NOUVELLEs ROUMANIE. Les Nouvelles de Roumanie cessent donc leur parution, sous leur forme. Les. L'aventure en valait la peine SOMMAIRE.

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1 Numéro juillet - août 2017 Les NOUVELLEs de Balkans SOMMAIRE Photos d'actualité Voisins Politique, Social A la Une Actualité Société Vie quotidienne Enseignement, Santé Sports Connaissance et découverte Cinéma Littérature, Livres Mémoire, Expositions Humour Coup de coeur 2 à et 7 8 à à à et à à à 56 A partir de septembre notre Nouvelle formule Uniquement sur Internet Abonnement: 35 euros/an 15 euros pour les Roumains. Gratuitement cet été. Lettre d information bimestrielle ROUMANIE L'aventure en valait la peine Les Nouvelles de Roumanie cessent donc leur parution, sous leur forme imprimée actuelle, avec ce numéro 102, mais leur version numérique, à laquelle les lecteurs peuvent s'abonner dès maintenant, prendra le relais dès la rentrée. Les regrets n'ont donc pas de raison d'être. La nostalgie sans-doute un peu. Les jeunes journalistes des années 70 l'avaient déjà éprouvée quand ils avaient vu disparaître les imposantes linotypes au plomb, héritières de l'époque de Gutenberg, remplacées par la photocomposition et le tirage offset. C'est un peu cette transformation que va subir notre revue, comme nous l'expliquons depuis le début de l'année. Il ne faudra plus attendre sa sortie de l'imprimerie, tous les deux mois, le passage du facteur, pour être tenu au courant du développement de l'actualité. Un clic suffira. Finalement, dans cette mutation, l'important pour les Nouvelles de Roumanie, c'est surtout de ne pas perdre leur âme. En près de vingt ans de parution et quelques articles, petits ou grands, la revue a largement rempli l'objectif qu'elle s'était assigné: rendre ses lecteurs aussi proches que possible d'un pays qui leur tient particulièrement à cœur. Le challenge n'était pas mince. En 2000, année de son lancement, la Roumanie était retombée dans l'anonymat. Pire même elle provoquait le découragement de nombre de ceux qui avaient volé à son secours au début des années 90. Mais les plus fidèles de ses amis refusaient de baisser les bras. Ils sont souvent devenus nos lecteurs. C'est à eux que notre revue doit sa naissance et sa longévité. A tous ceux qui ont montré que l'engagement pour la Roumanie n'était pas un effet de mode, mais une véritable cause. Le chemin a été chaotique et le demeure à bien des égards. Mais que d'obstacles surmontés par les Roumains depuis les descentes des mineurs venus "casser la démocratie" dans les artères de Bucarest, en juin 1990, récidivant dans les années suivantes jusqu'à l'entrée, sur la pointe des pieds dans l'union Européenne, le 1er janvier Une date à marquer d'une pierre blanche: certes, tout restait à faire mais rien ne serait plus pareil. Désormais, il ne faisait pas jour seulement à l'ouest. Aujourd'hui, cela ne surprend plus personne de voir tous ces étudiants assis sur les bancs des universités européennes, les programmes d'échanges fleurir, des amitiés se nouer, des couples se former, des carrières se développer par delà les frontières: les Roumains ne sont plus un objet de curiosité. En matière d'europe, il leur arrive même de montrer la voie, contrairement à leurs voisins qui s'enferment dans un nationalisme et un égoïsme d'un autre temps. Pour les pionniers de la coopération avec la Roumanie, quelle belle récompense! Pour Les Nouvelles de Roumanie quelle satisfaction! Le pari était audacieux, mais l'aventure en valait la peine. Henri Gillet et Dolores Sirbu-Ghiran 1

2 2 Balkans Depuis 1992, l'institut Heidelberg pour l'étude des conflits (HIIK) publie chaque année un baromètre des conflits au niveau mondial. Silvia Steininger, politologue et juriste, est en charge de la région des Balkans. Dans un entretien accordée à la Deutsche Welle, elle s'inquiète des "divisions, des ambitions sécessionnistes, des manifestations contre les gouvernements et des provocations ethniques". Selon elle, il existerait trois types de facteurs d'instabilité dans la région. Le premier résulte de tensions communautaires toujours fortes. Le second concerne les conflits dits classiques entre les gouvernements et les mouvements d'opposition, sans violence physique notoire en Roumanie et en Bulgarie, violents au Kosovo et en Macédoine. La troisième catégorie est liée à la présence d'éléments radicaux, notamment les groupes fondamentalistes. La Bosnie-Herzégovine et le spectre de la division Dans un monde marqué par l'instabilité, les Balkans jouissent depuis plus de vingt ans d'une période de paix relativement longue. Mais "la stabilité d'un espace n'est jamais une valeur sûre", met en garde le politologue Josip Glauric, qui enseigne à l'université du Luxembourg. "Elle dépend d'un certain nombre de conditions politiques. Tant qu'il y aura des acteurs politiques suffisamment puissants et avec un intérêt à attiser les tensions, ils ne s'en priveront pas. Si vous ajoutez à ça l'énorme réservoir de ressentiments hérités des dernières guerres, vous avez la recette de problèmes considérables". Selon le rapport du HIIK, la Croatie compte deux points conflictuels. Le premier est lié aux revendications de la minorité serbe. L'analyse ne le précise pas, mais il s'agit vraisemblablement de l'usage du cyrillique à Vukovar dans les institutions publiques. Ce problème est classé "niveau 1", c'est-à-dire qu'il peut se régler par le dialogue. L'autre point de tension est le litige frontalier avec la Slovénie, qui dure depuis 1991, aussi classé niveau 1. En Bosnie-Herzégovine, trois foyers principaux sont identifiés, avec un niveau de dangerosité relativement faible. Il s'agit de l'opposition entre Croates et Bosniaques sur la question de créer une entité croate en Fédération, décrite comme une "recherche d'autonomie", et de la tentation d'indépendance de la Republika Srpska (RS), qualifiées de "visées sécessionnistes". Un institut allemand identifie Treize, c'est le nombre de "foyers de tension" qu'identifie l'institut Heidelberg dans les Balkans. Litiges frontaliers, tensions politiques, radicalisme religieux... : les facteurs de crise ne manquent pas et renvoient tous à une transition démocratique inachevée. L'intégration européenne a longtemps tenu lieu de réponse à ces problèmes, mais cette perspective s'éloigne, l'ue n'accordant plus guère d'importance aux Balkans. Des tensions constantes Si ces deux conflits sont classés au niveau 1, le rapport note qu'ils suscitent des tensions constantes. À la mi-mai, à Siroki Brijeg, tout un stade a sifflé l'hymne national bosnien, le public scandant à la place "Nous, les Croates". Bakir Izetbegovic, le membre bosniaque de la présidence a quant à lui répété le 17 mai que toute tentative de sécession de la RS provoquerait des conflits aux conséquences désastreuses pour la région toute entière, soulignant que Milorad Dodik ne devait en aucun cas franchir cette "ligne rouge". Ce sont "les groupes islamistes actifs dans le pays" qui, selon le HIIK, représentent le principal danger pour la Bosnie-Herzégovine. Ce facteur de risque est classé niveau 2, soit un "conflit sérieux" encore non-violent. En Macédoine, deux foyers de tensions sont recensés. Le premier, classé niveau 1, concerne les aspirations autonomistes de la minorité albanaise, notamment sur la question du bilinguisme qui a provoqué une série de tensions qui n'avaient pas encore commencé au moment de la rédaction du rapport de l'hiik. En revanche, la confrontation politique entre le VMRO-DPMNE et ses adversaires a été classés au niveau 3 de dangerosité, qui inclut des actes de violence. A Sarajevo, en juillet 2014, l attentat qui allait mettre le feu au monde et au 20éme siècle. La Macédoine inquiète, le Kosovo aussi La situation en Macédoine est donc toujours particulièrement explosive, même si le Président Gjorge Ivanov s'est résolu à donner au chef du Parti social-démocrate Zoran Zaev le mandat de former le gouvernement, après avoir fait obstruction pendant des mois. Ce sont les relations entre la Serbie et le Kosovo qui représenteraient, selon les analystes de l'hiik, le foyer de tensions le plus dangereux des Balkans. Trois sources de conflits sont identifiés en Serbie: les revendications de la communauté bosniaque pour une autonomie du Sandzak et celles de la vallée de Presevo à majorité albanaise, qui penche pour une unification avec le Kosovo. Le troisième danger vient du risque terroriste que font peser les combattants revenus du djihad en Irak ou de Syrie. Le Kosovo compte également trois sources potentielles de crise: les tensions politiques internes, tout d'abord, marquées par une forte conflictualité entre l'opposition et le gouvernement, qui a d'ailleurs fini par tomber, ouvrant la voie à des élections anticipées. A la Une A la Une "treize foyers de tensions" dans le sud-est européen Bien que non-violentes, les relations entre Pristina et Belgrade sont aussi particulièrement tendues, tout comme celles entre les Serbes du Kosovo et les autorités de Pristina. La crise du leadership européen Comment sortir de ces conflits? On a longtemps espéré que l'intégration européenne vienne à bout des tensions balkaniques. Mais "de nombreuses occasions ont été manquées", analyse Josip Glauric, "par Bruxelles mais également par la majorité des grandes puissances. Attendre d'une UE en plein Brexit, sans interlocuteur à Washington et assaillies de menaces internes et externes qu'elle trouve une nouvelle énergie pour l'élargissement dans la région est complètement illusoire: l'europe n'en a tout simplement pas les capacités en ce moment", estime le politologue. "De grandes difficultés nous attendent, financées et attisées par ceux qui ont intérêt à l'instabilité de la région et de l'europe. Je pense principalement à Moscou". "L'absence de leadership et de vision politique laisse augurer une régression politique, économique et sécuritaire contre laquelle les pays non intégrés des Balkans occidentaux, Le Parlement de Bucarest a adopté mercredi 21 juin; la motion de censure déposée par la coalition majoritaire formée par le PSD (ex-communistes) et par l'alliance des libéraux et des démocrates contre son propre gouvernement dirigé par le premier ministre Sorin Grindeanu. 241 élus nationaux se sont prononcés en faveur de la motion de censure, alors que pour passer elle devait être votée par 233 sénateurs et députés. Les autres partis parlementaires - le Parti national libéral, l'union Sauvez la Roumanie, l'union démocrate magyare de Roumanie et le Parti du mouvement populaire ne se sont pas exprimés par vote, affirmant que cette situation était un problème interne de la coalition gouvernementale. La avec leurs institutions inefficaces et corrompues, ne pourront pas lutter", renchérit l'historien et analyste politique Nikola Samardzic qui enseigne à l'université de Belgrade. "Or, le moindre espace libre sera occupé par la Russie et la Turquie, qui se sont déjà partagés la Bosnie-Herzégovine, l'une prenant la main dans l'entité serbe, l'autre dans l'entité croato-bosniaque", avertit-il. Selon le rapport de l'hiik, les Balkans restent une zone de tensions parce que la majorité des États n'a pas achevé sa transition politique et économique. La Yougoslavie a échoué non pas en tant qu'état multinational que parce qu'elle n'a pas su achever sa réalisation démocratique. Dans son malheur, la région a cependant une chance, estime Nikola Samardzic: la faiblesse des moyens matériels, dans l'armement notamment, pour soutenir une nouvelle guerre. "Mais nous sommes constamment stressés et sous pression, comme si la guerre n'avait jamais pris fin. À peine commençons-nous à oublier les années 1990 ou la Seconde Guerre mondiale qu'on nous monte toute une affaire sur les responsabilités et culpabilités dans la Première, et ainsi de suite, comme une histoire sans fin". Robert Bajrusi (Le Courrier des Balkans) Le PSD renverse son propre gouvernement et ouvre une crise politique motion a été introduite après le refus du premier ministre de démissionner, même si la coalition le portant lui avait retiré son soutien. Il a rejeté comme non fondées les conclusions de l'évaluation faite par le PSD aux six mois depuis l'installation du cabinet, qui indiquait qu'il y avait des retards dans la mise en application du programme de gouvernance. "Le risque d'un retour à Ceausescu" Sorin Grindeanu (à gauche) a jugé "incompréhensible" le dépôt d'une motion de censure contre un gouvernement qui a "bien travaillé". "Le risque existe d'un retour en arrière, à l'époque d'avant 1989", année ayant vu la chute du régime communiste de Nicolae Ceausescu, a-t-il mis en garde, en faisant référence au style autoritaire de Liviu Dragnea (à droite), le chef du PSD et devenu l'homme fort du pays. Ce dernier, repris de justice, enrage de ne pas pouvoir accéder au poste de Premier ministre, à cause de son passé judiciaire qui l'empêche, constitutionnellement, d'assurer cette fonction. Il s'efforce donc de contourner l'obstacle en désignant des hommes de paille dont il espère faire des marionnettes, exigeant qu'une fois au gouvernement, ils fassent abroger la loi qui lui interdit toute ambition. Mais ses créatures, prenant goût au pouvoir, refusent de rentrer dans son jeu et de lui céder la place. Liviu Dragnea a donc décidé de faire tomber le Premier ministre qu'il avait désigné, ouvrant une nouvelle crise politique. Il avait préparé le terrain, en promettant démagogiquement de doubler le salaire des fonctionnaires, ce que Sorin Grindeanu, qui estimait que la situation des finances publiques ne le permettait pas, a refusé, exacerbant les tensions entre les deux hommes et entraînant, de justesse, la chute du dernier. Une crise politique est donc ouverte, non seulement au PSD, mais dans le pays. A l'heure où nous mettons sous presse, le président Klaus Iohannis devait avoir des consultations, qui s'annonçaient ardues, au sujet de la formation du nouveau gouvernement, avec les partis parlementaires. Ces imbroglios à succession ont fait remonter sa cote de popularité et l'opposition démocratique, en piteux état actuellement, se frotte les mains. 3

3 A la Une Actualité Balkans Les traditions culinaires spécifiques des Balkans en péril Plus personne ne veut travailler en cuisine! L actualité en images Restaurateurs, chefs de cuisine et formateurs de tous les pays des Balkans se sont récemment réunis en séminaire à Budva, au Monténégro. Le constat est alarmant : les jeunes se détournent de la profession, astreignante, peu valorisée et toujours mal payée dans la région. Le risque est de voir disparaître les traditions culinaires spécifiques des Balkans. 4 Les restaurateurs de tous les pays de la région font face au même problème: le manque de cuisiniers qualifiés. Il s'agit pourtant d'une profession qui doit transmettre l'histoire, la civilisation et la culture d'une région et de ses habitants, et la gastronomie constitue un atout essentiel de toute destination touristique. "Dans quelques années, nous serons confrontés à de sérieux problèmes, car nous n'aurons personne à qui transmettre notre savoir-faire. Nous devrons faire appel à une maind'œuvre étrangère, qui ne connait pas nos pratiques culinaires, la nourriture que nous mangeons, qui ne peut pas l'apprécier ni la préparer comme nous le faisons. Cela veut dire que nous proposerons à nos clients un produit de qualité inférieure", souligne Dusan Mitrovic, un chef de Budva. Il enseigne actuellement au lycée de la ville qui, depuis des années déjà, a bien de mal à maintenir son option restauration. Alors même que Budva apporte au Monténégro plus de la moitié de l'ensemble de ses revenus touristiques, l'intérêt des jeunes de la ville pour se former la gastronomie ne cesse de diminuer. "Chaque année, notre école arrive à peine à remplir une classe pour les cuisiniers et les serveurs. C'est un inquiétant signal d'alarme qui devrait nous inciter à prendre les choses au sérieux... Pourtant, personne ne semble se préoccuper de la question. Nous entendons dire qu'il y aurait trop de chômeurs au Monténégro, mais pour un bon cuisinier, il y aura toujours du travail" ajoute-t-il. "Malheureusement, chaque année, notre école arrive à peine à remplir une classe pour les cuisiniers et les serveurs". 500 euros par mois Dans les meilleurs hôtels de la côte monténégrine le salaire d'un cuisinier est de 500 euros par mois, mais ce chiffre peut être trois fois plus élevé pour les plus qualifiés ou les chefs employés sur des yachts de luxe. "Cependant, ce sont des exceptions et ces postes ne sont occupés que par les meilleurs de la profession, après des années de perfectionnement. Beaucoup d'entre eux ont essayé de se placer à l'étranger car ils espéraient de meilleures conditions de travail, un avancement plus rapide, des salaires plus élevés, mais ils ont été confrontés à la rude concurrence mondiale", explique le président de l'association des cuisiniers de Serbie, Dejan Stankovic. "Nos cuisiniers à l'étranger montrent toujours de l'ardeur au travail, mais ils n'ont pas le statut de leurs collègues d'italie ou de France". "Autrefois, un Français ou un Italien installés à Moscou pouvaient prétendre à des salaires de 8000 euros par mois, sans que l'on connaisse leurs références professionnelles. Il suffisait qu'ils soient italiens ou français. Par contre, nos chefs qui vont à l'étranger ne peuvent jamais espérer un salaire de plus de 2000 euros. On nous sous-estime car ils connaissent notre situation financière". En Slovénie, où les portes du marché européen sont ouvertes depuis longtemps, le salaire moyen d'un cuisinier est d'environ 1000 euros. Les meilleurs dans la profession sont appréciés et recherchés, mais la gastronomie ne figure pas parmi les métiers les plus populaires parmi les jeunes, explique Davor Druzinec, qui a travaillé dans les hôtels prestigieux à Bled et Brdo pri Kranja. Les jeunes ne veulent plus travailler plus de huit heures et le week-end "Quand tu as besoin d'un cuisinier, il y en a beaucoup. Mais quand il faut vraiment un bon chef, il est difficile de le trouver. Tout d'abord, la journée de travail est très longue, on est longtemps debout, et les jeunes ne veulent pas travailler plus de huit heures ni pendant le week-end. Toutefois si tu es courageux et que tu veux faire une carrière, tu peux y arriver en Slovénie", estime-t-il. Dans les offres de travail saisonnier sur la côte monténégrine, les cuisiniers sont les plus recherchés. Afin que les employeurs aient moins de mal à trouver de bons chefs, Dejan Stankovic leur conseille de tenir compte des connaissances et de l'art des professionnels de la gastronomie. "Les restaurateurs doivent se décider en fonction du professionnalisme et du savoir des cuisiniers. Imaginez simplement que l'argent consacré à ce secteur soit investi de manière stratégique comme le font les pays scandinaves, ce serait extraordinaire! Les Scandinaves investissent énormément d'argent dans la gastronomie mais ils n'ont pas le feu dans l'âme, comme nous, les Balkaniques... Et, pour bien faire la cuisine, on a besoin d'avoir ce feu sacré", conclut Dejan Stankovic. Jasna Vukicevic (Le Courrier des Balkans) La cuisine des Balkans a toujours été réputée, mais elle est menacée aujourd hui car la profession n attire plus. Le Président Iohannis, en visite à Washington, est un des rares chefs d Etat européen à faire ami-ami avec Donald Trump. A Timisoara, une académie anti-corruption pour les agents de l Etat. Patricia Kass à Timisoara, Andrea Bocelli-Gheorghe Zamfir à Cluj: une saison artistique roumaine qui promet, comme tous les ans. Rimetea, au pied des Apuseni, a été désigné comme l un des plus beaux villages de Roumanie. Président d honneur du festival de cinéma TIFF de Cluj, Alain Delon a été fêté par 3000 admirateurs, ravi d être plus aimé à l étranger qu en France. Les chemins de fer roumains ont mis en circulation des trains spéciaux vers les plages de la mer Noire, les passagers troquant déjà leurs tenues de ville. Boulanger à Londres, Florin Morariu est devenu un véritable héros en cachant des passants dans sa boutique, pendant les attentats qui ont ensanglanté la capitale britannique. 5

4 Voisins Actualité À Sofia, les "concombres de Bâle" sont enfin sur les rails Les tramways de Sofia passent du jaune au vert: les "concombres de Bâle"vont remplacer peu à peu les anciennes motrices. Surnommés "les concombres" en raison de leur forme et de leur couleur, les nouveaux tramways de Sofia ont été inaugurés avec enthousiasme par les autorités. La presse, elle, reste sur sa réserve: venues de Suisse, les voitures ont quand même 27 ans d'âge. Voisins Actualité Borissov III, ancien chef des pompiers, a remporté les élections bulgares Au nom de la stabilité l'extrême droite au gouvernement Ayant gagné avec une courte avance les dernières élections législatives bulgares, le Premier ministre sortant, Boïko Borissov, a dû composer avec les représentants d'une sulfureuse "union de patriotes". Ces derniers obtiennent quatre postes, dont celui de la Défense. 6 OTAN: Iohannis inquiet Klaus Iohannis, le président roumain, a reproché à Angela Merkel d'insister sur le fait que l'europe doit prendre son propre destin en main, au détriment de la relation avec les États-Unis. "L'OTAN représente toujours la relation transatlantique qu'elle a toujours illustré et restera vitale à l'évolution de l'europe et d'amérique du nord", a assuré Klaus Iohannis, le président roumain, le lendemain de la remarque d'angela Merkel. "Cette relation ne peut pas disparaître, elle peut être plus intense, ou moins intense, mais ne disparaitra pas". Pour le pays, il est en effet d'une grande importance de préserver ses liens stratégiques, étant donné qu'il accueille un bouclier antimissile américain d'une valeur de plus de 700 millions d'euros, censé protéger l'europe des États voyous des environs. Menaces russes Le chef d'état-major général russe a menacé le 3 mai de lancer une attaque préventive contre les installations antimissiles de l'otan situées en Europe de l'est si les États-Unis procédaient à la construction d'un bouclier antimissile controversé. Moscou assure que le dispositif n'a qu'un objectif : neutraliser l'arsenal nucléaire russe assez longtemps pour que les États-Unis puissent bombarder la Russie en cas de guerre. Une version démentie par Washington et l'otan. La Roumanie a récemment demandé que davantage de vaisseaux de guerre de l'otan soient déployés dans la mer noire, une proposition qui n'a cependant pas obtenu l'aval de la Bulgarie et d'un autre pays de l'alliance. Prendre le tramway à Sofia c'est, aussi, voyager un peu dans le temps. De couleur jaune, ces moyens de transport antédiluviens, au carillon si caractéristique, sont une véritable attraction pour les touristes. Mais pour les habitants de la capitale bulgare, c'est autre chose. Aussi exotiques soient-ils, ces trams sont extrêmement bruyants, inconfortables et pratiquement pas chauffés en hiver. Bref, un trajet en tram à Sofia relève certains jours du calvaire. C'est certainement la raison pour laquelle les voitures, promises depuis plusieurs mois par la Confédération suisse, étaient attendues avec beaucoup d'impatience. Et leur arrivée, inaugurée en grande pompe par les autorités de la ville le 23 avril dernier, n'a pas manqué de susciter de nombreux commentaires dans la presse locale. "Les concombres de Bâle entament leur périple sur les rails de Sofia", titre ainsi le site de la télévision nationale BNT, pour introduire un reportage enthousiaste qui montre la maire de Sofia, Iordanka Fandakova, empruntant l'un de ses trams en compagnie de l'ambassadeur helvète Denis Knobel. C'est ce dernier qui s'était d'ailleurs chargé de traduire en bulgare le surnom que les habitants de Bâle, d'où proviennent ces trams, ont donné à ces engins à la couleur et la forme si caractéristiques: "Krastavitsa" (concombre). Dix ans de moins que les trams locaux Ces trams sont pratiquement un don: la Suisse a financé à hauteur de 85 % le projet, précise le site Mediapool. Pour l'instant, seuls quatre des 28 véhicules promis sont arrivés, mais une mini-polémique n'a pas tardé à éclater pour autant. Car l'âge des "concombres verts" n'a échappé à personne: ces trams ont 27 ans. Cela fait quand même "dix de moins" que les plus anciens des "trams jaunes" de Sofia, nuance le journal en ligne Dnevnik. Et tous les médias bulgares de préciser que les trams suisses ont été "entièrement modernisés" depuis la lointaine année Ils sont notamment équipés de rampes d'accès pour les fauteuils roulants et les poussettes - des installations qui faisaient cruellement défaut à Sofia. Certains journalistes ont tout de même remarqué que ces rampes risquaient de se révéler inutilisables, car inadaptées aux rues de la capitale. "Les arrêts des trams à Sofia n'ont pas de perrons à proprement parler, ces derniers s'arrêtent en pleine voie", rappelle la télévision privée BTV. Mais la municipalité assure que des travaux d'aménagement vont être effectués dans les plus brefs délais. Les réseaux sociaux, toujours très actifs en Bulgarie, n'ont pas manqué de s'emparer également du sujet, avec des avis très contrastés. "Pourquoi tente-t-on de faire toujours du neuf avec du vieux?", se demande un internaute. "La place de ces trams est au musée", enchérit une ancienne ambassadrice bulgare à Berne. Depuis Londres, où il habite, l'ancien ministre et expert en énergies renouvelables Julian Popov a, lui, plaisanté que la Bulgarie était enfin devenue ce qu'elle avait toujours rêvé d'être, à savoir "la Suisse des Balkans". Alexandre Lévy La presse de Sofia l'a déjà surnommé "Borissov 3". Le gouvernement qui a pris ses fonctions jeudi 4 mai est en effet le troisième constitué par l'inoxydable Premier ministre conservateur, Boïko Borissov. Celui-ci domine, à l'exception de deux courtes éclipses, la scène politique bulgare depuis 2009, date de sa première - et triomphale - élection. "C'est le retour du bon flic", écrit l'un des éditorialistes du quotidien en ligne Dnevnik, en référence au passé chatoyant de Borissov, successivement chef des pompiers, patron d'une agence de sécurité et secrétaire général du ministère de l'intérieur. Mais, cette fois-ci, cet "éternel retour" s'accompagne de quelques compromis politiques qui risquent d'abimer l'image de pro-européen réformateur à laquelle tient tellement Boïko Borissov. Ayant gagné de peu les récentes élections législatives anticipées, son parti, le Gerb, a conclu un pacte de gouvernement avec une "union de patriotes", dont les membres se sont surtout illustrés ces dernières années par un discours xénophobe et raciste totalement décomplexé. Résultat, "Borissov 3" comporte au moins quatre postes - dont celui stratégique de la Défense -, occupés par des personnalités sulfureuses issues de formations politiques plus habituées à se quereller entre elles qu'aux arcanes du pouvoir. Frasques des "patriotes" Dans le quotidien populaire 24 Tchassa, le politologue Ivaïlo Ditchev écrit: Le monde démocratique a de plus en plus tendance à normaliser l'extrême droite. Chez nous, ceux qui aujourd'hui entrent au gouvernement prenaient des mosquées d'assaut hier, s'en prenaient aux universités et empêchaient des citoyens de se rendre aux urnes". Il fait référence aux récentes frasques des "patriotes" qui ont tenté de bloquer la frontière avec la Turquie afin d'empêcher les ressortissants bulgares résidant dans ce pays de venir voter en Bulgarie. Volen Siderov, l'un des trois membres de cette "union" - et certainement le plus médiatique - a mené de véritables opérations commando avec ses sbires contre des lieux de culte musulmans. En tant que député et chef d'ataka, le parti d'extrême droite qu'il a fondé au début des années 2000, il a prôné la sortie de la Bulgarie de l'union européenne et de l'alliance atlantique, la fermeture de la frontière avec la Turquie et un rapprochement géopolitique et commercial avec la Russie. "Aujourd'hui, on a vu ce même Siderov se lever au Parlement lors de l'intronisation du gouvernement et entonner l'ode à la joie de Beethoven alors qu'hier il brûlait le drapeau de l'ue", s'amuse l'éditorialiste Ivan Bedrov du magazine Club Z. Le journal considère que les "véritables dindons de la farce de ce deal" sont bien les électeurs de ces partis ultranationalistes qui n'auront au gouvernement "ni les hommes ni les idées qu'ils ont soutenus". Il rappelle notamment certains des grands engagements électoraux des "patriotes", comme l'expulsion de tous les demandeurs d'asile, le rétablissement du service militaire obligatoire, mais aussi une diminution de la TVA et des prix de l'électricité "Rien de tout cela ne figure dans le programme du gouvernement qui, une fois de plus, a réaffirmé son engagement à poursuivre dans la voie de l'ue et de l'otan", écrit Club Z. Boïko Borissov, un profil de catcheur. Les nationalistes ont mis beaucoup d'eau dans leur vin Le sentiment général est que, "pour avoir leur part du gâteau", les nationalistes ont mis beaucoup d'eau dans leur vin, selon la presse de Sofia. Le quotidien 24 Tchassa note aussi que,"sans surprise, tous les ministres les plus en vue de Gerb ayant participé aux précédents gouvernements de Borissov sont de retour" et qu'il s'agit, pour la plupart, de professionnels reconnus. Prenant la parole devant les parlementaires, l'ancien-nouveau Premier ministre Borissov a fait profil bas, acceptant son troisième mandat avec humilité, "presque avec un sentiment d'ennui et de lassitude", note la correspondante de Média Pool. "C'est devenu une habitude. Je rends le pouvoir [démissionne], puis les électeurs décident du contraire", a-t-il dit. La presse bulgare rapporte aussi que Boïko Borissov a reçu les félicitations d'angela Merkel (son idole politique), qui aurait salué son "phénoménal succès". "Ce troisième mandat fait de lui l'homme politique le plus couronné de succès de l'histoire de la transition, même si cela peut paraître paradoxal car la Bulgarie reste, selon tous les classements, le pays le plus pauvre et le plus corrompu de l'ue", conclut ainsi Média Pool. Alexandre Lévy 7

5 Actualité Actualité ORADEA SATU MARE SUCEAVA IASI Politique L'irrésistible et minutieuse Une ascension tentative de prise du pouvoir de Liviu Dragnea semée de combines 8 ARAD TIMISOARA TARGU MURES GRATIA CONSTANTA BUCAREST CRAIOVA BACAU BRASOV VASLUI TARGOVISTE BRAILA TULCEA "Tout est bon dans le cochon" Une enquête menée par Marian Pavalasc et Dan Tapalaga pour Hotnews s'intéresse à une porcherie industrielle de Teleorman que dirige Stefan Valentin Dragnea. C'est via Teldrum que le fils Dragnea en a obtenu la propriété. Petre Pitis l'avait acquise pour environ euros, puis l'avait vendue à Ludikon System, une petite entreprise locale, qui l'a cédée revendue à Stefan Valentin Dragnea pour 110 euros. L'entreprise affichait à l'époque un chiffre d'affaires de plus de huit millions d'euros et employait 151 personnes. Six mois après son acquisition, Stefan Valentin Dragnea renouvelait le crédit bancaire de l'entreprise, un crédit dont les garants ne sont autres que Petre Pitis et sa femme. Lors de sa campagne pour les dernières législatives, le PSD a promis une hausse des subventions pour deux produits: les tomates et la viande de porc. Liviu Dragnea a proposé ce coup de pouce deux ans après le rachat par son fils de la Ferma Salcia. Le projet de loi, qui n'a pas encore été approuvé, prévoit de subventionner pendant huit ans les 200 têtes de porc à hauteur de euros annuels. La "Ferma Salcia" du fils Dragnea a une capacité de porcs. Depuis qu'il l'a rachetée, elle a reçu environ trois millions d'euros d'aides, principalement de l'union européenne. Le plan d'action de la "Ferma Salcia" est d'importer 25 kilos de porcelets d'allemagne et des Pays-Bas, de les nourrir d'ogm pour accélérer leur croissance puis de les revendre sous le label "viande roumaine". Le chef du Parti social-démocrate est toujours l'homme politique le plus influent de Roumanie. S'il n'a pas pu briguer la tête du gouvernement à cause de son implication dans deux affaires de corruption, il y a placé l'un de ses hommesliges. Même la grande révolte populaire de cet hiver l'a à peine fragilisé. Une position de force qu'il doit à son réseau patiemment construit depuis son fief de Teleorman. Récit d'une ascension semée de combines vers le pouvoir. Difficile de croire que l'homme politique le plus puissant de Roumanie était autrefois rocker. Et pourtant, Liviu Dragnea avait un groupe du rock, "Ego", avec deux amis, Liviu Drobrescu et Mugurel Gheorghia. C'était pendant ses études d'ingénieur, à la fin des années Mais le fils de "milicien", le nom des policiers sous le régime communiste, né en 1962 à Gratia, dans la région de Teleorman, a rapidement enfilé le costume-cravate du politicien, quelques années après la chute de Ceausescu. En 1994, il intègre le Parti démocratique (PD) et fait son entrée sur la scène politique locale et deux ans plus tard, il devient préfet de la région de Teleorman. Il reste à ce poste jusqu'en 2000, puis devient directement le président du Conseil régional de Teleorman. En 2001, il rallie le Parti social-démocrate (PSD) qui vient d'être formé et prend la tête de sa branche locale en Il enchaîne trois mandats consécutifs à la présidence du Conseil général de Teleorman jusqu'en 2012, année où il devient député, vice-premier ministre, ministre du Développement régional et de l'administration publique du gouvernement Ponta. Liviu Dragnea hérite de la présidence du PSD par intérim après la démission de Victor Ponta sur fond de scandale de l'incendie meurtrier du club Colectiv le 30 octobre Il est ensuite confirmé à son poste lors des élections du PSD. Il faut dire qu'il est le seul candidat. Après les élections législatives de décembre 2016, à défaut de pouvoir occuper le poste de Premier ministre à cause de son casier judiciaire, Liviu Dragnea a opté pour la présidence de l'assemblée nationale. Un casier judiciaire embarrassant Liviu Dragnea, dans l ombre... à défaut d être mis à l ombre. Pour un homme politique roumain de cette envergure dans un paysage politique gangrené par la corruption, avoir deux enquêtes sur le dos n'a rien de particulièrement scandaleux. Tout est relatif en politique. Liviu Dragnea a été condamné à deux ans de prison avec sursis pour avoir usé de son pouvoir pour influer sur les résultats du référendum de 2012 sur la destitution du président Traian Basescu. La sentence est définitive, même si Liviu Dragnea veut toujours la contester à la Cour européennes des Droits de l'homme. Le second dossier est une accusation d'abus de pouvoir pour des emplois fictifs du PSD dans la région de Teleorman. Plus précisément, il est accusé d'avoir employé pour le compte du PSD deux salariés des Services d'assistance sociale de Teleorman, dont son épouse, quand il dirigeait le Conseil général. Le procès n'a cessé d'être repoussé. Après la victoire écrasante de son parti aux législatives de décembre 2016 et la révolte populaire qui a suivi, des journalistes indépendants roumains se sont intéressés au parcours politique de Liviu Dragnea. Rise Project, Digi24 et Hotnews ont ainsi mis au jour ses connexions avec d'anciens camarades de lycée et des proches dans divers affaires. C'est en se plongeant dans ce réseau que l'on découvre les bases de son pouvoir. "Dragnea des bois" L'une des enquêtes de Rise Project se penche sur les hectares de forêts qui lui appartiennent dans régions de Teleorman et de l'olt. Tout a commencé avec Turris, une association de chasse et pêche que Dragnea a fondée en En 2004, juste après sa réélection à la tête du Conseil général, il transfère l'association à plusieurs de ses amis. Le président est son vieil ami Petre Pitis, aujourd'hui connu pour être son "lieutenant". Le second est Marian Fiscuci, un ami de lycée. Au fil du temps, l'association a acquis le droit de chasser sur un grand nombre de territoires de la région, certaines autorisations ayant été obtenues en falsifiant les signatures de propriétaires réticents et en s'arrangeant avec les délimitations légales des forêts. Pour ça, les dirigeants de Turris ont crée Danubius, une association de propriétaires terriens. Ce sont des dizaines d'amis de Liviu Dragnea, également membres du PSD et fonctionnaires de la région de Teleorman, qui sont aujourd'hui à la tête de Turris et Danubius. À travers ces dernières, ils possèdent le droit de chasser sur 14% de la région de Teleorman, soit hectares, pour euros par an. L'un des sites de prédilection de cette bande de chasseurs, c'est le complexe de Zorile, près de Plopii Slavitesti, dans le sud du pays. La forêt dans laquelle se trouve le site a été achetée par Petre Pitis en 2010 par l'intermédiaire de l'entreprise Gransiloz, dont Stefan Valentin Dragnea, le fils de Liviu a été l'actionnaire majoritaire entre 2015 et 2016 avant de la revendre à la société Teldrum. Teldrum est une entreprise publique fondée en 1998 par le Conseil général de Teleorman et privatisée sur proposition de Liviu Dragnea quatre ans plus tard. Et ses nouveaux propriétaires font tous partie du réseau Dragnea: Petre Pitis et les anciens du groupe de rock Liviu Dobrescu et Mugurel Gheorghias. Ces dix dernières années, Teldrum a monopolisé les contrats publics à Teleorman et dans d'autres régions, seul ou en association avec d'autres entreprises. Ces contrats publics représentent 1,6 milliards d'euros. Liviu Dragnea nie toute connexion avec Teldrum et ses propriétaires. "Dragnea do Brazil" Dragnea ne s'est pas contenté des forêts de Teleorman. Entre le milieu des années 1990 et le milieu des années 2000, alors qu'il était aux commandes de la région, il a acheté très bon marché de nombreux terrains à des propriétaires privés ou à l'occasion de privatisations de biens fonciers qui appartenaient à l'état. Il en a vendu six en 2009 à un camarade d'université devenu homme d'affaires, Costel Comana, pour un million d'euros, payés comptant. Trois jours après la transaction, son entreprise de chemins de fer Regiotrans signait un contrat additionnel avec le ministère des Transports, multipliant ainsi par deux son activité à l'échelle nationale. Et pendant des années, Costel Comana a remporté des marches publics à la pelle. Le million d'euros n'apparaît dans aucune déclaration, puisque l'agence nationale pour l'intégrité (ANI), qui régule entre autres la fortune des élus et hauts fonctionnaires, contrôle les transactions d'argent liquide simplement en demandant aux personnes concernées le montant de la transaction... Costel Comana s'est suicidé à bord d'un vol vers le Costa Rica en février 2015, juste après que la Direction nationale anti-corruption (DNA) a commencé à enquêter sur le cas Regiotrans. Au total, le préjudice de Regiotrans à l'égard de l'état roumain est estimé à 250 millions d'euros. L'homme d'affaires avait également des affaires et des propriétés au Brésil, où Liviu Dragnea et d'autres hommes politiques roumains ont passés de nombreuses vacances, principalement dans une villa de Cumbuco. Quand le journaliste de Rise Project a demandé au chef du PSD ce qu'il avait fait du million d'euros reçu, celui-ci a répondu: "J'ai acheté des cocotiers". Il a clarifié sa réponse un peu plus tard, affirmant qu'il avait utilisé l'argent pour construire sa villa à Alexandria, dans la région de Teleorman. Mugurel Gheorghias, l'ancien membre du groupe de son rock, a également ouvert une affaire au Brésil pour investir dans des hôtels, restaurants et dans l'immobilier. Victor Ponta à boulets rouges Depuis la grande vague de manifestations de janvier, Liviu Dragnea est sous le feu des projecteurs bien malgré lui. Pour ses opposants, ce serait lui le véritable instigateur de la réforme des ordonnances d'urgence ayant déclenché les immenses manifestations de protestation. Le Premier ministre Sorin Grindeanu et le ministre démissionnaire de la Justice d'alors, Florin Iordache, auraient agi selon ses ordres. Mais le chef du PSD est contesté au sein même de son parti. Son principal rival n'est autre que son prédécesseur et ancien Premier ministre Victor Ponta. Depuis sa démission de la tête du gouvernement, ce dernier s'est en effet retrouvé mis sur la touche, sans aucune fonction de pouvoir au sein du PSD. N'ayant plus rien à perdre, Victor Ponta ne se prive donc pas pour tirer à boulets rouges sur Liviu Dragnea, dénonçant notamment sa gestion autoritaire du parti et réclamant tout haut son départ. Tant et si bien que Liviu Dragnea a fini par accuser Victor Ponta et l'ancien Président Traian Basescu d'être payés par le milliardaire d'origine hongroise George Soros et coordonnés par le Service roumain de l'information (SRI) pour déstabiliser le PSD. Ce à quoi Ponta a répondu: "Pour chacun de ses mensonges sur moi, je révèlerai une vérité sur lui. Et croyez-moi, j'en sais tellement que dans cinq ans, je n'en aurai toujours pas fini". Laura-Maria Ilie (Le Courrier des Balkans) 9

6 Actualité Actualité 10 ORADEA ARAD TIMISOARA TARGU MURES SIGHETU M. PITESTI CRAIOVA BRASOV CONSTANTA BUCAREST GIURGIU SUCEAVA BACAU IASI VASLUI BRAILA PERIPRAVA Les premières condamnations Décembre Chute du régime communiste ( ). Décembre Création de l'institut d'investigation sur les crimes du communisme et la mémoire de l'exil roumain (IICCMER) L'IICCMER dépose 210 plaintes contre des responsables de la répression. Les plaintes sont rejetées. Il faudra attendre que la justice soit réformée pour permettre les poursuites pour des crimes non prescriptibles. Février Alexandru Visinescu, l'ancien commandant de la prison de Ramnicu Sarat, est condamné à vingt ans de prison pour crimes contre l'humanité. Il est le premier condamné pour les crimes commis pendant les quarantecinq années de communisme. Mars Ioan Ficior, 89 ans, l'ancien chef du camp de travail de Periprava est lui aussi condamné à vingt ans de prison pour crimes contre l'humanité. Une procédure à l'encontre de Marian Petrescu, 85 ans, ancien commandant de plusieurs prisons et camps de travail, a été ouverte début mars. Les victimes Selon le mémorial installé dans l'ancienne prison de Sighet, environ Roumains ont été condamnés et emprisonnés pour des motifs politiques pendant la dictature communiste. Politique Les archives couvrant quarante-cinq ans de communisme jusqu'en 1989 ne sont encore que partiellement accessibles. La maison Ceausescu se visite sans aucune évocation des crimes commis, signe de la difficulté qu'éprouve toute une société à poser un regard apaisé sur son passé. Enfant, je frissonnais en marchant devant le siège de la Securitate" La Securitate, la police politique secrète de la Roumanie communiste, a pesé d'une ombre menaçante sur la jeunesse de Mihai Demedriade sans qu'il sache précisément pourquoi. "Mes parents comme beaucoup avaient peur et cachaient la vérité par prudence, pour bien faire", explique-t-il. Car ce n'est pas un hasard s'il est aujourd'hui, à 43 ans, historien au Conseil national d'étude des archives de la Securitate (CNSAS) à Bucarest. Sur les 25 kilomètres de rayonnage d'archives conservées dans la banlieue de la capitale roumaine, l'historien a mis la main sur le secret de famille, sur le passé traumatique de son père, ses six années en prison et en camp de travail de 1958 à 1964 pour activité contrerévolutionnaire alors qu'il était jeune étudiant, et qui brisèrent à jamais sa vie. Condamné à travailler comme ouvrier Visinescu, ici en 1953, mémoire encore vivante des années sombres de la Roumanie. non qualifié dans le bâtiment, sans pouvoir reprendre ses études, son père est resté sous surveillance policière jusqu'à son décès en 1987, malgré son procès en réhabilitation en "Comme pour toutes les personnes qui consultent les archives, j'ai été en état de choc devant les détails de la vie intime de mon père et les noms de tous les proches de la famille qui collaboraient avec la Securitate", témoigne-t-il. La Securitate roumaine œuvrait à l'instar de la Stasi de l'ex-rda, avec ses agents épaulés par un vaste réseau d'indicateurs dans la population et par quelque militaires impliqués dans la traque aux opposants parmi les vingt millions de Roumains. Une partie des archives détruite à la chaux Les archives de la Securitate La mémoire Mihai Demedriade n'en oublie pas sa démarche d'historien et le fait que les murs de la CNSAS ne révèlent qu'une vérité partielle si ce n'est partiale. "L'existence du Conseil témoigne de la volonté de savoir", affirme l'historien Silviu Moldovan, également au CNSAS. "Mais une partie des archives ont été détruites en 1989 au moment de la chute de Nicolae Ceausescu, explique-t-il, certaines ont été incendiées, d'autres enterrées avec de la chaux, notamment les dossiers les plus récents, donc les plus sensibles, tels ceux concernant les personnalités du Front de salut national, le parti au pouvoir au moment de la transition". Près de trente ans plus tard, les Roumains ignorent encore qui fut le commanditaire de ces destructions et ce qu'il advint des archives pendant les années où elles restèrent aux mains des services secrets avant d'être transférées au CNSAS au cours des années Pour l'historien Matei Cazacu, il est clair qu'elles ont été soigneusement "peignées". "Les dossiers des informateurs du parti communiste ou des hommes clés de la Securitate ont été détruits ou écartés, la Securitate a volontairement jeté la lumière sur les seconds couteaux", estime-t-il. Des dossiers, ajoute-t-il, à manipuler avec précaution: "Certains se basent sur de fausses délations, les agents eux-mêmes faisaient parfois de fausses déclarations pour abîmer l'image d'une personne". roumaine toujours aussi discrètes en forme de passoire "La Securitate vivait sous la pression du parti, elle devait prouver son caractère indispensable et pour ce faire, écrivait en permanence", corrobore Radu Preda, directeur de l'institut d'investigation sur les crimes du communisme et la mémoire de l'exil roumain (IICCMER). Matei Cazacu, considéré comme un élément "haineux" par le régime, y compris après son exil en 1973, n'a pu retrouver que 400 pages couvrant les années 1966 et 1967 parmi les volumineuses archives le concernant. "À mon frère qui était souvent inquiété à mon propos, des agents de la Securitate avaient montré une photo tirée du feuillet n 803, soit la page 1605", explique-t-il. Réhabiliter la Securitate en simple service de renseignements Or ce dossier, s'il existe encore, relève du peu coopérant service d'information externe (SIE) de la Roumanie, à l'époque chargé des espions, des exilés et des agents d'influence. L'armée et le ministère de la justice eux-mêmes font de la résistance. "Nous ne pouvons pas fouiller leurs dossiers librement, déplore Radu Preda. Même si l'arsenal législatif le permet, il n'y a pas la volonté historique et civique d'ouvrir les archives", se désole-t-il. Sans compter le travail de sape encore à l'œuvre. "Nous devons faire face à toute une littérature qui réécrit l'histoire afin ainsi de réhabiliter la Securitate en simple service de renseignements", ajoute Silviu Moldovan. "Et, poursuit l'historien, des centaines de procès sont intentés par d'anciens agents de la Securitate, qui contestent les documents attestant d'actes qu'ils ont fait subir aux victimes quand celles-ci portent plainte ; heureusement nous gagnons quasiment tous ces procès". L'ouverture politique dans le courant des années 2000 n'aura pas suffi. Quelques jours avant l'adhésion à l'union Européenne, les parlementaires roumains adoptèrent en décembre 2006 la déclaration de "condamnation des crimes du communisme, de regret et de compassion à l'égard des victimes de ces crimes". Mais dix ans plus tard, le musée de la dictature communiste, alors décidé, n'a pas vu le jour. Les panneaux d'une modeste exposition de préfiguration sont discrètement installés dans les murs de la bibliothèque nationale. "Cela n'a pas été facile", concède Radu Preda. Si l'exposition s'arrête aux premiers mois qui ont suivi l'exécution du couple Ceausescu le 25 décembre 1989, elle montre que la répression contre les manifestants fut plus sanglante après la chute du dictateur qu'avant, illustrant un pays à la transition durablement préemptée par les anciens responsables communistes jusqu'aux actuels dirigeants du parti "socialdémocrate" au pouvoir. Comprendre le passé pour construire la démocratie "La continuité de l'élite communiste a constitué un obstacle majeur. Cette bataille contre le temps est très frustrante", s'inquiète Radu Preda. Seuls deux responsables ont récemment été condamnés pour crimes contre l'humanité. "Il ne s'agit ni de revanche, ni de chasse aux sorcières, plaide-t-il. Mais la Roumanie ne pourra pas construire un état de droit sur une montagne d'injustice. Construire la démocratie suppose de savoir ce qui s'est passé pendant les décennies d'absence de démocratie". La visite dans l'ancienne demeure du couple Ceausescu, ouverte au public depuis le printemps 2016, donne une idée du degré d'amnésie de la société roumaine. La jeune guide parcourt l'immense "palais du printemps". Pièce après pièce, elle détaille la débauche de luxe, les tapis iraniens, les mosaïques italiennes, les marbres roumains, le mobilier ici Louis XVI, là Louis XIV, baroque ou rococo mais, s'exclame-t-elle, "toujours fabriqué en Roumanie!". Elle s'émeut devant le petit salon où Nicolae s'adonnait aux échecs et devant les sofas alors réservés aux deux labradors. Elle s'extasie devant l'incroyable dressing d'elena et tous les équipements de soins du corps, hydrothérapie, électrothérapie, etc., aux abords de la piscine intérieure. Mais du règne dictatorial du couple pendant vingt-cinq ans, elle ne souffle mot. "Le communisme reste une nostalgie, une parenthèse méconnue, analyse l'historien Ioan Stanomir. À l'époque, personne n'avait l'audace de penser la fin du communisme, la seule façon de survivre c'était l'adaptation, et la relative tranquillité économique d'alors devait faire en sorte que tous adhèrent au système". Mais l'identification au communisme - trois millions de membres du PC et leurs familles constituaient la majorité de la population - n'explique pas tout. "L'histoire est mal connue aussi parce qu'elle est mal aimée", fait valoir Matei Cazacu. "Les Roumains détestent leur histoire faite d'occupation, de dépendance et de défaites militaires. La période communiste n'a fait que noircir encore un peu plus le passé". Marie Verdier (La Croix) L'ancienne demeure du couple Ceausescu, ouverte au public depuis le printemps

7 Actualité Actualité 12 ORADEA ARAD TIMISOARA SATU MARE TARGU MURES PETRILA CRAIOVA CONSTANTA BUCAREST GIURGIU BRASOV SUCEAVA BACAU IASI TARGOVISTE VASLUI BRAILA TULCEA La diffusion des bonnes pratiques, un objectif Diana, commissaire au sein de l'autorité nationale pour la protection des consommateurs, a nourri l'idée d'entreprendre la rédaction d'un code d'éthique: "Nous avons des principes à suivre pour les contrôles que nous effectuons auprès de restaurateurs, par exemple, mais pas de règles de bonne conduite, ni envers nos clients, ni entre nous", précise cette participante à l'académie, qui ne manque pas d'exemples de conflits d'intérêts. Outre la mission qu'ils se donnent d'éduquer leurs supérieurs, les académiciens repartent avec la volonté de transmettre des valeurs à leurs concitoyens. "Intégrité, éthique, transparence, ce sont des mots qu'on n'enseigne pas à l'école. Les cours d'éducation civique y sont optionnels. C'est pour cela que nous continuons tous à penser que tout nous est dû" affirme Andrei, en pensant déjà aux débats qu'il proposera aux jeunes de sa commune. Les initiateurs de cet élan attendent surtout de voir un réseau surgir. "D'ici six mois ou un an, nous dresserons un bilan des changements qu'ils auront déjà réussi à insuffler, seuls et ensemble, avec l'espoir que cette expérience aura un effet boule de neige", avance Cristina Pintilie, juriste de 29 ans et membre de l'association Liderjust. Car si l'équipe a choisi Timisoara comme point de départ de son initiative du fait de l'ouverture vers l'europe de l'ouest que manifeste cette ville, beaucoup d'autres lieux, sur la carte de la corruption du pays, restent couverts de rouge. Politique En février 2017, le gouvernement roumain tentait de légiférer pour dépénaliser certains faits de corruption, provoquant la colère de dizaines de milliers de Roumains qui ont manifesté plusieurs semaines contre les abus de pouvoir dans l'administration. Preuve que l'élan ne retombe pas, des fonctionnaires et agents publics ont lancé fin mai à Timisoara une "Académie anti-corruption" pour endiguer ce fléau à leur échelle. Le marché de la corruption ressemble à un trafic de drogue, sauf qu'ici le dealer n'échange pas des grammes de cocaïne contre de l'argent, mais un abus de pouvoir". Codru Vrabie, grand brun au regard intransigeant, ne mâche pas ses mots pour mobiliser la douzaine de fonctionnaires, conseillers municipaux et membres d'associations qui lui font face dans le sous-sol d'un hôtel de Timisoara. Avec d'autres experts du sujet, sa mission est de taille: en quatre jours, former la première "Académie anti-corruption" d'un pays, où, d'après ce militant de la bonne gouvernance, la petite corruption présente dans toutes les administrations publiques se chiffre à 1,5 milliard d'euros par an. "En Roumanie, malheureusement, le pouvoir discrétionnaire est encore très fort, ce qui laisse de la place à l'apparition de la corruption. Ainsi, les citoyens donnent des potsde-vin, qui valent en moyenne un mois de salaire, pour obtenir un service plus rapidement ou meilleur, alors qu'ils le paient déjà dans leurs impôts", regrette cet ancien représentant de la société civile auprès du Conseil national de l'intégrité. Réduire les occasions de chantage Les membres de cette nouvelle académie en sont convaincus: un changement dans les pratiques doit germer. Et ici, ils sont venus chercher les outils pour rendre cela possible. Première leçon : éviter les cas de monopole décisionnaire afin, par exemple, de lutter contre un maire qui se croit tout-puissant. Des mots familiers pour Daniela, conseillère municipale dans l'opposition d'un village de habitants. "Le maire force les employés à signer des documents litigieux sous peine de les licencier. Il en profite car nous n'avons le budget que pour huit salariés. Mais je viens d'apprendre que nous pourrions nous associer à d'autres communes pour nous répartir les tâches administratives et mieux les contrôler. Cela réduirait les occasions de chantage", espère-t-elle. Encourager chacun à agir est l'un des buts de cette académie. "Le communisme et sa triste culture du "qui suis-je pour contredire mon chef" ont laissé des séquelles, et beaucoup ont encore peur de s'impliquer, alors même qu'ils ne font rien de mal à titre personnel", ajoute Codru Vrabie. Aline Fontaine La lutte contre la corruption A Timisoara une "Académie anti-corruption" voit le jour Des fonctionnaires en guerre contre les bakchichs Le parlement roumain examine actuellement un projet de loi controversé visant à désengorger les prisons. Le 31 janvier, le gouvernement social-démocrate (ex-communiste) avait avancé l'argument de la surpopulation carcérale pour adopter un décret d'urgence assouplissant la législation anticorruption. Les Roumains avaient protesté par centaines de milliers dans les rues, et contraint le gouvernement à renoncer à son projet. Le rôle de la DNA. La Direction nationale anticorruption (DNA) créée sous la houlette de l'union européenne avant l'adhésion de la Roumanie à l'ue a permis de condamner 4000 personnes de 2010 à 2016 pour des faits de corruption. En 2016, 1271 personnes ont été traduites devant la justice dont une trentaine de personnalités, ministres, sénateurs, députés, magistrats, chefs d'entreprise publiques. Social Sur la planète idéale de Lavinia, la nature, la propreté et le respect régneraient en maîtres. Dans ce monde rêvé, surtout, les parents ne partiraient jamais travailler à l'étranger. Lavinia a 10 ans. Elle vit à Petrila, cité du centre-ouest de la Roumanie, habitants et cinq mines de charbon. La fermeture progressive des sites l'a depuis transformée en désert économique. L'exode des adultes, obligés de partir travailler dans d'autres pays européens, lui a donné le coup de grâce. Affairée dans la pièce unique du logement entre deux canapés-lits, la mère de Lavinia, femme célibataire de 38 ans, se prépare à passer plusieurs mois en Allemagne pour le ramassage des fraises, comme elle le fait depuis trois ans. En deux mois à l'étranger, Gabriela amasse euros. De quoi nourrir la famille et acheter des vêtements, avant de vivoter de nouveau jusqu'au départ suivant, grâce aux 155 euros d'aides sociales qu'elle reçoit chaque mois et qui permettent de payer le loyer et les factures. "Mes trois filles gèrent plutôt bien ces périodes, mais mon fils Vasile souffre plus", confie Gabriela. Le garçon de 14 ans acquiesce: "Dès que maman part, je ne parle plus à mes amis, et je me renferme. Chaque fois que je rentre dans l'appartement, j'ai envie de lui dire quelque chose, mais elle n'est pas là ". Beaucoup de parents ne déclarent pas leur départ À Petrila, les services sociaux recensent 335 enfants dans cette situation. "En réalité, ils sont au moins deux fois plus, car tous les parents ne signalent pas leurs départs", concède le maire, Vasile Jurca. Conduits par le désir d'offrir un meilleur avenir matériel à leurs enfants, certains parents s'organisent autour de ce nouveau mode de vie. "Mon mari part deux mois, puis c'est moi, nous alternons, lâche Luminita, 45 ans. Notre fille de 8 ans en sort affectée. Quand je suis à ses côtés, je vois comme son père lui manque, et quand je suis en Allemagne, elle me demande de rentrer, en disant que l'argent n'est pas important". À Petrila, la plupart des enfants concernés sont issus de familles monoparentales. Souvent, leurs grands-parents les élèvent. "Notre priorité est d'éviter que les enfants soient abandonnés et placés, assure Daria Moldovan, psychologue à l'association Salvati Copiii qui suit une cinquantaine de ces enfants. Nous insistons auprès des parents sur la nécessité de déclarer un représentant légal, sans quoi leurs enfants peuvent perdre des droits comme l'accès à des sorties scolaires ou à la santé". Daria Moldovan coordonne un programme de suivi et En Roumanie, les parents partent, les enfants restent "Par chance, nous n'avons eu aucun suicide" La cité minière roumaine de Petrila (jud Hunedoara) voit sa population active s'en aller, victime du marasme économique, pour travailler ailleurs en Europe. De plus en plus d'enfants se retrouvent seuls, privés de leurs parents. d'activités pour ces enfants privés de leurs parents, et voit de près les effets néfastes de la situation. "Par chance, nous n'avons pas eu de suicide ici, comme ailleurs dans le pays. Mais nous voyons que les enfants changent. Rien ne peut remplacer l'amour des parents. Une fois, un garçon resté avec sa tante s'est mis à mordre ses camarades de classe, il exprimait ainsi son manque d'affection", se souvient-elle. Le pire est à venir avec la fermeture de la dernière mine Dans les locaux de Salvati Copiii, les diplômes scolaires des enfants accompagnés par l'association sont affichés aux murs. "Nous faisons tout pour qu'ils dépassent la condition de leurs parents. Partir quelques mois pour gagner un peu d'argent puis revenir et repartir encore n'élèvera pas leur niveau de vie", martèle Valeria Popescu, directrice de la structure, arrivée à Petrila en 1976 comme institutrice et qui a vu sombrer la ville. Seul un renouveau économique sortirait Petrila du cauchemar. "La dernière mine va fermer l'an prochain, laissant 800 personnes au chômage. La mairie sera le premier employeur, alerte le maire. J'ai sollicité des fonds européens pour aménager ici une coopérative fruitière. Si nous recevons cet argent, nous formerons des gens pour y travailler et la diriger. J'ai aussi baissé les taxes pour les entreprises, mais personne ne vient investir. Pourtant, nous avons beaucoup de main-d'œuvre, et pas chère ". En attendant, l'hémorragie se poursuit. Adiana, la grande sœur de Lavinia, en termine cet été avec le lycée. Jusqu'ici, elle s'occupait de ses frères et sœurs en l'absence de leur mère. Cette foisci, elle aussi devrait partir. Alice Fontaine Au moins enfants concernés enfants roumains ont au moins un parent qui travaille à l'étranger, soit de plus que fin Les services de l'inspection scolaire évoquent même enfants dans le pays "concernés" par la migration parentale. Seulement d'entre eux bénéficient d'une protection sociale d'après le ministère du travail, de la famille et de la protection sociale. En juin 2016, un groupe de travail a été créé pour cerner les besoins de ces enfants. Parmi les propositions: le raccourcissement des délais pour déléguer l'autorité parentale, le parrainage d'enfants par des familles restées sur place ou le jumelage entre les villes hôtes des parents et les villes d'origine. 13

8 Société Société 14 ORADEA ARAD TIMISOARA SATU MARE TARGU MURES PITESTI CRAIOVA CONSTANTA BUCAREST GIURGIU BRASOV SUCEAVA BACAU IASI TARGOVISTE VASLUI BRAILA TULCEA La fille aînée de Basescu inculpée La fille de l'ancien président roumain Traian Basescu et plusieurs autres personnes seront traduites en justice dans une affaire de corruption associée à sa campagne présidentielle de son père. Ioana Basescu, notaire, est soupçonnée d'avoir demandé au dirigeant d'une entreprise publique d'accepter un contrat fictif pour défrayer les coûts de la campagne. Les deux autres accusés sont l'ancienne ministre du Tourisme Elena Udrea et le journaliste Dan Andronic. Elena Udrea, surnommée "la Blonde du Président" était la directrice officieuse de la campagne de Basescu. Les procureurs affirment que cette campagne a été financée avec de l'argent obtenu illégalement, notamment par détournement de fonds et blanchiment d'argent. Crise du marché de l'emploi "L'économie roumaine se dirige vers une crise profonde sur le marché de l'emploi, vu que le nombre des salariés et le taux de professionnalisation sont à la baisse depuis plusieurs années". C'est la principale conclusion d'une étude publiée à Bucarest par la compagnie de conseil financier Keys Fin. Selon l'enquête, la principale cause de ce phénomène c'est l'exode des Roumains vers l'occident, notamment depuis l'adhésion du pays à l'ue en Par ailleurs, le nombre des postes vacants a beaucoup augmenté depuis 2009, lorsque l'on recensait près de postes, par rapport à en Quelques chiffres: postes vacants dans l'industrie manufacturière, 8461 dans la santé et 5216 dans le commerce. Vie quotidienne De par son type d'élevage et sa position géographique, chaque pays d'europe a une consommation de viande ou de poissons différentes, qui bien entendu rejaillit sur ses spécialités culinaires. La viande de bœuf est la plus consommée au Danemark avec 29,6 kilos par an et par habitant. Les Irlandais, les Suédois, les Luxembourgeois, les Français, les Suisses et les Italiens mangent plus de 20 kilos par an. Britanniques, Norvégiens, Suédois, Russes, Biélorusses, Portugais, Grecs, Autrichiens, Slovènes, Belges et Néerlandais plus de 15. Les Allemands, les Espagnols, les Estoniens, les Albanais et les Turcs plus de 10. Les plus rétifs à la viande de bœuf sont les Slovaques, les Polonais, les Lituaniens, les Lettons, les Bulgares et les Moldaves qui en mangent moins de 5 kilos par an. Les Tchèques, les Ukrainiens, les Macédoniens, les Croates, les Hongrois, les Bosniaques, les Serbes, les Roumains et les Monténégrins en mangent plus de 5 et moins de 10. Entre 15 et 18 kg de viande de volaille par an pour les Roumains La volaille est la plus consommée au Royaume-Uni avec 30,8 kilos par an et par habitants. Les Islandais, les Danois, les Luxembourgeois, les Biélorusses, les Chypriotes, les Espagnols, les Portugais et les Hongrois plus de 24 kilos. Les Irlandais, les Belges, les Français, les Italiens, les Slovènes, les Tchèques, les Polonais, les Lituaniens, les Russes, les Ukrainiens et les Bulgares plus de 21 kilos. Les Finlandais, les Estoniens, les Lettons, les Autrichiens, les Turcs plus de 18 kilos. Les plus rétifs à la viande de volaille sont les Néerlandais, les Croates, les Bosniaques, les Serbes, les Albanais, les Grecs et les Monténégrins avec moins de 15 kilos par an. Les Norvégiens, les Suédois, les Slovaques, les Roumains, les Moldaves et les Macédoniens en mangent moins de 18 mais plus de 15. Les Autrichiens amateurs de porc Qui mange quoi en Europe? Le porc est, on s'en serait douté, présent là où l'on mange moins de bœuf. C'est l'autriche qui détient le record avec 67,5 kilos de viande porcine consommée par an. Pays de charcuterie, le Portugal, l'espagne, l'italie, l'allemagne et la Pologne en consomment plus de 40 kilos, ce qui est aussi le cas du Luxembourg, de la Slovénie, de la Hongrie, du Monténégro, de la République Tchèque, de la Lituanie et de la Lettonie. L'Irlande, la France, la Belgique, les Pays-Bas, la Grèce, Chypre, la Croatie, la Slovaquie, la Suisse, la Biélorussie, la Suède et la Finlande dépassent les 30 kilos par an. L'Islande, le Royaume-Uni, la Norvège, la Russie, la Serbie, la Bulgarie et la Roumanie sont au-dessus des 20 kilos. Islam oblige, les plus rétifs au porc sont l'albanie, la Bosnie et la Macédoine avec moins de 10 kilos par an. Entre les 10 et les 20 kilos, on trouve l'ukraine, la Moldavie et le Danemark. Pêcheurs d Islande: ce n est pas une légende Reste le poisson, avec les pêcheurs d'islande qui pulvérisent les records : l'île aux glaciers consomme 90,1 kilos de poissons par an et par habitants, loin devant la Norvège, la Lituanie, l'espagne et bien sûr le Portugal (célèbre pour ses sardines et ses morues) qui en consomment plus de 40 kilos. Au-dessus des 30 kilos, on trouve la France, la Suède et la Finlande. Au dessus des 20 kilos, l'irlande, la Belgique, les Pays-Bas, le Luxembourg, la Lettonie, la Russie, le Danemark et Chypre. Il ne faut pas sortir de Polytechnique pour deviner que les pays les plus loins de l'océan sont les plus rétifs aux poissons: République Tchèque, Slovaquie, Hongrie, Roumanie, Bulgarie, Albanie, Serbie, Macédoine, Bosnie, Turquie et Monténégro avec moins de 10 kilos de poisson par an. Reste les pays compris entre 10 et 20 kilos : la Grèce (et sa délicieuse tarama), le Royaume-Uni, l'allemagne, la Suisse, l'autriche, la Slovénie, la Croatie, la Moldavie, l'ukraine, la Biélorussie, la Pologne et l'estonie. Enseignement Entre 2004 et 2014 le nombre de jeunes partis étudier en dehors de nos frontières est passé de à par an. Après quelques mois loin de France, le retour n'est pas si simple. The Beacon, journal rattaché à l'université de Portland aux Etats-Unis, s'est penché sur la question. À son retour de l'étranger, l'étudiant passerait par différents stades. D'abord le stade de la tristesse, de quitter ce qui était devenu une nouvelle maison, puis celui de l'enchantement de retrouver son "vrai" domicile, de pouvoir se coucher à nouveau dans son "propre lit", et puis surtout de revoir des "visages familiers". Enfin, viendrait la frustration. Celle de ne pas se réhabituer aussi vite qu'on le pensait aux vieilles habitudes laissées derrière soi au moment du départ. "J'avais l'impression que je n'étais jamais vraiment partie" Même si tous les étudiants ne passent pas nécessairement par ces différents stades, une majorité de ceux que nous avons interrogés pour évoquer ce sujet, nous parlent tout de même d'un certain "décalage" au moment de leur retour à la vie "normale". Pour Célia, qui parle de son année à l'université de Perth comme "une des plus rythmées, et enrichissantes, de (ses) études", le retour en France a été "ambigu". Trop vite retombée dans la routine, et mes petites habitudes, j'avais l'impression que c'était une parenthèse dans le reste de mes années d'études, et que je n'étais jamais vraiment partie". Période particulière où l'on sait que le temps est compté : "il faut en profiter pour faire autant de choses que possible. On a le sentiment qu'il ne faut pas perdre un instant". Anne, partie en Italie, partage ce sentiment : "on essaye de faire le maximum de choses, ce qui rend généralement notre échange encore plus intense". Le temps paraît comme suspendu toute la durée de l'échange. Les contraintes sont loin, et les enjeux différents. Tout est toujours nouveau, on apprend tous les jours, et "surtout, comme on a conscience que cette période est provisoire, on est peut-être plus réceptif à ce qui nous entoure, plus curieux. J'ai l'impression que notre état d'esprit est différent, sans doute plus ouvert que d'habitude. C'est un contexte un peu particulier. Ce qui est difficile finalement quand on rentre, c'est de se rendre compte qu'on a un peu changé et puis de constater qu'on revient dans un "monde" où pour le coup rien n'a vraiment bougé" ajoute Mathilde, partie au Canada. Le blues du retour des étudiants après une expérience Erasmus Pas facile de retrouver son "chez soi" Que ce soit pour un semestre ou pour un an, de plus en plus d'étudiants français, encouragés par leurs écoles, partent étudier à l'étranger. Si les départs, synonymes d'aventures et de dépaysement, sont généralement bien préparés, les retours le sont paradoxalement beaucoup moins. Quoi de plus naturel que de retrouver son "chez soi", ses habitudes et son quotidien? Pourtant le "choc culturel " attendu ne se produit peut-être pas dans le sens qu'on imagine? "Je ne suis rentré en France que 12 ans plus tard!" Un groupe folklorique d étudiants roumains à Perth. En sortant de leur "petit confort", en cherchant à s'adapter à tout type de situations, ou mode de vie, Anne et Célia ont développé de nouvelles compétences. Des "compétences linguistiques", mais aussi des "capacités d'adaptation " et "forcément ça aide quand on doit s'intégrer dans une nouvelle équipe de travail par exemple, ou un nouveau groupe d'amis" précisent-elles. Ariane, partie pendant trois ans, elle aussi au Canada, affirme avoir "élargi ses horizons pendant cette période" et être revenue "différente et changée". "À mon retour à Paris, je n'avais plus les mêmes centres d'intérêts que mes amis. J'étais un peu en décalage". Le retour à la réalité, et le fait de "reprendre un rythme français" peut, dans ces conditions, ne pas paraître très grisant, et être plutôt vécu comme quelque chose "d'un peu compliqué" voire de carrément "ennuyeux"! Pourtant certains réussissent parfois à y échapper. C'est le cas de Damien. "J'ai eu peur de ce blues du retour, beaucoup de mes amis m'en avaient parlé. Je n'avais plus du tout envie de rentrer en France. J'avais envie de continuer à voyager! Revenir dans le quotidien me paraissait déprimant. À la fin de mon année à Tromsöe, (en Norvège, ndlr) je suis parti voyager en Asie, et ne suis rentré en France que 12 ans plus tard!". Une future vie d'expat? Pour beaucoup d'entre eux, le fait d'avoir pu partir étudier à l'étranger, c'est comme d'avoir ouvert la boîte de Pandore. Le virus du voyage s'est installé et ne semble pas près de les quitter. "Maintenant j'ai envie de partir en Amérique du Sud pour apprendre l'espagnol et surtout pour y travailler dans le domaine du vin, raconte Anne. La Nouvelle-Zélande m'attire aussi. En tout cas je suis contente d'avoir pu vivre en Italie ou en Australie, j'aurais vraiment regretté de ne pas l'avoir fait". Damien qui lui, vient juste de rentrer en France après plus de 12 ans de vie à l'étranger plaisante en disant que finalement ce "retour c'est un peu comme une nouvelle expatriation". Il réapprend la vie à la française. Célia quant à elle, est en train de préparer son prochain départ: elle vient de décrocher "un stage de 6 mois à Bogota" et n'envisage pas de passer ses premières années dans le monde du travail en France. Noémie Choimet ( 15

9 Société Société Santé Grâce aux dons ISF, Care aide des enfants roumains atteints de scoliose 16 ORADEA ARAD TIMISOARA SATU MARE TARGU MURES PITESTI CRAIOVA BRASOV SUCEAVA IASI TARGOVISTE BRAILA TULCEA CONSTANTA BUCAREST GIURGIU BACAU VASLUI Au moins 13 heures sur la table d'opération Pour Marinela, l'intervention, qui a duré 13 heures, a commencé le 31 janvier. Le médecin lui a d'abord posé un anneau sur la tête, rattaché à une poulie, qu'elle a dû garder pendant six semaines, afin d'étirer petit à petit son corps. "Ce temps préalable à l'opération est nécessaire, sans cela le corps réagirait difficilement. Il faut imaginer que, pendant ce processus, tous les organes, le foie, les reins changent de position", explique Alexandru Thiery. 24 heures sur 24, des bénévoles d'associations se sont occupés de Marinela, car elle ne pouvait pas marcher toute seule avec cet appareillage. "C'était pesant, souvent j'avais envie de tout enlever, mais les devoirs de mathématiques et de roumain m'ont aidée à oublier", reconnaît l'élève de sixième. L'opération a eu lieu le 21 mars. "L'idée était de redresser la colonne avec deux tiges en lithium de 5,5 mm, détaille le médecin. Nous avons commencé par poser la tige de gauche pour tirer la colonne et implanté une vingtaine de vis. La tige de droite nous a permis d'adapter le degré de correction". Deux Français ont inventé cette technique au début des années Dans le bloc, une équipe de sept personnes s'affairait: deux chirurgiens, un anesthésiste, un infirmier et deux aides opératoires qui veillent sur l'activité neurologique de l'enfant. "Nous devons être sûrs que la moelle épinière n'est pas affectée", assure le maître de cet ouvrage d'envergure. Un médecin de Bucarest s'est spécialisé dans la chirurgie des scolioses sévères. Grâce à l'aide d'associations qui prennent en charge les frais de ces soins non remboursés, des dizaines d'enfants redécouvrent la vie. Marinela va bientôt pouvoir courir. Avant, au bout de quelques mètres, l'adolescente s'arrêtait, épuisée et remplie de douleurs dans le bas du dos, la faute à une grave scoliose. Dix jours après son opération, elle se met à rêver. "Peut-être pourrai-je même danser et participer à des compétitions", espère la brunette, allongée sur un canapé de la clinique Monza, à Bucarest. Jusque récemment, cette jeune fille de 14 ans avait la taille d'une enfant de 6 ans. Sa colonne vertébrale était déformée de 140, un cas très grave. Grâce à une intervention chirurgicale, Marinela a grandi de 14 centimètres. Sa colonne s'est redressée et ne présente plus qu'une déformation de 37. Jamais la correction n'est totale. "Dans trois mois, elle pourra faire du vélo et aller à la piscine, confirme Alexandru Thiery, le médecin qui l'a opérée. C'est normal que ce ne soit pas instantané. Marinela a dû rester six semaines assise ou alitée avec des instruments pour l'étirer. C'est comme si elle revenait du cosmos et reposait pied sur terre". Pour le chirurgien, l'évolution de Marinela est excellente. "Elle marche déjà gracieusement, comme une ballerine", s'amuse-t-il. Jusqu'à euros l'intervention Marinela: un sourire qui en dit très long et la photo de son calvaire d enfant, avant l opération. En Roumanie, les cas de scoliose sévère chez les enfants, à savoir plus de 100 de déformation, ne sont traités que dans cette clinique. Un traitement rendu possible grâce à l'association Sera (Solidarité enfants roumains abandonnés) et parrainé par son association partenaire, Care France. "Chaque année, nous investissons euros de dons venus de France, dont un cinquième provenant des dons ISF, pour acheter des kits d'implants qui ne sont pas remboursés par l'assurance maladie. Ils valent près de 4000 euros l'unité, mais le fabricant a accepté de nous les vendre à moitié prix", précise Bogdan Simion, le directeur de Sera. L'intervention peut coûter jusqu'à euros. Inabordable pour les Roumains, qui gagnent un salaire mensuel moyen de 300 euros. D'autres associations se sont alliées à Sera pour prendre en charge les frais d'hospitalisation ou encore les médicaments afin de permettre à des enfants comme Marinela de bénéficier de l'opération. Pour Marinela, comme pour les 114 enfants venus de tout le pays que le médecin a opérés depuis trois ans et demi, tout s'est bien terminé. Le sourire de l'adolescente le montre. "Avant, elle était très renfermée. Beaucoup de ses camarades de classe l'excluaient à cause de sa maladie", décrit Daniel, bénévole de l'association "Ana et les enfants". Il suit Marinela depuis trois ans. "Le médecin lui a donné une chance de se réinsérer dans la société", conclut-il. Pour mener à bien ces opérations, le médecin s'est formé à l'hôpital universitaire de Gand, en Belgique. Aujourd'hui, il aimerait bien pouvoir faire plus. "Je ne peux opérer que six à huit enfants par mois, car ces interventions durent au moins 13 heures et sont très difficiles. C'est pourquoi seulement quelques dizaines d'établissements au monde les proposent. Mais, dans un pays de 20 millions d'habitants, je ne devrais pas être tout seul, s'indigne Alexandru Thiery. Il pousuit, un peu désabusé : La Roumanie a voulu rejoindre l'union Européenne mais elle ne se donne pas du tout les moyens de s'aligner!" cas de scoliose grave À Iasi, dans le nord du pays, un autre chirurgien, qu'alexandru Thiery allait aider, pratiquait ces interventions, mais l'hôpital public a cessé de le financer. Pour le médecin, la Roumanie ne s'illustre pas par un nombre exceptionnel de scolioses. Faute de statistiques officielles, il estime à le nombre de scolioses de plus de 30, une proportion égale à celle du reste de l'europe. "En revanche, nous sommes dans un cercle vicieux. Nous avons plus de cas graves car nous ne sommes qu'une vingtaine d'orthopédistes pédiatriques, dix fois moins qu'en France. Et 40 % des médecins roumains exercent à l'étranger, faute de moyens dans notre système public", ajoute-t-il. Un autre problème frappe aussi le chirurgien. "Beaucoup de généralistes pèchent par orgueil. Ils ne vont pas avoir En Roumanie, 25 enfants sont récemment décédés des suites de la rougeole ou de complications liées à cette maladie. De nouveaux foyers épidémiques viennent d'être détectés dans une localité de Bihor (Transylvanie), invitant les autorités sanitaires à prendre des dispositions d'urgence. Une commande de doses de vaccin ROR (rougeole, rubéole, oreillons) a été passée afin de répondre aux besoins immédiats. Début mai, une campagne de vaccination de masse devait débuter incessamment dans les régions les plus touchées. Pour endiguer définitivement la propagation de la maladie, autres doses étaient en cours de production à la demande de la Direction de la santé publique, bénéficiant en priorité aux nourrissons et aux enfants en bas âge. Afin d'éviter une future pandémie infantile, le ministère de la Santé lancera prochainement un accord-cadre d'une durée de quatre ans pour assurer la continuité de la distribution de ce vaccin dans le pays. l'honnêteté de dire aux patients qu'ils ne savent pas comment faire, ni avoir l'idée d'envoyer le patient chez un spécialiste, comme ça se fait en Europe de l'ouest. Ainsi, on se retrouve avec des cas de scoliose très aggravés". Teodora, 16 ans, a subi les conséquences de cette mentalité. Elle a été opérée un jour après Marinela. "Elle est atteinte depuis l'âge de 6 ans. Nous savions qu'une opération était possible, mais, les médecins de notre région, dans le nord, ont toujours prétexté que l'opération devait être reportée", raconte sa mère qui, sans le soutien financier de Sera, n'aurait par ailleurs pas pu financer l'intervention. Résultat, la scoliose a fini par comprimer la cage thoracique de Teodora. "Il était temps de l'opérer car elle n'avait plus qu'une capacité respiratoire de 20 %", ajoute le médecin. Maintenant, Teodora sent qu'elle respire. Tout comme Marinela rêve de courir, la lycéenne, pleine d'optimisme, songe à intégrer l'université d'art de Bucarest. D'ici à six mois, elle n'aura plus besoin de l'assistance permanente de sa mère. Tout sera possible. Aline Fontaine Vaccination infantile généralisée contre l'épidémie de rougeole La Cour européenne des droits de l'homme condamne la Roumanie à verser une amende de 9800 euros, la raison étant que les autorités roumaines n'ont pas condamné un homme qui a agressé son épouse à 8 reprises. De plus, la Cour a noté que les autorités ont même accusé la victime d'avoir provoqué l'agresseur, et n'ont pas émis les ordres de protection sollicités par celle-ci. La demande de la victime d'avoir un avocat commis d'office lui a même été refusée. Malgré la stratégie adoptée par le gouvernement pour combattre et prévenir la violence domestique, la passivité du système Le bilan de l épidémie de rougeole est passé de 2 à 25 morts. Enfin, un projet de loi obligeant les parents à faire vacciner leurs enfants est actuellement à l'étude. Le ministre souhaite que la responsabilité pénale des parents soit engagée, au cas où ils contreviendraient à leurs obligations de soins. Cette politique sanitaire à l'égard des plus jeunes est appelée à se généraliser, le ministre de la santé, Florian Bodog étant favorable au lancement de campagnes de vaccination à l'encontre d'autres maladies infantiles. En 2017, le ministère de la Santé prévoyait d'ailleurs de financer, pour la première fois, l'achat de vaccins contre le pneumocoque à l'intention des enfants, afin de prévenir certains cas de pneumonie, de méningite et de septicémie. Violences domestiques : la Roumanie condamnée à Strasbourg judiciaire et le manque de sanctions contre les agresseurs, indique qu'il n'y a pas d'engagement de la part des autorités pour démarrer les actions nécessaires dans le combat de la violence domestique, précise la Cour. Cette dernière note que les statistiques officielles indiquent que ce type de violence est toléré en Roumanie et perçu comme étant "normal" par la majorité de la population et que très peu d'incidents de ce type mènent à des poursuites pénales. De plus le nombre de cas de violence domestique a augmenté dans les dernières années. 17

10 Société Société 18 ORADEA ARAD TIMISOARA SATU MARE TARGU MURES LUGOJ PITESTI CRAIOVA BRASOV SUCEAVA BACAU IASI BUCAREST VASLUI PLOIESTI BRAILA TULCEA CONSTANTA Un record approché mais jamais égalé Resté fidèle à sa ville de Timisoara, William Zombory a évolué jusqu'en 1938 au Ripensia, avant de porter durant quelques matchs le maillot de l'ilsa Timisoara, le club de l'usine de laine de la ville (Industria Lânii Societate Anonim Timisoara, soit Industrie de la Laine Société Anonyme en français). Après un arrêt de quelques années durant la Seconde Guerre mondiale, il rejoue un temps avec le Poli Timisoara, avant d'entraîner le club voisin du Vulturi Lugoj durant deux ans. Une expérience sans lendemain sur le banc, avant de se consacrer à la fonction d'arbitre pendant près d'une décennie. William Zombory est décédé en 1993, quelques jours après avoir fêté son 87e anniversaire. Aujourd'hui encore, son record de jamais cinq buts marqués tient toujours en Liga 1 roumaine. Le grand Rica Raducanu, titulaire indiscutable en sélection une décennie durant, s'en est approché avec trois buts marqués, tous sur penalty, en 1973 et 1974, sous le maillot du Rapid Bucarest. Auxquels s'ajoutent un but marqué en Coupe de l'uefa, son préféré, comme il l'avouait en 2015 au journal Gazeta Sporturilor: "En 1976, avec le Sportul. On avait battu l'olympiakos 3-0 à l'aller et on jouait à domicile. On a eu un penalty à la 30e minute. Personne ne voulait y aller, si bien qu'angelo Niculescu m'a envoyé le tirer! En Divizia A je ne stressais pas, mais là, il y avait une qualification en jeu. Heureusement, j'ai marqué". Sports Cinq buts. Cinq petits buts qui sont un record depuis 80 ans. Bien des décennies avant le Paraguayen José luis Chilavert et le Brésilien Rogério Ceni, le football connaissait déjà un gardien buteur. Avec cinq buts marqués durant sa carrière dans les années 30, William Zombory est, aujourd'hui encore, le gardien ayant marqué le plus de buts en Divizia A, la première division roumaine devenue Liga I voila quelques années. Si son record tient toujours, le joueur n'est pas réduit à cette performance. Car au-delà des chiffres, William Zombory, ce sont de folles histoires, ces anecdotes d'un football révolu. Ses incroyables aventures, ainsi que celles de son alter-ego Andrei Sepci, racontent à leur manière l'histoire de la Roumanie de l'époque, des rivalités opposant la province à la capitale et, surtout, le ressentiment de la Hongrie après la première guerre mondiale. Une véritable saga racontée avec saveur par Pierre-Julien Pera sur son site footballski. Le 11 janvier 1906, c'est sous le nom de Vilmos Zombori que naît notre homme à Temesvar (ancien nom de Timisoara), dans une région appartenant encore à l'empire d'autriche-hongrie. Il faudra attendre 1920 et le retour de la région au sein de la Grande Roumanie pour que Vilmos Zombori ne devienne William Zombory. Le jeune Austro-hongrois n'attend néanmoins pas le Traité de Trianon pour prendre sa première licence et rejoindre le Temesvari Kinizsi SE. Nous sommes en 1919 et, à 13 ans, le jeune Vilmos fait ses premières armes dans le meilleur club de la région. Un club qui devient un an plus tard le Chinezul Timisoara, légendaire vainqueur de six championnats de Roumanie consécutifs dans les années 20. Tout comme son coéquipier Rudolf Bürger, Zombory ne participe qu'à la conquête du dernier de ces six titres. Sept ans à peine après ses débuts, le jeune gardien de but profite des premiers départs de titulaire du Chinezul pour trouver sa place dans l'effectif et faire ses premières apparitions en première division. Rapidement couronnées par un titre de champion national, mais également par une première sélection avant même son vingtième anniversaire. Les premiers pas entravés du professionnalisme Quand la passion du football Les folles aventures de William William Zombory, un destin extraordinaire Lorsque le Chinezul perd peu à peu ses meilleurs joueurs et rentre plus ou moins dans le rang (3e en 1929, 2e en 1930), Zombory est devenu un maillon essentiel de son équipe. Avant d'imiter une fois encore son coéquipier Bürger en rejoignant à l'été 1930 la nouvelle force du football roumain, le Ripensia Timisoara. Ce club est alors le seul du pays à avoir passé le pas du professionnalisme, une notion qui créé de vifs débats dans le pays. La fédération met des mois à légiférer sur cette question, en donnant son feu vert qu'au mois d'octobre Dès le mois de novembre, Zombory fait partie des tous premiers joueurs déclarés professionnels par le Ripensia. Des joueurs qui doivent néanmoins attendre deux ans avant de voir leur club autorisé à évoluer en Divizia A. Deux années de tournées et matchs internationaux, où le club est notamment brièvement entraîné à ses débuts par un certain Ferenc Plattko. Dès sa première saison, le Ripensia domine le championnat de la tête et des épaules, au nez et à la barbe des clubs en vue de la capitale que sont alors la Juventus Bucarest et surtout le Venus Bucarest, double champion de Roumanie. Vainqueur de son groupe, raconte aussi l'histoire du pays Zombory, gardien buteur du Ripensia Timisoara le Ripensia bat en finale l'universitatea Cluj (5-3 et 0-0). Battu l'année suivante par le Venus des frères Vîlcov en finale, le club du Banat conquiert un deuxième titre en 1935, à l'issue du premier championnat de Divizia A disputé sous la forme d'un unique groupe, avant de récidiver l'année suivante, en Avec ces titres, auxquels s'ajoutent deux Coupes de Roumanie, Zombory fait partie de l'âge d'or du Ripensia. Après quelques années d'absence, l'équipe nationale lui ouvre de nouveau les bras. Une sélection refusée par le roi Carol II William Zombory ne compte que huit sélections avec l'équipe nationale roumaine. Un chiffre qui s'explique par la rareté des matchs de la sélection à cette époque. La première remonte à 1926, année de son premier titre, lorsqu'il évoluait encore avec le Chinezul. La Roumanie avait alors battu la Yougoslavie 3-2 à Zagreb lors d'un match comptant pour la Coupe du Roi Alexandre Ier. Même chose en 1929, où c'est encore pour ce même trophée que Zombory participe à la nouvelle victoire 3-2 de la Roumanie, cette fois-ci sur la pelouse du Stade ONEF de Bucarest. Las, il ne dispute qu'un seul des quatre matchs de la sélection durant l'année et ne fait pas partie de la sélection, faite par le Roi Carol II en personne, pour la Coupe du Monde Après ces deux premières apparitions déjà bien espacées, il faut encore attendre quatre longues années au gardien du Ripensia Timisoara pour obtenir sa troisième cape. La faute à la forte concurrence à son poste, avec Lapuneanu, Szatmary, Pullok et autres Andrei Sepci qui se partagent le poste au fil des années. Fin 1933, c'est néanmoins Zombory qui est titularisé par le sélectionneur Costel Radulescu pour le match face à la Suisse comptant pour la qualification à la Coupe du Monde Un match difficile face à Max Abegglen et ses coéquipiers. Au Stade du Wankdorf de Berne, les Roumains tiennent tête aux Suisses et obtiennent le nul 2-2. Mais un événement inattendu survient, lorsque la FIFA donne match perdu à la Roumanie. Celle-ci considère en effet Iuliu Baratky comme non-sélectionnable, la légendaire "Merveille blonde" ayant évolué avec la Hongrie auparavant. Pour Zombory, blessé et remplacé à l'heure de jeu par Adalbert Pullok, le match laisse un goût encore plus amer. Les joueurs roumains réduits à la part congrue L'année 1934 ne démarre pas sous les meilleurs augures. Pullok est en effet titulaire lors des deux premiers matchs de la sélection nationale, notamment le 29 avril, pour le match Roumanie-Yougoslavie décisif pour la qualification à la Coupe du Monde. Dans un Stade ONEF garni de spectateurs, les Roumains, sans Zombory, l'emportent 2-1 grâce à un but de l'inévitable Stefan Dobay en fin de match. Un match où les Yougoslaves touchent les montants pas moins de huit fois! Grâce à cette victoire spectaculaire, la Roumanie, déjà présente en 1930 parmi les quatre sélections européennes envoyées en Uruguay, se qualifie pour la Coupe du Monde Avec une équipe composée en très grande majorité de joueurs d'origine hongroise ou allemande évoluant dans les grands clubs de l'époque que sont le Ripensia Timisoara ou le Crisana Oradea. La très faible minorité de joueurs d'origine roumaine en sélection fait naître bien des controverses - une campagne de "romanisation" de l'équipe est même publiquement réclamée par un écrivain - mais celles-ci ne l'empêchent en rien de briller. En Italie, la donne est ainsi quasiment la même. Et en tant que champion en titre, le Ripensia envoie une très forte colonie de joueurs. Pas moins de neuf de ses titulaires sont en effet du voyage pour le Mundiale. L'aventure est malheureusement très courte. Dans cette compétition à élimination directe, la Roumanie affronte la Tchécoslovaquie dès le premier tour. William Zombory y retrouve la place de titulaire. Grâce à un nouveau but de Dobay, les Roumains mènent 1-0 dès la dixième minute, mais finissent par s'incliner 2-1 face à des Tchécoslovaques qui iront jusqu'en finale. Pour Zombory, cette défaite signifie une nouvelle attente de plusieurs mois pour porter de nouveau le maillot de l'équipe nationale. Le grand Rica Raducanu, considéré comme le meilleur gardien roumain de tous les temps. Bucarest contre la Province Ce sont sept nouveaux moins qui s'écoulent. A l'automne 1934, la Roumanie joue un match contre la Pologne, mais sans Zombory. Ce sont en fait plusieurs joueurs de clubs de l'ouest du pays qui sont écartés. La faute à un homme: le nouveau sélectionneur Alexandru Savulescu. Un sélectionneur accusé à l'époque de préférer les joueurs de la capitale à ceux de province. Le poste de gardien en est un exemple frappant. William Zombory et Andrei Sepci (U Cluj) sont écartés de la sélection malgré leurs bonnes prestations, pour y être remplacés par Carol Burdan (Venus Bucarest) et Anghel Creteanu (Juventus Bucarest). Une décision vivement critiquée par la presse: (suite page 20) 19

11 Société Société 20 TIMISOARA ORADEA ARAD SATU MARE TARGU MURES PITESTI CRAIOVA GIURGIU BRASOV SUCEAVA BACAU IASI BUCAREST VASLUI TARGOVISTE BRAILA TULCEA CONSTANTA Les gardiens butteurs Si Zombory est un précurseur, Petre Radulescu l'a un temps légèrement devancé. Le gardien de l'unirea Tricolor - devenu le Dinamo Bucarest par la suite - est le tout premier gardien à avoir marqué par deux fois en Divizia A, grâce à deux buts marqués lors de la saison Il n'en marquera plus par la suite en championnat. Un autre portier a marqué un but lors de cette saison Il ne s'agit de personne d'autre qu'andrei Sepci, le fameux gardien de la Roumanie lors de la Coupe des Balkans 1933, qui marque l'unique but de sa carrière sous le maillot de l'u Cluj. Bien d'autres gardiens de but ont réussi à marquer un but en Divizia A. Parmi ceux encore en activité, seul Mircea Bornescu est dans la liste. En assez bonne place puisqu'il a marqué à deux reprises lors de la saison avec l'u Craiova. Mieux, l'actuel gardien de but du FC Voluntari avait auparavant marqué à onze reprises en Divizia B, toujours avec Craiova. A 36 ans, Bornescu n'a plus marqué depuis près de dix ans et ne devrait donc pas venir menacer le record de William Zombory. Un record qui tient donc bon en Roumanie, et pourrait bien être encore d'actualité dans une vingtaine d'années, un siècle après avoir été réalisé. (suite de la page 19) "Il fallait voir et revoir Sepci en ce début de saison. Il n'a encaissé que 11 buts en 11 matchs de championnat quand presque tous les autres en ont 20 à leur passif. Il n'a eu qu'une malchance : la provincialophobie du sélectionneur, et surtout le fait que ce dernier n'ait pas eu la curiosité de voir jouer beaucoup de joueurs autres que ceux du club qu'il soutient, le Venus." Mais le 30 décembre, un télégramme arrive au siège de la Fédération Roumaine de Football (FRF) : "Creteanu blessé pendant le match contre la Bulgarie. Envoyez immédiatement un gardien pour jouer contre la Yougoslavie". L'appel est désespéré. L'équipe nationale est alors en Grèce pour la Coupe des Balkans. Une compétition dont elle détient le trophée après une édition 1933 remportée haut la main. A Bucarest, la Roumanie avait, avec un Andrei Sepci imbattable, remporté ses matchs face à la Bulgarie (7-0), la Grèce (1-0) et la Yougoslavie (5-0) sans encaisser le moindre but. C'est donc en tenante du titre qu'elle est attendue à Athènes, mais tout ne se passe pas aussi bien durant ces fêtes de fin d'année. Un pilote d'avion "cul de jatte" Face à la Grèce, les Roumains ne peuvent faire mieux qu'un nul 2-2. Un résultat désastreux pour l'équipe, d'autant plus qu'elle menait 2-0 dès le quart d'heure de jeu. Titulaire dans la cage, Burdan est remplacé par Creteanu pour le deuxième match, face à la Bulgarie, joué le 30 décembre. La Roumanie mène 3-0, mais Creteanu, blessé, doit céder sa place à Burdan, qui encaisse deux nouveaux buts. Durant la retransmission radio, le commentateur Virgil Economu lui-même lance un appel désespéré aux officiels de la fédération pour qu'ils envoient Zombory, le "vétéran du Ripensia" (il a 28 ans). Sur place, Savulescu se rend compte de son erreur et ne demande non pas un mais deux gardiens pour sauver son bilan. William Zombory et Andrei Sepci sont appelés. Et avec urgence, car le trophée doit se jouer le surlendemain, 1er janvier 1935, face à la Yougoslavie. Tout se fait dans la plus grande hâte, et le plus grand désordre. La convocation officielle tombe le 30 décembre à 19h30 pour les deux hommes. Un seul arrivera à Athènes. Lorsque Zombory est informé de sa convocation, il a deux heures pour être dans le train en partance de Timisoara vers la Yougoslavie. A peine le temps de faire sa valise, et pour la FRF de régler les problèmes de visa. Le gardien n'hésite pas une seule seconde, mais deux problèmes se posent: absent des terrains depuis trois mois, il avoue à la fédération ne pas être sûr de son niveau, mais n'avoir surtout pas un sou en poche! Un représentant local de la fédération lui prête un peu d'argent, et le voilà parti pour un long trajet vers Athènes. Pour Sepci, habitant Satu-Mare, c'est bien plus compliqué. Celui-ci prend un taxi pour Cluj, où il saute dans le train pour Bucarest. De la capitale, il embarque dans un petit avion deux places (photo) piloté par un certain Gheorghe Banciulescu, aviateur héros de la Première Guerre mondiale ayant la particularité d'avoir des prothèses aux deux jambes. Oubliant le réveillon du Nouvel An, mais surtout la tempête de neige qui s'abat sur le pays, les deux hommes décollent le 31 décembre à midi. Le trajet doit se faire en plusieurs étapes, des ravitaillements étant prévus en Bulgarie puis à Salonique avant d'arriver à Athènes. Le stade rejoint en charrette Après un long trajet et une nuit du Nouvel An passée dans le train, William Zombory est sur le terrain, prêt à défendre le but roumain face aux Yougoslaves en ce 1er janvier. Un match que ces derniers remportent facilement 4-0 face à des adversaires totalement démobilisés. Et pour cause, Andrei Sepci n'est pas arrivé à Athènes. Son avion est porté disparu. Dans l'attente de nouvelles qui n'arrivent pas, les Roumains n'ont pas la tête au match. Le soir du 31 décembre, les autorités grecques annoncent à leurs homologues roumaines qu'elles n'ont aucune trace de l'avion. Ce n'est qu'au petit matin, et un nouvel appel, que les Roumains s'affolent. D'autant plus que côté bulgare, aucune information n'est donnée. En fin de journée, après le match donc, les Bulgares annoncent qu'après une escale à Burgas, allongée par les nombreuses formalités administratives à remplir, les deux hommes ont passé la nuit au sol avant de repartir au petit matin mais ont été vus volant à basse altitude le long de la côté en direction du nord! L'explication est simple: à cause d'un kérosène de mauvaise qualité lors du ravitaillement en Bulgarie, les deux hommes ont été contraints de faire demi-tour vers la Roumanie pour atterrir à Constantsa. Las, le moteur coupe en vol, obligeant le biplan Curtiss B-2 à un atterissage forcé dans champ près de Mangalia. Une fois la périlleuse manœuvre réussie, les deux miraculés ont rejoint la ville à pied et en charrette, avant de prévenir enfin la fédération. Prêt à sauter en parachute pour être au coup d'envoi Le reste est raconté par Gheorghe Banciulescu dans le journal Gazeta Sporturilor du 2 janvier : "Sepci est le véritable héros de cette Coupe des Balkans. Il s'est porté volontaire avec courage pour ce vol, malgré le froid, dans le seul but d'aider son équipe. Avant le décollage, je lui ai mis son parachute et je lui ai expliqué quand et comment sauter de l'avion en cas de danger. ( ) Nous étions à 1000 mètres d'altitude quand le moteur à commencé à 'tousser' et il a fallu effectuer des manœuvres compliquées pour trouver un terrain où se poser. D'un coup, je regarde derrière moi et je vois Sepci, parachute en main, prêt à se jeter dans le vide. J'ai réussi au dernier moment à le tirer en arrière, mais j'ai pu lire une détermination sans faille sur son visage. Cette seconde lui a sauvé la vie. Son parachute était tellement enroulé autour de lui qu'il ne se serait jamais ouvert, Sepci serait mort en heurtant le sol. ( ) Après plusieurs manœuvres atroces, nous avons réussi à atterrir à Mangalia et de là, ce courageux jeune homme, qui mérite toute reconnaissance pour son esprit de sacrifice, est rentré chez lui en train". Une histoire invraisemblable qui montre l'attachement de ces deux hommes pour leur équipe nationale. Un goal qui marque plus de penaltys qu'il n'en encaisse Quelques jours avant son 29e anniversaire, William Zombory fête ainsi d'étrange manière sa huitième et dernière cape avec l'équipe nationale. Il n'en est néanmoins pas à son dernier coup d'éclat. Car le gardien de niveau international se double d'un excellent tireur de penalty. Lui-même déclare qu'il a marqué plus de buts qu'il n'en a encaissés dans cet exercice. Sur le tard, Andrei Speci entraînait encore les gamins de son village. Une affirmation impossible à démontrer, mais qu'il commente: "Je n'épargnais personne. J'avais deux atouts : je connaissais mieux que les joueurs de champ les qualités et défauts des gardiens adverses, et je conservais très bien mon calme et ma lucidité quand je frappais". A côté des cinq buts marqués en Divizia A, deux matchs, disputés hors-championnat, en sont la preuve. Le premier est la finale de Coupe de Roumanie, disputée le 6 juin Le Ripensia fait le voyage jusqu'au Stade ONEF de Bucarest pour y affronter le Rapid Bucarest, qui s'appelle alors encore le CFR Bucarest (pour Casa Feroviarului Rapid Bucarest). Un match au déroulement aussi fou qu'imprévisible. Contre toute attente, le CFR mène 2-0, se fait remonter, puis reprend deux buts d'avance, menant 4-2 à l'heure de jeu puis 5-3 à la 70e minute! Le Ripensia revient néanmoins au score en fin de match grâce à Stefan Dobay, encore et toujours, puis à Zombory, qui ne craque pas sous la pression et transforme un penalty à la 88e minute. Le CFR s'impose finalement 6-5 en prolongations. Une défaite que le Dr Cornel Lazar, créateur et entraîneur du Ripensia, explique par la petite forme d'une partie de ses joueurs après une récente série de blessures. "J'ai prié pour qu'on ait un nouveau penalty, en vain," lui a avoué le gardien buteur Quelques semaines plus tard, Zombory récidive, dans des circonstances plutôt inédites. Le 19 août, le Ripensia termine une série de matchs de gala face à l'austria de Vienne. Le grand Austria, mené par Matthias Sindelar, le "Mozart du football" sur le terrain, et le visionnaire Hugo Meisl sur le banc. Les deux hommes qui ont notamment mené la Wunderteam autrichienne en demi-finale de la Coupe du Monde italienne un an plus tôt. Deux équipes défendues par le gardien de but Rudi Hiden. Ces vedettes de l'époque, Zombory va s'en jouer durant ce match joué dans le Stade Venus de Bucarest. Non pas une, mais deux fois. Ni vu, ni connu Les faits ont été relatés par Coloman Bogdan, attaquant de la Juventus Bucarest venu voir le champion national en découdre avec quelques-uns des meilleurs joueurs du monde. Des joueurs auxquels le Ripensia rend la vie dure. (suite p.22) 21

12 Société Société 22 (suite de la page 21) Jusqu'à un penalty accordé par l'arbitre. Zombory s'avance pour le tirer. Il n'est pourtant que remplaçant! Dumitru Pavlovici est titulaire dans la cage du Ripensia, mais lorsque l'arbitre siffle la faute, Zombory, placé derrière le but, échange sa place avec son coéquipier, traverse le terrain, tire le penalty, bat Hiden, puis retourne calmement vers le but, où il croise de nouveau Pavlovici, avant de retourner s'asseoir sur le banc. Un manège qui n'était pas prémédité, comme il l'affirme par la suite: "J'étais remplaçant de Pavlovici, mais ça ne s'est pas bousculé pour le tirer, alors je me suis faufilé et j'ai marqué". Le tout sans que personne ne bouge. L'arbitre Denis Xifando, pourtant le meilleur arbitre roumain du moment, qui a officié sur plusieurs matchs internationaux, n'a rien vu. "Sindelar était formidable, un maestro inégalable du ballon rond, un fin stratège, aux feintes parfaites, mais vous croyez que l'on peut maîtriser ses nerfs aussi facilement?" commenta Coloman Braun-Bogdan. Quelques minutes plus tard, M. Xifando siffle un nouveau penalty en faveur du Ripensia. "La scène se répète, raconte Cibi Braun, mais cette foisci, Sindelar court vers l'arbitre en criant 'Ils sont douze sur le terrain!' Je ne sais pas ce que Denis Xifando lui a répondu, mais Sindelar a répliqué avec son célèbre coup de pied, directement appliqué avec précision et maestria sur le fondement de l'arbitre". Coup de pied au c à l'arbitre Suite à ce geste d'humeur, Sindelar est exclu du match, et sera réprimandé par la fédération autrichienne. Face au ballon, Zombory ne perd pas son sang froid et bat une seconde fois Hiden. Au terme de ce match au déroulement incongru, les deux équipes font match nul 3-3. Après cet étonnant coup d'éclat, Zombory poursuivra sa carrière avec brio durant quelques années. Il ajoutera deux titres nationaux à son palmarès, pour au final porter leur nombre à cinq, et marquera encore par deux fois durant la saison Pierre-Julien Pera (footballski) Sports "Il ne faut pas confondre le business avec les droits de l'homme et le tennis, c'est du business", affirme l'ancien joueur roumain, figure de Roland-Garros. A 78 ans, il est probablement l'un de ceux à avoir vu le plus de matchs sur le Central parisien, depuis sa loge située au premier rang, juste au-dessus de l'entrée des joueurs. Ion Tiriac, ancien 55e joueur mondial, vainqueur du double à Paris en 1970 avec son compatriote Ilie Nastase, est aujourd'hui l'une des plus grosses fortunes de Roumanie. Il y a fondé la première banque privée, Banca Tiriac, et possède entre autres la compagnie aérienne Tiriac Air et les assurances Allianz-Tiriac. L'homme d'affaires à la barbe fleurie, ancien coach de Vilas, Becker, Ivanisevic ou Leconte, est adepte du franc-parler, quitte à nourrir des polémiques. Elisabeth Pineau l'a interviewé pour Le Monde. -Vous êtes l'un des spectateurs les plus assidus du tournoi : cette loge au premier rang du Central, depuis quand l'occupez-vous? -Les deux loges que je possède aujourd'hui, dont celle au-dessus de l'entrée des joueurs, je les ai achetées dans les années Mais la genèse remonte à 1959, lors d'une rencontre de Coupe Davis France-Roumanie ici. Il y avait à l'époque seulement 13 loges et personne ne les achetait. Un jour, j'ai dit à Philippe Chatrier [président de la Fédération française de tennis de 1973 à 1993] qu'il ferait mieux de construire entre 500 et loges car dans un tournoi comme ça, 20 % des gens te rapportent 80 % des revenus, et 80 % des gens ne t'en rapportent que 20 %. Il m'avait pris pour un fou mais j'avais 300 % raison. Roland-Garros est une marque que l'on peut comparer à Ferrari ou Mercedes. Je ne sais pas s'il existe en France une marque plus exclusive que Roland-Garros. Or, les gens achètent toujours les choses qu'ils ne peuvent pas trouver au Ion Tiriac avec Boris Becker supermarché, exclusives et limitées. Il n'y a qu'une année où je n'ai pas payé mes loges, c'est quand je me suis disputé avec le président Chatrier à propos de leur prix, au début des années Je trouvais ça trop cher. -Justement, combien ça coûte une loge comme ça? -J'ai les moyens de me les payer, mais je ne sais même pas aujourd'hui combien ça me coûte, car ce n'est pas moi qui gère ça. Mais vous n'avez qu'à demander, c'est public [en réalité, la FFT n'a pas souhaité communiquer sur ce montant]. La plupart du temps, mes deux loges sont vides, comme ça, si quelqu'un vient au dernier moment - que ce soit un partenaire d'affaires, un collègue, un homme politique avec qui je suis ami, un de mes fils ou un copain avec qui j'ai joué - il a une place. Moi, j'occupe deux sièges car malheureusement je suis gros et, malheureusement, j'ai des jambes assez longues "J'ai pris cinq, six "bébés" et j'en ai tous fait des numéros un mondiaux" Ion Tiriac: "Je suis contre "Le tennis, -De votre siège vous devez voir des détails qui échappent à d'autres -Aujourd'hui, quand je regarde un match de tennis, les trois quarts du temps, je suis plus attentif à la technique et à la position des joueurs. Quand je discute avec mon voisin, neuf fois sur dix, si je lui dis que la balle est mauvaise, la balle est mauvaise. Avant même que le joueur frappe la balle, je sais déjà si elle va être bonne ou pas. C'est naturel, j'ai vingt-cinq ans d'expérience. l'égalité des primes hommes-femmes" c'est du business" J'ai été un bon joueur de tennis, on va dire que j'étais "pas mal ", j'ai gagné le double ici, mais comme entraîneur, je suis très arrogant. C'est probablement le seul talent que j'ai eu dans ma vie. Je ne suis pas mauvais dans le business, certes, mais j'avais le talent de miser sur les bonnes personnes et je ne me suis jamais trompé. Je ne suis pas modeste quand je dis ça et je ne veux pas non plus avoir l'air de prendre la grosse tête, parce que ce n'est pas correct, mais d'un autre côté, c'est une réalité. J'ai pris cinq, six "bébés" de 14, 15, 16 ans et j'en ai tous fait des numéros un mondiaux : Nastase, Vilas [en réalité, il n'a été que 2e même si le classement de 1977 a fait débat], Ivanisevic [2e lui aussi], Becker, Safin -Quel est votre meilleur souvenir comme spectateur ici? -J'aime quand les styles sont opposés. L'un des meilleurs matchs que j'ai vus ici c'était la demi-finale Djokovic-Federer [en 2011, remportée par le Suisse 7-6, 6-3, 3-6, 7-6]. Roland- Garros, pour moi, a une saveur particulière. Déjà, il y a cet attachement à la France. Je ne suis pas Voltaire, je ne suis pas Victor Hugo, mais j'ai appris à parler le français au bout de trois mois sans jamais l'avoir étudié à l'école. Le premier petit pied-à-terre que je me suis acheté dans ma carrière, c'était à Paris. Maintenant, j'ai un appartement que j'occupe vingt ou trente jours par an. Roland-Garros, c'est le seul tournoi où je peux me permettre de rester douze ou treize jours. Il m'arrive de faire des allers-retours dans la journée, mais je suis là quasiment toute la quinzaine. J'ai un avion qui m'attend tout le temps au Bourget et je pars et je reviens quand je veux. "Le temps effectif d'un match à Roland-Garros est de 32 %" -Vous dites que le tennis est le sport qui a le moins changé ces dernières décennies. A quoi attribuezvous cet immobilisme? -Le problème avec le tennis, c'est qu'il existe des instances dirigeantes multiples. Il y a la Fédération internationale, l'atp, la WTA, le comité des Grand Chelem autant d'entités distinctes qui rendent le moindre changement compliqué. Le tennis a très peu changé en trente ans, hormis concernant le tie-break et le hawk-eye. Mais à Roland-Garros, je trouve ça ridicule qu'ils ne l'utilisent pas. Halep [joueuse roumaine, protégée de Tiriac], en finale contre Sharapova en 2014, on lui a volé une balle dans le 3e set. Si le hawk-eye contredit la décision de l'arbitre, elle gagne Roland-Garros et cela lui aurait changé la vie. Quels autres changements préconisez-vous plus globalement? -On doit changer la taille des balles. Elles devraient être de 10 % à 15 % plus grosses pour que le jeu soit plus lent et que le talent des joueurs soit beaucoup plus mis en valeur. Il serait aussi préférable de changer le système de points, par exemple, supprimer l'avantage lors des égalités. Il faudrait aussi autoriser un seul service. Le temps effectif d'un match à Roland- Garros est de 32 %. Ça que le reste du veut dire temps, on attend Les vingt secondes pour servir ne sont jamais respectées, il faudrait peut-être mettre un chronomètre comme en basket. -Vous aviez aussi essayé de mettre en place de la terre battue bleue, en 2012, à Madrid, tournoi dont vous êtes propriétaire -Il n'y a aucun règlement qui stipule que la terre battue doit être rouge. Mais l'atp a dit non, car trois joueurs s'en sont plaints [allusion à Nadal, Djokovic et Federer]. Pourtant, 110 chaînes de télévision m'avaient répondu qu'on voyait entre 30 % et 35 % mieux la balle sur de la terre battue bleue. Jusqu'à maintenant, j'ai fait tout ce que j'ai pu pour faire changer des choses, je pense que c'est au tour de gens comme Forget [directeur de Roland-Garros] et des plus jeunes que moi de prendre le relais. J'ai beaucoup parlé au nouveau président [Bernard Giudicelli], j'espère qu'il va faire des choses et prendre le tennis européen en main car Roland-Garros appartient à la FFT. Or, la FFT est la seule en Europe à disposer d'un Grand Chelem, d'un Masters 1000 et de tournois ATP 250. J'attends aussi de M. Giudicelli qu'il aborde le sujet du prize money car il y a toujours une friction entre les instances et les joueurs qui réclament toujours plus d'argent. "Pour gagner plus, les femmes doivent rapporter plus" -A propos de dotation, vous aviez exprimé l'an dernier votre désaccord sur la parité hommes-femmes. Votre position a-t-elle évolué? -Il ne faut pas confondre le business avec les droits de l'homme. Le tennis, c'est du business. Le jour où le tennis féminin rapportera plus que le tennis masculin, alors les joueuses mériteront plus que les joueurs. Mais tant que ce n'est pas le cas, je comprends les joueurs qui disent qu'ils en ont marre de financer le tennis féminin avec l'argent du tennis masculin. Certains viennent me voir en me disant: Monsieur Tiriac, jusqu'à quand allez-vous financer les femmes avec notre argent? Très peu le disent publiquement, même si la plupart le pensent. L'égalité des primes hommes-femmes, pour moi, ce n'est pas un procédé équitable. Quand les sœurs Williams rayonnaient, du temps de la petite Belge [allusion à Justine Henin], ou de celui de Steffi Graf, c'était sensationnel, peut-être qu'à ce moment-là, elles auraient mérité de gagner plus. Sur les Grand Chelem, à la limite je peux comprendre qu'elles revendiquent la parité car ça rapporte beaucoup d'argent. (suite p.24) Avec un de ses élèves,guillermo Vilas (à droite) 23

13 Société Connaissance et découverte 24 ARAD ORADEA ORASTIE TIMISOARA BAIA MARE SIBIU CRAIOVA TARGU MURES PITESTI IASI BRASOV BOTOSANI BUZAU BUCAREST GALATI CONSTANTA TULCEA Chantage à la délocalisation Des milliers d'employés de la société Leoni à Bistrita-Nasaud, sont entrés en grève spontanée, le 10 Mai, pour protester contre des salaires qu'ils trouvaient beaucoup trop bas, et le fait qu'on ne leur avait pas versé les primes d'ancienneté ainsi que les heures supplémentaires. Les choses se seraient calmées quand la direction aurait promis aux protestataires des majorations salariales. Or, quelques jours après, plusieurs personnes ont été renvoyées ou obligées de démissionner pour les motifs selon lesquels elles avaient contacté la presse ou posté sur Facebook des photos et des vidéos des protestations. Le préfet de Bistrita est intervenu en faveur des dirigeants de la société Leoni, qui ont répliqué que si les employés sont mécontents de leurs salaires, la société opterait pour une délocalisation en Serbie ou pour embaucher des Serbes. La société Leoni, un des plus importants employeurs de la région est un groupe roumano-allemand spécialisé dans la réalisation de câblages auto pour des marques comme Mercedes ou BMW. Un boulanger roumain devenu héros Florin Morariu, un Roumain qui travaillait dans une boulangerie dans le quartier où a eu lieu l'attaque terroriste de Londres est élevé au rang de héros par les médias. En effet il a abrité 20 personnes dans la boulangerie où il travaillait pendant la durée de l'attentat et aurait même envoyé une caisse sur un des terroristes et l'aurait ainsi frappé à la tête. L'attaque de Londres a fait 7 morts et une cinquantaine de blessés. (suite de la page 23) Mais dans les tournois mixtes comme Madrid, Miami, Indian Wells, je ne suis pas d'accord. Le jour où elles rapporteront économiquement autant que les hommes, je leur donnerai même plus d'argent que les hommes pour leur "graciosité" et leur féminité. Vilas était un bosseur et Nastase un flemmard -Vous vous occupez désormais des intérêts de Lucas Pouille avec votre associé Gérard Tsobanian : qu'est-ce qui vous a décidé à accepter cette collaboration? -J'ai vu Lucas, et je pense qu'il a des possibilités énormes. Il doit progresser dans son jeu de jambes, dans la récupération entre les points, mais au niveau des frappes et techniquement, il a tout. Le jour où il arrivera à mettre bout à bout toutes ses qualités, il peut être un grand champion. Je pense qu'il peut gagner un Grand Chelem, oh oui. -En termes de personnalité, il ne ressemble absolument pas aux joueurs que vous avez pris sous votre aile -Tous les joueurs sont différents. Vilas était le meilleur joueur de tous les temps. Talent? 1 %. Travail? 199 %. Il jouait entre six et huit heures par jour et il ne se plaignait jamais. Nastase? Il s'entraînait une heure, une heure et demie maximum, il n'a jamais travaillé. Mais avec son talent, il a fait plus que tous les autres réunis. Safin? Il a gagné l'us Open à 20 ans! Henri [Leconte]? C'était un fou sympa. Mais vous savez, j'ai été un dictateur, je ne perdais pas mon temps si le joueur ne voulait pas faire ce que je voulais. "Je n'ai pas eu le courage de devenir Président de la Roumanie" -En parlant de Nastase, il a récemment soulevé l'indignation en tenant des propos racistes (à l'encontre de Serena Williams) et insultants (envers l'équipe britannique et l'arbitre) à l'occasion du match de Fed Cup entre son équipe et la Grande- Bretagne. Vous ne l'excusez tout de même pas? -Nastase, ce n'est pas un saint, O.K. Mais de là à l'accuser d'être raciste ou vulgaire Avant de juger quelqu'un, il faut attendre d'être jugé. Dans toutes les démocraties du monde, jusqu'à ce qu'un tribunal te condamne, tu es innocent. C'est la personne la plus gentille, généreuse et sociable que je connaisse. Il n'a pas deux poumons, il a deux cœurs, c'est ça Monsieur Nastase. Simona Halep, une protégée prometteuse... mais cabocharde -Nastase s'est lancé en politique. Vous-même n'y avezvous pas été tenté? -Je pense sans modestie qu'au début des années 1990 [après la chute de Ceausescu], cela aurait été assez facile pour moi d'accéder à la présidence. Mais je n'ai pas eu le courage. Je ne me sentais pas capable d'avoir le sort de 22 millions de Roumains entre mes mains. On m'a toujours proposé, jusqu'à il y a six mois encore, de prendre des responsabilités politiques, mais depuis 1990, je n'y touche pas. Et je n'ai qu'une parole. Mais vous savez, aujourd'hui, je suis très loin du tennis, ça représente moins de 5 % de ma vie, j'ai d'autres business. Je travaille vingt-six heures par jour, pas vingt-quatre. J'ai 78 ans et je n'ai pas été aussi intelligent que Nastase pour ne pas travailler après ma carrière. Les seules vacances que je prends, je vais chasser en Afrique, au pôle Nord partout dans le monde. Je chasse tout ce qui est permis: l'éléphant, en cinquante ans, j'en ai tué deux, je chasse des buffles, des lions, des ours Elisabeth Pineau (Le Monde) Cinéma LePetitJournal.com Bucarest : Es-tu content du nombre de personnes présentes pour cette 6ème édition du festival Pelicam? Benjamin Ribout: Oui, très content, ce qui marche le plus ce sont les projections pour enfants, des classes entières se déplacent, on a minimum 200 personnes dans la salle. Et puis on a nos fidèles qui sont chaque année au rendez-vous. Pour les locaux, c'est une autre histoire, en semaine ils travaillent et n'ont plus forcément le temps ou l'énergie. Nos jeunes bénévoles répondent toujours présents, pour eux, c'est une occasion unique de rencontrer des gens, des artistes du monde entier et de sociabiliser avec eux. Ils font un super boulot! -La vraie difficulté, n'est-elle pas justement de ramener les gens au cinéma quand il y en a de moins en moins en Roumanie? -Si, il y a bien un ciné dans un centre commercial mais il ne passe que de gros blockbuster, il n'y a plus de cinéma art et essais à Tulcea depuis la Révolution. Le pari est donc difficile à relever, car en plus, nous, on en rajoute une couche, et on débarque avec des documentaires sur l'environnement. "A Tulcea, on est au confluent de la civilisation et de la nature sauvage" -Les messages véhiculés par ces films trouvent-ils un écho auprès de la presse locale? -Et bien, par exemple, l'autre jour, pour notre thématique sur l'économie sociale et solidaire, on passait trois films et un journaliste de Tulcea vient me dire qu'il n'y croit pas du tout. Bref, qu on est bien parti pour se planter. Je ne vais pas te mentir, on arrive à sensibiliser les gens mais cela demande du temps, cela ne se fera pas en un jour. Loin de tout, ici, autour du Delta du Danube, les gens n'ont pas toujours la même ouverture que les gens qui voyagent beaucoup même si on a eu de belles surprises. Pour les gamins, on est très content car ils viennent nous voir après les projections pour nous dire qu'ils ont adoré, qu'ils ont appris des choses. C'est une belle victoire pour tous ceux qui se mobilisent ici pendant le festival. Benjamin Ribout était à l'œuvre pour la sixième année consécutive Pelicam: un festival franco-roumain au cœur du Delta La 6ème édition du Pelicam International Film Festival se déroulait du 6 au 11 juin au bord du Danube, à Tulcea. Des films du monde entier y étaient projetés dans des salles ou en plein air avec des concerts, des débats, des ateliers découvertes pour les enfants, des soirées barbecue et dance floor jusqu'à n'en plus finir. Le gagnant fut le film "Zona Franca", du réalisateur Georgi Lazarevski, photographe d'origine yougoslave. Le film explore le quotidien difficile des habitants de la Patagonie chilienne. Retour sur un festival engagé pour la protection de l'environnement avec son organisateur, Benjamin Ribout (photo ci-dessous). -Comment fais-tu pour faire venir tous ces réalisateurs des quatre coins du monde? -Et bien, il y a de l'argent privé, de l'argent publique, on a des aides de la mairie, de la préfecture, du centre national de la cinématographie. Les instituts culturels roumains aussi et pas mal de centres culturels étrangers, les ambassades surtout, pour faire venir les gens en fonction de leurs nationalités. On prépare ce festival depuis un an, on regarde des films tous les jours depuis octobre et on cherches des financements. -Tes invités découvrent souvent la Roumanie pour la première fois, quels sont les retours que tu as pu avoir? -Les gens sont surpris. L'autre jour, les membres du jury sont allés faire une balade en barque sur le Delta du Danube, c'est un lieu exotique qui fait bien évidement écho aux sujets du festival, la faune et la flore ici sont riches. Ils en ont pris plein la vue comme tu peux l'imaginer. -C'est pour cette raison que tu as choisi Tulcea? Oui, mais on ne voulait pas non plus se perdre dans le Delta, ici à Tulcea, on est à un endroit plutôt stratégique, au confluent de la civilisation et de la nature sauvage. On peut s'embarquer pour l'aventure mais ça reste une ville accessible pour ceux qui veulent nous rejoindre d'un peu partout. On a nos fidèles qui viennent de Bucarest. On peut loger les gens facilement et ensuite leur laisser découvrir les richesses cachées du Danube s'ils le désirent, en revenant à l'heure pour les séances. A Tulcea, il y a aussi des infrastructures pour projeter les films dans de bonnes conditions et de bons endroits pour faire la fête, ce qui est loin d'être négligeable. -Tu parlais des fidèles, quels sont leurs profils? -Des journalistes, des activistes, des étudiants, des cinéphiles, des curieux ou des fêtards. Il y a aussi des amoureux des terrasses, certains ne décollent plus de leurs chaises, et oublient un peu de se rendre dans les salles. Depuis 6 ans la réputation du festival grandit petit à petit et les gens ont envie de voir ce qui se fait dans d'autres pays et de pouvoir échanger avec nos invités car ils restent vraiment pendant la durée du festival et sont très accessibles. Propos recueillis par Grégory Rateau ( 25

14 Connaissance et découverte Connaissance et découverte 26 Cinéma Medeea Marinescu : D'abord, je vous dirai qu'avant "Je vous trouve très beau" je ne parlais pas du tout français. C'est d'ailleurs une des raisons pour lesquelles j'avais refusé de participer au casting organisé en Roumanie pour le film qui s'appelait à cette époque "La fille de l'est". Je me trouvais aux États-Unis et je me suis dit que cela n'avait aucun sens de me présenter au casting juste parce que la réalisatrice avait vu une photo de moi et avait demandé à me rencontrer. Comme elle avait laissé un numéro de téléphone, lorsque je suis allée en vacances à Paris, je l'ai appelée, en lui parlant en anglais. C'est ainsi que mon aventure dans le cinéma français a débuté. Isabelle, je l'ai aimée dès le début. J'aime les gens qui ont le sens de l'humour, qui savent ne pas se prendre trop au sérieux et qui cachent sous l'apparence de la nonchalance une grande sensibilité. Isabelle est une personne sentimentale, intelligente, fragile et en même temps forte, tumultueuse et courageuse, pleine de vie et capable de mesurer sa complexité. Par la suite, elle m'a témoigné à de nombreuses reprises son amitié. Dans un monde qui court sans répit après la gloire, après l'argent, après des reconnaissances de plus en plus notables, l'amitié me semble une chose extrêmement précieuse. "Michel Blanc n'est pas un bavard" Celui qui a compris et qui a misé sur le scénario d'isabelle Mergault a été Jean Louis Livi. C'était au début de la carrière de réalisatrice d'isabelle. Et je crois que l'expérience de producteur de Jean Louis Livi a été très bénéfique pour elle. Michel Blanc a été l'un des acteurs les plus spéciaux que j'ai eu l'occasion de rencontrer dans ma carrière. J'ai peu discuté avec lui. J'avais commencé à "bredouiller" quelques mots en français, surtout pour faire face au tournage, tout en gardant une timidité de débutante, craignant les fautes de grammaire. De toute façon, Michel n'est pas un bavard. Il est plutôt introverti, d'une immense délicatesse, un des observateurs les plus subtils que j'ai eu la chance de rencontrer. Il était extrêmement juste et correct sur le plateau de tournage. Michel observait L'héroïne de "Je vous trouve très beau" raconte Medeea Marinescu : mes premiers pas dans le cinéma français Au moment où, en 2005, elle fait son apparition dans le film d'isabelle Mergault "Je vous trouve très beau" (César du meilleur premier film) donnant la réplique à Michel Blanc, Medeea Marinescu ne pense pas qu'elle va impressionner autant les spectateurs français dont beaucoup gardent encore en mémoire le charme inoubliable de la grande actrice Elvira Popesco. Sociétaire à son tour du Théâtre national de Bucarest, Medeea Marinescu a conquis le public français et international par son charme spontané et par la parfaite maîtrise de son art, deux qualités essentielles qu'elle possède avec un naturel surprenant. "Donnant-donnant", toujours sous la direction d'isabelle Mergault, a permis de faire plus ample connaissance avec l'actrice, cette fois-ci aux côtés de Daniel Auteuil et de Sabine Azéma. Mais cette fois-ci, le succès n'était pas au rendez-vous. Rencontre avec l'actrice. avec délicatesse tout ce qui se passait pendant le tournage. L'influence de ses très fines observations se retrouvait dans les scènes que nous étions en train de jouer. Il manifestait une exigence particulière pour les détails, attitude que j'avais ressentie et qu'il me transmettrait, moi, la petite fille de l'est. Donnant-donnant: "J'était enceinte et Daniel Auteuil aussi!" Au moment de "Donnant-Donnant", j'étais enceinte de mon premier fils Luca Ioan. J'étais en train de regarder un film, "The lost son". L'acteur que j'avais déjà vu dans "Jean de Florette" ou "La Reine Margot" attirait mon attention. Je l'admirais et je me disais "ce serait merveilleux si je le rencontrais un jour" et, comme il n'arrive que dans les films, une semaine plus tard, je reçois un coup de fil de mon amie Isabelle. "Medeea, me dit-elle, nous avons le projet d'un nouveau film. Sais-tu qui sera ton nouveau partenaire cette fois? Daniel Auteuil". Incroyable Je suis restée interdite. J'ai bredouillé quelque chose du style "super! mais, tu sais, j'ai un problème en ce moment " et la réponse d'isabelle ne s'est pas faite attendre. "Quoi, tu es enceinte?", suivie d'un éclat de rire. Fantastique, continua-t-elle mes deux acteurs principaux attendent chacun un enfant, tu sais, Daniel aussi sera père". Ce qui fait que, lorsque nous avons commencé le tournage de "Donnant-donnant", moi j'étais la maman de Luca, et Daniel, le papa de Zack. Daniel est un acteur extroverti, jovial, plein d'humour, une vedette complètement décontractée pour qui la célébrité est accessoire, chose à laquelle il semble ne pas accorder grande importance. Charmant lors des tournages, spontané, ludique, y compris dans sa manière de jouer son rôle. Par la même occasion, j'ai rencontré Sabine Azéma, une actrice de talent, notamment dans ses rôles comiques, une personne adorable, d'une grande féminité. Propos recueillis et traduction Dan Burcea (lepetitjournal.com/bucarest) Je vous trouve très beau avec Michel Blanc Littérature Lepetitjournal a demandé à l'intéressée ce que cette belle aventure littéraire lui inspire et surtout que signifie pour elle être écrivain roumain de langue française aujourd'hui : "J'ai débuté l'écriture il y a une dizaine d'années sans savoir où cela pouvait me mener. A l'époque, je ne m'imaginais pas à quel point le choix du français comme langue d'écriture allait interpeller. Depuis la sortie de mon premier roman on me classe tantôt dans la catégorie des écrivains roumains, tantôt dans celle des écrivains français. C'est peut-être pour cela que le débat sur l'identité qui n'arrête pas de secouer la société française ne m'a jamais laissée indifférente. De culture roumaine et de langue française, mon identité d'écrivaine est le mélange des deux. Et c'est bien ce paradoxe qui intrigue. Si j'écris en français, mon imaginaire, lui, est roumain. Aurais-je écrit si je vivais encore en Roumanie? Je ne le sais pas. Que représente la nationalité quand on devient écrivain? Je me suis toujours méfiée des écrivains "nationaux". Je reste persuadée qu'il y a un risque à s'enfermer dans une identité nationale qui finit par tuer toute créativité. Si appartenance il y a, c'est celle à une culture, elle-même sans cesse remodelée, renouvelée, transfigurée. "Traîtres à leur patrie parce qu'ils n'écrivent pas en roumain" Le statut d'un écrivain n'est pas le même d'un pays à un Partagée entre sa Roumanie natale et la France où elle vit Liliana Lazar : "Je suis une écrivaine tout simplement" Reconnue par la critique et par ses pairs illustres comme J.M.G. Le Clézio, récompensée par de nombreux prix, Liliana Lazar s'est installée durablement dans le paysage littéraire français. "Terre des affranchis" (Gaïa, 2009, Lauréate 2010 du Prix des cinq continents de la francophonie, Prix Première 2010 des auditeurs de la RTBF, Prix Littéraire Québec-France Marie-Claire-Blais 2011, etc.) et "Enfants du diable" (Seuil, 2016) sont désormais des succès de librairie. autre. En France, si vous êtes écrivain, les gens font attention à ce que vous dites, toute déclaration acquiert une forme d'autorité. A l'inverse, en Roumanie on se méfie des écrivains surtout quand ils choisissent une autre langue pour s'exprimer, ce qui fait d'eux des traîtres à leur patrie. Mais combien savent ce que ce choix coûte à ceux qui vivent dans l'exil? En m'éloignant de mon pays je n'ai pas oublié ma langue maternelle. Mettre de la distance avec ce qu'on a perdu n'est pas une lâcheté, c'est un combat permanent pour une certaine forme de survie, d'adaptation. Dans ce combat je me suis servie du français comme d'un bouclier. Cette langue française, patiemment apprivoisée durant tant d'années, a fini par m'adopter. Elle m'a autorisée à raconter le pays qui m'a vue naître et grandir, en me prêtant ses mots qui arrondissent les angles, apportent des nuances, permettent à l'indicible de prendre forme. Ma préoccupation première reste cela, raconter, en puisant mon inspiration dans la Roumanie de mon enfance. Je suis une déracinée qui vit dans la nostalgie de son terreau premier. Qui retourne le humer, année après année, le retrouvant chaque fois enrichi par la décomposition d'une nouvelle couche de feuilles mortes. Saisie par l'angoisse du temps qui passe, j'ouvre mon imaginaire aux autres pour témoigner d'un monde que j'ai connu. Suis-je une écrivaine roumaine, de langue française? Pour mes lecteurs je suis une écrivaine, tout simplement. Le reste n'est qu'itinéraire". Dan Burcea Louis Vuitton : des chaussures "Made in Italy" fabriquées en Roumanie Une grande partie de la fabrication des chaussures "made in Italy" de la marque de luxe Louis Vuitton, se produit dans la ville de Cisnadie (Transylvanie), sur le site de Somarest, la filiale roumaine de Louis Vuitton, selon un reportage publié par le quotidien britannique The Guardian. D'après son enquête, la majorité des composants pour ses chaussures, vendues entre 500 et 2000 euros, sont fabriquées en Roumanie, alors que l'assemblage final, qui serait en fait la pose des semel- les, a lieu en France ou en Italie, justifiant ainsi le label "made in France" ou "made in Italy". En effet, d'après la législation européenne, si un produit a été fabriqué dans plusieurs pays, il sera originaire du pays "où a eu lieu la dernière transformation ou ouvraison substantielle, économiquement justifiée". Les 743 personnes employées dans ces usines sont payées le "salaire moyen d'un travailleur roumain dans l'industrie du textile", à savoir 133 euros/mois, précise l'article, qui a basé ce chiffre sur les rapports de l'ong, Clean Clothes Campaign. 27

15 28 Livres Le Livre des Records en parle: le colosse qui abrite de nos jours le Parlement roumain est le deuxième bâtiment administratif au monde, en termes de superficie, après le Pentagone, et le troisième en termes de volume, après la pyramide Quetzalcóatl au Mexique. D'autres frissons, de sarcasme mélangé à la tendresse, de stupeur pigmentée de révolte, attendent le lecteur d'un tout autre livre qui s'attarde sur la Maison du peuple, non pas en tant que Temple d'une idéologie mais en tant que Tombeau de ses esclaves. Le roman Esclaves sur Uranus de Ioan Popa, traduit du roumain par Florica Ciodaru-Courriol et publié chez Non Lieu, rafraîchit d'une manière saisissante la mémoire de n'importe quel touriste désinvolte (qui ne l'est pas?) sur les sites des anciennes dictatures de l'europe de l'est: dans les années 1980, pas moins de militaires -officiers et hommes de troupe - ont été contraints de travailler tels des "esclaves modernes " sur le chantier de la gigantesque Maison du peuple de Bucarest. La descente aux enfers du lieutenant Popa Connaissance et découverte Le jugement dernier des Esclaves sur Uranus L'été, Bucarest est une fournaise. Le bon plan : s'il se réfugie sous les voûtes gigantesques de la Maison du Peuple, le touriste rincé reçoit, en bonus, de délicieux frissons propres au délire mégalomane. Afin de construire la Maison du Peuple - l'incarnation sur terre de la grandeur du communisme et aujourd'hui le monument le plus visité à Bucarest -, Ceausescu a fait raser tout un quartier (Uranus), un monastère, un hôpital, les Archives nationales et un stade. Diplômé de l'ecole militaire d'officiers de Pitesti, poète et auteur de six livres à ce jour, Ioan Popa livre un tableau sans condescendance de l'enfer des camps de travail dans la Roumanie communiste. Cette descente aux enfers, le lieutenant Popa l'a vécue dans sa chair comme dans son âme en tant que comandant de peloton dans un camp militaire de travail de la plateforme Uranus, de 1985 jusqu'à la chute du régime communiste. Le roman Esclaves sur Uranus est une sorte de journal de campagne qui décrit la promiscuité de chantier, de dortoirs et de réfectoires, peuplés par des soldats avilis par 18 heures de travail quotidien et par les ordres débiles des politrucs. Certes, Ioan Popa est un graphiste appliqué, minutieux, capable de détails d'une tendresse atroce : "Arrivés sur Uranus, nous descendons et nous dirigeons vers les réfectoires de l'ancien stade. Des queues immenses se forment rapidement. Les files de soldats qui attendent pour manger paraissent grises dans la lumière trouble du matin. Seuls brillent les ovales métalliques des cuillères, dépassant des poches de leurs poitrines, telles d'étranges médailles". Pourtant sa plume lyrique s'ébroue et son calme descriptif se fait amère, son humour corrosif: "Lorsque l'inspection monte sur le chantier, je fais mon rapport, lorsque les généraux arrivent je fais mon rapport, lorsque viennent les ingénieurs et les architectes, je fais mon rapport. Un jour, un chien est monté par les escaliers jusqu'à nous et nous a regardés attentivement d'un œil critique, alors j'ai ordonné à mes hommes: "Garde à vous!", puis je me suis retourné vers le chien et j'ai crié tout en le saluant, la main sur le casque: "Camarade chien, le peloton n 3, compagnie 2, à vos ordres!". On repère vite "les mouchards" et "les provocateurs avec épaulettes" Sur le chantier pharaonique de la Maison du peuple on s'épuise docilement à achever le plan de travail, on assiste aux inéluctables réunions du Parti, on reçoit des punitions, on repère vite "les mouchards" et "les provocateurs avec épaulettes", on chuchote que le couple Ceausescu parle avec les généraux "comme s'il parlait à des domestiques". Et on meurt. Des soldats et des officiers tombent des échafaudages et des cadres militaires sont envoyés devant les Tribunaux Militaires : "Nous mourons dans une guerre contre personne, déraisonnable, sur un front où l'on nous a envoyé sans armes". On n'est pas au temps "de Ramsès et de Séthi", ni "à l'époque de Hammourabi et de Timur", ni de "l'esclavage à Athènes et à Rome"; on est bel et bien à la fin du XX ème siècle, dans un pays de l'est où la mascarade idéologique totalitaire de la "construction du socialisme" veut légitimer le travail forcé et le faire passer pour "la passion libératrice" des peuples en guerre contre "les dangers du capitalisme". Quand dégrossir des poutres, couler du ciment, crépir des murs est non seulement le quotidien mais également le "rêve" suprême des militaires, comme la propagande des politrucs le martèle du matin au soir, qui saurait se révolter un jour? Publié dans une version censurée Publié dans une version "censurée" trois ans après la chute de Ceausescu et dans son intégralité en 2012, le roman Esclaves sur Uranus a causé des ennuis à son auteur, qui a été exclu de l'armée. Preuve que l'essayiste Horia-Roman Patapievici, l'un des plus grands penseurs roumains contemporains, a vu juste: si l'humanité s'est évertuée à procéder à une nécessaire clarification morale au sujet des atrocités du nazisme, pour ce qui est du communisme totalitaire, cette prise de conscience reste à venir. Une sorte de résurrection ou un jugement dernier auquel fait référence la toute dernière phrase des Esclaves sur Uranus. Cristina Hermeziu Esclaves sur Uranus, de Ioan Popa, traduit du roumain par Florica Ciodaru-Courriol (Editions Non Lieu, 2014), 340 pages, 18 euros. Livres Tobie tombe amoureux. Sara est d'une beauté frémissante. Autour d'elle la lumière se met à vibrer finement et l'existence entière miroite, hallucinée. C'est dire si son père, le Dr Israël Hübner, est un alchimiste et si Stefan Agopian, l'auteur, est un fakir. Les personnages prennent vie au point d'intersection de l'ombre et de la lumière, là où "beaucoup de choses se dérobent encore à la parole". Justement, sur la page, quand la lumière "s'égoutte" et que l'on perçoit "l'ondoiement inquiétant de la nuit", les mots se font phosphorescents. Avec Stefan Agopian on vit dans des tableaux de Brueghel l'ancien : le geste du quotidien est précis et la pensée translucide. On boit de la bière dans des chopes à couvercle et à blason, on met goulûment les doigts dans un confiturier, on détourne sans état d'âme des lettres, on tisse des intrigues politiques. Une Transylvanie harcelée par une compétition religieuse On ne fait jamais l'amour. Cependant l'air est langoureux, les souffles exhalent une sensualité étouffante. C'est l'effet des demi-mots envoûtants, des deux points suspendus, qui butent contre le vide prometteur. C'est surtout l'effet des bruissements que l'ombre et la lumière naissent en se frottant sans cesse. "Une chose agréable et encore étrangère à son imagination semblait lui rôder autour, un désir sans mots, une petite commotion qui troublait l'équilibre du corps frêle entre émotions et pensées vagues". Lorsque les corps des personnages s'effleurent, l'air est galvanisé par une constellation invisible d'étincelles de désir. Il y a quelque chose de profondément onirique dans ce monde qui pourtant vit et fait palpiter toutes ses veinules, comme remplies d'un fluide encore plus vital que le sang. Quel est ce flot invisible qui anime des êtres concrets et mystérieux, des personnages historiques ou inventés de toutes pièces? Intolérants envers les Roumains majoritaires, des Hongrois, des Sicules et des Saxons se dominent et se jalousent dans une Transylvanie harcelée par une compétition religieuse dans laquelle l'empereur Léopold 1er prend en cachette la partie des catholiques. Stefan Agopian sait très bien ce qui coule dans les veines de ce petit monde contrasté: c'est le Temps. L'écrivain a beau couper son flot en Son écriture Connaissance et découverte Avec son personnage Sara, on vit dans des tableaux de Brueghel Stefan Agopian, le fakir qui rend les mots phosphorescents 1703, quelque part, en Transylvanie. Des ombres moites et douillettes capitonnent sensuellement les bâtisses. Comme la lueur du chandelier à trois bougies ne rend pas les contours nets, lorsque les corps s'effleurent, on palpe directement l'âme. atemporelle regorge du débit impétueux de ce Temps superbement indifférent envers l'histoire, qui rebat les cartes à volonté au point de créer l'illusion de circularité. Tous les événements, tout ce qui arrive aux gens, dans une époque quelconque de l'histoire, ce n'est que le palpitant orgasmique du Temps en tant que fluide vital de ce monde. Autant les personnages savent ce qui va leur arriver, autant l'auteur fait semblant de n'être sûr de rien. Il y a une dimension ludique et frivole qui sape constamment cette fascinante quiétude qui plane même sur les faits les plus violents: "Dans un battement serein, la nuit se posa sur sa maison, les petits éclairs que déchiraient son corps, nos événements, tout ce qui nous a tourmentés et nous tourmentera encore à l'avenir, les innombrables pages du présent livre, rien de tout cela ne semblait mouvoir dans un sens ou dans un autre la lourde machine de l'obscurité limpide qui nous entoure". Stefan Agopian pourrait dire, en épicurien distrait: croyez-moi sur parole parce que je doute moimême que je sois capable de savoir quoi que ce soit. Et si Dostoievski avait vu juste? L'excellente traductrice Laure Hinckel nous guide de temps en temps à travers la pénombre séduisante et troublante de l'écriture elliptique de Stefan Agopian: ses notes inspirées traversent pertinemment les bas de page, comme des chandelles qui illuminent un instant les visages trop discrets des convives d'un banquet. Cette anecdote incroyable, on l'apprend dans la "Préface" que Laure Hinckel signe également: écrit au temps de la dictature communiste. Trop subversif, parce que le fruit d'une liberté de création troublante, le manuscrit de Sara a déstabilisé à l'époque son censeur. Au bout de deux ans de discussions et d'hésitations, le censeur admet l'impossible: "Mon devoir de marxiste est de l'interdire, mais mon cœur d'esthète veut le voir paraître ". Paru en Roumanie en 1987, Sara est le premier titre traduit en français parmi les 8 romans si singuliers que Stefan Agopian a écrits à ce jour. Et si Dostoievski avait vu juste? La beauté (des mots) pourrait sauver le monde. Cristina Hermeziu Sara, de Stefan Agopian, Laure Hinckel (Traduction), éditions Acte Sud, 2015, 22,80 euros 29

16 Connaissance et découverte Connaissance et découverte Mémoire Lucien Leconte et Fernand Prével reconnus "Justes parmi les nations" En Normandie, deux prêtres avaient sauvé cinq juifs roumains Dans l'orne, deux prêtres normands, Lucien Leconte et Fernand Prével, ont évité à cinq juifs roumains d'être déportés, et viennent pour cela d'être reconnus Justes parmi les nations par le mémorial israélien de Yad Vashem. Mémoire Contre dollars, Ana Cumpanas avait dénoncé John Dillinger La "femme en rouge" était originaire du Banat Ana Cumpanas, alias Ana Serge, plus connue sous le nom de fut l'une des plus (tristement) célèbres Roumaines du siècle dernier. Elle doit sa notoriété à la fréquentation de John Dillinger, célèbre gangster et braqueur de banques aux Etats- Unis, et pour avoir été mêlée à l'une des plus grandes affaires de l'amérique du grand banditisme. Sa vie a inspiré de nombreux romans et productions cinématographiques. 30 L'histoire du sauvetage de son grand-père par deux prêtres, dans les tréfonds de l'orne, en pleine bataille de Normandie en juin 1944, Haïm Brézis l'avait entendue de ses oreilles d'enfant. Il gardait le souvenir de cet homme ensoutané qui ne manquait pas, lors de ses passages à Paris, de venir partager le repas de Solomon, à qui le liait désormais une solide amitié. Ce qu'il ignorait, c'est que ce grand-père rescapé avait déposé en 1958, au mémorial de Yad Vashem, un récit racontant comment deux prêtres lui avaient sauvé la vie, à lui et à ses deux beaux-frères. "À l'époque, le titre de Juste n'existait pas", raconte le professeur Haïm Brézis. En 2015, Yad Vashem contacte donc celui qui est devenu un mathématicien de renommée internationale, membre de plusieurs académies dans le monde, pour lui annoncer que les trois pages de témoignage de son grand-père ont été retrouvées dans les archives. Le 5 septembre 2016, l'institut commémoratif des martyrs et des héros, édifié sur le mont du Souvenir à Jérusalem, a décerné le titre de Justes parmi les nations aux Pères Lucien Leconte et Fernand Prével. Fils du grand rabbin de Ploiesti Réfugié avec sa famille depuis 1943 dans le village auvergnat de Riom-ès-Montagnes, Solomon Brézis, originaire de Roumanie - qu'il a quittée dans les années , est arrêté au printemps 1944 avec ses deux beaux-frères, Marcel-Moïse et Izi Blanar. Envoyés en Normandie, pour travailler au renforcement du mur de l'atlantique, ils échappent à une exécution sommaire. Le Débarquement vient d'avoir lieu, et les Allemands décident d'envoyer leurs prisonniers en Allemagne. Solomon, Marcel et Izi réussissent à fausser compagnie à leurs geôliers. Le 22 juin, au cœur du bocage ornais, ils croisent le chemin du Le Collège National des Assistants Sociaux de Roumanie a publié un rapport dans lequel 33% des enfants entre 0 et 6 ans sont en situation de privation matérielle accrue, trois fois plus élevé que la Père Lucien Leconte, responsable de l'institut de Tinchebray - un lycée de mécanique -, qui leur ouvre les portes. "Ils étaient en loques, raconte Haïm Brézis. Le Père Leconte leur a donné des vêtements de jardiniers". Solomon, fils du grand rabbin de Ploiesti, en Roumanie, est un juif religieux et pratiquant. "Le Père Leconte lui a alors trouvé une bible rédigée en hébreu. Et pendant tout le temps où les juifs ont été cachés à Tinchebray, il s'est efforcé de leur donner de la nourriture casher", poursuit Haïm, visiblement ému au souvenir de la "très grande sensibilité et délicatesse" du prêtre. Le 13 juillet, l'institut est fouillé par les Allemands persuadés que des juifs s'y cachent. Ils ne les trouveront pas, terrés dans la crypte de la chapelle. Malade, le Père Leconte part se faire opérer à Paris, où il meurt le 25 juillet. Son adjoint, le Père Fernand Prével continue à s'occuper des trois clandestins, qui quittent Tinchebray, sains et saufs, le 7 août. "Mon grand-père gardera des liens très forts avec le Père Prével jusqu'à sa mort, en 1962", poursuit Haïm, se souvenant des deux hommes qui, après avoir partagé leur repas, bénissaient chacun le Seigneur selon leur propre rituel. Une cérémonie à Tinchebray En 1949, les restes du Père Leconte, enterré à Paris, sont transférés à Tinchebray. La prière du Kaddish est récitée sur la tombe du prêtre par ceux qu'il a sauvés. Ils font aussi apposer dans la chapelle un ex-voto qui est encore visible. Les noms des Pères Leconte et Prével seront bientôt inscrits dans l'allée des Justes de Yad Vashem, avant une cérémonie qui doit avoir lieu à Tinchebray, à l'initiative de Yad Vashem-France, de l'ambassade d'israël en France et de l'association de sauvegarde de la chapelle Sainte-Marie de Tinchebray. Clémence Houdaille Un enfant sur 3 vit dans la pauvreté sévère en Roumanie moyenne des autres pays de l'ue. Leurs familles sont dans l'incapacité de couvrir les dépenses liées à au moins six éléments: le payement du loyer, d'un emprunt hypothécaire, les vacances, le chauffage, la consommation régulière de viande, la télévision, la machine à laver, le téléphone ou faire face à des dépenses imprévues. Face à ce constat alarmant, le Collège appelle l'etat à agir avec urgence contre cette situation. Ana Cumpanas naquit en 1891 à Comlosu Mare, un village du Banat. En 1909 elle épousa Michael Chiolak en 1909 et à 23 ans, ils décidèrent de partir ensemble pour l'amérique. A son arrivée, elle s'établit dans l'indiana, dans l'east Chicago. De son union avec Michael, Ana eut un fils, Steve Chiolak, né en Mais le mariage se termina par un divorce et pour gagner sa vie, Ana Cumpanas opta pour le plus vieux métier du monde. Elle se prostitua pendant quelques années jusqu'à ce qu'elle se lance dans les affaires pour devenir tenancière de bordel. Citoyenne étrangère sans valeurs morales Un premier bordel est ouvert à East Chicago, suivi d'un autre en 1923 à Gary. Elle se remaria avec un avocat roumain, Alexandru Suciu, les deux époux adoptèrent comme nom de famille celui de Sage. En 1923, Ana Sage revint pour une courte période en Roumanie. Après avoir rendu visite à sa mère dans le Banat, elle rentra aux Etats-Unis à bord du paquebot RMS Majestic. Elle se sépara de son deuxième mari et prospéra dans les affaires. En 1933, elle ouvrit un troisième "établissement" à Chicago. Mais, un an plus tard, les autorités américaines la menacèrent d'expulsion au motif qu'elle était une "citoyenne étrangère sans valeurs morales". En 1934, elle se retrouva dans l'entourage du célèbre gangster John Dillinger qui était à cette époque désigné comme l'ennemi public n 1 du pays. Cumpanas fréquentait, à ce qu'on raconte, Polly Hamilton, la petite amie de Dillinger. Une récompense substantielle avait été placée sur la tête du gangster et la Roumaine s'est soudain rendue compte qu'elle pouvait empocher une coquette somme d'argent si elle le dénonçait au FBI. En échange de sa dénonciation, elle demanda en plus un droit de résidence permanent aux Etats-Unis. Cumpanas contacta donc le FBI en juillet Elle demanda qu'on lui remette dollars en échange de la dénonciation de Dillinger et qu'on oublie ses affaires de proxénétisme. Le 22 juillet, à 20 heures 30, ainsi qu'il en était convenu avec le FBI, Ana Cumpanas alla voir un film avec John Dillinger accompagné de sa petite amie Polly Hamilton au Theater Biograph. Elle était habillée de La Roumaine n avait pas froid aux yeux. rouge, comme prévu. A la sortie de la salle, à son signal, John Dillinger tomba sous les balles des agents du FBI. Le FBI éloigna ensuite Ana Cumpanas en l'envoyant à Détroit puis en Californie. Elle ne reçut que 5000 dollars soit la moitié de la somme demandée et, malgré ses réclamations, la procédure d'expulsion qui avait commencé avant la dénonciation ne put être arrêtée et fut prononcée. Ana Cumpanas fit appel le 16 octobre Mais en janvier 1936, la cour d'appel confirma la décision et elle fut expulsée vers la Roumanie où elle rejoignit Timisoara. Célèbre en Roumanie Ana Sage n'était pas une inconnue en Roumanie et son arrivée en 1936 ne passa pas inaperçue. Un article de "Realitatea ilustrata" publié en mai de la même année, la présente ainsi: "Notre pays accueille depuis une semaine une personne hors du commun [ ]. Celle-ci surnommée "La femme en rouge" par les journaux américains n'est autre que notre compatriote Ana Cumpanasu-Sage qui, après une vie quelque peu mouvementée en Amérique, est revenue au pays. Elle a pour projet de créer une ferme à Comlosu Mare, son village natal. Rappelons qu'elle a bien connu John Dillinger surnommé "l'ennemi public n 1" aux Etats-Unis dont les "exploits" audacieux et les confrontations avec la police furent suivis passionnément par toute l'amérique. Ce dernier est mort depuis peu. En effet, Ana Sage, profitant de son amitié avec Dillinger, le dénonça à la police pour une récompense de dollars ". Enterrée au cimetière des pauvres Ana Cumpanas décéda mystérieusement le 20 avril 1947 à Timisoara. On raconte qu'elle fut retrouvée avec une longue aiguille enfoncée dans la nuque. Est-ce une vengeance des acolytes de Dillinger? Sur la porte, on trouva un billet sur lequel était écrit: "Je suis partie à la campagne". Mais Ana Cumpanas était analphabète. Ce billet suscita la suspicion et fit naître la controverse. Et bien qu'ayant été un temps la John Dillinger Roumaine la plus riche d'outre d'amérique, Ana Cumpanas fut inhumée au cimetière des pauvres de Timisoara. Yves Lelong 31

17 32 Mémoire Spécialiste des ponts et chaussées, Victor Laugier a collaboré a la réalisation de nombreux travaux publics en Roumanie, pour lesquels il a été décoré par l`état roumain et a reçu - à sa demande - la citoyenneté roumaine. Son fils, Charles Hyppolite, a suivi les cours de l`école primaire à l`institut privé Gustav Arnold et le Lycée Carol Ier de Craiova. Après son baccalauréat, il sera étudiant à la Faculté de Médecine de Bucarest, entre Médecin de campagne en Olténie Après ses études, Charles Hyppolite va travailler comme médecin dans diverses localités de l`olténie. Dix ans plus tard, il sera nommé médecin en chef du département Dolj. A Craiova il va dérouler une intense activité sanitaire. Ainsi, il fondera le Cercle Médico-Pharmaceutique, qui réunit divers médecins et pharmaciennes du département et qui communiquent, dans des réunions ou dans la revue L`Hôpital, leur observations et leurs expériences. Toujours en 1908, il fondera et dirigera à Craiova l`ecole des Agents Sanitaires. En 1913 on le retrouve comme médecin militaire pendant la campagne de l`armée Roumaine en Bulgarie. En 1916 il l'accompagnera en Transylvanie et puis, pendant sa retraite, à Iasi, il organisera le rapatriement des blessés de guerre. En février 1915, il fera partie des fondateurs à Craiova de la Société "Les Amis de la Science". Pendant une quinzaine d années, la société, présidée par Charles Laugier, va dérouler La scène, qui se passe à Trieste, est digne d'une comédie italienne. Deux Roumains ont tenté de voler un véhicule, profitant d une nuit sans lune, mais ignorant qu'il s'agissait d'une voiture banalisée de la police. Connaissance et découverte A Craiova, le médecin marseillais a bouleversé la situation sanitaire Charles Laugier, le Carol Davila de l`olténie Charles Hyppolite Laugier est né le 21 juin 1875 dans le village Cernele, département de Dolj (Craiova). Il est le fils de Victor Laugier ingénieur français originaire de Marseille, et de son épouse Blanche. Son action et son engagement rappellent ceux du Nantais Carol Davila, qui joua un rôle éminent dans la seconde moitié du XXème siècle pour moderniser la Roumanie sur le plan sanitaire. une intense activité culturelle, mais surtout une permanente éducation sanitaire. Sur tous les fronts Après la guerre, le 1er janvier 1919, le gouvernement roumain le nomme Inspecteur Général Sanitaire pour toute la région d`olténie. En cette qualité il va combattre le paludisme, le choléra, mais aussi les maladies vénériennes et la prostitution. Il crée l`hôpital de Strehaia, modernise l`hôpital des maladies contagieuses de Craiova, réorganise l`hôpital Filantropia de la ville, et érige le sanatorium antituberculeux de Leamna, de Craiova. A partir de 1922, il déroule son activité scientifique dans le cadre de l`université Libre des Amis de la Science, fondé par le savant Nicolae Iorga. La même année commence à paraître à Craiova la publication Les Archives d`olténie, qu'il dirige pendant 4 ans. Lui même y signe de nombreux articles, notamment sur des sujets de médecine et d`ethnographie. Auteur prolifique Ils avaient remarqué qu'elle était stationnée depuis plusieurs jours au même endroit, dans la rue où ils habitaient. Mais peu observateurs, ils s'étaient installés au volant, après avoir forcé discètement la serrure, et tenté de démarrer sans remarquer la présence d'un passager Charles Laugier a publié une vingtaine de livres sur la santé et surtout plusieurs manuels scolaires d'hygiène. En 1925, son ouvrage Contributions à l`ethnographie médicale d`olténie sera récompensé par l`académie Roumaine. Il s`éteint le 16 août 1930, a Craiova, à seulement 55 ans. Pour sa contribution aux éradications des diverses épidémies et maladies, pour son travail permanent de propagande sanitaire, par ses publications et par la fondation des diverses institutions, Charles Laugier a reçu plusieurs médailles et distinctions et surtout il a été surnommé le "Carol Davila de l`olténie". Aujourd`hui le Lycée Sanitaire de Craiova porte son nom. Dodo Nita Charles Laugier, medic si etnograf, par Adrian Michiduta, Editions Aius, Craiova, Comédie à l'italienne à l'arrière qui n'était autre qu'un inspecteur de police en filature d'un gang de trafiquants de drogue. Le policier n'a eu qu'à donner l'adresse du commissariat à ces deux chauffeurs bénévoles pour s'y faire conduire sans autre manière son révolver servant de GPS. Expositions Ils ne s'attendaient pas à se rencontrer mais l'ex-dictateur communiste Nicolae Ceausescu, le comte Dracula et Jésus-Christ tiennent la vedette au Musée du kitsch roumain qui s'est ouvert à Bucarest. A tout seigneur tout honneur: c'est le vampire national qui accueille les visiteurs, plus précisément une représentation -- forcément kitschissime-- du personnage créé par Bram Stoker. "Dracula représente la marque roumaine la plus connue mais aussi l'absolu du kitsch roumain, car son image est utilisée d'une manière très chaotique et incohérente", confie à l'afp Cristian Lica, propriétaire du musée. Cet ancien publicitaire âgé de 41 ans se dit un "passionné du kitsch" et raconte avoir grandi "comme tous ceux de sa génération avec le kitsch communiste" de l'ère Ceausescu. Accessoires de design intérieur incontournables de cette époque dans le pays, les poissons-bibelots et des tapisseries représentant "L'enlèvement au sérail" sont ressuscités. Le tout sous le regard satisfait de Nicolae Ceausescu, dans une incarnation "légendaire" du kitsch roumain, selon Cristian Lica: une photo montrant le dictateur portant un sceptre lors de la cérémonie de son investiture en tant que président de la Huit minutes. C'est le temps qu'aura mis le Parlement pour effacer un an de travail de concertation mis en place par l'ancien ministère de la Culture du gouvernement "technocrate" de Dacian Ciolos ( ) avec des professionnels de l'industrie cinématographique pour adopter une nouvelle loi, indispensable au cinéma roumain. La majorité parlementaire conduite par le Parti socialdémocrate (PSD) a rejeté le texte suivant l'avis négatif de la "Commission de la culture, des arts et des moyens d'information", qui n'a même pas pris le temps de lire le projet de loi ni de le débattre et a suivi le ministère "de la Connaissance et découverte Ceausescu, Dracula et Jésus se rencontrent au Musée du kitsch roumain Culture et de l'identité nationale", hostile à cette loi. République en Les 215 objets exposés sont repartis dans six catégories dont: "Religion" -où Jésus-Christ n'est pas oublié- et "Fais ton propre kitsch". Une section est spécifiquement consacrée au foisonnant "Gypsy kitsch" (kitsch gitan). On peut notamment y admirer des photos de chefs richement parés de couronnes et d'autres accessoires en or. Les référents de l'importante minorité rom de Roumanie peuvent être perçus par la majorité des Roumains comme kitsch. Mais on peut tous être le kitsch de quelqu'un", relève Cristian Lica, soulignant que "personne n'a le droit de juger la culture d'autrui kitsch. Fort de ces différentes influences, le kitsch roumain constitue un patrimoine précieux qu'il convenait de mettre en valeur, souligne le passionné. Mais gare aux imitations et au pseudo-kitsch, alors que le genre connaît une vogue dans les milieux branchés à travers la planète! "Un kitsch authentique est créatif, ridicule et ostentatoire", rappelle l'expert. Le musée ( est ouvert tous les jours. La Roumanie dit adieu à sa loi sur le cinéma Vétustes, les cinémas Patria laissent peu à peu la place aux complexes multi-salles dans les centres commerciaux. Le projet de loi, élaboré en partenariat avec le CNC français, visait à rendre plus transparent le financement des films par le CNC: aujourd'hui, la majorité des points sont alloués sur la base des précédents projets du réalisateur et de la notoriété de sa maison de production, défavorisant les nouveaux réalisateurs et les producteurs indépendants. Il s'agissait également de faire passer le mode de financement du crédit à la subvention, d'engager la rénovation des cinémas à travers le pays et de restaurer et de digitaliser les archives cinématographiques nationales. Les réalisateurs roumains se sont montrés irrités par cette décision. 33

18 Connaissance et découverte 34 Humour Réponse à tout Une jeune fille qui porte un string sur la plage, réduit à sa plus simple expression, est interpellé par un pope : -T'as pas honte de te promener comme çà! Qu'est-ce que dirait ta mère si elle te voyait? -C'est sûr qu'elle ne serait pas contente Je lui ai emprunté sans lui demander. Cigognes Une grand-mère est assise dans son jardin, entourée de ses 3 petits enfants qui lui posent plein de questions sur les cigognes qui viennent de nidifier : -Et bien mes petits chéris, vous voyez, ce sont elles qui apportent les bébés dans les familles. Elles viennent de très loin! Les mômes se regardent et chuchotent : -Il serait peut-être temps qu'on lui apprenne la vérité! Lumière Un Moldave et un Oltène sont à la pêche. Le Moldave mange juste la tête des poissons. Intrigué, son compagnon lui demande pourquoi : -Comme çà, on devient plus intelligent! -Ah bon? Je ne savais pas. -Si tu veux, je te vends les miennes 50 lei le kilo. Marché conclu. Après avoir avalé tous ses poissons, l'oltène s'exclame : -Qu'est-ce que tu m'as raconté? Je ne suis pas plus intelligent! -Mais si! Regarde! Tu t'en rends compte Conseilleurs mais pas payeurs Bula, en pleine déprime, va voir son médecin : -Tu as une névrose mais çà se soigne. Il faut que tu cherches à être plus gai, que tu fredonnes des chansonnettes pendant le boulot, que tu racontes des blagues aux collègues, à la clientèle si t'en as, que tu souris, rigoles, fasse des clins d'œil aux femmes. -Mais docteur, c'est ce que j'ai essayé de faire et ils m'ont foutu à la porte! -Alors çà Qu'est-ce qu'ils font tes patrons? -Ils ont une firme de pompes funèbres Education sexuelle Les adolescents de quatrième (classe XII) attendent avec impatience leur premier cours d'éducation sexuelle. La prof, qui a un peu de barbe sous le menton, commence : -Camarades, voici comment çà se passe : L'amour entre deux femmes est immoral; entre deux hommes, c'est un cas pénal; entre un homme et une femme bon, çà peut encore passer. Mais le véritable amour, le plus important, c'est celui qu'on porte au parti et notre glorieux Conducator Et c'est de cela que nous allons parler toute l'année. Vraiment fou Un médecin demande à un pensionnaire d'un hôpital psychiatrique pourquoi on l'a interné : -J'ai voulu m'enfuir à l'étranger. -Mais pour çà, on ne te met pas chez les fous on t'envoie en prison! -Oui, mais je voulais aller en Union Soviétique. Parking Deux amis se rencontrent par hasard dans une rue de Bucarest : -Salut, çà va? Qu'est-ce que tu fais? -Je travaille Piata Romana. -Mais qu'est- ce que tu fiches Place du Sud, à 10 km? -Je cherche une place pour me garer Cervelle Dans un restaurant pour cannibales: -Aujourd'hui, au menu, nous avons de la cervelle au menu : cervelle de missionnaire à 10 euros la portion, d'explorateur à 15 euros et de policier à 50 euros. -Mais pourquoi aussi chère celle-ci? -Parce qu'il nous en faut plusieurs pour faire une portion. Mieux vaut se taire Blagues Bula se plaint auprès de sa mère. - Papa m'a battu deux fois aujourd'- hui - Mais qu'est-ce-que tu avais donc fait? - Rien. La première fois, je lui ai montré le carnet de notes la deuxième, je lui ai dit que c'était le sien, quand il était élève. Chien et chat Un chat et un chien se croisent à la frontière hongroise. Ils se saluent, mais le chat est très surpris de voir que le chien veut entrer en Roumanie. - Pourquoi tu viens chez nous? lui demande-t-il - Parce qu'on m'a dit qu'on y menait une vie de chien. Prévoyants Ceausescu et sa femme se préparent pour une visite officielle en France. Le "Conducator" demande a sa femme : - T'as pensé à prendre les maillots de bain? - Pourquoi faire? - Demain soir, on est invités à l'opéra au "Lac des cygnes". Economies Le Conducator a ordonné dans un discours que chaque Roumain fasse des économies d'énergie. La maîtresse interroge ses élèves : - Dis-moi, Cornel, que font tes parents pour suivre les consignes de notre grand leader aimé? - Maman, elle met la nourriture sur le balcon et on a débranché le frigidaire. - Bravo, et toi Marian? - Dès que je rentre de l'école, je ne vais pas jouer mais j'apprends mes leçons, comme çà je n'ai pas besoin de lumière. - C'est très bien. A ton tour Bula - Moi, je regarde la télévision hongroise comme çà c'est eux qui paient le courant. Près de 20 ans de passion Voici près de 20 ans, paraissait le premier numéro des "Nouvelles de Roumanie". La passion, lucide, de ses deux fondateurs - Henri Gillet et Dolores Sirbu-Ghiran - pour ce pays, a eu souvent du mal à résister à la pression des évènements. Comment ne pas s'indigner du traitement inepte que lui réservaient les médias occidentaux? Comment ne pas se révolter devant la permanence d'un système corrompu et d'une société méprisant ses citoyens? Oui, il fallait garder la tête froide pour bien parler de la Roumanie. Dire sans relâche ce qui la défigure. La comprendre dans sa fragilité, ses interrogations. L'aimer pour son authenticité et son génie. En essayant de ne pas se tromper Rude tâche. Pour saisir un pays, il faut le connaître. Internet et ses milliers de sites permettent cette gageure. Aux "Nouvelles", entre huit et dix heures par jour ont été consacrées à leur découverte. Grâce à cet outil, journaux roumains, magazines et revues, ont été épluchés quotidiennement. Sans Internet, "Les Nouvelles de Roumanie" n'auraient pas existé. Les chaînes de télévision roumaines captées par le satellite, et regardées chaque soir, le téléphone, dont l'importance se faisait particulièrement sentir au début lorsque sa facture arrivait, complétaient ce dispositif. Mille savoir-faire et vingt métiers différents Bien sûr, il ne fallait pas se limiter à donner une image virtuelle de la Roumanie, mais l'expliquer, la faire comprendre, ressentir. D'où des voyages de plus en plus fréquents de l'équipe des "Nouvelles". Tous les deux mois pour Dolores Sirbu-Ghiran, une ou deux fois l'an pour Henri Gillet. Un mois sur place pour la plupart, deux mois pour le plus long Et les multiples rencontres, reportages, interviews, découvertes, qu'ils ont engendrés. Au fil des numéros, la Roumanie et le magazine ont envahi la vie de leurs concepteurs. Les semaines sont passées à deux fois 35 heures, les week-ends et les fêtes ont été oubliés. Lors des réveillons, le champagne du Nouvel an a servi surtout de pause dans le bouclage de la revue qui s'achevait dans l'effervescence. En déplacement, la lecture des journaux roumains et le suivi de l'actualité était toujours de rigueur. L'ordinateur portable permettait de grappiller sur les moments libres, les longs trajets en train, les attentes aux aéroports, pour taper quelques articles. Faire un journal demande mille savoir-faire. D'écrire à le poster, chaque stade de sa fabrication exige connaissance des règlements, des pratiques. Etre comptable, maquettiste, correcteur, journaliste, administrateur, surveiller les abonnements, répondre en roumain au téléphone, écrire en français et comprendre l'anglais sur Internet au total, ce sont près de vingt métiers ou tâches, parfois très éloignés, qu'a requis la sortie de chaque numéro. A partager à deux Une immense tendresse à l'égard d'une Roumanie qui irrite Evidemment, pour Henri Gillet, ce n'était pas la pré-retraite tranquille envisagée au terme d'une carrière de 30 ans dans le journalisme, avec l'idée de faire un magazine comme passe-temps. La passion du métier a vite repris le dessus avec, enfin, ce rêve à portée de main: faire un journal à soi, professionnel, exigeant en qualité, déterminé à rendre compte de la réalité, même s'il faut prendre des risques pour cela, et soucieux de l'expliquer. Avec l'indépendance et la liberté en prime. Un journal qui ne soit pas inodore, sans saveur, sans couleur, mais qui n'hésite pas à s'engager quand cela lui paraît nécessaire. Pour Dolores Sîrbu-Ghiran, la volonté était trop forte de faire découvrir son pays, injustement méconnu, avec ses travers s'il le faut, ses richesses, ses interrogations, et ainsi faire oublier les clichés réducteurs dont on l'affuble. Pour tous les deux, sans-doute une immense tendresse à l'égard d'une Roumanie qui les irritait autant qu'elle les émouvait. C'était une aventure de se lancer dans "Les Nouvelles". Il fallait miser sur l'existence de lecteurs frustrés par le manque d'informations sur ce pays. Ils existaient, même s'ils n'étaient pas très nombreux. Sans moyen financier, il ne fallait pas, non plus, trop écorner la modeste pré-retraite, qui suppléait aux abonnements et a permis à la revue et à ses créateurs de vivre. Mais la passion permet de soulever des montagnes. Pendant la "révolution" de décembre 1989, Henri Gillet, en reportage pour son journal, mais aussi chargé de mettre en place l'aide humanitaire de sa région, avait été arrêté à l'orée d'un village par un groupe de révolutionnaires qui voulaient empêcher d'éventuels commandos de la Securitate d'y entrer. Parmi eux, une jeune femme, Dolores Sîrbu-Ghiran, qui pointait sur sa poitrine une kalachnikov plus intriguée que menaçante. De cette rencontre inattendue sont nées, quelques années plus tard, "Les Nouvelles de Roumanie". 35

19 36 Les Nouvelles de Roumanie ont publié des centaines de portraits de Roumains illustres même si certains n'étaient pas toujours recommandables, mais ils faisaient partie de l'histoire. Nous en avons sélectionné quelques uns, parus dans les premiers numéros et dont nos lecteurs les plus récents n'ont pas eu connaissance. Pour les plus anciens, ce sera un régal de les retrouver. "Ma qué pourvou qué çà doure" Grande duchesse de "Tovarich", "Mamma" sicilienne en mantille noire, Elvire Popesco interpréta certains de ses rôles plus de mille fois, devenant, sur le tard, la comédienne fétiche d'andré Roussin. En prenant de l'âge, souvent soumise à des crises d'arthrose, elle prolongea sa carrière en devenant directrice de tournée et du Théâtre Marigny. Retirée dans son appartement à Paris, ne recherchant aucun honneur, sa seule passion, jusqu'à sa disparition en 1993, à l'âge de 98 ans, fût le théâtre. Après avoir tourné tout au long de sa vie dans une trentaine de "navets", elle fit sa dernière apparition à l'écran dans "Auterlitz". Perruquée de brun et drapée de noir, enfermée dans ses silences et ses châles, jouant Laetitia Bonaparte, elle n'ouvrait la bouche que pour lâcher "Ma qué, pourvou qué çà doure!". Comme la matrone corse se retrouvant mère d'un empereur, la jeune fille de Bucarest qui faisait rêver le roi, cousine à succès de Varsovie, puis impératrice du boulevard et de la scène parisienne, ne pouvait que remercier le destin. A un spectateur qui lui demandait si l'actrice sur scène était russe ou polonaise, Sacha Guitry répondit un jour : "En tous cas pas française, mais sûrement parisienne". Théâtre Elvire Popesco, reine du boulevard Elvire Popesco est l'une des comédiennes françaises du XXème siècle qui aura le plus marqué le public. Considérée comme la reine du boulevard, après son triomphe dans "La cousine de Varsovie", elle marqua profondément la vie parisienne. L'existence, avec elle, devenait une sorte de cocktail mondain avec secrétaire frétillant, grand duc dans le placard, Hispano décapotable, barbon berné, et esprit de la capitale. La cousine de Varsovie était en fait de Bucarest, où elle était née en Son oncle, un acteur réputé, Nicolescu, l'avait poussée à s'inscrire au conservatoire. Pensionnaire du Théâtre national de Bucarest à l'âge de 20 ans, elle y trouva aussi un mari, son partenaire sur la scène, Aurel Athanesescu, dont elle aura une fille, Tatiana, son unique enfant. L'histoire veut que, chaque matin, lorsqu'elle marchait jusqu'au théâtre et qu'elle passait devant le palais royal, on pouvait voir un rideau s'écarter: le roi Ferdinand regardait amoureusement l'une des plus belles femmes de son royaume. L'histoire d'elvira Popescu chavira à la suite d'un coup de téléphone de Paris, en Louis Verneuil, auteur de pièces de boulevard à succès, cherchait une comédienne "bien roulée", explosive, avec un fort accent pour remplacer au pied levé, sur la scène du Théâtre Michel, l'interprète du rôle principal de "Ma cousine de Varsovie", la Russe Maria Orska, qui avait la fâcheuse habitude de forcer sur les doses de morphine et cocaïne et dont la direction ne voulait plus. La blonde de Bucarest, cousine de Varsovie pendant 32 ans Louis Verneuil se souvint alors d'une sorte de blonde volcanique, débarquée d'europe centrale quelques mois plus tôt et qui avait interprété au théâtre de l'oeuvre à Paris, en roumain, "La passion rouge" de Mihaïl Sorbul. Cette demoiselle Popescu, aux mèches blondes frisées au petit fer et aux lèvres abusivement rouges, avait manifesté du tempérament et du panache mais elle était repartie à Bucarest. La comédienne ne fût pas longue à convaincre. Trente six heures plus tard elle débarquait gare de l'est, répétant l'après-midi même, pour reprendre un rôle qu'elle jouera pendant 32 ans, ne l'abandonnant qu'en Le personnage de Sonia, une cousine débarquant de Varsovie à Saumur, se dévouant pour séduire tout à tour le maître des lieux à la demande de sa femme, puis l'amant de celle-ci sur les instances de son épouse, lui colla à la peau. Roumaine, elle campait une Polonaise à prénom russe. Tout le monde se moquait de ce hiatus, tant Elvire Pospesco - dans la foulée, elle avait modifié son nom - mettait le public dans sa poche. Sourcils redessinés, cils ourlés comme des stores vénitiens, dents de lait, sourire aux oreilles, la comédienne se trouva vite sacrée reine. Un accent à couper au couteau "Ses auteurs, souvent ses amants, lui faisaient des actes elle leur faisait des scènes" Il manquait un chapitre à la pièce de Louis Verneuil les treize ans de vie sentimentale et professionnelle qu'il partagerait avec son impétueuse interprète. D'ailleurs le personnage de théâtre et celui de la vie d'elvire Popesco se confondirent longtemps, copiés l'un sur l'autre, et raison de sa gloire. Ne cachant jamais son fort accent à couper au couteau, roulant les "r", elle a incarné l'incandescence vaporeuse du Paris de l'entre-deuxguerres, en pétillant comme du champagne, avec des sanglots au fond. Mais sous les apparences de la spontanéité la plus débridée, se cachait une véritable professionnelle qui commençait toujours par déterminer minutieusement ce qu'était le personnage avant de se laisser aller à une improvisation étudiée.comédienne adulée, multipliant les aventures sentimentales, friande de frasques fantasques, elle fut, selon une jolie formule "celle à laquelle les auteurs faisaient des actes et auxquels, en retour, elle faisait des scènes". Florence fut de longues années le grand amour de Constantin Brancusi, de 37 ans son aîné Une muse de 20 ans pour le père de la sculpture moderne Sculpture Constantin Brancusi ( ), considéré comme le père de la sculpture moderne, était aussi un très grand photographe. Jean-Jacques Aillagon, ministre de la Culture français, a inauguré récemment aux Tuileries (Galerie Hopkins-Custot) une exposition de l'œuvre photographique du Roumain, où figurent des clichés dont les prix varient aujourd'hui entre et Brancusi a passé les deux tiers de sa vie en France, est enterré au cimetière Montparnasse et son atelier a été reconstitué sous forme de musée dans le quartier Beaubourg. A l'occasion de cette exposition, le critique et historien d'art Radu Varia a fait sensation dans l'introduction du catalogue de présentation, révélant que le sculpteur avait entretenu une liaison intense avec une très jeune artiste américaine, Florence, qui avait 37 ans de moins que lui. Brancusi l'avait rencontrée en 1932, alors qu'il avait 57 ans et elle, 20. L'artiste semble avoir été emporté par un amour fou et une exubérance sentimentale qu'on ne lui connaissait pas. Quelques 18 lettres échangées entre 1932 et 1947, portées à la connaissance de Radu Varia, assez récemment, témoignent de sa passion pour Florence, de son côté humain et de l'infini tendresse qu'il lui portait. Dans ses courriers, il lui révèle qu'il pense sans arrêt à elle et termine par des "je t'aime et je t'étreins fort, fort, fort, fort..." à n'en plus finir. Il signe souvent d'un dessin du plus grand intérêt, comme celui qui sera l'ébauche de sa fameuse sculpture "Le Baiser". Les réponses de Florence n'ont pas été rendues publiques, mais cette correspondance devrait être dévoilée prochainement par l'intermédiaire Florence, photographiée par Man Ray. du Centre Pompidou qui s'apprête à publier les archives du sculpteur. Florence était l'une des trois filles d'agnès Meyer, richissime femme, propriétaire du groupe de presse "Washington Post" et "Newsweek", qui a joué plusieurs fois un rôle important dans la carrière de Brancusi et dont il a sculpté deux portraits. Celle-ci était en possession de plusieurs de ses oeuvre majeures, dont la plus belle version de "L'oiseau dans l'espace" et de "Danaïda", qui s'est vendue récemment 18 M (120 MF) à New York. Un nombre de liaisons impressionnant Les femmes ont toujours occupé une grande place dans la vie de Brancusi et le nombre de ses liaisons amoureuses était impressionnant. Certaines se sont révélées marquantes pour son oeuvre, comme celle entretenue avec la fascinante irlandaise Eileen Lane qu'il emmena en Roumanie et dont il réalisa de superbes photos. Sa relation épisodique avec la Hongroise Margit Pogany lui a inspiré l'une des sculptures les plus célèbres du 20 ème siècle, "Mademoiselle Pogany". Son aventure avec Nancy Cunard, héritière de la grande compagnie maritime américaine, donna une autre sculpture célèbre, "La jeune fille sophistiquée". Par contre, on ne sait pas grand chose de la mère de son unique fils, lequel vit aujourd'hui près de Versailles. La richissime Peggy Guggenheim, propriétaire de plusieurs galeries d'art moderne, dont le père est mort dans le naufrage du Titanic, et nièce du créateur du musée Guggenheim de New York, écrit dans ses mémoires que Brancusi pensait qu'elle voulait se marier avec lui, uniquement pour mettre la main sur ses sculptures et, pour cette raison, ajoutetelle "il déclarait qu'il était déjà marié... avec son art". Une oeuvre plus importante après sa mort que de son vivant Constantin Brancusi Radu Varia relève aussi que, paradoxalement, c'est dans son pays natal que Brancusi est le moins connu, alors qu'en Amérique chaque grand musée se fait un devoir de posséder au moins une de ses oeuvres. L'historien d'art avance comme raison le fait que les Roumains n'ont jamais eu l'occasion de voir chez eux une seule de ses grandes oeuvres, comme "L'oiseau d'or" ou "Le commencements du monde", et que le célèbre triptyque de Târgu Jiu, réalisé entre 1937 et 1938 ("La colonne de l'infini", "La porte du Baiser", "La Table du Silence") vient tout juste d'être rénové, avec l'aide de la Banque Mondiale, après des années d'indifférence. Et d'insister sur l'urgence absolue d'organiser une grande exposition de son oeuvre à Bucarest, proposition qui a reçu l'assentiment du ministre Jean-Jacques Aillagon, lequel a promis une aide significative dans ce sens. Cette manifestation serait d'autant plus utile pour situer la place du plus grand artiste roumain de tous les temps dans l'histoire mondiale de l'art... que jamais Brancusi n'a fait autant de sculptures que depuis qu'il est mort. Ces faux, dont beaucoup sont "retrouvés" en Roumanie et attribués à la période précédent son départ pour la France, à l'âge de 28 ans, ne peut que déconsidérer son oeuvre. 37

20 38 Littérature Passion et colère devant "l'outrage" "Jusqu'à quand va-t-on se laisser humilier pour un bol de mamaliga?", "Faut-il accepter toutes ces mortifications pour entrer dans l'otan?", "Des machinations de ce genre affectent non seulement notre histoire et notre culture, mais aussi notre mode de vie" Les réactions ont été particulièrement vives en Roumanie, après la publication dans les journaux des comptes - rendus du livre d'alexandra Laignel-Lavastine. Passion et colère devant l'outrage fait à "trois monstres sacrés" du patrimoine littéraire ont alimenté les courriers des lecteurs, au sentiment national blessé. Interrogés par les journalistes, les intellectuels de renom, dont l'ancien Ministre de la culture, Andrei Plesu, se sont réfugiés dans un silence prudent, arguant du fait qu'ils n'avaient pas encore lu le livre. Certains ont cependant reproché amèrement à son auteur un parti-pris qui l'amène à insister sur un passé "épisodique", marqué par le fascisme, et à oublier ou à négliger l'autre tournant du siècle, autrement plus tragique pour la Roumanie, que fut le communisme et à en faire porter la responsabilité collective à ses intellectuels. Mais en faisant surgir l'inévitable et très sensible question de la responsabilité des élites politiques et intellectuelles de l'époque, le livre d'a.l.l. alimente un débat qui concerne aussi bien la France que les autres pays européens en proie aux idéologies monstrueuses d'alors. Cioran, Eliade, Ionesco: L'oubli du fascisme, par Alexandra Laignel- Lavastine; PUF (Presses Universitaires de France), Perspectives critiques, avril 2002, 552 pages, 29. "Cioran, Eliade, Ionesco: l'oubli du fascisme" Trois prestigieux exilés roumains au crible de leur passé En publiant son livre Cioran, Eliade, Ionesco : l'oubli du fascisme, l'historienne et universitaire française, Alexandra Laignel-Lavastine, auteur de nombreux ouvrages de référence, a jeté un véritable pavé dans la mare qui n'en finit pas de faire des remous, notamment en Roumanie. Dans cette triple biographie argumentée, tout à fait accessible au lecteur non spécialisé, A.L.L. souligne le rôle idéologique majeur que l'historien des religions Mircea Eliade et le philosophe Emil Cioran, principaux chefs de file de la jeune génération intellectuelle roumaine des années 30 - redevenus aujourd'hui des "monstres sacrés" de la culture post-communiste roumaine - ont joué auprès de la Garde de fer, mouvement antisémite et violent d'extrême-droite au contraire d'eugène Ionesco qui, horrifié par la "rhinocérisation" (la contagion idéologique) de ses amis, a dénoncé le fanatisme ambiant, mais a choisi de garder le silence jusqu'à sa mort, en 1994, sur le passé de ses deux compatriotes alors qu'ils étaient tous trois exilés et célèbres. Pour prouver l'importante contribution intellectuelle d'eliade et de Cioran à l'extrémisme légionnaire, A.L.L utilise toute une série d'articles aujourd'hui accessibles en recueils que tous deux ont publiés à l'époque. A quoi s'ajoutent leurs propres écrits, dont les rééditions récentes ont été d'ailleurs expurgées de leurs passages délicats. La célèbre photo des retrouvailles (1977) : Emil Cioran, Eugène Ionesco, Mircea Eliade La peur des révélations La guerre achevée, passée au Portugal de Salazar sur un poste diplomatique pour Eliade, entre Bucarest, Vichy et Paris pour Cioran et Ionesco, les trois hommes se retrouvent dans le Paris de la Libération à l'aube de leurs fulgurantes carrières qui en feront des figures marquantes de la culture occidentale. Cioran et Eliade vivent dès lors dans la peur permanente que leur engagement "gardiste" ne soit révélé, construisent leur oeuvre en conformité avec ce que leur pays d'accueil peut tolérer idéologiquement, le monde intellectuel français penchant plutôt à gauche, sans toutefois renier ni démentir sur le fond, leur engagement passé. Ils sont aidés dans cette démarche, du moins jusque dans les années 80 au cours desquelles les révélations vont commencer à affluer, par l'attitude de l'exil roumain à Paris, tout à son combat anti-communiste. A noter toutefois que la diaspora roumaine dans la capitale française ne se composait pas uniquement d'anciens gardistes. Ionesco: l'anti-communisme plutôt que la mémoire du passé. Ionesco lui-même, qui avait juré de ne plus jamais adresser la parole à ses anciens amis, en vint à "oublier" le passé et à poser avec eux, en 1977 à Paris et en toute amitié, devant le photographe pour le cliché de la célébrité Ainsi, après avoir résisté à la montée du fascisme dans son pays dans les années trente, se mettra-t-il à résister, depuis la France, au nouvel obscurantisme qui engloutira à nouveau son pays après guerre: le stalinisme puis le national-communisme. Cela en conformité avec sa mentalité d'éternel opposant mais au détriment, cependant, d'une certaine mémoire du passé. Si Cioran a accepté, avant la fin de sa vie survenue en 1995, de revenir quelque peu sur son passé, il n'en est rien de Mircea Eliade, mort en 1986, qui écrivait dans son Journal de 1973 une phrase de Goethe citée par Nietzche: "Lorsqu'on est celui que je suis, on perd (...) le droit d'être jugé par ses pairs". Bernard Camboulives En l'état actuel de la recherche, rien ne prouve que Cioran ait "fait partie" de la Garde de fer. Jusqu'à preuve du contraire, on peut affirmer que jamais l'organisation ne parvint à le recruter parmi ses cadres ou ses idéologues attitrés. Reste que ses positions, à partir de la fin 1933, n'en sont pas moins ouvertement pro-légionnaires, comme elles le resteront à l'automne 1940 lorsque le philosophe rendra publiquement hommage à la profondeur de Codreanu et à sa capacité à avoir "donné un visage à l'homme roumain", dans une conférence diffusée à la radio. Cioran reste par ailleurs proche de la Garde de fer dans les traits qu'elle emprunte aux fascismes européens - antisémitisme, culte du chef et de la violence, haine du régime parlementaire- comme dans la conviction qu'il ne peut y avoir d'issue, dans le cas roumain, que dans le cadre d'une révolution "nationale". Mais Cioran se distingue surtout par son antisémitisme de conviction, intellectuel et froid, doctrinal, servi par une élaboration argumentative extrêmement serrée. "Le Juif n'est ni notre semblable, ni notre prochain; et quelle que soit l'intimité que l'on puisse avoir avec un Juif, un Un historien des religions au service de la révolution nationale: Mircea Eliade Tout au long de son livre, l auteur Alexandra Laignel Lavastine illustre le parcours des trois grands intellectuels roumains, ce qui permet au lecteur de suivre leur itinéraire. Tandis que Cioran apparaît plutôt comme un compagnon de route, précieux certes mais passablement imprévisible et indiscipliné, Eliade manifeste davantage de sérieux et d'application dans son engagement aux côtés de la révolution nationale. Il prend la parole dans des réunions de son organisation politique, même s'il n'en fut jamais membre au sens strict, et n'hésite pas à prêter main-forte sur le terrain. Ce sera le cas, en 1937, lors de la campagne électorale. Eliade multiplie les professions de foi que clôt son fameux "Pourquoi je crois dans la victoire du Mouvement légionnaire", trois jours avant les élections. C'est tout son poids d'écrivain vénéré par la jeunesse et de professeur d' Université respecté par ses étudiants que l'historien des religions met dans la balance de ses mots. Combien seront conduits à un engagement dans les rangs des Franquistes en Espagne ou à se porter candidats pour les équipes de tueurs-kamikases de Codreanu, offrant ainsi leur vie et consentant à des crimes de sang "en sacrifice pour la Chrétienté"? Après-guerre, devenu célèbre en Occident, Eliade cherchera à dissimuler son passé, comme le montrent deux textes. Dans son Journal des années portugaises (non publié en France), il évoque comme un cauchemar lui provoquant insomnies et dépression, la perspective de la défaite allemande. Ce futur titulaire d'une chaire à l'université de Chicago ne cesse de vitupérer contre "l'imbécillité féroce de Churchill et de Roosevelt", contre les avancées de ceux qu'ils nomment les "Anglo-bolchéviques" en Afrique du Nord. Dans la version qu'il donne de ce journal pour ses Mémoires et publiées en France en 1988, on peut lire: "Comme beaucoup de mes compatriotes et beaucoup d'européens, j'interprétais le débarquement américain en Afrique du Nord comme un signe encourageant...". Emil Cioran, révolutionnaire-conservateur et antisémite de conviction Ionesco fait partie de ces quelques intellectuels esteuropéens qui, dans les années 1930, résistèrent avec une égale détermination à la fascination du fascisme et du communisme. A la Roumanie transfigurée de Cioran, il oppose la Roumanie défigurée par le fanatisme idéologique et il lui revient d'avoir décrit avec une rare clairvoyance le caractère à la fois progressif et insidieux de ce processus. De passage à Paris entre 1938 et 1940 pour y faire des études, Ionesco écrit dans son journal: "Voyez comme ils marchent avec leur tête de fer, comme ils défilent dans leurs bottes de fer, sur des boulevards de fer". Il parle parfois de ses amis. Leur ralliement à la Garde de fer représente, dans sa vie, "un véritable traumatisme" qui le faisait "énormément souffrir". Eliade et Cioran, en 1945, sont pour Ionesco... d'odieux abîme continue de nous en séparer, qu'on le veuille ou non" écrit-il dans La Transfiguration de la Roumanie, publiée en Dans Un peuple de solitaires, (1956), un texte longtemps perçu comme un exercice d'admiration envers le peuple juif, Cioran, en pleine entreprise d'occultation de ses écrits antérieurs, ne fera en réalité qu'inverser les signes, les stéréotypes antisémites subsistant: le soushomme deviendra le surhomme, l'être errant et sans-patrie, ennemi de toutes les causes nationales, un être émancipé des "niaiseries de l'enracinement". Eugène Ionesco : la constance dans le combat anti-totalitaire fascistes qu'il se jure de ne jamais revoir, qu'il tient pour responsables des dérives d'une partie de la jeunesse roumaine, affirmant début 1946, que rien ne peut effacer leur engagement légionnaire et "qu'ils sont irrémédiablement devenus des hyènes les uns pour les autres". Entre sa période roumaine et sa période française, l'enfant terrible, certes, s'embourgeoise, en même temps qu'il accomplit un assez spectaculaire basculement de gauche à droite. Une évolution qui éclaire sans doute une part de l'énigme liée à la réconciliation avec Eliade et Cioran. "A l'époque, les deux étaient de droite et moi j'étais de gauche", aura-t-il l'habitude de dire dans les années "Maintenant nous sommes tous au centre". Mais entre ces deux pôles, une logique, chez lui, demeure: le combat anti-totalitaire. 39

21 40 Sports La même flamme et jeunesse d'esprit Iolanda Balas a arrêté sa carrière en 1967, au faîte de sa gloire, à la suite de douleurs tenaces au tendon d'achille. La championne, âgée de 31 ans, ne supportait pas l'idée d'être battue. La même année, devenue professeur d'éducation physique, elle se maria avec Hansi. Le couple, qui a eu un garçon, a vécu modestement jusqu'à la mort prématurée d'hansi en 1987, que Iolly mettra sur le compte de ce que leur avait fait endurer le régime et des privations de l'époque. Portée à la présidence de la Fédération Roumaine d'athlétisme après la "Révolution", Iolly, devenue légende dan son pays, vit avec sa retraite de 3,1 millions de lei (76 e), pour 41 ans de travail et sa carrière sportive, somme confortée par une rente viagère pour ses deux titres olympiques, ce qui lui permet de mener une existence décente dans son appartement de trois pièces du quartier Floreasca de Bucarest. Toujours souriante, espiègle, la grande championne a gardé dans le regard la même flamme qui l'animait lorsque le speaker annonçait "Mesdames, Messieurs, Iolanda Balas va tenter de battre son record du monde". "Silence, s'il vous plaît! A68 ans, Iolanda Balas a regardé avec émotion les participantes à la finale du saut en hauteur prendre leur course d'élan, lors des derniers Jeux Olympiques. Une poussée d'adrénaline l'a fait revenir quarante ans en arrière, lorsqu'elle régnait sur cette discipline. Dans le public athénien, peu de gens savaient qu'une des plus grandes dames de l'athlétisme mondial, devenue en 1991, présidente de la Fédération Roumaine d'athlétisme, était assise parmi eux. Iolanda Balas est un mythe, mais pour en arriver là, le saut en hauteur s'est révélé plus qu'une épreuve sportive pour celle dont le speaker annonçait au micro la présence sur les stades en disant "Silence, s'il vous plait! Iolanda Balas va sauter!" Petite fille frêle au yeux bleus, Iolanda, ou Iolly, son diminutif, vendait des journaux aux coins des rues de Timisoara, sa ville natale, pour rapporter un peu d'argent à sa famille. Son père, un homme sévère, l'avait inscrite à l'école Notre Dame, tenue par des religieuses, dont elle sera une des dernières élèves. Fillette, elle sautait par dessus les cordes à linge de sa mère Dans la cour de son immeuble, la fillette s'amusait à sauter par dessus les cordes à linge de sa mère, franchissant déjà 1,20 m alors qu'elle n'avait que 12 ans. Repérée par le plus célèbre club d'athlétisme du pays, celui de l'usine Electrica, elle s'entraînera avec une telle ardeur, que son professeur sera obligé de la réfréner. Quand, deux ans plus tard, en 1950, elle réussit 1,40 m, les choses sérieuses commencèrent. On l'envoya à Bucarest où elle s'initiera à la compétition dans un groupe d'athlètes adultes. Lors de son premier concours à Budapest, l'adolescente à peine sortie de l'enfance paraissait si effacée qu'on l'a prise pour la fille d'un membre de la délégation roumaine. Mais lorsqu'elle eut franchi 1,40 m dès son premier saut, puis améliora le record de son pays, les regards changèrent. Près de vingt ans d'un règne absolu Iolanda Balas entamait une carrière sportive de 20 ans où elle allait dominer la scène roumaine et mondiale, avec un palmarès inégalé au niveau de l'athlétisme dans son pays: deux titres olympiques (Rome, 1960, Tokyo, 1964), trois titres européens (les championnats du monde n'existaient pas alors), trois titres mondiaux universitaires, neuf médailles d'or aux Jeux Balkaniques, dix neuf titres nationaux. Les performances s'accumulaient les unes après les autres: 63 records nationaux, 14 records mondiaux, dont le dernier, 1,91 m, durera dix ans, de 1961 à La longue silhouette fine de Iolanda Balas, 1 m 85, de très longues jambes, ses sauts élégants en ciseaux, dans un style bien particulier, étaient alors connus dans le monde entier. Des champions C'est un tireur au pistolet, Iosif Sârbu, qui rapporta sa première médaille d'or à la Roumanie, lors des J.O. d'helsinki en 1952, mais la première médaille roumaine revint à l'équipe de rugby qui obtint le bronze à Paris (1924). Il fallut attendre 1936 et les J.O. de Berlin pour que le pays obtienne sa première médaille d'argent, en équitation. A cette époque là, la Roumanie brillait également dans les disciplines de sports d'hiver, remportant ses premiers titres mondiaux en luge (1934 et 1936). Le sport roumain va éclater sur la scène mondiale à partir des années 60, avec la sauteuse en hauteur Iolanda Balas (championne olympique à Rome, 1960, et Tokyo,1964), mais aussi avec des titres olympiques en aviron et canoë-kayak, disciplines où la Roumanie a toujours brillé à l'image de son champion le plus titré, le canoéiste Ivan Patsaïchin, quatre fois champion olympique (Mexico, 1968, Munich, 1972, Moscou, 1980, Los Angeles, 1984) et sept fois champions du monde. Iolanda Balas va sauter!" La jeune femme, devenue dès l'âge de 15 ans, "maître des sports" dans son pays, établit ainsi 100 records de stade à travers tous les continents et entra dans le Guiness Book, avec 142 victoires consécutives, un record qui, aujourd hui encore n est pas égalé. Accusée de sabotage, sa photo déchirée, piétinée, après son échec aux J.O de Melbourne Pourtant cette réussite ne constituait que l'envers de la médaille. Devenue alors symbole, Iolanda Balas, qui parle français, anglais, hongrois, allemand et russe, apprit vite qu'elle ne s'appartenait plus et découvrit la nature du régime communiste. Favorite des Jeux Olympiques de Melbourne, en 1956, elle fut privée de la compagnie de son entraîneur, devenu aussi son ami de cœur, Ioan Hansi Soter, qui avait été empêché de quitter le pays, car son frère s'était établi en Australie. A sa place, on lui avait dépêché un agent de la Securitate qui la suivait comme son ombre. Profondément perturbée, la toute jeune femme de vingt ans ne prit que la cinquième place. Cette contre-performance lui valut les reproches violents des chefs de sa délégation qui l'accusèrent de "sabotage" et "d'avoir vendu le titre olympique". Au village olympique, on déchira sa photo, cracha dessus, la piétina Iolly dépassa cette période difficile grâce à l'aide de Hansi, qui prendra toujours soin d'elle et de sa carrière, s'efforçant de lui assurer une vie calme. Le couple vivait dans une chambre d'étudiants, Iolanda suivant les cours de la Faculté d'education Physique et de Sports de Bucarest. Se payant le culot d'aller voir le dictateur Gheorghiu-Dej Reprenant avec assiduité les entraînements, la championne retrouvera vite performances et confiance. Mais déjà 1960 et les Jeux Olympiques de Rome se profilaient. De nouveau, Hansi se vit interdire la sortie du territoire par les autorités. Iolly refusa alors de partir. Prenant son courage à deux mains, dans une démarche audacieuse et risquée, aussi bien pour sa carrière sportive que pour son avenir personnel, elle se rendit elle-même au siège du Comité central du Parti Communiste pour parler à son Secrétaire général, Gheorghiu-Dej. Ainsi, elle obtint gain de cause et Hansi l'accompagna. Le dictateur n'eut pas à regretter son geste, l'athlète ramenant la médaille d'or à la Roumanie, renouvelant cet exploit quatre ans plus tard à Tokyo, avec un saut à 1m 90, à un centimètre de son record mondial. Pendant toutes ces compétitions, le couple se promenait avec un cerbère de la Securitate sur les talons et, chaque soir, devait faire vérifier le contenu de ses maigres achats effectués avec les trois dollars quotidiens qui lui étaient attribués. A l'époque, être champion ne permettait pas de rouler sur l'or. "Pour un record national, on nous promettait 750 lei (un salaire moyen), pour un record mondial, 6000 lei" se souvient l'ancienne championne olympique, rajoutant "C'était de l'argent, mais on ne recevait jamais tout On nous disait qu'il fallait que le pays fasse des économies", avant de constater : "Mais çà ne comptait pas, on mettait beaucoup de passion dans ce qu'on faisait. Ce n'est pas comme aujourd'hui, où les sportifs se préoccupent avant tout de ce qu'ils vont gagner". Si, au fil des ans, les Nouvelles de Roumanie sont passées de 40 à 60 pages, leur présentation n'a pas varié. Elle est due à un étudiant se destinant à l'époque au journalisme et déjà passionné par les pays de l'est, qui a passé des nuits entières à la mettre au point. Depuis, Francky Blandeau a fait son chemin. Parlant l'ukrainien et le russe, il est devenu directeur des centres culturels français en Ukraine et le conseiller écouté d'ambassadeurs de France en poste dans la région, notamment à Kiev. Revenu en France, il en a ramené le meilleur souvenir: sa femme, Ana, Ukrainienne. Les Nouvelles de Roumanie sur Internet! Merci Francky! Les Nouvelles de Roumanie disposent désormais d'un site internet sur lequel vous pouvez consulter sans exception tous les numéros parus depuis le premier (septembre 2000). Les articles parus dans nos colonnes peuvent être repris librement, sous réserve d'être ni dénaturés, ni utilisés dans un sens partisan ou à des fins commerciales, et en précisant bien leur source. Nos plus chaleureux remerciements à Octavian Coman, Adela et Téofil Ivanciuc qui ont conçu et animé ce site. 41

22 42 Littérature La littérature française se souvient avec émotion de Maurice Radiguet, jeune romancier pétri de talent et de promesse, emporté par la maladie à l'âge de 20 ans, en 1923, dont l'œuvre d'une lucidité psychologique implacable (Le diable au corps, Le bal du comte d'orgel) marque encore les esprits. Mais les Français, le Petit Larousse et le Robert en tête, ont totalement oublié Iulia Hasdeu ( ), jeune poétesse roumaine écrivant dans leur langue, disparue alors qu'elle avait dix huit ans, minée par la phtisie. "Comme écrivain, elle a vécu un siècle au moins" Iuila était promise à un avenir immense par ses contemporains les plus illustres, Français, Roumains, qui bien qu'ayant l'âge de ses parents ou grands parents l'admiraient, tout autant impressionnés par la force de pénétration de son esprit, aussi bien préparé à la vie qu'à la mort, que pantois devant la qualité exceptionnelle des bribes de l'œuvre déjà réalisée dont ils avaient eu connaissance, alors qu'elle sortait à peine de l'adolescence. Trois ans après la mort du vénérable octogénaire qu'était Victor Hugo qu'elle admirait tant, ressentie comme une tragédie en France et en Europe, le destin dramatique de cette frêle et virginale jeune fille bouleversa l'opinion qui en avait pourtant à peine entendu parler. Les journaux français et roumains suivirent pas à pas la progression de sa maladie. Ses Promise à un prodigieux avenir, artiste et penseur, Iulia Hasdeu avait choisi la compatriotes la pleurèrent et de nombreuses villes de Roumanie lui dédièrent un lieu ainsi que l'attestent les plaques de rues portant son nom, que l'on découvre toujours. La jeune Roumaine laissa derrière elle deux volumes de poésie, deux de récits, impressions, pensées, études, deux de nouvelles, un de théâtre et légendes, nombre de lettres et exposés pleins de verve et d'intérêt, tous écrits en français, dès l'âge de huit ans, le principal de son œuvre étant réalisé entre quinze ans et sa disparition. "Comme écrivain, elle a vécu un demisiècle au moins!" s'exclama un de ses proches. Grandissant au sein d'une famille de culture francophone Iulia Hasdeu était née le 14 novembre 1869 à Bucarest, dans une famille appartenant à l'élite intellectuelle francophone et francophile roumaine. Son père, Bogdan P. Hasdeu, était un immense homme de culture, respecté dans toute l'europe, et considéré aujourd'hui comme le créateur de la philologie. L'enfant, fille unique, grandit entourée par la tendresse et l'attention de ses parents. Montrant des dispositions étonnantes, elle savait déjà lire à l'âge de deux ans et demi et commençait à réciter des petites saynètes en français et en roumain. A huit ans, elle parlait également l'anglais et l'allemand, achevait les quatre classes de l'enseignement primaire dans une école de garçons; à onze ans, elle en finissait avec le premier cycle secondaire, terminant première du prestigieux lycée pour garçons Sf. Sava de Bucarest. Dans le même temps, la fillette obtenait le prix du Conservatoire de musique. Dotée d'une mémoire fabuleuse et d'une intelligence exceptionnelle, elle connaissait le latin, le grec, l'hébreu, le sanscrit, dessinait, jouait du piano. Elle s'était mise à écrire des poèmes dès l'âge de huit ans, plutôt en roumain. Mais, deux ans plus tard, Iulia commença à privilégier le français. Sous sa plume, trottant agilement sur le papier, elle laissait libre cours à son inspiration, poésies, légendes, comédies, quatre romans pour enfants dans le style de la Bibliothèque rose naissant de sa fertile imagination. Respirer l esprit français comme l oxygène Iulia aimait bien la Roumanie" rappelait son père, après sa mort, en "Elle l'aimait du seul amour dont elle pouvait aimer: amour grand et pur, amour qui transpire et même déborde dans presque tout ce qu'elle a écrit; mais elle était - et je ne sais pourquoi - tellement Française par la tournure de son esprit et le tempérament de son cœur que, longtemps avant son départ pour Paris, avant même d'avoir pu prévoir que c'est là qu'elle fera ses études, dès l'âge de huit ans, en plein Bucarest, elle rêvait, elle pensait, elle écrivait en français. Pour moi, ça a toujours été une énigme. Elle avait eu à la maison des institutrice allemandes et anglaises; elle parlait très couramment l'anglais et l'allemand; et cependant, la leçon obligatoire ou bien la causerie d'exercice une fois terminée, aussitôt qu'elle saisissait la plume pour s'épancher à son gré, habituellement en cachette, elle sentait une espèce d'obsession irrésistible du français; et elle le maniait avec une facilité étonnante, tandis que chez nous, en famille, on ne causait presque jamais qu'en roumain". Et Bogdan P. Hasdeu de conclure: "Mais, puisque la France c'est la civilisation contemporaine dans l'acception la plus vaste du mot, ses citoyens sont partout: il n'y a point d'étranger pour elle. Ses ennemis même, quoi qu'ils fassent et quoi qu'ils disent, respirent l'esprit français involontairement, pour pouvoir vivre, comme on respire l'oxygène ". la jeune poétesse roumaine, également écrivain, s'est éteinte à la fleur de l'âge langue française pour exprimer son génie La première étudiante licenciée en lettres de la Sorbonne Devenue adolescente, sa soif de connaissance semblant sans limite, ses parents décidèrent de l'envoyer à Paris, sa mère l'y accompagnant. Iulia passa brillamment ses deux baccalauréats en français au collège Sévigné, à l'âge de seize ans, et s'inscrit à la Sorbonne où elle fut la première Roumaine à y être accueillie et la première femme à être licenciée en lettres, tout en suivant les cours de l'institut des Hautes Etudes. Très vite on remarqua cette étudiante douée d'une brillante culture, initiée en philosophie, histoire, linguistique, ethnographie, avec de brillantes aspirations encyclopédiques. Ses professeurs se montrèrent stupéfaits devant ses talents littéraires et d'artistes. Non seulement la jeune fille promettait de devenir une grande poétesse et écrivaine, mais elle montrait un don incroyable pour la peinture et le dessin. Iulia étudiait aussi le chant car elle avait une voix remarquable de mezzo-soprano et composait des morceaux de musique pour accompagner ses poèmes. Son éloquence fut aussi remarquée, si bien qu'elle fut conviée à donner deux conférences à la Sorbonne, sur la logique de l'hypothèse et le deuxième livre d'hérodote, alors qu'elle n'avait que 17 ans. Un des éminents adultes qui l'avaient côtoyée la décrivait ainsi: "Julie Hasdeu avait, avec tous ses dons naturels et acquis, une figure ouverte et agréable, une distinction naturelle, un noble caractère, un grand esprit, une vive intelligence, une force de pénétration étonnante, une âme douée, une sérénité constante, une nature délicate et poétique, et elle marchait dans la vie comme un beau rêve". "La vie moderne était trop étroite pour mon âme ardente" Gaieté franche, beauté sans apprêt, esprit sans recherche le comportement naturel de Iulia séduisait, mais ses proches se montraient particulièrement impressionnés par la profondeur de sa pensée qui leur semblait habitée par un vague pressentiment et n'avait rien à voir avec son âge: "La vie n'est qu'une rivière que nous traversons à la nage; celui qui atteint le plus vite l'autre rivage est le plus heureux", écrivait-elle dès l'âge de seize ans. La jeune fille s'enfermait dans des tête-à-tête avec ellemême, dialoguant sur l'âme et l'immortalité, se sentant à l'étroit dans sa condition humaine, griffonnant dans les marges des livres ses réflexions dont elle faisait rarement part et que ses parents découvriront après sa mort. Dépouillant alors ses manuscrits, collationnant ses brouillons, feuilletant page par page tous ses écrits, pendant des nuits, des jours, des mois, ils devineront, avec un certain effroi, l'univers dans lequel leur enfant approchait de sa fin, à la fois résignée et pleine d'espoir: "Ma patrie n'est pas de ce monde; mon Père Eternel m'a choisie pour le sacrifice humain; sur la terre je suis revenue du ciel, et j'y remonte voilée par le mystère. J'ai passé, j'ai vu, j'ai écouté. La Le refuge de Câmpina vie telle qu'elle est me dégoûte; j'ai souri en passant, mais tout ce qui autour de moi m'a frappée, m'a froissée. Que mes parents terrestres soient bénis pour tous les soins qu'ils m'ont prodigués, mais qu'ils cessent de pleurer pour moi; la vie moderne était trop étroite pour mon âme ardente; j'y étouffais, je cherchais les grands espaces lumineux; je les ai retrouvés et je vais y planer et y rayonner moi-même, au milieu du sourire immortel des âmes". Minée et emportée par la phtisie à dix-huit ans Iulia Hasdeu ne montrait aucun empressement à voir son œuvre publiée, contrairement à son père, fier de la voir continuer une lignée de quatre générations ininterrompues de gens de lettres: l'arrière grand-père de Iulia écrivait en polonais, le grand-père en russe, le père en roumain et elle-même en français. Pourtant la jeune fille, moldave par son père, transylvaine par sa mère et valaque par son lieu de naissance, se flattait d'être l'expression même de la Roumanie et de refléter la Dacie de Trajan toute entière. Elle se montra très fâchée quand son père, impatient et ayant mis la mains sur des poèmes qu'elle avait écris à quinze ans, les remit à un journal. Elle le sermonna et lui dit qu'elle ne voulait rien publier sous son nom et qu'un jour elle adopterait le pseudonyme de Camille Armand, sans en préciser la raison. Mais la maladie ne lui laissa pas ce loisir. Alors qu'elle préparait sa thèse de doctorat, travaillant d'arrache pied, douze à quatorze heures par jour, dans sa petite chambre de Paris, la phtisie la minait. Un mal pris à la légère par les médecins qui n'avaient su le détecter à temps. Ensuite, il était trop tard. Ses parents l'emmenèrent bien à la montagne, puis la ramenèrent en Roumanie, espérant que l'air du pays natal lui redonnerait des forces. Rien n'y fit. Iulia s'éteint à Bucarest dans les bras de ses parents, qu'elle s'efforçait de consoler, le 28 septembre Elle n'avait pas atteint ses dix-neuf ans. La tour du château de Câmpina, où le père de Iulia tentait de rentrer en contact avec l esprit de sa fille. 43

23 Musique Le groupe roumain le plus célèbre de tous les Phœnix renaît toujours temps fait partie du patrimoine du pays de ses cendres 44 Nicu Covaci Au début des années soixante, alors que les générations de jeunes occidentaux, issues du "Baby boom", jetaient par dessus bord les conventions étouffantes de leur société et mordaient dans la vie en s'enthousiasmant pour des formes d'expression incarnées par des groupes comme les Beatles et les Rolling Stones, la jeunesse roumaine ne restait pas à l'écart du mouvement. Avec un léger temps de retard, Phœnix a symbolisé cette forte aspiration au changement, dès 1962, pour devenir un phénomène national au début des années Le message du groupe musical était sans-doute moins direct dans sa contestation que celui exprimé par la génération hippy, son opposition à la guerre du Vietnam, son rejet des normes de la société, mais n'en avait que plus de force car, derrière le rideau de fer, l'exercice n'était pas sans risques. Toute remise en cause de l'ordre étant exclue, il fallait procéder à pas comptés et éviter tout faux pas. Le Pouvoir, à l'affût, ne demandait qu'à le provoquer, pour mettre un terme brutal au défi qui lui était jeté, là ou les sociétés capitalistes contestées misaient sur la patience et leur pouvoir récupérateur. Et il pouvait compter sur l'impatience et la passion inhérentes à la jeunesse pour arriver à ses fins. Là est tout le mérite de Phœnix, d'avoir su résister pendant près d'une décennie aux pressions et d'amener, grâce à son immense talent, des Phœnix doit son existence et sa réputation à son fondateur, Nicu Covaci. C'est ce jeune lycéen de 15 ans, de Timisoara, qui a donné naissance au groupe roumain de musique le plus populaire de tous les temps, et dont il est toujours le leader. C'est lui qui a su préserver son existence, résister aux pressions du régime, contournant ses interdictions. C'est encore lui qui a su renouveler son genre pour pouvoir continuer à défier le régime. Phœnix lui doit encore d'avoir pu renaître de ses cendres, alors que tous les membres du groupe étaient dispersés. Guitariste, chanteur, auteur-compositeur, Nicu Covaci a cependant bien d'autres cordes à son arc. Diplômé de la Faculté d'arts plastiques de Timisoara, il a montré qu'il avait aussi des talents d'artistes, devenant un peintre et un sculpteur renommé. Mais là encore, son tempérament de rebelle et de provocateur a repris le dessus. Durant son exil, chargé de réaliser une grande fresque murale pour la ville centaines de milliers de Roumains à suivre ses concerts et acheter autant de disques, tout en sachant que leur geste n'était pas innocent. Les pieds de nez d'un lycéen de Timisoara nommé Nicu Covaci Phœnix doit sa réputation, et en partie son existence à une personnalité incomparable, Nicu Covaci, son fondateur. A 15 ans, en il est né en ce lycéen participe à la naissance d'un groupe de musique à Timisoara, "Sfintii" ("Les Saints"). Le style moderne et occidental, les emprunts aux Beatles et autres formations à la mode de "l'autre côté", loin du "politiquement correct", dérange déjà les autorités ce qui n'empêche pas le groupe d'obtenir le second prix du festival national scolaire, dès cet été là. Le nom choisi par le groupe est déjà un pied de nez. C'est la première fois que les Roumains voient apparaître sur scène, puis sur leurs écrans de télévision, une bande de joyeux diables aussi peu conformistes. D'ailleurs, comme on leur reproche de faire de la "propagande mystique", ils en changent pour renaître immédiatement sous celui de "Phœnix", déconcertant leurs censeurs. Etudiant en arts plastiques, futur sculpteur et peintre de talent, Nicu Covaci a réuni plusieurs camarades. Le groupe fait ses compositions, passe indifféremment de la musique acoustique au violon, de la guitare électrique aux instruments à vent, utilise percussions, basses, s'éclate au rock, s'accompagne au chant. L'effervescence est grande. Filles, garçons, étrangers de passage, Allemands ou Hollandais, forment autour de lui une immense bande de copains où on discute ferme et où on rêve d'un avenir ouvert. Reprise en main par Ceausescu A Timisoara - ville émancipée d'où, ce n'est pas un hasard, partira la "Révolution de décembre Phœnix bénéficie d'un climat de complicité. Nicu Covaci, le rebelle des années allemande d'osnabrück, en Allemagne, sur un mur de 250 mètres de long et 8 mètres de large, et portant sur l'histoire de la cité, il y prévoyait d'y peindre des scènes représentant les chasses aux sorcières qui s'y étaient déroulées ainsi que les crimes commis par les SS. La commande lui avait été retirée Aujourd'hui, Nicu Covaci vit dans un village du sud de l'espagne, près de la Méditerranée, où il peint, sculpte, compose, et pratique la plongée sous-marine, revenant pour ses concerts en Roumanie. Universitaires, médecins, avocats, artistes, écrivains, metteurs en scène, ingénieurs rayonnent autour de lui, formant un cocktail intellectuel qui le rend suspect aux yeux du Pouvoir. Pourtant, il trouvera sur place, sinon un défenseur, du moins un observateur compréhensif, en la personne de Ion Iliescu, exilé par Ceausescu, comme secrétaire à la propagande du Parti communiste dans le judet. En 1968, alors que la jeunesse occidentale s'enflamme dans les manifestations et sur les barricades, Phœnix triomphe au festival national étudiant de Iasi, remporte le premier prix, il assoit sa réputation à travers tout le pays. C est l'apogée; le groupe profite d'une relative libéralisation du régime. Mais cette période va être d'une courte durée. En 1971, Ceausescu reprend les choses en main. Le dictateur, de retour d'un voyage lourd de conséquences en Chine, en 1972, exige que toutes les formes de l'art exaltent les véritables valeurs populaires de l'âme roumaine. Les écrivains seront les premiers à souffrir de cette mise au pas, notamment les prosateurs du "groupe onirique" (Dumitru Tsepeneag, Virgil Tanase) qui rejettent le dogme du "réalisme socialiste". Un changement de style qui fait enrager les autorités Nicu Covaci va, une nouvelle fois, défier le Pouvoir, en rusant. Malgré les fortes réticences de son groupe, il lui impose un changement radical de style. Phœnix se convertit à la musique ancestrale, voire aux rites païens, qu'il instrumentaliste de façon moderne, façon rock, un peu comme l'a fait Alan Stivel pour la musique bretonne, en France. Le succès est foudroyant et les autorités enragent. Elles cherchent la moindre faille pour réagir, n'hésitent pas à censurer. Mais, malgré toutes les coupures faites à l'époque, ce qui subsiste de cette musique demeure d'une grande qualité et a donné naissance à un nouveau genre musical. Le groupe s'empare des fortes légendes roumaines, désespérantes souvent, comme celle de maître Manole, interprète l'histoire du canari qui chante derrière les barreaux de sa cage, provoque avec "A l'ombre du grand ours", qui se dit "Urs" en roumain et auquel ses compatriotes ont vite fait de rajouter un second "s". Les textes évoquant la mythologie roumaine sont écrits par Serban Foarta, le traducteur de l'œuvre complète de Mallarmé en roumain, professeur de l'université de Timisoara, introduit au sein du groupe par l'intermédiaire d'un jeune ami. Des centaines de milliers de spectateurs se sont précipités aux concerts de Phœnix, mais à leur issue les musiciens n'empochent que 170 lei de l'époque, soit l'équivalent de 10 dollars alors que le salaire moyen était de 120 dollars. Le reste, comme une bonne partie de l'argent des disques, termine dans la poche de l'etat. A la télévision, on ne tolère le groupe que si les longues chevelures sont dissimulées en chignon, les barbes scotchées. Le Pouvoir a peur qu'il fasse des émules. Les pressions et mesures vexatoires deviennent intolérables. La fuite, caché dans une sono En 1972, le groupe se retire plusieurs mois dans les Carpates et revient avec un opéra-rock, "Cantafabule", inspiré des légendes animales, produisant un double-disque qui sera le plus achevé de son répertoire. Deux ans plus tard, Phœnix est invité au gigantesque concert de "Sarmizegetusa Dacica", dans les ruines de la capitale du roi dac, Decebal, près d'hunedoara, mais il est interdit de passage à la télévision, première mesure avant son interdiction définitive. En 1976, ne pouvant plus vivre dans ce climat de menaces et de terreur, Nicu Covaci jette l'éponge et s'enfuit en Hollande, caché dans l'emballage de la sono d'un orchestre. Le guitariste-chanteur, auteur-compositeur, revenu un an plus tard, réussira à faire sortir du pays les autres membres du groupe. Reconstitué, celui-ci tentera sa chance en Allemagne mais, après quelques succès prometteurs, dont un premier prix décerné par la "Deustsche Phonoakademie" en 1980, se séparera. Des publics enthousiastes pour la tournée des 40 ans Retrouvailles pour le groupe Le silence de Phœnix durera dix ans, les plus terribles qu'aient vécus les Roumains. Depuis la "Révolution" plusieurs de ses anciens membres ont reconstitué le groupe autour de son fondateur, le batteur Ovidiu Lipan Tandarica, le chanteur Mircea Baniciu, le violoniste et flûtiste Mani Neumann. Phœnix a effectué plusieurs tournées en Roumanie, y rencontrant le même succès, et aussi dans les pays voisins ou en Europe de l'ouest, enregistrant plusieurs CD. En 2002, à l'occasion du quarantième anniversaire de sa fondation, le groupe s'est produit devant des salles combles dans plusieurs grandes villes du pays, réunissant dans des ambiances extraordinaires des publics de plus de spectateurs, scandant des minutes entières son nom fétiche. A Bucarest, les "anciens", Costin Petrescu, Moni Bordeainu, Ioji Kappl, Tavi Colen, Alin Oprea, Bela Kamocsa, Lucian Cioarga, Eugen Tegu, avaient rejoint Nicu Covaci sur scène, alors que Gheorghe Zamfir se mêlait à la fête. Sexagénaires et plus jeunes ont chanté "la multi ani" ("Bon anniversaire"), alors que des enfants reprenaient en chœur des refrains composés quand ils n'étaient pas encore nés. Les larmes aux yeux, se souvenant de ses années d'exil, Nicu Covaci constatait que Phoenix appartenait déjà au patrimoine roumain. 45

24 Littérature Satires féroces et ironie mordante Caragiale, sans pitié ont assuré la célébrité au grand écrivain pour la bourgeoisie roumaine 46 Ion Luca Caragiale ( ) est considéré comme l'un des grands écrivains classiques roumains. Parfois comparé à Molière, il fait partie des auteurs les plus lus dans son pays, ses pièces, caricaturant le caractère prétentieux de la bourgeoisie de l'époque, sont jouées et rejouées et ses féroces saynètes font l'objet d'adaptations télévisées à succès. Après avoir fréquenté les cours du Conservatoire d'art dramatique de Bucarest, une ville qu'il découvrit seulement en 1868, Caragiale fit mille métiers pour vivre, devenu en outre soutien de famille, après la mort précoce de son père. Successivement souffleur, copiste, fonctionnaire, professeur, inspecteur de l'enseignement, patron de brasserie, restaurateur, il décrocha même le poste de directeur général des théâtres du pays, et donc du Théâtre national de Bucarest, en 1888, démissionnant dix mois plus tard, suite à des machinations visant à le discréditer. Car le jeune auteur n'était pas d'un caractère souple. Réfractaire à l'ordre établi, aux convenances, il votait en permanence pour les partis d'opposition, même s'ils lui étaient antipathiques. Ses nombreuses collaborations journalistiques et esquisses littéraires, s'étendaient aussi bien aux revues conservatrices que progressistes. Des succès qui tardent à venir En 1877, à 25 ans, Caragiale avait acquis une certaine notoriété en créant son propre journal "Natiunea româna" ("La Nation roumaine"), en pleine guerre d'indépendance contre les Turcs, mais ses succès littéraires tardèrent à venir. Plusieurs de ses pièces furent des échecs et certaines ne seront jouées que 30 ans plus tard. L'auteur s'imposa cependant, notamment par ses petits textes, qu'il appellait "moments", où son talent d'observateur social, la finesse avec laquelle il réduisait un événement aux dimensions d'une conversation de comptoir de bistrot ou de la vie quotidienne, faisaient merveille, donnant des instantanés historiques et de pittoresques cartes postales de la vie populaire. Collaborant à partir de 1899 à "Universul", ("L'Univers"), le quotidien le plus lu du pays, il y livra ses commentaires mordants d'ironie sur la vie publique. La crise financière y est vue à travers la conversation de trois mendiants, un attentat ourdi par "un complot bulgaro-macédonien" est l'occasion d'une fièvre journalistique digne des paparazzi d'aujourd'hui. Les efforts d'une mère, remontant toute une chaîne de relations pour éviter à son fils de redoubler, sont l'occasion d'une observation savoureuse, tout comme l'établissement d'un monopole d'état sur la tsuika, qui crée une effervescence révolutionnaire dans la capitale. "Le Roumain est blagueur avant d'être Roumain" Parallèlement, depuis 1893, Ion Luca Caragiale éditait une revue "Moftul român" ("La Blague roumaine") qui se voulait être la formule exacte de l'esprit roumain "car si le blagueur est éminemment roumain malgré tout, avant d'être Roumain, il est blagueur". Mais l'écrivain compléta le tableau social de la Roumanie urbaine, à la croisée des deux siècles, par des nouvelles dont l'action se passe dans le pays profond, où les esprits vivent encore dans un univers fait de religiosité et de superstitions. La satire laissa alors la place à la prose fantastique ou au drame réaliste. Se succédèrent O faclie de Paste ( Un cierge de Pâques, 1889) racontant l'affrontement effrayant d'un cabaretier juif et peureux et d'un brigand cruel, La hanul lui Un destin qui se croisera avec celui d Eminescu Né en 1852, à Haimanale (en roumain, "Les Vauriens") village perdu de Valachie qui porte aujourd'hui son nom, dans le département de Prahova, à une centaine de kilomètres au nord de Bucarest, le futur dramaturge passa une enfance sans problème à Ploiesti, toutefois marquée par l'influence de ses deux oncles, écrivains et auteurs de pièces. L'œil critique du garçon s'exerça vite à la satire dans cette ville tranquille où la petite bourgeoisie, dont était issue sa famille, faisait la pluie et le beau temps. En 1870, des politiciens y prirent le pouvoir et y instaurèrent pour quelques heures la République. Réprimée en douceur, après quelques agapes dans le jardin public, cette "révolution" dont le leader fit par la suite une brillante carrière à la cour du Roi, donna l'occasion au jeune homme d'immortaliser cette "République vigneronne". Mais déjà Caragiale avait montré ses dispositions pour l'écriture et le théâtre. Il y rencontra le poète Mihaï Eminescu, de deux ans son aîné, souffleur dans la troupe de son oncle Les deux jeunes gens, qui formèrent avec l'écrivain Ion Creanga ce que l'on appelle l'âge d'or de la littérature roumaine, resteront amis jusqu'à ce qu'une histoire de femme les rendent rivaux. Leurs destins se croiseront à plusieurs reprises, notamment au sein du journal "Timpul" dont il seront chroniqueurs, y retrouvant un autre écrivain de grand talent, Ioan Slavici. Mânjoala ("A l'auberge de Mânjoala") et La conac ("Au relais de poste") qui mettent aux prises un jeune homme avec les forces obscures. Napasta ("Le malheur") est un tableau d'une force dramatique, digne de Dostoïevski, mais aussi le portrait d'un étonnant Hamlet féminin. Mortifié par une accusation de plagia En 1901, Caragiale fut accusé par un obscur individu, nommé Caion, d'avoir plagié un auteur hongrois dans Napasta. Non seulement aucune preuve ne sera apportée par ce détracteur, mais on ne retrou - vera jamais trace de l'existence de cet écrivain soit-disant copié. Et Pourtant Caion sera acquitté au terme du procès en diffamation qui lui fut intenté. Pour Ion Luca Caragiale, membre de la prestigieuse société culturelle "Junimea" qui réu - nissait les plus grands hommes de lettres de l'époque autour de Titu Maiorescu, l'affront fut à la mesure du scandale énorme soulevé dans le monde littéraire. Profondément affecté, il en profitera pour quitter la capitale dont l'atmosphère balkanique lui pèse, un héritage lui permettant de s'établir définitivement, avec sa femme et ses enfants, à Berlin, en Son activité littéraire baissera alors sérieusement. L'auteur ayant perdu ses repères roumains sera longtemps sujet au mal du pays. Il écrivit encore quelques contes et surtout la nouvelle Kir Ianulea, transposition du thème de Belphégor dans le Bucarest commerçant et cosmopolite du XVIIIème siècle. "Après une vie trop amère, ne te bourre pas de confitures" A la suite de la grande révolte paysanne de 1907, dont la féroce répression fit plus de morts, Caragiale publia din primavara pâna-n toamna( Du printemps à l'automne"), essai de grande valeur sur la société roumaine et pamphlet contre son oligarchie. Caragiale mourut à Berlin en 1912, quelques mois après George Cosbuc, Elena Cosbuc, Alexandru Vlahuta, Vaida Voievod, Ion Luca Caragiale: une académie littéraire informelle, dont les membres se retrouvaient autour d une table. avoir refusé de participer aux célébrations que la Roumanie avait organisé en l'honneur de son soixantième anniversaire. "Après une vie trop amère, ne te bourre pas de confitures" avait-il écrit comme morale d'une de ses fables. Son fils, Mateiu Cargiale devait lui aussi devenir une écrivain réputé, mais dans un autre registre littéraire. Lettre d'information bimestrielle sur abonnement éditée par ADICA (Association loi 1901pour le Développement International, la Culture et l Amitié) Siège social, rédaction : 8 Chemin de la Sécherie, Nantes, France Tel.: , adica@wanadoo.fr Directeur de la publication:henri Gillet, Rédactrice en chef :Dolores Sîrbu-Ghiran Ont participé à ce numéro: Yves Lelong, Dodo Nita, Robert Bajrusi, Marie Verdier, Laura-Maria Ilie, Aline Fontaine, Pierre-Julien Pera, Grégory Rateau, Alain Salles, Clémence Houdaille, Bernard Camboulives, Paula Romanescu, Jasna Vukicevic, AlexandreLévy,.Impression: Helio Graphic-Docuworld Nantes, 2 rue Gutenberg ZAC du Moulin des Landes, Sainte-Luce sur Loire Cedex Numéro de Commission paritaire: 1117 G 80172; ISSN Dépôt légal: à parution Site : www//lesnouvellesderoumanie.eu Nouvelle formule Uniquement sur Internet Abonnement: 35 euros/an 10 euros pour les Roumains CHANGE* (en nouveaux lei, RON**) Euro = 4,56 RON (1 RON = 0,21 euro) Franc suisse = 4,20 RON Dollar = 4,09 RON Forint hongrois = 0,01 RON (1 euro = 309 forints) *Au 26/06/2017 ** 1 RON = anciens lei 47

25 48 Musique Près de cinquante ans après la mort de Georges Enescu - Enesco, en français - l'un des plus purs génies de la musique du XXème siècle reste méconnu, même des mélomanes. Violoniste hors pair, chef d'orchestre exceptionnel, pédagogue remarquable et pianiste talentueux On a peine à croire qu'un seul homme ait pu concentrer tant de qualités. Le génie du compositeur dépasse de loin la première Rapsodie roumaine, œuvre de jeunesse dont il regrettait la popularité. Plusieurs biographies lui ont été consacrées. Deux de ses admirateurs, Alain Chotil Fani et Marinela Nardin, ont conçu un riche site Internet qui rend hommage, d'une façon détaillée et rigoureuse, au plus grand musicien roumain qui a partagé sa vie entre son pays et la France. Brahms admiratif devant l'adolescent de douze ans Georges Enescu est né le 19 août le 7 dans l'ancien calendrier orthodoxe, alors en vigueur en Roumanie - dans le village moldave de Liveni-Virnav, rebaptisé à son nom depuis, situé à quelques kilomètres seulement du lieu de naissance de celui qui est considéré comme le dépositaire de l'âme nationale, le poète Mihail Eminescu ( ). Son père, Costache Enescu, administrateur terrien, de nature curieuse, a voyagé à travers l'europe et a appris le latin et le français. Il joue très convenablement du violon et dirige même à l'occasion des chorales. Sa La famille d'enescu était frappée d'une terrible malédiction: quatre enfants étaient mortnés, les sept autres étaient morts jeunes, le plus âgé ayant douze ans. Il est vraisemblable que Maria, la mère, transmettait la tuberculose à travers son lait. Le petit Georges échappera à ce sort grâce au guérisseur local qui conseilla à ses parents de le confier à une nourrice. L'activité de pédagogue a pris une L'un des plus purs génies de la musique femme, Maria, l'accompagne souvent à la guitare. Très rapidement le petit Georges manifeste des dons extraordinaires pour la musique. Il apprend à jouer du violon qu'on lui offre, devient l'élève d'un virtuose tsigane qui développe ses facultés en lui inculquant les rudiments de sa musique. Il donne son premier concert à l'âge de cinq ans. Son père le présente au compositeur Eduard Caudella qui le fait rentrer au conservatoire de Iasi, puis l'envoie à Vienne étudier avec des professeurs de renom. Tout juste âgé de douze ans, Enescu y rencontre Brahms, rendu vite admiratif, et fait partie rapidement de la vie musicale. Ses concerts enthousiasment la presse et le public. Il interprète tous les grands compositeurs du répertoire. A quatorze ans, en 1895, le jeune prodige prend la direction de Paris pour poursuivre ses études musicales, ayant comme professeurs Massenet, Gabriel Fauré et comme condisciples, Maurice Ravel, Roger Ducasse. L'adolescent est déjà un compositeur fertile, enchaînant quatre symphonies, ses premières oeuvres de musique de chambre, quelques mélodies, et surtout la suite symphonique Poèmes roumains. Avec Yehudi Menuhin, à droite, dont il sera l inspirateur. Une vie partagée entre la France et la Roumanie Paris est sous le charme. La presse l'a déjà surnommé "le nouveau Mozart" et le public attend avec impatience ses créations. A travers le monde, les plus grands interprètes, de Gustave Mahler, à Edouard Colonne l'inscrivent à leur répertoire. Mais le style d'enescu, de plus en plus élaboré, commence à les rebuter. L'octuor pour cordes (1900) consacre la rupture. Jugé trop difficile par Colonne, il est retiré des répétitions. A son cœur défendant, Enescu doit vivre de ses talents de musicien. Violoniste admirable, on le découvre aussi excellent pianiste et chef hors pair. Echappant à une terrible malédiction familiale place considérable dans la vie du compositeur. Son compatriote, Dinu Lippati, mort à 33 ans ( ), qui deviendra rapidement l'un des plus grands pianistes du siècle et dont les enregistrements font encore aujourd'hui le bonheur des mélomanes, sera son élève. Yehudi Menuhin ( ) lui doit sans aucun doute l'épanouissement de son génie de violoniste. Cet enfant prodige trouva en Enescu le maître qui Enescu, "Mozart" saura guider son évolution de la meilleure façon, le transcendera par son enseignement. Enescu lui inculqua aussi une solide culture humaniste qui trouvera une illustration exemplaire quand Menuhin, d'origine juive, prendra, après la guerre, la défense du chef allemand Furtwängler, accusé de collaboration avec le régime nazi, donnant plusieurs concerts sous sa direction. du XXème siècle, reste largement méconnu des temps modernes Il donne des concerts avec Pablo Casals, Gabriel Fauré, Richard Strauss. Il voyage à travers l'europe, jusqu'en Russie, revient dans son pays pour diriger les premières auditions de Wagner, l'intégrale de la neuvième symphonie de Beethoven, et ses propres compositions. Entre-temps, il a rencontré la femme de sa vie, la princesse Maruca Cantacuzino, et la rejoint pendant la première guerre mondiale à la cour royale de Roumanie, restant dans son pays pendant tout le conflit. Après 1918, le musicien reprend une existence partagée entre la France et la Roumanie, continuant à donner des concerts pour assurer son existence. Malgré son activité épuisante d'interprète, Enescu réussit à composer ce qui compte parmi ses œuvres les plus remarquables, la "troisième sonate pour violon et piano dans le caractère populaire roumain" (1926), l'opéra Œdipe ( ), les sonates pour piano ( ), la "troisième suite pour orchestre" dite "paysanne" (1938). Dès qu'il a aperçu Maruca Rosetti Tescani, Georges Enescu en est tombé profondément amoureux. Cette jeune femme, fascinante et mystérieuse, de trois ans son aînée, fille d'un boyard de Moldavie était la descendante d'un grand compositeur roumain, Mihail Jora. La scène se passait lors d'un récital que donnait le jeune prodige, alors âgé de 17 ans, à l'athénée roumain, la grande salle de concert de Bucarest, sous le regard de la reine Elisabeta qui l'avait pris sous sa protection. Elégante, distinguée, très belle, Maruca était l'une des trois étoiles de l'aristocratie roumaine, avec la reine et la princesse Martha Bibescu, ces femmes rivalisant d'esprit et de séduction. Timide, discret, Enesco taira de longues années sa passion dévorante pour Maruca, ne la revoyant que neuf années plus tard, en La jeune femme était devenue l'épouse du prince Mihai Cantacuzino, qui sera plus tard ministre de la justice, et par là, princesse. Le musicien, dont la flamme était intacte se contentera de la dévorer du regard et de l'appeler secrètement "Printesa iubita", Princesse aimée. Malgré la naissance de deux enfants, le couple Cantacuzino battait de l'aile. Lui était un politicien ambitieux, coureur de jupons, ayant même une aventure avec la sœur de Maruca. Elle, fantasque, capricieuse, passait de l'abattement à l'exubérance, était affectée de pulsions suicidaires, croyait à la magie et au spiritisme. Transformé en musicien de la cour pour voir sa princesse Exproprié par les communistes il se réfugie à Paris Quand la Seconde guerre mondiale éclate, le musicien se réfugie à nouveau dans son pays natal. Il s'investit pleinement dans la vie musicale bucarestoise, se montre un défenseur infatigable de la musique contemporaine roumaine, jouant des œuvres de Constantin Silvestri, Mihail Jora, Ionel Perlea, Martian Negrea, Sabin Dragoi. Après guerre, Enescu donne des concerts avec ses amis David Oistrakh, Lev Oborin, Emil Ghilels, et avec ses ancien élèves, Yehudi Menuhin et Dinu Lipatti. Mais, en 1948, le régime communiste roumain nationalise une grande partie de ses biens. Il s'exile définitivement à Paris. Bien que Français de cœur, il gardera toujours la nationalité roumaine, par fidélité pour son pays natal. Enescu est alors âgé de 68 ans. Son jeu de violon devenant incertain, il prend la baguette de chef d'orchestre. En 1954, il compose sa "symphonie de chambre pour douze instruments solistes", puis s'éteint le 4 mai 1955, à l'âge de 74 ans. Le musicien est enterré au cimetière du Père Lachaise, à Paris. Sur sa tombe figure seulement son nom, ENESCU. L'amour fou du compositeur pour Maruca, princesse Cantacuzino Finalement, Enescu et sa belle princesse deviendront amants à la fin 1914, près de 16 ans après leur première rencontre. Il a 33 ans et elle 36. Pour se rencontrer plus librement, le compositeur devient "musicien de la cour" au palais Cantacuzino - aujourd'hui musée Enescu - une situation qu'il vit péniblement, devinant derrière son dos tous les commérages de la bonne société bucarestoise. Puis, pendant la première guerre mondiale, il rejoint Maruca à Iasi où la cour royale s'est réfugiée, Bucarest étant occupée par les Allemands. Leur liaison ne peut s'afficher au grand jour qu'après 1928, lorsque le prince Cantacuzino meurt dans un accident de voiture. Mais la princesse s'est amourachée d'un philosophe de renom, de 13 ans son cadet, Nae Ionescu, qui deviendra l'inspirateur de Eliade, Emil Cioran, Constantin Noica. Fidèle et patient, le compositeur attendra encore six longues années pour qu'enfin Maruca soit définitivement à lui. Elle a 56 ans, lui 53. Plus tard, ils se marieront, elle, conservant son titre de princesse Cantacuzino. Enescu remuera ciel et terre pour rendre heureuse sa femme, attentif lors de ses dépressions et désordres psychiques, donnant des concerts jusqu'à l'épuisement pour assurer son train de vie, répondre à ses caprices. Réfugié à Paris, le couple habitera dans un petit appartement de la rue de Clichy, où mourra Enescu. La princesse passera ses dernières années dans un hôtel de luxe sur les bords du lac de Genève, décédant 13 ans plus tard, à 90 ans. Elle est enterrée aux côtés du compositeur. Sur la plaque de son tombeau, figure simplement la mention "Maruca Enescu, née Rosetti Tescani". La princesse a oublié son titre, rendant enfin hommage à celui qui l'a vraiment aimée. 49

26 Peinture Epris de nature et de lumière Nicolae Grigorescu a été Une rapsodie de le premier peintre de son pays de dimension européenne la terre roumaine 50 Autoportrait du peintre. Ni c o l a e Grigorescu ( ) est aujourd'hui considéré comme le plus grand peintre roumain, car il a donné une direction à la peinture de son pays, l'a émancipée de l'académisme étroit et conventionnel. Un de ses compatriotes dira : "Grigorescu est apparu alors que ses compatriotes dormaient. Il admirait et rassemblait autour de lui les beautés. Sa peinture était comme une exclamation d'étonnement devant la lumière et la nature. Il nous a appris à les regarder et transposer directement les sensations perçues par l'œil". Grigorescu s'enivrait du plein-air. La lumière, la couleur et la tendresse de la nature l'absorbaient. Il était enthousiaste, lyrique et optimiste mais n'idéalisait, ni ne poétisait. Il filtrait tout simplement, choisissait les motifs qui correspondaient le mieux à sa sensibilité. "Il y a peut-être des imbéciles qui croient que l'on peut retoucher l'œuvre de la nature, mais ceux-là ne sont pas des artistes. Moi je choisis, je ne corrige pas" s'exclamait-il. Avec lui commença la peinture Peintre des paysans", Nicolae Grigorescu réalisa des centaines de tableaux, dont 63 sont consacrés à des bœufs. Parmi eux, les célèbres Car cu boi, où l'on voit des charrettes tirées par des bœufs menés par des fermiers et leurs aides. Pour conduire l'artiste au cimetière, ses amis et les habitants de Câmpina, où il passa la fin de sa vie, choisiront symboliquement cet équipage. Loin de son pays, le peintre avait été profondément marqué par un autre univers rural et ancestral, la Bretagne. En 1876, la curiosité et le hasard l'avaient conduit vers une petite ville pittoresque et médiévale, Vitré. Le peintre y discerna le rythme languissant de la vie provinciale de l'époque, où tout était attente, contemplation. Il rendit admirablement cette atmosphère dans Intérieur à Vitré, où l'on voit une vieille femme, perdue dans ses pensées, égrenant les heures dans une maison où elle a passé toute sa vie, tricotant dans la lumière éclatante que laisse entrer sa porte. roumaine moderne à laquelle il apporta le souffle révolutionnaire de l'école de Barbizon et le goût pour la nature, au-delà des murs de l'académie des Beaux-Arts et de l'atelier. Premier peintre roumain de dimension européenne, Grigorescu facilitera le chemin de son art dans son pays, offrant à ses successeurs l'occasion de l'approfondir. Son ami, l'écrivain Alexandru Vlahuta ( ), dira de lui que son œuvre était "une rapsodie de la terre roumaine". A douze ans, l'enfant peignait des petites icônes qu'il vendait dans les foires pour aider sa mère Nicolae Grigorescu est né le 15 mai 1838 dans le village de Pitaru, dans le département de Dambovita. Sixième et avant-dernier enfant d'une famille pauvre, il n'avait que cinq ans quand son père mourût. "C'est de son travail de couturière que notre pauvre mère nous a élevés. Et je ne l'ai jamais entendue se plaindre" confia-t-il plus tard. "Elle s'est efforcée,la pauvrette, à apprendre seule à lire et à écrire pour pouvoir nous enseigner le peu qu'elle savait". La famille s'était réfugiée chez une tante, dans un quartier miséreux de Bucarest. A dix ans, l'enfant commençait son apprentissage chez un artisan d'icônes. Deux ans plus tard, il quittait son maître et se mit à son compte, peignant de petites icônes qu'il vendait dans les foires. "Dieu quel bonheur après ma première réussite! J'avais gagné quelques sous, et quand je les donnais à ma mère, elle me regarda et me demanda, inquiète, d'où venait l'argent, car j'avais travaillé en cachette. Lorsque je le lui appris, elle m'embrassa, voulût dire quelque chose, puis se retourna vers la fenêtre pour cacher ses larmes. Ce fût, peut-être, le plus beau jour de ma vie" se rappelait avec émotion l'artiste. Chariot à boeufs, sujet de prédilection du peintre. Les visages des villageois remplacent ceux des saints Pendant près de dix ans, de 1852 à 1861, le jeune peintre prit le chemin des monastères, accompagné parfois de son frère aîné, Ghita, peignant fresques et icônes, parcourant le A la rencontre de la Bretagne Il est peu probable que Grigorescu ait peint un autre tableau avec autant de chaleur et de poésie. L'artiste était si satisfait de son travail qu'il en donna trois versions. Cette étape fût peut-être le moment suprême de la carrière du peintre qui poursuivit son voyage vers l'océan où il fût fasciné par son immensité toujours changeante et sa rencontre avec le rivage. De cette découverte résulta une série de marines impressionnantes, sans pareil dans la peinture roumaine. département de Prahova, puis la Moldavie. A Agapia (Neamt), il affirma son tempérament en remplaçant les traditionnels visages des saints par ceux des paysans des villages voisins, peignant le paysage de la région, et se représentant lui-même sous les traits de Saint Daniel ce qui ne sera découvert par les spécialistes qu'un siècle plus tard. Passant sur les lieux, en 1861, le ministre de l'instruction publique, Mihaïl Kogalniceanu, remarqua le talent exceptionnel du jeune peintre et lui obtint une bourse de huit ans pour aller perfectionner son art à Paris, jusqu'en Quelques années auparavant, un hobereau à la solde des Turcs lui avait refusé ce privilège, sous prétexte qu'il n'avait pas d'éducation. Mais les temps avaient changé et l'avenir se montrait prometteur. En 1859, Grigorescu s'était enflammé pour l'union de la Moldavie et de la Valachie, prémisse de la réunion de toutes les provinces roumaines et de l'indépendance, passant des nuits à réaliser des dessins à sa gloire. A 23 ans, quarante ans avant un illustre compatriote, pauvre comme lui, le sculpteur Constantin Brancusi, Nicolae Grigorescu prît le chemin de la France et de sa capitale. A Barbizon, dans la forêt de Fontainebleau, le jeune artiste découvrit l'école du plein-air Admis à l'ecole des Beaux Arts, fréquentant le Louvre et le Luxembourg, travaillant dans l'atelier d'un peintre académique, Sébastien Cornu, le Roumain se lassa cependant vite du conformisme qu'il y décelait. Il était attiré par d'autres artistes, souvent jeunes et inconnus du grand public, rencontrés au village de Barbizon, dans la forêt de Fontainebleau, avec lesquels il sympathisait. Le jeune homme aux yeux brillants renonça aux études classiques et devint l'apprenti d'un cénacle qui révolutionna la peinture, la sortant de la pénombre des ateliers pour la mettre en relation directe avec les secrets de la nature En quelque sorte l'école du plein-air. Il y reçut les conseils de Rousseau, Corot, Millet, Daubigny. De cette période, la plus enrichissante de sa carrière, mais aussi la plus studieuse, naîtront des œuvres le plaçant sur un pied d'égalité avec ses maîtres. Grigorescu participa aux grandes expositions annuelles de Paris, y recevant une médaille d'or. Napoléon III lui acheta deux œuvres. En visitant un salon, l'empereur, qui avait fait beaucoup pour aider à la naissance de la Roumanie, lui demanda l'origine de paysages figurant sur ses toiles. "Majesté, c'est mon pays" lui répondit fièrement l'artiste roumain. Peintre des paysans et de la Guerre d'indépendance De retour chez lui, en 1869, Nicolae Grigorescu qui avait sollicité en vain un poste de professeur à l'ecole des Beaux Arts de Bucarest, consacra une grande partie de son œuvre à peindre le milieu rural, y gagnant la réputation de "peintre des paysans". Il voyagea en Moldavie, puis en Turquie, Italie, Grèce. Mais en 1877, la Guerre d'indépendance contre les Turcs le ramena au pays. A la demande du gouvernement, l'artiste partit, avec d'autres collègues, comme "peintre au front". Aux premières loges des batailles, il dressa des esquisses, qu'il concrétisera plus Paysanne de la région de Muscel (Arges). tard avec plus de 60 œuvres, dont la célèbre "Attaque de Smârdan", qu'il achèvera seulement en Dans ses tableaux de guerre, Grigorescu voyait la masse et non les détails, les soldats et non les officiers. Dans l'assaut des troupes, il n'avait guère le temps de chercher une pose pour quelque "héros d'atelier". Le peintre admirait et glorifiait les gens du peuple. Plus tard, ses yeux se rempliront de larmes, chaque fois qu'il se rappelerait leur bravoure. Se mettre à l'abri du besoin pour ses vieux jours Pendant les quinze années suivantes, le peintre partagea son temps entre son pays et la France, où des séjours en Bretagne, notamment à Vitré, lui donneront l'occasion d'affirmer de manière éclatante son style et de réaliser quelques unes de ses toiles les plus marquantes. Sa notoriété grandissait en Roumanie. Pourtant Grigorescu restait modeste, ne cherchant pas les louanges des critiques d'art. "Quand je serai mort, vous direz ce que vous voulez" leur lançait-t-il. Son autorité, établie désormais chez ses compatriotes, permit cependant à l'art indépendant de s'affirmer, au détriment de l'art officiel. Son talent commençait à être reconnu en Europe. L'artiste peignait beaucoup. Il lui arriva même de vendre deux cents tableaux au cours d'une seule exposition. Grigorescu se rappelait l'enfance pauvre du petit Nicolae et voulait mettre de l'argent de côté pour ses vieux jours, s'achetant une maison à Câmpina, dans la vallée de Prahova. Il se plaignait que l'etat ne l'ai pas aidé en lui attribuant un atelier, même petit, ce qui l'obligeait à produire des toiles pour cent lei, afin de vivre, et l'avait empêché de se consacrer à des œuvres plus talentueuses. Nicolae Grigorescu se fera construire lui-même son atelier, attenant à sa maison, devenue aujourd'hui musée. Mais il n'en profitera pas. Il mourra quelques mois plus tard, le 24 juillet 1907, à l'âge de 69 ans. Le peintre projetait alors d'acquérir une grande roulotte et de partir à la découverte de son pays, cheminant avec deux amis écrivains, afin d'en ramener toiles et romans. 51

27 52 Cinéma California Dreamin a fait l'évènement à Cannes, en mai 2008, en remportant le prix de la catégorie "Un certain regard", alors que "4 mois, 3 semaines et deux jours" de Cristian Mungiu recevait la Palme d'or. Dans ce film, distribué depuis fin octobre en France, le réalisateur Cristian Nemescu, disparu tragiquement à l'âge de 27 ans dans un accident de voiture en août 2006, donne une nouvelle preuve de la vitalité et de l'inventivité du nouveau cinéma roumain. Le style caustique du cinéaste se déchaîne ici dans le cadre d'une petite ville plouc, Capâlnita, où un convoi de l'otan en route pour le Kosovo, en 1999, est immobilisé. A son bord, une escouade de marines américains bloquée par Doiaru - interprété magistralement par l'acteur Razvan Vasilescu - un chef de gare qui, bien que n'étant qu'une fripouille notoire, s'entête à réclamer aux passagers et à leur cargaison des papiers en règle. La présence des Américains commandés par le capitaine Doug Jones - Armand Assante - met le village en émoi. Les jeunes filles se jettent sur cette viande fraîche tandis que le maire s'active pour plaider auprès de ses hôtes forcés, bloqués pendant cinq jours, la cause touristique de sa commune. Un mélange de joie générale et de gabegie collective plane en permanence sur ce petit monde. Un cabochard patriote Le chef de gare qui a bloqué un convoi de l'otan pendant la guerre du Kosovo existe bel et bien La vraie histoire de "California Dreamin" Cristian Nemescu, en discussion avec Armand Assante, a attendu pendant un an que l acteur soit libre pour commencer le tournage de son film. Florin Patracioiu, le vrai chef de gare, regarde son personnage, interprété par Razvan Vasilescu. Ce film picaresque, véritable tranche de bonheur, est inspiré d'un évènement authentique, survenu le 3 juin Ce jour là, par une chaleur suffocante, le chef de gare de Pielesti - Capâlnita dans le film - un village de quatre rues à la sortie nord de Craiova, a refusé de laisser passer un convoi de l'otan, tant que ses papiers n'étaient pas en règle. Cet incident a fait la une de tous les médias roumains, alors que le pays implorait son entrée dans l'organisation de défense militaire et qu'il paraissait invraisemblable de contrarier ne serait-ce-qu-un peu le bon vouloir des Américains. Le cabochard chef de gare s'appelait Florin Patracioiu (Doiaru), 51 ans. Dans une interview récente, celui-ci a précisé que le train était beaucoup plus long que celui du film, comportant 18 wagons dont deux réservés aux passagers américains et dotés de l'air conditionné. Mais surtout, le convoi n'avait été bloqué que pendant quatre heures. Pendant ce laps de temps, Florin Patracioiu avait reçu de nombreux coups de téléphone de ses supérieurs, des autorités régionales, de Bucarest, le menaçant de le mettre à la porte. Mais le chef de gare à la fibre patriotique sensible répondait invariablement et de manière désarmante: "Comment voulez-vous que je les laisse passer? Ils n'ont pas de papiers ". Vodka mais pas russe pour les Américains Le Roumain s'était montré cependant courtois avec ses "invités". Il leur avait offert une vodka qu'ils avaient refusé parce qu'elle était russe. Il avait suffi qu'il en change l'étiquette pour qu'ils vident la bouteille. Leur chef, le major Jeff Thompson, avait finalement pris son mal en patience. Finalement, des chefs douaniers, accourus de Bucarest, avaient apporté les documents demandés, Patracioiu vérifiant avec attention qu'ils portaient bien les tampons salvateurs et donnant le feu vert au départ du convoi. Le chef de gare note toutefois quelques différences avec le film. Dans la réalité, le maire de la ville n'a joué aucun rôle dans l'affaire. Contrairement à l'histoire portée à l'écran, il n'a pas une fille, Monica, qui n'a qu'une envie, "se tirer du bled avec un Américain pour ne pas pourrir sur pied ", mais deux garçons. Même s'il rit aujourd'hui de cette approximation, l'actrice - Mariana Marilescu - ayant interprété son rôle, lui étant tombée dans les bras quand il l'a rencontrée, l'appelant "Papa". La seule chose que Patracioiu n'ait pas digéré, c'est d'avoir été présenté comme un mafieux, un corrompu. Invité à Bucarest à la première du film, il n'a pas décoléré, déclarant que "jamais de sa vie il n'avait pris un bakchich ou reçu un leu" pour finalement pardonner au metteur en scène: "Je le comprends, çà faisait mieux dans l'histoire". Menacé par Basescu, puis recevant une prime "pour avoir fait son devoir" Finalement, Florin Patracioiu est très content d'être devenu un héro par procuration. Il a même donné une suite au film, regrettant que Cristian Nemescu n'ai pas pu la tourner: au retour des Américains, le chef de gare a à nouveau bloqué leur convoi, mais cette fois-ci pour deux semaines et toujours pour le même motif, ne cédant pas aux injonctions du ministre des Transports de l'époque un certain Traian Basescu. Finalement le convoi a pu repartir, ses papiers étant en règle, mais après avoir payé plus de dollars de taxes Cédant à la pression médiatique, le gouvernement a accordé à Florin Patracioiu trois mois de salaires supplémentaires "pour avoir fait son devoir". Histoire Carol II est un roi très controversé, beaucoup plus impopulaire en Roumanie qu'à l'étranger. Les Roumains retiennent surtout ses frasques, leur mémoire sélective ayant été aidée par la propagande du régime soviétique. Les historiens ont un jugement nettement plus nuancé, prenant notamment en compte la situation géopolitique du pays à l'époque, enserré entre deux mastodontes sanguinaires dont il avait tout à craindre, l'allemagne nazie et l'urss, et abandonné par ses alliés, au premier rang duquel, la France. Dans son passionnant ouvrage, Le roi trahi*, qui fait revivre avec intensité la Roumanie de l'entre Deux guerres, Lily Marcou rend justice à un homme à bien des égards déroutant, et particulièrement moderne. Le souverain avait ainsi reconstitué une Roumanie en miniature pour l'éducation de son fils, qui allait devenir le futur roi Michel. Un des quatre survivants de l'époque, âgé aujourd'hui de 87 ans, a rappelé aux journalistes cette initiative inédite. Carol II ne voulait pas que son fils soit élevé comme l'étaient les autres princes héritiers d'europe, coupés du monde, enfermés dans un palais, loin du peuple, confiés à des gouvernantes et professeurs particuliers leur enseignant les langues étrangères, les préparant aux principes de la gouvernance, à la découverte des milieux qu'ils seraient appelés à diriger, comme l'armée, la diplomatie, etc. Au contraire, Carol II jugeait indispensable que le futur souverain ait une connaissance charnelle du pays, dans ses profondeurs. Des pauvres, des riches, des paysans, des citadins, des ouvriers, des ingénieurs, des intellectuels, des minorités, de la population des différentes provinces, de la capitale, des étrangers vivant dans le pays. Avec des fils de paysan, facteur, avocat, officier Carol II avait reconstitué une Roumanie miniature pour l'éducation de Michel, son fils et héritier Sur les bancs de l'école avec le Roi Clasa palatina Carol II au cours d un camp d été avec son fils et ses camarades En 1932, alors que Michel avait onze ans et terminait ses quatre années de classe primaire, où il avait étudié à la manière classique des princes, confié au professeur Nicolae Saxu, son père chargea une commission d'arpenter en long et en large le pays pour dénicher des élèves du même âge qui deviendraient ses camarades de classe pendant les huit années de lycée qui l'attendaient. C'est ainsi que ce qu'on a appelé "la classe palatine" a ouvert ses portes le 30 janvier 1933, avec neuf élèves. Pendant huit ans, jusqu'en 1940, le futur roi y côtoiera des enfants de Bucarest, du Banat, de Bucovine, de Transylvanie, de Moldavie, des Allemands de Brasov, des Hongrois de Târgu Mures. Les uns étaient fils d'industriel, de diplomate, d'écrivain, d'officier, d'avocat, de libraire, d'instituteur, de prêtre, d'autres de facteur, d'agriculteurs, de mécanicien de locomotive. Certains furent remplacés car ils ne faisaient pas l'affaire. La classe comporta jusqu'à treize élèves. Carol II avait demandé au grand écrivain Nicolae Iorga, considéré comme le "plus grand puits de connaissance de l'époque", de réfléchir au programme. L'enseignement était dispensé par des historiens, géographes, philologues, philosophes, scientifiques, particulièrement réputés. Le premier trimestre se déroulait invariablement à Sinaia au château de Peles, jusqu'à Boboteaza, l'epiphanie orthodoxe, au tout début de janvier. Puis les élèves prenaient le chemin d'un pavillon du palais royal de Bucarest, l'enseignement étant intégré à celui du collège national Sfântu Sava. Le roi s'était fait aménager un bureau avec pupitre dans la classe pour pouvoir assister aux cours et avait passé comme consigne que son fils soit traité comme les autres élèves. A la fin de l'année, pendant l'été, les élèves partaient avec leurs professeurs pour une "tournée de synthèse" et de révision de ce qu'ils avaient appris. Ce voyage les emmenait à travers tout le pays à la découverte des endroits où s'étaient déroulées les grandes batailles, des châteaux, des monastères, des musées, des places fortes, des sites archéologiques, industriels, miniers, des lieux de naissance des écrivains, personnalités historiques. Cette éducation ouverte, originale et très moderne pour l'époque, aurait été complète s'il ne lui avait pas manqué l'élément féminin... C'est-à-dire la moitié de la population. * Lily Marcou, Le roi trahi, Carol II de Roumanie, éditions Pygmalion, 2002, 22,50 53

28 Vie artistique Le chant populaire roumain Maria Tanase, porté à un niveau inégalé la "Maiastra" 54 Ma r i a T anase ( ) reste dans le cœur de ses compatriotes comme la plus grande chanteuse roumaine de tous les temps. La poétesse Paula Romanescu nous raconte la légende de celle dont son impresario, Gaby Michaïlescu, aujourd'hui âgé de 90 ans et auteur sa biographie dit : "Elle n'avait pas d'égal. ( ) ; Elle venait de très loin, du tréfonds du temps, de l'âme roumaine commencement et fin du chant ". C'était le 25 septembre Dans la famille de Ion Coanda Tanase un bébé venait au monde. Son nom: Maria. On ne l'attendait pas trop. Deux autres enfants - Aurica et Franz- Stephane - pesaient lourd dans le budget d'ana et Ion Coanda Tanasa, fleuristes de Dealul Piscului, non loin du Parc Carol de Bucarest. Si le père ne voulait que mieux cultiver son jardin (pour montrer au fleuriste belge Vermeulen, fournisseur du Roi de Roumanie, qui fut son maître et, aussi parrain de ses enfants que son amour pour les fleurs peut faire de lui, sinon le plus important marchand de quatre saisons, au moins l'un des plus grands), la mère, Ana, elle voulait voir grandir ses enfants sous le toit de leur maison, en paix et amour. Dans sa voix, toute l'âme roumaine Ion Coanda Tanase était originaire d'oltenia (en Valachie). Ana Muntean-Tanase venait de Transylvanie, du pays de Fagaras. Par delà des montagnes, les deux provinces roumaines se donnaient la main une fois de plus par l'union de ces deux êtres humains qui furent les parents de la plus grande représentante de la musique populaire roumaine, Maria Tanase. L'enfant blonde aux yeux verts grandit parmi les fleurs et chou-fleurs de Livada cu duzi, dernière propriété de ses parents. Les affaires de la famille Tanase allaient de mieux en mieux. On engagea beaucoup de laboureurs pour les travaux dans le jardin de légumes et des fleurs. La petite môme était toujours parmi ceux-ci, à écouter leurs chants. L'un d'eux ne faisait que répéter comme une litanie un brin de mélodie sur deux vers ; "Feuille verte, feuille jaune / Emporte-moi, bercemoi encore ". Le soir, autour de la table, assise sur les genoux de son père, Maria se mettait à chanter sans se faire prier. La petite voix avait quelque chose d'intraduisible, comme si toute l'âme roumaine y voulait trouver écho. Et le temps passa. Maria était devenue une très belle adolescente, dont le regard de feuille verte enivrait tous ceux qui y noyaient leurs yeux. Elle n'avait que seize ans lorsqu'un jeune médecin perdait sa tête sous ses charmes. Mais il allait la retrouver assez vite pour convaincre Maria, déjà enceinte de lui, qu'elle devait renoncer à l'enfant. Maria le fit. Jamais depuis elle n'aura plus d'enfant. Ses lamentations (bocete) déchirantes trouvèrent dans la musique de la vibration jamais entendue. Elle était très belle. Dans ses yeux il y avait du soleil, dans ses cheveux noirs-bleu il y avait de la nuit, son corps mince paraissait un roseau s ous le vent, ses "mille dents " - perles de rivière de hautes montagnes, sa voix cri, murmure, éclat, prière, malédiction d'un indicible charme, où la nature entière se retrouvait Premier succès avec "Noce tsigane" C'est à Harry Bauner - folkloriste réputé - que Maria Tanase doit ses premiers pas dans la carrière d'interprète du chant populaire. Son "premier répertoire" comptait trois chansons: "Of zac" ( Ô je languis ), "Geaba ma mai duc acasa" ( A quoi bon rentrer chez moi ) - chanson qu'elle a entendu à un enterrement dans son quartier de Livada cu duzi - et "Târâisul sarpelui" (la reptation du serpent, celui qui Une artiste généreuse et femme de cœur Maria Tanase est née à Bucarest en Dans son enfance, elle a appris de ses parents d'origine paysanne, de nombreuses chansons populaires. Elle enrichit également son répertoire de mélodies provenant des différentes régions du pays. Artiste éclectique, Maria Tanase pratiqua aussi le théâtre de drame, la comédie musicale, l'opérette et le genre revuistique. Elle composa également des chansons folkloriques originales, tant en mélodie qu'en versification. Alors qu'elle n'avait pas atteint cinquante ans, la maladie mit fin, en 1963, à la vie de cette artiste qui sut allier l'originalité à l'authenticité. L'artiste a toujours regretté de ne pas avoir d'enfant. Trois ans avant sa mort elle adopta une adolescente rencontrée à Timisoara et dont elle s'occupa, espérant lui léguer son héritage artistique. Maria Tanase était mariée, mais son mari, joueur invétéré, fréquentant assidûment les hippodromes, était toujours à court d'argent et vivait dans son ombre. Son grand amour, elle l'avait rencontré pendant la guerre, chez un Français, Maurice Nègre, qu'elle cacha chez elle, alors qu'il était recherché par les nazis. Risquant sa vie pour lui, elle vendit son piano, son manteau de fourrure, ses solitaires pour qu'il puisse regagner clandestinement la France, où il devint plus tard chef du service de presse du Général De Gaulle mais parût ne plus se souvenir de l'immense service qu'elle lui avait rendu. trahit l'amour), cueillie de Fagaras. Un premier disque avec "Noce tzigane" eut un grand succès. La troupe de variétés "Carabus" de Constantin Tanase, un homonyme, parut être à Maria le meilleur tremplin pour mieux s'imposer dans le monde de la scène. Le grand Tanase commença par lui changer de nom: Elise Lamé et, pour le second spectacle, Mary Athanasiu. Pour quelle raison? Il n'y avait pas de place pour deux Tanase sur la même scène Marie salua et s'en alla avec un "On verra, cher maître ". Et on l'a vu Payée royalement offrant tout La maison de disques "Columbia" envoya Maria à Vienne pour l'enregistrer. De retour en Roumanie, elle alla chanter à la radio, et dès lors, son nom, sa voix s'imposèrent. Elle chantait comme on respire. L'accompagner était très difficile. Mironel Soarec, l'accompagnateur d'enesco et de Jacques Thibaud, fut le seul à pouvoir suivre le "chemin" de son chant à travers le pays. Tour à tour, Leonida Petrescu, Dinu Serbanescu et Farâmita Lambru furent ses accompagnateurs. Sa générosité était proverbiale. Maria était payée royalement, mais elle offrait tout, avec une joie de voir les gens contents autour d'elle. Fleuristes, cochers, malades, amis, soldats, danseuses, chefs d'etat dont les femmes ne pouvait plus détacher leur regard du costume populaire de l'interprète (Tito entre autres), étudiants, etc., tous trouvaient en Marie un Mécène. "On n'a vraiment que ce qu'on donne", voilà la seule philosophie qu'elle connut. Elle fumait énormément, des cigarettes roumaines très fortes, et ne buvait jamais. Les chansons qu'elle interprétait, que ce soit de Transylvanie, de Moldavie, d'olténie, ou d'un passant inconnu, sont des "sculptures" de son et d'harmonie, d'une extraordinaire originalité. Rappelons aussi que la romance "Pasarica, muta-ti cuibul" ( Petit oiseau, change de nid ) lui appartient: musique, paroles, et sa voix. Le roi de l'aluminium à ses pieds A Londres, Maria Tanase se présenta un jour devant un grand professeur de canto pour en prendre des leçons. Subjugué par la beauté de la jeune Maria, il comprit n'avoir rien à lui apprendre. Le "Très Haut" lui avait tout donné pour le chant. Toute intervention ne pouvait que nuire. Un milliardaire, Ben Smith de son nom, le roi de l'aluminium, mit à ses pieds toutes ses promesses, un consistant chèque, et les scènes les plus grandes de la planète, mais Maria avait besoin de ses racines, de ses Roumains. Qu'elle chantât dans un petit bistro de quartier, ou à New York, à Paris, à Ankara, dans un village perdu de Carpates, son chant devenait cathédrale, colonne sans fin et oiseau dans l'espace. A New York, en 1939, Maria allait renoncer à cinq contrats, préférant rentrer en Roumanie. A Istanbul, à 28 ans, on lui proposa de s'établir définitivement; une ville sur l'ile Prinkipo l'attendait, la Radio d'ankara voulait créer pour elle un poste permanent afin de promouvoir la musique turque, l'institut ethnographique d'istanbul la voulait aussi en chercheur du chant turc. Prix international de l'académie Charles Cross En 1944, l'abc Parisien l'attendait pour un série de spectacles-enregistrements. Le contrat que Mitti Goldin lui proposa aurait séduit n'importe quelle "étoile". Mais Maria n'était pas "n'importe quelle". La Maison d'éditions Pathé Marconi lui fit enregistrer cinq chansons (traduites en français par Nicole Sachelarie): "La reptation du serpent", "Cette nuit j'ai rêvé de toi", "Uhai bade", "Iac-asa" ("Et voilà") et "Doïna de Dolj". L'accent et la voix de Marie ont conquis l'occident. En 1965, deux ans après son envol vers les cieux, l'académie Charles Cros de Paris accordait à ce disque son Prix International Le long de sa courte vie, le chemin de Maria croisa celui des plus grands monuments de l'art et de la culture roumaine grandes comme Enesco, Brâncusi, Titulescu, qui reconnurent tous en elle une "Maïastra" (la reine du chant roumain). Le metteur en scène Cezare Zavattini, amoureux d'elle, lui proposa une tournée autour du monde. Mais on était entré dans l'époque communiste cette fois-ci l'œil vigilant du parti unique veillait et la Securitate dit non. Louis Daquin la fit jouer dans le film "Ciulinii Baraganului" d'après Panaït Istrati, où Maria, avec un impressionnant "bocet" (plainte funèbre) coupa le souffle aux spectateurs. Fauchée à 50 ans par le cancer En 1962, la chanteuse se retira à Gorj, pour y rassembler la richesse d'un folklore qu'elle voulait offrir au monde. Avec l'orchestre Taraful Gorjului, elle programma une tournée du 14 avril au 25 juin. Tout était prêt, mais trois jours après son début, à Turnu Severin, Maria fût victime d'un grand épuisement. On l'a transporta à l'hôpital. Verdict : cancer. Elle refusa d'être transportée à Bucarest pour le traitement et rejoignit son orchestre, décidée à continuer la tournée à tout prix. Un an plus tard, le 1er mai 1963 à Hunedoara, elle faisait sa dernière apparition sur scène, sans que le public ne connaisse son état. Et ce fut un samedi, le 22 juin 1963, à 14 h que son âme s'envola. Maria Tanase n'avait pas encore cinquante ans. Son corps allait retrouver la terre qu'elle avait chantée comme nul autre sous le ciel. Son corps, tout vêtu de blanc, fût conduit vers sa dernière demeure par une foule venue de toute la Roumanie. "Feuille verte, feuille jaune, / Emporte-moi, berce-moi encore" Paula Romanescu 55

29 56 Littérature Liviu Rebreanu ( ) est considéré comme l'un des romanciers majeurs du XXème siècle et le plus grand écrivain roumain de l'entre deux guerres. Egalement auteur de pièces de théâtre, d'articles, de nouvelles, éditeur, ce personnage considérable de la littérature roumaine, traduit dans une vingtaine de langues et traducteur lui-même d'œuvres universelles, a fondé et animé des revues. Il a aussi dirigé le Théâtre National de Bucarest, la Société des Ecrivains Roumains ce qui conduit ses compatriotes à le considérer comme le véritable fondateur du roman moderne roumain et un monument national. Elève roumain, hongrois, allemand Liviu Rebreanu, le plus grand écrivain roumain de l'entre deux guerres Aîné d'une famille d'instituteurs qui comptait quatorze enfants, Liviu Rebreanu est né à Târlisua (département de Bistrita-Nasaud), aux confins orientaux de l'empire austrohongrois sur le déclin, en Transylvanie, où vivent, à côté des Roumains majoritaires, des populations hongroises et germaniques. Son père reçoit souvent à la maison la visite du grand poète roumain George Cocbuc ( ), qui est son ami. La formation du jeune Liviu reflète la diversité ethnique de sa province natale. Il fait ses classes d'abord à l'école où enseigne son père, à Maieru, puis successivement dans un lycée roumain, hongrois et allemand, à Bistrita, avant d'entreprendre des études supérieures à Budapest. Officier de l'armée impériale austro-hongroise Malgré sa passion pour la médecine, le manque d'argent le pousse vers la carrière militaire. Un choix obligé qui pèsera à la fois sur sa destinée et sur son œuvre. En 1905, il est promu officier de l'armée austro-hongroise, envoyé en poste à Gyula (Hongrie), mais découvre très vite que sa vocation est ailleurs. C est l écriture. A la veille de la Grande Guerre, l'effondrement de l'empire multinational se profile. Déjà les Roumains, frustrés par l'administration hongroise qui les exclut des affaires publiques, tournent le regard vers le petit royaume danubien. Liviu Rebreanu démissionne de l'armée. Dépositaire d'une culture centre-européenne, il gagne en 1909, la Roumanie, indubitablement sa véritable patrie. C'est là que s'exprimera son grand talent d'écrivain. Avant qu'il ne franchisse clandestinement les montagnes, son père l'emmène jusqu'à la gare lui lançant du quai "Sois aussi grand que Cosbuc!". Quelques mois plus tard, il sera arrêté, extradé et emprisonné à Guyla, à la demande des autorités austro-hongroises qui n'ont pas apprécié les conditions de son départ. Libéré, il rejoindra aussitôt Bucarest. L amour déchirant de la terre Son premier roman, Ion, est publié en 1920, après la réunification de cette province avec le Royaume roumain, à la faveur du Traité de Versailles. Si ce texte, dont il a écrit la première version pendant l'occupation de la Roumanie par l'allemagne, plonge ses racines dans les tensions sociales au sein d'un village transylvain, La forêt des pendus, paru peu après (1922), raconte la tragédie d'un jeune officier roumain de l'armée impériale, celle vécue en vrai par son frère, contraint de tuer d'autres Roumains pendant la Première guerre mondiale, qui désertera et sera pendu. Le soulèvement paysan de 1907 Avec ses romans, Liviu Rebreanu s'impose d'emblée comme le plus important créateur épique de la nouvelle Roumanie. De l'autre côté des Carpates, en ce pays danubien qui deviendra le sien, au nord des Balkans, l'écrivain découvre une réalité sensiblement différente de celle qu'il a connue en Transylvanie. Certes ses compatriotes vivent dans leur propre Etat, mais la misère des campagnes reste extrême. Loin de Vienne et de Budapest, Bucarest, en marge de l'europe, fait figure de capitale bâtarde où règne le charme de l'esprit français mêlé aux langueurs orientales. Le soulèvement paysan de 1907 contre les propriétaires terriens qui dépensent le produit de leur labeur en Occident, inspire à l'auteur La Révolte (1932), grande fresque de l'affrontement entre les maîtres du Royaume et leurs serfs dépourvus du minimum nécessaire pour survivre. Depuis son arrivée en Roumanie, la création de Liviu Rebreanu se situe en ce lieu, au milieu de la plaine étendue au sud des Carpates, où se heurtent les traditions du monde villageois et la sophistication citadine, surgie avec la modernité. Mort deux jours avant l'entrée de l'armée Rouge dans Bucarest A 47 ans, l'écrivain a alors achevé ses œuvres principales. Plus concentrée, plus analytique, son roman Ciuleandra (Madalina), conçu quelques années plus tôt (1927), rappelle davantage, par sa force dramatique, les textes de l'autrichien Stefan Zweig ( ), enracinés dans le milieu viennois et le Freudisme, que les monumentales constructions réalistes, à l'architecture rigoureuse et impeccable, auxquelles ses lecteurs étaient habitués, ainsi que le souligne Edgar Reichmann. Reçu à l'académie Roumaine en 1939, il y prononcera son discours d'intronisation, intitulé Eloge du paysan roumain, dans le droit fil de son œuvre, qui dresse une fresque de l'amour violent ou déchirant que portent à leur terre ceux qui vivent de ses entrailles ou veulent la rejoindre. Grand fumeur, Liviu Rebreanu disparaîtra le 1er septembre 1944, des suites d'un cancer de la gorge, à Valea Mare, à l'âge de 59 ans. Deux jours après que l'armée Rouge ait fait son entrée dans Bucarest et que la Roumanie qu'il avait tant aimée ne disparaisse dans le bloc soviétique.

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