Conseil National du Commerce Extérieur Négociations entre le Maroc et l Union Européenne relatives à la libéralisation du commerce des services et du droit d établissement Anticiper Partager Agir www.cnce.org.ma
Sommaire 1. Synthèse 2. Cadre général et revue de littérature 3. Rapport sur les services de transport 4. Rapport sur les services financiers (banques et assurances 5. Rapport sur les services de la construction et de l ingénierie 6. Rapport sur les services de la communication et de l informatique 7. Rapport sur les services de tourisme et voyage 8. Rapport sur les services de l éducation et de R&D 9. Rapport sur les services de la distribution et l environnement 10. Rapport sur les services de santé et services sociaux
Synthèse L objectif du présent rapport est de dresser une analyse comparée de l état des lieux des secteurs des services aussi bien en terme de potentiel de croissance qu en terme de nature des engagements pris tant par le Maroc que par l Union européenne à l égard des pays membres de l OMC et des pays partenaires d accords de libre-échange. A travers l analyse des secteurs des services en termes de physionomie, de réglementation et de niveau d ouverture, le rapport à l ambition de porter un éclairage sur les enjeux des négociations en cours entre le Maroc et l Union européenne. Cet éclairage a été opéré, entre autres, à travers la quantification des marges préférentielles accordées par les deux parties dans le cadre de leurs engagements au niveau de l OMC et vis-à-vis de leurs partenaires des accords de libre échange (Maroc-USA et UE-Chili et UE-CARIFORUM). L analyse de l état des lieux confirme et quantifie une évidence à savoir : l existence d un écart assez important des niveaux de développement des secteurs des services au Maroc et à l Union européenne tant en termes de taille qu en terme de maturité et positionnement international. Ainsi, en terme absolu, le secteur des services dans l Union européenne représente 70% de l activité économique (70% du PIB en 2007) ce qui veut dire que l économie européenne tourne principalement par les activités des services alors que l industrie et l agriculture réunis ne représente que 30% du PIB. Au Maroc, cette contribution s élève à hauteur de 55% du PIB. Cependant, en terme relatif les tendances de l évolution du commerce des services convergent malgré l écart important du volume des échanges qui existe entre le Maroc et l Union européenne. Avec des exportations qui ont atteint 1735 milliards de dollars en 2008, l Union européenne (27) réalise près de 50% du commerce mondial des services commerciaux suivi des Etats-Unis (522 Mds de dollars) et du Japon (144 Mds de dollars). En termes de variation annuelle, les exportations des services commerciaux européens ont atteint 10% par an durant la période 2000-2006. L Union européenne pris comme un ensemble (27 pays) est, également, le premier importateur mondial des services commerciaux avec une valeur de 1513 milliards de dollars en 2008 et une croissance de 10%. Durant la période 2000-2007, les importations des services commerciaux de l UE ont enregistré un taux de croissance de 14% par an. La performance de l UE en matière du commerce international de services résulte, principalement, de certains membres comme le Royaume-Uni, l Allemagne, la France et l Espagne. Au Maroc, les exportations des services ont atteint une valeur de 98,9 milliards de Dhs et les importations près de 49,1 milliards de Dhs soit un excédent de 49,8 milliards de Dhs. Comparé aux échanges des services de l Union européenne, le Maroc ne représente qu une infime partie de 0,12% entre 0,16% des exportations et 0,08% des importations. En termes de structure, l analyse sectorielle des principales activités des services aussi bien dans l Union européenne qu au Maroc englobe les activités telles que le transport, la distribution, la finance, le tourisme, les télécommunications, les services de construction, et bien d'autres services comme la publicité, l immobilier, le conseil en gestion, l'architecture qui sont plus développés dans l Union européenne qu au Maroc. Parmi ces services, les activités de services qui se distinguent au Maroc par leurs contribution au PIB sont les activités de tourisme, les télécommunications, les services financiers, les activités de construction et travaux publics ainsi que les services de transport. Au niveau de l Union européenne, le secteur du transport produit 10% du PIB communautaire, soit environ 1000 milliards d euros par an et génère plus de 10 millions d emplois. Au Maroc, ce secteur a fait objet de plusieurs processus de libéralisation aussi bien au niveau du transport aérien, maritime et routier et ce en vue de s adapter, entre autres, à l évolution des échanges du Maroc avec l extérieur. Il représente, tous modes confondus, près de 6 % du PIB marocain et assure l emploi d environ 10% de la population active urbaine. La distribution reste un secteur très développé dans l Union européenne avec plus de quatre millions d entreprises opérantes dans le commerce de détail dans l UE-25. Ces entreprises génèrent un chiffre d affaires de plus de deux milles milliards d Euros. Elles emploient près de 15,5 millions de personnes et produisent une valeur ajoutée de près de 352 milliards d Euros.
Pour ce qui est du secteur de tourisme, sa part dans le PIB européen s élève à 11%. Ce secteur offre des opportunités de travail à plus de 12% de la population active soit 24 millions de postes d emploi en 2006 (emplois direct et indirect). Cependant, le secteur emploie directement environ 8 millions de personnes, soit quelque 4% de la population active. De son côté, le secteur de tourisme marocain a fait l objet de la «vision 2010» et du contrat programme conclu entre la profession et le gouvernement pour le développement de capacité d accueil, la formation, les investissements dans le secteur dans l objectif d accueillir 10 millions de touristes d ici 2010. Le secteur représente près de 60% des activités des services et emploie directement près de 35.000 personnes et indirectement 175.000 personnes. Le marché de la construction dans l Union européenne (UE-25) est estimé à 1 286 milliards d euros. En gros, le secteur de construction, bâtiment et travaux publics produit une valeur ajoutée de 571,2 milliards d Euros et emploie plus de 12 millions de personnes. Pour sa part, ce secteur demeure stratégique pour Maroc. Il occupe une place prépondérante dans l économie nationale aussi bien au niveau des emplois qu au niveau de sa contribution au PIB national. Le secteur emploi près de 9,7% de la population soit plus de 520.000 personnes. La contribution de la valeur ajoutée du secteur BTP dans le PIB national oscille autour de 6,1%. En effet, en 2007, la valeur ajoutée du secteur a atteint 37 milliards de dirhams contre 31,7 milliards de dirhams en 2006, soit un accroissement de 16,7 %. Cet essor s explique par l expansion des infrastructures de base, grâce à la politique des grands chantiers initiée par l Etat et le déploiement de la construction des logements sociaux, des villes nouvelles et la restructuration de l habitat insalubre. Le secteur compte près de 52000 opérateurs dont 5220 entreprises organisées avec une prépondérance des entreprises de construction (près de 58%). Ces entreprises couvrent la totalité du territoire national avec une relative concentration à Casablanca (22%), Rabat-Salé (17%) et Meknès-Tafilalet (11,4%). Au sein de l Union européenne-27, le secteur des télécommunications reste parmi les activités de services les plus actives en fournissant plus de 1,2 millions d emplois et en générant plus de 190 milliards d'euros de valeur ajoutée dans l'ue-27. La valeur de la production de matériel de télécommunications a dépassé, quant à elle, 17 milliards d'euros en 2006. Dans cette branche, les services informatiques ont généré une valeur ajoutée de 150 milliards d euros dans les pays de l EU-25 et a occupé 2,5 millions de personnes. La prestation desdites services constitue la principale activité de plus de 500000 entreprises en 2006. En ce concerne le Maroc, la libéralisation du secteur des télécommunications au Maroc a été parmi les réformes ayant connu un franc succès. Le processus de réforme a donné lieu à une situation de marché concurrentiel où opèrent trois opérateurs des segments de la téléphonie mobile, la téléphonie fixe et les services d Internet. Le secteur représente, actuellement, un chiffre d affaires de 30 milliards de Dhs et 10% du PIB prévus en 2012 (chiffre d affaire de 80 milliards de Dhs1). Sa contribution dans le PIB national s élève à 7%. Le secteur emploi directement près de 37.000 personnes et 120 000 emplois indirects. Enfin, il convient de noter que le secteur financier marocain (bancaire et d assurance)a fait l objet d un long processus d ouverture et de réformes. Ce secteur a été, depuis les années 90, au centre des choix importants pris par les pouvoirs publics dans le cadre d un processus d ouverture maîtrisé des activités financières au niveau international. Ce secteur emploie actuellement près de 35000 agents, dont 78% sont employés par les banques. Parallèlement à l extension de leur réseau, les banques ont renforcé leur effectif de 6,8% à 27435 agents, contre 5,7% en 2006. Sur le plan de l analyse des engagements pris dans le cadre des négociations multilatérales (OMC) et dans le cadre bilatéral (accords de libre-échange), le rapport renseigne sur les garanties offertes pour accéder au marché des deux partenaires pour la fourniture des services. Le Maroc a pris des engagements, dans le cadre multilatéral, dans 26 sous- secteurs sur les 155 sous-secteurs de la nomenclature de la Classification centrale des produits contre 83 sous-secteurs pour l Union européenne et 93 pour les Etats-Unis. Cependant, le Maroc s est proposé d améliorer son offre de concessions lors du cycle de négociations de Doha (2001) en intégrant des concessions pour de nouveaux secteurs n ayant jamais fait l objet de négociation. 1 Données fournies par l Agence nationale de réglementation des télécommunications.
Généralement, il y a deux types d engagements pris aussi bien par le Maroc que par l Union européenne en matière de commerce des services : Les engagements horizontaux Les engagements spécifiques Les engagements horizontaux s appliquent à la fourniture des services de l ensemble des secteurs auxquels le Maroc et l Union européenne ont souscrit des concessions. Ils concernent, principalement, les mouvements des personnes physiques et la réglementation des changes spécifique au Maroc. Les engagements spécifiques du Maroc ont concerné six domaines de services : les services professionnels et informatiques, les télécommunications, la construction et services d ingénierie connexes, les services d environnement, les services financiers, les services touristiques, et les services de transport. Ceux de l Union européenne ont couvert en plus de ces domaines, les services de l éducation et recherche et développement, les services culturels et de la santé. Concernant les services fournis aux entreprises, les engagements ont couvert les activités de services professionnels de la comptabilité et l audit des comptes, les services de conseil en gestion, les services de placement et de fourniture de personnel et les services informatiques et services connexes. Les services de télécommunications et les services bancaires et services d assurance, ainsi que les services touristiques et de transport aérien et routier (marchandises et de voyageurs) ont été couvert par des limitations de part et d autres inscrites en matière d accès aux marchés. Par ailleurs, les services relatifs au tourisme et aux voyages sont parmi les rares services ayant bénéficié d une ouverture sur les deux marchés (Maroc et UE). Ils ont touché, pratiquement, toutes les activités du secteur : les services d'hôtellerie et de restauration, les services d'agences de voyages et organisateurs touristiques, les services des guides touristiques et autres services. Le secteur de transport a fait l objet, quant à lui, d engagements portant sur les activités majeurs, à savoir, le transport maritime, aérien et routier. Sur le plan de l analyse comparative 2 des niveaux d ouverture du Maroc et de l Union européenne au titre de l accès au marché et du traitement national, celle-ci a été opérée à partir des engagements retenus aussi bien au niveau NPF (Accords de l OMC) que préférentiel (Accords de libre-échange). Elle permet de relever que le Maroc a pris des engagements plus étendus dans le cadre de l accord conclu avec les Etats-Unis par rapport à son niveau NPF et ce, pour pratiquement l ensemble des secteurs ayant fait l objet de négociations. Cela s explique, en grande partie, par la nature de l approche adoptée dans le cadre de l accord conclu avec les Etats-Unis (approche négative). En revanche, l offre d engagements de l Union européenne au Chili demeure restreinte dans le cadre de leur accord préférentiel comparativement à son niveau NPF. Cela s explique par deux facteurs à savoir : - La même approche de négociations (approche positive) a été retenue par l UE aussi bien dans le cadre préférentiel que NPF ; - L amélioration de l offre de l Union européenne nécessite un engagement de tous les Etats membres de l UE. 2 L analyse comparative a été faite sur la base des marges préférentielles du Maroc (MPMaroc) et de l Union européenne (MPUE) évaluées en termes de différences entre le niveau de protection NPF et celui préférentiel convenu dans le cadre des accords de libre-échange signés par les deux parties (avec les Etats-Unis en ce qui concerne le Maroc et avec le Chili concernant l UE). Le différentiel entre ces marges préférentielles (DG = MPMaroc - MPUE) indique le niveau de désavantage pour le Maroc (Cas ou DG 0) ou d avantage (Cas ou DG 0) qui pourrait résulter d un alignement du futur accord entre le Maroc et l Union européenne sur les accords préférentiels déjà signés par les deux parties.