Les effets de la cession de créance



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Transcription:

HOFFMANN Cynthia Université Paris 1-Panthéon Sorbonne M2 Droit privé général Année 2009-2010 Les effets de la cession de créance Sous la direction de M. le Professeur Philippe STOFFEL-MUNCK 1

Introduction La cession de créance est une technique juridique très utile à la vie des affaires par laquelle un créancier, le cédant, transfère à une autre personne, le cessionnaire, une créance qu il détenait sur son débiteur, le débiteur cédé. Le Code civil ne la définit pas, au contraire de l avant projet de réforme du droit des obligations, dit projet Catala 1, qui dispose : «la cession de créance est une convention par laquelle le créancier cédant transmet tout ou partie de sa créance à un tiers cessionnaire, par vente, donation ou autre titre particulier» (art. 1251). L intérêt de l opération, en comparaison avec d autres, est que le cessionnaire recueille la créance telle qu elle existait entre les mains du cédant, avec ses accessoires, sans avoir à recueillir le consentement du débiteur cédé. Il n a cependant pas toujours été possible de transmettre ainsi un lien d obligation. En effet, en droit romain, un tel lien était personnel et formaliste, ce qui le rendait alors intransmissible. Ainsi, deux obstacles se dressaient contre la transmission de l obligation : la notion de lien personnel, selon laquelle la transmission de l obligation ne peut que nécessairement créer un lien nouveau et le formalisme, selon lequel l obligation ne peut que naître de formalités accomplies par le créancier et le débiteur eux-mêmes 2. Cette intransmissibilité n a été remise en cause que par touches successives 3. Cette remise en cause a, en premier lieu, concerné la transmission de l obligation à cause de mort, en raison de la nécessité de continuer la personne du défunt. Quant à la transmission entre vifs, des modes indirects de transmission de la créance se sont alors développés. On a ainsi recouru à la novation par changement de créancier, technique insatisfaisante dans la mesure où elle conduit à l extinction du rapport originaire et à la naissance corrélative d un nouveau rapport, ou à la procuratio in rem suam qui utilise le mandat mais dispense le mandataire de rendre des comptes. Mais le mandat 1 Avant-projet de réforme du droit des obligations (art. 1101 à 1386 Cciv) et de la prescription (art. 2234 à 2281 Cciv), remis à M. Pascal CLEMENT, Garde des Sceaux, Ministre de la Justice, le 22 septembre 2005, publié à la Documentation française, 2006. 2 E. Fraud, La notion de transfert de créance, RRJ 1998, 817. 3 Ph. Malaurie, L. Aynès, Ph. Stoffel-Munck, Les obligations, Defrénois, 4 ème édition, 2009. 2

devenant caduc au décès du mandant, cette technique a, elle aussi, montré ses limites lorsque cet évènement se produisait avant l exécution de l obligation. On a dès lors reconnu l artifice des solutions détournées et la nécessité de recourir à une véritable transmission de la créance entre vifs. Celle-ci n a été rendue possible que par l atténuation du caractère personnel de ce lien que l on a considéré petit à petit comme une valeur économique. L Ancien droit a admis une telle transmission tout en la complétant par une notification de la cession au débiteur lui enjoignant de payer entre les mains du cessionnaire afin d éviter qu il ne paie le cédant. Mais ce n est que sous le Code civil que la cession de créance s est vue consacrée véritablement aux articles 1689 et suivants, au Titre consacré à la vente. Elle a alors connu un succès vif qui peut notamment s expliquer par les fonctions qu elle reçoit. On reconnaît en effet traditionnellement trois fonctions à la cession de créance 4. Tout d abord, celle-ci peut constituer le moyen pour le cédant de mobiliser une créance non encore échue. Elle peut alors être à titre gratuit, et ainsi faire l objet d une donation ou d un legs, ou à titre onéreux, et elle relève alors de la spéculation, le créancier se procurant immédiatement des liquidités en cédant la créance pour un prix inférieur à son montant nominal et le cessionnaire pouvant cependant exiger d en recevoir le montant nominal. Elle peut, ensuite, constituer un moyen de paiement. Cette fonction se retrouve dans l hypothèse où le cédant est lui-même débiteur du cessionnaire et se libère en lui transférant la propriété d une créance qu il détient sur une autre personne. L extinction de la dette du cédant ne se produit que lorsque le cédé satisfait à son obligation, sauf convention contraire entre le cédant et le cessionnaire 5. Enfin, la cession de créance peut être faite à titre de garantie, on l appelle alors cession fiduciaire. Un débiteur cède à son créancier la créance qu il détient sur un tiers afin de constituer une sûreté. Ce transfert se fera le plus souvent à titre temporaire si le cédant, débiteur du cessionnaire, exécute son obligation. Dans le cas contraire, le créancier, mettant en œuvre la garantie ainsi constituée, se fera payer par 4 Ph. Malaurie, L. Aynès, Ph. Stoffel-Munck, Les obligations, Defrénois, 4 ème édition, 2009. 5 Com, 23 juin 1992, Bull. civ. IV, n 245 ; JCP G 1992, IV, 2441, RTD civ. 1993, 357, obs. J. Mestre. 3

le débiteur cédé. Il est douteux que cette fonction soit admise en matière de cession de créance de droit commun. La Première chambre civile de la Cour de cassation y a semblé ouverte 6, mais la Chambre commerciale l a plus récemment requalifiée en nantissement de créance 7. Cependant, l avant-projet de réforme du droit des obligations prévoit expressément la possibilité de céder une créance «sans stipulation de prix, à titre de garantie» (art. 1257-1). La créance cédée reviendrait alors au cédant s il exécute l obligation garantie ou lorsque cette obligation s éteindrait pour une autre cause. Les conditions imposés par le Code ne sont que peu contraignantes inter partes. Ce sont les conditions classiques de validité des conventions qui trouvent ici à s appliquer : consentement, capacité, objet et cause. De plus, toute créance peut en principe être cédée, sauf exclusion légale, comme en matière de créance alimentaire, ou conventionnelle, par la stipulation d une clause d incessibilité. Quant aux effets de la cession entre les parties, ils se produisent dès l échange des consentements et recouvrent, pour leur majeure partie, ceux d une vente classique, quand la cession est faite à titre onéreux, ou d une libéralité, quand la cession est faite à titre gratuit. Mais le régime posé par le Code civil impose aux parties le respect de règles précises de publicité pour que la cession puisse produire effet à l égard des tiers, ce sont les formalités de l article 1690. Cet article impose une information du débiteur cédé par acte authentique soit par voie d un exploit d huissier, soit par l acceptation du débiteur dans un acte authentique. Avant l accomplissement de ces formalités, le cédant conserve sa qualité de créancier à l égard des tiers, ceux-ci pouvant alors tout à fait ignorer le cessionnaire. L accomplissement des formalités doit donc être effectué le plus rapidement possible afin d éviter que le cessionnaire ne perde son droit en raison, par exemple, d un paiement valablement effectué entre les mains du cédant ou d une signification plus rapide d un autre cessionnaire, ou ne le voit modifié, notamment sous l impulsion du cédant. 6 Civ1, 20 mars 2001, Bull. civ. I, n 76 ; D. 2001, 3110, note L. Aynès ; RD banc. et fin. 2001, n 224, obs. D. Legeais. La Cour décide ici que «des créances futures ou éventuelles peuvent faire l objet d un contrat, sous la réserve de leur suffisante identification». 7 Com, 19 décembre 2006, Bull. cjv. IV, n 250 ; D. 2007, 344 note C. Larroumet ; JCP G 2007, II, 10067, note D. Legeais. 4

Ce formalisme fait actuellement l objet de vives critiques dans la mesure où il a conduit les professionnels à se désintéresser de la cession de créance de droit commun au profit de cessions spéciales mises en place par le législateur. En effet, la vie des affaires requiert la célérité, la sécurité et la recherche d un moindre coût, ce que ne permet pas la soumission de l opération au régime des articles 1689 et suivants du Code civil. Plusieurs techniques ont alors été développées par le législateur pour écarter l application des formalités prescrites à l article 1690. Ces formes simplifiées de cession de créance s appliquent aux créances constatées par des titres négociables 8. De tels titres sont en eux-mêmes la matérialisation de la créance, ce qui en facilite la transmission et sécurise la transaction. Trois formes de titres négociables sont reconnues. Les titres nominatifs, tout d abord, sont en principe émis par l Etat, les collectivités locales ou une société afin de constater leur emprunt. Ces organismes tiennent alors un registre contenant le nom des titulaires de ces titres. Dès lors, la transmission peut se faire par remise du titre et modification de l inscription. Les titres à ordre, ensuite, comprennent une clause à ordre invitant le débiteur à payer le créancier ou une personne désignée par lui. Cette clause permet la transmission du titre par simple endossement. Les formes les plus courantes de titre à ordre sont la lettre de change, le chèque ou encore le billet à ordre. Les titres au porteur, enfin, ne comportent pas la désignation de leur titulaire mais une mention selon laquelle ils sont payables au porteur. Leur transmission s opère simplement par la remise du titre à un nouveau porteur. Cette technique est néanmoins peu sécurisée en raison du risque important de perte ou de vol du titre. Mais la forme la plus utilisée aujourd hui est la cession par bordereau des créances professionnelles, dite cession Dailly. Elle a été instituée par la loi du 2 janvier 1981 modifiée par la loi du 24 janvier 1984 et codifiée aux articles L313-23 et suivants du Code monétaire et financier. La cession de créances professionnelles est alors permise au profit des établissements de crédit par simple remise d un bordereau désignant précisément les créances transmises. Ce procédé est cependant réservé aux créances 8 F. Terré, P. Simler, Y. Lequette, Droit civil, Les obligations, Précis Dalloz, 10 ème édition, 2009. 5

résultant d une activité professionnelle et le cessionnaire ne peut être qu un établissement de crédit. La cession est alors efficace entre les parties en même temps qu opposable aux tiers dès la date portée sur le bordereau. L information du débiteur n est ici qu une simple faculté offerte par la loi sans imposer de forme particulière 9. La pratique avait développé la cession Dailly dans un domaine que la loi n avait pas envisagé, à titre de garantie d un crédit. On voit dès lors pourquoi les professionnels recourent plutôt à ce mécanisme, la cession de droit commun ne permettant pas de l utiliser à de telles fins. Cette technique a été, par la suite, entérinée par le législateur en 1984 10. Le recours à ces procédés simplifiés est aujourd hui dénoncé comme ayant montré ses limites et certains préconisent le retour à la cession de créance de droit commun, après une nécessaire simplification de son régime 11. En effet, la multiplication des régimes spéciaux donne de moins en moins de lisibilité à la matière et l ajustement de la technique de droit commun aux exigences du droit des affaires semblerait un remède à cette inflation. Des projets de réforme ont alors été rédigés afin de remédier à ces inconvénients dénoncés. Au niveau européen, ce sont les Principes Unidroit 12 et les Principes du droit européen des contrats 13, ces derniers ayant été repris, mot pour mot en matière de cession de créance, par le Projet de cadre commun de référence 14. Ces Principes tendent à harmoniser les législations nationales en matière internationale. Ils peuvent, par conséquent, servir de base à une réflexion sur une réforme de la cession de créance. Au niveau national, l avant-projet de réforme du droit des obligations, s inspirant du régime de la cession Dailly et évoquant les Principes européens, se propose de simplifier l opération en abrogeant les dispositions de l article 1690 et en ne conservant qu une simple formalité d information du débiteur cédé. Mais il a fait 9 Art. L313-28 CMF. 10 Art. L313-24 CMF. 11 C. Dugué, Réhabilitons la cession de créance de droit commun!, Rev. dr. banc. et fin. 2004, 163. 12 Principes d Unidroit relatifs aux contrats du commerce international, Institut international pour l unification du droit privé, 2004. 13 Principes du droit européen du contrat, Société de législation comparée, Droit privé comparé et européen, volume 2, 2003. 14 Projet de cadre commun de référence, Principes contractuels communs, Association Henri Capitant des Amis de la Culture Juridique Française, Société de législation comparée, Droit privé comparé et européen, volume 7, 2008. 6

l objet de critiques en distinguant, dans la date de l opposabilité au tiers, entre le débiteur cédé et les autres tiers, cette distinction complexifiant le régime. En effet, il préconise de rendre la cession opposable au débiteur cédé seulement à compter de la notification qui lui en serait faite, tandis qu elle serait opposable aux autres tiers en même temps qu elle serait efficace entre les parties, c'est-à-dire dès l établissement de l acte de cession. On peut cependant regretter l absence de prise en compte de cette proposition de réforme dans la mesure où le projet gouvernemental de réforme du droit des contrats 15 se borne au droit des contrats et ne prévoit par conséquent pas de réformer la cession de créance. Il se présente alors comme un projet moins ambitieux que celui proposé par la commission Catala. De plus, la réforme tarde à se mettre en place, l avantprojet Catala ayant été présenté en 2005. Il nous faut alors nous interroger sur les effets que produit la cession de créance de droit commun afin d en déterminer les limites et la nécessité de réformer la matière. En d autres termes, dans quelle mesure les effets de la cession de créance de droit commun rendent-ils celle-ci inadaptée aux exigences actuelles des affaires provoquant ainsi une désaffection pour cette technique? De tels effets doivent être examinés au regard de deux types de relations nées de la cession de créance. En premier lieu, la cession de créance produit des effets entre les parties liées par le contrat de cession lui-même, c'est-à-dire le cédant et le cessionnaire (partie 1). Ces effets ne font pas actuellement l objet de critiques particulières et l avant-projet propose, en majeure partie, de les reprendre tels qu ils existent déjà. En second lieu, cette cession influe sur la situation des tiers qui se voit modifiée par la convention passée entre cédant et cessionnaire (partie 2). C est sur ce point que les critiques les plus vives se sont dressées et les propositions de l avant-projet de réforme ne permettent pas de parvenir à un consensus. 15 Non publié. 7

Partie 1 : Les effets de la cession de créance dans les rapports entre les parties au contrat de cession Entre le cédant et le cessionnaire, la cession de créance produit deux types d effets : un effet translatif, celui de la créance qui fait l objet du contrat entre le cédant et le cessionnaire (chapitre 1), et un effet créateur d obligations en vertu duquel le cédant devient garant de l existence de la créance (chapitre 2). 8

Chapitre 1 : L effet translatif de la cession de créance L effet translatif de la cession de créance ne diffère pas selon que la cession est à titre gratuit ou onéreux. L étendue de la cession de créance réalisée au profit du cessionnaire doit être envisagée en deux temps : tout d abord, la cession emporte transmission de la créance en elle-même (section 1) mais le Code civil prévoit, en outre, la transmission de ses accessoires (section 2). Section 1 : Le transfert de la créance Le transfert de la créance elle-même s opère, comme en matière de vente, immédiatement par la rencontre des volontés (I). L opération ainsi réalisée est neutre en ce qu elle ne modifie pas les caractères de la créance transmise (II). I. Le transfert immédiat de la créance Entre le cédant et le cessionnaire, la cession de créance produit ses effets immédiatement. Ainsi, la cession est accomplie dès lors qu il y a accord sur la chose et sur le prix (A). Mais le cessionnaire, en tant qu ayant-cause du cédant, ne devient pas lui-même partie au contrat liant ce dernier au débiteur cédé (B). A. La cession de créance, un contrat consensuel Prenant les règles qui régissent le droit commun de la vente, la cession de créance est parfaite «dès qu on est convenu de la chose et du prix» (art. 1583 Cciv). La cession de créance est donc un contrat consensuel qui se forme par le seul échange des consentements 16. L avant-projet Catala préconise de maintenir le transfert immédiat de la créance entre les parties, dès l établissement de l acte de cession (art. 1254), de même que le Projet de cadre commun de référence (art. 11:106) et les principes Unidroit (art. 9.1.7) qui disposent : «une créance est cédée par la seule convention entre cédant et 16 F. Terré, P. Simler, Y. Lequette, Droit civil, Les obligations, Précis Dalloz, 10 ème édition, 2009. 9

cessionnaire, sans notification au débiteur». Le consentement du débiteur n est alors pas requis, sauf si le contrat originel est intuitu personae. L article 1689 du Code civil dispose : «dans le transport d une créance ( ) la délivrance s opère entre le cédant et le cessionnaire par la remise du titre». Néanmoins, cet article ne fait pas référence à la formation du contrat de cession mais à son exécution 17. Dès la cession, et bien que celle-ci ne soit pas encore opposable aux tiers du fait du non-accomplissement des formalités prévues par le Code civil, le cédant ne peut alors plus modifier l étendue des droits transmis sans accord du cessionnaire 18. Dans le cas contraire, il pourrait engager sa responsabilité à l égard de celui-ci. Dès la formation de la cession, le cessionnaire devient alors titulaire de la créance concernée. Cependant, celui-ci n acquiert pas la qualité de partie au contrat d où est issue la créance, il n est, dans ce rapport d obligation, que l ayant-cause du cédant. B. Le cessionnaire, ayant-cause du cédant Le contrat de cession confère au cessionnaire la titularité de la créance cédée mais celui-ci ne devient pas pour autant partie au contrat originaire 19. Par conséquent, la cession n a pas pour effet de créer en elle-même un lien entre le débiteur cédé et le cessionnaire. Ce dernier n est que l ayant-cause à titre particulier du cédant tant que les formalités d opposabilité ne sont pas accomplies 20. La situation du cessionnaire avant l accomplissement des formalités de l article 1690 est délicate. Titulaire de la créance mais ne pouvant pas encore opposer ce droit aux tiers, il risque de voir le cédant se faire payer valablement voire accomplir des actes qui seraient néfastes pour son droit. La jurisprudence lui a alors reconnu le droit de prendre des mesures conservatoires notamment par le biais de cause d interruption de la prescription extinctive. 17 F. Terré, P. Simler, Y. Lequette, Droit civil, Les obligations, Précis Dalloz, 10 ème édition, 2009. 18 Com, 8 novembre 1994, D. 1995, 10. 19 Com, 21 novembre 2000, Bull. civ. IV, n 180, p.158 ; D. 2001, 123 obs. V. Avena-Robardet. 20 M. Billiau, La transmission des créances et des dettes, LGDJ, 2002. 10

Ainsi, le transfert de la créance s opère immédiatement entre les parties à la cession, sous réserve des difficultés soulevées résultant de l exigence des formalités d opposabilité de la cession aux tiers. Ce transfert de la créance est une opération neutre en ce sens que le cessionnaire acquiert la créance exactement dans l état où elle se trouvait entre les mains du cédant. II. Une opération neutre La cession de créance étant une hypothèse particulière de vente, les effets de cette dernière sont en large part repris dans le régime de la cession 21. Celle-ci n emporte pas création d une obligation nouvelle mais, au contraire, la créance cédée conserve son identité et ses caractères originaires (A). Néanmoins, certains caractères, personnels au cédant, ne se retrouvent pas inclus dans le transfert ainsi réalisé (B). A. La conservation de l identité et des caractères de la créance originelle La cession de créance, contrairement à d autres techniques du droit des obligations telles que la novation qui suppose l extinction d une obligation et la naissance corrélative d une obligation nouvelle, emporte transfert de la créance du cédant au cessionnaire qui devient donc titulaire de la créance originelle. Il s opère entre les parties au contrat initial d où est issue la créance un changement de créancier mais la créance demeure telle qu elle était 22. Le principe nemo plus juris s applique ici : le cessionnaire acquiert autant de droits qu en avait le cédant, pas plus mais pas moins non plus. Cette créance transférée conserve par là même sa nature, qu elle soit civile ou commerciale. Elle conserve, de plus, ses modalités. Ainsi, si le contrat originel stipulait un terme, celui-ci n est pas déchu du seul fait de la cession. 21 F. Terré, P. Simler, Y. Lequette, Droit civil, Les obligations, Précis Dalloz, 10 ème édition, 2009. 22 P. Malinvaud, Droit des obligations, Litec, 10 ème édition, 2007. 11

La cession de créance permettant notamment au cédant d obtenir des liquidités rapidement, celui-ci peut parfois céder sa créance pour un montant inférieur à celui de la créance. Alors qu en matière de subrogation personnelle, le subrogé ne peut obtenir paiement que du montant que lui-même a payé, le cessionnaire recueille le montant nominal de la créance, peu important que le prix qu il ait versé au cédant y soit inférieur 23. Une exception est cependant admise par le Code civil (art. 1699) en matière de cession de créance litigieuse. Néanmoins, si le cessionnaire recueille effectivement la créance telle qu elle existait dans le contrat initial, certaines prérogatives découlant de ce dernier ne peuvent se transmettre en raison de leur attachement personnel au cédant. B. La non-transmission des caractères personnels au cédant de la créance Certains caractères de la créance ne peuvent pas passer sur la tête du cessionnaire en raison de leur caractère personnel au cédant. J. Carbonnier écrivait alors que les «faveurs personnelles sont intransmissibles» 24. Ainsi, si le cédant bénéficiait d une cause de suspension de la prescription en raison notamment de sa minorité, le bénéfice de cette suspension ne se reporte pas sur la tête du cessionnaire. Par conséquent, le délai de prescription commencera à courir contre le cessionnaire dès le jour de la cession. Mais, à l inverse, une telle cause de suspension peut bénéficier au cessionnaire si lui-même acquiert la créance alors qu il est mineur 25. Par ailleurs, les parties au contrat initial peuvent décider de rendre intransmissibles certaines prérogatives appartenant au cédant et, ainsi, empêcher le cessionnaire de s en prévaloir 26. 23 Ph. Malaurie, L. Aynès, Ph. Stoffel-Munck, Les obligations, Defrénois, 4 ème édition, 2009. 24 J. Carbonnier, Droit civil, Les obligations, T. 4, PUF, 22 ème édition, 2000. 25 C. Ophèle, Cession de créance, Répertoire civil Dalloz, 2008. 26 M. Cabrillac, Les accessoires de la créance, Etudes dédiées à A. Weill, Dalloz-Litec, 1983, p. 107. 12

Si l effet translatif de la cession de créance s opère quant à la créance elle-même, il en est de même de ses accessoires en vertu du principe selon lequel l accessoire suit le principal. Section 2 : Le transfert des accessoires de la créance Le Code civil prévoit lui-même le transfert des accessoires de la créance lors de sa cession et donne énumération de certains d entre eux (I). Néanmoins, une controverse doctrinale réserve le cas des actions dont l effet est d anéantir la créance (II). I. La notion classique d accessoire à l épreuve de la cession de créance La notion classique d accessoire de la créance a été utilisée afin de déterminer lesquels d entre eux intégraient le patrimoine du cessionnaire en même temps que la créance elle-même (A) mais devant les spécificités de la cession de créance, la Cour de cassation a procédé à une extension de cette notion au profit du cessionnaire (B). A. Les accessoires traditionnels de la créance L article 1692 du Code civil dispose : «la vente ou la cession d une créance comprend les accessoires de la créance, tels que caution, privilège et hypothèque». Réaffirmant le principe selon lequel l accessoire suit le principal (art. 1615 Cciv), cet article donne une énumération des accessoires qu il ne faut pas entendre comme une énumération exhaustive. En effet, ainsi que l a démontré M. Cabrillac dans un célèbre article 27, la notion d accessoire de la créance peut être définie comme «un droit ou une action qui n a pas d autre finalité que d en [à la créance] renforcer la valeur ou d en favoriser le recouvrement ; une prérogative dont l exercice ne peut être profitable qu à son titulaire». Par conséquent, on voit dès lors mieux la justification du principe : la 27 M. Cabrillac, Les accessoires de la créance, Etudes dédiées à A. Weill, Dalloz-Litec, 1983, p. 107. 13

prérogative ainsi transmise à titre d accessoire au cessionnaire n aurait plus d utilité pour le cédant dès le moment où il se sépare de la créance. L accessoire est au service de la créance et caractérise «tout droit ou action qui a une incidence bénéfique sur l étendue ou les modalités de la prestation due, ou fournit le moyen direct ou indirect d obtenir cette prestation, ou enfin sanctionne la défaillance du débiteur». M. Cabrillac en déduit alors que, certes, comme l indique le Code, les sûretés sont des accessoires de la créance en tant qu elles permettent au cessionnaire de se prémunir contre une éventuelle insolvabilité de son débiteur, mais que cette notion ne s y réduit pas. Il y inclut les droits qui permettent une détermination du montant de la créance (ex : clause d indexation), ceux qui déterminent l échéance (ex : clause de déchéance du terme quand elle sanctionne le défaut de paiement), les actions protégeant les droits du créancier (ex : action oblique, action paulienne) et les droits ou actions permettant d obtenir le paiement (ex : titre exécutoire). Par ailleurs, il faut en outre admettre que les intérêts à échoir sont inclus dans la notion d accessoire et sont donc transmis au cessionnaire. Quant aux intérêts échus, ils suivent eux aussi le capital dans la mesure où ils n avaient pas encore été perçus, sauf stipulation contraire dans le contrat de cession 28. La transmission des accessoires se retrouve également dans l avant-projet de réforme du droit des obligations (art. 1255) qui prévoit cependant la possibilité pour les parties de prévoir conventionnellement le contraire. Les Principes Unidroit affirment la transmission des «droits garantissant le paiement de la créance cédée» (art. 9.1.14) de même que le Projet de cadre commun de référence (art. 11:105). La Cour de cassation ayant fait sienne cette analyse de la notion d accessoire de la créance, elle l a utilisée afin de l élargir et d y inclure certains droits et actions que l on ne considérait pas comme tels. 28 M. Planiol, G. Ripert, Traité pratique de droit civil français, T. 7, Obligations, 2 ème partie, LGDJ, 2 ème édition, 1954. 14

B. L extension de la notion par la Cour de cassation Cette extension s est réalisée quant à deux types de droits et actions : la clause compromissoire et l action en responsabilité civile. Se fondant sur l article 1692 du Code civil, la Cour de cassation a affirmé la transmissibilité de la clause compromissoire en cas de cession de créance en 2001 29 par un arrêt qui se place dans la mouvance jurisprudentielle en la matière 30. L article 1442 du Code de procédure civile définit la clause compromissoire comme «la convention par laquelle les parties à un contrat s engagent à soumettre à l arbitrage les litiges qui pourraient naître relativement à ce contrat». Il résulte alors de sa définition même que la clause compromissoire lie les parties à un contrat et, en vertu de l effet relatif des contrats (art. 1165 Cciv), elle ne devrait pas concerner les tiers. Or, nous l avons vu, le cessionnaire est un tiers au contrat originaire. Pourtant, la Cour de cassation impose la transmission de la clause compromissoire lors de la cession de créance en dehors même du consentement du cessionnaire. Elle vise ici à conférer le plus d efficacité possible à une telle clause en affirmant l automaticité de sa transmission 31. La Cour de cassation a continué à étendre la notion d accessoire de la créance notamment par l affirmation de la transmission de l action en justice au cessionnaire de la créance 32. Ici aussi, elle décide que la transmission s effectue de plein droit. Plus spécifiquement, la Cour de cassation a été amenée à affirmer la transmission de plein droit de l action en responsabilité délictuelle 33 et même contractuelle 34 mais elle réserve aux parties la faculté de prévoir une convention contraire. Cette solution a été confirmée très récemment 35 et la jurisprudence est alors désormais constante. 29 Civ2, 20 décembre 2001, Bull. civ. II, n 198 ; D. 2003, 569, obs. X. Pradel ; RTD com 2002, 279, obs. E. Loquin, (pour un arbitrage interne). 30 Civ1, 5 janvier 1999, Bull. civ. I, n 1 ; Defrénois 1999, art. 37008, n 44, obs. P. Delebecque, (pour un arbitrage international). 31 X. Pradel, Cession de créance et transfert de la clause compromissoire (à propos de Civ2, 20 décembre 2001), D. 2003, 569. 32 Civ1, 10 janvier 2006, Bull. civ. I, n 6 ; D. 2006, 2129 obs. D. Bert ; Defrénois 2006, 597, obs. E. Savaux. 33 Civ1, 24 octobre 2006, Bull. civ. I, n 433 ; RDC 2007, 291, obs. G. Viney. 34 Civ1, 19 juin 2007, Bull. civ. I, n 239 ; D. 2007, AJ 1958, obs. X. Delpech. 35 Civ2, 17 décembre 2009, D. 2010, 150. 15

La jurisprudence tend à élargir la notion d accessoire pour permettre la transmission de plein droit de droits et actions au cessionnaire, parfois même au détriment de sa propre volonté. Mais elle n a pas encore résolu la question relative à la transmission des actions qui aboutissent à un anéantissement de la créance. II. La controverse liée à la transmission des actions tendant à l anéantissement de la créance La spécificité des actions tendant à l anéantissement de la créance a conduit la doctrine à se demander si ces actions pouvaient être transmises au cessionnaire dans la mesure où, s il les exerce, son droit disparaitrait. La jurisprudence n étant pas intervenue pour trancher la question, un vif débat doctrinal s est alors développé (A) mais les solutions proposées ne permettent pas de dégager de consensus (B). A. Un débat doctrinal vif Le débat doctrinal s est porté sur las actions qui tendent à anéantir la créance du cessionnaire : action en nullité, en rescision ou en résolution. En effet, en matière notamment de nullité relative (telles que les actions sanctionnant les vices du consentement), le cessionnaire ne saurait se prévaloir d une qualité à agir. Une telle action ne visant que la protection de la personne à qui elle est octroyée, seule celle-ci peut l exercer. Or, le cessionnaire n est pas partie à l acte qui est à la source de la créance 36. Mais alors quid pour les actions en nullité absolue, toute personne intéressée pouvant agir? Certains relèvent alors qu il semble contradictoire pour le cessionnaire qui a acquis une créance de mettre en œuvre une action qui aboutira à l anéantir. Quel serait son intérêt à agir, condition nécessaire à toute action en justice selon l article 31 du Code de procédure civile? D autres leur répondent que l intérêt du cessionnaire se trouve dans la possibilité, une fois la créance anéantie, d exercer l action en garantie que lui confère l article 1693 du Code civil 37. 36 M. Billiau, La transmission des créances et des dettes, LGDJ, 2002. 37 M. Billiau, La transmission des créances et des dettes, LGDJ, 2002. 16

Il est alors nécessaire d envisager les solutions proposées par ces auteurs. Celles-ci sont hétérogènes et marquent l absence de consensus doctrinal. B. Une disparité des solutions envisagées Pour certains, l action en nullité et l action en rescision ne pourraient être exercées par le cessionnaire dans la mesure où elles tendent exclusivement à l anéantissement de la créance, ce qui n est pas le cas de l action en résolution qui vise à contraindre le débiteur à exécuter son obligation 38. Ils proposent donc de distinguer, non selon le résultat de l action, mais en fonction de sa finalité. D autres préconisent la transmission de ces actions au cessionnaire dans la mesure seulement où le cédant ignorait le vice affectant la créance. En effet, selon cette conception, la cession de créance faite par le cédant vaudrait confirmation tacite de l acte et par conséquent extinction des actions 39. D autres enfin se prononcent en faveur d une transmission des actions du cédant au cessionnaire sans distinction 40. Nous le voyons bien, l effet translatif de la cession de créance, s il semble bien acquis en ce qui concerne le transfert de la créance en elle-même, ne va pas sans poser des interrogations, en particulier en ce qui concerne la transmission des accessoires de ladite créance. Mais cet effet se double d un effet créateur d obligations dans les rapports des parties entre elles. La principale d entre elles tient à l obligation de garantie due par le cédant. 38 J. Flour, J.-L. Aubert, E. Savaux, Droit civil, Les obligations, T.3 Le rapport d obligation, Sirey Université, 6 ème édition, 2009. 39 M. Planiol, G. Ripert, Traité pratique de droit civil français, T. 7, Obligations, 2 ème partie, LGDJ, 2 ème édition, 1954. 40 F. Terré, P. Simler, Y. Lequette, Droit civil, Les obligations, Précis Dalloz, 10 ème édition, 2009. 17

Chapitre 2 : Le cédant, garant de l existence de la créance Faite à titre gratuit, la cession de créance emporte pour le cessionnaire les obligations du donataire et pour le cédant celles du donateur. Quant à l effet créateur d obligations de la cession de créance à titre onéreux, il se calque sur celui de la vente. Ainsi, le cessionnaire se voit obligé de payer le prix au terme et au lieu convenus et le cédant est soumis à une obligation de délivrance (art. 1689 Cciv). Mais la principale obligation créée par la cession de créance à titre onéreux l est à l égard du cédant : c est son obligation de garantie. Cette obligation est imposée par la loi (section 1) mais peut néanmoins être aménagée en tout ou partie dans le contrat de cession (section 2). Section 1 : L obligation légale de garantie La loi détermine et borne l étendue de l obligation de garantie du cédant, en atténuant les règles prévalant en matière de vente (I) mais la sanction de sa violation demeure pour partie incertaine (II). I. L étendue de la garantie Le Code civil n impose au cédant que de garantir l existence de la créance (A), garantie qui se trouve alors doublement limitée dans le temps et dans son contenu (B). A. Une garantie de l existence de la créance L article 1693 du Code civil dispose : «celui qui vend une créance ou un autre droit incorporel, doit en garantir l existence au temps du transport, quoiqu il soit fait sans garantie». Les différents projets de réforme reprennent cette obligation : l avant projet de réforme du droit des obligations (art. 1256 alinéa 1 er ), les Principes Unidroit (art. 9.1.15) et le Projet de cadre commun de référence (art. 11:108). Ainsi, le Code impose au cédant de garantir l existence actuelle de la créance. Par conséquent, le cédant garantit sa qualité de créancier et l absence de toute exception 18

que le débiteur pourrait ensuite faire valoir contre le cessionnaire pour se libérer de son obligation 41. La Cour de cassation en a déduit que la charge de la preuve de l existence de la créance au moment de la cession pèse sur le cédant 42. La cession de créance emportant transmission des accessoires de la créance, leur existence est pareillement couverte par la garantie de droit, ce qu affirme depuis longtemps la Cour de cassation 43. Cependant, le cédant doit toujours garantie de son fait personnel, tant antérieur que postérieur à la cession 44. C est la même garantie contre l éviction que celle que doit le vendeur à l acquéreur (art. 1626). Mais cette garantie de droit est doublement limitée par le Code civil. B. Une garantie doublement limitée De la lettre même de l article 1693, on en déduit que la garantie n est due qu au jour de la cession. Ainsi, l extinction de la créance par prescription postérieurement à la cession n engage pas la responsabilité du cédant, même si elle avait commencé à courir avant la cession 45. Il faut donc ici prendre en compte la date à laquelle la cause d extinction ou d anéantissement est survenue, non celle de sa prise d effet. Mais la limitation la plus importante à la garantie due par le cédant tient à ce que celui-ci ne doit pas, de plein droit, garantir la solvabilité du débiteur. En effet, l article 1694 prévoit expressément qu il «ne répond de la solvabilité du débiteur que lorsqu il s y est engagé». Cette disposition signifie alors que, plus que la solvabilité du débiteur, le cédant ne doit pas non plus garantie de l efficacité des sûretés attachées à la créance et transmises avec elle et, partant, il ne garantit pas non plus la solvabilité des débiteurs accessoires, et on pense ici naturellement à la caution. 41 Ph. Malaurie, L. Aynès, Ph. Stoffel-Munck, Les obligations, Defrénois, 4 ème édition, 2009. 42 Com, 29 mars 1994, Bull. civ. IV, n 126. 43 Civ, 10 février 1857, DP 1857, 1, 87. 44 C. Ophèle, Cession de créance, Répertoire civil Dalloz, 2008. 45 Civ, 13 février 1849, DP 1849, 1, 40. 19

Certains expliquent ces limitations par une probable volonté des parties 46. En effet, c est cet aspect spéculatif inhérent à la cession de créance qui, justifiant que le cessionnaire paie un prix inférieur au montant de la créance, explique de même que la garantie due par le cédant ne valle pas pour l avenir. D autres considèrent que l absence de garantie de la solvabilité du débiteur peut s expliquer par le fait que «les droits de créance ne sont pas des droits sur les biens, ce sont des rapports personnels» 47. Ainsi, bien que le débiteur soit insolvable, il n en demeure pas moins que la créance existe. L étendue de la garantie de droit dictée par le Code civil est donc limitée mais elle n est pas dépourvue d effets. II. Les effets de la violation de son obligation de garantie par le cédant Les effets d une violation par le cédant de son obligation légale de garantie ne sont pas prévus par les dispositions du Code civil relatives à la cession de créance. Il faut alors se reporter au droit commun de la vente édicté par les articles 1630 et suivants du Code : le cédant verra alors sa responsabilité engagée (A) mais pourra dans certaines circonstances s en exonérer (B). A. La sanction de la violation de son obligation par le cédant La violation de son obligation de garantie par le cédant se traduit par l inexistence de la créance au jour de la cession. Lors de sa découverte, le cessionnaire peut mettre en œuvre la responsabilité du cédant et ainsi obtenir la restitution du prix versé pour l acquisition de la créance. Des difficultés ont alors été soulevées quant à la mesure de cette restitution 48. Le cédant n est-il tenu que de restituer le prix qu il a reçu ou bien le cessionnaire peut-il 46 F. Terré, P. Simler, Y. Lequette, Droit civil, Les obligations, Précis Dalloz, 10 ème édition, 2009. 47 J. Carbonnier, Droit civil, Les obligations, T. 4, PUF, 22 ème édition, 2000. 48 J. Flour, J.-L. Aubert, E. Savaux, Droit civil, Les obligations, T.3 Le rapport d obligation, Sirey Université, 6 ème édition, 2009. 20

exiger le montant nominal de la créance? Pour répondre à cette question, il faut ici encore se référer au droit commun de la vente, et plus spécifiquement à l article 1630 du Code civil. Le cessionnaire peut demander la restitution du prix versé au cédant (art. 1630, 1 ). Il peut aussi demander le paiement des intérêts qui courent à compter de la mise en demeure du cédant de même que «les frais et loyaux coûts du contrat», c'est-à-dire, notamment, les frais d une éventuelle action en justice intentée contre le débiteur (art. 1630, 4 ). Mais alors quid du dommage dont le cessionnaire pourrait se prévaloir? Si le cessionnaire parvient à démontrer que le débiteur aurait satisfait intégralement à son obligation sans la survenance de l éviction, alors le cédant lui devra des dommages et intérêts en réparation du gain manqué qui seront calculés de manière à couvrir la différence entre le montant nominal de la créance et le prix versé par le cessionnaire 49. Le cédant ayant violé son obligation de garantie doit donc réparation au cessionnaire. Mais le droit commun de la vente applicable à la cession de créance prévoit une possibilité d exonération du vendeur, que la Cour de cassation a cependant limitée. B. Une exonération de garantie restreinte La Cour de cassation est venue affirmer dans un arrêt ancien 50, réaffirmé plus récemment 51, qu à défaut de clause de non-garantie insérée dans l acte, la seule connaissance par l acquéreur du risque d éviction ne suffit pas à exonérer le vendeur qui reste donc obligé de restituer le prix. Ainsi, deux conditions sont donc nécessaires pour que le cédant ne soit tenu à aucune garantie : il faut insérer dans l acte de vente une clause de non garantie et que l acquéreur ait eu connaissance du risque d éviction. Cependant, en l absence de clause de non-garantie et même si l acquéreur déclare acheter à ses risques et périls, il semble que l obligation de garantie soit maintenue 52. L obligation de garantie à charge du cédant se révèle donc moins efficace que celle due par le vendeur, bien qu elle s en inspire. Mais les parties au contrat de cession 49 C. Ophèle, Cession de créance, Répertoire civil Dalloz, 2008. 50 Civ, 9 mars 1937, DH 1937, 253. 51 Civ3, 24 juin 1998, Bull. civ. III, n 130, p.87 ; Dr. aff. 1998, 1481. 52 J. Ghestin, M. Billiau, G. Loiseau, Traité de droit civil, Le régime des créances et des dettes, LGDJ, 2005, citant un arrêt rendu le 21 novembre 1825 (Journ. not. et av. 1826, art. 5603, p.222). 21

peuvent y déroger et, ainsi, instaurer une garantie conventionnelle, ces dispositions étant supplétives de volonté. Section 2 : Une législation supplétive de volonté Le législateur a donné à l obligation de garantie du cédant un caractère supplétif de volonté, rien n interdisant d inclure dans le contrat de cession des clauses extensives de garantie (I) ou restrictives de garantie (II). I. La possibilité d une extension conventionnelle de garantie Le contrat de cession de créance peut prévoir une extension conventionnelle de garantie sous la forme d une obligation de garantir la solvabilité du débiteur cédé (A). Mais cette faculté est encadrée par le Code qui contient une disposition protectrice du cédant (B). A. La stipulation de la garantie de la solvabilité du débiteur L article 1694 du Code civil permet aux parties au contrat de cession d aménager une garantie conventionnelle plus élargie que celle de l article 1693 en incluant la garantie de la solvabilité du débiteur. C est dans ce sens que les parties, le plus souvent, aménagent l obligation de garantie due par le cédant 53. Une telle extension de garantie suppose qu une clause claire et précise soit insérée dans le contrat de cession. A défaut, en vertu de l article 1162 du Code civil, elle sera interprétée en faveur du cessionnaire et contre le cédant 54. Cette exigence de stipulation expresse de prise en charge de la solvabilité du débiteur est reprise par l avant-projet de réforme du droit des obligations (art. 1256 al. 2). Néanmoins, la Cour de cassation a jugé que la connaissance par le cédant de l insolvabilité du débiteur au moment de la cession et la non-information du 53 Ph. Malaurie, L. Aynès, Ph. Stoffel-Munck, Les obligations, Defrénois, 4 ème édition, 2009. 54 C. Ophèle, Cession de créance, Répertoire civil Dalloz, 2008. 22

cessionnaire l oblige à garantir cette solvabilité en dehors même de toute stipulation expresse d extension de garantie 55. Les parties peuvent donc prévoir dans le contrat de cession que le cédant s oblige à garantir la solvabilité du cessionnaire mais, en raison des dangers qu une telle stipulation peut représenter pour le cédant, le Code civil est venu limiter cette liberté contractuelle. B. Une liberté encadrée par la loi Le Code civil limite doublement la faculté laissée aux parties d étendre la garantie due par le cédant. L article 1694 en limite le montant «jusqu à concurrence seulement du prix qu il [le cédant] en a retiré» et l article 1695 en restreint le domaine en disposant : «cette promesse ne s entend que de la solvabilité actuelle, et ne s étend pas au temps à venir, si le cédant ne l a expressément stipulé». Ces dispositions sont reprises, quasiment mot pour mot, par l avant-projet de réforme du droit des obligations (art. 1256 al. 2 et 3). La règle posée par l article 1694, au contraire de celle posée par l article 1695, est d ordre public. Cette disposition vise à lutter contre un éventuel cessionnaire usuraire qui acquerrait la créance à vil prix tout en se réservant la possibilité d en recouvrer le montant total en faisant jouer la garantie du cédant 56. Au contraire, les parties peuvent écarter l article 1695 et décider de faire entrer dans la garantie due par le cédant la solvabilité future du débiteur au jour de l échéance : ce sont des clauses «de fournir et faire valoir» 57, mais cette intention des parties doit être clairement exprimée. Néanmoins, outre la possibilité offerte aux partie d insérer des clauses extensives de garantie, le Code leur permet, au contraire, de restreindre une telle garantie, voire même de la supprimer. 55 Req, 14 avril 1908, DP 1908, 1, 4. 56 F. Terré, P. Simler, Y. Lequette, Droit civil, Les obligations, Précis Dalloz, 10 ème édition, 2009. 57 Ph. Malaurie, L. Aynès, Ph. Stoffel-Munck, Les obligations, Defrénois, 4 ème édition, 2009. 23

II. La possibilité d une restriction conventionnelle de garantie Les parties peuvent prévoir une restriction de garantie. Deux voies sont alors ouvertes : soit elles prévoient une simple restriction de la garantie due (A), soit elles insèrent au contrat de cession une clause qui supprime toute obligation de garantie (B). A. La stipulation de clauses restrictives de garantie Les clauses restrictives de garantie ont pour objet de limiter conventionnellement la garantie due par le cédant. Ainsi, le cédant peut déclarer ne garantir que la créance elle-même et par là même exclure de sa garantie certains voire tous les accessoires de cette créance, notamment les sûretés. La Cour de cassation a alors décidé que la stipulation selon laquelle la cession est faite «sans autre garantie que celle de l existence de la créance» valait exclusion des accessoires de la garantie 58. Mais le cédant peut par ailleurs échapper totalement à son obligation de garantie par l insertion d une clause exclusive de garantie dans le contrat de cession. B. La stipulation de clauses exclusives de garantie Ces clauses concernent l existence même de la créance qui n est alors plus garantie par le cédant, elles sont donc très dangereuses pour le cessionnaire. Néanmoins, la portée de ces clauses ne doit pas être exagérée. Le cédant, tout d abord, ne peut jamais invoquer une clause exclusive de garantie pour un fait qui lui serait personnel (art. 1628 Cciv). Il reste donc toujours tenu de garantir l inexistence de la créance qui lui serait imputable en raison d une cession de créance qui aurait produit ses effets à l égard des tiers avant celle du cessionnaire en cause ou encore d une extinction de la créance qui lui aurait profité, telle qu une compensation 59. Ensuite, 58 Req, 28 mai 1873, DP 1873, 1, 407. 59 F. Terré, P. Simler, Y. Lequette, Droit civil, Les obligations, Précis Dalloz, 10 ème édition, 2009. 24

elle ne lui évite pas de restituer le prix qu il a obtenu du cessionnaire mais seulement de lui verser en plus des dommages et intérêts que celui-ci pourrait réclamer au titre de réparation d un préjudice par lui subi. Mais la restitution du prix n est, elle-même, plus due par le cédant si le cessionnaire a acquis à ses risques et périls, notamment quand il connaissait au moment de la cession le risque d éviction 60. La cession de créance produit donc deux types d effets entre le cédant et le cessionnaire : un effet translatif en vertu duquel la créance entre dans le patrimoine de ce dernier telle qu elle existait dans celui du cédant, et un effet créateur d obligations qui se calque sur le régime d une vente classique et dont l aspect principal est celui de créer à charge du cédant une obligation de garantie, mais qui peut être aménagée par les parties. Mais la cession de créance, en ce qu elle implique un changement de créancier, produit aussi des effets à l égard des tiers, et notamment du débiteur cédé qui se voit dès lors imposer un nouveau cocontractant. Il est donc nécessaire, désormais, d envisager les effets que cette cession peut produire sur la situation des tiers. 60 Ph. Malaurie, L. Aynès, Ph. Stoffel-Munck, Les obligations, Defrénois, 4 ème édition, 2009. 25

Partie 2 : L opposabilité de la cession de créance aux tiers La Cour de cassation a donné une définition des tiers à la cession de créance comme «ceux qui, n ayant pas été partie à l acte de cession, ont intérêt à ce que le cédant soit encore créancier» 61. Ce sont alors le débiteur cédé, les créanciers du cédant et les cessionnaires successifs qui son concernés par cette définition. En droit positif, pour que la cession de créance déploie ses effets à l égard des tiers, des formalités d opposabilité doivent être réalisées par l une ou l autre des parties à la cession (chapitre 1). Mais la nécessité de réformer la matière se fait de plus en plus ressentir, la cession de créance de droit commun étant délaissée au profit d autres mécanismes qui se révèlent moins formalistes et, partant, plus compatibles avec la vie des affaires. Des projets ont alors été élaborés, tant au niveau européen 62 pour harmoniser les législations, qu au niveau national, l avant-projet de réforme du droit des obligations proposant, dans un souci de simplification de la cession de créance de droit commun, de ne conserver l exigence de formalités d opposabilité qu à l égard du cédé (chapitre 2). 61 Civ1, 4 décembre 1985, Bull. civ. I, n 336 ; RTD civ. 1986, 750, obs. J. Mestre. 62 Principes d Unidroit relatifs aux contrats du commerce international, Institut international pour l unification du droit privé, 2004 et Projet de cadre commun de référence, Principes contractuels communs, Association Henri Capitant des Amis de la Culture Juridique Française, Société de législation comparée, Droit privé comparé et européen, volume 7, 2008. 26