Pour un rayonnement européen des métropoles françaises



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Transcription:

CIADT du 18 décembre 2003 Pour un rayonnement européen des métropoles françaises Éléments de diagnostic et orientations Une bonne performance pour le nombre de sites culturels et touristiques Mais une place médiocre pour le nombre de sièges sociaux de grands groupes

1 Pour un rayonnement européen des métropoles françaises Éléments de diagnostic et orientations

2 Pour un rayonnement européen des métropoles françaises Sommaire Sommaire Introduction 5 Les métropoles françaises : motrices pour l économie 9 Une croissance démographique amorçant une nouvelle figure de la France urbaine 10 Les grandes villes devancent et amplifient la mutation de l économie nationale 13 Les emplois métropolitains supérieurs : 32 % de la croissance de l emploi depuis 1990 15 Les grandes villes : lieu d accueil privilégié des emplois supérieurs 15 Les plus grandes aires urbaines connaissent la plus forte croissance des emplois supérieurs 19 Des dynamiques métropolitaines intégrant les villes moyennes 22 C est à l échelle européenne qu il faut comparer les villes françaises 24 Les grandes villes françaises, hors Paris, n ont pas le poids démographique de leurs homologues européennes 24 Les métropoles françaises ont un bon niveau de rayonnement européen, mais leurs fonctions économiques sont insuffisamment affirmées 26

3 Les axes d une politique nationale 31 Agir sur les accélérateurs du rayonnement métropolitain 34 Une politique de rayonnement économique 34 Le rayonnement de l enseignement supérieur et de la recherche 36 Le rayonnement culturel et artistique 37 La politique d implantation territoriale des emplois publics 37 L accessibilité des métropoles 38 Le cadre de la politique de soutien au rayonnement des métropoles 39 Un appel à projets dès 2004 39 Un projet métropolitain préparé par les collectivités 40 Un contrat métropolitain à signer après 2006 41 Bibliographie 43 Annexe 44

4 Pour un rayonnement européen des métropoles françaises Introduction Introduction

Prendre conscience de l enjeu des métropoles 5 Les grandes villes accueillent une grande part de la population nationale : plus de 60 % des Français résident dans une aire urbaine 1 de plus de 100 000 habitants. Il se produit un mouvement de rééquilibrage, lent mais sensible, entre Paris et les grandes métropoles régionales : depuis 10 ans, la croissance de la population comme celle des emplois dits stratégiques (les emplois d encadrement, de conception ou de création) a été plus forte à Lyon, Toulouse, Strasbourg, Grenoble, Montpellier ou Nantes, qu à Paris. Les emplois supérieurs, très ancrés dans les plus grandes villes, représentent le tiers de la croissance de l emploi total en France depuis 1990. Les grandes villes ont été ainsi des contributeurs essentiels à la croissance de l emploi, précédant et amplifiant la tertiarisation de l économie et sa transformation vers une «économie des savoirs». Ce développement des villes s est accompagné et nourri d un fort enracinement de l intercommunalité, même si leur périmètre apparaît parfois inadapté pour conduire des politiques de développement à l échelle des métropoles. Le constat ne peut cependant pas s arrêter au seul horizon français. Le mouvement d intégration européenne et l internationalisation croissante de l économie conduisent à s interroger sur la place de nos villes en Europe. Or, s il apparaît que, globalement, les villes françaises ont un bon niveau de rayonnement, leurs fonctions économiques restent insuffisamment affirmées. Elles ne sont pas encore suffisamment bien placées dans la compétition économique des villes européennes. 1 L aire urbaine, telle que définie par l Insee, est composée d un pôle urbain (unité urbaine d au moins 5000 emplois) et d une couronne périurbaine comprenant les communes qui envoient au moins 40 % de leurs actifs résidents travailler dans le pôle ou à proximité. Il s agit ainsi qu'une approche de la notion de bassin de vie.

6 Pour un rayonnement européen des métropoles françaises Introduction Mettre en œuvre un appui de l État aux projets métropolitains Dans le contexte d une nouvelle étape de décentralisation, il ne saurait être question pour l État de se substituer aux institutions locales, notamment dans la définition ou la mise en œuvre d une stratégie propre à chaque métropole. Il revient en revanche à l État d accompagner ces stratégies au travers des politiques structurantes dont il demeure responsable (universités, recherche, transports, prospection et accueil d entreprises internationales, pôles de compétitivité internationaux, etc.), tout en favorisant les coopérations autour de projets métropolitains cohérents, associant les régions et les réseaux de villes moyennes qui les entourent. Il y a un an, le comité interministériel de l aménagement et du développement du territoire (CIADT) du 13 décembre 2002 avait retenu le principe d une «stratégie nationale de renforcement de l offre métropolitaine de la France en Europe». Le présent document, présenté au CIADT du 18 décembre 2003, est une première concrétisation de cette stratégie. Il précise les grandes lignes du diagnostic quant au rayonnement des métropoles françaises 2 et les mesures prises par l État pour les accompagner dans leur ambition européenne. La qualité des métropoles sans les effets négatifs de la métropolisation 2 Synthétisant un rapport plus complet de la Datar, à paraître début 2004. La métropole est «une très grande ville, qui s exprime par la taille de sa population et celle de l agglomération qu elle anime, par son poids économique, politique, social et culturel ainsi que par son pouvoir d attraction et de diffusion» (selon Marcel Roncayolo, professeur à l EHESS). La métropole rassemble des fonctions diversifiées, notamment des fonctions tertiaires supérieures. Elle rayonne sur son environnement régional, national et international, et fonctionne en réseau avec les autres grandes villes et les villes moyennes qui l entourent.

7 La métropolisation, en tant que processus, est interprétée par certains comme «la traduction urbaine de la mondialisation» 3, les grandes villes étant vues comme le lieu privilégié du développement globalisé, rassemblant les pouvoirs, l intelligence, l excellence et la forte valeur ajoutée. Si l on reconnaît donc le rôle moteur des métropoles dans l économie nationale, il faut aussi être vigilant sur les conditions de leur développement : il s agit bien d accroître l offre métropolitaine, sans les effets néfastes de la métropolisation, tels que l étalement urbain consommateur d espaces naturels, la pollution et le bruit liés à la mobilité automobile, la ségrégation sociale, etc. Ces préoccupations pour les métropoles font plus largement écho aux réflexions et aux mesures prises par le gouvernement pour améliorer l attractivité du «site France» (séminaire gouvernemental, missions parlementaires) ; elles renvoient aussi à la mise en œuvre de l engagement des chefs d État et de gouvernement de l Union européenne à Lisbonne en mars 2000, visant à faire de l Europe «l économie de la connaissance la plus dynamique et la plus compétitive du monde d ici 2010». Le Premier ministre, lors de son allocution devant le congrès des maires de France, le 18 novembre 2003, a confirmé son attente : «Il faut que, dans cet espace européen qui se construit, nos grandes capitales puissent avoir un rayonnement, puissent organiser leur présence sur la scène internationale, européenne. ( ) Il n y a pas de supériorité du fait urbain sur le fait rural, les deux sont des constituants de la République et, pour tous les deux, il faut une politique adaptée». 3 Lacour Claude, et Puissant Sylvette (sous la dir.) «La métropolisation. Croissance, diversité, fractures». Paris: Anthropos, 1999, p. 74.

8 Pour un rayonnement européen des métropoles françaises Les métropoles françaises : motrices pour l économie.

1Les métropoles françaises : motrices pour l économie 9

10 Pour un rayonnement européen des métropoles françaises Les métropoles françaises : motrices pour l économie. Une croissance démographique amorçant une nouvelle figure de la France urbaine Les villes accueillent une grande part de la population nationale : plus de 60 % des Français résident dans une aire urbaine 4 de plus de 100 000 habitants. En 1954, ils n étaient 5 que 53 %. Ce sont les plus grandes aires urbaines (celles qui ont aujourd hui plus de 100 000 habitants) qui ont vu leur population progresser le plus dans cette période longue. 4 L aire urbaine définie par l Insee, est composée d un pôle urbain (unité urbaine d au moins 5000 emplois) et d une couronne périurbaine comprenant les communes qui envoient au moins 40 % de leurs actifs résidents travailler dans le pôle ou à proximité. Une approche de la notion de bassin de vie. 5 Dans le périmètre 1999 des aires urbaines. L évolution de la population des 354 aires urbaines, entre 1954 et 1999 fait d abord ressortir l exceptionnelle période d expansion que l ensemble des villes a connue. La moitié des aires urbaines s accroît au minimum de 50 % ; 50 d entre-elles voient leur population au moins doubler. La plupart des métropoles régionales ont crû plus vite que Paris, en termes relatifs. C est notamment vrai dans le quart sud-est du pays et, plus récemment, dans l ouest. Seules 16 aires urbaines se distinguent en étant moins peuplées en 1999 qu elles ne l étaient 50 ans plus tôt. Généralement, les villes qui perdent des habitants sont celles qui se sont développées historiquement autour de l extraction minière (Béthune, Decazeville, Longwy ). L évolution des villes françaises se caractérise par deux tendances de fond : > Un effet «boule-de-neige», lié à la taille : la plupart des grandes villes croissent plus vite que les autres ; Montpellier en tête, suivie de près par Toulouse, Rennes, Grenoble ou encore Nice. Ce mouvement n empêche pas évidemment un certain nombre de petites aires urbaines de connaître des croissances fortes dans cette même période. > Un effet régional : ainsi notamment depuis 1990, les villes de l Ouest de la France connaissent une croissance démographique importante, indépendamment de leur taille. Il faut aussi souligner la dynamique insufflée par les plus grandes métropoles aux aires urbaines de plus petite taille qui leur sont proches : c est le cas autour de Paris, Lyon et Marseille par exemple.

11 CARTE 1 > La population des aires urbaines en 1999 et son rythme d évolution depuis 1954 Source : Insee Recensements de la population

12 Pour un rayonnement européen des métropoles françaises Les métropoles françaises : motrices pour l économie. TABLEAU 1 > Nombre d aires urbaines selon leur nombre d habitants (1999) Paris 1 Plus de 500 000 13 de 100 000 à 500 000 64 de 50 000 à 100 000 59 de 25 000 à 50 000 89 Moins de 25 000 128 Total 354 Source : Insee Source : Insee Recensements de la population (périmètres de 1999) FIGURE 1 > Répartition de la population française selon la taille de l aire urbaine. Comparaison 1954-1999 L analyse des soldes migratoires des villes françaises entre 1990 et 1999 montre que les très grandes villes ne sont plus aussi attractives qu elles ont pu l être dans le passé. Au total, les quatre plus grandes villes de France enregistrent le départ de près de 600 000 personnes (Marseille ayant par exemple un solde migratoire négatif de près de 20 000 personnes). Leur croissance démographique n est portée que par leur solde naturel (naissancesdécès). C est tout particulièrement vrai pour Paris. Les villes de 100 000 à 500 000 habitants enregistrent en revanche des soldes migratoires positifs élevés.

Les grandes villes devancent et amplifient la mutation de l économie nationale 13 Paris et les plus grandes villes se tertiarisent et développent les services spécialisés plus vite et plus fortement que les autres villes. Les services spécialisés 6, se développent dans les aires urbaines, quelle que soit leur taille, depuis quarante ans. Mais si les trajectoires sont parallèles, elles n ont pas la même ampleur : les plus grandes villes, et particulièrement Paris, ont tendance à «s échapper du lot». Cette évolution, liée à l économie du savoir et de l information, apparaît bien comme l émergence d un nouveau cycle économique, qui naît dans les métropoles, lieu privilégié d anticipation des innovations. FIGURE 2 > Une trajectoire économique commune à toutes les tailles d aires urbaines, vers la tertiarisation et les services spécialisés. Source : Insee Recensements de la population et SAPHIR L aire urbaine parisienne est précurseur dans l adoption de la mutation économique vers la tertiarisation, qui se développe ensuite rapidement dans l ensemble des villes. Paris et les métropoles traceraient-elles la voie de la mutation des profils économiques des villes françaises, elles-mêmes irriguant cette mutation dans leur région? En tout état de cause, on ne doit plus opposer Paris et le reste du territoire, les dynamiques en cours étant très solidaires, dans un jeu qui n est pas à somme nulle. Sur les vingt dernières années (1982 à 1999), la variation des emplois en France entre grandes fonctions est nettement en défaveur de la fabrication (production concrète), avec un déclin s accélérant depuis 1990 : cette fonction perd 1,3 million d actifs dans l ensemble des aires urbaines, soit une baisse totale de 30 %. Or, l essentiel de cette diminution s est réalisé dans les aires urbaines de plus de 100 000 habitants. 6 Les services spécialisés sont destinés aux entreprises: conseils et assistance, ingénierie, publicité auxquels s associent la finance, l assurance et l immobilier (que les Anglo-Saxons appellent FIRE pour Finance, Insurance et Real Estate). Ces services participent de l économie du savoir en lien avec les activités de recherche et développement.

14 Pour un rayonnement européen des métropoles françaises Les métropoles françaises : motrices pour l économie. Parallèlement, la production immatérielle (conception, gestion et marketing) et la fonction «collective» (administration publique, sécurité publique, justice, santé, social, culture, loisirs, formation et éducation) sont en forte augmentation. Ainsi d une production de biens, le système économique évolue-t-il vers une «économie des savoirs» qui passe d abord par les métropoles. Source : Insee RGP Auteur : L. HALBERT (LADYSS) Datar 2003. FIGURE 3 > Variation des emplois par fonctions (1982-1999) selon la taille de l aire urbaine

Les emplois métropolitains supérieurs : 32 % de la croissance de l emploi depuis 1990 15 Pour qualifier et décrire les fonctions supérieures des territoires, l Insee a défini onze branches d activité 7, employant des ingénieurs et des cadres dans leurs fonctions d animation, direction et encadrement : art, banque-assurance, commerce, commerce industriel, gestion, information, informatique, recherche, services aux entreprises, télécommunications, transports. Les emplois correspondants à ces critères sont appelés «emplois métropolitains supérieurs» (ou «emplois supérieurs»). Ils permettent de mieux cerner ce qui distingue les grandes villes des villes de moindre taille, mais aussi d approcher le niveau de rayonnement économique des territoires 8. L emploi métropolitain supérieur concernait, en mars 1999, 1 806 000 actifs sur un total de 22 802 600 emplois, soit 7,9 % du total des emplois. Les trois branches d activité des emplois métropolitains supérieurs les plus fournies en 1999, qui comptent à elles seules 58 % des emplois supérieurs, sont : > les services aux entreprises (30,6 % des emplois supérieurs) ; > la recherche (15,3 %) ; > et le commerce (11,9 %). Ensemble, ces trois branches ont accru leurs effectifs de 15,9 % depuis 1990, soit près de 1 point au-dessus de la moyenne des emplois métropolitains supérieurs. Les variations relatives les plus fortes depuis 1990 viennent de branches d activité à faibles effectifs mais marquées par l innovation. On trouve ainsi aux trois premières places dans l intensité de la progression, les télécommunications, l art et la recherche. Les grandes villes : lieu d accueil privilégié des emplois supérieurs Paris concentre 45 % des emplois supérieurs du pays et les 77 autres aires urbaines de plus de 100 000 habitants en accueillent 39 %. Les emplois supérieurs prennent donc dans ces grandes métropoles une part élevée de l emploi total. 7 Voir définition plus précise en annexe. Les 354 aires urbaines françaises concentrent, en 1999, la quasi-totalité des emplois métropolitains supérieurs, avec 92,8 % de leurs effectifs nationaux, confirmant qu il s agit bien d emplois profondément ancrés en milieu urbain. Les emplois métropolitains supérieurs comptent pour 16 % de l emploi de l aire urbaine parisienne, ce qui constitue la plus forte proportion parmi les aires urbaines de plus de 100 000 habitants. Mais, hors Paris, ce ne sont pas toujours les aires urbaines dont le nombre d emplois total est le plus élevé qui présentent la plus forte proportion d emplois supérieurs. 8 FNAU, «L offre métropolitaine française, vue par les emplois métropolitains supérieurs», Paris: Fédération nationale des agences d urbanisme, rapport pour la Datar, 110p. + annexes. (à paraître).

16 Pour un rayonnement européen des métropoles françaises Les métropoles françaises : motrices pour l économie. Ainsi, Lyon, Marseille et Lille en comptent respectivement 11 %, 9 % et 8 %. Ces grandes agglomérations ont proportionnellement moins d emplois supérieurs que des villes comme Grenoble, Toulouse et Montpellier. En dehors des plus grandes métropoles toutefois, les parts d emplois supérieurs dans l emploi total chutent rapidement. On ne trouve que 4 % d emplois supérieurs, dans l emploi total des aires urbaines de moins de 100 000 habitants, et 3,1 % hors des aires urbaines. TABLEAU 2 > Parts des emplois supérieurs dans l emploi total selon la taille de l aire urbaine (1999) Emploi total Emploi supérieur Part emploi sup./ emploi total Aire urbaine de Paris 5 089 179 815 552 16,0 % Aires urbaines de plus de 100 000 hab. (hors Paris) 9 527 092 701 991 7,4 % Aires urbaines de moins de 100 000 hab. 3 915 176 157 910 4,0 % Hors aires urbaines 4 269 169 130 630 3,1 % France entière 22 800 616 1 806 083 7,9 % Source : FNAU pour la Datar, d après Insee-RGP. La part relative des grandes aires urbaines dans l accueil des emplois supérieurs varie parfois beaucoup d une région à l autre, selon leur caractère plus ou moins urbain. On peut distinguer trois groupes de régions : > Les régions les plus urbaines où une part importante des emplois supérieurs se situe dans les aires urbaines de grande taille (Ile-de-France, Provence-Alpes-Côte-d Azur, Nord Pas-de-Calais, Aquitaine et Rhône-Alpes) ; > Les régions accordant une place importante aux agglomérations petites et moyennes (Haute Normandie, Bourgogne et Auvergne), où l emploi supérieur se situe pour près du quart dans une aire urbaine de moins de 100 000 habitants ; > Les régions où au moins un quart des emplois supérieurs de la région se situe en zone rurale (Limousin, Picardie, Basse Normandie et Poitou-Charentes). Les métropoles sont souvent généralistes Les très grandes aires urbaines sont plutôt généralistes : lorsqu elles offrent de nombreux emplois supérieurs, elles disposent également d une diversité dans leurs secteurs économiques. Les phénomènes de spécialisation concernent essentiellement les aires urbaines de taille plus réduite. Une forme de spécialisation s exprime à travers les profils technopolitains de Montpellier, Rennes, Grenoble qui fondent une partie de leurs emplois métropolitains supérieurs sur l association recherche publique/privée, informatique et télécoms. Les ports, avec la rupture de charge qu ils gèrent, sont des vecteurs de spécialisation des aires urbaines qui les abritent dans le domaine des transports, d autant plus que leur situation littorale les empêche de développer des fonctions généralistes de desserte territoriale. C est parmi les aires urbaines moyennes du nord et de l est que l on retrouve les dominantes industrielles fortes (gestion dans l industrie). L art semble, quant à lui, plutôt sensible à l héliotropisme méditerranéen.

Paris se distingue néanmoins par une spécialisation dans les domaines de l information et des services aux entreprises. Ce dernier point confirme que la région parisienne s inscrit bien dans un contexte géographique beaucoup plus vaste que les autres métropoles françaises. Le secteur des services aux entreprises est en effet le premier secteur accueillant les investissements étrangers en Ile-de-France. Certaines aires urbaines, y compris parmi les plus importantes, montrent des lacunes dans la répartition de leurs fonctions métropolitaines. Citons par exemple le secteur banque assurance pour Toulouse, le commerce pour Grenoble, la gestion dans l industrie pour Montpellier, l information pour Nantes, les transports pour Grenoble (mais Chambéry est spécialisée dans ce secteur), les services aux entreprises au Havre (mais la proximité de la capitale explique sans doute cela). 17 CARTE 2 > Classifification des 354 aires urbaines selon leurs activités privilégiées en 1999 Source : FNAU pour la Datar, d après Insee-RGP

18 Pour un rayonnement européen des métropoles françaises Les métropoles françaises : motrices pour l économie. Des emplois supérieurs en forte progression : une amorce d un rééquilibrage dans les régions Les emplois métropolitains supérieurs ont représenté pratiquement le tiers de la hausse du nombre d emplois en France depuis 1990 (alors qu ils ne pèsent que 7,9 % de l emploi total) et ils ont augmenté dans toutes les régions. Ils méritent à ce titre un intérêt particulier, comme contributeur important à l économie nationale. Alors que l emploi total s est accru de 3,3 % entre 1990 et 1999, les emplois métropolitains supérieurs se sont accrus de 14,9 %. TABLEAU 3 > Les emplois métropolitains supérieurs dans l emploi total 1999 Variation 1990 1999 Effectifs Absolue Relative Part dans la croissance Emplois supérieurs 1 806 083 234 530 14,9 % 32 % Emplois autres 20 994 533 495 764 2,4 % 68 % Total des emplois 22 800 616 730 303 3,3 % 100 % Source : FNAU pour la Datar, d après Insee-RGP L emploi supérieur a augmenté dans toutes les régions : l accroissement des effectifs aura dépassé, ou au moins approché 10 % entre 1990 et 1999. Et cinq régions auront connu une augmentation supérieure à 20 % : la Corse, le Languedoc-Roussillon, les Pays de la Loire, la Bretagne et Midi-Pyrénées. Même l Ile-de-France, dont la part commence à s effriter, a connu une augmentation de 1,29 % par an des effectifs dans les emplois stratégiques. EMS : emplois métropolitains supérieurs Source : FNAU pour la Datar, d après Insee-RGP FIGURE 4 > Variations de l emploi total et des emplois supérieurs par région, de 1990 à 1999

Les variations positives des effectifs d emplois supérieurs, constatées dans toutes les régions, paraissent surprenantes dans trois régions qui ont vu reculer leur emploi total : Champagne-Ardenne (-1 234 emplois), le Limousin (-3 095) et l Ile-de-France (-33 979). Dans ces trois cas, la progression des emplois supérieurs a compensé pour partie la perte plus marquée dans les autres activités. L Ile-de-France a ainsi perdu 118 655 emplois «traditionnels» mais le gain de 84 676 emplois supérieurs atténue partiellement cette perte. Si l Ile-de-France voit sa part dans les emplois supérieurs du pays s effriter, elle continue de peser pour 45 % et les autres régions sont loin derrière elle. Deux seulement dépassent les 5 %, Provence - Alpes - Côte-d Azur (6 %) et Rhône-Alpes (9,3 %). Ce sont également les deux seules dont les effectifs dans les emplois supérieurs excèdent les 100 000 actifs. 19 Les plus grandes aires urbaines connaissent la plus forte croissance des emplois supérieurs Près d un emploi nouveau sur quatre est un emploi supérieur dans les plus grandes aires urbaines. Il se produit donc une réelle mutation de leur profil économique. La croissance des emplois supérieurs est plus significative dans les aires urbaines de plus de 100 000 habitants (+ 15,2 %) que dans les aires de moins de 100 000 habitants (+10,6 %). Ces dernières ont connu, cependant, une augmentation de leur emploi total supérieure d un point de celle des aires de plus de 100 000 habitants (+4,6% contre +3,6 %). Ces chiffres confirment que les fonctions les plus qualifiées sont davantage attirées par les grandes villes et elles y ont un rôle moteur sur l emploi total. En revanche, les villes moins peuplées présentent un meilleur dynamisme de leur emploi total mais appuyé sur une moindre proportion d emplois supérieurs. TABLEAU 4 > Évolution 1990-1999 de l emploi total et des emplois métropolitains supérieurs selon la taille de l aire urbaine Évolution Évolution Part des emplois de l emploi total des emplois supérieurs supérieurs dans l évolution de l emploi total Aires +100 000 hab. 3.6 % 15,2 % 39,4 % Aires 100 000 hab. 4,6 % 10,6 % 8,8 % France entière* 3,3 % 14,9 % 32,2 % * y compris hors aires urbaines Source : FNAU pour la Datar, d après Insee-RGP

20 Pour un rayonnement européen des métropoles françaises Les métropoles françaises : motrices pour l économie. Les évolutions des emplois supérieurs et des emplois totaux ont été diversifiées selon les sites : > des aires urbaines comme celles de Rennes, Montpellier, Toulouse, Nantes, mais aussi Calais, Le Mans et Belfort ont connu une forte croissance à la fois de leurs emplois supérieurs et de leur emploi total ; > les plus grandes aires urbaines, celles de Paris, Lyon, Marseille-Aix, Lille et Bordeaux, ont certes des gains d emplois total et supérieur, mais dans des proportions moindres que les aires de taille inférieure ; > quelques aires connaissent une double baisse, comme Saint-Étienne ou Saint- Quentin, Cherbourg, Béziers, Troyes et Nevers ; > un autre groupe a connu une croissance de l emploi total mais une baisse des emplois supérieurs. Parmi ces aires urbaines, se trouvent Besançon, Colmar, Quimper, Dunkerque ou Perpignan. De rares aires urbaines ont vu croître les emplois métropolitains supérieurs mais baisser leur emploi total, dont Tarbes, Bourges et Montbéliard. Source : FNAU pour la Datar, d après Insee-RGP CARTE 3 > Évolution des emplois supérieurs dans les aires urbaines françaises de 1990 à 1999

Pour les aires urbaines, tout semble fonctionner sur un principe identique à celui des entreprises du secteur privé, à savoir le renforcement et la concentration sur son «métier de base», tout en cherchant une certaine diversification sur des «niches» plus porteuses d avenir. Malgré tout, on peut affirmer que certaines fonctions métropolitaines, qualifiées de supérieures, se banalisent, car elles connaissent un fort développement en dehors des aires urbaines. Il s agit, en particulier, de la gestion industrielle, du commercial industriel, de l art et dans une moindre mesure du commerce. À l opposé, les secteurs des services aux entreprises, des banques, assurances et surtout de l information semblent des activités beaucoup plus marquées par une dynamique métropolitaine. 21 CARTE 4 > Des évolutions très inégales par branche d emplois métropolitains supérieurs (source : FNAU, pour la Datar, d après Insee-RGP)

22 Pour un rayonnement européen des métropoles françaises Les métropoles françaises : motrices pour l économie. Des dynamiques métropolitaines intégrant les villes moyennes Des liens privilégiés existent entre les grandes villes et les villes moyennes qui les entourent. Ces liens sont le reflet des dynamiques métropolitaines, auxquelles participent de nombreuses villes moyennes. La proximité d une métropole est souvent considérée comme un handicap pour le développement économique d une ville moyenne. Cette relation qui lie moyenne et grande villes doit être cependant nuancée et peut être mieux perçue au travers de l éclairage : > des relations domicile-travail ; > du profil économique des villes moyennes selon leur distance à une grande ville. Sur le plan des relations domicile-travail, on voit se dessiner des ensembles métropolitains, composés par les grandes villes et les villes moyennes qui les entourent. Ces ensembles sont parfois inter-régionaux, et parfois transfrontaliers. Les flux d actifs sont globalement équilibrés entre les villes moyennes et les grandes villes. Le «déficit» des villes moyennes à l égard des grandes villes les plus proches se fixe à 60 000 actifs, soit seulement 1,2 % de leurs actifs. Du point de vue la ville moyenne, ce léger «déficit» (Davezies, 2003) peut s interpréter de deux manières : > un déficit peut inquiéter (il n y a toutefois que quelques villes moyennes qui enregistrent un déficit significatif) et rendre compte du phénomène de «pompe aspirante» par les grandes villes des ressources humaines des villes moyennes ; > d un autre point de vue, ce même déficit peut être considéré comme un appoint, en termes de revenus et d effets multiplicateurs, pour la ville moyenne. Grâce à ce mécanisme, ses ménages sont plus riches et son emploi (induit) plus abondant que son seul dynamisme économique ou ses seuls avantages comparatifs ne l auraient autorisé. On pourrait donc parler d échange -dont on sait qu il est en général producteur de développement-. On considère ici comme villes moyennes les 214 aires urbaines (définition 1999) de 20 000 à 200 000 habitants, et comme grandes villes les aires urbaines de plus de 200 000 habitants. Il existe d autre part un lien tangible entre la spécialisation économique des villes moyennes et leur distance à la métropole la plus proche. D une manière générale, les fonctions de production tendent à perdre de leur importance à mesure que l on s éloigne de la grande ville la plus proche quand, au contraire, les fonctions «aval» (distribution, services à la population) et surtout les fonctions collectives (administration, santé, justice, éducation, etc.) croissent (Halbert, 2003). Les villes moyennes distantes des métropoles sont souvent des centres-relais pour les espaces ruraux environnants, tandis que les villes moyennes les plus proches des métropoles semblent participer davantage à un ensemble économique, dont elles constituent des pôles de production.

23 CARTE 5 > Part des actifs des villes moyennes allant travailler dans la principale métropole Sources : données Insee RP99, fond de carte IGN, traitées avec SAS.

24 Pour un rayonnement européen des métropoles françaises Les métropoles françaises : motrices pour l économie. C est à l échelle européenne qu il faut comparer les villes françaises Les grandes villes françaises, hors Paris, n ont pas le poids démographique de leurs homologues européennes Une des caractéristiques françaises réside dans l absence de grandes villes dans des tailles supérieures à deux millions d habitants, hors Paris. Pour élaborer une stratégie nationale de soutien à l offre métropolitaine, il faut comparer les villes françaises à leurs homologues européennes, sur des critères autres que la population, et miser sur un rayonnement supérieur au poids démographique. L armature urbaine française est évidemment liée à la géographie et à l histoire : un grand territoire, à la densité de population moyenne (en comparaison de ses voisins européens) et qui dispose d un ensemble de villes nombreuses (30 agglomérations de plus de CARTE 6 > Agglomérations de plus de 100 000 habitants en Europe (en 2000)

25 200 000 habitants contre 34 pour l Allemagne et 32 pour la Grande-Bretagne) mais dont la «maille» est particulièrement large Par rapport à ses pays voisins, la France présente un très faible maillage par les villes de plus de 100 000 habitants : la Belgique, les Pays-Bas, l Allemagne, l Angleterre et le nord de l Italie disposent d un grand nombre de villes de cette taille, relativement proches les unes des autres. On pourrait dire que l Europe des grandes villes contourne la France par le nord-est Mais qui soutiendrait que Toulouse ou Nantes doivent gagner 500 000 ou un million d habitants supplémentaires pour être compétitives vis-à-vis des métropoles européennes? L enjeu, à l évidence, n est plus là. CARTE 7 > Agglomérations de plus de 100 000 habitants distantes de moins de 100 km (en 2000)

26 Pour un rayonnement européen des métropoles françaises Les métropoles françaises : motrices pour l économie. Les métropoles françaises ont un bon niveau de rayonnement européen, mais leurs fonctions économiques sont insuffisamment affirmées Dans de nombreux domaines, les villes françaises ont un rayonnement qui compense leur faible taille au plan démographique. L enjeu majeur de leur développement est celui de la présence de grandes fonctions économiques supérieures qui alimentent le dynamisme économique local. Le rayonnement de 180 agglomérations européennes de plus de 200 000 habitants a été analysé pour la Datar 9. Ce travail, qui couvrait les quinze pays de l Union européenne, la Suisse et la Norvège, a été effectué à partir de quinze indicateurs relatifs aux fonctions internationales, aux activités économiques et au niveau de rayonnement, ainsi que la diversité ou la spécialité économique. Un classement global a ensuite été fait, permettant de synthétiser et de comparer leur niveau de rayonnement. La trame urbaine de l Europe se caractérise par quelques faits marquants et relativement stables dans le temps : > deux villes, Paris et Londres, sont clairement dominantes au plan démographique et du rayonnement ; > une grande dorsale européenne s étend de Londres à Milan en passant par la troisième grande conurbation européenne Essen-Cologne-Francfort. C est le dessin de la fameuse «banane bleue». Pour autant, cette Europe n est plus la seule réalité : l effet de l ouverture à l est s est traduit par un renforcement des villes les plus continentales (Berlin, Munich, Vienne, notamment) et une Europe de plus en plus multi-polaire se dessine, où le sud (avec des villes comme Barcelone, Madrid, Lisbonne, Porto, Naples ou Athènes), les confins ouest (Dublin) et les grandes villes scandinaves (Stockholm, Oslo, Malmö) constituent indéniablement des pôles d attraction forts. Les villes françaises, dans ce panorama européen, ont une position particulière : 9 Source principale: «Les villes européennes. Analyse comparative», Céline Rozenblat, Patricia Cicille, Paris: La Documentation Française (Datar), 2003, 94p. > Paris est le fer de lance européen, avec Londres, dans la compétition des villes mondiales. > Les villes françaises, hors Paris, n ont pas le poids démographique des très grandes villes européennes. > Aucune d elles n atteint le niveau de rayonnement des principales métropoles européennes : Lyon, deuxième ville française parmi les 180 villes étudiées, se classe 17 e ; Marseille et Toulouse se classent respectivement 23 e et 28 e. > Elles ont des forces dans plusieurs domaines : accessibilité plutôt satisfaisante, nombre de sites culturels et de grandes manifestations globalement élevé, présence estudiantine importante, activité industrielle globalement diversifiée. > Leur rayonnement scientifique paraît encore relativement modeste, hors Paris (nombre de revues scientifiques éditées, participation à des réseaux de recherche internationaux, etc.), malgré leur fort potentiel universitaire et alors que ces sujets sont au cœur de la compétitivité économique. > Leurs faiblesses sont plus marquées encore dans les domaines liés à l économie (présence de grands groupes, banques internationales, foires et salons internationaux, etc.).

CARTE 8 > Une bonne performance pour le nombre de sites culturels et touristiques CARTE 9 > Mais une place médiocre pour le nombre de sièges sociaux de grands groupes 27

28 Pour un rayonnement européen des métropoles françaises Les métropoles françaises : motrices pour l économie. CARTE 10 > Classement global de 180 villes selon 15 indicateurs de rayonnement : aucune ville française dans les classes 2 et 3 TABLEAU 5 > Un bon rayonnement des agglomérations françaises, comparé à leur poids démographique, mais qui reste à améliorer France Autres villes européennes Rayonnement nettement plus fort que le poids démographique Montpellier Amsterdam, Genève, Grenade, Luxembourg Rayonnement légèrement plus fort que le poids démographique Angers, Brest, Cannes, Clermont-Ferrand, Dijon, Grenoble, Lyon, Marseille, Mulhouse, Nancy, Nantes, Nice, Rennes, Strasbourg, Toulouse Munich, Vienne, Bruxelles, Helsinki, Dublin, Milan, Oslo, Utrecht, Lisbonne, Stockholm, Lausanne, Zurich Rayonnement équivalent au poids démographique Béthune, Bordeaux, Le Havre, Lens, Metz, Orléans, Paris, Reims, Rouen, Saint-Étienne, Tours Copenhague, Bilbao, Madrid, Rome, Porto, Glasgow, Londres, Berlin, Francfort, Hanovre Source : «Les villes européennes. Analyse comparative», Céline Rozenblat, Patricia Cicille, Paris : La Documentation Française (Datar), 2003, 94p. Rayonnement plus faible que le poids démographique Lille, Toulon, Valenciennes Essen, Belfast, Liverpool, Manchester, Naples, Dresde, Sarrebruck, Barcelone, Athènes, Gênes, Turin Rotterdam, Birmingham

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30 Pour un rayonnement européen des métropoles françaises Les axes d une politique nationale

2Les axes d une politique nationale 31

32 Pour un rayonnement européen des métropoles françaises Les axes d une politique nationale Aux Pays-Bas, l État est à l initiative de la démarche intégrée des villes En 1998, l État néerlandais a adopté une politique 10 qui a incité vingt-cinq villes du pays à se doter d un projet de développement intégré, une vision, permettant de bénéficier de financements nationaux supplémentaires (458 millions en 4 ans, par exemple, pour Utrecht). Le 20 décembre 1999, toutes les villes avaient signé une convention avec le gouvernement, qui respecte les principes suivants : les villes doivent développer une vision cohérente pour leur avenir et formuler leurs ambitions ; la régénération des quartiers déshérités est le principe premier du programme ; le plan doit être en cohérence avec le développement régional ; le processus est basé sur la participation des acteurs urbains pertinents, des décideurs nationaux et des habitants ; le plan doit mentionner clairement les objectifs à atteindre et les résultats doivent être évalués chaque année. De plus, le plan de développement urbain doit spécifier l investissement propre des villes, la nature des partenariats engagés, les indicateurs mesurables choisis Outils de développement des villes, ces plans participent aussi à la lisibilité et à la cohérence des politiques urbaines au niveau national. En Angleterre, le gouvernement construit une politique à l égard des grandes villes Un rapport vient d être rendu au gouvernement sur le positionnement des villes britanniques dans la compétition des villes européennes 11. Résolument tourné vers les questions de performance économique comparée des villes britanniques, ce rapport a été rédigé par un partenariat constitué de : huit villes-centre (Birmingham, Bristol, Leeds, Liverpool, Manchester, Newcastle, Nottingham, Sheffield), neuf agences régionales de développement, et les services ministériels impliqués dans la performance économique nationale (notamment les services du Deputy Prime Minister, le Trésor, le Commerce et l Industrie, les Transports, la Culture, les Média et le Sport). 10 EUROCITES, «Stratégies de développement des métropoles européennes», Lyon: Grand Lyon, groupe de travail Eurocités/EDURC, septembre 2003, 28p. 11 PARKINSON, Michael (et alii), «Competitive European cities: where do the core cities stand?», Londres: Core Cities Working Group, octobre 2003, 104p. Quelques principes fondamentaux ont été affirmés par l État britannique : La compétitivité du pays et de ses régions passe par celle de ses grandes métropoles. Il est possible d améliorer leur performance. Les politiques nationales ont leur rôle à jouer. La responsabilité de la réussite ou de l échec du rayonnement des métropoles est partagée entre les partenaires nationaux, régionaux et locaux. Les villes s inscrivent dans des réseaux, qui dépassent pratiquement toujours les périmètres des autorités locales. Les territoires et la géographie évoluent ; les institutions devraient évoluer parallèlement. Il s agit d une problématique de long terme (un marathon plutôt qu un 100 m).

33 Le Gouvernement, conformément aux orientations du Ciadt du 13 décembre 2002, engage une stratégie nationale destinée à consolider le rayonnement des métropoles françaises au niveau européen. Cette stratégie se justifie doublement : la consolidation d un certain nombre de métropoles est clairement d intérêt national, voire européen, et les domaines d intervention qui peuvent servir à cette consolidation incombent pour partie à l État, permettant d accompagner la stratégie propre à chaque métropole. Cette stratégie s appuie sur : > un renforcement du rayonnement économique : création de nouveaux quartiers d affaire, politique foncière volontariste, accueil de sièges sociaux, de congrès ; > un renforcement de l enseignement supérieur et de la recherche en veillant, par exemple, à favoriser l accueil des étudiants et/ou chercheurs étrangers ; > un renforcement du rayonnement culturel et artistique : construction de nouveaux zéniths, lancement de trente projets de rénovation lourde de musées territoriaux d ici 2008 et création d antennes régionales des grands équipements culturels ; > la poursuite de l implantation d emplois publics dans les grandes métropoles ; > une meilleure accessibilité : poursuite du développement des TGV, amélioration des dessertes aériennes et de l accès aux grandes plate-formes aéroportuaires. En confortant leur place européenne, les principales agglomérations pourront irriguer plus largement le territoire qui les environne. Cette voie doit permettre d éviter les effets négatifs de la métropolisation : extension démesurée, ségrégation sociale et dégradation de la qualité de vie et de l environnement.

34 Pour un rayonnement européen des métropoles françaises Les axes d une politique nationale Agir sur les accélérateurs du rayonnement métropolitain Une politique de rayonnement économique > Favoriser l essor de nouveaux quartiers d affaires pour accueillir des sièges sociaux Hormis Paris, la plupart des métropoles françaises disposent aujourd hui d un parc d immobilier d entreprises insuffisant pour leur conférer une position forte dans la concurrence européenne. Pourtant ce sont les quartiers d affaires qui permettent, par leur effet de masse, leur visibilité internationale et les services qu ils proposent, de développer l emploi supérieur lié à l accueil de sièges sociaux ou d organes de direction des grands groupes internationaux. C est pourquoi, l État soutiendra certains grands projets de réalisation de centres tertiaires d envergure, portés par les collectivités en appui d une stratégie de rayonnement international affirmée comme à Marseille, Lille, ou dans la région urbaine de Lyon (Saint-Étienne). > Valoriser les centres des grandes agglomérations, par une politique foncière volontariste La plupart des très grandes villes souffrent en leur centre d une pénurie foncière. Or, l État et ses établissements publics sont parmi les premiers propriétaires fonciers dans les métropoles. Certaines de leurs propriétés pourraient contribuer à l offre foncière nécessaire aux projets métropolitains. Dans cette optique, les différents ministères concernés proposeront, pour le printemps 2004, une stratégie de mise sur le marché des terrains en leur possession, dont ils n ont pas de perspective d usage à moyen-long terme. Ils seront aidés par l Agence des propriétés immobilières de l État, en cours de création. > Accueillir des sièges sociaux et promouvoir les métropoles françaises à l étranger Par rapport aux autres grands pays européens, les sièges sociaux des entreprises internationales et les centres de recherche internationaux sont en France encore très concentrés dans la capitale. Le Gouvernement entend donc rendre plus efficace le dispositif de prospection internationale en matière d accueil de grandes implantations tertiaires et de promotion des métropoles vis-à-vis des investisseurs et des entreprises étrangères.

35 > Renforcer les fonctions d accueil de congrès, salons et foires des villes françaises En matière d accueil de congrès internationaux et d organisation de foires et salons, les villes françaises accusent, à l exception de Paris, un retard important. Il s agit pourtant d activités essentielles au tissu économique métropolitain. Le Gouvernement prépare un diagnostic et des recommandations visant à définir une stratégie concertée pour renforcer les activités de congrès, salons dans les métropoles, en associant les chambres de commerces et d industries et les collectivités locales. > Favoriser l accueil d activités logistiques d intérêt européen La France, par sa position géographique en Europe, bénéficie pleinement de la croissance des activités logistiques induites par l internationalisation des échanges. Dans cette perspective, la localisation et l organisation de plates-formes logistiques à vocation européenne revêtent une importance particulière. En lien avec les acteurs de la logistique et les collectivités territoriales, le Gouvernement établira un état des lieux et assurera le suivi des projets de platesformes logistiques à vocation européenne ou susceptibles de le devenir. Il formulera des recommandations pour le développement des vocations internationales de chacun de ces sites.

36 Pour un rayonnement européen des métropoles françaises Les axes d une politique nationale Le rayonnement de l enseignement supérieur et de la recherche Formation supérieure et recherche constituent deux leviers indispensables pour asseoir le statut métropolitain d une agglomération. Dans ce domaine, l enjeu d avenir pour les établissements français est celui de leur positionnement à l échelle européenne et internationale, avec une réflexion sur leur masse critique et leur mise en réseau. > Améliorer l accueil des étudiants étrangers et les services aux étudiants L harmonisation des diplômes actuellement en cours (démarche LMD licence- master- doctorat), va faire du continent européen un vaste espace facilitant la mobilité des étudiants et des chercheurs, tout en le rendant lisible et attractif à l échelle mondiale. Dans ce contexte, des mesures visant à améliorer l accueil des étudiants étrangers (formation linguistique, facilitation des démarches, accompagnement individualisé ) seront mises en œuvres. Des dispositions rapprochant les formations d ingénieurs et favorisant la coopération entre les universités permettront d accroître l image et l attractivité du système éducatif français. Par ailleurs, L État poursuivra l amélioration des services aux étudiants (soutien au programme des universités numériques en région). Ce programme, qui a déjà mobilisé 5M de crédits d État pour la période 2002-2003 est prolongé pour une durée supplémentaire de deux ans. > Renforcer l attractivité de la recherche française L attractivité de la recherche française repose sur l existence de pôles régionaux de réputation internationale. Parallèlement à cette action sur les structures de recherche, il est nécessaire d améliorer les conditions d accueil et de vie des chercheurs étrangers en France. En lien avec les collectivités territoriales concernées (régions, grandes agglomérations), un état des lieux présentant les forces et faiblesses des actions et dispositifs existants sera réalisé, ainsi qu un plan d action territorial précisant notamment la pertinence et la faisabilité de réalisation de " centres internationaux de recherche " à Paris et dans quelques grandes métropoles. > Développer les structures de recherche médicale Le Gouvernement souhaite favoriser l émergence de grands ensembles médico-scientifiques dans les métropoles françaises. Le développement de cancéropôles s inscrit dans cet objectif. Depuis 2003, sept cancéropôles sont en émergence (Nantes, Toulouse, Paris, Strasbourg, Lille, Marseille et Lyon) pour un montant de 16,5M de crédits d État. Par ailleurs, le Gouvernement favorisera la mise en réseau à l échelle interrégionale des centres hospitaliers universitaires (CHU), pour constituer des pôles de dimension européenne.

Le rayonnement culturel et artistique 37 L'un des principaux axes de la politique culturelle du Gouvernement consiste à aider l implantation en régions de grands équipements culturels. Pour les grandes métropoles, la qualité des équipements et de l activité culturelle est un élément essentiel de leur rayonnement qui favorise leurs activités touristiques et économiques. L État poursuivra son effort en faveur de la construction de Zéniths en mobilisant 13 M pour la construction de projets programmés sur Nantes, Strasbourg, Limoges, Amiens et Saint-Étienne (onze zéniths ont déjà été construits depuis 1984). D ici 2008, 30 projets de rénovation lourde de musées territoriaux seront engagés, correspondant à un effort du ministère de la culture de 125 M. L État sera le partenaire des collectivités locales pour le développement de programmes pluridisciplinaires ambitieux. Il participera notamment à la construction du théâtre auditorium de Poitiers, au pôle Champs libres à Rennes, à la constitution du pôle enseignement recherche ARTEM à Nancy ou encore au projet Hérault - culture- sport à Montpellier. Le ministère de la Culture compte 37 établissements publics (hors écoles d'architecture et écoles d'art), dont 34 sont situés à Paris. Les plus grands d'entre eux développeront des antennes dans les régions. Le projet le plus avancé est celui du Centre Pompidou à Metz. D autres projets, portés par le Musée du Louvre (dont une antenne est envisagée dans la région Nord Pas-de-Calais) ou la Bibliothèque Nationale de France, arriveront bientôt à maturité. La politique d implantation territoriale des emplois publics Le Gouvernement décide de renforcer les centres de décisions publics dans les métropoles et d y favoriser l accueil d organismes publics européens et internationaux. Les pôles publics qui se sont constitués, au fil des années dans les métropoles, ont acquis une taille suffisante pour permettre cette politique. L ensemble des ministères sont conviés à élaborer d ici la fin du premier semestre 2004 des plans d implantation qui concrétiseront cet objectif. Le Ciadt du 18 décembre 2003 confirme les opérations de transfert suivantes : > le département des mesures physiques de l ONERA à Toulouse ; > les équipes chargées de nouvelles applications informatiques du Ministère des finances à Nantes ; > un tiers des services de la nouvelle agence UBIFRANCE (ex-cfce) à Marseille ; > le nouveau centre européen de formation à la propriété industrielle à Strasbourg.