Sommaire. 1. Présentation. 2. Mise en œuvre. 3. Contribution. Par Philippe Fekik Directeur associé TALLIS Consulting. Par Sébastien Bonnet

Documents pareils
Maîtriser les mutations

STRATEGIE, GOUVERNANCE ET TRANSFORMATION DE LA DSI

GLOBAL SAAS HR SOLUTION INTÉGRÉE DE GESTION DES TALENTS

Optimiser la maintenance des applications informatiques nouvelles technologies. Les 11 facteurs clés de succès qui génèrent des économies

Développer une culture d efficience

Lean Management : une stratégie de long terme. Pourquoi l évolution des comportements est-elle essentielle à une réussite durable?

Les activités numériques

Sage 30 pour les petites entreprises

L architecture d entreprise ou comment prendre une longueur d avance

EXL GROUP FILIÈRE ERP - QUI SOMMES NOUS?

Les ressources numériques

Présentation Vinci Consulting

La vision 360 pour gérer tous les financements

DÉMATÉRIALISATION DES DOCUMENTS ET AUTOMATISATION DES PROCESSUS UN PREMIER PAS VERS LA BANQUE SANS PAPIER

Auditer son environnement Telecom Un des fondements du projet TEM

Soyez plus réactifs que vos concurrents, optimisez votre chaîne logistique

La Fonction publique «Vers une organisation intelligente?»

l originalité conseil en stratégies médias pour une croissance pérenne Your business technologists. Powering progress

Regard sur hybridation et infogérance de production

Pôle Finance Exemples de réalisations

Stratégie IT : au cœur des enjeux de l entreprise

RENFORCE LA CHAÎNE DE VALEUR AJOUTÉE DE SES PARTENAIRES

Microsoft France. Pour en savoir plus, connectez-vous sur ou contactez notre Service Client au *

Sage 100. pour les PME. Faites de votre gestion un levier de performance

FINANCE, COMPTABILITE Inter entreprises petits groupes (6 stagiaires maximum par session)

TEMPS PLEIN I CAMPUS REIMS. in Intelligence & Innovation Marketing. intégrant les outils digitaux

RESSOURCES HUMAINES. Yourcegid Ressources Humaines, des solutions pour les entreprises qui s investissent dans leur capital humain.

Pilotez, ajustez et optimisez votre portefeuille de projets

Aligner le SI sur la stratégie de l entreprise

PROCONCEPT EASY START

Les leviers de performance du pilotage du processus achats/fournisseurs

Management des organisations et stratégies Dossier n 10 Veille et intelligence économique

M2S. Formation Management. formation. Animer son équipe Le management de proximité. Manager ses équipes à distance Nouveau manager

Accompagner la transformation vers l excellence opérationnelle. Olivier Gatti olivier.gatti@adis-innovation.com

Contribution du Système d informationd à la valeur de l entreprisel

PÉRENNISER LA PERFORMANCE

son offre Executive Education

en quelques mots 1

Le Concept Dynamics Nav. B.I.Conseil

Planning for growth. Focus Supply Chain

MAÎTRISE DES ACHATS D INVESTISSEMENTS

Pole Formation Catalogue

Formation certifiante : Animer mon équipe pour élever la performance

Supply Chain: un regard vers le passé et un pas vers le futur

Quatre compétences clés pour l excellence digitale

Accompagnement RH des projets de transformation des organisations

Ressources Humaines Enjeux et Stratégie dans un contexte international

Une étude sur : «La Supply Chain comme facteur clé de compétitivité» Jeudi 27 juin 2013 Au Grand Hôtel Opéra, Paris

A. Le contrôle continu

ACCOMPAGNEMENT VERS LE CLOUD COMPUTING BIENVENUE

Dossier de Presse SYLOB

Shift Expectation. Notre ambition est de vous faire changer d opinion sur le conseil en vous démontrant des résultats concrets et opérationnels.

Optimisez vos processus informatiques, maximisez le taux de rendement de vos actifs et améliorez les niveaux de service

PEPI GPI (Gestion de Projet Informatique) - Note de Cadrage décembre

isrs 7 Améliorer la performance Sécurité, Environnement et Opérationnelle

MANUFACTURING MANUFACTURING

WHITEPAPER. Quatre indices pour identifier une intégration ERP inefficace

Auteur : Françoise NICOLAS, Responsable Qualité. Approuvé par : Michel ROUVELLAT, Président. Dernière date de mise à jour : 01 avril 2015

Avis d expert. Réussir son Site E-Commerce

Les rendez-vous Risk Advisory La lettre des professionnels du risque et de la finance

Le CRM en BFI : une approche du pilotage stratégique

Energisez votre capital humain!

Table des matières. Comment utiliser efficacement cet ouvrage pour en obtenir les meilleurs résultats?... 5

IT on demand & cloud professional services

Avec Sage HR Management, transformez votre gestion du capital humain en atout stratégique

Sciences de Gestion Spécialité : SYSTÈMES D INFORMATION DE GESTION

Optimisation de la gestion des risques opérationnels. EIFR 10 février 2015

ITIL V3. Objectifs et principes-clés de la conception des services

Chapitre 1 : Introduction au contrôle de gestion. Marie Gies - Contrôle de gestion et gestion prévisionnelle - Chapitre 1

Plateforme STAR CLM. Gestion intégrée des réseaux multilingues d entreprise

Externaliser le système d information : un gain d efficacité et de moyens. Frédéric ELIEN

ACCOMPAGNEMENT INDIVIDUEL

Comité stratégique de la démarche Alsace 2030 : des ambitions fortes, une vision partagée

Transformation Digitale

Rationalisez vos processus et gagnez en visibilité grâce au cloud

Périmètre d Intervention. Notre Offre

Sage 100. pour le BTP. Faites de votre gestion un levier de croissance

RHesilience. Découvrez comment mieux piloter le changement par la résilience

Software Asset Management Savoir optimiser vos coûts licensing

Pour une innovation productive

agence marketing digital

agence marketing digital

Business Intelligence et Data Visualisation

IT Advisory. Notre offre de services. kpmg.fr

Quels outils pour prévoir?

Tout sur le processus CPQ Configure Price Quote

LES ENTREPRISES PROSPÈRES SE TRANSFORMENT GRÂCE À DES SOLUTIONS SAP FLEXIBLES

Comment intégrer l ensemble de la chaîne de valeur au bénéfice des clients et de l'entreprise?

Gestion des risques liés aux systèmes d'information, dispositif global de gestion des risques, audit. Quelles synergies?

Copyright Agirc-Arrco Mars QUESTIONS pour comprendre le Système d Information Retraite Complémentaire (SI-RC)

Master Marketing et Pratiques Commerciales parcours Management de la marque et communication Apprentissage Master 2

Analyse des coûts. 1 ère année DUT GEA, 2005/2006 Analyse des coûts

Anticiper. Définir. mesurer. optimiser DE GAMMA - ARCOLE RH DE GAMMA. arcole rh. Gestion de la Paie et des Ressources Humaines

L apport d escm dans la mise en œuvre de Centres de Services Partagés (CSP) -

L évolution du travail en réseau : une nouvelle donne stratégique

La plateforme Cloud Supply Chain. Présentation de GT Nexus

data center services Optimiser le data center Conformité Sécurité Efficacité Your business technologists. Powering progress

DOSSIER D ENTREPRISE ENTREPRENEURIAT TRANSFORMATION CROISSANCE

ENJEUX ET PERSPECTIVES DU MODÈLE DE BANCASSURANCE NON-VIE À L AUNE DES ANNÉES 2020

Practice Finance & Risk Management BCBS 239 enjeux et perspectives. Equinox-Cognizant, tous droits réservés

Transcription:

Sommaire 1. Présentation Par Philippe Fekik Directeur associé TALLIS Consulting 2. Mise en œuvre Par Sébastien Bonnet Directeur associé TALLIS Consulting 3. Contribution Par Denis Dauchy Professeur en stratégie d entreprise à l EDHEC

1. Présentation Par Philippe Fekik, directeur associé de Tallis Consulting Comment définir un «Global Operating Model» performant La mondialisation, la concurrence, la libéralisation et la dématérialisation de l économie ont bouleversé les habitudes de consommation et les repères traditionnels. Le défi post-mondialisation auquel nos entreprises sont confrontées est de taille, et leur réponse souvent déterminante pour leur survie.... Favorisée par la libéralisation et la dématérialisation de l économie, l arrivée de nouveaux concurrents, volontiers agressifs, fait qu il est aujourd hui aisé de se positionner en tant que nouvel acteur dans de nombreux domaines, y compris sur des marchés bien établis. Le «ticket d entrée» est devenu plus accessible grâce à des règles de concurrence favorisant l émergence de nouveaux acteurs souvent «low cost» et grâce à Internet qui minimise les investissements et permet de toucher immédiatement des millions de consommateurs, sans avoir besoin d un maillage physique spécifique. Le comportement des consommateurs s en trouve d ailleurs sensiblement modifié, donnant un accès immédiat à de nombreuses offres qu il est aisé de comparer en termes de qualité et de prix. Le consommateur est devenu volage et de moins en moins fidèle, préférant «zapper» d une marque à l autre, en fonction des offres et des services proposés, souvent à la recherche du meilleur coût. Le consommateur actuel est plus attentif à l attention qu on lui porte (service client) et son niveau d exigence quant à la qualité ou à l attractivité des prestations proposées (notamment l effet «gratuité» sur Internet) augmente de manière très nette. En abolissant les distances la mondialisation et la dématérialisation ont ainsi fait disparaître les frontières. Nos entreprises ont la possibilité de faire traiter leurs factures en Inde ou de localiser un centre d appel au Maghreb ; ces solutions leur permettent de maintenir une pression constante sur leurs coûts de revient. La mondialisation rendant par ailleurs possible l internationalisation des offres et la vente de produits ou de services dans le monde entier. Des évolutions aux conséquences significatives : Une augmentation des volumes de vente (donc des traitements associés) Une baisse significative des marges La nécessité de développer de nouveaux services à valeur ajoutée La recherche de la qualité et du «zéro défaut» Le développement des services clients Les entreprises qui subissent la pression de concurrents plus rapides doivent donc s adapter de plus en plus vite à ces évolutions contextuelles pour avoir une chance de conserver des clients qui, eux aussi, ont la possibilité de changer beaucoup plus facilement de fournisseurs. Les fonctions opérationnelles sont au cœur de cette transformation puisqu elles déterminent la qualité et les coûts de traitement unitaire de ces opérations. Une des clés de la réussite de cette transformation est d abaisser ces coûts de traitement, afin d enrayer la baisse des marges. C est ainsi qu une véritable réflexion stratégique s impose pour définir ou redéfinir ce que l on appelle un «global operating model», modèle d opération global en français. Le «global operating model» consiste à définir une vision globale optimisée de l activité, avec pour objectif d optimiser le couple efficacité/risques et d améliorer la qualité. Il s agit d envisager la production dans son ensemble et non plus par sites, typologie ou zones géographiques, ce qui crée nécessairement de l étanchéité entre les activités et rigidifie la production. L optimisation, l automatisation, voire l externalisation des processus dégagent les gains de productivité qui permettent aux opérationnels de se concentrer sur le service aux clients ainsi que sur la qualité de leurs prestations. Là ou un opérationnel passait sa journée à effectuer des traitements fastidieux à faible valeur ajoutée, il peut dorénavant aller au-devant des besoins du client, être disponible pour résoudre ses problèmes puis être affecté à de nouvelles tâches. Les principales à se poser dans ce type de démarche sont les suivantes : Comment industrialiser l activité? Comment organiser l activité entre différents sites (spécialisation, polyvalence, concentration, externalisation)? Comment harmoniser les processus et les pratiques de management en les alignant sur les meilleures pratiques? Comment améliorer l efficacité opérationnelle? Comment mieux maîtriser les risques? 4 Global Operating Model - Février 2012

Comment industrialiser l activité? Il s agit sans aucun doute du levier le plus important de réduction des coûts de traitement, mais aussi du plus complexe à mettre en œuvre, avec des investissements souvent conséquents. L industrialisation d une chaîne de traitement consiste alors à éliminer au maximum les tâches manuelles et à tendre vers une chaîne Straight Through Processing (STP). Le principe est simple : une opération doit être entrée dans le système «front office» (lors de la vente) et être traitée sans intervention humaine jusqu à sa comptabilisation. Seules les erreurs ou les opérations nécessitant un traitement spécifique sont gérées manuellement. Les avantages que procurent ces solutions sont : Une baisse significative des coûts de traitement Une capacité d absorption des volumes sans générer de coûts de main d œuvre supplémentaire Une réduction des erreurs engendrant une amélioration importante de la qualité de traitement Prenons le cas d une banque ayant mis en place un traitement STP entre 2001 et 2008. Cet établissement britannique a ainsi vu son volume d opérations passer de 6.500 interventions par jour en 2001, avec un coût unitaire de traitement de 2,60 par opération, à 200.000 interventions par jour en 2008, avec un coût unitaire de traitement de 0,20! Ces projets s articulent autour de procédures informatiques permettant de transformer l organisation et les processus qui y sont liés. Il s agit souvent de la mise en place d une architecture de type «SOA» (Service Oriented Architecture) afin d apporter le maximum de souplesse à la chaîne de traitement tout en la rendant évolutive. Les entreprises les plus avancées sur l industrialisation obtiennent ainsi des «taux de STP», autrement dit le pourcentage d opérations traitées en automatisation complète, supérieurs à 95%, ce qui permet de diminuer de façon très importante les coûts de traitements et d absorber des augmentations de volumes sans impact sur le dimensionnement de l activité. Comment organiser l activité entre différents sites? Bien souvent, l historique des entreprises (fusion, acquisitions, développement du maillage territorial, expansion internationale) a réparti leurs activités de traitement entre différents sites géographiques. D où une grande disparité entre ces sites où le meilleur côtoie parfois le pire... Cette disparité et la très faible polyvalence entre ces sites rend difficile les reports de charges entre différentes équipes. La tendance est alors à la concentration de l activité afin de générer des économies d échelles et de permettre plus de polyvalence dans la répartition des tâches. Il s agit d appliquer le principe des plates-formes logistiques dans lesquels un ouvrier peut indifféremment participer au déchargement d un camion, à l emballage des produits ou au chargement d un container. D un point de vue opérationnel, nous sommes donc loin du bon vieux taylorisme, ce mode de fonctionnement permettant aux collaborateurs d apprendre de nouveaux métiers et de varier les tâches. L externalisation de certaines activités est un phénomène grandissant. Il convient d aborder cette problématique avec prudence. Un tel processus doit être évalué et répondre à une série de critères bien précis pour que l externalisation soit un succès : Il doit être parfaitement maîtrisé : l externalisation suppose un transfert de savoir-faire nécessitant une description parfaite de l activité L activité externalisée doit être à faible valeur ajoutée. Il est ainsi très risqué d externaliser un processus produisant une importante valeur ajoutée client ou présentant un savoir-faire stratégique pour l entreprise Le processus doit être en grande partie dématérialisé (l externalisation nécessite un échange de flux dématérialisés) Le choix de la zone géographique est important (barrière de la langue, niveau de maturité, risque pays) Comment harmoniser les processus et les pratiques de management en les alignant sur les meilleures pratiques? Dans les modèles non optimisés, il existe souvent autant de manière de réaliser un même processus, ou de manager des équipes ayant la même fonction, que de sites géographiques ou de centres de traitements. Il est donc primordial d harmoniser les méthodes de travail et de management en les alignant sur les «meilleures pratiques». Cette harmonisation passe par trois étapes : Réaliser un diagnostic de l existant sur les processus, la gouvernance et les pratiques de management ; Bâtir une cible moyen terme ; Formaliser un plan d action et de déploiement. Global Operating Model - Février 2012 5

Diagnostiquer l existant L objectif de cette étape est de déterminer le niveau de maturité de chaque entité traitée, et par extrapolation du niveau de maturité global de l organisation étudiée. L analyse va consister à bâtir une grille de maturité sur les 3 volets : processus, gouvernance et management. Les critères de cette grille sont fonction du contexte et des objectifs stratégiques de l entreprise. On s attachera à évaluer l analyse des processus sur leur performance et leur degré de formalisation avec des indicateurs opérationnels permettant de mesurer cette performance. On s attachera enfin à analyser et à déterminer les modes de gouvernances et leur efficacité ainsi que celle du management, aussi bien en termes de compétences, d approche et d efficacité des différents managers. La grille d analyse servira ensuite de socle pour déterminer la meilleure cible possible. Bâtir une cible moyen terme A partir de cette grille de maturité, on comparera les niveaux de maturité entre entités en les mettant en perspective par rapport aux meilleurs standards du marché. Ceci va permettre d identifier les meilleures pratiques à déployer, déterminer quels processus mettre à niveau et établir un ordre de priorité. Ce choix des processus sera effectué en fonction des résultats de cette grille tout en tenant compte des objectifs stratégiques de l entreprise. La gouvernance et le management sont également fortement concernés par ces évolutions, accompagnant le passage vers une organisation globale, intégrée et homogène. Il s agit notamment de faire connaître et déployer les meilleures pratiques de management tout en associant étroitement les équipes opérationnelles. Une fois la cible définie et validée, les écarts avec l existant vont être identifiés, ce qui permettra de préparer le plan d action et de déploiement. Formaliser un plan d action et de déploiement A partir des écarts identifiés, il s agit de préparer un plan de déploiement cohérent et réaliste. Ce plan tiendra compte de l inertie de l organisation traitée, des priorisations nécessaires, et également des nombreuses contraintes, notamment celles qu imposent les systèmes informatiques. Les actions devront être coordonnées afin de s assurer que l ensemble des préconisations seront correctement déployées. Comment améliorer l efficacité opérationnelle? Revoir son organisation en profondeur est également une très bonne occasion pour optimiser les processus et tourner son organisation vers l excellence opérationnelle. En complément de l industrialisation, l optimisation des processus permet d améliorer la productivité, le confort opérationnel ainsi que la qualité réelle et perçue, sachant que les outils de type Lean et Six Sigma sont bien adaptés à cet exercice, tout en restant vigilant sur leur utilisation qui doit se faire en symbiose avec l environnement et la culture de l entreprise. Une approche Lean & Six Sigma doit ainsi être mise en place progressivement, et bénéficier d un appui fort, tant du management que des opérationnels. Les organisations peuvent ensuite évoluer vers un cycle d amélioration continue. Comment mieux maîtriser ses risques? La réflexion sur un «global operating model» doit également prendre en compte la gestion du risque tout en exerçant un contrôle permanent permettant de se prémunir contre les différents types de risques opérationnels. On s attachera donc à optimiser ces contrôles afin de les rendre plus efficaces et éviter de grever l efficacité opérationnelle du dispositif. Passer ensuite d un modèle régional à un modèle mondial intégré nécessite une révision de la notion de risque, intégrant notamment une réflexion stratégique sur les plans de continuité d activité (PCA). Certains modèles d organisation vont tendre vers une spécialisation des sites opérationnels, ce qui engendre une augmentation du risque. Si l on spécialise un site sur un type de production opérationnelle, que se passe-t-il si ce site est détruit ou endommagé? Cette question devient primordiale lorsque les activités sont externalisées ou lorsqu elles sont délocalisées dans des «hub» situés en Asie ou ailleurs. Il est alors nécessaire de redéfinir les plans de continuité et de sauvegarde en tenant compte de ces nouvelles contraintes. 6 Global Operating Model - Février 2012

Cette réflexion sur le modèle d opérations global est devenue un point de passage obligé pour les grandes entreprises confrontées à un contexte économique complexe et volatil. La construction d un modèle d opérations automatisé, harmonisé, spécialisé par processus, et servi par une chaîne informatique «STP», est une des clés pour affronter la compétition économique mondiale. Ce type de modèle a le grand avantage de combiner réduction et maîtrise des coûts en proposant une capacité d absorption des volumes sans impact majeur, ainsi qu une augmentation importante de la qualité et du service rendu au client. Philippe Fekik, directeur associé de Tallis Consulting 2. Mise en œuvre Par Sébastien Bonnet, directeur associé de Tallis Consulting Les cinq clés d un programme de transformation réussi ou : comment mettre en place un Global Operating Model efficace Depuis cinq ans, les entreprises présentes dans les secteurs de la banque, de la finance, de l assurance, de l industrie pharmaceutique, des transports ou des services publics, multiplient les programmes de transformation afin d harmoniser le traitement de leurs processus au niveau mondial. Une harmonisation destinée à favoriser l innovation, en augmentant leur efficacité opérationnelle et la maîtrise des risques auxquels elles sont confrontées.... La performance des grandes entreprises repose sur deux éléments clés : la définition d une stratégie pertinente et sa bonne exécution. Au cœur de toute stratégie, le business model, ou «proposition de valeur», doit, dans sa plus simple expression, répondre à la question «comment faire pour gagner de l argent et accompagner la croissance de l entreprise?». Du côté de l exécution, l operating model doit aussi proposer une réponse structurée à la question «notre organisation nous permet-elle d exécuter correctement notre stratégie?». Pour réussir la mise en œuvre d un «Global Operating Model» il est indispensable de permettre au management de l entreprise concernée de coordonner les opérations du siège et des différentes business units quelle que soit leur implantation géographique (Europe/Amérique/Asie), tout en garantissant une chaîne de valeur structurée. Il s agit ainsi de travailler simultanément sur cinq éléments essentiels de l organisation lors de la définition puis de la mise en œuvre du «Global Operating Model». Ces cinq éléments qui conditionnent la réussite du projet - sont : Le leadership et les acteurs (people) Les processus L organisation et le contrôle Les technologie Le système de mesure de la performance (KPI & KRI) Le leadership et les acteurs - Le leadership regroupe le management de l entreprise qui va impulser et influencer de manière significative l organisation, et incarner ainsi la manière dont les opérations doivent se dérouler ; il ne s agit pas seulement des cadres dirigeants de l entreprise mais de l ensemble des managers identifiés comme «acteurs du changement» (certaines entreprises parlent de «Club des 100») qui doivent être fédérés autour d une véritable approche de conduite de ce changement. L implication et le «style» du leadership, sa diversité, et la manière dont le management assure le processus de décision, sont autant de facteurs de succès dans sa mise en œuvre. Pour les collaborateurs concernés, le succès de la transformation passe notamment par la capacité de l entreprise à «manager ses talents», son support à leur engagement opérationnel (empowerment) en facilitant l échange entre les différents acteurs, notamment à travers leur mise en réseau. Sur ce dernier point, l utilisation des réseaux sociaux d entreprise peut, selon les besoins, s avérer une réponse efficace (cf., Lettre de Square # 1). Plus globalement, la mise en place d un «Global Operating Model» implique la consolidation d une culture d entreprise à travers la diffusion et le partage de valeurs communes. Global Operating Model - Février 2012 7

Processus - Cet élément est constitué des chaînes d activités de l entreprise qui produisent des résultats mesurables. Il comporte notamment tous les processus transverses de management qui aident à coordonner les entrées-sorties d activités au sein de la chaîne de valeur entre les différentes directions et unités géographiques de l entreprise. Il peut s agir de processus de planification stratégique, d allocation de ressources, de gestion des connaissances, de gestion de l innovation, de gestion de la chaîne d approvisionnement, de gestion de la relation client (CRM), etc. A ce stade, la mise en place d un «Global Operating Model» performant passe par une harmonisation et une optimisation des processus au sein de l entreprise ; les approches d efficacité opérationnelle de type «Lean Management & Six Sigma» ont ainsi apporté des résultats significatifs aux problématiques de gestion des stocks dans l industrie pharmaceutique. Organisation & Contrôle - Il s agit ici de structurer la manière dont les responsabilités et le reporting sont assurés au sein de l entreprise. Ce qui inclut notamment les structures et les mécanismes de contrôle utilisés pour intégrer et différencier les pays et les lignes de produits (business lines). Technologies - Cet élément comporte les équipements physiques, logiciels (IT) et outils qui sous-tendent les processus de l entreprise. La planification des ressources logicielles ou la mise à disposition d un portail intranet peuvent permettre un meilleur pilotage financier ou favoriser la gestion des connaissances et des processus d innovation. La transformation de cet élément est essentielle à la mise en place d un «Global Operating Model», dans le sens où un grand nombre d entreprises leaders dans leur secteur d activité ont connues ces dix dernières années une forte croissance, externe (acquisitions), ou organique, et possèdent aujourd hui une multitude d applications pour un même processus. Une véritable rationalisation et harmonisation de cet élément est donc devenu indispensable pour accompagner cette transformation. Technologies - Cet élément comporte les équipements physiques, logiciels (IT) et outils qui sous-tendent les processus de l entreprise. La planification des ressources logicielles ou la mise à disposition d un portail intranet peuvent permettre un meilleur pilotage financier ou favoriser la gestion des connaissances et des processus d innovation. La transformation de cet élément est essentielle à la mise en place d un «Global Operating Model», dans le sens où un grand nombre d entreprises leaders dans leur secteur d activité ont connues ces dix dernières années une forte croissance, externe (acquisitions), ou organique, et possèdent aujourd hui une multitude d applications pour un même processus. Une véritable rationalisation et harmonisation de cet élément est donc devenu indispensable pour accompagner cette transformation. Système de mesure de la performance (KPI & KRI) (1) - Cet élément transverse à l organisation doit permettre de piloter la performance de l entreprise en s appuyant sur des faits et sur des chiffres ; il doit être connu de tous et partagé à tous les niveaux de l entreprise, du balanced score card (BSC) pour le Top Management au «Management Visuel» au sein des équipes opérationnelles. Réussir la mise en place d un «Global Operating Model» efficient, nécessite pour l entreprise d opérer la transformation de ses cinq piliers de manière simultanée, de garantir leur cohérence et leur synergie dans le temps, pour atteindre ses objectifs stratégiques et assurer ainsi sa pérennité et sa croissance. (1) KPI : key performance indicator ou indicateur de performance ; KRI : key risk indicator ou indicateur de risque 8 Global Operating Model - Février 2012

3. Expertise Par Denis Dauchy, Professeur en stratégie d entreprise à l EDHEC Les clefs du design d un modèle opérationnel réussi Le passage d une économie de «marchés de masse» à une logique de «niches» suppose d inventer de nouveaux modèles opérationnels, à la fois globaux et singuliers. Les trois piliers de la performance sont alors la promesse client, l alignement opérationnel, et l agilité.... La globalisation de l économie s accompagne d une fragmentation des marchés. De nombreux facteurs nourrissent l accroissement de la diversité des business models : nouvelles approches de la consommation dans les économies matures, nécessaire adaptation des modèles d affaires au contexte économique et culturel des pays émergés, nouvelles articulations des propositions de valeur autour de l usage et non de la seule offre technique (apport de solutions, positionnement sur des écosystèmes), innovations dans les configurations opérationnelles (nouvelles chaînes de valeur de type low cost), impact de la révolution numérique sur l organisation de la relation client (approche ubiquitaire incluant les supports mobiles, les réseaux sociaux), etc. De plus en plus, pour répondre à cette nouvelle diversité, une entreprise accueille en son sein plusieurs business models. Une construction spécifique doit être pensée et expérimentée pour chacun d eux, autour : d une proposition de valeur aux clients, servant de focus et permettant de dégager une capacité à monétiser ; d un modèle opérationnel articulant les opérations productives (matérielles et immatérielles) au service de la proposition de valeur ; d une équation économique validant la capacité de création de valeur à la fois sur la rentabilité des capitaux employés, et sur la capacité à générer de la croissance. Une logique d ingénierie globale doit présider aux décisions et à l animation du modèle opérationnel. La réponse aux marchés de masse a pu s enraciner dans la spécialisation et les effets de la courbe d expérience. Le nouveau paysage économique exige, en plus, d accueillir la diversité et l agilité autour de modèles opérationnels parfaitement articulés sur les plans technique et humain. Selon une logique systémique, la performance d une unité d action résulte de la cohérence (et de la cohésion) créée en son sein. Pour la favoriser, le design et l exécution doivent se nourrir mutuellement. Selon cette perspective, une triple préoccupation doit guider le design d un modèle opérationnel : l efficacité dans la réponse à la promesse client ; l efficience dans l utilisation des ressources ; l agilité face à la volatilité de l environnement. De nombreux leviers d action et d animation peuvent ensuite être explorés. Les thèmes suivants, notamment, sont incontournables pour initier la créativité stratégique et la performance opérationnelle. L ingénierie de la chaîne de valeur à partir de l écosystème Les normes sectorielles ont par trop catégorisé les entreprises et leurs opérations : le design, la transformation matérielle, la commercialisation aux entreprises industrielles ; le sourcing, la mise à disposition physique, la relation clients aux entreprises de distribution, etc. Le design d un modèle opérationnel peut consister à dépasser ces conventions, à l exemple de Décathlon, articulant au sein de la même entreprise design, promotion, maîtrise industrielle, distribution et relation clients. La capacité d Apple à dépasser les conventions entre équipements, télécommunication, distribution (retail) est également probante. L organisation des flux physiques et d information La distinction entre modèles «push» (poussant les flux productifs vers les prévisions de marchés) et modèles «pull» (tirant l information des marchés vers la mise en œuvre réactive de l activité productive) est connue. Seuls ces derniers modèles opérationnels permettent un alignement sur des propositions de valeur centrées sur la personnalisation de masse ou le renouvellement rapide de l offre. La performance remarquable du groupe Inditex - Zara (près de 40% de retour sur capitaux employés en 2010) illustre la pertinence de cette logique. L alternative «make or buy» Le design d une chaîne de valeur implique des décisions sur le niveau de maîtrise souhaitable des différentes opérations. L alterna- Global Operating Model - Février 2012 9

tive entre internalisation et appel au marché est classique. L outsourcing constitue une option comportant une combinaison spécifique et subtile de maîtrise informationnelle et de délégation contractuelle d opérations. De nombreux facteurs doivent être pris en compte : la sécurisation de la proposition de valeur finale, le niveau et la nature (fixe versus variable) des coûts, sans ignorer les coûts de transaction : coût de coordination interne (fluidité du fonctionnement interne) versus coûts de contractualisation (recherche et surveillance du partenaire), etc. La localisation des opérations Qu elle soit internalisée ou externalisée, une opération peut faire l objet d un choix de localisation qui a des conséquences sur la capacité de respect de la promesse client, sur le niveau des coûts et sur l agilité. La construction d un «mix» peut permettre de concilier ces différentes logiques. Cap Gemini développe par exemple une approche «right shoring» en combinant une localisation des ingénieurs en Inde et dans les pays où sont implantés ses clients au bénéfice d une proposition de valeur associant compétitivité et proximité. La construction du «mix» des canaux de la relation clients Un modèle opérationnel global inclut les opérations d interaction avec les clients, que celles-ci soient promotionnelles ou matérielles (mise à disposition physique, gestion d une expérience). Les canaux utilisés par une entreprise sont en nombre croissant : force terrain, agences, «call center», site web, «smartphones», réseaux sociaux, etc. Une combinaison spécifique doit être construite entre ces canaux et les opérations du parcours client : comparaison des propositions, transaction, financement, services, participation à la chaîne de valeur de l offre (recommandation commerciale, co-création), etc. Une matrice entre canaux et étapes du parcours client visualise les ingénieries possibles de modèles opérationnels. Une nouvelle diversité est permise. L alternative entre opération dédiée à une «business unit» et partage au sein d une plate-forme L environnement actuel induit un nombre croissant de «business units» au sein des entreprises. Les nouvelles configurations opérationnelles commandent des arbitrages entre l affectation pleine d une opération à une «business unit» et la recherche d économie de champ. La première option préserve mieux l alignement. La seconde favorise l efficience par le partage. Le sujet mérite une intégration de données techniques mais aussi humaines : cohérence culturelle, effet positif de l émulation entre unités, aptitude au partage L énoncé de ces clefs du design d un modèle opérationnel ne se veut pas exhaustif. Il permet de souligner les avancées d une approche globale, notamment par la recherche de la singularité, l ouverture à l écosystème et la diversité des constructions possibles. Denis Dauchy est professeur de stratégie à l EDHEC Business School et auteur de «7 étapes pour un business model solide», Dunod 2010. 10 Global Operating Model - Février 2012

www.square-management.com www.la-lettre-square.com Prochaine édition : Les règlementations bancaires