LE CONTOURNEMENT ROUTIER DE THONON-LES-BAINS ET LE FRANCHISSEMENT DE LA COSTIERE DE LA DRANSE

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1 LE CONTOURNEMENT ROUTIER DE THONON-LES-BAINS ET LE FRANCHISSEMENT DE LA COSTIERE DE LA DRANSE THE DEVIATION OF THONON-LES-BAINS AND THE CROSSING OF COASTAL OF THE DRANSE Fabien BORSELLINO 1, Yves GUERPILLON 2 1 EGIS SE Géotechnique, Seyssins, France 2 EGIS SE Géotechnique, Seyssins, France RÉSUMÉ Le projet de contournement routier de Thonon-les-Bains s inscrit dans le projet de désenclavement de Chablais. Au niveau du passage de la Dranse, le projet se projette à flanc de coteau. Nous nous proposons de présenter les contraintes de ce projet de franchissement et les solutions qui ont été retenues. ABSTRACT The Thonon-les-Bains by-pass project falls under the project of improving the access to Chablais. In the vicinity of the river Dranse, the project is located in a hillside. We propose to present the constraints of this project and the solutions which were adopted. 1. Introduction Le contournement routier de Thonon-les-Bains fait partie du plan de désenclavement du Chablais, approuvé le 7 juillet 1999 par le Ministère de l Equipement, des Transports et du Logement. Déviant la RN 5 pour contourner Thonon-les-Bains, ce projet fait suite au projet de l autoroute A400 qui devait relier A40 à la Suisse et éventuellement l autoroute N9. La Déclaration d Utilité Publique (DUP) de ce projet avait été prise en 1995 pour une première section Annemasse Thonon. Elle a été cassée en 1998 après un recours. L alternative à l autoroute a déjà eu un commencement de mise en œuvre. En effet, le Département avait déjà aménagé en partie à 2 x 2 voies la Route Départementale Bonne-sur-Ménoge (A.40) Annemasse (carrefour des Chasseurs) et l Etat la RN 206 entre Annemasse/Machilly, cet axe étant parallèle au début de projet A.400. La solution maintenant retenue est celle de poursuivre l itinéraire par une voie en site propre (voir figure 1) : sous maîtrise d ouvrage Etat pour le tronçon Machilly/Thonon-les-Bains, sous maîtrise d ouvrage Département (Conseil Général de la Haute- Savoie) pour le contournement de Thonon-les-Bains, dont la mise en service est prévue en Egis est intervenu sur le projet en tant que Maître d œuvre. 191

2 Figure 1 : plan de situation Depuis Anthy (sur la RN 5 à l Est), le contournement rejoint la terrasse de Thonon-les-Bains, en passant par le viaduc du Pamphiot, puis redescend sur la RN5 en direction d Evian par la costière de la Dranse (voir figure 2). THONON-LES-BAINS Figure 2 : plan de situation, échelle 1/100000e Ce tracé permet de délester le trafic de transit tout en offrant une alternative au trafic inter-quartiers. La prise en compte des contraintes environnementales conduit à un tracé qui limite la consommation d espaces boisés au minimum. D autre part, les principales zones humides : Pamphiot, Dranse, Marais de la Versoie, sont évitées par le projet. 192

3 2. Conditions géologiques, géotechniques et hydrogéologiques Le projet de contournement de Thonon-les-Bains recoupe des formations glaciaires et fluvio-glaciaires reposant sur un substratum molassique en profondeur. Du point de vue géotechnique, le projet peut être découpé en trois parties : à l Est du viaduc du Pamphiot, sont principalement rencontrés les terrains morainiques, il s agit des moraines lessivées, argiles à blocaux et moraines caillouteuses). Les formations de surface sont aquifères (moraines lessivées). au Sud de Thonon-les-Bains, les terrains fluvio-glaciaires à tendance gravelo-sableuse, sont aquifères mais le niveau de la nappe est généralement en dessous de la plate-forme d après les relevés piézométriques disponibles. à l Ouest, la costière de la Dranse, d une hauteur de 25 m environ, marque la limite des formations fluvio-glaciaires. Les moraines (argiles à blocaux) affleurent sous les colluvions de pente en pied de versant. Après le passage de la costière de la Dranse, le projet se situe dans la vallée de la Dranse où se sont déposées des alluvions sablo-graveleuses. Nous examinerons ci-après les dispositions retenues pour le passage à flanc de coteaux dans le versant Est de la costière de la Dranse, 3. Le franchissement de la costière de la Dranse Entre les PK 7 et 7.5, le projet doit franchir la costière de la Dranse qui constitue un des obstacles géotechnique majeurs du tracé. Cette costière est située en bordure des terrasses de Thonon (dépôts fluvio-glaciaires) et des moraines. Ce ravin, creusé par le torrent, présente un versant emprunté par le contournement. Celui-ci est raide et est recouvert de colluvions de pente. Le talus des coteaux est localement sub-vertical en tête puis la pente est plus douce vers la base (de l ordre de 35 ). Les moraines Wurmiennes sont présentes en fond de vallon avec les alluvions de la Dranse et sous les dépôts fluviaux glaciaires (voir figure 3). 4 Fluvio-glaciaire Erosion régressive source 2 Colluvions 3 Moraines source 1 Alluvions Figure 3 : Schéma géologique de la costière 193

4 La costière est le siège d une érosion régressive dont le mécanisme est le suivant : L horizon fluvio-glaciaire 4 est aquifère alors que les argiles à blocaux (moraines 3) sont peu perméables. Dans ces conditions, des résurgences ont lieu soit au toit des moraines, soit au droit d horizons de sables fins moins perméables. Ces sources génèrent une érosion régressive de la partie inférieure de la costière, en particulier dans les horizons de sables fins. Cette érosion est à l origine des falaises sub-verticales présentes dans la costière, falaises qui reculent en fonction de l érosion en partie inférieure. 4. Analyse des différentes solutions Trois solutions ont été analysées au stade de l Avant-projet : une solution mur s, principalement en remblai à flancs de costière, une solution viaduc, une solution mixte (mur + viaduc) Impact environnemental Compte tenu de la nécessité de réaliser des pistes de chantier, l impact sur l environnement est similaire pour les trois solutions durant les phases chantier (notamment la dérivation ponctuelle du Berle, ruisseau situé en pied de costière). En phase exploitation, la situation est différente : la solution Murs avec protection par enrochements sur site a un impact un peu plus important en termes d emprise, comparée aux deux autres solutions (Solution Viaduc et Solution Mixte). Toutefois, l impact environnemental des trois variantes sur le fonctionnement écologique local est globalement équivalent. En effet, pour les solutions présentant un viaduc, les espaces situés sous le tablier seront également dénaturés Impact foncier La solution «Murs» est une façon de conforter les relations urbanité/naturalité de ce passage particulier du tracé. Cette solution permet de respecter l intégrité du site, ainsi que la géométrie des coteaux. En outre, les terrasses successives adoucissent visuellement l'effet de hauteur de cette costière. Cette solution permet à la voie de s'inscrire dans le site tout en le révélant. Concernant la solution «Viaduc», elle n'apporte pas de réponse satisfaisante au grand paysage qu elle traverse. Elle génère des délaissés peu engageants en pied de pile et sous le tablier du fait de cette inscription parallèle d'un type d'ouvrage qui a normalement pour vocation de franchir transversalement une brèche. Enfin, la mixité de la solution «Murs + Viaduc» complexifie la lecture de l'ensemble Stabilisation de l évolution de la costière Seule la solution «Murs» apporte une réponse définitive au problème de l instabilité du versant de la costière, en haut de laquelle plusieurs habitations sont actuellement confrontées à des problèmes d éboulement de la costière. La solution «Mixte Viaduc + Murs» assure la stabilité sur une partie de la costière, celle concernée par la réalisation des murs avec terrasses. 194

5 La solution «Viaduc» ne permet pas d assurer la pérennité de la costière, tout comme la zone concernée par le viaduc dans la solution «Mixte» Comparaison des différentes solutions Aussi, l analyse des contraintes géotechniques marquées par des instabilités potentielles, la limitation des emprises (due à la protection de l environnement à l aval et parcelles privées à l amont) et la pente transversale significative imposent la réalisation d ouvrages de franchissement appropriés et ont conduit à retenir la solution mur (voir tableau I. analyse multicritère dans le tableau suivant). En effet, celle-ci est la plus économique et elle permet de plus de stabiliser la costière. L impact environnemental de cette solution est par ailleurs acceptable. Solutions Solution «Murs» Solution «Viaduc» Solution «Mixte Viaduc + Murs» Impact environnemental Tableau I. analyse multicritère de l Avant-projet Impact foncier Impact géométrie et tracé Impact urbain, paysager et architectural Stabilisation de l évolution de la costière Coût Délais Risques travaux Exploitation ** ** ** *** **** **** *** ** ** *** ** * * * * *** ** *** *** ** ** * ** ** * ** ** 5. Eléments géologiques et géotechnique On peut distinguer les faciès suivants : 1 Alluvions : Ces alluvions sont des graves sableuses et sont présentes sur une épaisseur moyenne, à l aval de la costière. Ces alluvions intéressent peu le projet qui se situe principalement dans le versant. 2 Colluvions sableuses : Ces colluvions sont liées à l altération des dépôts fluvio-glaciaires en bordure du ravin formant le lit de la Dranse. Ce sont essentiellement des sables (pour les profils les plus en amont) et des graves sablolimoneuses. 3 Moraines : Ce sont des argiles à blocaux. Cette formation fait partie du complexe wurmien et caractérise la moraine de fond typique de la région. Son faciès est très constant : «argiles» (ou plutôt silt d un point de vue géotechnique) bleues, jaunes quand elles sont altérées, à galets et blocs quelquefois volumineux (1 à 2 m de diamètre). 4 - Fluvio-glaciaire : Les terrasses de Thonon sont des dépôts apportés par les torrents dans un lac périglaciaire déterminé par le versant de la vallée et le glacier du Rhône en régression. La structure de ces dépôts est deltaïque. Les matériaux des terrasses de Thonon sont essentiellement sablo-graveleux et ont une composition pétrographique avec une prédominance de galets préalpins sur les galets de roches métamorphiques ou cristallines. Les reconnaissances géotechniques ont essentiellement consisté en : Reconnaissance visuelle et étude de la géologie du site ; 195

6 Interprétation géomorphologique à partir des photographies aériennes ; Réalisation de sondages carottés avec prélèvement d'échantillons intacts pour essais de laboratoire (identification et cisaillement à la boîte et au triaxial) ; Réalisation de sondages pressiométriques, de sondages à la pelle araignée, de piézomètres, d essais de laboratoire, de profils de sismique réfraction et de sondages électriques. Les caractéristiques de cisaillement prises en compte pour l établissement du projet sont issues des essais de cisaillement et de calculs à rebours sur la stabilité actuelle du versant. 6. Description de la solution Murs en remblai Pour les remblais de grande hauteur, le contexte géotechnique précité a conduit à se limiter aux ouvrages en sols renforcés par armatures peu extensibles avec un parement vertical. Le projet est disposé dans la costière. Pour des raisons de stabilité générale, des murs en cascade sont localement disposés à l aval du projet (figures 3, 4 et 5). L ensemble des murs en remblai atteint une hauteur maximale de l ordre de 25 m environ. Axe du projet chaussées Mur poids végétalisable Murs en cascade Axe du projet chaussée M 4 5 m M 3 10 m maxi 5 m M 2 10 m maxi soutènement provisoire Fouille provisoire M 1 Figure 3 : Avant le PK 7200 Figure 4 : Au-delà du PK 7200 Figure 5 : photographie des murs en cascade 196

7 Pour les murs amont, le choix s est porté sur un mur poids végétalisable (voir figure 6). 2m Axe du projet Mur végétalisable chaussées Figure 6 : mur poids amont végétalisable Le groupement DTP/PERRIER/GFC a mis en œuvre des murs de type VSOL pour les murs en sol renforcé, et des murs de type EVERGREEN pour les murs végétalisables. Les matériaux de remblais utilisés pour la construction des murs sont issus du projet. 7. Hydrologie La Dranse est, avec le Pamphiot, l un des deux cours d eaux les plus importants concernés par le contournement routier. A la lecture du Schéma Directeur d Aménagement et de Gestion des Eaux du Bassin Rhône-Méditerranée-Corse, il ressort que la partie aval de la Danse est considérée comme une zone où vivent des espèces animales et végétales endémiques, rares, à forte valeur patrimoniale pour le bassin Le ruisseau du Berle est un petit affluent rive gauche de la Dranse, formé par de nombreuses sources de versant. Il s écoule dans le lit majeur de la Dranse, avec une faible pente. Son cours divague au pied du versant, et donne ainsi naissance à une zone humide d intérêt écologique. Les sources sont présentes tout le long de la costière et une partie de leurs apports s infiltre, l autre alimentant le ruisseau du Berle. La vallée alluviale de la Dranse ainsi que le ruisseau du Berle et sa zone humide associée représentent un enjeu écologique fort. La vallée alluviale de la Dranse est en effet, du fait de sa divagation, un écosystème dynamique générateur d une diversité importante d habitats. L implantation du pied des murs en sol renforcés a du prendre en compte ces contraintes. Le ruisseau du berle a été dévié dans un marché de travaux préparatoires, la zone humide a été préservée. Les eaux provenant du chantier ont été filtrées. En outre, l intégralité du lit majeur de la Dranse est préservée car l ensemble des flux et de l espace de divagation de la Dranse seront respectés. 197

8 Afin de préserver les écoulements provenant de la costière, des ouvrages hydrauliques plus ou moins importants ont été réalisés : buses de diamètre 1500 mm (Figure 7) et deux ouvrages 2.50 x 3 m pour les deux sources les plus importantes, avec la mise en place de drains sub-horizontaux pour le captage des sources (Figure 8). Une couche drainante de 1 m a également été mise en place sous la base des murs en sol renforcés afin de conforter le principe de transparence hydraulique des ouvrages réalisés. Figure 7 : ouvrage hydraulique φ1500 Figure 8 : ouvrage hydraulique 2.50 x 3 m 7. Foncier Aucune habitation n est détruite avec le projet retenu. Des écrans acoustiques sont prévus en crête de la costière pour protéger les habitations des nuisances sonores. 8. Conclusions Le contournement routier de Thonon-les-bains s inscrit dans un cadre environnemental sensible : géologie, hydrogéologie, foncier, écologique. Les travaux ont été réalisés avec un souci constant de limiter l impact environnemental : transparence hydraulique, réemploi des matériaux, stabilisation de la costière, rétablissement des cours d eau avec des compensations environnementales. De plus, ce projet va permettre de redonner vie à cette zone à fort potentiel écologique. 198