Chapitre1 : Introduction au travail collaboratif 1. Définition, notions voisines et lexique de termes techniques Travail collaboratif, coopératif ou encore travail de capitalisation, autant de termes dont les significations se rapprochent et méritent donc une définition et une distinction claires. Le travail collaboratif : Il s agit d un travail de groupe d égal à égal (sans lien hiérarchique de commandement ou d impulsion) qui fonctionne sans véritable organisation préalable (coordination). Chaque intervenant apporte son savoir, son idée en pouvant ou non s inspirer des apports réalisés précédemment par les autres (travail que l on peut apparenter à une réunion de type non directive recherchant la créativité) Exemple : un wiki : chaque internaute peut ajouter un commentaire sur le site ou corriger ceux des autres. Exemple : un tableau blanc : chaque internaute écrit, dessine ou dépose un document sur le tableau. Le travail se fait par accumulations et modifications permanentes ; Les rapports sont très souvent qualifiés d horizontaux ; Le mode de communication est plutôt synchrone même si le travail asynchrone n est pas impossible ; Le travail individuel est difficilement identifiable à la fin. Le travail coopératif : Le travail est un travail de groupe hiérarchiquement organisé qui fonctionne suivant un planning impliquant des délais et un partage des tâches (coordination). Chaque intervenant sait ce qu il doit faire dès le début et communique, échange ou partage des éléments uniquement pour arriver à son objectif individuel. A la fin, le travail de chacun est relié pour créer un objet unique de travail. 6
Exemple : un blog : même si chaque internaute peut apporter son commentaire, le modérateur du blog a déterminé à l avance le thème de discussion (cadrage important) et peut également à tout moment décider de supprimer un apport. Le travail se fait par addition de travaux individuels ; Les rapports sont très souvent qualifiés de verticaux ; Le mode de communication est plutôt asynchrone même si le travail synchrone n est pas impossible ; Le travail individuel est facilement identifiable à la fin. Eléments communs à ces deux notions pour une définition générale : Travail synchrone ou asynchrone réalisé à distance (réseau interne ou externe) entre deux ou plusieurs personnes à l aide d outils et de logiciels permettant une interaction entre les personnes afin de coproduire un objet (en communiquant, partageant, échangeant ou créant). Les éléments communs sont donc nombreux entre ces deux notions mais ceux qui permettent de les distinguer sont clairement identifiés et nous amènent donc à éviter toute confusion. On distingue trois types de travail coopératif : La coopération additive : Intellectuellement, l'homme apparaît comme un ordinateur particulier, caractérisée par une capacité de traitement de l'information lente, limitée et séquentielle. Cette capacité limitée peut être compensée par une "coopération additive" : en combinant capacités et efforts, un ensemble d'individus peut effectuer une tâche qu un seul individu n aurait pu réaliser seul. La coopération intégrante : Chaque salarié étant donc spécialisé, il doit pouvoir travailler en se concentrant sur cette spécialisation sans avoir à réaliser d autres tâches. En cela, l outil informatique peut le libérer des tâches intellectuelles connexes, notamment celles de contrôle qui pourraient le perturber dans son travail premier. La coopération de débat : L outil informatique apporte dans ce type de coopération une aide à la réflexion et à la résolution de problèmes en collectant un ensemble de points de vue et en extirpant la solution la plus adéquate au problème posé. 7
2. Aperçu historique du travail collaboratif Cet historique s efforce de dégager les grandes étapes de l évolution de la notion de travail collaboratif, afin d en donner un aperçu clair et succinct. Le travail collaboratif, autrement appelé, le travail de groupe assisté par ordinateur est une notion plutôt ancienne. En effet, elle fait son apparition dans les années 60 au Research Institute de Stanford aux Etats-Unis sous la direction d ENGELBART, considéré aujourd hui comme le père fondateur du travail collaboratif. Il développe un système nommé «Augment» qui recouvre en quasi-totalité toutes les caractéristiques d un outil de groupware d aujourd hui avec les dimensions technologiques mais aussi humaines et organisationnelles. Dans les années 70, d autres applications de type «travail collaboratif» se développent en milieu universitaire aux Etats-Unis, notamment l EIES (Electronic Information Exchange System), véritable système de téléconférence développé au New Jersey Institute of Technology sous la direction de TURROF. Son objectif était de concevoir «un laboratoire de communication électronique utilisable par des communautés de chercheurs géographiquement dispersées». Parallèlement à l évolution des capacités du matériel et des logiciels informatiques surtout en termes de réseaux locaux et étendus, les outils de travail collaboratif connaissent une forte expansion dans les années 80. Le terme «groupware» est d ailleurs cité pour la première fois à destination du grand public dans un article provenant du magazine anglosaxon «Fortune» et daté de 1987. Il est présenté comme une «nouvelle manière révolutionnaire» de travailler. Mais c est dans les années 90, avec l entrée dans «l ère de la gestion et de l économie de l information et de la communication» et avec le développement de la bureautique individuelle que le groupware prend son essor. Il devient enfin connu du grand public avec la commercialisation de ses produits comme celle du célèbre logiciel : Lotus Notes. Le groupware fait véritablement son apparition en France en 1994 sous le nom de «collecticiel» grâce au contexte favorable de changement organisationnel dans les entreprises (travail de groupe) et par le biais de sociétés de conseil en informatique et management. Puis des ouvrages utilisant le terme de «groupware» font leur apparition, ce qui correspond à l approche orientée «outil» au lancement de cette notion. Le terme «travail collaboratif» concerne les ouvrages les plus récents, sans doute révélateur d une prise de conscience de la part des professionnels de la nécessité de prendre en compte le travail collaboratif comme un 8
ensemble de différents éléments et non comme un outil «miracle» qui viendrait au secours des entreprises pour améliorer leur communication interne. Les années 2000 voient apparaître de nouveaux types d outils de travail collaboratif comme les logiciels libres et le collaboratif web. Le web 2.0, avec les blogs et les sites de type wiki, facilite l utilisation du web pour les «novices» et offre des interfaces plus ergonomiques spécialement pensées pour les utilisateurs. 3. Définition Le groupware est un néologisme inventé par deux chercheurs (Peter et Trudy JOHNSON- LENZ) en 1980 qui rassemble à la fois la notion de travail en groupe «group» et l aspect technologique du logiciel avec «ware» de «software». Mais, le travail collaboratif est bien plus qu un simple outil permettant une meilleure communication entre plusieurs acteurs. La définition suivante reflète bien les différentes nuances que recouvrent cette notion : «une combinaison de technologies, de personnes et d organisation qui facilite la communication et la coordination nécessaire à un groupe pour réaliser son travail de manière collective et efficace, atteindre un but partagé et assurer un gain pour chacun de ses membres» De ce nouveau concept est né aux Etats-Unis un champ disciplinaire appelé CSCW (Computer Supported Cooperative Work). Le CSCW étudie le comportement des individus travaillant en groupe afin de fournir des solutions logicielles adaptées à leurs besoins. Le CSCW s intéresse donc en priorité à l être humain et aux interactions homme homme et homme machine. Cette dimension sociale et psychologique s inscrit en réaction face aux tendances «tout groupware» qui ne prend en compte que l aspect informatique de cette notion. Le groupware est souvent comparé à d autres systèmes d information pour l entreprise comme le Gestion Electronique de Documents (GED) ou encore le Workflow. Bien que ces systèmes aient un certain nombre de similitudes, il convient de ne pas les confondre car ils répondent à des objectifs bien différents. Il est courant de trouver des offres de logiciels proposant les trois solutions dans un seul produit, des sortes d offres «3 en 1» mais qui sont bien loin de tenir leurs promesses. Le travail collaboratif, la GED et le Workflow sont trois systèmes d information qui facilitent le travail de groupe au sein d une entreprise : - Le Workflow sert à modéliser les tâches de chacun des acteurs pour la réalisation d un projet 9
- La GED est un outil «permanent» qui met à disposition les documents de travail utiles pour l ensemble des acteurs (référentiels etc.) - Le travail collaboratif, quant à lui correspond à l organisation globale d une structure qui permet le travail par projet. Le groupware se base sur des technologies de GED, de workflow, de communication, il facilite ainsi la communication interne et stimule «l intelligence collective» 10