MARQUES DE COMMERCE PROVINCIALES



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Transcription:

MARQUES DE COMMERCE PROVINCIALES Hugues G. Richard * LEGER ROBIC RICHARD, avocats ROBIC, agents de brevets et de marques de commerce Centre CDP Capital 1001 Square-Victoria Bloc E - 8 e étage Montréal (Québec) H2Z 2B7 Tél: 514-987-6242 - Fax: 514-845-7874 info@robic.com www.robic.ca Le Canada est une fédération de dix états (provinces), cette situation politique et juridique a des répercussions à tous les niveaux de l'appareil gouvernemental canadien, que ce soit au niveau legislatif, exécutif ou judiciaire. Le domaine des marques de commerce n'échappe pas à ces répercussions. Toutefois, force est de de constater que seul le Parlement fédéral a légiféré en cette matière. Mon propos de ce matin est d'analyser cet état de faits afin de voir s'il est juridiquement souhaitable qu'il en soit ainsi ou s'il y a place pour des législations provinciales en matière de marques de commerce au Canada. Il va sans dire que mon analyse se bornera à l'aspect juridique de la question. Je laisserai à d'autres le loisir de traiter de l'aspect politique qui certes pourrait susciter d'intéressants points de vue. Le sujet que j'aborde est considéré par plusieurs personnes comme tabou. La raison de cette méfiance résulte du fait que notre système canadien des marques de commerce est en bonne partie fondé sur un quiproquo ou un mythe, nous, les spécialistes, le savons, mais cela fait généralement notre affaire et il en découle que c'est la loi du silence qui prédomine. La situation est un peu semblable à celle des onze enfants d'un père décédé qui se seraient partagés la fortune de leur père en fonction de son testament LEGER ROBIC RICHARD / ROBIC, 1988. * Avocat et agent de marques de commerce, Hugues G. Richard, est l'un des associés principaux du cabinet d'avocats LÉGER ROBIC RICHARD, s.e.n.c. et du cabinet d'agents de brevets et de marques de commerce ROBIC, s.e.n.c. Ce document a été préparé pour fins d'information générale dans le cadre d'une présentation donnée à la 62ième assemblée générale annuelle de l'istitut canadien des brevets et marques tenu à Gray Rocks entre les 1988.09.28 et 1988.10.01. La version anglaise de ce document a été publiée à (1989), 5 Canadian Intellectual Property Review 301-314. Publication 25.

à une époque où le frère aîné exerçait sur ses dix soeurs une influence dominante. Le frère aîné ayant pris en mains la direction des affaires de la famille, tout va pour le mieux dans le meilleur des mondes. Dès que quelqu'un engage la discussion à l'effet de relire le testament du père pour vérifier si effectivement le frère aîné devait diriger les affaires de la famille, tout le monde se méfiait car dans le fond, on sait que le testament du père n'avait pas accordé à l'aîné la direction exclusive des affaires de la famille; en fait, le voeu du père avait été que les onze enfants s'en occupent, mais l'aîné fait si bien son travail, s'il fallait que les dix soeurs s'en mèlent, on risquerait la pagaille. C'est ainsi qu'à chaque fois que quelqu'un évoque la possibilité de relire le testament, le réflexe naturel est de chercher à éviter la question. Or, aujourd'hui je vous propose de relire le testament (en l'occurence la constitution de notre pays) afin de voir si effectivement le frère aîné (en l'occurence, le fédéral) a les pouvoirs qu'il prétend avoir pour diriger les affaires de la famille (en l'occurence le domaine des marques de commerce au Canada) ou si ce n'est pas plutôt aux onze enfants (le fédéral et les provinces) que revient l'initiative dans ce domaine. En dehors de toute définition que l'on peut retrouver dans les textes législatifs, une marque de commerce peut se comprendre comme un bien intangible ou incorporel faisant partie du patrimoine économique d'une personne physique ou morale. A ce titre, le droit de propriété qu'exerce une telle personne sur ce bien n'est pas différent du droit de propriété qu'elle exerce sur les autres biens dont elle est propriétaire. Ce droit de propriété est régi par le droit applicable dans chaque province tel que cela est prévu à l'article 92(13) de la Loi constitutionnelle de 1867. Quant on parle d'un droit de propriété sur un bien, que ce bien soit une marque de commerce, un camion, une action cotée en bourse ou un terrain, c'est au droit provincial qu'il appartient de définir les conditions pour que ce droit prenne naissance, pour qu'il subsiste, pour qu'il soit transféré et pour qu'il s'éteigne. Notons que dans ce contexte, l'exercice du droit de propriété sur une marque de commerce et les recours délictuels ou contractuels qui en découlent, sont l'exercice d'un droit privé dont la protection relève de l'initiative de la personne qui désire s'en prévaloir selon les règles du code civil au Québec et du common law dans les autres provinces. Parmi les recours délictuels qu'offrent le droit civil et le common law, nous retrouvons les recours en concurrence déloyale sous diverses formes à l'encontre des délits de contrefaçon, dilution, substitution, parasitisme, piraterie, etc...

Contrairement à ce que généralement véhiculé, une marque de commerce c'est d'abord et avant tout un actif faisant partie du patrimoine économique d'une personne; ce droit relève donc par conséquent en tout premier lieu du droit provincial. A cause du quiproquo ou du mythe mentionnés ci-haut, en bons chiens de Pavlov, nous avons développé le réflexe bien malgré nous de penser "fédéral" lorsque nous pensons "marque de commerce". Il s'agit d'une erreur d'appréciation de la réalité juridique et économique de ce dont on parle. En réalité, une marque de commerce doit être considérée pour ce qu'elle est, un actif comme un autre d'une entreprise, rien de plus, mais rien de moins. Ceci n'est toutefois pas la fin de nos difficultés, je dirais qu'il s'agit plutôt de leur début. En effet, si les législatures provinciales de notre pays ont une juridiction première en matière de marques de commerce, il n'en reste pas moins que le Parlement fédéral, en vertu de son pouvoir de légiférer en matière de règlementation des échanges et du commerce (article 91(2) de la Loi constitutionnelle de 1867), a le droit, à l'intérieur de certaines limites, de légiférer en matière de marques de commerce. Ces limites sont relativement mal définies; elles s'interprètent d'une série d'arrêts rendus par le Conseil privé et par la Cour suprême du Canada. Dans l'affaire Macdonald c. Vapor Canada ltd. [1977] 2 R.C.S. 134, L'Honorable Juge Laskin en fait une étude approfondie principalement aux pages 159 et suivantes. Les arrêts qu'il analyse sont ceux de Citizens Insurance Co. c. Parsons (1881), 7 A.C. 96; Attorney-General of Ontario c. Attorney-General of Canada [1937] A.C. 405; Attorney-General of Ontario c. Attorney-General of Canada (local prohibition case) [1896] A.C. 348; Attorney-General of Canada c. Attorney-General of Alberta [l916] 1 A.C. 588; Hodge c. The Queen (1883), 9 App. Cas. 117; Board of Commerce case [1922] 1 A.C. 191; Proprietary Articles Trade Association c. Attorney- General of Canada [1931] A.C. 310. C'est après avoir fait l'analyse de ces arrêts que l'honorable Juge Laskin écrit ce qui suit à la page 163 de son jugement: "I do not find it necessary to examine in any detail subsequent cases, either in the Privy Council or in this court which canvassed or considered the federal trade and commerce power. In so far as they involved marketing regulation, whether under federal legislation, as in The King v. Eastern Terminal Elevator Co., in The Natural Products Marketing Act Reference, and in Murphy v. C.P.R., or under provincial legislation, as in Shannon v. Lower Mainland Dairy Products Board or in Reference re: Ontario Farm Products Marketing Act, they do not bear directly upon the present case. The bearing they do have, however, is in indicating that regulation by a public authority, taking the matter

in question out of private hands, must still meet a requirement, if federal regulatory legislation is to be valid, of applying the regulation to the flow of interprovincial or foreign trade; or, if considered in the aspect of regulation of credit (to adopt views expressed by Duff C.J. in Reference re: Alberta Statutes it must be such as to involve a public regulation thereof applicable to the conduct of trading and commercial activities throughout Canada."[Le texte anglais est cité car sa traduction française est boîteuse.] Il découle de l'arrêt Macdonald v. Vapor Canada Ltd. qu'il y a deux types de législations que le Parlement fédéral peut adopter en vertu de 91(2) de la Loi constitutionnelle de l867. Le premier type de loi serait certainement constitutionnelle, l'autre le serait peut-être. Le premier type: Si la loi prévoit une règlementation appliquée par une autorité publique sur des échanges inter- provinciaux ou internationaux. Le deuxième type: Si la loi prévoit une règlementation applicable par une autorité publique sur la poursuite d'activités commerciales dans tout le Canada. Voyons superficiellement si ces deux "tests" sont rencontrés par les dispositions de la loi actuelle. Mon intention n'est pas de faire le procès de la constitutionnalité de la Loi sur les marques de commerce canadienne. Qu'il suffise pour le moment de signaler que sa constitutionnalité à maints égards est mise en doute et je vous réfère entre autres aux excellents articles suivants: Daniel R. Bereskin, "Trade marks Act and the Constitution" Patent & Trademark Institute of Canada Bulletin, series 8, Vol. 11-15, 1982, page 687, W.P.M. Kennedy, "Is the Canadian Legislation on Trade Marks ultra vires?" publié dans le Canadian Bar Review, (1930), Vol. VIII, page 711 and G. Ronald Bell and Heather Probert, the Constitutionality of Canadian Trade Mark Law (l985) 4 C.P.R. (3d), page 305. Nul ne contestera la juridiction du Parlement fédéral de légiférer en matière de marques de commerce; le problème résulte toutefois de la Loi sur les marques de commerce telle qu'elle fut adoptée. Cette loi semble, à bien des égards, empiéter sur les prérogatives provinciales et je me permets de vous en citer quelques exemples. L'article 3 détermine lorsqu'une marque de commerce est censée avoir été adoptée par une personne au Canada.

On y mentionne entre autres qu'elle est censée l'avoir adoptée lorsqu'elle a produit une demande d'enregistrement de ladite marque au Canada. En common law et en droit civil, l'adoption d'une marque de commerce se fait par l'usage. L'introduction dans le droit canadien de la notion d'adoption par la simple production d'une demande d'enregistrement semble contraire aux principes fondamentaux du droit provincial. L'article 3 donne ouverture au dépôt d'une demande d'enregistrement d'une marque de commerce sur une base projetée, notion qui est totalement étrangère au droit provincial sur les marques de commerce. En adoptant l'article 3 le Parlement fédéral a créé un droit donnant un effet rétroactif au droit de propriété sur une marque, ce qui semble un empiètement évident des pouvoirs des provinces. A l'article 4(2) le Parlement fédéral introduit la notion de marque de commerce en liaison avec des services. Cette notion est inconnue en common law. Il a fallu qu'en Grande-Bretagne la loi soit amendée pour créer un droit statutaire relatif à une marque de services ce qui était jusqu'alors inconnu en common law. Or, la Grande-Bretagne est un pays unitaire qui peut se permettre par législation adoptée au Parlement de Londres de modifier la common law. Il en est tout autrement pour le Canada qui n'est pas un pays unitaire et dont les législatures des provinces ont la responsabilité d'adopter des lois pour modifier le droit commun. L'article 7 est un de ceux dont la constitutionnalité est la plus sérieusement mise en doute et ce malgré la décision de la Cour d'appel dans l'affaire Asbjorn Horgard A/S c. Gibbs/Nortac Industries (1987), 14 C.P.R. (3d) 314. Le contexte de la présente conférence ne me permet pas d'entrer dans le détail de cette décision. J'ai écrit sur le sujet dans la dernière mise à jour du Canadian Trade Marks Act Annotated, [Robic-Leger-Canadian Trade Marks Act Annotated, Hugues G.Richard, éd., Richard De Boo Publishers, Toronto, 1983] aux pages 80 et suivantes du "Cumulative Supplement" (un article sur ce sujet apparaîtra également sous peu dans Les Cahiers de Propriété Intellectuelle). Qu'il suffise de dire qu'il m'apparaît que l'honorable Juge MacGuigan a fondé sa décision sur son interprétation de l'affaire MacDonald v. Vapor. Dans cette affaire, l'honorable MacGuigan a tenté d'établir un parallèle entre la Loi sur les marques de commerce et la Loi sur le droit d'auteur. Il écrit à la page 328 de son jugement: The Canadian Act, as the statutory history set out by Laskin, C.J.C. in the MacDonald case, supra, showed, has traditionally been concerned with the protection of unregistered as well as registered trade marks. In this it is like the Copyright Act, whose coverage is broader than registered copyright. In both acts what registration does is to provide additional benefits over and above those available at common law".

Il est difficile d'être en accord avec une telle déclaration. C'est un principe de droit très bien établi qu'il n'existe aucun droit d'auteur en common law. Le droit d'auteur est un droit statutaire qui est totalement régi par la Loi sur le droit d'auteur. Ceci a été confirmé par la Cour suprême du Canada dans Compo Company Ltd. v. Blue Crest Music, [1980] 1 R.C.S. 357 à la page 372 où l'honorable Juge Estey écrivait: "Mr. Hughes for the Respondent in answer to a question from the bench put it very well when he said that Copyright Law is neither tort law nor property law in classification, but is statutory law. It neither cuts across existing rights in property or conduct or falls between rights and obligations heretofore existing in the common law. Copyright Legislation simply creates rights and obligation upon the terms and in the circumstances set out in the statute". De plus, l'honorable Juge MacGuigan à la page 328 de son jugement écrit au sujet de l'article 7(b): "[It] " 'rounds out' the statutory scheme of protection"". Il semble qu'en utilisant cette expression, il se référait à un commentaire de l'honorable Juge Laskin à la page 172 de l'arrêt MacDonald v. Vapor. Il faut noter toutefois que l'expression complète utilisée par le Juge en Chef était: "round out regulatory schemes prescribed by Parliament". L'application de ce système de règlementation édicté par le Parlement ne serait pas laissée à l'initiative des particuliers sans contrôle public par un organisme qui surveillerait d'une façon permanente l'application des règlements. Ce n'est donc que dans la mesure où il existerait un organisme public exerçant ce genre de surveillance qu'il pourrait au moins y avoir quelqu'apparence de fondement à la prétention que l'article 7(b) est de portée nationale ou qu'il vise tout le Canada. Or, l'article 7 (b) ne pourrait avoir d'application constitutionnelle que s'il était assujetti à la surveillance de l'organisme public, i.e. le Registraire des marques de commerce. A tout évènement, le contexte de la présente conférence ne nous permet pas de faire une analyse complète de l'affaire Asbjorn; mon opinion toutefois est à l'effet que cet arrêt ne met pas un terme aux spécul L'article 8 est une disposition à caractère purement civil. Il confère aux bénéficiaires d'un transfert de marchandises portant une marque de commerce ou nom commercial une garantie de la part de l'auteur du transfert que la marque de commerce ou le nom commercial peut être licitement employée à l'égard de ces marchandises. Il nous semble assez évident que le Parlement fédéral n'a pas le pouvoir de légiférer de la sorte; il s'agit d'une ingérence dans un domaine purement de compétence provinciale.

L'article 9 traite d'adoption de marques interdites. On y fait la liste de divers usages prohibés. Le paragraphe 9(j) stipule que nul ne peut adopter une devise ou un mot scandaleux, obscène ou immoral. Nous voyons mal en quoi l'usage d'une devise ou d'un mot scandaleux, obscène ou immoral dans la province de l'île du Prince Edouard concernerait le Parlement fédéral? Une fois de plus, il nous semble évident que tel que libellé, ce paragraphe empiète sur des prérogatives purement provinciales. Le paragraphe 9(k) interdit l'adoption comme marque de commerce de toute matière qui peut faussement suggérer un rapport avec un particulier vivant. Nous avons peine à croire comment le Parlement fédéral peut avoir juridiction pour interdire à mon voisin d'utiliser mon nom pour faussement suggérer un rapport avec moi. Une fois de plus, il s'agit d'une affaire locale, de nature privée sur laquelle le Parlement fédéral à ce que je sache n'a aucune juridiction. Le paragraphe 9(l) pour les mêmes raisons que celles mentionnées eu égard au paragraphe (k) n'a pas non plus sa place dans une législation émanant du Parlement fédéral. Quant à l'article 10, puisqu'il s'adresse à une marque non enregistrée dont l'emploi pourrait être limité à une seule province, il est difficile de concevoir qu'il puisse connaître une application intra vires dans tous les cas. L'article 11, toujours pour les mêmes motifs, semble une fois de plus aller audelà de ce que l'on peut s'attendre d'un texte législatif émanant du Parlement fédéral. Si l'entreprise visée par l'article 11 n'est exploitée que dans la province du Nouveau-Brunswick, nous ne voyons pas comment le Parlement fédéral pourrait avoir juridiction pour priver quelqu'un d'être propriétaire d'une marque dans plusieurs des cas mentionnés aux articles 9 et 10 de la Loi. Quant aux articles 3 à 11 inclusivement tels que rédigés, puisqu'on y traite de marques de commerce non enregistrées, force est de constater qu'il s'agit de dispositions législatives qui échappent à la surveillance du Registraire des marques de commerce et en ce sens ne constituent pas une règlementation du commerce au Canada telle que cette expression fut définie par la jurisprudence du Conseil privé et de la Cour suprême du Canada. Article 16: Cet article traite des personnes admises a l'enregistrement des marques de commerce. Ainsi, une personne aura droit d'enregistrer une marque si elle ou son prédécesseur en titre a employé la marque au

Canada. L'emploi au Canada n'est pas défini mais pour y donner une interprétation constitutionnelle certaine, il faudrait que cet emploi soit dans deux provinces ou plus du Canada. Il est probable d'ailleurs qu'un amendement à l'article 16 prévoyant que l'emploi au Canada doit exister dans deux provinces ou plus ou dans une province et à l'étranger, éliminerait bien des doutes quant à la constitutionnalité de la présente Loi. Comme nous le verrons plus loin, il s'agit-là d'une solution adoptée par les Etats-Unis. La situation du Canada à cet égard ne nous semble pas très différente. L'article 19 accorde au propriétaire d'une marque enregistrée le droit exclusif à l'emploi dans tout le Canada de cette marque de commerce en liaison avec les marchandises et les services cités à l'enregistrement. Comme le mentionne Daniel Bereskin dans son article précité, à la page 701, l'article 19 de la Loi sur les Marques de Commerce donne au titulaire d'un enregistrement des droits qui dans bien des situations peuvent empiéter sur le droit de propriété appartenant à un autre à l'intérieur d'une province. En common law et en droit civil, le droit de propriété d'une marque de commerce découle de son usage. Le droit à l'usage exclusif d'une telle marque de commerce s'étend sur le territoire où cette marque est utilisée ou révélée. Il est bien évident que si l'enregistrement d'une marque a pour effet d'étendre le droit à l'usage exclusif à travers tout le Canada, cela ne peut se faire qu'au détriment des autres propriétaires de marques identiques qui auraient acquis par usage le droit exclusif à l'usage de leurs marques de commerce sur un territoire donné. En l'absence d'une stipulation dans la Loi sur les marques de commerce à l'effet que seules les marques utilisées dans plus d'une province ou dans une province et à l'étranger sont enregistrables, il est fort à craindre que l'article 19 outrepasse dans le contexte actuel les pouvoirs du Parlement fédéral. Article 20: A l'égard de cet article, les mêmes commentaires que ceux faits sur l'article 19 sont applicables. Article 23: Par l'article 23 le Parlement fédéral crée une marque de commerce d'un caractère très particulier: il s'agit de la marque de certification. Cette marque, contrairement à la marque de commerce habituelle, se distingue par le fait que son propriétaire n'a pas le droit d'utiliser la marque et que l'usage se fait par des tiers. Plutôt qu'identifier une source de provenance des biens, cette marque identifie un standard de qualité. Il est très douteux que ce genre de marque puisse exister en common law. En effet, en common law, la propriété d'une marque s'acquiert par l'usage; or, dans le cas d'une marque de certification, le propriétaire n'a pas le droit de l'utiliser. De plus, en common law, l'usage d'une marque par plus d'une personne lui fait perdre généralement son caractère distinctif, or, il va de

l'essence même d'une marque de certification qu'elle soit utilisée par des personnes autres que le propriétaire. Si donc une marque de certification n'existe pas en common law le Parlement fédéral a créé par l'article 23 une nouvelle catégorie de marques. On peut s'interroger sur sa capacité de le faire. Il est probable que des éléments de solution se retrouvent dans la décision rendue par le Conseil privé dans l'affaire Canada Standard Trade Mark A.G. Ontario v. A.G. Canada [1937] A.C. 405. A l'article 29(b) pour être consistant avec ce que nous avons dit relativement à l'article 16, on pourrait y prévoir que la marque doit avoir été employée dans deux provinces du Canada ou plus, ou dans une province et à l'étranger. En ce qui a trait au paragraphe 29(e) pour les raisons mentionnées lorsque nous commentions l'article 3, nous émettons certains doutes quant à la compétence du Parlement fédéral d'adopter une telle législation. En effet, comment le Parlement fédéral peut-il réglementer une intention d'usage d'une marque qui précèderait un usage réel alors qu'au stade de l'intention d'usage seulement, la marque de commerce comme droit ou comme bien n'existe pas. A ce sujet, un parallèle avec ce qui se passe aux Etats-Unis actuellement est d'intérêt. Aux Etats-Unis, la loi sur les marques de commerce, le Lanham Act, sera peutêtre amendée [Depuis que cette conférence fut prononcée, les amendements furent adoptés.] pour y inclure la notion "d'intention d'utiliser". Certains juristes américains s'interrogent sur la constitutionnalité d'un tel amendement. Je vous réfère à un article paru dans le Trademarks Reporter intitulé "The Constitutionality of Intent to Use Amendment to the Lanham Act" (1988) 78 TMR 361. Quant au paragraphe 29(f) qui traite des demandes d'enregistrement de marques de certification, nos commentaires relativement à l'article 23 sont pertinents. Article 47: Cet article traite du transfert de la propriété d'une marque de commerce enregistrée ou non. Il s'agit-là d'une ingérence manifeste dans un domaine de compétence des provinces. Comme nous l'avons dit au tout début, une marque de commerce est un élément de l'actif d'une entreprise. Toute question relative à la naissance, au transfert, à la subsistance et à l'extinction de ce droit de propriété relève du droit provincial. Que le Parlement fédéral veuille réglementer le transfert de marques de commerce enregistrées, à l'intérieur de certaines limites (e.g. marques de commerce liées article 15), ceci pourrait être constitutionnel. Mais, lorsque le Parlement fédéral s'arroge le droit de légiférer sur le transfert de marques de commerce non enregistrées, il nous semble que l'empiètement est évident.

Article 48: Cet article traite des changements apportés aux fins de l'emploi d'une marque. Il s'adresse aux marques de commerce enregistrées ou non. Dans la mesure où cet article pourrait s'appliquer à une marque de commerce non enregistrée utilisée dans une seule province, nous avons peine à concevoir que le Parlement fédéral puisse légiférer sur sa validité ou sur son invalidité. Article 49: Une marque de commerce en vertu de la common law et du droit civil, pour subsister, doit conserver son caractère distinctif. En droit provincial, la perte du caractère distinctif d'une marque est une question de faits. La common law semble être assez intransigeante quant à l'effet de l'usage par un tiers d'une marque de commerce puisque cet usage entraînerait généralement la perte du caractère distinctif. Le droit civil ne connait pas cette intransigeance, la question de la perte du caractère distinctif demeurant dans tous les cas une question de faits. Par l'introduction de l'article 49 le Parlement fédéral a créé une exception au principe de common law voulant que l'usage par un tiers d'une marque de commerce entraîne la perte de son caractère distinctif. Nous nous interrogeons sur la juridiction du Parlement fédéral pour établir une telle exception. Comment le Parlement fédéral peut-il établir comme il le fait à l'article 49(3) la présomption de droit voulant que l'emploi d'une marque de commerce par un usager inscrit ait le même effet qu'un emploi de cette marque par le propriétaire inscrit aux fins de la présente Loi? A cause de cette présomption de droit l'usage d'une marque de commerce par un tiers pourrait de fait lui faire perdre son caractère distinctif alors qu'en droit aucune atteinte au caractère distinctif n'aurait eu lieu. Il fait peu de doute que l'article 49(3) amende la common law; est-ce là une compétence du fédéral? D'ailleurs, il est actuellement question d'abolir l'article 49 et si de fait cet article était aboli, l'appréciation de la perte du caractère distinctif d'une marque de commerce devra à nouveau se faire selon les critères du droit provincial à moins que le Parlement fédéral ne s'ingère une fois de plus dans le domaine du droit provincial pour définir les conditions à respecter pour qu'il n'y ait pas perte de caractère distinctif. Cette nouvelle ingérence risquerait d'être également d'une constitutionnalité douteuse. Cette ingérence serait encore plus évidente si les amendements visaient à la fois les marques de commerce enregistrées et celles qui ne le sont pas. Il semble d'ailleurs que les amendements proposés toucheront également les marques non enregistrées. Article 50: Cet article traite de l'utilisation d'une marque de commerce par des compagnies connexes en liaison avec des préparations

pharmaceutiques. Cet article traite de marques de commerce enregistrées ou non. A cet égard, nous émettons l'opinion dans la mesure où ces marques de commerce sont utilisées à l'intérieur d'une seule province et ne sont pas assujetties au pouvoir de surveillance du Registraire des marques de commerce, en vertu de l'article 91(2) de la Loi constitutionnelle de 1867 le Parlement fédéral ne devrait pas avoir juridiction pour l'adopter. Article 5l: Même si l'article 51 n'a plus d'application aujourd'hui, il démontre le souci du législateur relativement au fait que l'usage d'une marque de commerce par un licencié autre qu'un usager inscrit pourrait invalider l'enregistrement de la marque. Il est intéressant de noter que contrairement à l'article 18, ce n'est pas l'enregistrement qui serait invalidé sous l'article 51 mais la marque de commerce elle-même. Il est également intéressant de noter que l'article 51 a pour but de valider rétroactivement une marque de commerce qui par ailleurs sous la common law aurait perdu son caractère distinctif. Il nous semble que le sujet traité par l'article 51 est en dehors des compétences du Parlement fédéral et dans la mesure où il amenderait la common law, il empièterait sur les compétences des législatures des provinces. L'article 52 traite de procédures judiciaires relativement à la garde de marchandises faisant l'objet de contravention. Cet article ne se limite pas toutefois à des objets portant une marque de commerce enregistrée mais s'applique également à des objets portant un simple nom commercial. Nous pouvons imaginer bien des situations où par l'application de l'article 52 à des objets portant un nom commercial, le Parlement fédéral s'ingèrerait dans des questions d'ordre purement privé et de droit provincial. Si les produits que l'on tente de saisir ne font pas l'objet d'un commerce inter-provincial ni international et ne comportent pas de marque de commerce enregistrée, marque sur laquelle le Registraire des marques de commerce appliquerait sa règlementation, il serait assez étonnant de concevoir que le Parlement fédéral puisse en légiférer car alors il légifèrerait dans une matière de procédures judiciaires relevant du droit provincial. Il va sans dire que la revue que j'ai faite des articles de la Loi sur les marques de commerce est superficielle. Afin de véritablement discuter de la constitutionnalité de chacun d'eux, il faudrait y mettre autant d'énergie que l'honorable Juge Laskin a eu à en mettre pour décider de l'inconstitutionnalité de l'article 7(e) de la Loi. Le contexte de la présente conférence ne nous permet pas d'approfondir chacun des cas. Le but que je poursuis est de soulever dans vos esprits certains doutes quant à la constitutionnalité des articles mentionnés ci-haut. L'intérêt que l'on peut avoir pour l'adoption de législation provinciale en matière de marques de commerce est directement lié au doute que l'on peut avoir quant à la constitutionnalité de toute ou partie de la Loi sur les marques de commerce.

Une des difficultés que nous avons au Canada en matière de litige sur les marques de commerce prend son origine dans le quiproquo ou le mythe dont j'ai parlé plus tôt. La plupart des juges et bien des avocats sont sous l'impression que le Parlement fédéral détient toute la juridiction en matière de marques de commerce. Or, fonctionnant sur cette mécompréhension de notre système juridique, le spécialiste doit constamment faire l'éducation de la cour et souvent de son adversaire sur la nature réelle d'une marque de commerce et la portée relativement limitée de la Loi sur les marques de commerce. Le vacuum juridique statutaire provincial ne fait qu'amplifier cette difficulté. Si les dix provinces du Canada adoptaient des legislations uniformisées en matière de marques de commerce et si par ailleurs le Parlement fédéral amendait la présente loi pour faire en sorte que notre droit canadien sur les marques soit réellement un tissu intégré de législations, le résultat servirait mieux et avec plus de certitude les justiciables canadiens. Le plus grand problème que nous avons à l'heure actuelle c'est l'incertitutde. Il semble que ce soit une mauvaise approche que d'avoir une seule loi sur les marques de commerce constamment menacée soit en partie ou en totalité d'inconstitutionnalité. Les justiciables canadiens méritent mieux que ça. Il nous semble qu'il soit plus facile de faire adopter par nos onze gouvernements des législations compatibles et harmonisées en matière de marques de commerce que de proposer un amendement à notre constitution conférant au Parlement fédéral plus de pouvoir en cette matière. Aux Etats-Unis, notre contrepartie américaine, à savoir, the United States Trademark Association (USTA), a dès 1949 préparé un projet de loi intitulée "Model State Trademark Bill". En date d'aujourd'hui, mes informations sont à l'effet que 46 états ont adopté une loi sur les marques de commerce fondée sur ce modèle préparé par l'usta. Au Canada, l'institut des Brevets et Marques pourrait se donner comme mission de préparer un tel modèle de législation provinciale et un modèle de législation fédérale en matière de marques de commerce et de concurrence déloyale. En invitant les provinces à occuper d'une façon plus active et dynamique ce champ de compétence qu'elles partagent avec le Parlement fédéral, l'institut contribuerait grandement à clarifier plusieurs ambiguïtés qui règnent présentement et qui continueront de régner tant et aussi longtemps que chacun des ordres de gouvernement de ce pays n'aura pas assumé sa part de responsabilité. Au Canada, le droit des marques a évolué sous

l'influence constante de la Grande-Bretagne; cette constatation est même vraie pour le Québec mais à un degré moindre. En adoptant comme modèle celui de la Grande-Bretagne, le Canada doit constamment se rappeler que le Parlement de Londres est celui d'un pays unitaire exerçant sa juridiction sur l'ensemble des matières législatives. En important au Canada tant les textes législatifs que les décisions judiciaires de Grande-Bretagne, nous courons le risque de l'inconstitutionnalité si nous oublions la structure fédérale de notre pays. Ainsi, en Grande-Bretagne le Parlement de Londres a pu modifier la common law en adoptant une disposition législative permettant l'enregistrement de marques de commerce utilisées en liaison avec des services. Il s'agissait-là d'un amendement à la règle de droit édictée par la common law. Lorsqu'au Canada on a voulu faire la même chose, on a surement omis de se rappeler que la common law n'était pas une affaire fédérale mais une affaire des provinces. Ainsi, la constitutionnalité des dispositions de la Loi sur les marques de Commerce canadienne touchant les marques de service peut être mise en doute. Le même commentaire pourrait s'appliquer sur l'enregistrement d'une marque sur une base projetée, sur l'introduction du concept de marques de certification et généralement sur la plupart des points soulevés lorsque précédemment j'ai discuté des doutes que j'avais sur la constitutionnalité de plusieurs articles de notre loi canadienne. Par des législations provinciales et fédérales harmonisées, le Canada pourrait se doter d'un système de marques de commerce mieux adapté à notre réalité politique et juridique. Aux Etats-Unis, ce sont les états qui les premiers ont adopté des législations en matière de marques de commerce et de concurrence déloyale. En fait, ce fut l'état de New York qui en 1845 adopta la loi intitulée "An Act To Prevent Fraud In The Use Of False Stamps And Labels". Entre 1847 et 1866 onze autres états adoptèrent des législations en matière de marques de commerce. La première loi fédérale américaine sur les marques de commerce remonte à 1870. Cette loi portait le titre "An Act To Revise, Consolidate And Amend The Statutes Relating To Patents And Copyrights". Malgré son titre, cette loi traitait de marques de commerce, prévoyait leur enregistrement sans la nécessité d'un usage;, l'intention d'adopter et d'utiliser la marque suffisait. Cette loi fut considérée comme inconstitutionnelle par jugement rendu en 1879. En 1881 une nouvelle loi fut adoptée et probablement par prudence, elle se limitait aux marques de commerce "used in commerce" avec les pays étrangers et avec les tribus indiennes.

En 1905 une nouvelle loi fut adoptée et demeura sensiblement la même pour les 42 ans qui ont suivi. C'est le 5 juillet 1946 que fut adopté le Lanham Act qui ne devait toutefois entrer en vigueur qu'une année plus tard. La constitution américaine, comme celle du Canada, accorde le pouvoir de légiférer en matière de propriété et de droit civil aux états membres de la fédération; elle accorde au législateur fédéral le pouvoir de réglementer les échanges et le commerce. La fédération canadienne telle qu'elle a évolué depuis 1867 a permis de développer un Canada beaucoup moins centralisé que ne le sont les Etats-Unis. Les pouvoirs de préemption du législateur fédéral américain dépassent de beaucoup ceux du législateur canadien. En fait, au Canada, le pouvoir de préemption du fédéral ne peut être exercé que dans les cas où le fédéral a une juridiction nette et précise, ce qui n'est pas le cas lorsque sa juridiction est fondée sur son pouvoir de réglementer les échanges et le commerce, cette disposition ayant été interprétée très restrictivement par nos tribunaux supérieurs. Les états des Etats-Unis ont senti la nécessité de légiférer en matière de marques de commerce et de concurrence déloyale, je comprendrais mal comment dans un état décentralisé comme le Canada de telles législations ne pourraient pas être possibles. Non seulement suis-je d'avis que de telles législations pourraient êtres possibles, je suis également d'avis qu'elles seraient très utiles dans la mesure où elles clarifieraient l'atmosphère nébuleuse entourant tout notre système de marques de commerce au Canada. Les législations provinciales en matière de marques de commerce serviraient les intérêts de la moyenne et petite entreprise au Canada; cette entreprise qui oeuvre généralement à l'intérieur d'une même province. Les statistiques officielles nous confirment que la petite et moyenne entreprise au Canada est de loin le plus grand employeur au pays et génère la plus grande partie de notre produit national brut. Cette moyenne et petite entreprise mérite donc qu'on adapte notre système de marques de commerce canadien non seulement à la mesure des grandes entreprises nationales mais également à la mesure des entreprises plus modestes. De toute façon, indépendamment de cette considération économique, sur le plan strictement juridique l'absence de législation en matière de marques de commerce au niveau provincial est la cause principale de l'ambiguïté néfaste et de l'incertitude dans lesquelles nous nous trouvons avec le système actuel. Une loi incertaine est une mauvaise loi. Tout justiciable a le droit de prévoir ce que sont ses obligations et ses droits; or, notre système actuel ne permet pas aux justiciables canadiens de connaître avec une relative certitude quels sont leurs droits et leurs devoirs en matière de marques de commerce au Canada.

L'absence de codification de la common law comme d'ailleurs l'absence de codification dans la province de Québec des règles relatives aux marques de commerce ont permis, et d'une certaine manière, ont incité le Parlement fédéral à légiférer au-delà de ses compétences en matière de marques de commerce. Il est bien connu que le principe physique voulant que le vide se remplisse, connait sa contrepartie en matière législative au Canada. La création de registres de marques de commerce provinciaux pourrait publiciser l'usage de certaines marques de commerce qui autrement ne seraient enregistrées nulle part. De plus, tout le domaine de la concurrence déloyale étant actuellement non codifié donne aux contrefacteurs et aux copieurs une chance qu'ils ne méritent pas. Par une codification des recours en matière de concurrence déloyale, les provinces pourraient introduire de nouveaux moyens permettant aux innovateurs et aux hommes d'affaires honnêtes de se protéger plus efficacement. Si l'on pèse le pour et le contre, il m'apparaît que le système canadien des marques de commerce s'en porterait mieux si les provinces acceptaient leur part de responsabilité dans la protection des droits des propriétaires de marques de commerce. L'idée étant maintenant lancée, on peut se demander si notre Institut, à l'instar de l'usta, n'aurait pas intérêt à prendre l'initiative dans ce domaine et préparer des lois cadre permettant aux provinces et au fédéral de légiférer d'une façon harmonieuse au Canada. Le résultat de cette initiative serait pour le Canada un pas de plus vers la protection d'un élément important du patrimoine économique des entreprises canadiennes.

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