, épicentres traditionnels de la piraterie, sont en lutte d influence contre l actuel président, Hassan Sheikh Mohamoud. L élection présidentielle prévue en 2016 a été repoussée, les conditions politiques et sécuritaires n étant pas réunies. La difficile reconstruction du pays, toujours en proie aux attaques des shebabs, Somalian Piracy: A Mixed Situation While congratulations are in order for the success of the international naval coalition set up in 2008 to put a stop to a growing phenomenon, it should be acknowledged that the roots of piracy have not disappeared. They remain the by-product of a weak State, Somalia, prey to corruption where the authority of the central government is undermined. F igures support the estimate that Somalian piracy has been eradicated and that today it only constitutes a residual threat. Piracy reached its apex in 2011 with 176 attacks. Since early 2016 (1), no attack has been reported. The regions of Puntland and Galmudug, the traditional epicenters of piracy, are engaged in a power struggle with the current President, Hassan Sheikh Mohamoud. The presidential election planned for 2016 has been postponed as the 40 Diplomatie - octobre 2016 Sécurité maritime et développement en Afrique

41 Maritime Security En dépit d avancées, dont l élaboration d une stratégie maritime et la constitution de gardecôtes, la Somalie ne paraît pas en mesure de défendre efficacement et durablement son domaine maritime. ne génère guère d activités économiques (2). À ce sombre tableau s ajoute la lassitude des donneurs et de la communauté internationale. Le mandat de l opération «Atalante» de lutte contre la piraterie de l Union européenne touche à sa fin en 2016 et l OTAN n entretient qu une présence épisodique depuis deux ans. Seules les Forces maritimes combinées, coordonnées par l US Navy, et certaines marines indépendantes, dont la Chine, désormais basée à Djibouti, le Japon, la Russie et l Inde, maintiennent des patrouilles régulières. Un nouveau discours, axé sur l autonomisation et l appropriation africaine, s est fait jour tandis que des initiatives de renforcement des capacités maritimes somaliennes et régionales se développaient, telle la mission civile de l Union européenne, EUCAPNESTOR. Cette dernière, mise en place à Djibouti en 2012, vient d être transférée à Mogadiscio. Mais, en dépit d avancées, dont l élaboration d une stratégie maritime et la constitution de garde-côtes, la Somalie ne paraît pas en mesure de défendre efficacement et durablement son domaine maritime. À la lenteur des progrès enregistrés s ajoute la perception de la montée d une insécurité maritime régionale diffuse qui, au-delà de la piraterie, met en lumière de nombreux phénomènes déstabilisants : trafics d armes, migration illégale, dommages environnementaux, mais surtout la persistance de la pêche illicite, non déclarée et non réglementée (INN). Un système criminel résilient et potentiellement résurgent L océan Indien, la mer Rouge et le golfe d Aden sont des espaces historiquement à la croisée de nombreux flux illicites (êtres humains, armes, drogues, dont l omniprésent trafic de khat). L importance des routes maritimes et la forte densité de la navigation côtière, jointe à l incapacité des autorités à effectuer un contrôle approprié sur leur domaine maritime, ont favorisé l essor des trafics et une culture d impunité difficile à combattre. En effet, 80 % des marchandises transportées dans le monde le sont par bateau, et près de 10 % necessary political and security conditions were not present. The difficult reconstruction of the country, still prey to the attacks of the Chebabs, generates little economic activity (2). The lassitude of donors and of the international community can be added to this dark situation. The mandate of the European Union s piracy combatting operation Atlante will end in 2016 and NATO has only been episodically present in the past two years. Only the combined maritime forces, coordinated by the US Navy, and some independent navies, including that of China, henceforth based in Djibouti, Japan, Russia and India, maintain regular patrols. A new discourse, focusing on African empowerment and appropriation has come to light while initiatives to strengthen Somalian and regional maritime capabilities were being developed, like the civil mission of the European Union, EUCAPNESTOR. The latter, set up in Djibouti in 2012, has just been transferred to Mogadishu. But, despite advances, including the development of a maritime strategy and the constitution of a coast guard, Somalia does not appear to be able to effectively and durably defend its maritime domain. To the slowness of the progress posted can be added the perception of diffuse rising regional maritime insecurity which, beyond piracy, sheds light on many destabilizing phenomena: weapons trafficking, illegal migration, environmental damage, but above all the persistence of illicit, undeclared and unregulated fishing (INN). A resilient criminal and potentially resurgent system The Indian Ocean, Red Sea and Gulf of Aden have historically been the historic intersection of many illicit flows (human beings, weapons, drugs, including the omnipresent trafficking of khat). The importance of maritime routes and high density of coastal navigation, alongside the incapacity of authorities to implement the appropriate control over their maritime domain, have promoted the rise of trafficking and a culture of impunity that is difficult to combat. 80% of the goods transported in the world are transported by ship, Photo ci-contre : Le 3 octobre 2008, l équipage du Faina se tient sur le pont après que l US Navy a demandé à vérifier son état de santé et de bien-être. Exploité par une entreprise ukrainienne, ce navire transportant de l équipement militaire a été capturé en septembre 2008 et libéré en février 2009 contre une rançon de 3,2 millions de dollars. ( DoD/Jason R. Zalasky) Opposite: On 3th October, 2008, the crew of the Faina stood on deck after the US Navy asked to check its state of health and well-being. Operated by a Ukrainian company, the ship transporting military equipment was captured in September 2008 and freed in February 2009 for 3.2 million dollars in ransom. ( DoD/Jason R. Zalasky) Diplomatie - october 2016 Maritim Security and Development in Africa 41

42 Sécurité maritime Photo ci-contre : Un pêcheur somalien transporte sa marchandise sur le marché aux poissons de Mogadiscio, capitale de la Somalie. Selon la fondation américaine One Earth Future, le chalutage illégal à grande échelle auquel se livrent certains navires étrangers au large des côtes somaliennes menacerait les ressources essentielles à l économie somalienne et pourrait pousser les communautés côtières à se tourner à nouveau vers la piraterie. ( AMISOM/AU-UN IST Photo/ Stuart Price) Opposite: A Somalian fishing boat transports its merchandise to the fish market of Mogadishu, capital of Somalia. According to the American foundation, One Earth Future, the large scale illegal trawling practiced by certain foreign ships off the Somalian coast threatens the resources essential to the Somalian economy and could push the coastal communities to turn once more to piracy. ( AMISOM/ AU-UN IST Photo/Stuart Price) du commerce mondial transite dans cette zone. Ce sont navires par an qui sont ainsi exposés à la menace pirate. La piraterie somalienne a su s adapter au contexte de maritimisation grandissante du transport mondial et évoluer du local au global pour développer ses activités illicites. Elle a fait d une activité de police maritime autoproclamée, consistant à prélever des amendes pour pêche illégale ou déversement de déchets toxiques, une entreprise criminelle organisée bénéficiant de réseaux financiers transnationaux (3). Si, initialement, son action pouvait se comprendre comme une compensation à des activités étrangères illégales dans le domaine maritime somalien, le calcul de gain potentiel et l absence apparente de risques l ont fait basculer dans la prise d otages. Retenir un navire et son équipage lui permet de négocier d importantes rançons de la part de l armateur ou de l assureur, voire, selon les cas, de l État du pavillon. Dès 2009, les pirates territorialisent le bassin somalien et attaquent massivement des thoniers européens. L effet dissuasif de la mise en place d équipes de protection embarquées (EPE) (4) les incitera à chercher d autres cibles et à étendre leur zone d opération grâce à l usage de bateaux-mères et du téléphone satellitaire, allant jusqu à menacer la route maritime de Suez (segment mer Rouge, golfe d Aden). La mise en place d un corridor de navigation surveillée, l International Recommended Transit Corridor, IRTC, destiné à garantir la sécurité du transit des navires l empruntant, les contraindra à se déployer plus loin, vers le golfe d Oman. Il leur faut également compter avec les dispositifs de l industrie maritime pour protéger ses navires, notamment les Best Management Practices émanant de l Organisation maritime internationale, et le contrôle naval volontaire. La piraterie somalienne a su s adapter au contexte de maritimisation grandissante du transport mondial et évoluer du local au global pour développer ses activités illicites. La décrue observée à partir de 2012 peut s expliquer par la prise de distance des principaux commanditaires somaliens et autres «kingpins» visés par la justice internationale. On se souvient de l arrestation rocambolesque de l un d entre eux, Mohamed Abdi Hassan, alias Afweyne, en Il avait été attiré en Belgique sur la base d un projet de film fictif imaginé par la police belge (5). Le contrôle côtier des pirates et les connivences locales qui permettaient aux gangs criminels de ramener leurs prises à terre ne fonctionnent plus. Certains ont réinvesti l argent des rançons dans des activités plus acceptables telles que l immobilier. Le modèle économique de la piraterie (6) semble cassé, mais les réseaux financiers qu elle alimentait restent présents et peuvent à tout moment être réactivés. and nearly 10% of the world s trade transits through this zone. 18,000 ships per year are thus exposed to the threat of piracy. Somalian piracy has been able to adapt to the growing importance of the world maritime transport and evolve from the local to the global arena to develop its illegal activities. It has transformed a self-proclaimed activity of maritime policing that consisted in demanding fines for illegal fishing or the spilling of toxic waste, into a an organized criminal enterprise benefitting from transnational financial networks (3). While initially its action could be understood as compensation for illegal foreign activities in the Somalian maritime space, the calculation of potential gains and apparent absence of risks allowed a switch to hostage-taking. Capturing a ship and its crew enabled it to negotiate high ransoms paid by the ship-owner or insurer, even, depending on the case, the government of the flag flown by the ship. Beginning in 2009, the pirates made the Somalian basin their territory and massively attacked European tuna boats. The dissuasive effect of onboard security teams (4) will lead them to seek other targets and expand their zone of operation through the use of mother ships and satellite phones, going as far as to menace the Suez maritime route (segment of the Red Sea and Gulf of Aden). The implementation of a controlled navigation corridor, the International Recommended Transit Corridor, IRTC, designed to guarantee the transit security of ships using it, will force them to deploy further, towards the Gulf of Oman. They must also deal with the measures of the maritime industry to protect its ships, in particular the Best Management Practices issued by the International Maritime Organization and voluntary naval control. The drop observed beginning in 2012 can be explained by the distancing of the main Somalian criminals ordering the attacks and other kingpins targeted by the international justice system. One need simply recall the rather eventful arrest of one of them, Mohamed Abdi Hassan, alias Afweyne, in He d been lured to Belgium to participate in a fictitious film imagined by the Belgian police (5). 42 Diplomatie - octobre 2016 Sécurité maritime et développement en Afrique

43 Maritime Security Face à une menace pirate mouvante, la communauté internationale a élaboré des instruments politiques et militaires visant à coordonner l action des principaux acteurs concernés, étatiques et non étatiques. Une architecture de contrepiraterie en cours de réforme Face à une menace pirate mouvante, la communauté internationale a élaboré des instruments politiques et militaires visant à coordonner l action des principaux acteurs concernés, étatiques et non étatiques. Sur le plan politique, l objectif est d aider à la stabilisation de la Somalie en lui donnant les moyens de contrôler ses espaces maritimes, mais aussi, dans une perspective stratégique globale, d aider les pays d Afrique de l Est à instaurer une gouvernance maritime durable. Ainsi, le Groupe de contact sur la piraterie au large de la Somalie (7) a constitué un irremplaçable forum de discussion et de coordination des initiatives des principaux États engagés dans la lutte contre la piraterie. Par ailleurs, le Code de conduite de Djibouti, adopté en 2009 par 21 États, fournit un cadre institutionnel facilitant la coopération entre les États de l océan Indien concernés par la piraterie. Sur le plan militaire, les mécanismes instaurés ont permis de sécuriser la navigation des bâtiments de commerce et de faciliter la coordination opérationnelle des composantes aéronavales engagées. Il s agit du centre de sécurité maritime de Northwood, au Royaume-Uni : le Maritime Surveillance Center Horn of Africa (MSCHOA) ; du corridor de navigation sécurisé au profit des navires de commerce : l IRTC ; du mécanisme de coordination opérationnel SHADE (Share Awareness and Deconfliction), qui permet de réunir régulièrement à Bahreïn les forces navales et les acteurs concernés pour une coordination des activités et un partage de l information. Ces mécanismes de concertation politique et opérationnelle sont toujours actifs et permettent de continuer à suivre l évolution de la piraterie somalienne. Toutefois, dans un contexte de «post-piraterie», se pose la question de leur réforme, si ce n est de leur maintien, en raison de l apparition de nouveaux foyers de piraterie, dont le golfe de Guinée, ou de la montée de facteurs d insécurité maritime appelant une réponse internationale, telle la crise migratoire en Méditerranée. Ainsi, depuis deux ans, le futur du Groupe de contact fait débat. Celui-ci a revu son format et l organisation de ses groupes de travail pour se concentrer sur des projets de capacity-building adaptés aux besoins des États d Afrique de l Est afin de renforcer les moyens de gouvernance régionale. On citera à cet effet le rôle décisif de l Union européenne avec le programme des «Routes maritimes critiques» (MARSIC et CRIMARIO) et l ambitieux programme Maritime Security (MASE), mis en œuvre par la Commission de l océan Indien (COI), qui devrait voir à court terme la mise en place d un Centre régional de fusion de l information maritime (CRFIM), à Madagascar, appuyé par un centre opérationnel aux Seychelles (8). The coastal control of the pirates and local collusion that allowed criminal gangs to bring their booty on land no longer worked. Some reinvested the ransom money in more acceptable activities such as real estate. The economic model of piracy (6) seemed broken, but the financial networks that supplied them remain present and can be reactivated at any time. A counter-piracy architecture undergoing reform Faced with a movable threat of piracy, the international community developed political and military instruments that aimed to coordinate the action of the main players concerned, State-related and not. Politically, the aim is to help stabilize Somalia by giving it the means to control its maritime spaces, but also in a global strategic perspective, to help the countries of east Africa to instill sustainable maritime governance. The Contact Group on Piracy of the Coast of Somalia, CGPCS (7), constituted an irreplaceable forum for discussion and coordination of the initiatives of the main States engaged in the fight against piracy. Furthermore, the Djibouti Code of Conduct, adopted in 2009 by 21 States, provided an institutional framework facilitating cooperation between the States of the Indian Ocean concerned by piracy. Militarily, the mechanisms set up helped secure the navigation of trading ships and facilitated the operational coordination of the naval aviation components engaged. These mechanisms are the maritime command headquarters at Northwood, United Kingdom, the Maritime Surveillance Center Horn of Africa (MSCHOA); the controlled navigation corridor for trading ships, the IRTC, the operational coordination mechanism SHADE (Share Awareness and Deconfliction), that regularly unites navy forces and concerned players in Bahrein to coordinate activities and share information. These mechanisms of political and operational coordination are still active and allow the continued monitoring of the evolution of Somalian Photo ci-dessus : Le 26 juillet 2013, des membres de la force navale européenne EU Navfor s approchent d un bateau naviguant au large des côtes somaliennes dans le cadre de l opération militaire et diplomatique «Atalante». Le but est de rassurer la population locale et de décourager toutes activités de piraterie dans la Corne de l Afrique. ( EU NAVFOR) Above: On 26th July, 2013, members of the European naval force, EU Navfor approach a ship navigating off the coast of Somalia under the military and diplomatic operation, Atalante. The aim is to reassure the local population and discourage all acts of piracy in the Horn of Africa. ( EU NAVFOR) Diplomatie - october 2016 Maritim Security and Development in Africa 43

44 Sécurité maritime Photo ci-dessus : En mai 2009, des militaires américains appartenant à la Task Force 151 capturent des pirates présumés après avoir répondu à un appel de détresse du navire marchand. La Combined Task Force 151 est une force opérationnelle navale multinationale mise en place en 2009 pour combattre la piraterie dans le golfe d Aden et le long des côtes somaliennes. ( DoD/Eric L. Beauregard) Above: In May 2009, American soldiers belonging to Task Force 151 captured presumed pirates after having responded to a distress call by the merchant ship. The Combined Task Force 151 is a multi-national operational naval force set up in 2009 to combat piracy in the Gulf of Aden and along the Somalian coasts. ( DoD/Eric L. Beauregard) Le Code de conduite de Djibouti lui-même, dont les objectifs, notamment la formation, l entraînement et le partage de l information maritime, restent d actualité, subit les critiques de certains États signataires. Ceux-ci plaident pour son élargissement afin d intégrer des menaces maritimes autres que la piraterie. Les mécanismes de sécurité opérationnelle sont les moins affectés par le déclin de la menace pirate. Par construction, le MSCHOA est le cœur du dispositif de contre-piraterie. Il continue à centraliser les informations relatives à l activité maritime civile au large des côtes somaliennes, à effectuer un suivi en temps réel des actes de piraterie et à diffuser des alertes par réseau internet. Cependant, la question d une éventuelle réorganisation de ses missions, dans le cadre d un élargissement de ses responsabilités, se pose. Ainsi, la piraterie somalienne a vu la mise en place d un modèle de gestion politico-militaire qui lui survit, avec des outils aisément transposables à d autres crises maritimes, comme le Groupe de contact et le forum SHADE. Toutefois, la solution du problème ne se trouve pas en mer, mais bien à terre, entre les mains des autorités somaliennes. Marianne Péron-Doise Notes (1) Voir le site de la mission de contre-piraterie de l Union européenne (eunavfor.eu). (2) «Rapport sur la Somalie du Groupe de contrôle pour la Somalie et l Érythrée présenté conformément à la résolution 2182 (2014) du Conseil de sécurité», S/2015/801, 20 octobre (3) Stig Jarle Hansen «The dynamics of Somali Piracy», Studies in Conflict and terrorism, vol. 35, n o 7-8, 2012, p (4) Dans un premier temps, la protection par du personnel militaire a été privilégiée, notamment par la France, puis, à partir de 2014, l embarquement de gardes armés privés s est généralisé. (5) Jean-Sébastien Josset, «Belgique : le roi des pirates somaliens derrière les barreaux mais avec son butin, jeuneafrique.com, 25 mars (6) «Pirate trails: tracking the illicit financial flows from piracy off the Horn of Africa», rapport de la Banque mondiale, novembre 2013 ( (7) Contact Group on Piracy off the Coast of Somalia, CGPCS ( (8) Marianne Péron-Doise «Piraterie et insécurité maritime dans l Ouest de l océan Indien : quelles perspectives régionales?», Défense Nationale, dossier «Afrique» coordonné par Sonia Le Gouriellec, été piracy. However, in a post-piracy context, the issue of their reform, or even their maintenance, arises due to the appearance of new seats of piracy, including the Gulf of Guinea, or the growth of factors of maritime insecurity calling for an international response such as the migratory crisis in the Mediterranean. For two years, the future of the Contact Group has been the subject of debate. The latter has revised its format and the organization of its work groups to focus on capacity-building projects tailored to the needs of the eastern African States in order to reinforce regional governance means. The decisive role of the European Union with the Critical Maritime Routes program (MARSIC and CRIMARIO) and the ambitious Maritime Security (MASE) program, implemented by the Indian Ocean Commission (IOC), which in the short term should see the implementation of a Regional Maritime Fusion Information Center (CRFIM) in Madagascar, supported by an operational center in Seychelles (8). The Djibouti Code of Conduct itself, whose objectives, in particular education, training and sharing maritime information, remain current, sustains the criticism of certain signatory States. The latter plead for its expansion in order to incorporate maritime threats other than piracy. The mechanisms of operational security are the least affected by the decline of the menace of piracy. By construction, the MSCHOA is the core of the counter-piracy initiative. It continues to centralize information relating to civil maritime activity off the Somalian coast, to monitor acts of piracy in real time and broadcast alerts over the Internet. However, the issue arises of the possible reorganization of its missions in the framework of its expanded responsibilities. Somalian piracy has thus seen the implementation of a politico-military management model that survives it, with tools that can be easily transposed to other maritime crises, like the Contact Group and SHADE forum. However, the solution to the problem is not found at sea, but on land, in the hands of the Somalian authorities. Marianne Péron-Doise Notes (1) See the counter-piracy mission site of the European Union (eunavfor.eu). (2) Rapport sur la Somalie du Groupe de contrôle pour la Somalie et l Érythrée présenté conformément à la résolution 2182 (2014) du Conseil de sécurité (Report on Somalia by the Control Group for Somalia and Eritrea presented according to resolution 2182 (2014) of the Security Council) S/2015/801, 20 October (3) Stig Jarle Hansen The dynamics of Somali Piracy, Studies in Conflict and terrorism, vol. 35, n o 7-8, 2012, p (4) Initially, protection by military personnel was preferred, in particular in France, and then beginning in 2014 came the generalization of onboard private armed guards. (5) Jean-Sébastien Josset, «Belgique : le roi des pirates somaliens derrière les barreaux mais avec son butin, jeuneafrique.com (Belgium: the king of the Somali pirates behind bars but with his booty), 25 March (6) Pirate trails: tracking the illicit financial flows from piracy off the Horn of Africa, World Bank report, November 2013 ( (7) Contact Group on Piracy off the Coast of Somalia, CGPCS ( (8) Marianne Péron-Doise Piraterie et insécurité maritime dans l Ouest de l océan Indien : quelles perspectives régionales? (Piracy and maritime insecurity in the western Indian Ocean: What regional perspectives?, Défense Nationale, Africa dossier coordinated by Sonia Le Gouriellec, Summer Diplomatie - octobre 2016 Sécurité maritime et développement en Afrique

45 Maritime Security analyse Soutenir la sécurité maritime en Afrique D ici à 2020, la population de l Afrique subsaharienne aura plus que doublé. Les dix pays avec les populations les plus jeunes et les dix pays avec les taux de fertilité les plus élevés se situent tous en Afrique. Les économies des pays subsahariens ne progressent pas suffisamment rapidement pour répondre aux demandes de cette population croissante. La sécurité alimentaire est menacée par les niveaux de pêche intenables et le changement climatique. L e chômage des jeunes contribue grandement à encourager l extrémisme violent, les activités criminelles telles que la piraterie et la toxicomanie qui conduisent au délitement de la cohésion sociale. Ajoutez à cela l instabilité causée par la guerre et la tension entre riches et pauvres et vous obtenez une situation qui, sans une réflexion concertée et une action positive, n a aucune chance de s améliorer rapidement. La réponse globale des Nations Unies à ces défis est présentée dans les Objectifs de développement durable (ODD) et soutenue par d autres stratégies de l ONU Supporting Maritime Security in Africa The population of sub-saharan Africa will more than double by The ten countries with the youngest populations and the ten countries with the highest fertility rates are all in Africa. The economies of Sub-Saharan countries are not growing fast enough to meet the demands of the increasing population. Food security is being threatened by unsustainable levels of fishing and climate change. Y outh unemployment is a major factor in promoting violent extremism, criminal activities including piracy, and drug abuse that leads to the breakdown of social cohesion. Add to this mix the instability caused by war and the pull of the haves on the have nots, and we have a situation which, without joined up thinking and positive action, will not get better any time soon. The United Nations broad response to these challenges is set out in the Sustainable Development Goals (SDGs), supported by other UN strategies such as the Par Chris Trelawny, conseiller spécial à la sécurité maritime et l assistance, Organisation maritime internationale (OMI). By Chris Trelawny, Special Adviser on Maritime Security and Facilitation, International Maritime Organization (IMO). analysis Photo ci-dessus : Un tanker s approche du port de Lagos, capitale économique du Nigéria. Le golfe de Guinée concentre un cinquième des attaques de pirates dans le monde, avec une moyenne d une attaque par semaine, le pétrole étant souvent pris pour cible par les pirates. Depuis 1960, la valeur du pétrole disparu est estimée à 100 milliards de dollars pour l ensemble du continent africain. ( Igor Grochev) Above: A tanker approaches the port of Lagos, economic capital of Nigeria. The Gulf of Guinea is the focus of one fifth of the attacks by pirates in the world, averaging one attack per week, oil often being the target of the pirates. Since 1960, the value of stolen oil has been estimated at 100 billion dollars for the entire African continent. ( Igor Grochev) Diplomatie - october 2016 Maritim Security and Development in Africa 45

46 Sécurité maritime Photo ci-contre : Le 8 février 2016, un navire de garde-côtes patrouille dans le port de Djibouti. Le 29 janvier 2009, l OMI faisait adopter le Code de conduite de Djibouti concernant la répression des actes de piraterie et des vols à main armée contre des navires dans l océan Indien occidental et le golfe d Aden. ( Vladimir Melnik) Opposite: On 8th February, 2016, a coast guard ship patrols in the port of Djibouti. On 29th January, 2009, the IMO adopted the Djibouti Code of Conduct concerning the repression of acts of piracy and armed robbery against ships in the western Indian Ocean and Gulf of Aden. ( Vladimir Melnik) telles que la prévention de l extrémisme violent, ainsi que par des initiatives locales. En tant qu organe de l ONU, l OMI fera tout son possible pour aider à atteindre les objectifs des ODD. Mais, malgré le soutien de l OMI, le secteur maritime civil est entravé par la piraterie, les attaques à main armée contre les navires, l activité maritime illicite et l émigration variée et dangereuse par la mer. Notre stratégie de long terme consiste à créer les conditions favorables au développement de l emploi, de la prospérité et de la stabilité en valorisant le secteur maritime et l économie bleue durable dans le processus de développement des pays. L industrie maritime, qui comprend le transport, les ports et les personnes nécessaires à leur fonctionnement, peut et doit jouer un rôle significatif en aidant les États membres à créer ces conditions favorables au travers de l encouragement du commerce maritime, de la valorisation des secteurs portuaires et maritimes en tant que créateurs de richesses à la fois à terre et, via le développement d une économie bleue durable, en mer. La plus grande menace maritime pour les pays est peut-être leur incapacité à comprendre la valeur du secteur maritime. L initiative d un sommet à Lomé en octobre prochain est à la fois bienvenue et opportune. La Charte africaine de transport maritime révisée (CATM révisée) de 2010 et la Stratégie maritime intégrée de l Union africaine (SMIUA) 2050 indiquent En tant qu organe de l ONU, l OMI fera tout son possible pour aider à atteindre les objectifs des ODD. Mais malgré le soutien de l OMI, le secteur maritime civil est entravé par la piraterie, les attaques à main armée contre les navires, l activité maritime illicite et l émigration variée et dangereuse par la mer. dans les grandes lignes la direction à suivre pour les États africains, mais toutes deux manquent de détails quant aux actions concrètes à mettre en œuvre pour atteindre ces objectifs. L élaboration d une «Charte de Lomé» pourrait être le moyen pour les signataires de s engager à agir de façon ciblée et mesurable pour promouvoir le développement d une économie bleue en Afrique au sens large, soutenue par une sécurité maritime de qualité et une police maritime efficace. L OMI peut s enorgueillir de régulièrement travailler main dans la main avec les États membres africains à l amélioration de la sécurité maritime dans son acception la plus large. En 2006, l OMI ainsi que les 25 pays de l Organisation maritime de l Afrique de l Ouest et du Centre (OMAOC) ont lancé une initiative qui a abouti à la signature par les 16 États membres d un Mémorandum d entente (ME) sur la création d un Réseau sous-régional intégré de la fonction de garde-côtes (ME OMI/ OMAOC). Dans ce contexte, le terme générique de «fonction de garde-côtes» recouvre tous les aspects de la sûreté maritime, de la sécurité de la police maritime et de la protection de l environnement marin. Le but est moins de créer de nouveaux prevention of violent extremism, as well as regional initiatives. As a UN body, IMO will do what it can to help achieve the aims of the SDGs. Although IMO s constituency, the civilian maritime sector, is challenged by piracy, armed robbery against ships, illicit maritime activity and unsafe mixed migration by sea, our long term strategy is focussed on creating conditions for increased employment, prosperity and stability through enhancing the maritime sector and sustainable blue economy in developing countries. The maritime industry, which includes shipping, ports and the people that operate them, can and should play a significant role helping Member States to create conditions for increased employment, prosperity and stability ashore through promoting trade by sea; enhancing the port and maritime sector as wealth creators both on land and, through developing a sustainable blue economy, at sea. Arguably, the biggest maritime threat to countries is the failure to appreciate the value of the maritime sector. The initiative to hold a Summit in Lomé in October this year is both welcome and timely. Both the Revised African Maritime Transport Charter (Revised AMTC) of 2010 and the African Union s Integrated Maritime Strategy (AIMS) 2050 give broad brush outlines of where African States should be heading, but both are short on detail as to what governments actually have to do in order to achieve the objectives. The development of a Lomé Charter could provide a means for signatories to commit to taking specific, measurable actions to promote the Africa-wide development of a sustainable blue economy, underpinned by good maritime security and efficient maritime law enforcement. IMO has a proud history of working with African Member States to enhance maritime security in its widest sense. In 2006, IMO and the 25 countries of the Maritime Association of West and Central Africa (MOWCA) initiated a process that led to the signing by 16 States of a Memorandum of Understanding (MOU) on the Establishment of a Sub-Regional Integrated Coast Guard Function Network (the IMO/MOWCA MoU). In this context, the generic term coast guard functions included all aspects of maritime security, maritime law enforcement safety and protection of the marine environment. The aim was not to build new Coast Guards per se, but rather for countries to perform 46 Diplomatie - octobre 2016 Sécurité maritime et développement en Afrique

47 Maritime Security gardes-côtes en tant que tels que d améliorer la police maritime en utilisant les atouts disponibles de chaque pays, y compris les marines nationales. Pour répondre à la menace que représente la piraterie dans le golfe d Aden et l océan Indien occidental, l OMI a élaboré le Code de conduite de Djibouti. Depuis sa signature et sa mise en œuvre par les 20 États des régions de l océan Indien occidental et du golfe d Aden, la piraterie basée en Somalie a été maîtrisée avec succès puisque, à l heure où nous parlons, aucun détournement de navire marchand n a réussi depuis Plus récemment, à la suite de l adoption des résolutions 2018 (en 2011) et 2039 (en 2012) du Conseil de sécurité des Nations Unies, l OMI a également collaboré avec la Communauté économique des États de l Afrique de l Ouest (CEDEAO) et ensuite avec la Communauté économique des États de l Afrique centrale (CEEAC) et la Commission du golfe de Guinée, en vue de mettre en application la SMIUA 2050, ainsi que la Stratégie maritime intégrée de la CEDEAO. Le Code de conduite relatif à la prévention et à la répression des actes de piraterie, des vols à main armée à l encontre des navires et des activités maritimes illicites en Afrique de l Ouest et du Centre, fondé sur le Code de conduite de Djibouti et adopté en juin 2013, cherche à répondre à toutes les activités maritimes illicites identifiées dans la SMIUA 2050, y compris la pêche illégale, le dépôt de déchets, le vol de pétrole, le trafic de drogues, le terrorisme maritime, ainsi que la piraterie et le vol à main armée contre des navires. À l heure actuelle, la plupart des États signataires du Code de conduite de Djibouti ont exprimé leur intention d en étendre le champ pour répondre aux questions de sécurité maritime au-delà de la piraterie. Le secrétariat de l OMI collabore actuellement avec eux pour faire avancer ce projet. Il est à espérer que tout nouvel accord régional tirera les leçons de la mise en œuvre du Code de conduite pour l Afrique de l Ouest et du Centre, prendra également en compte le besoin de stratégies maritimes commerciales nationales, d une coordination renforcée des mesures de sécurité maritime au niveau national et, enfin, répondra aux menaces émergentes contre le développement économique telles que le commerce illégal d animaux et les cyberattaques. Le Code de conduite pour l Afrique de l Ouest et du Centre de 2013 a été signé à un niveau ministériel avec les chefs d État et de gouvernement lors du Sommet de Yaoundé, ce qui a donné lieu à une déclaration sur la sûreté et la sécurité maritime dans leur zone maritime commune. En raison du précédent créé par ce sommet, une approche similaire à deux niveaux pourrait également être adoptée au Sommet de Lomé. La Commission de l Union africaine pourrait envisager de développer un Code de conduite mis à jour, fondé sur les deux codes existants, comme document support pour une Charte de Lomé qui serait signée à un niveau ministériel. Ensemble, ces deux codes de conduite représentent 39 États africains, maritime law enforcement with the national assets which are available, including vessels of the navy. To address the increasing threat from piracy in the Gulf of Aden and western Indian Ocean, IMO developed the Djibouti Code of Conduct. Following its signature and implementation by 20 States from the western Indian Ocean and Gulf of Aden areas, Somalia based piracy has been successfully contained, with (at the time of writing) no merchant ship being successfully hijacked since More recently, following the adoption of United Nations Security Council resolutions 2018(2011) and 2039(2012), IMO also worked with ECOWAS, and subsequently ECCAS and the Gulf of Guinea Commission, to operationalize AIMS 2050 and the ECOWAS Integrated Maritime Strategy. The Code of Conduct concerning the repression of piracy, armed robbery against ships and illicit maritime activity in west and central Africa, which was based on the Djibouti Code of Conduct, sought to address all illicit maritime activity identified in AIMS 2050, including illegal fishing, dumping of waste, oil theft, drug trafficking and maritime terrorism as well as piracy and armed robbery against ships. Currently, most of the signatory States to the Djibouti Code of Conduct have expressed their intention to expand the scope of that code to address maritime security issues beyond piracy and the IMO Secretariat is working with them to progress this work. It is anticipated that any new regional agreement will take into account the lessons learned from the implementation of the Code of Conduct for west and central Africa, as well as including the need for national maritime business strategies, stronger coordination of maritime security measures at the national level, and addressing emerging threats to economic development such as the illegal wildlife trade and cyber attacks. At the Summit of Heads of State and Government held in Yaoundé in June 2013, the Code of Conduct for west and Photo ci-contre : Un navire de la garde-côte nationale mouille dans la rade de Port-Louis, capitale de Maurice, dans l océan Indien. ( Kletr) Opposite: A national coast guard ship anchors in the road of Port-Louis, capital of Mauritius in the Indian Ocean. ( Kletr) Diplomatie - october 2016 Maritim Security and Development in Africa 47

48 Sécurité maritime The African Union Commission may wish to consider developing an updated code of conduct, based on the two existing codes as the base document for a Lomé Charter that could be signed at the ministerial level. Photo ci-dessus : Le 7 mai 2014, le ministre nigérian de la Défense (à gauche) participe à une cérémonie organisée à Charleston, en Caroline du Sud, au cours de laquelle est signé le transfert par la garde côtière des États-Unis à la Marine nigériane de l USCGC Gallatin (depuis baptisé NNS Okpabana). ( US Coast Guard/Lauren Jorgensen) Above: On 7th May, 2014, the Nigerian Minister of Defense (left) participated in a ceremony organized in Charleston, South Carolina, during which the transfer by the United States Coast Guard to the Nigerian Navy of the USCGC Gallatin (since renamed NNS Okpabana) was signed. ( US Coast Guard/ Lauren Jorgensen) si bien qu un code de l Afrique tout entière semble tout à fait réalisable. Cela serait complété par une déclaration des chefs d État et de gouvernement, dotée en préambule des paragraphes adéquats sur la mise en œuvre de la SMIUA 2050 et la CATM révisée, qui les engageraient à entreprendre un certain nombre de démarches ciblées au niveau national et qui faciliteraient la mise en œuvre de la nouvelle Charte de Lomé, telles que : établir une sécurité maritime nationale multiagence, multidisciplinaire ainsi qu un comité de conseil dans le but de développer une politique de sécurité maritime nationale ; définir les rôles et les responsabilités de tous les intervenants compétents, coordonner la mise en œuvre de la stratégie maritime commerciale nationale ; identifier et donner les moyens aux coordinateurs nationaux d incarner la volonté collective du comité ; conduire une étude approfondie de la législation nationale relative à la police dans le domaine maritime pour s assurer qu elle est adaptée aux besoins ; La Commission de l Union Africaine pourrait envisager de développer un Code de Conduite mis à jour, basé sur les deux codes existants comme document support pour une Charte de Lomé qui serait signée à un niveau ministériel. conduire une étude impartiale sur la valeur potentielle des ressources naturelles dans la zone économique exclusive afin de déterminer les niveaux appropriés d investissement nécessaire à la protection et au maintien de ces ressources ; en concertation avec les organisations de pêches régionales et les États voisins, établir et faire respecter des zones central Africa was signed at Ministerial level with the Heads of State and Government issuing a declaration on maritime safety and security in their common maritime domain. Following the precedent of that summit, a similar, two-tier approach could be adopted by the Lomé Summit too. The African Union Commission may wish to consider developing an updated code of conduct, based on the two existing codes as the base document for a Lomé Charter that could be signed at the ministerial level. Taken together, these two codes of conduct represent 39 African States so a whole of Africa Code seems quite achievable. This would be complemented by a Head of State and Government declaration (with appropriate preambular paragraphs on implementing AIMS 2050 and the Revised AMTC, committing themselves to take a number of specific actions nationally that would facilitate implementation of the new Lomé Charter, for example: establish a multi-agency, multi-disciplinary national maritime security and facilitation committee in order to: develop a national maritime security policy; define roles and responsibilities of all relevant agencies; coordinate implementation of the national maritime business strategy; and identify and empower national focal points to represent the collective will of the committee; conduct a thorough review of national legislation pertaining to law enforcement in the maritime domain to ensure that it is fit for purpose; conduct an impartial review of the potential value of natural resources in the exclusive economic zone in order to determine the appropriate levels of investment necessary for to protect and sustain them; in consultation with regional fisheries organizations and neighbouring States, establish and enforce no fishing zones in fish breeding grounds; establish in all national ports, port security and facilitation committees charged with implementing national policies on security, border controls, health and safety and trade facilitation; seek investment in ports and port infrastructure; and seek investment in training programmes for seafarers, fishermen and port workers. Civil/military cooperation is also very important. It is necessary to break down the silos between government departments, including the navy. Avoiding duplication, sharing personnel and equipment and standardizing approaches will benefit all departments. Maritime security should be seen as an enabler for development. It is a means to an end, not the end in itself. Although this is a 48 Diplomatie - octobre 2016 Sécurité maritime et développement en Afrique

49 Maritime Security d interdiction de pêche dans les zones de reproduction des poissons ; établir la sécurité portuaire dans tous les ports nationaux, ainsi que des comités de conseil chargés de mettre en œuvre les politiques nationales sur la sécurité, les contrôles aux frontières et la facilitation du commerce et l hygiène et la sécurité ; rechercher des investissements pour les ports et les infrastructures portuaires ; et, enfin, rechercher des investissements pour les programmes de formation à destination des marins, des pêcheurs et des ouvriers portuaires. La coopération entre civils et militaires est également très importante. Il est indispensable de faire tomber les cloisonnements entre les services de l État, y compris dans la marine. Éviter les doublons, partager les ressources en personnel et en équipements et standardiser les approches sera bénéfique à tous les services. La sécurité maritime devrait être perçue comme un facilitateur de développement. Elle constitue un moyen pour atteindre un but et non un but en soi. Bien que cette initiative soit à l échelle du continent africain, il est vital que les pays africains établissent individuellement leurs propres organisations nationales, leurs propres cadres juridiques et développent leurs capacités pour retirer des bénéfices du secteur maritime. Bien que cette initiative soit à l échelle du continent africain, il est vital que les pays africains établissent individuellement leurs propres organisations nationales, leurs propres cadres juridiques et développent leurs capacités pour retirer des bénéfices du secteur maritime. Les entités régionales reflètent cette appartenance. L Union africaine et les Communautés économiques régionales (CER) ne disposent pas d atouts en propre. Elles ne seront pas en mesure d allouer les ressources suffisantes au secteur maritime tant que leurs États membres ne fourniront pas l impulsion et les moyens nécessaires. Les stratégies locales ne fonctionneront que si les pays croient en eux-mêmes individuellement et agissent pour s imposer. Les pays d Afrique n ont pas tous le même potentiel. Ceux qui disposent de politiques maritimes fortes et qui peuvent démontrer la valeur de l investissement maritime devraient encourager leurs CER à promouvoir le développement de stratégies maritimes crédibles auprès d autres gouvernements de la région, en s appuyant sur leur succès. La politique est la clé de la réussite. Si le Sommet de Lomé peut fixer un cadre qui facilite le développement du secteur maritime et une économie bleue viable qui génère des revenus, de l emploi et de la stabilité, il est probablement le meilleur moyen de développer cette volonté politique. Chris Trelawny Although this is a whole of Africa initiative, it is vital that individual African countries establish their own national organizations, legal frameworks and develop their capacity in order to benefit from the maritime sector. whole of Africa initiative, it is vital that individual African countries establish their own national organizations, legal frameworks and develop their capacity in order to benefit from the maritime sector. Regional bodies reflect their membership. The African Union and the Regional Economic Communities (RECs) do not have any assets of their own. They will not be able to allocate sufficient resources to the maritime sector until their member States provide the impetus and assets to do so. Regional strategies will only work if individual countries believe in them and take action to enforce them. African countries have different capabilities. Those countries that have strong maritime policies and can demonstrate the value of maritime investment should encourage their RECs to promote the development of credible maritime strategies to other Governments in the region, based on their success. Political will is the key to success. If the Lomé Summit can agree a framework to facilitate the development of the maritime sector and a sustainable blue economy that generates revenue, employment and stability, this is probably the best way to develop that political will. Chris Trelawny Photo ci-dessous : Le 12 novembre 2015, l OMI inaugure le Centre régional de formation de Djibouti. Situé dans le port de Djoraleh, il est appelé à jouer un rôle de premier plan dans les initiatives régionales de renforcement des capacités. ( IMO) Below: On 12th November, 2015, the IMO inaugurated the regional training center of Djibouti. Located in the port of Djoraleh, it will play a leading role in regional capability reinforcement initiatives. ( IMO) Diplomatie - october 2016 Maritim Security and Development in Africa 49

50 50 Diplomatie - octobre 2016 Sécurité maritime et développement en Afrique

51 Les défis Challenges ANALYSE L Afrique face aux défis des migrations maritimesp. 52 ANALYSIS Africa s Challenge of Maritime Migrations ANALYSE L Afrique face à la montée des océans : quelles conséquences? p. 58 ANALYSIS Africa and the Rising Oceans: What Consequences? ANALYSE Les enjeux des aires marines protégées en Afriquep. 63 ANALYSIS The Implications of Marine Protected Areas in Africa ANALYSE La pêche illégale le long de la côte ouest-africaine p. 68 ANALYSIS Illegal Fisheries along West African Coast ANALYSE La pollution marine en Afrique : quelles conséquences? p. 72 ANALYSIS Marine Pollution in Africa: What Consequences? Photo ci-contre : Le drapeau de l'union africaine ( Shutterstock) Opposite: The African Union flag. ( Shutterstock) Diplomatie - october 2016 Maritim Security and Development in Africa 51

52 Les défis analyse Par Charles Kwenin, Haut conseiller régional de l OIM (Organisation internationale pour les migrations) pour l Afrique subsaharienne. By Charles Kwenin, Senior Regional Advisor for Sub Saharan Africa at IOM. analysis Photo ci-dessus : Des migrants ayant survécu à la traversée du golfe d Aden attendent de l aide sur une plage du Yémen. Selon le HCR, bien que le Yémen soit en proie à l anarchie, les migrants continuent d affluer par milliers dans l espoir de rejoindre les pays riches du Golfe. ( UNHCR/J. Björgvinsson) Above: Migrants having survived the crossing of the Gulf of Aden wait for aid on a Yemen beach. According to UNHCR, although Yemen is prey to anarchy, migrants continue to arrive in the thousands in the hope of reaching of the rich countries of the Gulf. ( UNHCR/J. Björgvinsson) L Afrique face aux défis des migrations maritimes Dans le monde, une personne sur sept est un migrant. Ce ratio peut ne pas paraître très élevé à certains, mais il représente en réalité un milliard de personnes à l échelle mondiale. Ce chiffre, établi à partir des taux de migrations internationales ou internes, met véritablement en lumière l étendue de ce qu est devenue la migration aujourd hui : un phénomène mondial. IL est toutefois important de rappeler qu une large proportion des migrants ainsi comptabilisés n a pas terminé son voyage dans des conditions sûres. En fait, certains n ont même jamais atteint leur destination. Même si la migration a permis à certaines personnes de fuir sans heurts des situations désespérées pour avoir un meilleur avenir, d autres n ont pas eu cette chance. En raison de sa nature éminemment clandestine, la migration irrégulière est difficilement quantifiable ou mesurable. Cependant, les statistiques Africa s Challenge of Maritime Migrations One in seven people in the world are migrants. One in seven may not resonate with some as being a particularly high ratio but it actually represents 1 billion people globally. Made up of international migration or internal migration rates, this figure truly showcases the extent to which migration has propelled into the global phenomenon that it is today. Nevertheless, it s important to note that a large proportion of migrants that make up this figure did not complete their journey in a safe manner. In fact, some never even made it at all. Even though migration has enabled some individuals to smoothly escape dire situations to create new opportunities for themselves, others have not been as lucky. Due to its incredibly clandestine nature, irregular migration is hardly quantifiable 52 Diplomatie - octobre 2016 Sécurité maritime et développement en Afrique

53 Challenges disponibles tendent à montrer qu elle est en hausse. Selon la Fiche d information sur la migration mondiale de 2015 de l OIM, «la dernière estimation de la migration irrégulière suggère qu il y avait en 2010 au moins 50 millions de migrants irréguliers dans le monde, dont une grande partie dépend des réseaux de passeurs». Les recherches ont mis en évidence deux voies maritimes principales empruntées par les migrants à destination de l Europe : la route de la Méditerranée centrale et la route de la Méditerranée orientale. Ces dernières années, les statistiques ont montré que le taux des flux migratoires irréguliers en Europe augmente de plus en plus. L augmentation de la migration maritime en est le principal facteur responsable. En fait, les récentes crises sur le continent africain ont massivement poussé les migrants à fuir par la mer. Dans cet article, nous allons parler de l étendue des dangers de la migration maritime en Afrique et de l impact qu elle a eu sur le flot de morts de migrants. Pour cela, nous mettrons en lumière quelques-unes des statistiques clés de l importance du flux de la migration maritime en Europe, ainsi que les conclusions spécifiques de la situation migratoire en Somalie et dans le golfe d Aden. Migration maritime en Méditerranée Profil des migrants Les recherches ont mis en évidence deux voies maritimes principales empruntées par les migrants à destination de l Europe : la route de la Méditerranée centrale et la route de la Méditerranée orientale. La première a son point d entrée en Italie et la seconde, en Grèce. Les résultats fournis par la Matrice de suivi des déplacements de l OIM montrent un taux de réponses positives beaucoup plus élevé sur les indicateurs de présence de traite ou d autres pratiques d exploitation sur la route de la Méditerranée centrale. Les variations de distances de ces routes respectives et des profils de migrants aident à expliquer la différence des taux de pratiques d exploitation. Par exemple, les migrants surveillés sur la route de la Méditerranée centrale ont tendance à avoir plus de chemin à parcourir pour atteindre l Europe que ceux de la voie orientale. Environ «76 % des individus ont répondu oui à l un des indicateurs de présence de traite et d autres pratiques d exploitation, or measurable. Nevertheless, the statistics that are available have come to show that irregular migration is on the rise. According to IOM s 2015 Global Migration Factsheet, the most recent global estimate of irregular migration suggests that there were at least 50 million irregular migrants worldwide in 2010, a large number of whom rely on smuggling services. In recent years, statistics have shown that the rate of irregular migration flows into Europe is increasingly on the rise. The main factor that has contributed to this is the rise of maritime migration. In fact, recent crises on the African continent have largely propelled migrants willingness to migrate by sea. In this article, we will discuss the extent of the perils of maritime migration in Africa and the impact that it has had on the influx of migrant deaths, by highlighting some of the key statistics of the extent of the maritime migration flow into Europe as well as the key findings from the migration situation in Somalia and the Gulf of Aden. Maritime Migration in the Mediterranean - Migrant Profile Research has shown that there are two principal maritime routes that migrants adopt when migrating into Europe: the Central Mediterranean Route and the Eastern Mediterranean Route. The Central Mediterranean Route has its point of entry in Italy while the Eastern Mediterranean Route has a point of entry in Greece. Results from IOM s Displacement Tracking Matrix (IOM), show that there are much higher rates of positive responses to at least one of the trafficking or other exploitative practices in the Central Mediterranean route. The varied lengths of the respective routes as well as the varying migrant profiles help explain the difference in the rates of exploitative practices. For instance, the migrants surveyed on the Central Mediterranean Route tend to have a longer journey to Europe than their counterparts who journey on the Eastern Route. About 76% of individuals answered yes to one of the trafficking and other Photo ci-contre : Avec un chiffre d affaires annuel estimé à près de 7 milliards de dollars par l Office des Nations Unies contre la drogue et le crime (ONUDC), un risque limité et une forte demande, le transport de clandestins d Afrique vers l Europe via la mer attire de plus en plus de groupes mafieux puissants et transforme des chefs de guerre ou de clan en riches acteurs de la criminalité transfrontalière. ( Xinhua) Opposite: With annual revenues estimated at 7 billion dollars by the United Nations Office on Drugs and Crime (UNODC), limited risk and high demand, the transport of illegal migrants from Africa to Europe by sea attracts an increasing number of powerful mafia groups and transforms warlords or clan leaders into rich players of trans-border organized crime. ( Xinhua) Diplomatie - october 2016 Maritim Security and Development in Africa 53

54 Les défis Photo ci-contre : Le 15 juin 2015, la marine irlandaise prête assistance en Méditerranée à un bateau de migrants, dans le cadre de l opération «Triton». Cette opération de l agence Frontex, effective depuis novembre 2014, est censée soutenir l Italie pour faire face à l afflux de migrants par voie maritime. ( Irish Defence Forces) Opposite: On 15th June, 2015, the Irish Navy provided assistance in the Mediterranean to a boat of migrants under the Triton operation. This operation of the Frontex agency, effective since November 2014, is supposed to support Italy in handling the flow of migrants arriving by sea. ( Irish Defence Forces) basé sur leur propre expérience [ ] et 51 % des sondés ont répondu par l affirmative à au moins deux indicateurs de traite et d autres pratiques d exploitation» sur la route de la Méditerranée centrale. À l inverse, parmi ceux qui empruntent la route orientale, seulement 10 % des migrants interrogés ont répondu «oui» à l un des indicateurs de traite et d autres pratiques d exploitation et on n en dénombre que 2 % qui répondent par l affirmative à deux indicateurs ou plus. Cependant, puisque le propos de cet article est de mettre en lumière les problèmes rencontrés par les migrants africains au cours de leur voyage, nous nous concentrerons sur le profil du migrant typique figurant parmi les répondants sur la route centrale. Il est également important de noter que les groupes nationaux qui empruntent la route de la Méditerranée, soit centrale, soit orientale, ont tendance à être différents. Selon les sondages de l OIM, il semblerait que les ressortissants africains passent plus volontiers par la route de la Méditerranée centrale. En fait, on retrouve parmi les nationalités les plus représentées des Érythréens, des Nigérians, des Gambiens et des Égyptiens. D autre part, il est intéressant de souligner que les conditions de vie antérieures des migrants n influencent pas nécessairement la manière dont ils ont choisi d effectuer leur voyage. Les personnes sondées par l OIM présentent des modes de vie et des parcours professionnels variés, montrant ainsi que même des migrants habitués à un niveau de vie confortable peuvent Bossaso, l un des plus grands ports de l État somalien du Puntland, abrite des milliers de migrants éthiopiens à la recherche de la prospérité au Moyen-Orient et au-delà. opter pour la dangereuse route maritime. Par exemple, parmi ceux qui ont emprunté la route centrale, 47 % ont rapporté avoir un emploi au moment de quitter leur pays d origine. La majorité d entre eux travaillaient dans les secteurs de la construction, des services d électricité, de la vente, des transports et de l agriculture. En outre, une part importante des migrants (64 %) qui ont emprunté la route centrale voyage seule. Et sur les 36 % qui voyagent bel et bien en groupe, il semblerait qu il y ait une prévalence d individus qui le font avec des personnes extérieures à leur famille (57 %). Non seulement ces statistiques mettent en lumière combien la migration maritime sépare aisément les migrants de leurs proches, mais elles montrent également la facilité qu ont les migrants à s unir lorsqu ils se retrouvent dans la même situation délicate et dangereuse. La migration maritime en Somalie Depuis le début de la crise en Somalie et au Yémen, la Somalie a été utilisée par de nombreux migrants comme voie de transit et même comme destination finale. En fait, exploitative practices indicators, based on their own direct experience [ ] and 51% of respondents responded positively to at least 2 of the trafficking and other exploitative practices indicators on the Central Mediterranean Route. Contrarily, out of those on the Eastern Route, only 10% of individuals answered yes to one of the trafficking and other exploitative practices and a mere 2% responded positively to two or more. Nevertheless, due to the fact that the purpose of this article is to highlight the issues faced by African migrants when pursuing their journey, we will ultimately focus on the typical migrant profile found among respondents on the Central Route. It s also important to note that the national groups that use either the Central or Eastern Mediterranean route tend to differ. Based on IOM s surveys, it would appear that African nationals typically travel on the Central Mediterranean Route. In fact, the nationalities that are mostly represented are Eritreans, Nigerians, Gambians and Egyptians. Furthermore, it s important to note that the migrants prior living circumstances did not necessarily influence the way in which they opted to carry out their journey. The respondents surveyed by IOM showcase a variety of lifestyles as well as employment background, thus highlighting that even migrants who were accustomed to a comfortable standard of living can also opt for the perilous maritime route. For instance, out of those who journeyed on the Central Route, 47% of respondents reported being employed at the time of leaving their countries of origin. The most common industries in which these 47% respondents held professional occupations are: construction, electricity services, retail services, transportation and agriculture. In addition, a high proportion of migrants (64%) who use the Central Route tend to travel on their own. Out of the 36% of individuals that do travel in a group, there appears to be a greater prevalence of individuals that travel with non-family members (57%). Not only do these statistics highlight the extent to which maritime migration easily separates migrants from their loved ones but they also showcase the ease at which migrants find unity when in the same perilous predicament. 54 Diplomatie - octobre 2016 Sécurité maritime et développement en Afrique

55 Challenges personnes sont arrivées à Djibouti, en Somalie, au Soudan et en Éthiopie. À partir du 30 juin 2016, individus en tout (parmi lesquels 86 % étaient des Somaliens sur le chemin du retour, 1 % des migrants et 13 % des Yéménites) ont fui le conflit au Yémen et sont arrivés en Somalie. Nous ne disposons pas de données précises sur le nombre de migrants irréguliers. Néanmoins, la plupart de ces migrants sont souvent des individus célibataires, relativement éduqués et qui ont décidé de quitter la Somalie en raison de l insécurité générale. Les migrants clandestins sont éminemment susceptibles d être les victimes des trafics d êtres humains ou des passeurs, des traversées dangereuses et des prises de risques, ou de se retrouver abandonnés sur la route. Bossaso, le paradis des trafiquants Bossaso, l un des plus grands ports de l État somalien du Puntland, abrite également des milliers de migrants éthiopiens à la recherche de la prospérité au Moyen-Orient et au-delà. Pour certains, la traversée périlleuse du golfe d Aden dans des embarcations instables et pleines à craquer ne suffit pas à les dissuader. Par exemple, Mustariya, 19 ans, a déclaré : «On m a dit que le Yémen m offrirait une vie meilleure et je ferai tout pour y arriver». Par conséquent, Bossaso est communément surnommée «la ville des trafics». Même si les autorités du Puntland arrêtent fréquemment des migrants en situation irrégulière et des trafiquants, il semblerait qu elles manquent d infrastructures pénitentiaires capables de détenir un grand nombre de condamnés. Selon Said Mohamed Rage, le ministre des Ports et de la Pêche, le trafic est devenu un problème humanitaire grave pour les migrants, mais les autorités manquent cruellement de ressources pour les nourrir, sans parler de les renvoyer chez eux. En outre, nous n avons pas de données précises sur le niveau de trafic en Somalie, qu il s agisse du nombre actuel de migrants somaliens introduits illégalement ou du nombre de trafiquants qui utilisent le territoire comme un pays de transit ou de destination. En dépit de ce manque d information, les analystes ont souvent déclaré que la Somalie fait partie du top 10 des pays d origine des victimes de trafic. En 2012, le Département d État américain a rapporté que des hommes, des femmes et des enfants somaliens étaient introduits illégalement au Somaliland et au Puntland depuis les camps de déplacés internes situés dans le Sud de la Somalie avant de rejoindre des destinations étrangères. La traversée du golfe d Aden D après le Secrétariat régional de la migration composite (RMMS) situé à Nairobi et le HCR, en 2014, migrants sont arrivés au Yémen en traversant le golfe d Aden depuis la Somalie ou la mer Rouge depuis Djibouti. En 2015, ce nombre est passé à , soit une légère hausse. Les experts jugent cette augmentation surprenante étant donné que le conflit au Yémen a débuté en avril 2014 et s est poursuivi jusqu à la fin de l année Certains analystes supposent que le conflit de 2015 entre le gouvernement et les forces rebelles a laissé un vide de pouvoir au Yémen. Par conséquent, cela a entravé l application des lois, ce qui pourrait avoir attiré des migrants irréguliers. En 2015, près de 90 % des arrivées au Yémen provenaient d Éthiopie et de Somalie. Maritime Migration in Somalia Since the beginning of the Somalian and Yemeni crisis, Somalia has been used as by many migrants as a source of transit or even a final destination. In fact, 79,295 people have arrived in Djibouti, Somalia, Sudan and Ethiopia. As of 30 June 2016, 32,619 individuals overall (of which 86% were Somali returnees, 1% migrants and 13% Yemenis) fled the conflict in Yemen and arrived in Somalia. Precise data on the number of irregular migrants is unknown. Nevertheless, most irregular migrants tend to be single, relatively educated individuals who decided to leave Somalia due to general insecurity. Irregular migrants are highly vulnerable to falling victim to human trafficking or exploitative smugglers, dangerous crossings and risk-taking, and becoming stranded on route. Bossaso The Smuggler s Haven Bossaso one of the largest ports in Somalia s Puntland State is also home to thousands of Ethiopian migrants seeking prosperity in the Middle-East and beyond. For some, crossing the perilous Gulf of Aden in crammed and unstable boats is not a deterrent. For instance 19-year-old Mustariya said that, I have heard Yemen can offer me a better life, I will do whatever it takes. As a result, Bossaso is now commonly referred to as a smuggling boomtown. Even though the administration in Puntland frequently arrests irregular migrants and smugglers, they reportedly lack the jail infrastructure to hold a large number of culprits. According to Said Mohamed Rage, the Minister of Ports and Fisheries, smuggling has become a severe humanitarian issue for the migrants but the administration severely lacks the resources to feed let alone return them. Furthermore, exact data on the level of smuggling in Somalia is severely lacking, whether it be the actual number of smuggled Somali migrants or the number of smugglers that are using the nation as a transit or destination country. Despite this lack of precision, analysts have often reported Photo ci-dessus : Le 11 mars 2014, la marine italienne effectue une mission de sauvetage pour venir en aide à un navire de migrants d origines diverses : Syrie, Mali, Soudan, Gambie, Somalie et Centrafrique. ( UNHCR/A. D Amato) Above: On 11th March, 2014, the Italian Navy conducted a rescue operation to aid a ship of migrants of varying origin: Syria, Mali, Sudan, Gambia, Somalia and the Central African Republic. ( UNHCR/A. D Amato) Diplomatie - october 2016 Maritim Security and Development in Africa 55

56 Les défis Photo ci-dessus : Le 14 avril 2015, des réfugiés et des migrants sauvés en mer débarquent d un navire des gardes-côtes italiens à Palerme, en Sicile. Début juin 2016, le HCR déclarait que plus de migrants avaient péri en Méditerranée. ( UNHCR/Francesco Malvolta) Above: On 14th April, 2015, refugees and migrants rescued at sea disembark from an Italian Coast Guard ship in Palermo, Sicily. In early June 2016, UNHCR declared that over 10,000 migrants had perished in the Mediterranean. ( UNHCR/Francesco Malvolta) Inversement, les rapports de situation de crise de l OIM au Yémen montrent que, en 2015, migrants sont arrivés à Djibouti, en Éthiopie, en Somalie et au Soudan en provenance du Yémen. Presque tous ces individus ont voyagé par bateau. En 2015, aucune donnée sur les arrivées de migrants dans la Corne de l Afrique depuis le Yémen n avait été recensée, leur nombre ayant été jugé négligeable. Le nombre combiné d arrivées de migrants au Yémen et dans la Corne de l Afrique en 2015 s élevait à Malgré ce chiffre sans précédent, le nombre de décès de migrants en mer en 2015 au large de la Corne de l Afrique a diminué de 61 %, passant de 246 en 2014 à 95 en Du point de vue de l OIM, cette baisse pourrait être due à la demande bien plus élevée en 2015 de migration irrégulière par bateau à travers la mer Rouge et le golfe d Aden, dans les deux directions, poussant de nombreux commerçants à se tourner vers le trafic illicite de migrants avec des bateaux plus résistants et en meilleur état. Chaque année, des milliers de personnes meurent dans les eaux au large de l Afrique en essayant de rallier le Yémen pour échapper à des zones gangrenées par le conflit et à un avenir économique sombre chez eux. Le Yémen sert de porte d entrée vers les riches pays du Golfe au Moyen-Orient. Il semble que les Somaliens, les Érythréens et les Éthiopiens représentent la majeure partie des migrants qui envisagent de traverser le golfe d Aden et la mer Rouge pour tenter de rallier le Yémen et poursuivre leur route au-delà, dans des embarcations précaires et souvent sous le contrôle de trafiquants d êtres humains sans scrupule. En conclusion, nous pouvons remarquer que le phénomène de la migration maritime en Afrique ne montre aucun signe de ralentissement. Comme évoqué plus haut, l origine socioéconomique des migrants n influence pas nécessairement leur décision d effectuer leur voyage par la mer. Qu il s agisse d entrer en Europe ou de voyager à travers la Somalie via le golfe d Aden ou Bossaso, la migration maritime s est révélée de plus en plus dangereuse en raison de l augmentation des trafics. Charles Kwenin that Somalia is among the top 10 countries of origin of trafficking victims. In 2012, the U.S Department of State reported in 2012 that Somali men, women and children were smuggled or trafficked from IDP camps in south-central Somalia to Somaliland and Puntland and then to foreign destinations. Crossing the Gulf of Aden In 2014, according to the Nairobi-based Regional Mixed Migration Secretariat (RMMS) and UNHCR, 91,592 migrants arrived in Yemen by crossing the Gulf of Aden from Somalia or the Red Sea from Djibouti. This number rose marginally to 92,466 in Experts deemed this increase as surprising considering that the Yemen conflict had begun in April of that year and continued throughout Some analysts speculate that the conflict in 2015 between government and rebel forces resulted in a power vacuum in Yemen. This consequently led to diminished law enforcement which in turn may have actually attracted irregular migrants. In 2015, almost 90 per cent of those arriving in Yemen were from Ethiopia and Somalia. Conversely, IOM s Yemen Crisis Situation reports show that 72,308 migrants arrived in Djibouti, Ethiopia, Somalia and Sudan from Yemen in Almost all of them first started their journey by boat. There was no data in 2015 on migrant arrivals in the Horn of Africa from Yemen as the number was so low it was deemed negligible. If one were to combine the number of migrant arrivals in Yemen and in the Horn of Africa this would amount to approximately 164,000 individuals. Despite this unprecedented figure, the number of migrant deaths at sea in 2015 in the Horn of Africa decreased from 246 in 2014 to 95 in 2015 (61% reduction). From IOM s perspective, this decrease could be attributed to the significantly higher demand for irregular migration by boat across the Red Sea and Gulf of Aden in both directions in 2015, which caused many merchant traders of commodities to shift to migrant smuggling with sturdier, more seaworthy boats. Every year, thousands of people die in the waters off the coast of Africa while trying to reach Yemen in order to escape conflict-ridden situations and poor economic prospects at home. Yemen serves as a gateway to the rich Gulf countries in the Middle East. It appears that Somalis, Eritreans and Ethiopians make up for most of the migrants who look to cross the Gulf of Aden and the Red Sea trying to reach Yemen and beyond in precarious boats, often controlled by unscrupulous human traffickers. To conclude, we can observe that maritime migration in Africa is a phenomenon that is showing no signs of slowing down. As mentioned above, a migrant s socio-economical background does not necessarily influence their decision to carry out their journey by sea. Whether it is to enter Europe or journeying through Somalia via the Gulf of Aden or Bossaso, maritime migration has proved to become increasingly perilous through the rise of smuggling and trafficking. Charles Kwenin 56 Diplomatie - octobre 2016 Sécurité maritime et développement en Afrique

57 Challenges ACTUELLEMENT EN KIOSQUE CARTO N 37 SEPTEMBRE-OCTOBRE PAGES 10,95 Retrouvez nos publications en kiosque, librairie et sur Internet Numéro 01 Numéro 125 Numéro 50 Numéro 23 Numéro 06 Numéro 37 Numéro 82 Numéro 34 Numéro rue Saint-Honoré Paris (France) Tél. : +33(0) Fax : +33 (0) contact@areion.fr Diplomatie - october 2016 Maritim Security and Development in Africa 57

58 Les défis analyse Par Daria Mokhnacheva, spécialiste thématique en migration, environnement et changement climatique à l Organisation internationale pour les migrations (OIM)*. By Daria Mokhnacheva, topical specialist in migration, the environment and climate change at the International Organization for Migrations (IOM)*. analysis Photo ci-dessus : Village de pêcheurs à Cape Coast, au Ghana. Selon une étude de l université du Ghana parue en 2011, le pays devrait connaître de plus en plus d inondations dues à la montée du niveau des océans, avec un recul de plus de 200 mètres des lignes côtières qui affectera les sites industriels et naturels et entraînera des épidémies, des déplacements de populations, une perte de terres ainsi qu une baisse des prises et des revenus de la pêche. ( Art Olympic) Above: Fishing village in Cape Coast, Ghana. According to a study by the University of Ghana published in 2011, the country should experience more and more flooding due to rising sea levels with the erosion of more than 200 meters of the coast line that will affect industrial and natural sites and lead to epidemics, the displacement of populations, loss of land and a drop in catches and revenues from fishing. ( Art Olympic) L Afrique face à la montée des océans : quelles conséquences? La montée du niveau de la mer est l une des conséquences prévues les plus marquantes du changement climatique, car elle menace de disparition de nombreux territoires et installations humaines, voire, dans le cas de certains petits États insulaires, de pays entiers. S ous les effets de ces changements, de nombreuses communautés risquent de subir une dégradation nette de leurs conditions de vie, pouvant amener à des migrations hors des régions touchées, voire à des déplacements forcés. Si la mise en place de mesures d adaptation est encore possible, elle est souvent hors de portée pour les États en développement, rendant les communautés et les pays les plus touchés, notamment en Afrique, particulièrement vulnérables. Africa and the Rising Oceans: What Consequences? Rising sea levels are one of the more marked expected consequences of climate change for they threaten many territories and human installations, or even in some cases small island States or entire countries with disappearance. U nder the effects of these climate changes, many communities risk sustaining a clear deterioration of their living conditions which could lead to migrations outside the impacted regions, or to forced displacements. While the implementation of adaptation measures is still possible, it is often out of reach for developing States, making the most affected communities and countries, in particular in Africa, particularly vulnerable. 58 Diplomatie - octobre 2016 Sécurité maritime et développement en Afrique

59 Challenges Des risques côtiers croissants Les effets de l élévation du niveau de la mer sont répartis de manière inégale sur la planète, et dépendent des dynamiques du climat et de l océan propres aux différentes régions du monde, des caractéristiques variables des côtes, des infrastructures en place, mais aussi des capacités d adaptation des communautés concernées. Les villes côtières, les deltas et les territoires à basse élévation, notamment les petites îles, sont le plus fortement exposés à l élévation du niveau de la mer. En particulier, ce sont l Asie du Sud-Est, le Pacifique, le bassin caraïbe et les zones littorales occidentale, orientale et méditerranéenne de l Afrique qui sont identifiés comme les régions les plus vulnérables à ce phénomène en raison de leur géographie, de la densité de la population, mais aussi du fait des vulnérabilités socio-économiques existantes. À la montée du niveau de la mer s ajoutent de nombreux autres défis auxquels font face les régions côtières : le réchauffement de la température et l acidification de l océan, l augmentation de la fréquence des tempêtes et des marées extrêmes, l érosion des côtes, la salinisation des terres et des nappes phréatiques, ou encore It is in particular Southeast Asia, the Pacific, the Caribbean Basin and western, eastern and Mediterranean coastal areas of Africa that are identified as the most vulnerable to this phenomenon. En particulier, ce sont l Asie du Sud-Est, le Pacifique, le bassin caraïbe et les zones littorales occidentale, orientale et méditerranéenne de l Afrique qui sont identifiés comme les régions les plus vulnérables à ce phénomène. la dégradation des écosystèmes marins (1). Qu ils soient liés au changement climatique ou à la mauvaise gestion de l environnement par l homme, tous ces phénomènes menacent les services clés fournis par les écosystèmes marins à la société, tels que l approvisionnement en nourriture et en ressources dont dépendent l économie et les emplois, ou la régulation des risques naturels. Les facteurs multiples de vulnérabilité en Afrique Avec un littoral d environ km, le continent africain est riche en écosystèmes marins, mais également très exposé aux risques climatiques littoraux. Ce sont au total 32 pays côtiers d Afrique qui sont déjà touchés, ou qui risquent d être concernés à l avenir par l érosion des côtes ou les inondations détruisant des infrastructures majeures et causant des pertes humaines, et entraînant la perte de la mangrove et de son rôle de protection contre les risques extrêmes, la salinisation des terres et des ressources en eau essentielles pour l agriculture littorale ou encore la dégradation des ressources halieutiques (2). La plupart de ces pays ont une capacité très limitée à s adapter à ces défis. Ces phénomènes, qu ils soient à évolution lente ou à impact soudain, affectent les moyens de subsistance et la sécurité physique d un nombre croissant de personnes, dans le contexte de hausse démographique rapide et d urbanisation Growing coastal risks The effects of the rise in sea level are unequally distributed across the planet and depend on the dynamics of the climate and the ocean specific to the different regions of the world, on the variable characteristics of the coasts, the infrastructures in place, but also the capacity to adapt of the communities concerned. Coastal cities, deltas and lowlying territories, in particular small islands, are the most frequently exposed to the rise in sea level. It is in particular Southeast Asia, the Pacific, the Caribbean Basin and western, eastern and Mediterranean coastal areas of Africa that are identified as the most vulnerable to this phenomenon due to their geography, population density, but also due to existing socio-economic vulnerabilities. Many other challenges in addition to the sea level face the coastal regions: rising temperatures and the acidification of the ocean, increased frequency of storms and extremes tides, the erosion of the coastlines, salinization of the soils and water tables, or the deterioration of marine ecosystems (1). Whether they are related to climate change or poor management of the environment by humans, all these phenomena threaten the key services that marine ecosystems provide to society such as the supply of food and resources on which the economy and jobs depend or the regulation of natural hazards. Photo ci-dessus : Un enfant tanzanien sur une plage de l île de Zanzibar. Selon le ministère de l Environnement de Zanzibar, la montée des océans a entraîné le mélange de l eau de mer avec les sources d eau douce, ayant causé la contamination des puits de l île, dont la principale source d eau est souterraine. ( Adwo) Above: A Tanzanian child on a beach on the Island of Zanzibar. According to the Ministry of the Environment of Zanzibar, rising sea levels have led to the blending of seawater with fresh water causing the contamination of the island s wells whose main source of water is underground. ( Adwo) Diplomatie - october 2016 Maritim Security and Development in Africa 59

60 Les défis Photo ci-dessus : Photo satellite montrant en rouge les zones qui seraient impactées par une montée de 6 mètres du niveau de la mer. L Afrique fait partie des régions du monde dont les zones littorales et les deltas sont les plus exposés aux risques d inondations liées à l élévation du niveau des mers. ( NASA) Above: Satellite photo showing in red the zones that would be impacted by a 6-meter rise in sea level. Africa is among the regions of the world whose coastal areas and deltas are the most exposed to the risks of flooding related to rising sea levels. ( NASA) croissante que connaît ce continent. Selon la Division de la population des Nations Unies, le taux d urbanisation en Afrique, actuellement de 40 %, passera à 56 % d ici à 2050 (3). Cette urbanisation importante concernera fortement les grandes villes du littoral, dont Casablanca, Dakar, Conakry, Abidjan, Avec un littoral d environ km, le continent africain est riche en écosystèmes marins, mais également très exposé aux risques climatiques littoraux. Ce sont au total 32 pays côtiers d Afrique qui sont déjà touchés, ou qui risquent d être concernés à l avenir par l érosion des côtes ou les inondations. Accra, Lagos, Luanda, Maputo, Dar es Salam ou Alexandrie pôles économiques majeurs, mais aussi les villes côtières de taille moyenne ou petite. Au Nigéria, où l on s attend à une croissance de la population citadine parmi les plus rapides au monde, il s agira de 212 millions d habitants supplémentaires dans les villes d ici à 2050, dont une partie se retrouvera dans les agglomérations situées le long de la côte Atlantique notamment Lagos, dans un secteur de la côte ouest-africaine qui a été identifié comme étant parmi les plus exposés aux risques de montée du niveau de la mer (4). Cet afflux de population, qui est en partie dû aux problèmes environnementaux dans les zones rurales intérieures (sécheresses, dégradation des terres cultivables, raréfaction des ressources), accentue la pression The multiple factors of vulnerability in Africa With a coastline of roughly 26,000 km, the African continent is rich in marine ecosystems but also highly exposed to coastal climatic hazards. In all, 32 African coastal nations have already been impacted or risk being concerned in the future by the erosion of the coastlines or flooding that destroy major infrastructures and cause human loss and entail the shrinkage of the mangrove and its protective role against extreme hazards, the salinization of the soils and water resources essential for coastal agriculture or the deterioration of halieutic resources (2). Most of these countries have a very limited capability to adapt to these challenges. These phenomena, whether slow to evolve or having a sudden impact, affect the means of subsistence and physical safety of a growing number of people in a context of rapidly rising demographics and growing urbanization occurring on this continent. According to the Population Division of the United Nations, the rate of urbanization in Africa, currently at 40% will grow to 56%, by the year 2050 (3). This significant urbanization will heavily concern the large coastal cities including Casablanca, Dakar, Conakry, Abidjan, Accra, Lagos, Luanda, Maputo, Dar es Salam or Alexandria all major economic centers, but also medium or small size coastal cities. In Nigeria, where one of the fastest growing urban populations in the world is expected, 212 million additional inhabitants are expected in cities by 2050, some of which will be cities located along the Atlantic coast in particular Lagos, in a sector of the west African coast which has been identified as being among the most exposed to the risks of the rising sea level (4). This influx of population, which is in part due to environmental problems in inland rural areas (droughts, deterioration of arable land, and rarefaction of resources) accentuates the demographic pressure on coastal areas already subject to hazards and perhaps a source of new vulnerabilities. Variable impacts The impacts of rising sea levels and coastal hazards are not the same in cities or in rural areas. In large cities, the main challenge concerns the protection of the populations and infrastructures against destructive climatic events (flooding, extreme tides, erosion), that each year entail higher and higher costs, while the development of artificial environments on the coastline accelerates. In the Mediterranean, the development of tourism leads to the massive construction of recreational infrastructures on the coast (restaurants, hotels, sports complexes), often without planning for long term risks. In Casablanca, facilities in the recreational district along the coast are regularly flooded by extreme tides. In the long term, if no protective measures are introduced to hinder the backward shrinkage of 60 Diplomatie - octobre 2016 Sécurité maritime et développement en Afrique

61 Challenges démographique sur des zones littorales déjà soumises à des risques, et peut être source de nouvelles vulnérabilités. Des impacts variables Les impacts de la montée du niveau de la mer et des risques côtiers ne sont pas les mêmes en ville ou dans les zones rurales. Dans les grandes villes, le principal défi concerne la protection des populations et des infrastructures contre les événements climatiques destructeurs (inondations, marées extrêmes, érosion), qui entraînent chaque année des coûts de plus en plus élevés, alors même que l artificialisation du littoral s accélère. En Méditerranée, le développement du secteur touristique mène à la construction en masse d infrastructures de loisir sur la côte (restaurants, hôtels, complexes sportifs), souvent sans planification des risques à long terme. À Casablanca, les installations dans le quartier récréatif le long de côte sont régulièrement inondées par des marées extrêmes. À long terme, en l absence de mesures de protection pour freiner le recul de la côte, ce sont les quartiers résidentiels proches qui risquent d être touchés. Aboukir, près d Alexandrie, rencontre des problèmes similaires (5) ; au Mozambique, au Cameroun ou en Tanzanie, de nombreuses personnes risquent d être déplacées du fait d inondations (6). Dans d autres zones, sur la côte atlantique ou méditerranéenne, ou sur celle de la mer Rouge en Égypte, le secteur touristique même est menacé par l érosion des plages et la dégradation des récifs coralliens, constituant un défi majeur pour les économies locales majoritairement dépendantes du tourisme. Dans les zones côtières rurales, où, à la différence des populations citadines, les communautés sont souvent plus dépendantes des ressources et des écosystèmes naturels pour leur survie et pour la génération de revenus, les impacts des changements environnementaux sont d autant plus graves. Au Sénégal, par exemple (7), l érosion côtière, l avancée de la mer et la salinisation des sols et des nappes phréatiques dans les communautés rurales de Palmarin et de Ndiébène Gandiole ont entraîné la perte de nombreuses terres agricoles et une pénurie d eau. Certains villages ont disparu, engloutis par la mer, provoquant le déplacement forcé de leurs habitants. Des villages de pêcheurs ont été privés de leur activité principale avec la baisse des ressources halieutiques, due aussi bien aux effets du changement climatique qu à leur surexploitation. Ces changements ont poussé certaines familles de pêcheurs à migrer vers d autres zones côtières, parfois à l étranger. D autres ont préféré se reconvertir dans des emplois alternatifs, dans d autres régions rurales ou en ville, voire à l étranger. Des solutions à trouver Les impacts du changement climatique sur les moyens de subsistance et sur la sécurité humaine joueront un rôle croissant de catalyseur de migrations, qu elles soient forcées (en cas de catastrophes ou de perte d habitat) ou plutôt choisies (pour diversifier les revenus, se reloger dans des zones plus sûres). Face à ce constat, les États devront trouver des solutions efficaces à de nombreux problèmes pressants : l urgence de mettre en place des actions de réduction des risques de catastrophes et d adaptation au changement climatique pour réduire les migrations forcées ; la pression démographique dans les villes peu préparées à répondre aux risques naturels croissants et aux besoins dus à cet afflux : emplois, services de santé, accès à l éducation ou intégration des nouveaux arrivants ; With a coastline of roughly 26,000 km, the African continent is rich in marine ecosystems but also highly exposed to coastal climatic hazards. In all, 32 African coastal nations have already been impacted or risk being concerned in the future by the erosion of the coastlines or flooding. the coastline, nearby residential areas risk being impacted. Aboukir, near Alexandria, encounters similar problems (5); in Mozambique, Cameroon or Tanzania, many people risk being displaced due to floods (6). In other areas on the Atlantic or Mediterranean coasts, or that of the Red Sea in Egypt, the tourism sector itself is threatened by the erosion of the beaches and deterioration of coral reefs, constituting a major challenge for local economies for the most part dependent on tourism. In rural coastal areas, where unlike urban populations, community populations are more often dependent on natural resources and ecosystems for their survival and the generation of revenue, the impacts of environmental changes are all the more serious. In Senegal, for example (7), coastal erosion, the advance of the sea and salinization of soils and water tables in the rural communities of Palmarin and Ndiébène Gandiole have led to the loss of many agricultural lands and a lack of water. Some villages have disappeared, swallowed up by the sea, causing the forced displacement of their inhabitants. Fishing villages have been deprived of their main activity with the drop in halieutic resources due Photo ci-dessus : À l image d Abidjan, en Côte d Ivoire, ou d Alexandrie, en Égypte, la capitale économique du Nigéria, Lagos, est l une des villes africaines les plus vulnérables au risque de la hausse du niveau de la mer. ( Igor Grochev) Above: Like Abidjan, Ivory Coast, or Alexandria, Egypt, the economic capital of Nigeria, Lagos, is one of the African cities most vulnerable to the risk of rising sea levels. Igor Grochev) Diplomatie - october 2016 Maritim Security and Development in Africa 61

62 Les défis as much to the effects of climate change as their overexploitation. These changes have pushed some fishing families to migrate to other coastal areas, sometimes in foreign countries. Others have preferred to convert to alternative jobs in other rural areas or in cities, or abroad. Photo ci-dessus : Marché sur le port de Banjul, en Gambie. La capitale de la Gambie, située sur l île Sainte-Marie, à l embouchure du fleuve Gambie, est devenue tellement instable que des travaux importants ont été entrepris pour éviter une séparation d avec le continent. ( Anton Ivanov) Above: Market in the port of Banjul, Gambia. The capital of Gambia, located on the island of Sainte- Marie, at the mouth of the Gambia River, has become so unstable that significant work has been undertaken to avoid separation from the continent. ( Anton Ivanov) l absence de voies légales de migration internationale pour les personnes touchées par les changements environnementaux, qui se retrouvent dans des situations très précaires et risquent parfois leur vie pour atteindre un autre continent. Les États devront également savoir saisir les opportunités, notamment celles offertes par la migration, qui peut jouer un rôle positif important dans le développement et l adaptation au changement climatique au niveau local (8). Daria Mokhnacheva * L auteur remercie pour leur aide Dina Ionesco, chef de la division Migration, Environnement et Changement climatique (OIM), Françoise Gaill (INEE/CNRS), Guigone Camus (EHESS/ plate-forme Océan et Climat) et Christine Causse (Nausicaá). Notes (1) 5 e rapport d évaluation du GIEC, chapitre 5 : «Systèmes côtiers et basses terres littorales» ( assessment-report/ar5/wg2/wgiiar5-chap5_final.pdf). (2) 5 e rapport d évaluation du GIEC, chapitre 22 : «Afrique» ( FINAL.pdf) ; A. C. Ibe et L. F. Awosika, «Sea level rise impact on African coastal zones», in A change in the weather: African perspectives on climate change, African Centre for Technology Studies, Nairobi, 1991 ( (3) UNDESA, World Urbanization Prospects: The 2014 Revision, Highlights, 2014 ( wup/publications/files/wup2014-highlights.pdf). (4) O. A. Sunday et A. I. Ajewole, «Implications of the Changing Pattern of Landcover of the Lagos Coastal Area of Nigeria», American-Eurasian Journal of Scientific Research, 2006 ( org/aejsr/1(1)06/7.pdf) ; A. O. Amosu et al., «Impact of climate change and anthropogenic activities on renewable coastal resources and biodiversity in Nigeria», Journal of Ecology and the Natural Environment, vol. 4, n o 8, mai 2012 ( org/journal/jene/article-full-text-pdf/ ). (5) Assessment and Strategy Development to Respond to Sea Level Rise on Human Mobility in Abu Qir, Egypt, Technical Report, Le Caire, International Organization for Migration, (6) S. Brown et al., Sea-Level Rise and Impacts in Africa, 2000 to 2100, Southampton, University of Southampton, (7) M. Touré Thiam et J. Crowley, Impact des changements environnementaux sur les migrations humaines. Étude de cas : Sénégal et Côte d Ivoire, Paris, UNESCO, (8) D. Ionesco et al., Atlas des migrations environnementales, Paris, Presses de Sciences Po, 2016 ; IOM Outlook on Migration, Environment and Climate Change, Genève, International Organization for Migration, Solutions to be found The impacts of climate change on the means of subsistence and on human safety will play an increasing role as a catalyst of migration, whether forced (in case of disasters or loss of habitat) or chosen (to diversify revenues, live in safer areas). In the face of this situation, States will have to find effective solutions to many pressing problems: the urgent need for actions that mitigate the risks of disasters and spur adaptation to climate change in order to reduce forced migrations; demographic pressure in cities little prepared to respond to growing natural hazards and to the needs entailed by this influx: jobs, health services, access to education or integration of new arrivals; absence of legal channels of international migration for the people impacted by environmental changes who find themselves in highly precarious situations and who sometimes risk their life to reach another continent. The States must also know how to seize opportunities, in particular those offered by migration, that can play an important positive role in development and adaptation to climate change at the local level (8). * The author thanks Dina Ionesco, head of the Migration, Environment and Climate Change Division (IOM), Françoise Gaill (INEE/CNRS), Guigone Camus (EHESS/Ocean and Climate platform) and Christine Causse (Nausicaá). Notes Daria Mokhnacheva (1) 5th assessment report of the IPCG, chapter 5: Coastal Systems and Lower Coastal Lands ( assessment-report/ar5/wg2/wgiiar5-chap5_final.pdf). (2) 5th assessment report of the IPCG, chapter 22: Africa ( pdf) ; A. C. Ibe andt L. F. Awosika, Sea level rise impact on African coastal zones, in A change in the weather: African perspectives on climate change, African Centre for Technology Studies, Nairobi, 1991 ( (3) UNDESA, World Urbanization Prospects: The 2014 Revision, Highlights, 2014 ( wup/publications/files/wup2014-highlights.pdf). (4) O. A. Sunday and A. I. Ajewole, Implications of the Changing Pattern of Landcover of the Lagos Coastal Area of Nigeria, American- Eurasian Journal of Scientific Research, 2006 ( aejsr/1(1)06/7.pdf) ; A. O. Amosu et al., Impact of climate change and anthropogenic activities on renewable coastal resources and biodiversity in Nigeria, Journal of Ecology and the Natural Environment, Vol. 4(8), May 2012 ( org/journal/jene/article-full-text-pdf/ ). (5) Assessment and Strategy Development to Respond to Sea Level Rise on Human Mobility in Abu Qir, Egypt, Technical Report, Cairo, International Organization for Migration, (6) S. Brown et al., Sea-Level Rise and Impacts in Africa, 2000 to 2100, Southampton, University of Southampton, (7) M. Touré Thiam and J. Crowley, Impact des changements environnementaux sur les migrations humaines. Étude de cas : Sénégal et Côte d Ivoire, Paris, UNESCO, (8) D. Ionesco et al., Atlas of environmental migrations, Paris, Presses de Sciences Po, 2016 ; IOM Outlook on Migration, Environment and Climate Change, Geneva, International Organization for Migration, Diplomatie - octobre 2016 Sécurité maritime et développement en Afrique

63 Challenges analyse Les enjeux des aires marines protégées en Afrique Alors que la superficie des aires marines protégées africaines augmente depuis les années 2000, la stricte logique de conservation a évolué afin de devenir compatible avec le maintien des activités économiques traditionnelles (pêche) et le développement de nouvelles, comme le tourisme. A lors que près de 12 % des terres de la planète bénéficient d un statut de protection, seulement 2,07 % des océans et 5,27 % des eaux sous la juridiction des États sont concernés. Ce résultat encore modeste progresse chaque année et, aujourd hui, on enregistre plus de 5000 aires marines protégées (AMP). Ces structures, promues au niveau international par les parties prenantes aux conférences sur la biodiversité (CBD), sont reconnues par l UICN (1) comme un outil efficace de protection des milieux naturels marins compris en The Implications of Marine Protected Areas in Africa Although the surface area of African marine protected areas has been increasing since 2000, the strict logic of conservation has evolved to become compatible with the maintenance of traditional economic activities (fishing) and the development of new activities like tourism. While nearly 12% of the earth s land mass has protected status, only 2.7% of the oceans and 5.27% of the waters under the jurisdiction of States are concerned. This still modest result is progressing each year, and currently there are over 5,000 marine protected areas (MPA). These structures, promoted on an international level Par Isabelle Delumeau, professeur agrégé d histoire à l École navale. By Isabelle Delumeau, Associate Professor of History at École Navale. analysis Photo ci-dessus : Zone de coraux dans l aire marine protégée de la réserve naturelle de Ras Mohamed, dans la mer Rouge égyptienne. ( Richard Whitcombe) Above: Coral area in the marine protected area of the natural reserve of Ras Mohamed, in the Egyptian Red Sea. ( Richard Whitcombe) Diplomatie - october 2016 Maritim Security and Development in Africa 63

64 Les défis Photo ci-contre : Bateaux de pêche traditionnelle sur la plage de Kayar, troisième port de pêche artisanale du Sénégal. Douze ans après sa création, l aire marine protégée (AMP) de Kayar est confrontée à un problème de gestion, à l image de nombreuses autres AMP de la sous-région. ( Fred bb) Opposite: Traditional fishing boats on the beach of Kayar, third largest artisanal fishing port of Senegal. Twelve years after its creation, the marine protected area (MPA) of Kaya is confronted with a management problem, like many other MPAs of the sub-region. ( Fred bb) tant qu écosystèmes, qui englobe également les particularités culturelles et historiques. C est le Traité sur le droit de la mer de Montego Bay, signé en 1982 et qui fait obligation aux États côtiers de veiller à la défense des milieux naturels marins, ainsi que la Convention sur la diversité biologique de 1992 qui constituent le cadre légal dans lequel les États établissent leurs AMP. En 2004, un nouveau sommet international a introduit la notion qui a donné un nouvel élan à la création de telles structures. En effet, la stricte logique de conservation souvent appliquée à une espèce en particulier s est transformée et a ouvert la voie à des politiques qui font de la préservation des environnements naturels une priorité compatible avec le maintien des activités économiques traditionnelles, dont la pêche est la plus fréquente, mais aussi avec le développement de nouvelles Les experts qui se sont penchés sur le cas de l AMP de Mnazi Bay-Ruvuma Estuary Marine Park [ ] constatent un échec relatif du processus de reconversion, faute d adhésion de la part de la population, en grande partie en raison d une gestion très bureaucratique, loin des préoccupations quotidiennes des gens. comme le tourisme. Les États africains dans leur immense majorité, comme la plupart des pays en développement, se sont saisis de cet outil et prennent leur part dans le processus décidé lors de la Conférence sur la biodiversité de 2006, selon laquelle, avant 2012, 10 % des superficies marines sous juridiction nationale devaient être protégées dans le cadre des AMP. On est encore loin d atteindre ce chiffre, mais les efforts y tendent. Pour leur part, les États africains (2) ont placé sous ce statut 8,4 % des eaux étant sous leur juridiction : c est moins que la moyenne mondiale, mais près de deux fois plus que celle des pays les moins avancés. La superficie concernée augmente, même si l élan du début des années 2000 a tendance à s essouffler. Les milieux qu il faut protéger en priorité, selon les recommandations des CBD, sont bien représentés sur les côtes africaines ; on distinguera les zones coralliennes, surtout en Afrique de l Est et en mer Rouge, les herbiers marins, les zones des grands upwellings côtiers comme le courant du Benguela, mais aussi l écorégion des courants des Canaries et de Guinée ainsi que les zones estuariennes et les mangroves. La grande majorité des AMP africaines correspond au type VI défini par l UICN, c est-à dire qu elles permettent les activités d extraction. Un enjeu pour le développement des régions littorales Les AMP reposent sur un zonage des milieux à protéger dont le cœur est constitué par un espace où sont interdites by stakeholders at conferences on biodiversity (CBD), are acknowledged by the IUCN(1) to be an effective tool in protecting natural marine environments as ecosystems and one which also includes cultural and historical particularities. It is the Montego Bay Law of the Sea Treaty signed in 1982 that made it mandatory for coastal States to ensure the defense of marine natural environments and the 1992 Convention on Biological Diversity that form the legal framework in which States establish their MPAs. In 2004 a new international summit introduced the notion that spurred the creation of such structures. The strict notion of preservation often applied to a species in particular was transformed. This paved the way for policies that make the preservation of natural environments a priority compatible with the maintenance of traditional economic activities, of which fishing is the most frequently occurring, but also with the development of new activities such as tourism. The great majority of African States, like most developing countries, have seized upon this this tool and take their part in the process decided upon during the 2006 Biodiversity Conference according to which 10% of the marine surface areas under national jurisdiction should be protected under an MPA before We are still far from achieving this objective, but efforts are being made. The African States (2) have assigned this status to 8.4% of the waters under their jurisdiction: this is less than the world average, but more than twice that of the least advanced countries. The surface area concerned is increasing, even if the enthusiastic impetus of the early years of the 21st century is beginning to lose steam. The environments to be protected in priority, according to the recommendations of the CBDs, are well represented along the African coasts; there are the coral reef zones, especially in East African and in the Red Sea, the seagrass beds, the zones of the large coastal upwellings such as the Benguela current, but also the ecoregion of the Canary Island and Guinea currents along with estuary zones and mangroves. Most of the African MPAs are type VI as defined by the IUCN; that is they allow extraction activities. Implications for the Development of the Coastal Regions MPAs are based on the zoning of the environments to protect, the heart of which is composed of a space where all forms of extraction are prohibited: it is from there juvenile 64 Diplomatie - octobre 2016 Sécurité maritime et développement en Afrique

65 Challenges toutes formes d extraction ; à partir de là, les juvéniles partent recoloniser le milieu. Les AMP sont décrites par les instances internationales et les ONG et sont perçues par les décideurs politiques comme de bons moyens de développer économiquement et à long terme les régions littorales. L activité visée est avant tout la pêche, et notamment la pêche artisanale, secteur clé dans nombre d États africains. Les pays concernés sont parmi les moins développés du continent : ils partagent une forte croissance démographique et la crise actuelle a tendance à faire accroître la pression sur une ressource facilement accessible. Les pays riverains du golfe de Guinée sont tout particulièrement concernés puisqu on y compte aujourd hui plus de 10 % de la population active engagée dans la pêche artisanale : senneurs de plage, piroguiers ou collecteurs de crustacés et de mollusques. Au Sénégal, le secteur emploie 17 % de la main-d œuvre. De plus, les ressources halieutiques représentent 70 % des apports en protéines. Dans ces pays, les AMP ont été la plupart du temps imposées par le gouvernement central et, dans certains cas, les instances locales traditionnelles de gestion de la ressource ont été systématiquement écartées du processus : c est particulièrement vrai au Sénégal, aux Comores, au Togo, en Tanzanie, en Gambie et en Guinée- Bissau. Ainsi, dans l AMP de Kayar, au Sénégal, les habitants dénoncent une confiscation de la gestion au profit d un groupe familial. Ailleurs, les assemblées traditionnelles, souvent désignées sous le nom de «conseil de plage» sont, de fait, investies de la régulation des activités halieutiques ; ces systèmes de cogestion semblent donner d assez bons résultats, comme c est le cas dans l AMP des îles de Bolama-Bijagos, en Guinée- Bissau, mais aussi dans celle des Quirimbas, au nord-est du Mozambique. Le tourisme comme vecteur de développement? Les études s accordent pour conditionner le succès de l AMP à la baisse de la pression sur les ressources halieutiques. Il faut alors que les populations locales puissent trouver des activités de remplacement, au moins aussi rémunératrices que la pêche. C est le tourisme qui produit les meilleurs résultats, mais cela nécessite d importants investissements qui sont souvent hors de portée des communautés locales. On citera le cas exemplaire de l AMP de Chumbe. Elle couvre une petite surface de 0,5 km 2 autour de l île corallienne de Chumbe, tout près de Zanzibar. Cette AMP est gérée par un opérateur privé dont l objectif a été de développer un modèle de parc capable de se financer afin de promouvoir la protection de l environnement marin et le développement durable. L AMP ainsi créée appartient à la seconde catégorie selon la classification de l UICN (3). La somme investie au départ a été importante, soit plus de 1,5 million de dollars en 2005, ce qui est très supérieur à la moyenne estimée. Les résultats ont été à la hauteur : la population riveraine a largement bénéficié des processus de reconversion, les pêcheurs sont devenus park rangers et le tourisme a ouvert Experts that studied the case of the MPA of Mnazi Bay-Ruvuma Estuary Marine Park [ ] note a relative failure of the reconversion process caused by the lack of acceptance by the population, mainly due to highly bureaucratic management, far from the daily concerns of the people. fish leave to recolonize the environment. MPAs are described by international bodies and NGOs and perceived by political decision-makers as a good instrument for the long term economic development of the coastal regions. The activity concerned is above all fishing, in particular artisanal fishing, a key sector in many African countries. The countries concerned are among the least developed of the continent: They all show strong demographic growth and the current crisis has a tendency to increase pressure on an easily accessible resource. The countries bordering the Gulf of Guinea are more particularly concerned since more than 10% of the active population is engaged in artisanal fishing: beach seiners, canoeists or crustacean and mollusk collectors. In Senegal, the sector employs 17% of the country s labor force. Moreover, halieutic resources represent 70% of protein intake. In these countries, most of the time MPAs were imposed by the central government and, in some cases, the traditional local resource management bodies were systematically left out of the process: this is particularly true in Senegal, the Comoros, Togo, Tanzania, Gambia and Guinea-Bissau. In the MPA of Kayar in Senegal, inhabitants denounce the confiscation of management to the benefit of a family corporation. Elsewhere, traditional assemblies, often designated under the name beach councils are involved de facto in the regulation of halieutic activities; these co-management systems appear to give good results, as is the case in the MPA of the Bolamo- Bijagos islands in Guinea-Bissau, but also that of the Quirimbas, north east of Mozambique. Photo ci-contre : Réserve naturelle de Hoop, dans la province occidentale du Cap, en Afrique du Sud. Cette réserve naturelle est associée à une aire marine protégée créée en janvier 1985 et couvre un espace de 253 km² incluant le littoral côtier. ( Gossipguy) Opposite: Hoop Nature Reserve in the western province of the Cape in South Africa. This nature reserve is associated with a marine protected area created in January 1985 and covers a space measuring 253 square kilometers including the coastline. ( Gossipguy) Diplomatie - october 2016 Maritim Security and Development in Africa 65

66 Les défis Photo ci-dessus : Vue aérienne de l île de Chumbe et ses récifs coralliens, située à quelques kilomètres de l île de Zanzibar, en Tanzanie. Géré par l organisme privé à but non lucratif CHICOP, ce premier parc marin du pays a été enregistré comme aire marine protégée en 1994 et son objectif est de créer un modèle de gestion de parc financièrement et écologiquement durable. ( Rob) Above: Aerial view of the island of Chumbe and its coral reefs, located a few kilometers from the island of Zanzibar in Tanzania. Managed by the private, not-for-profit organization CHICOP, this first marine park in the country was registered as a marine protected area in 1994 and its aim is to create a management model of a financially and ecologically sustainable park. ( Rob) de nouvelles perspectives. Par ailleurs, il faut noter le rôle pédagogique de l AMP, qui avait reçu à la fin de l année 2014 plus de élèves et enseignants. Cependant, ce modèle ne semble pas facilement reproductible. Les experts qui se sont penchés sur le cas de l AMP de Mnazi Bay-Ruvuma Estuary Les pays du Maghreb constituent un groupe à part, même si le Maroc semble s impliquer davantage dans le processus. Le nombre d AMP est très réduit et les projets en cours avancent laborieusement, essentiellement sous la pression des États partenaires de la rive nord de la Méditerranée. Marine Park, qui s étend sur 650 km 2 dans le Sud de la Tanzanie, sur la rive nord de la rivière Ruvuma, constatent un échec relatif du processus de reconversion, faute d adhésion de la part de la population, en grande partie en raison d une gestion très bureaucratique, loin des préoccupations quotidiennes des gens. La situation est différente et bien moins conflictuelle dans les pays africains dont la côte est marquée par de très faibles densités de peuplement. C est le cas de la Namibie et du Soudan et, partiellement, de la Mauritanie. Chacun de ces États développe d assez vastes AMP dont le but est avant tout de servir de base à un développement touristique. Parfois, le parc marin est adossé, comme en Namibie, à un parc terrestre bien implanté. Les AMP à vocation touristique se retrouvent également aux Seychelles et de plus en plus à Madagascar, où elles rencontrent l intérêt des ONG et des financeurs internationaux. Le cas de Tourism as a vector of development Studies agree that the success of the MPA is conditioned by decreased pressure on halieutic resources. The local populations must then find replacement activities at least as profitable as fishing. Tourism appears to produce the best results, but this requires significant investments often out of reach of local communities. We could cite the exemplary case of the MPA of Chumbe. It covers a small surface area of 0.5 square kilometers around the coral island of Chumbe, near Zanzibar. This MPA is managed by a private operator whose aim is to develop a model of park capable of financing itself in order to promote the protection of the marine environment and sustainable development. The MPA thus created belongs to the second category according to the IUCN classification (3). The amount invested at the outset was significant, over 1.5 million dollars in 2005, which is well above the estimated average. But results were in keeping with the investment: the neighboring population widely benefited from the reconversion process, fishermen became park rangers and tourism opened up new perspectives. Furthermore, the pedagogical role of the MPA should also be noted: over 6,300 students and 1,100 teachers visited the area in However, this model does not appear to be easily reproducible. Experts that studied the case of the MPA of Mnazi Bay-Ruvuma Estuary Marine Park, covering 650 square kilometers in southern Tanzania, on the north bank of the Ruvuma River, note a relative failure of the reconversion process caused by the lack of acceptance by the population, mainly due to highly bureaucratic management, far from the daily concerns of the people. The situation is different and much less conflictual in African countries whose coast has a low population density. This is the case of Namibia and Sudan, and partially Mauritania. Each of these States is developing vast MPAs whose aim is above all to serve as a base for the development of tourism. Sometimes the marine park is set up alongside a well establish land park as in Namibia. MPAs with a touristic vocation can also be found in the Seychelles and increasingly in Madagascar, where they garner the interest of NGOs and international financiers. The case of Egypt is very comparable. Except for an MPA located in the Mediterranean and whose operation seems difficult, Egypt has focused its efforts on the coast of the Red Sea, mostly exploited for touristic purposes. The conservation of coral reefs, despite the increasingly frequented sites, is an imperative in order to maintain the activity which was estimated at nearly three billion euros. Among the five Egyptian MPAs established in the Red Sea, the most wellknown, Ras Mohamed, is the only one to generate direct revenues that then are used for the management of all the protected areas of the country. The case of South Africa is original. The western and eastern maritime facades differ significantly. The Atlantic coast is a rich environment, able to support industrial fishing but the population density along the coasts is low and the interest of developing MPAs there is less attractive than for the eastern coast that features poorer and more fragile environments but whose resources are subject to greater pressure due to the high population density. In this region, the government intends to use marine protected areas to establish a balance between social groups, a priority of post-apartheid political action. Finally, 66 Diplomatie - octobre 2016 Sécurité maritime et développement en Afrique

67 Challenges l Égypte est très comparable. À l exception d une AMP située en Méditerranée et dont le fonctionnement semble difficile, l Égypte a fait porter ses efforts sur le littoral de la mer Rouge, largement exploité à des fins touristiques. La conservation des récifs coralliens, malgré l augmentation de la fréquentation, est un impératif afin de maintenir l activité qui a été évaluée à près de trois milliards d euros. Parmi les cinq AMP égyptiennes implantées en mer Rouge, la plus connue, Ras Mohamed, est la seule à générer des revenus directs qui servent ensuite à la gestion de l ensemble des aires protégées du pays. Le cas de l Afrique du Sud est original. Les façades maritimes occidentales et orientales présentent des visages très différents. La côte atlantique est un milieu riche, apte à supporter une pêche industrielle, mais les littoraux sont peu peuplés et l intérêt d y développer des AMP est moins évident que sur la côte orientale, qui présente des milieux plus pauvres et plus fragiles, mais dont les ressources sont soumises à une plus forte pression du fait des fortes densités de peuplement. Dans cette région, le gouvernement compte se servir des aires marines protégées pour établir l équité entre les groupes sociaux, priorité de l action politique postapartheid. Enfin, les pays du Maghreb constituent un groupe à part, même si le Maroc semble s impliquer davantage dans le processus. Le nombre d AMP est très réduit et les projets en cours avancent laborieusement, essentiellement sous la pression des États partenaires de la rive nord de la Méditerranée. On peut expliquer ce relatif désintérêt de plusieurs façons. Premièrement, la pêche côtière y est une activité en déclin constant, qui contribue faiblement au PIB ainsi qu à l emploi. Ensuite, la région littorale est densément peuplée et la concurrence spatiale est rude entre les différentes activités. Les gouvernements ne semblent pas pressés d ajouter de lourdes contraintes susceptibles d entraver le développement économique. Quel avenir pour les AMP en Afrique? Le bilan est loin d être idyllique, les AMP ne sont certainement pas la panacée et la dégradation des milieux naturels se poursuit malgré les efforts entrepris. Les experts chargés d évaluer l efficience des structures plaident pour une meilleure gouvernance qui passe par davantage d implication des populations locales et une meilleure formation aux enjeux. Les États peinent à faire respecter le zonage faute d un balisage efficace et d agents en nombre suffisant. En effet, Les AMP sont, en général, sous-financées, même si cette situation n est pas propre aux États africains. Elles connaissent pour nombre d entre elles le destin des structures destinées à enclencher le développement économique, mais, plaquées sur la réalité locale sans en tenir vraiment compte, elles échouent trop souvent à remplir leurs objectifs. Isabelle Delumeau the Maghreb countries are a group apart, even if Morocco appears to be more involved in the process. The number of MPAs is very low and the projects underway are progressing slowly, essentially under the pressure of the partner States of the northern edge of the Mediterranean. There are several reasons for this relative disinterest. First, coastal fishing is a constantly declining activity that contributes very little to the GDP and to employment. Then the coastal region is densely populated and spatial competition is fierce between the different activities. The governments do not appear to be in a hurry to add heavy constraints likely to hinder economic development. What future for MPAs in Africa? The situation is far from idyllic, the MPAs are certainly not the ultimate answer and the deterioration of the natural environments continues despite the efforts undertaken. The experts in charge of assessing the efficiency of the structures plead for improved governance which requires more involvement by local populations and better training on the stakes involved. The States are having trouble ensuring compliance with the zoning due to a lack of effective beaconage and a sufficient number of agents. Generally, the MPAs are under-financed even if this situation is not specific to the African States. Many of them experience the destiny of structures designed to trigger economic development, but when faced with the local reality which they do not take into consideration, they too often fail to fulfill their objectives. Isabelle Delumeau Photo ci-dessus : Bateau traditionnel naviguant dans le parc national du Banc d Arguant, en Mauritanie. D une superficie de ha, cette aire marine protégée créée en 1976 est la plus grande aire protégée côtière et marine d Afrique de l Ouest. La population autochtone s adonne essentiellement à la pêche artisanale, mais également au pastoralisme, au commerce et à l écotourisme. ( Christine Vaufrey) Above: Traditional boat navigating in Banc d Arguin national park in Mauritania. With a surface area of 1,170,000 hectares, this marine protected area created in 1976 is the largest coastal and marine protected area in West Africa. The native population essentially practices artisanal fishing, but also extensive animal husbandry, commerce and eco-tourism. ( Christine Vaufrey) Notes (1) L Union internationale pour la conservation de la nature ( est la principale ONG vouée à la préservation de l environnement. Ses recommandations sont à l origine de la notion de développement durable. (2) Cette étude inclut le Cap-Vert, les Comores, Madagascar et les Seychelles. (3) Il s agit d une zone dans laquelle toute exploitation des ressources est interdite. Notes (1) International Union for the Conservation of Nature ( is the main NGO dedicated to preserving the environment. Its recommendations are the origin of the notion of sustainable development. (2) This study includes Cape Verde, the Comores, Madagascar and the Seychelles. (3) This is a zone in which any exploitation of resources is prohibited Diplomatie - october 2016 Maritim Security and Development in Africa 67

68 Les défis analyse Par Daniel Pauly, biologiste des pêches, professeur à l université de Colombie-Britannique à Vancouver (Canada). By Daniel Pauly, fisheries biologist, professor at the University of British Colombia, Vancouver (Canada). analysis Photo ci-dessus : Navire taïwanais suspecté de pêche illégale au large de la Sierra Leone. Une limitation plus efficace de cette activité illicite pourrait aider à l essor des bateaux de pêche ouest-africains, favoriser la création d emplois et générer 3,3 milliards de dollars de chiffre d affaires si ces pays pêchaient et exportaient euxmêmes leur poisson. ( DoD/US Coast Guard) Above: Taiwanese ship suspected of illegal fishing off the coast of Sierra Leone. More effective limitation of this illicit activity could help boost the number of West African fishing boats, promote the creation of jobs and generate 3.3 billion dollars in revenues if these countries fished and exported the fish themselves. ( DoD/US Coast Guard) La pêche illégale le long de la côte ouest-africaine Si l ampleur et l impact environnemental de la pêche illégale sont largement reconnus, le manque à gagner que cette activité représente pour les États africains et les moyens de le résorber sont eux plus difficiles à identifier. E n raison de la surexploitation des mers européennes, les ressources marines vivantes de l Afrique de l Ouest, du Maroc, au nord, jusqu à la Namibie, au sud, ont commencé à être exploitées dans l entre-deux guerre par des navires industriels européens, notamment français. Cependant, cette pêche étrangère s opérait sous la forme d incursions isolées. Ainsi, elle avait dans l ensemble un faible impact. La pêche ouest-africaine demeurait principalement domestique et était exploitée par de petits pêcheurs, c està-dire une pêche artisanale de subsistance. La Seconde Guerre mondiale a permis de reformer les stocks dans les eaux européennes, mais la période d après-guerre a rapidement conduit Illegal Fisheries along West African Coast While the extent and environmental impact of illegal fishery are widely recognized, the shortfall of this activity for African states and the means to curtail it are more difficult to identify. D ue to the overexploitation of European seas, the fisheries resources of West Africa, from Morocco in the North to Namibia in the South began to be exploited between the two World Wars by European industrial vessels, e.g., from France. However, this foreign fishing occurred in the form of isolated incursions. Thus, they had little overall impact, and West African fisheries remained mainly domestic, and operated by small-scale, i.e., artisanal and 68 Diplomatie - octobre 2016 Sécurité maritime et développement en Afrique

69 Challenges à la réémergence d une capacité industrielle de pêche excessive et à nouveau à la surexploitation des ressources halieutiques de l Atlantique nord. Les origines du phénomène Par conséquent, les navires français, espagnols, portugais et d autres pays de l Europe de l Ouest ont commencé à opérer en Afrique de l Ouest, utilisant comme bases des ports dans leurs colonies ou anciennes colonies. En outre, entre la fin des années 1950 et les années 1970, une succession d études scientifiques, notamment l «étude guinéenne sur le chalutage», internationalement reconnue, a identifié le long de la côte ouest-africaine des ressources de poissons de fond qui pouvaient être exploitées par les chalutiers industriels. Soudain, ce fut la ruée. Des chalutiers originaires de divers pays européens sont venus toujours plus nombreux pour exploiter les ressources marines de l Afrique de l Ouest, à tel point que, au bout de quelques années, les navires de pêche industrielle européens remontaient plus de poisson que les petits pêcheurs locaux. subsistence fishers. The Second World War allowed a rebuilding of the stocks in European waters, and the post-war period quickly led to the reemergence of excess industrial fishing capacity and the renewed overexploitation of North Atlantic fisheries resources. The Origins of the Phenomenon As a consequence, the French, Spanish, Portuguese and other Western European vessels began operating in West Africa, often using ports in their colonies or former colonies as bases. As well, from the late 1950s to the 1970s, a succession of scientific surveys, notably the international Guinean Trawling Survey identified bottom fish resources all along the West African coast that could be exploited by industrial trawlers, and soon the rush was on. Bottom trawlers originating from a variety of European countries came in increasing numbers to exploit West African fisheries resources, to the extent that within a few years, more fish were extracted by European industrial fishing vessels than by local smallscale fishers. En raison de la surexploitation des mers européennes, les ressources marines vivantes de l Afrique de l Ouest, du Maroc, au nord, jusqu à la Namibie, au sud, ont commencé à être exploitées dans l entre-deux guerre par des navires industriels européens. Certaines flottes de pêche étaient prétendument des entreprises conjointes, mais, en réalité, leurs partenaires africains ne l étaient que sur le papier. Un seul pays africain, le Ghana, a réussi dans les années 1960 à établir une véritable flotte industrielle nationale. Cependant, lorsque la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer a été achevée au début des années 1980, la flotte du Ghana a dû être rapatriée, les pays dans lesquels elle opérait ayant commencé à déclarer des zones économiques exclusives (ZEE) et à réclamer le paiement de frais d accès. Le Ghana n avait pas les moyens de payer les sommes exigées en devise forte pour accéder aux ressources des ZEE des autres pays. En revanche, l Union européenne, elle, le pouvait. Ainsi commença une longue période d accès subventionné par l UE aux ressources de pêche de l Afrique de l Ouest pour les Français, les Espagnols, ainsi que d autres flottes. Avec eux, vint également le temps des pêches illégales nous entendons par pêche illégale toute pêche dans la ZEE d un pays donné sans accord d accès et sans paiement d une taxe, habituellement égale à 5 % de la valeur des prises du navire. Divers pays européens ont commencé à pêcher illégalement à cette époque, notamment l Espagne, dont les navires débarquaient leurs prises massives à leur base de Las Palmas, aux îles Canaries, avant de les réexporter vers le reste de l Europe. Some of the fishing fleets were supposedly joint ventures, but their African partners were participants in name only. Only one African country - Ghana - succeeded in the 1960s in establishing a truly domestic industrial fleet, which operated all along the West African coast and beyond. However, when the Convention of the Law of the Seas was completed, in the early 1980s, Ghana s foreign fleet had to be repatriated when the countries in which it was operating began to declare Exclusive Economic Zones (EEZ), and to require payment of access fees. Ghana could not afford the hard currency payment requested to access the resources in the EEZ of other countries. The European Union, however, could and so began a long period of the EU subsidizing access to West African fisheries resources by French, Spanish and other fleets. What also began are illegal fisheries - if we define illegal fisheries as fishing in the EEZ of a given country without an access agreement, and without the payment of a fee, usually Photo ci-dessus : Des femmes mauritaniennes nettoient le poisson sur une plage de Nouakchott. En février 2016, le président mauritanien et son homologue sénégalais ont lancé une initiative mondiale pour une plus grande transparence et équité dans le secteur de la pêche, afin de combattre la surpêche et la pêche illicite. ( Attila Jandi) Above: Mauritanian women clean fish on a beach of Nouakchott. In February 2016, the Mauritanian President, and his Senegalese counterpart, launched a world initiative for greater transparency and equity in the fishing sector in order to combat excess and illicit fishing. ( Attila Jandi) Diplomatie - october 2016 Maritim Security and Development in Africa 69

70 Les défis Photo ci-contre : Le 20 mars 2016, un membre ghanéen de l équipe d arraisonnement de la marine, lors d un exercice de lutte contre la pêche illégale dans le cadre des exercices «Obangame/ Saharan Express 2016». Entre le 28 août et le 1 er septembre 2016, une opération conduite par la Commission sous-régionale des pêches (CSRP) a permis de contrôler plus de 80 bateaux de pêche et de découvrir 14 cas d infractions, dont deux navires industriels chinois pris en flagrant délit de pêche illégale au large de la Guinée et condamnés à une amende totale de 3 millions d euros. ( US Navy/Luis R. Chavez Jr) Opposite: On 20th March, 2016, a Ghanaian member of the Navy s ship-stopping and examination team, during an exercise in the fight against illegal fishing as part of the Obangame/Saharan Express 2016 exercises. Between August 28 and September 1st, 2016, an operation led by the Sub-regional Fishing Commission allowed over 80 fishing boats to be examined and led to the discovery of 14 cases of violations, including two industrial Chinese ships caught fishing illegally off the coast of Guinea and sentenced to pay a total fine of 3 million euros. ( US Navy/Luis R. Chavez Jr) L arrivée de nouveaux acteurs Cependant, dans les années 1990, d autres acteurs commencèrent à opérer en Afrique de l Ouest, notamment la Russie, qui poursuivit l aventure de l ancienne Union soviétique au large des côtes de Guinée équatoriale, de la Namibie et ailleurs, ainsi que la Chine et d autres pays d Asie du Sud-Est. Leur modus operandi consistait à acheter l accès à un pays, depuis lequel ils pouvaient faire des incursions illégales au nord et au sud, tout en déclarant le poisson pêché comme provenant du pays auquel ils avaient légalement accès. Un autre facteur vient compliquer l analyse du comportement des flottes étrangères. En effet, nombre d accords d accès de ces nouveaux acteurs, en particulier la Chine, sont signés avec le président ou avec le ministre de la Pêche des pays côtiers, mais ne sont pas reconnus comme tels par les pays concernés, contrairement aux accords avec l UE, qui sont disponibles en ligne. Ainsi, la presse de différents pays pense que la Chine opère de façon illégale sous couvert de manœuvres techniquement légales. Une plus grande transparence est manifestement nécessaire concernant ces accords d accès, dont les termes devraient être accessibles au public. D autres acteurs commencèrent à opérer en Afrique de l Ouest, notamment la Russie, qui poursuivit l aventure de l ancienne Union soviétique au large des côtes de Guinée équatoriale, de la Namibie et ailleurs, ainsi que la Chine et d autres pays d Asie du Sud-Est. La pêche illégale : un phénomène difficilement quantifiable Étant donné la situation actuelle, il est difficile d évaluer la quantité de poisson pêché illégalement plutôt que non signalé en Afrique de l Ouest par les flottes étrangères. Cependant, même les estimations approximatives sont éclairantes. Par exemple, en nous appuyant sur le travail que nous avons accompli en collaboration avec USAID, qui a partagé avec nous l observation de détection à distance des navires effectuant des incursions illégales dans les eaux de pays voisins, nous avons pu fournir fin novembre 2013 au ministre de la Pêche sénégalais de l époque une estimation qui s élevait à 300 millions de dollars pêchés illégalement chaque année dans son around 5 % of the ex-vessel value of the landings. Various EU countries began fishing illegally at the time, notably Spain, whose vessels unloaded their massive catches at their base in Las Palmas, in the Canary Islands, for re-export to Europe. The Arrival of New Players However, in the 1990s, other players began operating in West Africa, notably Russia, which followed on venture by the former Soviet Union off Equatorial Guinea, Namibia and elsewhere, as well as China and other East Asian countries. Their modus operandi was to buy access to one country from which it could make illegal incursions to the south and north of it, while declaring the fish they caught as originating from the country to which they had legal access. A complicating factor in analyzing the behavior of foreign fleets is that many of the access agreements by these new players, particularly China, are often signed with the President or the Minister of Fisheries of coastal countries, but are not publicly known as such in the countries concerned, in contrast to the EU agreements, which are available online for review. Thus, China is often thought by the press of various countries to operate illegally while its operations are technically legal. Clearly, far more transparency is needed concerning access agreements, whose terms should be available for public scrutiny. Illegal Fishery: A Difficult-to- Quantify Phenomenon Things presently being as they are, it is difficult to evaluate how much of the fish caught in West Africa by foreign fleets is illegally caught as opposed to not reported. However, even approximate estimates are useful. Thus, for example, based on work we performed in collaboration with USAID, which shared with us remote sensing observation of vessels performing illegal incursions from neighboring countries, we were able to provide in late November 2013 to then Minister of Fisheries of Senegal 70 Diplomatie - octobre 2016 Sécurité maritime et développement en Afrique

71 Challenges pays. Un mois plus tard, il faisait arrêter un navire de pêche russe qui opérait illégalement, l Oleg Naydenov, et infligea à ses armateurs une amende d un million de dollars. Quelle surveillance et quelle réponse juridique? En conclusion, les pays d Afrique de l Ouest ont tout à gagner en investissant dans la gestion et la surveillance des navires qui pêchent dans leur ZEE, car ces ressources qui leur sont volées sont substantielles et représentent une valeur bien plus grande que l obole qu ils reçoivent en marchandant l accès à leurs ressources. D ailleurs, le fait qu INTERPOL considère désormais la pêche illégale comme un crime constitue un pas dans la bonne direction. L Accord relatif aux mesures du ressort de l État du port visant à prévenir, contrecarrer et éliminer la pêche illicite, non déclarée et non réglementée, qui permet aux pays côtiers de retenir des navires ainsi que le fruit de leurs pêches dans les eaux d autres pays, représente également une avancée. an estimate of 300 million US $ per year being caught illegally in his country. One month later, he had an illegally operating Russian fishing vessel arrested, the Oleg Naydenov, and slapped its owners a fine of one million dollars. What Surveillance and What Legal Response? A lesson from this is that the countries of West Africa will benefit immensely from investing in the management and surveillance of the vessels fishing in their EEZ because the resources stolen from them are substantial and far more valuable than the pittance they get for access to their resources. That INTER- POL now views illegal fishing as the crime is a step in the right direction. Another positive step is the recently signed Port State Measures Agreement, which allows coastal countries to detain vessels and the fish they have illegally caught in the waters of other countries. These measures will have to be enforced, however, which can be achieved by an alliance of environmental NGOs, which currently do a superb job tracking illegally fishing vessels at sea, with the organizations of small-scale fishers Les pays d Afrique de l Ouest ont tout à gagner en investissant dans la gestion et la surveillance des navires qui pêchent dans leur ZEE car ces ressources qui leur sont volées sont substantielles. Cependant, ces mesures devront être renforcées, notamment par le biais d une alliance des ONG environnementales, qui effectuent actuellement un travail remarquable dans la chasse à la pêche illégale en mer, avec les organisations de petits pêcheurs et d industriels de l Afrique de l Ouest, premières victimes de ce pillage le long de leurs côtes. D autres organisations devront être associées à cette alliance, telles que celles qui travaillent sur les droits de l homme et qui s intéressent à la fois aux problèmes de sécurité alimentaire que la pêche étrangère, légale et illégale, génère à terre et aux mauvais traitements que subissent les équipages de nombreux navires, qu ils opèrent de manière semi-légale ou illégale. En effet, ce dernier point constitue un problème international de plus en plus urgent et qui ne cesse de prendre de l ampleur puisque, en raison du déclin des ressources, les opérateurs de ces flottes de haute mer tentent de réduire leurs coûts opérationnels en abaissant les salaires des équipages. Une coalition générale comme celle-ci est possible et pourrait bel et bien être en train de voir le jour. Une fois consolidée, elle devrait permettre aux gouvernements des pays ouest-africains non seulement de contenir les flottes étrangères, qu elles opèrent de façon légale ou illégale dans leurs eaux, mais également d accorder à leurs industries de pêche nationales l attention et les fonds de développement dont elles ont besoin (en matière d amélioration de la manutention, de la conservation et du marketing de leurs prises) et qui leur font pour l instant défaut. Daniel Pauly and processors in West Africa, as they are the first victims of the pillage along their coasts. Other groups that will have to be brought into this alliance are the organizations working on human rights, both in connection with the food security issues that foreign fishing, legal and illegal, creates on land, and with the mistreatment of the crew on many vessels operating semilegally or illegally. Indeed, the latter is an international issue that keeps growing in importance and urgency as the operator of distant-water fleets, in the face of declining resources, try to reduce their operating cost by reducing the wages of their crew. Such broad alliance is possible, and may indeed be slowly emerging. When consolidated, it should be able to move the governments of West African countries to not only rein in the foreign fleets operating legally and illegally in their waters, but to give their domestic fisheries the attention and the development funds that they need in term of improved handling, preservation and marketing of the catches - and that they presently lack. Daniel Pauly Photo ci-dessus : Marché aux poissons de Dakar, au Sénégal. Les ressources halieutiques constituant la principale source de revenus des communautés côtières de pêcheurs, l amélioration de la gouvernance, de la gestion des pêches et de la lutte contre la pêche illicite représente un objectif majeur à atteindre pour accroître et pérenniser ce secteur de l économie locale. ( Shutterstock) Above: Fish market in Dakar, Senegal. As halieutic resources form the main source of revenue of the coastal communities of fishermen, the improvement of the governance and management of fishing and the fight against illegal fishing represent a major objective to be reached to increase and ensure the sustainability of this sector of the local economy. ( Shutterstock) Diplomatie - october 2016 Maritim Security and Development in Africa 71

72 Les défis analyse Par Joseph Nguene Nteppe, docteur en droit, spécialiste du droit maritime et des transports, chargé de cours à l université de Douala (Cameroun) et juriste au Conseil national des chargeurs du Cameroun (CNCC). By Joseph Nguene Nteppe, doctor at law, specializing in maritime and transport law, lecturer at the University of Douala (Cameroon) and jurist with the Cameroon National Shippers Council (CNSC) analysis Photo ci-dessus : Un navire effectue une opération de nettoyage de la lagune Ébrié à Abidjan. Cette dernière, qui traverse la ville, reçoit les eaux usées industrielles et domestiques provenant de différents quartiers et affecte la santé des quatre millions d Abidjanais. ( AFP/Kambou Sia) Above: A ship conducts a cleanup operation of the Ebrié lagoon in Abidjan. The latter, that crosses the city, receives industrial and household wastewater from different neighborhoods and affects the health of four million Abidjan inhabitants. ( AFP/Kambou Sia) La pollution marine en Afrique : quelles conséquences? Bien que relativement récente, la protection de l environnement marin est une préoccupation majeure pour la communauté internationale en général et pour les États africains en particulier, en raison de l extrême vulnérabilité de ceux-ci à l égard du phénomène de pollution marine, dont les sources sont multiples et diffuses (1). L e continent demeure sous la forte menace des dégâts environnementaux d origines diverses, causés notamment par les grands pétroliers transportant les hydrocarbures ainsi que par les activités d exploration et d exploitation pétrolière offshore, non soumises à des réglementations et à des contrôles rigoureux. En raison de sa position géographique, bordée par deux océans et une mer (les océans Atlantique et Indien et la mer Méditerranée), l Afrique est généralement qualifiée de continent insulaire dont toutes les façades constituent des voies de navigation Marine Pollution in Africa: What Consequences? Although relatively recent, the protection of the marine environment is a major concern for the international community in general and for the African States in particular, due to their extreme vulnerability with respect to the phenomenon of marine pollution whose sources are many and diffuse (1). T he continent remains heavily menaced by environmental damage of various origins caused in particular by the large oil tankers carrying hydrocarbons and by the offshore oil exploration and exploitation activities not subject to regulations and rigorous controls. Due to its geographic position, bordered by two oceans and one sea (the Atlantic and Indian oceans, and the Mediterranean Sea), Africa is generally characterized as an insular 72 Diplomatie - octobre 2016 Sécurité maritime et développement en Afrique

73 Challenges maritime. Ses côtes sont par conséquent largement exposées aux pollutions marines diverses, en particulier par les hydrocarbures, et ce d autant plus que plusieurs pays africains sont désormais producteurs et exportateurs de pétrole. Sans ignorer les autres types de pollution auxquels l environnement marin et côtier africain est exposé, une attention particulière sera portée à la pollution par le déversement des hydrocarbures. Les pollutions océaniques et telluriques : principales menaces du milieu marin en Afrique Les pollutions dites océaniques s entendent généralement des nuisances dans le milieu marin résultant des activités humaines en mer et causées volontairement ou accidentellement (2). Il s agit notamment de la pollution par les navires, l immersion et l incinération de déchets en mer, la pollution résultant de l exploitation du sol et du sous-sol marins. Le milieu marin et les zones côtières en Afrique sont donc considérablement exposés à cette menace qui représenterait environ 5 % à 11 % de la pollution marine totale. La pollution par les navires est due soit à des déversements volontaires d hydrocarbures en mer du fait des opérations de déballastage des naviresciternes ou de vidange des huiles usagées (on parle de pollutions opérationnelles), soit à des accidents entraînant des marées noires ou des déversements de substances chimiques destructrices pour l environnement (pollutions accidentelles). La liste des marées noires provoquées par les accidents de navires dans le monde est bien longue et ne cesse de s allonger en dépit des mesures de prévention mises en place, et le continent africain n est évidemment pas épargné par ces catastrophes écologiques. Les pollutions océaniques proviennent aussi des installations pétrolières en mer, à travers notamment l implantation de plates-formes de forage, car les pays africains sont d importants producteurs et exportateurs d or noir. Le golfe de Guinée, en Le golfe de Guinée, en particulier, représente près de 70 % de la production du pétrole subsaharien et est de ce fait extrêmement exposé aux marées noires provenant des installations pétrolières en mer, tel que l illustre l importante sinistralité déjà vécue par les pays comme le Congo, l Angola, le Gabon, le Cameroun, la Guinée équatoriale et le Nigéria. continent all of whose facades form maritime navigation channels. As a result, its coasts are exposed to diverse forms of marine pollution, in particular by hydrocarbons, and all the more in that several African countries are henceforth producers and exporters of oil. Without ignoring the other types of pollution to which the marine and African coast environment is exposed, special attention will be paid to pollution caused by oil spills. Oceanic and telluric pollution: Main threats to the marine environment in Africa So-called oceanic pollution is generally understood to be environmental nuisances in the marine environment resulting from human activities at sea, caused voluntarily or accidentally (2). This mainly concerns pollution by ships, the immersion and incineration of waste at sea, pollution resulting from the exploitation of the marine soil and subsoil. The coastal zones in Africa are thus considerably exposed to this threat that represents roughly 5 to 11% of total marine pollution. Pollution by ships is either due to voluntary spillage of hydrocarbons at sea via the deballasting of tankers or the drainage of used oil (operational pollution) or to accidents leading to oil spills or the spillage of chemical substances harmful to the environment (accidental pollution). The list of oil spills caused by accidents involving ships in the world is long and continues to grow despite the preventive measures set up, and the African continent is obviously not spared from these ecological disasters. Oceanic pollution also results from petroleum facilities at sea, for the most part the installation of drilling platforms, for African countries are significant producers and exporters of black gold. The Gulf of Guinea in particular represents nearly 70% of the sub-saharan oil production and as a result is extremely exposed to oil spills caused by petroleum facilities at sea as illustrated by the significant number of accidents already sustained by countries like the Congo, Photo ci-contre : Pollution du fleuve Sénégal à Joal-Fadiouth, au sud-est de Dakar. Au Sénégal, où les industries et les populations riveraines des zones côtières utilisent la mer comme exutoire naturel, la gestion des eaux est un véritable casse-tête en raison de l insuffisance des moyens nécessaires. ( Holbox) Opposite: Pollution of the Senegal River at Joal-Fadiouth, southeast of Dakar. In Senegal, where industries and populations neighboring the coastal areas use the sea as a natural outfall, water management is an important conundrum due to the insufficiency of resources necessary. ( Holbox) Diplomatie - october 2016 Maritim Security and Development in Africa 73

74 Les défis Photo ci-contre : Pollution aux hydrocarbures dans la région du delta du Niger, au Nigéria, en En janvier 2015, près de sept ans après les fuites dans le delta de pétrole provenant d un oléoduc de la compagnie Shell, le géant pétrolier a accepté de verser 70 millions d euros de compensations à la communauté de Bodo dévastée par le désastre. ( Friends of the Earth Netherlands) Opposite: Oil pollution in the region of the Niger Delta, in Nigeria, in In January 2015, nearly seven years after oil leaks into the delta from a pipeline belonging to Shell, the giant oil company agreed to pay 70 million euros in compensation to the municipality of Bodo devastated by the disaster. ( Friends of the Earth Netherlands) particulier, représente près de 70 % de la production du pétrole subsaharien et est de ce fait extrêmement exposé aux marées noires provenant des installations pétrolières en mer, tel que l illustre l importante sinistralité déjà vécue par les pays comme le Congo, l Angola, le Gabon, le Cameroun, la Guinée équatoriale et le Nigéria. Les pollutions telluriques ont quant à elles pour origine le rejet dans la mer des déchets provenant de la terre ferme. Il s agit de pollutions dues notamment aux déversements continuels d importantes quantités de substances polluantes par les cours d eau, les établissements côtiers ou les émissaires, ou émanant de toute autre source située sur la terre ferme. Les cours d eau africains constituent généralement des dépotoirs pour les populations, et l ensemble des déchets domestiques, industriels et de l agriculture qui y sont déversés se dirige directement vers les eaux maritimes où se jettent ces cours d eau (3). Il est ainsi remarqué que les principales industries des États côtiers sont concentrées le long des côtes et qu elles déversent directement dans les océans leurs effluents et autres polluants, causant des dégradations multiformes. Les dommages environnementaux, sanitaires et économiques résultant des pollutions sur le milieu marin en Afrique Les pollutions massives par hydrocarbures et autres polluants provoquent de lourdes dégradations environnementales et des catastrophes écologiques. Les marées noires, parfois inévitables, sont hautement destructrices pour l environnement marin et les zones côtières. Ainsi, concernant le pipeline tchado-camerounais destiné à l acheminement Selon certains observateurs, dans quarante ans, les stocks de poissons de l Afrique seront décimés, alors que, pendant cette même période, la population du continent va doubler. du pétrole tchadien vers le terminal pétrolier implanté au large des côtes camerounaises, à Kribi, la COTCO, opérateur de ce terminal, a clairement reconnu qu «aucun opérateur ne peut garantir qu aucun déversement ne se produira (4)». Ces nuisances provoquent généralement des atteintes graves à la faune et à la flore marines et une perturbation durable de l équilibre des écosystèmes pouvant entraîner la disparition des ressources halieutiques. Elles ont ainsi un Angola, Gabon, Cameroon, Equatorial Guinea and Nigeria. The sources of telluric pollution are the discharging into the sea of waste from land. This is pollution mainly due from the continuous discharge of large quantities of polluting substances by water courses, coastal establishments or outfalls, or from another source on land. African water courses are generally used as dumps by the populations and all household, industrial and agricultural waste dumped in them is directly channeled to the seas and oceans into which the water course flows (3). It has thus been noted that the main industries of the coastal States have concentrated along the coasts and that they discharge their effluents and other pollutants into the oceans causing multiform degradation. The environmental, sanitary and economic damage resulting from pollution to the marine environment in Africa Massive pollution caused by hydrocarbons and other substances causes heavy environmental degradation and ecological disasters. Oil spills, sometimes inevitable, are highly destructive for the marine environment and coastal areas. Thus, regarding the Chad-Cameroon pipeline designed to carry Chadian oil to the oil terminal installed off the coast of Cameroon at Kribi, the COTCO, the operator of this terminal, has clearly acknowledged that no operator can guarantee that no spill will occur (4). These nuisances generally cause serious harm to the marine fauna and flora and a durable disruption of the equilibrium of the ecosystems which can entail the disappearance of halieutic resources. They thus have a serious impact on the food chain. The nuisances resulting from oil spills and toxic waste also have a highly negative impact on public health. The WHO has thus revealed that pollution resulting from oil production is the cause of many respiratory and skin diseases such as lung cancer, tuberculosis, skin cancer and other afflictions affecting a great many people in the affected areas, such as the Gulf of Guinea. It has unfortunately been noted that these 74 Diplomatie - octobre 2016 Sécurité maritime et développement en Afrique

75 Challenges impact sérieux sur la chaîne alimentaire. Les nuisances résultant des marées noires et des déchets toxiques ont aussi un impact hautement négatif sur la santé publique. L OMS a ainsi relevé que la pollution résultant de la production pétrolière est à l origine de nombreuses maladies respiratoires et cutanées comme le cancer des poumons, la tuberculose, le cancer de la peau et d autres affections touchant un grand nombre de personnes dans les zones affectées, à l instar du golfe de Guinée. Il est malheureusement constaté que ces risques sanitaires sont occultés dans certains États africains où l on déplore une insuffisance d initiatives sérieuses de lutte contre cette pollution, ce qui s expliquerait, selon bon nombre d observateurs, par la raison d État et l importance des intérêts économiques en jeu. Par ailleurs, les ressources associées au domaine maritime de l Afrique, notamment les ressources halieutiques et du tourisme, jouent un rôle essentiel dans les économies des États côtiers et constituent une base importante pour leur prospérité. Or ces ressources sont fortement menacées par les marées noires et les autres formes de pollutions marines évoquées. Les mers et les plages souillées causent un sérieux coup d arrêt aux activités touristiques, notamment les activités récréatives à la plage rendues impossibles de ce fait. Cette situation entraîne aussi un manque à gagner pour de nombreux opérateurs économiques (hôteliers, commerçants), les collectivités publiques et les populations côtières. Les pêcheries africaines sont une source de nourriture et d emplois pour des millions d Africains. Elles aussi sont menacées par les pollutions marines, opérationnelles ou accidentelles. Selon certains observateurs, dans quarante ans, les stocks de poissons de l Afrique seront décimés, alors que, pendant cette même période, la population du continent va doubler. Si des mesures radicales de protection du milieu marin contre la pollution marine et les autres actes illicites comme la pêche illicite ne sont pas prises, la conjugaison de l épuisement des ressources halieutiques et de la croissance démographique se traduira par une augmentation de l insécurité alimentaire pour les populations, ce qui aura un impact sur la sécurité des États. Joseph Nguene Nteppe health hazards are hidden in some African States where one can deplore the insufficiency of serious initiatives to combat this pollution, which would be explained, according to a good many observers, by reasons of state and the significance of the economic interests in play. Moreover, the resources associated with the maritime domain of Africa, in particular halieutic resources and tourism, play an essential role in the economies of the coastal States and constitute an important basis for their prosperity. But these resources are threatened by oil spills and the other forms of marine pollution mentioned. Polluted seas and beaches can cause a serious halt to touristic activities, in particular recreational activities on the beaches rendered impossible as a result of this pollution. This situation also leads to lost profits for many economic operators (hotels, merchants), public administrations and coastal populations. African fisheries are a source of food and jobs for millions of Africans. They too are menaced by marine pollution, whether operational or accidental. According to some observers, in forty years, the stocks of fish in African will be depleted while, during this same period, the population of the continent will double. If radical measures to protect the marine environment from marine pollution and other illicit acts such as illicit fishing are not taken, the combination of the depletion of halieutic resources and demographic growth will entail increased food insecurity which will have an impact of the security of the States. Joseph Nguene Nteppe Photo ci-contre : En Afrique du Sud, la région côtière du KwaZulu-Natal, l une des principales zones agricoles du pays est menacée par l industrie minière et ses effets environnementaux néfastes. ( UN Photo/Gill Fickling) Opposite: In South Africa, the region of KwaZulu-Natal, one of the main agricultural areas of the country, is threatened by the mining industry and its adverse environmental effects. ( UN Photo/Gill Fickling) Notes (1) R. Dajoz, Précis d écologie, 7 e éd., Dunod, 2000, p (2) J.-P. Beurier (dir.), Droits maritimes, 3 e éd. 2015/2016, Dalloz, p (3) A. Nabobuè Assemboni, «Le droit de l environnement marin et côtier en Afrique occidentale», thèse de doctorat en droit public, université de Limoges, (4) M. Ndende, «Activités pétrolières et protection de l environnement marin dans le Golfe de Guinée : problématiques nationales et régionales», Revue congolaise des transports et des affaires maritimes, n o 4, 2006, p. 27 et suiv., spéc. p. 31. Notes (1) R. Dajoz, Précis d écologie, 7 th ed., Dunod, 2000, p (2) J.-P. Beurier (dir.), Droits maritimes, 3th ed. 2015/2016, Dalloz, p (3) A. Nabobuè Assemboni, Le droit de l environnement marin et côtier en Afrique occidentale (Law in the marine and coast environment of west Africa), doctoral thesis in public law, University of Limoges, (4) M. Ndende, Activités pétrolières et protection de l environnement marin dans le Golfe de Guinée : problématiques nationales et regionals (Oil activities and protection of the marine environment in the Gulf of Guinea: domestic and regional issues) Revue congolaise des transports et des affaires maritimes, n o 4, 2006, p. 27 et seq., spec. p. 31. Diplomatie - october 2016 Maritim Security and Development in Africa 75

76 76 Diplomatie - octobre 2016 Sécurité maritime et développement en Afrique

77 Quelles stratégies? What Strategies? ANALYSE Quelle dynamique de construction du multilatéralisme sécuritaire dans le golfe de Guinée?...p. 78 ANALYSIS What Dynamic for the Construction of Multilateral Security in the Gulf of Guinea? ANALYSE La longue marche de l architecture africaine de sûreté et sécurité maritimes dans le golfe de Guinée...p. 84 ANALYSIS The Long March of African Maritime Safety and Security in the Gulf of Guinea ANALYSE La révolution portuaire africaine...p. 89 ANALYSIS The African Port Revolution ANALYSE «L Afrique bleue» : l ambition d un continent pour un développement sûr et harmonieux...p. 94 ANALYSIS Blue Africa : the Ambition of a Continent for Secure and Harmonious Development Photo ci-contre : Port de Durban, en Afrique du Sud. Trente-huit des 54 pays africains disposent d une façade maritime, et près de 90 % des importations et exportations du continent sont effectuées par la mer. ( Shutterstock) Opposite: Port of Durban, South Africa. 38 of the 54 African countries have a maritime coastline and almost 90 percent of the continent imports and exports are carried by sea. ( Shutterstock) Diplomatie - october 2016 Maritim Security and Development in Africa 77

78 Quelles stratégies? analyse Par Joseph Vincent Ntuda Ebode, professeur titulaire des universités en science politique, relations internationales et études stratégiques, et directeur du Centre de recherche et d études politiques et stratégiques (CREPS) à l université de Yaoundé II-Soa (Cameroun). By Joseph Vincent Ntuda Ebode, university professor in political science, international relations and strategic studies, and director of the Research Centre for Political and Strategic Studies (CREPS) at the university of Yaoundé II-Soa (Cameroon). analysis Photo ci-dessus : En janvier 2014, la 22 e session de l Union africaine s est clôturée par l adoption de la Stratégie africaine intégrée (AIM) pour les mers et les océans à l horizon 2050, qui invite notamment les communautés économiques régionales et les mécanismes régionaux à élaborer et adopter une stratégie régionale contre la piraterie, le vol à main armée et d autres activités maritimes illégales. ( State Department Photo) Above: In January 2014, the 22 nd session of the African Union closed with the adoption of the African Integrated Maritime (AIM) 2050 strategy for the seas and oceans, that invites the regional economic communities and regional mechanisms to develop and adopt a regional strategy against piracy, armed robbery and other illegal maritime activities. ( State Department Photo) Quelle dynamique de construction du multilatéralisme sécuritaire dans le golfe de Guinée? Le golfe de Guinée est un espace politique composé de treize États qui bénéficient d une façade maritime sur la bordure occidentale de l Afrique et dans la zone comprise entre le Libéria et l Angola. La création des passerelles politiques, diplomatiques et sécuritaires mises en place au niveau interrégional entre ces États pour faire face à la piraterie et au brigandage maritimes s est traduite par une dynamique multilatérale des politiques de sécurisation régionales et sous-régionales. Les instruments juridiques régionaux La Stratégie africaine intégrée pour les mers et les océans à l horizon 2050 (AIM 2050) La Stratégie AIM 2050 vise au développement des espaces maritimes africains à travers la promotion de la création de richesses grâce aux mers, océans et eaux intérieures de l Afrique et la mise en place d une économie maritime prospère tout en développant les activités maritimes avec la volonté de préserver durablement l environnement. Elle est axée What Dynamic for the Construction of Multilateral Security in the Gulf of Guinea? The Gulf of Guinea is a political space composed of thirteen States that benefit from a maritime facade on the western edge of Africa and in the area included between Liberia and Angola. The creation of political, diplomatic and security bridges set up at the inter-regional level between these States to combat maritime piracy and brigandage has led to a multilateral dynamic of regional and sub-regional security policies. Regional legal instruments The 2050 African Integrated Maritime (AIM) strategy The AIM 2050 strategy aims for the development of African maritime spaces through the promotion of the creation of 78 Diplomatie - octobre 2016 Sécurité maritime et développement en Afrique

79 What Strategies? autour d objectifs spécifiques et stratégiques. Les premiers définissent les modalités, le cadre d intervention concerté entre les États africains, ainsi que les ressources mises en œuvre pour développer des activités conjointes nécessaires à l atteinte des objectifs communs. Les seconds regroupent un La Stratégie AIM 2050 vise au développement des espaces maritimes africains à travers la promotion de la création de richesses grâce aux mers, océans et eaux intérieures de l Afrique et la mise en place d une économie maritime prospère tout en développant les activités maritimes avec la volonté de préserver durablement l environnement. ensemble d activités à mener dans les secteurs tels que la coopération maritime interafricaine au niveau communautaire, national, régional et continental ; l association de la société civile et d autres acteurs à la promotion des espaces maritimes africains ; le droit d accès à la mer et la liberté de transit des marchandises vers les pays sans littoral ; la sécurité et la sûreté maritimes ; la gestion des catastrophes ; la protection de l environnement maritime africain ; la protection du domaine maritime africain ; la gestion intégrée des zones côtières africaines ; la lutte contre les actes illégaux et criminels en mer ; la promotion du commerce international et régional. wealth based on the seas, oceans and inland bodies of water of Africa and the implementation of a prosperous maritime economy while developing maritime activities with the desire of durably preserving the environment. It focuses on specific and strategic objectives. The first of these define the terms and framework of concerted intervention between the African States, and the resources implemented to develop the joint activities necessary to achieve common goals. The second unites a set of activities to be carried out in sectors such as inter-african maritime cooperation at the community, national, regional and continental level: the association of civil society and other players in promoting African maritime spaces; access rights to the sea and free transit of goods to countries with no coast; maritime safety and security; management of disasters; protection of the African maritime environment; protection of the African maritime domain; integrated management of African coastal areas; fight against illegal and criminal acts at sea; and the promotion of international and regional trade. African maritime transport charter Adopted in 1994 in Addis Abeba by the Organization of African Unity (OAU), which has since become the African Union (AU), and revised and approved by the executive council of the Union meeting in Kampala, Uganda in July 2012, this is a continental instrument that aims to harmonize maritime transport policies to promote the growth and development of merchant fleets and African maritime infrastructures; promote close cooperation between the States of a same region or sub-region and between regions and sub-regions; harmonize viewpoints between the member States regarding the implementation of maritime conventions; reinforce cooperation between the maritime administrations of the party States in the areas of maritime and multimodal transport; inland water ways, ports and search and rescue; and lastly carry out studies aiming to promote maritime cooperation (article 3). Sub-regional instruments The memorandum of understanding on the management of the strategy to secure vital interests at sea organized around the Council for Peace and Security in Central Africa (COPAX) and promoting synergy with the Gulf of Guinea Commission and the Economic Community of West African States (ECOWAS) Signed in Kinshasa on 24th October, 2009, this is the joint platform of the ECCAS countries who wish to ensure the security Photo ci-contre : Adoptée en 1994 à Addis Abeba par l Organisation de l unité africaine, la Charte africaine des transports maritimes, jamais entrée en vigueur, a été révisée et approuvée définitivement par le Conseil exécutif de l UA en juillet ( Embassy of Equatorial Guinea) Opposite: Adopted in 1994 in Addis Ababa by the African Unity Organization, the African Maritime Transport Charter, which never went into effect, was revised and definitely approved by the Executive Council of the AU in July ( Embassy of Equatorial Guinea) Diplomatie - october 2016 Maritim Security and Development in Africa 79

80 Quelles stratégies? Photo ci-contre : Le 12 juin 2015 à Pointe-Noire, au Congo, des officiers de la Marine nationale française sont accueillis au siège du CRESMAC (Centre régional de sécurité maritime pour l Afrique centrale), inauguré en ( Marine nationale) Opposite: On June 12, 2015 in Pointe-Noire, Congo, officers of the French navy were hosted at the headquarters of the CRESMAC (Central Africa Regional Maritime Security Centre) inaugurated in ( Marine nationale) La Charte africaine des transports maritimes Adoptée en 1994 à Addis Abeba par l organisation de l unité africaine (OUA), devenue l Union africaine (UA), et révisée et approuvée par le conseil exécutif de l Union réuni à Kampala, en Ouganda, en juillet 2012, il s agit d un instrument continental qui vise à harmoniser les politiques de transport maritime pour favoriser la croissance et le développement des flottes marchandes et des infrastructures maritimes africaines ; promouvoir une coopération étroite entre les États d une même région ou sous-région et entre régions et sous-régions ; harmoniser les vues entre les États membres en ce qui concerne la mise en œuvre des conventions maritimes ; renforcer la coopération entre les administrations maritimes des États parties dans les domaines du transport maritime et multimodal, des voies d eau intérieures de navigation, des ports et de la recherche et du sauvetage ; mener des études visant à favoriser la coopération maritime (article 3). Le protocole signé à Kinshasa en 2009 est une plate-forme commune aux États de la CEEAC désirant sécuriser les eaux au large de leur territoire, et ainsi redonner confiance aux opérateurs économiques de ce milieu hautement stratégique. Les instruments sous-régionaux Le protocole d accord sur la gestion de la stratégie de sécurisation des intérêts vitaux en mer articulée autour du Conseil de paix et sécurité de l Afrique centrale (COPAX) et favorisant une synergie avec la Commission du golfe de Guinée (CGG) et la Communauté économique des États de l Afrique occidentale Signé à Kinshasa le 24 octobre 2009, il s agit de la plate-forme commune aux États de la CEEAC désirant sécuriser les eaux au large de leur territoire, et ainsi redonner confiance aux opérateurs économiques de ce milieu hautement stratégique. Il détermine les organes communautaires de la stratégie et leurs différents axes de coopération. Le protocole d accord a établi trois organes civilo-militaires : un Centre régional de sécurité maritime d Afrique centrale (CRESMAC), rattaché au secrétariat général de la CEEAC ; un Centre multinational de coordination (CMC), situé à l état-major des Armées de chacun des États pilotes et un Centre opérationnel de marine (COM), situé dans chaque État membre. Les domaines de coopération sont définis à l article 3 du protocole et concernent : la surveillance maritime et l intervention en mer, l échange des informations, l harmonisation de l action des États parties en mer, l institutionnalisation d une taxe communautaire, of the waters off their coasts and thus renew the trust of economic operators in this highly strategic environment. It determines the community bodies of the strategy and their different vectors for cooperation. The memorandum of understanding has established three civil-military bodies: a Central African Regional Maritime Security Center (CRESMAC), reporting to the general secretary of the EC- CAS; a Multinational Coordination Center (MCC) located at the Army headquarters of each of the lead States and a Naval Operations Center (NOC), located in each member State. The fields of cooperation are defined in article 3 of the memorandum and concern: maritime surveillance and intervention at sea, information exchange, harmonization of party State action at sea, the institutionalization of a community tax, the acquisition and maintenance of major equipment and the institutionalization of a maritime conference of the parties at the CDS (Defense and Security Commission). The technical agreement between the ECCAS and the governments of Cameroon, Gabon, Equatorial Guinea and Sao Tome and Principe on setting up a surveillance plan for the maritime security of the Gulf of Guinea Adopted in Yaoundé on 6th May, 2009 by the Ministers of Defense of the four States: Cameroon, Gabon, Equatorial Guinea and Sao Tome and Principe, this agreement aimed to effectively set up urgent operational measures ensuring the security of this space, awaiting the implementation of the global strategy. On an organic level, the MCC is composed of a center head (Cameroon navy officer), an operational officer (responsible for operations connected with the Gabonese navy), a navy officer (responsible for logistics belonging to the Sao Tome navy) and a navy officer (responsible for intelligence and transmissions and belonging to the navy of Equatorial Guinea). 80 Diplomatie - octobre 2016 Sécurité maritime et développement en Afrique

81 What Strategies? l acquisition et l entretien des équipements majeurs et l institutionnalisation d une conférence maritime des parties au niveau de la CDS (Commission de défense et de sécurité). L Accord technique entre la CEEAC et les États du Cameroun, du Gabon, de la Guinée équatoriale et de Sao Tomé-et-Principe sur la mise en place d un plan de surveillance pour la sécurisation maritime du golfe de Guinée Adopté à Yaoundé le 6 mai 2009 par les ministres de la Défense des quatre États Cameroun, Gabon, Guinée équatoriale et Sao Tomé-et-Principe, cet accord visait à mettre effectivement en place des mesures opérationnelles urgentes de sécurisation de cet espace, en attendant la mise en œuvre de la stratégie globale. Sur le plan organique, le CMC est composé d un chef de centre (officier de la marine nationale du Cameroun) ; d un officier traitant (responsable des opérations relevant de la marine gabonaise) ; d un officier de marine (responsable de la logistique appartenant à la marine de Sao Tomé) et d un officier de marine (responsable des renseignements et transmissions et appartenant à la marine équato-guinéenne). Merchant Marine Community Code of the CEMAC It was enacted 3th August, 2001 under regulation No. 03/01-UEAC-088-CM-06. It replaces the Merchant Marine Code of the Customs and Economic Union of Central African States (UDEAC) enacted under regulation No. 6/94-UDEAC-594-CE-30 on 22th December, It regulates the law applicable to ships, the security of ships, classification, assistance, rescue and wrecks, the maritime environment and pollution; employment and other matters concerning seamen, including the disciplinary and penal system, maritime transport including charter-parties, bills of lading and other transport contracts, the activities of ship s consignees, freight forwarders, groupers, pilots, handlers and dispute and other procedures concerning maritime matters. Overall, the Code seems to reflect the views of the International Maritime Organization (IMO) regarding points the community of maritime nations deems still open for discussion or which can come under independent will rather than regulation. Le Code communautaire de la marine marchande de la CEMAC Il a été promulgué le 3 août 2001 sous le timbre Réglementation 03/01-UEAC-088-CM-06. Il remplace le Code de la marine marchande de l Union douanière et économique de l Afrique centrale (UDEAC) promulgué sous le timbre n o 6/94-UDEAC- 594-CE-30 le 22 décembre Il réglemente le droit applicable aux navires ; la sécurité des navires ; la classification ; l assistance, le sauvetage et les épaves ; l environnement maritime et la pollution ; l emploi et autres matières concernant le marin, y compris le régime disciplinaire et pénal ; le transport maritime, y compris les chartes parties ; les connaissements et autres contrats de transport ; les activités des consignataires de navires, transitaires, groupeurs, pilotes, manutentionnaires et les procédures contentieuses et autres concernant les matières maritimes. Dans l ensemble, le Code semble refléter fortement les vues de l Organisation maritime internationale (OMI) sur des points que la communauté des nations maritimes juge encore ouverts à la discussion ou qui peuvent relever de l autonomie de la volonté davantage que du règlement. Le Mémorandum d entente sur la mise en place d un réseau sousrégional intégré de garde-côtes des États d Afrique de l Ouest et du Centre En octobre 2006, des représentants de l OMI et de l Organisation maritime de l Afrique de l Ouest et du centre (OMAOC) se sont réunis à Dakar pour discuter de la mise en place d un système permettant aux diverses entités nationales qui remplissent des fonctions de garde-côtes de coopérer à l échelle nationale et régionale afin de protéger l ensemble des États d Afrique de l Ouest et d Afrique centrale. Cette réunion a abouti à la mise au point d un mémorandum d accord sur la création d un réseau sous-régional intégré de garde-côtes en Afrique de l Ouest et en Afrique centrale, Mémorandum d accord S/2012/ OMI-OMAOC, qui a été adopté en juillet 2008 et signé par 15 États côtiers de la région. Ce texte vise à renforcer la sûreté et la sécurité maritimes et l action des services de répression dans l ensemble de la région et forme la base de la stratégie de sécurité maritime de la deuxième Memorandum of Understanding on the Establishment of a Sub-Regional Integrated Coast Guard Network in West and Central Africa In October 2006, representatives from the IMO and the Maritime Organization of West and Central Africa (MOWCA) met in Dakar to discuss the implementation of a system allowing the various national entities that fulfilled the functions of coast guard to cooperate on a national and regional level in order to protect all the west and central African States. This meeting led to the drafting of a memorandum of understanding on the creation of an integrated sub-regional coast guard network in west and central Africa, MOU S/2012/ OMI-OMAOC, which was adopted in July 2008 and signed by 15 coastal States in the region. This text aims to reinforce maritime safety and security and the action of the repression entities throughout the region and forms the basis for the maritime Photo ci-dessus : L Amiral Aoa Ikioda, responsable des politiques de la marine nigériane, prononce un discours lors d une cérémonie précédant un exercice maritime multinational dans le golfe de Guinée, conçu pour améliorer la coopération, l expertise et l échange d informations entre les forces maritimes des États d Afrique centrale et de l Ouest. ( US Navy/John Herman) Above: Admiral Aoa Ikioda, responsible for the policies of the Nigerian Navy, makes a speech during a ceremony preceding a multinational maritime exercise in the Gulf of Guinea designed to improve the cooperation, expertise and exchange of information between the maritime forces of the Central and Western African States. ( US Navy/John Herman) Diplomatie - october 2016 Maritim Security and Development in Africa 81

82 Quelles stratégies? security strategy of the second version of the African maritime transport charter that was adopted by the African Union in Durban, in October It also serves as the foundation for the national and regional action plans developed by the region s States with a view to setting up the integrated coast guard network. Photo ci-dessus : Port de Pointe-Noire, capitale économique du Congo et premier port à conteneurs de la Communauté économique et monétaire de l Afrique centrale (CEMAC). Cette dernière a promulgué en 2001 un Code communautaire de la marine marchande qui fixe pour le domaine maritime les règles applicables aux navires, à la navigation, aux transports, à la pollution, aux métiers de la mer et professions auxiliaires. ( Afritramp) Above: Port of Pointe-Noire, economic capital of Congo and leading container port of the Economic and Monetary Community of Central Africa (CEMAC). In 2001, this body enacted a Community Merchant Marine Code that sets the rules applicable to ships, navigation, transport, pollution, maritime-related jobs and auxiliary professions. ( Afritramp) version de la Charte africaine des transports maritimes, qui a été adoptée par l Union africaine à Durban, en octobre Il sert aussi de fondement aux plans d action nationaux et régionaux qui seront élaborés par les États de la région en vue de la mise en place du réseau intégré de garde-côtes. Ainsi, le Code recommande aux États d adopter de nouvelles lois ou de modifier celles en vigueur pour faciliter l arrestation et les poursuites judiciaires contre les auteurs de piraterie et autres activités illicites maritimes. Le Code de conduite relatif à la prévention et à la répression des actes de piraterie, des vols à main armée à l encontre des navires et des activités maritimes illicites en Afrique de l Ouest et du Centre Il a été adopté lors du sommet de Yaoundé, au Cameroun, des 24 et 25 juin 2013 entre les chefs d État et de gouvernement des pays de la CEDEAO, de la CEEAC et de la CGG. C est un outil de coopération régionale sur la sécurité et la sûreté maritime placé sous les auspices de l Union africaine. Le Code de conduite verra toutes ses dispositions devenir contraignantes après une période de trois ans à compter de sa date de signature et impose des mesures pour faire face aux crimes transnationaux organisés dans le domaine maritime. En effet, il s agit d un accord régional devant servir à la répression des actes criminels transnationaux organisés dans le domaine maritime, tels que les actes de piraterie ou de terrorisme Code of conduct concerning the repression of piracy, armed robbery against ships and illicit maritime activities in west and central Africa It was adopted during the Yaoundé summit held in Cameroon, 24-25th June, 2013 between the heads of State and Government of the countries of the ECOWAS, ECCAS and GGC. It is a regional cooperation instrument on maritime safety and security placed under the governance of the African Union. The provisions of the Code of Conduct will be enforced after a period of three years from its date of signature and imposes measures to combat transnational crime organized in the maritime domain. This is a regional agreement serving to repress transnational criminal acts organized in the maritime domain such as acts of piracy or maritime terrorism, acts of illegal-undeclared-unregulated fishing and other illegal activities at sea occurring in this space. The code thus recommends that the States adopt new laws or modify those in effect to facilitate the arrest of and legal action against perpetrators of piracy and other illicit maritime activities. Memorandum of Understanding on Maritime Safety and Security in Central and West African Maritime Space It was adopted on 25th June, 2013 at the summit of the heads of State and Government of the countries of the ECOWAS, ECCAS and GGC on maritime safety and security in the maritime space of central and west African. Its purpose is to ensure improved cooperation between the sub-regional maritime security centers of the ECOWAS (CRESMAO) and ECCAS (CRESMAC) and the GGC. This cooperation targets synergy of action through the pooling and interoperability of community resources. The memorandum concerns several areas of cooperation, in particular: technical cooperation, training and reinforcement of capabilities, management of information and data collection, mobilization of resources necessary to the achievement of objectives, coordination of joint actions, the management of maritime borders or any other common field of interest acknowledged as such by the parties. It provides for an annual meeting of the executive leaders and the implementation of an inter-regional coordination center. The latter installed in Cameroon for two years now has taken its first steps. Memorandum of Understanding for Port State Control for West and Central African Region (Abuja) 82 Diplomatie - octobre 2016 Sécurité maritime et développement en Afrique

83 What Strategies? maritime, les actes de pêche INN et autres activités illégales en mer survenus dans cet espace. Ainsi, le Code recommande aux États d adopter de nouvelles lois ou de modifier celles en vigueur pour faciliter l arrestation et les poursuites judiciaires contre les auteurs de piraterie et autres activités illicites maritimes. Le Mémorandum d entente sur la sûreté et la sécurité dans l espace maritime de l Afrique centrale et de l Afrique de l Ouest Il a été adopté le 25 juin 2013 au sommet des chef d État et de gouvernement de la CEEAC, de la CEDEAO et de la CCG sur la sécurité et la sûreté maritimes dans l espace maritime de l Afrique de l Ouest et de l Afrique centrale. Il a pour objectif de réaliser une meilleure coopération entre les centres sousrégionaux de sécurité maritime de la CEDEAO (CRESMAO), de la CEEAC (CRESMAC) et de la CGG. Cette coopération vise à une synergie d actions à travers une mutualisation et une interopérabilité des moyens communautaires. Le Mémorandum porte sur plusieurs domaines de coopération et notamment : la coopération technique, la formation et le renforcement des capacités, la gestion de l information et la collecte des données, la mobilisation des ressources nécessaires à la réalisation des objectifs, la coordination des actions conjointes, la gestion des frontières maritimes ou tout autre domaine d intérêt commun pertinent reconnu comme tel par les parties. Il prévoit une rencontre annuelle des hauts responsables et la mise en place d un Centre interrégional de coordination. Celui-ci, installé au Cameroun depuis deux ans fait ses premiers pas. Le Mémorandum d entente sur le contrôle des navires par l État du port dans la région de l Afrique de l Ouest et du Centre : le MoU d Abuja C est l une des premières réponses collectives à la nécessité d accroître la sécurité maritime, la protection de l environnement marin et l amélioration des conditions de vie à bord des navires. Il a été adopté et signé en 1999, dans l urgence de la mise en œuvre d une coopération régionale en matière de contrôle des navires. Dix-neuf pays de la sous-région de l Afrique de l Ouest et du Centre, y compris l Afrique du Sud, étaient présents. L organe suprême est un comité composé des autorités maritimes des États membres qui se réunit chaque année. Un groupe de travail intersession a été constitué afin d examiner toutes les questions juridiques administratives et financières relatives à la mise en œuvre efficace des dispositions du MoU d Abuja dans tous les États membres. Il a été prévu la mise sur pied d un centre d information régional pour la mise en œuvre effective des dispositions du Mémorandum. Il devrait recevoir régulièrement les rapports d inspection des centres nationaux, pour une large diffusion. Cette diffusion permettra de tenir informés tous les États membres des défectuosités des navires inspectés dans la sous-région. Enfin, le centre national d information dans chaque État membre procède au traitement des inspections sur le contrôle des navires par l État du port et transmet ses conclusions au centre régional d informations pour leur éventuelle diffusion dans les autres États membres du Mémorandum d Abuja, cela en vue de leur exploitation au service d une sécurité plus accrue dans leurs espaces maritimes. Joseph Vincent Ntuda Ebode The code thus recommends that the States adopt new laws or modify those in effect to facilitate the arrest of and legal action against perpetrators of piracy and other illicit maritime activities. This is one of the first collective responses to the necessity of increasing maritime security, environmental protection and improving living conditions on ships. It was adopted and signed in 1999, in the urgency of the implementation of regional cooperation regarding the control of ships. Nineteen countries of the western and central African subregion, including South Africa, were present. The ruling body is a committee composed the maritime authorities of the member States that meets each year. An inter-session work group was formed in order to examine all the legal, administrative and financial matters relating to the effective implementation of the provisions of the MoU of Abuja in all the member States. The creation of a regional information center has been provided for in order to ensure the effective implementation of the provisions of the Memorandum. It should also regularly receive inspection reports from the national centers for wide circulation. This circulation will keep the member States informed of the defects of the ships inspected in the sub-region. Finally the national information center in each member State will handle the inspections on the control of the ships by the port State and communicate its conclusions to the regional information center for possible distribution to other member States of the Abuja Memorandum with a view to their use for increased security in their maritime spaces. Joseph Vincent Ntuda Ebode Photo ci-dessus : Des soldats camerounais membres d un bataillon d intervention rapide se déploient dans la péninsule de Bakassi, près de la frontière nigériane, pour lutter contre les enlèvements et les attaques de pirates. ( AFP/ Cameroonian Army) Above: Cameroonian soldiers, members of a rapid intervention battalion deploy in the peninsula of Bakassi, near the Nigerian border to combat kidnappings and pirate attacks. ( AFP/Cameroonian Army Diplomatie - october 2016 Maritim Security and Development in Africa 83

84 Quelles stratégies? analyse Par Michel Luntumbue, chargé de recherche au GRIP (Groupe de recherche et d information sur la paix et la sécurité) dans le domaine «Conflits, sécurité et gouvernance en Afrique». By Michel Luntumbue, in charge of research at GRIP (Group for Information on Peace and Security) in the field of Conflicts, Security and Governance in Africa analysis Photo ci-dessus : Un navire des gardes-côtes camerounais patrouille le long de la côte près de Douala. La garantie de sécurité dans le golfe de Guinée dépend de la capacité et de la volonté des États riverains de coopérer entre eux en dépit des initiatives et de l appui technique et opérationnel des puissances étrangères. ( US Navy/Darryl Wood) Above: A Cameroonian coast guard ship patrols along the coast near Douala. Guaranteed security in the Gulf of Guinea depends on the capacity and desire of neighboring States to cooperate with each other despite the initiatives and technical and operational support of foreign powers. ( US Navy/Darryl Wood) La longue marche de l architecture africaine de sûreté et sécurité maritimes dans le golfe de Guinée Alors que l insécurité maritime se confirme comme l une des menaces majeures pour la sécurité et la stabilité économique du golfe de Guinée, tant pour les États du littoral que pour ceux enclavés dans l arrière-pays qui dépendent du commerce maritime, l augmentation rapide des actes de piraterie et de brigandage maritime a pris de court plusieurs pays de la sous-région. E n juin 2013, les dirigeants des Communautés économiques des États de l Afrique de l Ouest (CEDEAO) et de l Afrique centrale (CEEAC) ainsi que la Commission du golfe de Guinée (CGG), réunis à Yaoundé, au Cameroun, ont posé les bases d une stratégie régionale commune aux deux sous-régions. Le Sommet de Yaoundé s était notamment soldé par l adoption d un Code de conduite relatif à la prévention et la répression des actes illicites The Long March of African Maritime Safety and Security in the Gulf of Guinea While maritime insecurity is confirmed as one of the major threats to the security and economic stability of the Gulf of Guinea, both for the coastal States and for those isolated inland that depend on maritime trade, the rapid increase in acts of piracy and maritime robbery has taken several countries of the sub-region by surprise. I n June 2013, the heads of the Economic Communities of the West African States (ECOWAS) and of the Economic Communities of the Central African States (ECCAS), and the Gulf of Guinea Commission (GGC), united in Yaoundé in Cameroon, laid the foundations for a 84 Diplomatie - octobre 2016 Sécurité maritime et développement en Afrique

85 What Strategies? perpétrés dans l espace maritime du golfe de Guinée. Largement inspiré du Code de conduite de Djibouti relatif à la répression de la piraterie dans l océan Indien et dans le golfe d Aden, le Code de conduite de Yaoundé constitue la base juridique de la coopération entre les États signataires des deux régions. Il définit les modalités d intervention, le partage des responsabilités et l organisation pratique de la lutte contre les activités maritimes illicites en Afrique de l Ouest et en Afrique centrale. En vigueur dès le 25 juin 2013, il n était qu un préaccord, appelé à devenir contraignant après une période de trois ans, le temps d une évaluation et d amendements éventuels. Un Mémorandum d entente et une Déclaration politique avaient également été adoptés. Le Mémorandum, signé par la CEDEAO, la CEEAC et la CGG, organise les relations entre les centres régionaux de sécurité et sûreté maritimes, tandis que la Déclaration des chefs d État confirme leur appui politique. L architecture de la sûreté et sécurité maritimes, inspirée des actes de Yaoundé, se compose du Centre interrégional de coordination (CIC), structure d échange d informations et de coordination, qui fait la jonction entre le Centre régional de sécurité maritime de l Afrique centrale (CRESMAC) et le Centre régional de sécurité maritime de l Afrique de l Ouest (CRESMAO). L espace côtier des deux communautés économiques est subdivisé en zones maritimes opérationnelles, dont les activités sont coordonnées au sein des centres multinationaux de coordination (CMC). Le CRESMAC (1) et le CRESMAO (2) couvrent respectivement deux et trois CMC, correspondant au nombre de zones maritimes opérationnelles de leur ressort. Au niveau national, il est prévu un Centre des opérations maritimes (COM) par pays, qui doit regrouper, en plus de la marine nationale qui assure la coordination, les acteurs majeurs de l action de l État en mer (la police maritime, les douanes, la pêche et la protection de l environnement). Les structures de la CEEAC connaissent un début de fonctionnement avec la nomination du directeur du CRESMAC basé à Pointe-Noire (Congo-Brazzaville). Le CRES- MAO prévu à Abidjan (Côte d Ivoire) est encore à l étape de projet (3). De manière générale, l opérationnalisation des structures semble contrariée par l insuffisance des ressources La Charte de Lomé s inscrit dans l optique de la stratégie maritime africaine à l horizon 2050, dont l objectif est également de faire de l espace maritime l un des principaux leviers du développement économique et social de l Afrique. et l absence de mécanisme pérenne de financement (4). Ainsi, à peine inauguré en septembre 2014, le CIC a connu l éviction de son directeur, au terme d une polémique sur la gestion des premiers fonds alloués par le gouvernement camerounais à la phase de démarrage du centre (5). De plus, trois années après le Sommet de Yaoundé, le Code de conduite signé par The Lomé charter will be adopted in the framework of the 2050 African Integrated Maritime strategy, whose purpose is also to make the maritime space one of the main levers of the economic and social development of Africa. strategy common to both regions. The Yaoundé summit closed with the adoption of a code of conduct relating to the prevention and suppression of illegal acts perpetrated in the maritime space of the Gulf of Guinea. Largely inspired by the Djibouti Code of Conduct relating to fight against piracy in the Indian Ocean and Gulf of Aden, the Yaoundé Code of Conduct forms the legal basis for cooperation between the signatory States of both regions. It defines the terms of intervention, sharing of responsibilities and practical organization of the fight against illegal maritime activities in western African and central Africa. In effect since 25th June, 2013, it was only a preliminary agreement which would become enforceable after a period of three years, during which time it was to be assessed and possibly amended. A memorandum of agreement and political declaration had also been adopted. The memorandum, signed by the ECOWAS, ECCAS and GGC, organizes the relations between the regional maritime safety and security centers while the declaration of the heads of State confirmed their political support. The maritime safety and security structure, inspired by the acts of Yaoundé, is composed of the Interregional Coordination Center (ICC), a body for the Photo ci-dessus : Un groupe composé de Marines américains et de commandos sénégalais et nigérians lors d un exercice visant à développer la collaboration multilatérale et la coopération transfrontalière. ( DOD/Marines) Above: A group composed of American Marines and Senegalese and Nigerian Commandos during an exercise that aims to develop multilateral collaboration and trans-border cooperation. ( DOD/Marines) Diplomatie - october 2016 Maritim Security and Development in Africa 85

86 Quelles stratégies? Photo ci-dessus : Exercice antipiraterie entre la marine nigériane et la Navy américaine en avril Selon l UNODC, les patrouilles conjointes de surveillance au large du Bénin, mises en place à partir de septembre 2011 par les marines du Nigéria et du Bénin, semblent à l origine du déplacement d une partie de la piraterie vers l ouest du golfe de Guinée, vers les côtes togolaises et ivoiriennes notamment. ( DoD/Darryl Wood) Above: Anti-piracy exercise involving the Nigerian Navy and American Navy in April According to UNODC, joint surveillance patrols off the coast of Benin, set up beginning in September 2011 by the Nigerian and Benin Navies, appear to be the cause of a displacement of piracy to the west of the Gulf of Guinea, towards the Togolese and Ivorian coasts in particular. ( DoD/Darryl Wood) les parties prenantes n est toujours pas devenu contraignant. Comme le souligne Samuel Nguembock, «l un des écueils récurrents dans la construction du multilatéralisme sécuritaire dans le golfe de Guinée est lié à la capacité et à la volonté des États riverains de coopérer entre eux en dépit des initiatives et de l appui technique, opérationnel des puissances étrangères et des instances multilatérales mondiales (6)». Contrairement au Code de conduite de Yaoundé, qui ne concernait que les pays du golfe de Guinée, la Charte de Lomé se projette à l échelle continentale. Les enjeux du Sommet de Lomé L un des premiers défis du Sommet extraordinaire de l Union africaine sur la sécurité et la sûreté maritimes et le développement en Afrique, convoqué à Lomé le 15 octobre 2016, est de déjouer l enlisement du processus de Yaoundé. L ambition affichée est désormais l adoption d un nouvel instrument juridique, une charte africaine, qui vise à concilier la coordination harmonieuse et efficace des interventions des États en mer et les objectifs du développement économique et social. La Charte de Lomé s inscrit dans l optique de la stratégie maritime africaine à l horizon 2050, dont l objectif est également de faire de l espace maritime l un des principaux leviers du développement économique et social de l Afrique. La particularité du Sommet de Lomé est de mettre en balance les enjeux sécuritaires de la mer et les enjeux de développement. Les opérateurs économiques seront ainsi associés au processus. exchange of information and coordination that establishes a junction between the Central Africa Regional Maritime Security Centre (CRESMAC) and West Africa Regional Maritime Security Centre (CRESMAO). The coastal space of the two economic communities is subdivided into operational maritime zones whose activities are coordinated within Multinational Coordination Centers (MCC). The CRESMAC (1) and CRESMAO (2) respectively cover two and three MCCs, representing the number of operational maritime zones under their governance. On a national level, it is expected that a maritime operations center (MOC) will be created per country and will unite, in addition to the national navy that will ensure coordination, the major players of the State s action at sea (maritime police, customs, fishing and environmental protection). The structures of the ECCAS saw the beginning of operations with the appointment of a director of the CRESMAC based in Pointe-Noire (Republic of the Congo). The CRESMAO expected to be based in Abidjan (Ivory Coast) is still in the project stages (3). Generally, the entry into operation of the structures appears thwarted by insufficient resources and a lack of long term funding mechanisms (4). Thus, barely inaugurated in September 2014, the ICC saw the eviction of its director after a polemic on the management of the initial funds allocated by the Cameroon government in the startup phase of the center (5). Moreover, three years after the Yaoundé summit, the code of conduct signed by the stakeholders is still not enforced. As underscored by Samuel Nguembock, one of the recurring pitfalls in the construction of security-related multilateralism in the Gulf of Guinea is related to the capacity and desire of the neighboring States to cooperate with each other despite the initiatives and technical and operational support of foreign powers and global multilateral bodies (6). The Stakes of the Lomé Summit One of the major challenges of the African Union extraordinary summit on maritime safety and security and development in Africa, called for 15th October, 2016 in Lomé, is to avoid the quicksand of the Yaoundé process. The stated ambition is henceforth the adoption of a new legal instrument, an African charter that aims to conciliate the harmonious and effective coordination of the interventions of the States at sea with social and economic development objectives. The Lomé charter will be adopted in the framework of the 2050 African Integrated Maritime strategy, whose purpose is also to make the maritime space one of the main levers of the economic and social development of Africa. The particularity of the Lomé summit is to balance safety at sea with development. Economic operators will thus be associated with the process. 86 Diplomatie - octobre 2016 Sécurité maritime et développement en Afrique

87 What Strategies? Au-delà de la seule piraterie, le Sommet de Lomé couvrira par conséquent toutes les formes de criminalité en mer (7), et préconisera des mesures, en amont, pour décourager les actes illicites en mer. Actuellement, toutes les initiatives sont uniquement orientées vers la détection et la répression de ces actes. Enfin, contrairement au Code de conduite de Yaoundé, qui ne concernait que les pays du golfe de Guinée, la Charte de Lomé se projette à l échelle continentale. Toutefois, en dépit des efforts entrepris par les États pour se doter de structures institutionnelles spécifiques destinées à la gestion des questions maritimes (8), l opérationnalisation de cette ambitieuse architecture maritime africaine semble encore un objectif à long terme. Elle dépend non seulement du renforcement de la coordination et de l harmonisation des législations aux niveaux interétatique et interrégional, mais aussi de la délimitation des frontières maritimes. Le soutien des partenaires techniques et financiers s avère indispensable pour la viabilité d un système intégré de sécurité régionale. Un autre des défis majeurs est celui d un risque d inertie et de lourdeur décisionnelle, avec la multiplication de structures dont l articulation pourrait s avérer problématique. Le parcours de la Force africaine en attente (FAA) en est une illustration, avec la décision de l UA de construire une Capacité africaine de réaction immédiate aux crises (CARIC), alors même que l opérationnalisation de la FAA tarde à se concrétiser. La création du CIC reconduit dans une certaine mesure ce scénario, au moment où les efforts de réforme et de renforcement des capacités entrepris, tant par les États que par les structures régionales, ne sont pas encore achevés (9). Dans le sillage du Sommet de Lomé, l UA et ses composantes régionales seront sans doute appelées à repenser le rôle et l articulation de certaines structures du dispositif de sûreté et sécurité maritimes. En effet, l Organisation maritime de l Afrique de l Ouest et du centre (OMAOC) (10) comme la CGG (11) auraient pu prétendre au rôle de coordination de la stratégie maritime intégrée, dévolu au CIC, en raison de l interdépendance croissante de tous les enjeux maritimes (commerce, sécurité, environnement, etc.). Nombre d experts estiment qu au lieu de créer le CIC, la CEEAC et la CE- DEAO auraient pu responsabiliser l OMAOC pour faire la jonction entre le CRESMAO et le CRESMAC. Par ailleurs, la dévolution des missions de coordination et des capacités opérationnelles à un nombre d instances limité réduirait la contrainte financière qui pèse sur la plupart des États membres du Unlike the Yaoundé Code of Conduct, that only concerns the countries of the Gulf of Guinea, the Lomé charter aims for a continental scope. Beyond piracy, the Lomé summit will cover all forms of organized crime at sea (7) and recommend measures, upstream, to discourage illegal acts at sea. Currently, all the initiatives focus only on the detection and suppression of these acts. Finally, unlike the Yaoundé Code of Conduct, that only concerns the countries of the Gulf of Guinea, the Lomé charter aims for a continental scope. However, despite the efforts undertaken by the States to set up specific institutional structures to manage maritime issues (8), bringing this ambitious African maritime structure into operation still appears to be a long term objective. It not only depends on the reinforcement of the coordination and harmonization of legislations at the inter-state and inter-regional levels, but also on the delimitation of maritime borders. The support of technical and financial partners proves indispensable for the viability of an integrated regional security system. Another of the major challenges is that of a risk of inertia and decisionmaking heaviness, with the multiplication of structures whose articulation could prove problematic. The path of the African Standby Force is an illustration, with the decision of the African Union to build an African Capacity for Immediate Response to Crises (ACIRC) while the placement into operation of the African Standby Force remains to be done. The creation of the ICC renews to a certain extent this scenario at a time when efforts to Golfe de Guinée : la longue marche de l architecture africaine de sûreté et de sécurité maritimes CEEAC Centre régional de sécurité maritime d Afrique centrale (CRESMAC) Siège : Pointe-Noire (Congo-Brazzaville) - Zone A (Angola, RDC, Congo) - Zone D (Cameroun, Gabon, Guinée-Équatoriale, Sao Toméet-Principe) Centre interrégional de coordination (CIC) Siège : Yaoundé (Cameroun) CEDEAO Centre régional de sécurité maritime d Afrique de l Ouest (CRESMAO) Siège : Abidjan (Côte d Ivoire) - Zone E (Nigéria, Togo, Bénin) - Zone F (Ghana, Côte d Ivoire, Libéria, Sierra Leone, Guinée) - Zone G (Sénégal, Gambie, Guinée-Bissau, Cap Vert) Diplomatie - october 2016 Maritim Security and Development in Africa 87

88 Quelles stratégies? Photo ci-dessus : Réunion des représentants d États membres de la CEDAO et de la CEEAC à Cotonou, au Bénin, pour aborder la question de la sécurité maritime. ( US Africom/Olufemi A. Owolabi) Above: Meeting of the representatives of the member states of the ECOWAS and ECCAS in Cotonou, Benin, to tackle the issue of maritime security. ( US Africom/Olufemi A. Owolabi) fait de leur appartenance à plusieurs organisations régionales, au sein desquelles ils sont soumis au principe d un financement par contribution nationale. Dans l immédiat, l urgence est au renforcement de la présence en mer des pays riverains, sans pour autant négliger les causes profondes de l insécurité maritime. Notes Michel Luntumbue (1) Le CRESMAC couvre deux zones maritimes : la zone D avec un CMC situé à Douala (Cameroun) et la zone A avec un CMC dont l installation est prévue à Luanda (Angola). (2) Selon certaines indiscrétions, la CEDEAO pourrait revoir son architecture pour intégrer la Guinée (Conakry) à la zone G afin que ce pays accueille le CMC de ladite zone. Accra, au Ghana, a déjà été désigné pour accueillir le CMC de la zone F. (3) Seuls les CMC de Douala, au Cameroun (zone D), et de Cotonou, au Bénin (zone E), sont opérationnels. (4) Lors de la réunion extraordinaire de haut niveau consacrée au CIC, en février dernier, il avait été recommandé que les États membres fournissent 40 % des ressources nécessaires, qui seront complétées par les partenaires bilatéraux et internationaux. L opérationnalisation du centre étant prévue entre juillet et décembre (5) Jean-Bruno Tagne, «Flou, les 310 millions de la discorde», Le Jour, 15 décembre (6) Samuel Nguembock, «La construction du multilatéralisme sécuritaire dans le golfe de Guinée : les risques potentiels d une hypertrophie institutionnelle», Conférence internationale sur la sécurité dans le Golfe de Guinée, Lisbonne, 11 juillet (7) Le trafic de drogues, la pêche illicite, le déversement illégal de déchets toxiques, le trafic d armes et de migrants ou encore la traite des personnes. (8) Création de préfectures maritimes et d un organisme national chargé de l action de l État en mer au Bénin, au Togo, au Sénégal, etc. (9) Samuel Nguembock, op. cit. (10) Chargée des questions de transport maritime et d environnement marin depuis 1975, l OMAOC s intéresse de plus en plus aux questions de sécurité et de sûreté maritimes, avec son projet de développement d un réseau de gardes-côtes et d intégration des différentes instances de l action de l État en mer. (11) Chargée de l arbitrage des litiges territoriaux dans le domaine maritime du golfe de Guinée, mais dépourvue de capacités opérationnelles, la CGG pourrait se voir déposséder de ses prérogatives, voire disparaître. Les conflits de délimitation des frontières maritimes pourraient se régler dans les communautés économiques régionales (CER) et mécanismes régionaux. reform and reinforce the capabilities undertaken both by the States and the regional structures, are not yet complete (9). In the wake of the Lomé summit, the AU and its regional components will undoubtedly be called upon to rethink the role and articulation of certain structures of the maritime safety and security system. The Maritime Organization of Western and Central Africa (MOWCA) (10), like the GGC (11) could have claimed the role of coordination of the integrated maritime strategy, attributed to the ICC, due to the growing interdependence of all maritime issues (trade, safety, environment etc.). A number of experts feel that instead of creating the ICC, the ECOWAS and ECCAS could have assigned the responsibility to the MOWCA of establishing the junction between the CRES- MAO and CRESMAC. Furthermore, the attribution of the assignments of coordination and operational capabilities to a limited number of bodies would reduce the financial constraint that weighs on most of the member States due to their belonging to several regional organizations, within which they are forced to finance through national contributions. For the moment, it is urgent to strengthen the presence at sea of neighboring countries without neglecting the profound causes of maritime insecurity. Notes Michel Luntumbue (1) The CRESMAC covers two maritime zones: zone D with one MCC located in Douala (Cameroon) and zone A with an MCC that will be established in Luanda (Angola). (2) According to unofficial sources, the ECOWAS could be restructured to include Guinea in zone G so that this country could host the MCC of said zone. Accra, in Ghana, has already been designated to host the MCC of zone F. (3) Only the MCCs of Douala, in Cameroon (zone D), and Cotonou, in Benin (zone E), are operational. (4) During its extraordinary high level meeting devoted to the ICC last February, it was recommended that the member States provide 40% of the resources necessary that would be supplemented by the bilateral and international partners. The placement into operation of the center is slated for some time between July and December (5) Jean-Bruno Tagne, Flou, les 310 millions de la discorde (Fuzzy, the 310 millions of discord), Le Jour, 15 December (6) Samuel Nguembock, La construction du multilatéralisme sécuritaire dans le golfe de Guinée : les risques potentiels d une hypertrophie institutionnelle (The construction of the multilateralism of safety in the Gulf of Guinea: the potential risks of institutional hypertrophy). International conference on maritime security in the Gulf of Guinea, Lisbon, 11 July (7) Drug trafficking, illegal fishing, illegal toxic waste spillage, trafficking of arms and migrants or human slave trade. (8) Creation of maritime prefectures and a national organization in charge of the State s action at sea in Benin, Togo, Senegal, etc. (9) Samuel Nguembock, op. cit. (10) In charge of maritime transport and marine environment issues since 1975, the MOWCA is taking an increasing interest in the issues of maritime safety and security with its plan to develop a coast guard network and incorporate different bodies of the State s action at sea. (11) In charge of the arbitration of territorial disputes in the maritime domain of the Gulf of Guinea, but lacking operational capabilities, the GGC could see its prerogatives taken away, or disappear. Conflicts on the delimitation of maritime borders could be settled in the Regional Economic Communities (REC) and via regional mechanisms. 88 Diplomatie - octobre 2016 Sécurité maritime et développement en Afrique

89 What Strategies? analyse La révolution portuaire africaine Par Nora Mareï, chargée de recherche au CNRS, UMR 8586 PRODIG. By Nora Mareï, research fellow at CNRS, UMR 8586 PRODIG. analysis Alors que l Afrique portuaire s aligne sur les normes internationales (1), c est dans la capacité de ces nouvelles offres d échange à pénétrer les arrière-pays et à alimenter les projets entrepreneuriaux locaux qu il faut chercher les possibilités de croissance des trafics portuaires, mais également de développement économique pour l ensemble du continent L image du navire gréé et en route pour l Afrique n est plus d actualité : le continent a fait sa révolution portuaire. Les ports sont équipés de portiques à conteneurs de dernière génération ou de grues mobiles, améliorant nettement la vitesse de traitement des marchandises, et des navires de plus en plus imposants (jusqu à 9400 équivalents vingt pieds EVP) font escale dans les ports africains. Ces modifications durables des manières d échanger rapprochent le continent du reste du monde. Sa connectivité, c est-à-dire son The African Port Revolution As African ports align themselves with international standards (1), it is in their capacity to penetrate the hinterland and nourish local entrepreneurial projects that one must seek the possibilities for growth of port activity, but also economic development for the entire continent. T he image of a vessel fit-out and on route for Africa is no longer current: the continent has undergone its port revolution. The ports are now equipped with the latest generation container gantries or overhead cranes, considerably improving the speed of goods handling, and larger and larger vessels (up to 9,400 twentyfoot equivalent units-teu) stop in African ports. These durable changes to trading bring the continent closer to the rest of the world. Its connectivity, that is its connection offer, is multiplied both in the maritime and aerial domains. Photo ci-dessus : Escale du porte-conteneurs Amerigo Vespucci (capacité maximale de EVP) de CMA CGM, à Tanger- Med, au Maroc. ( N. Mareï) Above: Stopover of the container ship Amerigo Vespucci (maximum capacity of 14,000 TEU) of CMA CGM, in Tanger-Med, Morocco. ( N. Mareï) Diplomatie - october 2016 Maritim Security and Development in Africa 89

90 Quelles stratégies? Photo ci-contre : Porte-conteneurs dans le port sudafricain de Durban, le plus grand port d importation et d exportation d Afrique du Sud. ( Don Victorio) Opposite: Container ship in the South African port of Durban, the largest importexport port of South Africa. ( Don Victorio) offre de connexion, décuple, tant dans le domaine maritime que dans le domaine aérien. La course au hub africain L affirmation de la conteneurisation lors de la dernière décennie (2) a largement contribué à ces changements puisque le conteneur oblige à une standardisation des outils et des pratiques. Aujourd hui, le continent compte plusieurs ports millionnaires dont les volumes sont soutenus par le fret international provenant de l interlining (croisement des grandes lignes régulières au niveau des hubs) et par une fonction plus régionale de hub de transbordement. Sur les passages interocéaniques, zones de passages obligés, des volumes importants sont ainsi relevés : au Maroc, avec Tanger-Med ( EVP en 2014) ; en Égypte, autour du duo méditerranéen Port-Saïd ( EVP)/Damiette ( EVP) ; enfin en Afrique du Sud, pays africain le plus anciennement engagé dans la conteneurisation, avec le port de Durban ( EVP) et le hub de Ngqura ( EVP) en service depuis Seule exception à ce schéma des pays qui profitent de leur position interocéanique pour asseoir leurs trafics, le Nigéria, avec le complexe portuaire de Lagos qui enregistre EVP en La croissance portuaire y est directement imputable au dynamisme économique et le pays connaît un accroissement des échanges commerciaux et une forte consolidation des classes moyennes consommatrices de biens manufacturés. Incontestablement, l Afrique maritime et portuaire se mondialise et se standardise. Ces évolutions se réalisent dans le cadre d une forme de course au hub africain. Les terminaux à conteneurs se multiplient sur les côtes occidentales et orientales du continent au risque peut-être d une surcapacité. Mais, surtout, les réalités du terrain et le concept même d organisation des transports maritimes autour de hubs et de feeders (petits navires pour les liaisons régionales) font que peu de ports présentent les critères essentiels pour devenir le hub sous-régional. Dans la configuration actuelle, hormis le terminal à conteneurs de Lomé, géré par MSC et China Merchants qui y alignent des navires de EVP en provenance d Asie, peu de ports africains ont des tirants d eau suffisamment élevés pour accueillir les plus grands porte-conteneurs. Quelles perspectives de développement? Les perspectives de croissance résident alors davantage dans l augmentation des trafics intra-africains et dans la consolidation des trafics nationaux. D ailleurs, Tanger-Med joue aujourd hui un rôle de plus en plus incontournable de hub The race to the African hub The reaffirmed containerization of the last decade (2) has largely contributed to these changes since the container entails a standardization of tools and practices. Today, the continent counts several million-container ports whose volumes are supported by international freight from interlining (intersection of major regular shipping lines in hubs) and by a more regional hub function of transshipment. Significant volumes have been recorded on the inter-oceanic passages, mandatory zones of passage: in Morocco with Tanger-Med (3,000,000 TEU in 2014); in Egypt, around the Mediterranean duo of Port-Saïd (4,000,000 TEU) Damiette (700,000 TEU); finally in South Africa, the first African country to engage in containerization, with the port of Durban (2,600, 000 TEU) and the hub of Ngqura (700,000 TEU) in service since The only exception to this range of countries that benefit from their inter-oceanic position to impose their traffic is Nigeria, with the port complex of Lagos that posts 1,600,000 TEU in Port growth is directly attributable to economic growth and the country has seen an increase of commercial trading and the strong consolidation of middle classes, consumers of manufactured goods. These changes take place in a sort of race to the African hub. Container terminals are being multiplied on the western and eastern coasts of the continent perhaps running the risk of overcapacity. Above all, the situations in the field and concept itself of the organization of maritime transport around hubs and feeders (small ships for regional links) is such that few ports have the essential criteria to become the sub-regional hub. In the current configuration, except for the container terminal of Lomé, managed by MSC and China Merchants who align ships of 9,000 TEU from Asia, few African ports have sufficient depth to host the large container ships. What perspectives for development? The perspectives for growth reside more in the increase of inter-african traffic and in the consolidation of national 90 Diplomatie - octobre 2016 Sécurité maritime et développement en Afrique

91 What Strategies? ouest-africain : 70 % des volumes de transbordement sont à destination des ports de l Afrique atlantique, de Nouadhibou (Mauritanie) à Namibe (Angola). Il tire profit des stratégies des opérateurs globaux qui ont fortement investi le hub (en remplacement ou en complément d Algésiras en Espagne) et qui proposent alors des lignes directes plus courtes de type feeders vers les ports africains. Certains acteurs du transport parlent même d une nécessité d augmenter les fréquences (généralement hebdomadaire) et la taille des feeders (en moyenne EVP) pour soutenir ce schéma de transbordement depuis la côte sud du détroit de Gibraltar. Toutefois, des revers récents comme le retrait de l armateur japonais MOL ou du taïwanais Evergreen de leurs lignes reliant l Europe à l Afrique mettent au jour les difficultés du marché africain (concurrence en hausse, surcapacité, dispersion des marchés) ainsi que le manque de rentabilité de certaines lignes. Dans ce contexte, la multiplication des partenariats pour gérer les lignes et le croisement des investissements dans les terminaux se développent et permettent une minimisation des risques financiers même pour les opérateurs implantés depuis longtemps en Afrique. Les concurrents d hier sont devenus les partenaires de demain : le futur terminal en eau profonde de Kribi, au Cameroun, est ainsi concédé à un consortium formé par Bolloré, CMA CGM et l entreprise de génie civil chinoise CHEC ; Bolloré est associé avec APMT et la Ghana Ports and Harbour Authority pour l extension du port de Tema ; alors que la CMA CGM est cette fois-ci associée à l opérateur philippin ICTSI autour du projet de Lekki, au Nigéria. La récente montée des entreprises asiatiques est également à souligner et montre la diversification des partenariats économiques : China Merchants et Cosco (Chine), Portek et PSA (Singapour), HPH (Hong Kong), ICTSI (Philippines) et DPW (Émirats arabes unis) sont aujourd hui présents dans la gestion d une vingtaine de terminaux portuaires. Les stratégies de ces opérateurs internationaux tendent d une part à multiplier les terminaux à conteneurs, et favorisent d autre part la terminalisation des activités portuaires (spécialisation des terminaux) qui prend progressivement la place d un système où l ensemble du fret (conventionnel, roulier, conteneur) était traité au même endroit. Ces mutations des organisations portuaires ont des impacts sur l aménagement, les terminaux à conteneurs étant aujourd hui majoritairement positionnés hors des villes pour gagner de la place au sol (pour les quais et les terre-pleins) et du tirant d eau : le projet de Kribi affiche 16 mètres de profondeur, les futurs terminaux nigérians de Lekki et Badagry (concédé à AMPT) 14 à 16 mètres, le futur port tanzanien de Bagamoyo, où opérera China Marchants, étant lui aussi présenté à 16 mètres. Ces profondeurs permettent l accueil de navires de 5000 à 9000 EVP, alignant ainsi la taille des navires à destination de l Afrique sur la moyenne internationale. Uncontestably, maritime and port-related Africa is globalizing and standardizing. traffic. Moreover, Tanger-Med today increasingly plays the inescapable role of west African hub: 70% of the transshipment volumes are destined for the Atlantic African ports of Nouadhibou (Mauritania) and Namibe (Angola). It benefits from the strategies of global operators who have invested heavily in the hub (replacing or supplementing Algesiras in Spain) and who then offer shorter direct lines of the feeder type towards African ports. Some transport players even consider the necessity of increasing the frequency (generally weekly) and size of the feeders (on average 1,500 to 1,700 TEU) to support this transshipment system from the southern coast of the strait of Gibraltar. However, recent setbacks like the withdrawal by the Japanese shipper MOL or the Taiwanese Evergreen of their shipping lines connecting Europe to Africa shed light on the difficulties of the African market (increased competition, overcapacity, dispersal of markets) and the lack of profitability of certain lines. In this context, the multiplication of partnerships to manage the lines and the intersection of investments in the terminals are developing and help minimize financial risks even for operators established for a long time in Africa. Yesterday s competitors have become the partners of tomorrow: the concession of the future deep water terminal of Kribi, in Cameroon, has been granted to a consortium formed by Bolloré, CMA CGM and the Chinese civil engineering company CHEC; Bolloré is associated with PMT and Ghana Ports and Harbour Authority for the extension of the port of Tema; while CMA CGM is this time associated with the Pilipino operator ICTSI on the Lekki project in Nigeria. The recent rise of Asian companies is also to be underscored and shows the diversification of economic partnerships: China Merchants and Cosco (China), Portek and PSA (Singapore), HPH (Hong Kong), ICTSI (Philippines) and Photo ci-contre : Le 21 juillet 2015, le super porteconteneurs Maersk-Lomé, d une capacité de conteneurs, accoste dans le port autonome de Lomé (PAL), capitale du Togo. Alors que ce dernier dispose des moyens d accueillir les plus grands porte-conteneurs, le PAL a bénéficié d un plan de développement lancé en 2011 pour lui permettre de quadrupler ses capacités. ( Emmanuel Pita/Republicoftogo) Opposite: On 21th July, 2015, the super container ship Maersk-Lomé, with a capacity of 5,446 containers, docked in the port of Lomé (PAL), capital of Togo. While the latter has the resources to host the largest of the container ships, the port has been undergoing development since 2011 to enable it to quadruple its capacity. ( Emmanuel Pita/Republicoftogo) Diplomatie - october 2016 Maritim Security and Development in Africa 91

92 Quelles stratégies? Les ports conteneurisés africains en 2014 Santa Cruz Las Palmas Tanger-Med Casablanca Dakar San Pedro 1. Tema 2. Lomé 3. Cotonou 4. Lagos Mali Burkina F. Abidjan Les trafics conteneurs 2014, M. EVP 4 1,7 0,25 Trafics multipliés par plus de 1,5 entre 2009 et 2014 Pays enclavés Conception / Sources : N. Mareï, Niger Douala Pointe-Noire Luanda Walis Bay Tunis Le Cap Damiette Alexandrie El-Dekheila Tchad Centrafrique Zambie Ouganda Malawi Zimbabwe Botswana Swaziland Lesotho Sokhna Soudan du Sud Ngqura Port Elizabeth Port-Saïd Port-Soudan Éthiopie Durban Djibouti Mombasa Dar es Salam ( AREION/CAPRI) km Le développement de la logistique périportuaire et le renforcement des liens aux hinterlands sont ainsi les principaux défis à relever pour consolider les trafics et alimenter tous les nouveaux terminaux. Les ports, acteurs de l intégration régionale? Incontestablement, l Afrique maritime et portuaire se mondialise et se standardise. L échelle macrorégionale (celle des relations entre pays voisins) en profite. En effet, les échanges intracontinentaux par la voie maritime affichent un fort potentiel de croissance susceptible de favoriser une intégration régionale. Mais cette dernière demeure principalement littorale : les flux terrestres souffrent encore de difficultés diverses, de la mauvaise qualité d une partie du réseau jusqu aux fréquentes ponctions en tous genres et tout au long des trajets. Le développement de la logistique périportuaire et le renforcement des liens aux hinterlands sont ainsi les principaux défis à relever pour consolider les trafics et alimenter tous les nouveaux terminaux. Dans de nombreux pays, de l Égypte au Sénégal en passant par le Nigéria ou le Maroc, la logistique est le nouveau fer-de-lance des politiques de transport. Le ministère The development of portperipheral logistics and strengthening of ties with the hinterlands are thus the main challenges to be met to consolidate traffic and supply all the new terminals. DPW (United Arab Emirates) are today present in the management of about twenty port terminals. The strategies of these international operators is to multiply the container terminals and promote the terminalization of port activities (specialization of terminals) that is progressively taking the place of a system where all the cargo (conventional, roll-on/roll-off, container) was handled in the same place. These changes to port organizations have an impact on layout, as the container terminals are currently for the most part positioned outside the cities to gain ground space (for docks and open areas) and depth: the Kribi project is 16 meters deep, the future Nigerian terminals of Lekki and Badagry (granted to AMPT) 14 to 16 meters, the future Tanzanian port of Bagamoyo, where China Merchants operates, also posting a depth of 16 meters. These depths allow the hosting of 5,000 to 9,000 TEU vessels, thus aligning the size of the ships destined for Africa with the international average. Ports, actors of regional integration? Uncontestably, maritime and port-related Africa is globalizing and standardizing. The macro-regional scale (that of relations between neighboring countries) benefits from it. Indeed, intra-continental trade via maritime channels shows strong potential for growth likely to promote regional integration. But the latter remains for the most part coastal: land flows still suffer from various difficulties, from the poor quality of part of the network to the frequent pilfering of all types throughout the routes. The development of port-peripheral logistics and strengthening of ties with the hinterlands are thus the main challenges to be met to consolidate traffic and supply all the new terminals. In many countries, from Egypt to Senegal and including Nigeria or Morocco, logistics is the new spearhead of transport policies. The Moroccan Ministry of Equipment, Transport and Logistics has implemented a vast national plan to this effect; elsewhere numerous dry port projects are arising. The purpose of these new inland platforms is to ensure the fluidity of storage and distribution, but can also evolve towards more sophisticated installations, from the bonded warehouse to a facility for the end-processing of certain products (packing and packaging services for example), opening the way to the hosting of delocalized activities and new perspectives for international trade. While most projects are still embryonic, their interest lies in the fact that they have led decision-makers and transport players to reflect on the fluidity of transport chains. More globally, it is the place of the continent 92 Diplomatie - octobre 2016 Sécurité maritime et développement en Afrique

93 What Strategies? Ces nouvelles plates-formes intérieures ont pour vocation de fluidifier les entreposages et la distribution, mais peuvent également évoluer vers des installations plus sophistiquées, depuis l entrepôt sous douane jusqu à un espace de transformation finale de certains produits. de l Équipement, du Transport et de la Logistique marocain a par exemple mis en œuvre un vaste plan national en ce sens ; ailleurs, de nombreux projets de ports secs voient le jour. Ces nouvelles plates-formes intérieures ont pour vocation de fluidifier les entreposages et la distribution, mais peuvent également évoluer vers des installations plus sophistiquées, depuis l entrepôt sous douane jusqu à un espace de transformation finale de certains produits (prestations d emballage et de conditionnement par exemple), ouvrant alors la voie à l accueil d activités délocalisées et à de nouvelles perspectives d échanges internationaux. Si la majorité des projets sont encore embryonnaires, ils ont l intérêt d avoir entraîné décideurs et acteurs du transport dans une réflexion sur la fluidité des chaînes de transport. Plus globalement, c est la place du continent dans les marchés internationaux qui est désormais en jeu et qui influencera durablement les modes de développement économique mis en place. Bien entendu, le secteur des transports marchands est loin d être uniforme sur cet immense continent. Cependant, certains enjeux s expriment aujourd hui avec force dans une grande majorité de pays africains : aux échelles locales et nationales, gérer la congestion dans les grandes villes et sur les littoraux, car le développement portuaire accompagne la métropolisation des littoraux africains ; à l échelle internationale, mieux s insérer dans les marchés mondiaux en proposant une offre de transport répondant aux standards internationaux depuis le port et jusqu aux arrière-pays ; enfin, à l échelle régionale, favoriser les échanges entre les pays voisins en luttant contre les prélèvements abusifs sur les marchandises et les hommes. Notes Nora Mareï (1) Nora Mareï, «Terminalisation, spécialisation et enjeux logistiques des ports africains», note de synthèse n o 179 de l ISEMAR, avril (2) Yann Alix, «Une décennie de conteneurisation en Afrique subsaharienne», note de synthèse n o 141 de l ISEMAR, janvier The purpose of these new inland platforms is to ensure the fluidity of storage and distribution, but can also evolve towards more sophisticated installations, from the bonded warehouse to a facility for the end-processing of certain products. in international markets that is henceforth at stake and which will durably influence the economic development modes set up. Of course, the merchant transport sector is far from uniform on this huge continent. However, some implications are being expressed today with force in most African countries: at the local and national levels; managing congestion in major cities and on the coasts since the development of ports accompanies the urbanization of the African coasts; on the international scale, better fit into world markets by offering transport meeting international standards from the port to the hinterlands; finally on a regional scale, promoting trade between neighboring countries by combatting abusive pilfering of goods and people. Notes Nora Mareï (1) Nora Mareï, Terminalisation, spécialisation et enjeux logistiques des ports africains Terminalization, specialization and logistical stakes of African ports) summary note No. 179 of ISEMAR, April (2) Yann Alix, Une décennie de conteneurisation en Afrique subsaharienne (A decade of containerization in sub-saharan Africa), summary note No. 141 of ISEMAR, January Photo ci-contre : Certains ports africains, comme ici celui de Dar es Salam, en Tanzanie, sont stratégiques pour les importations et exportations de pays enclavés comme le Rwanda, dont 70 % du commerce maritime passe par ce port. ( Igor Grochev) Opposite: Some African ports, like this one, Dar es Salam in Tanzania, are strategic for the imports and exports of land-locked countries like Rwanda, 70% of whose maritime trade passes through this port. Igor Grochev) Diplomatie - october 2016 Maritim Security and Development in Africa 93

94 Quelles stratégies? analyse Par le Dr Virginie Saliou, adjointe au coordonnateur en matière de sûreté maritime, ministère français de la Défense. By Dr Virginie Saliou, deputy Coordinator for maritime security, French Ministry of Defense. analysis «L Afrique bleue» : l ambition d un continent pour un développement sûr et harmonieux Photo ci-dessus : Terminal d exportation de charbon de Richards Bay, en Afrique du Sud. Créé dans les années 1970, ce port en eau profonde relié à l arrièrepays par des chemins de fer est aujourd hui le plus important port d Afrique (en volume) et l un des principaux exportateurs de charbon au monde. ( RCBT) Above: Coal export terminal at Richards Bay, South Africa. Built in the 1970s, this deep water port linked by railroad to points inland is today the largest (by volume) in Africa and one of the main exportation points for coal worldwide. ( RCBT) E n Afrique, le pôle d inaccessibilité se situe à 1814 km des côtes, à proximité de la ville d Obo (1). Territoire le plus enclavé du continent, son développement dépend néanmoins de la sécurisation d espaces maritimes parfois très éloignés. Ce lien terre-mer n est pas toujours perçu de manière évidente. Et pourtant : 92 % des marchandises arrivant en Afrique ou en partant sont transportées par voie de mer. L accès aux marchés internationaux pour vendre coton du Burkina Faso, mangues du Mali, café d Ouganda ou uranium du Niger passe par des routes maritimes sécurisées et des ports de transit répondant aux exigences du commerce maritime mondial. Malgré cela, l Afrique ne dispose encore que de peu de ports de grande envergure permettant de desservir l ensemble du continent. Le premier port africain se situe ainsi au 44 e rang mondial (2), tandis que les routes maritimes africaines souffrent toujours des phénomènes de piraterie et de Blue Africa : the Ambition of a Continent for Secure and Harmonious Development I n Africa, the center of inaccessibility is located 1,814 km from its coasts, near the city of Obo (1). The most landlocked territory of the continent, its development nevertheless depends on the securing of sometimes very distant maritime spaces. This land-sea link is not 94 Diplomatie - octobre 2016 Sécurité maritime et développement en Afrique

95 What Strategies? brigandage (3). Le Togo, dont le port de Lomé dessert aujourd hui une large partie de la sous-région Mali, Niger, Burkina Faso, Ghana connaît ce lien intrinsèque entre sécurisation des espaces maritimes et développement économique. En 2012, il fut l un des pays d Afrique de l Ouest et centrale les plus touchés par la piraterie. La sécurisation rapide du port et l application effective du Code ISPS (4) ont permis une hausse du trafic maritime de 7,7 millions de tonnes de marchandises transportées en 2012 à 9,2 millions en 2014, l augmentation se poursuivant. Démonstration est faite, s il en était besoin, que sécurité des espaces maritimes et croissance économique sont étroitement liées. Assurer la sécurité de la navigation grâce à des routes maritimes clairement cartographiées et balisées, lutter contre les trafics criminels en mer, au premier rang desquels la piraterie et le brigandage, développer des zones de mouillage et des ports sûrs favorisent en effet le développement économique et la croissance durable, non seulement du pays côtier, mais aussi de l hinterland. Pénaliser et traduire en justice les contrevenants permet aussi des rentrées d argent importantes. Le always perceived in an evident manner, and yet 92% of the goods arriving in Africa or leaving it are transported by sea. Access to international markets to sell the cotton of Burkina Faso, the mangoes of Mali, Ugandan coffee or uranium from Niger use secured maritime routes and transit ports meeting the requirements of world maritime trade. Despite this, African still only has few large scale ports able to serve the entire continent. The leading African port ranks 44 th in the world (2) while the African maritime routes continue to suffer from piracy and brigandage (3). Togo, whose port of Lomé today serves a large part of the sub-region - Mali, Niger, Burkina Faso, Ghana is familiar with this intrinsic link between the securing of maritime spaces and economic development. In 2012, it was one of the countries of West and Central Africa most affected by piracy. The rapid securing of the port and effective application of the ISPS Code (4) allowed maritime traffic to grow from 7.7 million tons of goods transported in 2012 to 9.2 million in 2014, with this growth continuing. It is then obvious that Dans une situation de ressources limitées, les États africains ne peuvent se doter d outils pour chaque menace. Ils doivent en revanche optimiser l usage de ceux dont ils disposent et leur donner plusieurs fonctions, allant de la défense du territoire national depuis la mer jusqu à la lutte contre les pollutions et les trafics illégaux. Sénégal, par exemple, a ouvert la voie en adoptant en 2015 un Code de la pêche révisé sanctionnant très fortement les pratiques de pêches illégales, avec des amendes allant de 500 millions de francs CFA au minimum jusqu à un milliard. Les sanctions pour les atteintes à l environnement marin pourraient produire les mêmes effets. Selon la Banque mondiale, les quantités d hydrocarbures déversées dans le golfe de Guinée représentent chaque année près de tonnes : 710 sont liées à l exploitation pétrolière et sont rejetées de manière accidentelle. En 2011, au large du Gabon, s étendait ainsi une nappe d hydrocarbures de 107 kilomètres de long contaminant l une des régions du monde les plus riches en ressources halieutiques. Enfin, même si aucun lien systématique ne peut être mis en évidence, la lutte en mer contre les trafics d armes et de drogues contribue à couper à la racine des sources potentielles de financements d activités terroristes. S engager dans la sécurisation des espaces maritimes, c est donc promouvoir un développement économique et prospère de l Afrique. C est aussi contribuer de manière plus globale à la sécurité tout entière du continent. Parallèlement, le développement économique du continent contribue à une lutte de long terme contre l insécurité maritime : les entrées d argent légales et contrôlées limitent la the security of maritime spaces and economic growth are closely linked. Assuring the security of navigation thanks to clearly mapped and marked maritime routes, combatting criminal trafficking at sea, with piracy and brigandage in the lead, developing safe anchoring areas and ports promote economic development and sustainable growth, not only of the coastal countries but also the hinterland. Penalizing and taking legal action against offenders also allows the collection of significant sums of money. Senegal, for example, blazed the trail in 2015 by adopting a revised fishing code very heavily punishing illegal fishing practices with fines going from a minimum of 500 million CFA francs to a billion. Sanctions for pollution of the marine environment produce the same effect. According to the World Bank, the quantities of hydrocarbons spilled in the Gulf of Guinea each year represent 3,000 tons: 710 are related to oil production and 2,100 are spilled accidentally. In 2011, off the coast of Gabon, an oil spill 107 kilometers long contaminated one of the regions in the world with the greatest halieutic resources. Even if no systematic link can be spotlighted, the fight at sea against arms and drug trafficking contributes to cutting off potential sources of funding for terrorist activities. Engaging Photo ci-dessus : Vue aérienne de la ville du Cap, en Afrique du Sud. Dans l Agenda de l Union africaine pour 2063, il est affirmé que «l économie bleue de l Afrique représente trois fois la taille de sa masse terrestre, et devrait être le contributeur majeur à la transformation et la croissance du continent». ( Shutterstock) Above: Aerial view of Cape Town, South Africa. According to the African Union Agenda for 2063, Africa s blue economy is three times the size of its landmass and shall be a major contributor to continental transformation and growth. ( Shutterstock) Diplomatie - october 2016 Maritim Security and Development in Africa 95

96 Quelles stratégies? Photo ci-dessus : Des pêcheurs en mer à Madagascar. Le secteur de la pêche y est plus de 500 % plus productif que la moyenne générale des productions du pays. Selon la Commission économique des Nations Unies pour l Afrique (UNECA), la productivité provenant des secteurs liés directement ou indirectement de l économie bleue en Afrique de l Est est souvent plus élevée que la moyenne de l ensemble de l économie. ( Gail Johnson) Above: Fishermen at sea near Madagascar. The fishing sector here is over 500 percent more productive than the overall average of other economic sectors in the country. According to the United Nations Economic Commission for Africa (UNECA), the labor productivity of sectors directly or indirectly connected to the blue economy in Eastern Africa is often higher than the economy-wide average. ( Gail Johnson) corruption et l émergence des trafics illicites ; l approvisionnement régulier en ressources halieutiques et le développement de l aquaculture limitent la pêche côtière sous-dimensionnée et favorisent la préservation de l environnement ; la baisse des trafics illicites sur l espace littoral autorise le développement du tourisme balnéaire ; le développement de raffineries locales freine la vente illégale de pétrole. La sécurisation et l extension des ports engendrent pour leur part la construction de dessertes vers l arrière-pays, favorisant les échanges économiques et créant des emplois. Ce développement doit néanmoins se faire de manière concertée : l Afrique compte près de kilomètres de côtes et intensifie la construction de ports. Toutefois, la bathymétrie africaine impose dans la plupart des cas d importants aménagements qui induisent des phénomènes d érosion massive. Non pris en compte, ceux-ci sont susceptibles d accroître les tensions dans un espace massivement occupé, une grande partie des populations africaines vivant près des côtes. La sécurisation des espaces maritimes et le développement d une économie bleue durable requièrent dès lors une gouvernance spécifique et adaptée. L interdépendance des activités en mer nécessite en effet une approche concertée et une vision partagée, depuis le sommet de la pyramide, à l échelle du continent, jusqu à l échelon de mise en œuvre et entre administrations. Les pratiques illicites en mer se combattent souvent avec des moyens similaires. La corrélation entre les activités en mer oblige à penser de manière globale la lutte contre l insécurité maritime afin d éviter une duplication inutile des moyens dans une région du monde où ceux-ci sont particulièrement contraints. Les outils s adaptent en conséquence : bâtiments multimissions, cadres juridiques harmonisés, échanges d informations entre services, etc. Cette approche se veut aussi pragmatique : dans une situation de ressources limitées, les États africains ne peuvent se doter d outils pour chaque menace. Ils doivent en revanche optimiser l usage de ceux dont ils disposent et leur donner plusieurs fonctions, allant de la défense in securing maritime spaces is thus promoting the economic and prosperous development of Africa. It is also contributing more globally to the entire security of the continent. At the same time, the economic development of the continent contributes to the long term fight against maritime insecurity: the legal and controlled entry of money limits corruption and the emergence of illegal trafficking; the regular supply of halieutic resources and development of fish farms limit undersized coastal fishing and promote the preservation of the environment; decreasing illicit trafficking in the coastal area allows the development of seaside tourism; the development of local refineries hinders the illegal sale of oil. The securing and expansion of ports generates the construction of service routes to the hinterland, promoting economic exchanges and creating jobs. This development must nevertheless be carried out in a concerted manner: Africa has nearly 26,000 kilometers of coast and is intensifying the construction of ports. However, African bathymetry in most cases requires important arrangements that lead to massive erosion. Not taken into account, they are likely to increase tensions in a densely occupied space, the majority of African populations living near the coast. Securing maritime spaces and the development of a sustainable blue economy require specific and appropriate governance. The interdependence of activities at sea requires a concerted approach and shared vision, from the top of the pyramid, on the scale of the continent, to the implementation echelon and between administrations. Illicit practices at sea are often combatted with similar resources. The correlation between activities at sea entails global thinking in the fight against maritime insecurity in order to avoid an unnecessary duplication of resources in a region of the world where they are particularly restricted. Tools must adapt accordingly: multipurpose buildings, harmonized legal frameworks, information exchange between departments etc. This approach also aims to be pragmatic: in a situation of limited resources, the African States cannot equip themselves with instruments for each threat. However, they must optimize the use of those they have and give them several functions, going from the defense of the national territory from the sea to the fight against pollution and illegal trafficking. Cooperation between administrations, but also regional agreements, such as the Yaoundé process or Djibouti Code of Conduct, are key resources in combatting maritime insecurity and ensuring the tacking and punishment of offenders. Finally, international cooperation, in a globalized economy, is a supplemental resource of African proactiveness. The setting up of a Regional Maritime Fusion Information Center (CRIFM) in Madagascar for example, that exchanges with the Fusion Information Center of Singapore, testifies to the necessity of these exchanges that go beyond the borders and cross the oceans, each center supplying the other. Combatting maritime insecurity is a complex and global challenge. It is equivalent to working towards the security of a space that is simultaneously terrestrial and marine, but also to ensuring economic development and prosperity. This requires a concerted approach that includes political, economic, judicial and security aspects. Togo faces this ambitious challenge by uniting 54 African heads of State 96 Diplomatie - octobre 2016 Sécurité maritime et développement en Afrique

97 What Strategies? du territoire national depuis la mer jusqu à la lutte contre les pollutions et les trafics illégaux. Les coopérations entre administrations, mais aussi les accords régionaux, tels que le processus de Yaoundé ou le Code de conduite de Djibouti, constituent de surcroît des ressources clés pour lutter contre l insécurité maritime et s assurer de la poursuite et de la pénalisation des contrevenants. Enfin, la coopération internationale, dans une économie mondialisée, est une ressource complémentaire du volontarisme africain. La mise en place d un centre régional de fusion de l information maritime à Madagascar par exemple, échangeant avec l Information Fusion Centre de Singapour, témoigne de la nécessité de ces échanges qui dépassent les frontières et traversent les océans, chaque centre alimentant l autre. Lutter contre l insécurité maritime est un défi complexe et global. Il revient à œuvrer pour la sécurité d un espace à la fois terrestre et marin, mais aussi à en assurer le développement et la prospérité économique. Cela nécessite dès lors une approche concertée, intégrant les dimensions politique, économique, juridique et sécuritaire. Le Togo porte cet ambitieux pari en réunissant, le 15 octobre 2016, 54 chefs d État et de gouvernement africains autour de cet enjeu et en proposant, avec l Union africaine, une vision de long terme pour le continent. Les grands objectifs stratégiques continentaux pour le développement d une Afrique bleue ont déjà été définis dans la Stratégie africaine intégrée pour les mers et les océans Horizon Proposer des actions pragmatiques pour favoriser leur mise en œuvre constitue aujourd hui le socle de la réflexion du Sommet de Lomé, la sécurité des espaces maritimes africains étant à la fois un préalable et une conséquence de ces perspectives de croissance et de développement. Cette mise en œuvre sera en outre confrontée à la nécessité d une application adaptée aux particularismes locaux permettant de renforcer les nombreuses initiatives existantes. L amélioration de la sécurité des espaces maritimes favorisant le développement économique n est donc pas un cercle vertueux virtuel, mais bien une réalité tangible à portée de main, des mers et des océans sûrs et protégés étant source de profits pour l ensemble du continent. Dr Virginie Saliou and Government on 15th October, 2016 around this challenge and by proposing, with the African Union, a long term vision for the continent. The major continental strategic objectives for the development of blue Africa have already been defined in the 2050 African Integrated Maritime Strategy for the seas and oceans. Proposing pragmatic actions to promote their implementation is currently the basis of the reflection of the Lomé summit, the security of African maritime spaces being both a prerequisite and a consequence of these perspectives of growth and development. This implementation will furthermore be confronted with the necessity of an application tailored to local particularities allowing the reinforcement of the many existing initiatives. The improvement of the security of maritime spaces promoting economic development is thus not virtual virtuous circle, but indeed a tangible reality within reach, safe and protected seas and oceans being a source of profit for the entire continent. Dr Virginie Saliou Photo ci-dessus : Plage touristique sur l île de Zanzibar, en Tanzanie. Selon les observateurs du tourisme, l Afrique pourrait devenir la «destination du XXI e siècle». L Afrique est en effet l une des régions où le tourisme a le plus progressé ces dix dernières années et les recettes touristiques y constituent une source vitale pour de nombreuses économies. ( Shutterstock) Above: Tourist beach on the island of Zanzibar, Tanzania. Tourism watchers say Africa could become the destination of the 21 st century. Africa has been one of the fastestgrowing tourism regions of the past decade and tourism revenues are a vital source for many African economies. ( Shutterstock) Notes (1) Ce point le plus enclavé d Afrique se situe à la frontière entre le Soudan du Sud, la République démocratique du Congo et la République centrafricaine. (2) Richards Bay, en Afrique du Sud. (3) La recrudescence en nombre et en violence des actes de piraterie et de brigandage dans le golfe de Guinée depuis janvier 2016 contraste fortement avec l absence d attaques réussies dans la Corne de l Afrique depuis mai Elle ne reflète cependant pas les efforts réalisés au niveau local par les États côtiers et les trois organisations régionales réunies au sein du processus de Yaoundé. Elle appelle néanmoins à une poursuite et un renforcement de l engagement collectif contre l insécurité maritime en Afrique. (4) Code international pour la sûreté des navires et des installations portuaires, entré en vigueur au 1 er juillet Notes (1) This most landlocked point of Africa is located at the border between southern Sudan, The Democratic Republic of Congo and the Central African Republic.. (2) Richards Bay, in South Africa. (3) The growth in number and violence of acts of piracy and brigandage in the Gulf of Guinea since January 2016 are in strong contrast with the absence of successful attacks in the Horn of Africa since May This does not reflect the efforts made locally by the Coastal States and the three regional organizations united within the Yaoundé process. It calls for the pursuit and reinforcement of the collective undertaking against maritime insecurity in Africa. (4) International code for the security of ships and port facilities, that entered into effect on 1st July, Diplomatie - october 2016 Maritim Security and Development in Africa 97

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