La CSST à la resco des trava VOUS CROYIEZ QUE LES ACCIDENTS de travail sont réservés aux travailleurs de la construction ou du secteur manufacturier? Détrompez-vous. Car la tranquillité et l apparente sécurité qu offrent nos bureaux douillettement informatisés peuvent parfois s avérer trompeuses. «Les gens qui tapent toute la journée, qui effectuent des mouvements répétitifs, peuvent, par exemple, développer des tendinites ou des bursites si leurs appareils ne sont pas bien ajustés», rappelle Éric Arseneault, porteparole de la Commission de la santé et de la sécurité du travail (CSST). Et que dire des maux de dos, triste héritage des années passées cloué à son bureau. Si le conseiller victime d un accident professionnel travaille en entreprise, il peut, comme plus de deux millions de salariés québécois, bénéficier de la protection de l assureur public. À ce sujet, la loi est claire : tout employeur établi au Québec et comptant au moins un travailleur, à temps plein ou non, est obligé de s'inscrire à la CSST et de payer une prime annuelle. En contrepartie, l entrepreneur se trouve à l abri des poursuites en cas de lésion professionnelle, termes utilisés dans le jargon pour désigner les maladies et les blessures liées au travail. Toutefois, l obligation de s inscrire n incombe pas aux conseillers qui travaillent à leur compte (voir CSST : travailleur autonome 101). «Les travailleurs autonomes ont le choix de s inscrire ou non», explique M. Arseneault. D ailleurs, les chiffres les plus récents de la CSST révèlent que trois cas de lésions professionnelles ont été répertoriés chez les conseillers travailleurs autonomes de 1994 à 1999. Pourtant, si on se fie aux propos recueillis dans le cadre de cet article, l'admissibilité des travailleurs autonomes à cette option, somme toute assez abordable (voir Le taux le plus bas de la CSST!), semble peu connue. «Je n étais pas au courant, révèle Daniel, planificateur financier à son compte jusqu en octobre dernier. Si je l avais su, j aurais envisagé cette possibilité. Ça aurait pu être avantageux», conclut le professionnel montréalais. «Tous les travailleurs autonomes peuvent être assurés, au même titre qu un propriétaire d entreprise», résume OBJECTIF CONSEILLER 6
usse illeurs autonomes Denis Gobeille, président de Gobeille Ressources humaines, à Québec. Un secret bien gardé? «Plusieurs d entre eux méconnaissent la CSST», observe ce consultant d expérience. Et difficile d estimer leur nombre à la CSST, car l organisme dit ne pas être en mesure de fournir de données fiables à ce sujet. L indemnité : 90 % du salaire net Le travailleur autonome désireux de s inscrire à la CSST doit fournir «une preuve de capacité de gain», lit-on sur le site Internet de l organisme, comme un Relevé 1 de Revenu Québec, un feuillet T4 de Revenu Canada, des états financiers ou tout autre document pertinent. Le candidat choisit ensuite son niveau de protection, qui peut varier d une masse salariale minimale de 15 900 $ jusqu à un plafond annuel assurable de 57 000 $. Une fois sa prime acquittée, l assuré bénéficie d un régime de protection assez généreux. En fera foi ce cas fictif, quoique courant. Un conseiller financier passe ses journées devant un ordinateur qui n est Au beau milieu du marathon REER, une plaque de glace dissimulée entraîne votre chute et celle de votre revenu. Heureusement, votre rétribution pourra être compensée par l indemnisation de la CSST à laquelle tous les conseillers québécois sont admissibles, même les travailleurs autonomes. CLAUDE COUILLARD 7
La CSST à la rescousse Le taux le plus bas de la CSST! LA CSST CLASSE les employeurs québécois dans environ 200 unités, selon la nature de leurs activités économiques. Chaque unité comporte un taux de prime basé, notamment, sur le risque qui lui est imputé. Comme les probabilités de lésions professionnelles associées à leur unité (no 70010) sont faibles, les conseillers et les planificateurs financiers à leur compte bénéficient du taux le plus bas de la CSST, soit 0,57 $ par tranche de 100 $ de masse salariale assurée en 2006. C est quatre fois moins que le taux moyen de 2006, fixé à 2,32 $. «Cette unité englobe également les courtiers en assurance, les bureaux de crédit, les maisons de courtage, les agences de recouvrement, etc.», précise la CSST. Qui plus est, le travailleur autonome admissible peut choisir son niveau de couverture, qui peut varier de 15 900 $ à un maximum assurable de 57 000 $ pour 2006 1. «Le travailleur autonome a alors droit à la même couverture et aux mêmes services que tout travailleur québécois», certifie Éric Arseneault, porte-parole de l assureur public. Primes à verser en 2006, selon les revenus suivants : 15 900 $ x 0,57 $/ 100 $ = 90,63 $ 35 000 $ x 0,57 $/ 100 $ = 199,50 $ 57 000 $ x 0,57 $/ 100 $ = 324,90 $ À cette somme, il faut ajouter des frais de gestion de 65 $. Le taux de prime le plus élevé? Celui fixé pour les employeurs qui réalisent des travaux de maçonnerie.il est de 26,69 $ par tranche de 100 $ de masse salariale assurée. C est 46 fois plus que celui imposé aux conseillers! Ouf 1 Minimum et maximum assurables sujets à changement au cours de l année. Source : CSST pas aménagé de façon ergonomique. Peu à peu, il en vient à développer une tendinite. Une visite chez le médecin confirme le diagnostic appréhendé. La maladie professionnelle le contraint à interrompre ses activités. «Si le travailleur n est plus en mesure d utiliser ses outils de travail, la CSST va remplacer la perte de revenus, déclare son porte-parole, M. Arseneault. Il faut que le lien entre la lésion et le travail soit prouvé.» À cette fin, le médecin remplit un formulaire qui est acheminé à la CSST. «Une fois le lien prouvé, le même processus s enclenche pour le travailleur, poursuit-il. S il y a une perte de revenus, on calcule les indemnités. Elles correspondent toujours à 90 % du revenu net, c est-à-dire libre des impôts fédéral et québécois, ainsi que des contributions à l assurance emploi et à la Régie des rentes du Québec, selon le salaire assuré.» Prenons maintenant un autre cas, tout aussi probable. En allant chercher un dossier, un conseiller à son compte inscrit à la CSST se fracture le bras à la suite d une malencontreuse chute. L incident obligera le malheureux à porter une orthèse. «À ce moment-là, on va non seulement payer pour les frais médicaux, mais aussi pour l orthèse, précise-t-il. Si la prothèse ou l orthèse abîme ses vêtements, on va même lui rembourser un autre montant pour les remplacer.» Les soins de réadaptation ou de physiothérapie sont aussi couverts, et dans la triste éventualité où l accident entraînerait une atteinte permanente aux capacités physiques, la CSST ajoutera un montant forfaitaire à l indemnisation déjà prévue. Les conseillers à leur compte appelés à rencontrer des clients à domicile peuvent aussi bénéficier de la protection de l assureur public. «Un accident qui survient chez un client est considéré comme un accident de travail», signale M. Arseneault. Et si l événement se produisait alors qu il est au volant? «Quand on est au travail et qu on a un accident de voiture, c est un accident de travail, explique M. Gobeille, consultant en ressources humaines. On est assuré par la CSST. C est important. Avec la Société de l assurance automobile du Québec, on reçoit 66 % de son salaire et les règles de gestion sont très sévères. À la CSST, la règle de gestion s applique jusqu à ce qu un médecin statue que la maladie est guérie. C est à ce moment que tu recommences ton travail. Puisqu il y a des maladies qui ne guérissent pas, des séquelles permanentes, la CSST peut alors t indemniser jusqu au décès.» Comme nombre de ses confrères, Daniel a souscrit une police d assurance invalidité privée pendant ses trois années de travail autonome. La prime annuelle du conseiller montréalais dépassait les 2 000 $. Voilà pourquoi le président de Gobeille Ressources humaines invite fortement les travailleurs autonomes à s inscrire à la CSST: l accessibilité de la prime, compte tenu de l étendue de la protection. «Calculez-la», invite-t-il. Assurer 50 000 $ coûte à peine 300 $. «Les assurances privées, ajoute-t-il, auront souvent tendance à réduire les indemnités versées à la victime après une période de deux ans, par exemple. Bien sûr, les protections privées diffèrent de celle offerte par la CSST. Cette dernière jouit d un monopole en matière d assurance au travail, alors que les premières couvrent souvent toutes les sphères de la vie dans une même police. Difficile de comparer, par conséquent. Il n empêche. Le consultant en ressources OBJECTIF CONSEILLER 8
humaines recommande aux travailleurs autonomes de réduire et de cibler davantage leur couverture au privé. «Prendre, par exemple, d autres types d assurance, moins d invalidité», suggère-t-il. Lorsqu on lui demande si des assureurs privés proposent aux travailleurs à leur compte une protection équivalente à la sienne, la CSST n hésite pas à répondre qu elle «offre une couverture plus complète. L'assurance que nous offrons couvre une plus grande proportion du salaire (90 %). De plus, nous offrons la réadaptation et couvrons l'ensemble des frais médicaux.» Nous avons aussi sollicité le point de vue de compagnies privées à ce sujet, mais sans succès. Réalité de plus en plus répandue, de nombreux conseillers financiers (planificateurs, courtiers ) détiennent un statut de travailleur autonome au sein d une entreprise. Le candidat est-il alors couvert par la CSST, «Tous les travailleurs autonomes peuvent être assurés, au même titre qu un propriétaire d entreprise.» Denis Gobeille président de Gobeille Ressources humaines, à Québec La CSST à la rescousse comme l exige la législation québécoise? C est la zone grise, a constaté M. Gobeille. «Je l incite à aller voir son employeur, car il arrive très souvent que ce ne soit pas le cas.» Que faire alors? «Il devrait se déclarer à la CSST et demander une protection personnelle pour ses activités», poursuit-il. Le Québec compte des centaines de milliers PHOTO : GOBEILLE RESSOURCES HUMAINES 9
La CSST à la rescousse CSST: travailleur autonome 101 UN TRAVAILLEUR AUTONOME est une personne physique qui fait des affaires pour son propre compte et qui n'emploie aucun travailleur, spécifie le site Internet de la CSST. Généralement, il ne bénéficie pas d'avantages sociaux. Il peut réaliser des profits ou subir des pertes. Pour bénéficier de la protection accordée par la loi, le travailleur autonome doit s inscrire lui-même à la CSST. Une association dont il est membre peut aussi s'en charger pour lui. Cependant, aucun regroupement de conseillers financiers à leur compte ne figure actuellement sur la liste de la CSST, signale Éric Arseneault, porte-parole de l assureur public. Mais il n est jamais trop tard, car «c est une formalité de les accepter». Source : CSST de travailleurs autonomes. Il y a donc de fortes chances que des conseillers financiers à leur compte en recensent au sein de leur clientèle. Ils ont tout intérêt à leur suggérer, à leur tour, de s inscrire à la CSST. «Ce serait très important», estime M. Gobeille. En effet, la méconnaissance de cette option n est pas le lot des seuls conseillers. Elle est présente dans à peu près toutes les sphères du travail autonome. OC Pour plus d information : www.csst.qc.ca 11