Madame Ségolène Royal Ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie



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Transcription:

Cour des comptes Le 2 9 AVR. 2015 Le Premier président à Madame Ségolène Royal Ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie Réf.: 72216 Objet : la gestion des agences de l'eau En application des dispositions de l'article L. 111-3 du code des juridictions financières, la Cour a examine les comptes et la gestion des six agences de l'eau (Adour-Garonne, Artois-Picardie, Loire-Bretagne, Rhin-Meuse, Rhône-Méditerranée et Corse, Seine-Normandie), pour les exercices 2007 à 2013. À l'issue de son contrôle, et en complément de l'insertion au rapport public annuel de 2015 relative aux agences de l'eau et à la politique de l'eau, la Cour m'a demandé, en application des dispositions de l'article R. 143-1 du même code, d'appeler votre attention sur les observations suivantes. Entre 2007 et 2013, la forte augmentation des redevances perçues par les agences de l'eau (+ 24 %) leur a procuré une aisance financière certaine. Cet accroissement de leurs ressources ne les a pas incitées à accentuer significativement la sélectivité des aides, qui représentent 90 % de leurs dépenses, en les consacrant aux actions prioritaires dans leurs bassins. Les charges de fonctionnement n'ont pas été maîtrisées, alors même que le contexte du 1 oe programme (2013-2018) qui prévoit une moindre augmentation des recettes, d'une part, et celui de la contribution des agences au redressement des finances publiques, d'autre part, rendent impérative une gestion plus rigoureuse.

Cour des comptes - Référé n 72216 2 16 1 - Une gestion des ressources humaines coûteuse et peu favorable à la mobilité Les dépenses de personnel ont augmenté de 13 % entre 2008 et 2012 à périmètre constant. La modification du quasi-statut des personnels en 2007 a donné lieu à d'importants reclassements des agents à la catégorie supérieure. Son surcoût est évalué entre 8 et 11 M par an pour la seule agence de l'eau Seine-Normandie, soit près d'un tiers de la masse salariale. Rapporté au nombre d'équivalents temps plein (ETP) sur la période 2007-2012, le coût salarial moyen de l'ensemble des agences a augmenté de 22 %, soit un gain net de pouvoir d'achat de 12 % par agent. L'évolution la plus sensible a porté sur l'augmentation des primes et indemnités ( + 50 % entre 2007 et 2013). Le régime indemnitaire est particulièrement généreux. Le dispositif de la prime de fonctions et de résultats (PFR), instauré avant celui de la PFR applicable aux personnels de l'état, est très coûteux et trop peu modulable selon les résultats des agents. En effet, la part variable liée aux résultats est faible : elle s'échelonne de 20 pour les agents de catégorie V à 190 pour ceux de catégorie 1 1. La prime de performance collective (PPC) n'a pas été mise en œuvre conformément aux objectifs initiaux de rémunération des performances et des résultats de chacune des agences de l'eau. Aucune de ces deux primes n'a constitué un outil de management permettant de valoriser la performance individuelle. Par ailleurs, le statut des agents n'encourage pas la mobilité qui reste très faible en raison de freins juridiques et financiers. Le ministère de l'écologie, du développement durable et de l'énergie (MEODE) a indiqué que les agents de la future Agence française pour la biodiversité (AFB) bénéficieraient d'un quasi-statut où la mobilité n'occasionnerait pas la perte du bénéfice de l'avancement. Cette disposition pourrait être étendue aux contractuels des agences de l'eau dans le cadre de la réflexion globale sur la mobilité interne et géographique préconisée par la Cour, sous réserve qu'elle n'entraîne aucun surcoût. Enfin, les dispositifs actuels de protection sociale complémentaire (complémentaire santé, prévoyance, sur-complémentaire retraite) des agences de l'eau n'ont plus de base légale et présentent un coût par agent exorbitant au regard de ceux du ministère de tutelle : il atteint 1 221 par an et par agent à l'agence Rhin-Meuse, alors qu'il n'est que de 39 au ministère de l'écologie. La couverture sociale complémentaire des agents des six agences de l'eau, ainsi que de l'office national de l'eau et des milieux aquatiques (Onema) devrait être alignée sur celle des agents du ministère de l'écologie. La Cour préconise de mettre fin aux recrutements aux conditions actuelles du statut et d'explorer les voies d'une refonte du cadre d'emploi à coût constant. 2 - Des dépenses de communication et d'aide internationale à contenir Bien que les ressources consacrées aux actions internationales ou de communication ne représentent que 1 % des aides versées, leur montant s'est élevé à 145 M au cours du 9e programme, soit entre 2007 et 2012. Ces dépenses financent souvent à guichet ouvert des opérations dont l'intérêt est parfois très limité. En matière de communication, de nombreuses subventions relèvent davantage d'une démarche culturelle et événementielle que d'actions liées à la lutte contre les pollutions. À titre d'exemple, entre 2007 et 2012, l'agence de l'eau Seine-Normandie a versé une subvention de 250 000 pour le village de l'eau «les voiles de la liberté» de l'armada (Rouen, 2013), 150 000 à l'association Solidarité Eau Europe (SEE) pour les rencontres internationales Eau et Cinéma dans le cadre du r Forum Mondial de l'eau, 187 475 à 1 +/-30 pour les catégories IV, +/-60 pour les catégories Ill, +/- 11 0 pour les catégories Il, +/-560 pour les catégories 1 BIS. 13 rue Cambon - 75100 PARIS CEDEX 01 - T +33 1 42 98 95 OO - www.ccomptes.fr

Cour des comptes - Référé n 72216 3/6!'Association pour le Festival de la Photo Animalière et de Nature (AFPAN). De même, l'agence Rhin-Meuse a accordé 687 7 40 de subventions pour l'organisation de «trophées de l'eau» dont 150 000 financent l'achat d'espaces publicitaires par les journaux locaux et la réalisation d'un plan média, actions qui paraissent éloignées des missions de l'agence. En matière de coopération internationale, les projets financés par les agences sont conduits en dehors du dispositif de pilotage de l'aide publique française au développement. Bien qu'une répartition des priorités géographiques entre les agences soit censée être établie, le dispositif n'est pas véritablement coordonné. Le contrôle de l'utilisation de ces aides est malaisé, qu'il s'agisse de la réalité des ouvrages ou des bénéficiaires des projets. L'intérêt de ces interventions est d'autant moins avéré que les projets financés portent surtout sur des actions d'animation de réseaux. La Cour s'interroge sur l'opportunité et sur la pertinence de ces actions de coopération internationale qui mobilisent des ressources importantes. Dans le cadre de la préparation du 6e Forum mondial de l'eau à Marseille en mars 2012, le comité international du Forum mondial de l'eau a bénéficié de 2 M d'aides au fonctionnement, sans lien avec des projets alors définis. Ce même groupement d'intérêt public (GIP) a bénéficié ultérieurement d'une avance exceptionnelle de 2,5 M de l'agence de l'eau Seine-Normandie. En outre, une partie significative des dépenses de communication et d'aide internationale des agences de l'eau ont servi à financer des projets relatifs au Forum mondial de l'eau. Des associations perçoivent de manière récurrente des subventions très élevées. La Cour a ainsi constaté que l'agence de l'eau Seine-Normandie avait accordé, entre 2007 et 2012, des subventions d'un montant total de 6,4 M à l'association Espaces, 1,2 M à l'association de l'aquifère des calcaires du Champigny (AQUl'Brie), 424 710 à la Fédération départementale des chasseurs de Seine-et-Marne, 3, 1 M aux différentes fédérations de pêcheurs. Certaines associations (01Eau 2, PFE 3, ps-eau 4, etc.) ont facturé, à l'instar de sociétés de conseils, des coûts d'intervention en homme/jour à des tarifs élevés (de 350 à 784 ). Enfin, les liens juridiques et financiers entre les agences et certaines associations impliquées dans la thématique de l'eau (OIEau, PFE, ps-eau, ASTEE 5, etc.) mériteraient d'être clarifiés, afin qu'ils ne soient pas regardés comme constitutifs de conflits d'intérêts potentiels. 3 - Des méthodes et des outils de contrôle interne à renforcer Le contrôle interne et les outils qui permettent de s'assurer du respect des procédures et de l'homogénéité du traitement des dossiers devraient être renforcés particulièrement lorsque les directions territoriales disposent d'une grande autonomie, comme à l'agence Adour-Garonne et à l'agence Seine-Normandie. Le contrôle interne en matière d'interventions et de redevances devrait être mieux structuré. S'agissant des interventions, seules quelques agences ont organisé un véritable contrôle a priori au stade de l'instruction des dossiers sous forme d'un dispositif dit de pare-feu. Ce contrôle est pourtant nécessaire car les critères d'attribution sont rarement formalisés et les agents pas toujours suffisamment formés. D'une manière générale, le processus d'instruction et d'attribution des aides est insuffisamment documenté et difficilement traçable. Certaines règles définies par le programme d'intervention et les conventions d'attribution des aides sont mal appliquées : ainsi, des aides ont pu être versées à des bénéficiaires débiteurs à l'égard de l'agence, ce qui est théoriquement interdit. Les agences se privent alors du moyen de recouvrer leurs créances, notamment auprès des collectivités locales. 2 Office international de l'eau. 3 Partenariat Français pour l'eau. 4 Programme Solidarité Eau. 5 Association Scientifique et Technique pour l'eau et!'environnement.

Cour des comptes - Référé n 72216 4 / 6 Le contrôle de second niveau (après l'attribution de l'aide) n'est pas assez développé et ses modalités ne sont pas standardisées. Lorsqu'il est mis en œuvre, il fait apparaître des écarts significatifs entre prévision et réalisation en matière de conformité et de qualité du projet financé. S'agissant des redevances, les cartographies des risques élaborées dans certaines agences classent l'absence d'exhaustivité de la base des redevables parmi les risques forts. En pratique, les agences consacrent peu de moyens à la recherche de nouveaux redevables. Cette carence pourrait être comblée par des actions appuyées par la tutelle, comme le croisement des données en provenance des différents applicatifs de chaque agence (aides, redevances) et l'analyse des fichiers externes dont dispose l'administration, en particulier le ministère de l'agriculture. De même, la politique de contrôle fiscal n'est formalisée que dans quelques agences et recouvre des pratiques variables. La plupart du temps, les contrôles sur pièces sont peu nombreux et quelquefois confiés aux agents chargés d'émettre les titres, ce qui limite les possibilités de détection d'erreurs. Dans certaines agences, la part des contrôles sur place est anormalement faible. Le contrôle de gestion n'est effectif que dans quelques agences. Il devrait se développer et s'inscrire dans une logique de performance globale, et pourrait être davantage piloté par la tutelle. En matière d'analyse des coûts, les agences s'appuient sur des méthodes de gestion analytique mises en place par le ministère. Néanmoins, chaque agence procède à des traitements internes de données qui nuisent à la comparabilité des résultats. De plus, le logiciel Sirepa, commun à toutes les agences, ne permet pas la production automatique des états de gestion analytique. La définition d'une méthodologie détaillée commune aux six agences, voire son développement dans les systèmes d'information, permettrait d'homogénéiser les données et de sécuriser leur production. En tout état de cause, la tenue d'une comptabilité analytique est devenue obligatoire à compter de 2015, en application du décret n 2012-1246 du 7 novembre 2012 relatif à la gestion budgétaire et comptable publique (GBCP). Le choix de l'outil de gestion ou de comptabilité analytique devra être commun aux six agences et reposer sur un traitement le plus automatisé possible des données. 4 - Une mutualisation inter-agences à renforcer La mutualisation inter-agences contribue à la baisse des coûts de fonctionnement. Elle existe pour la collecte de trois redevances. En matière informatique, elle est assez avancée. Un cadre de cohérence national des systèmes d'information des agences de l'eau a été élaboré afin de mutualiser les systèmes d'information. Cette méthode a permis des progrès comme le développement du logiciel sur les redevances (Aramis), adopté par cinq des six agences, et l'adoption du logiciel sur les ressources humaines. Toutefois, la mutualisation demeure facultative et laisse subsister des outils variés : en matière d'aides, chacune des agences dispose d'un système d'information distinct ; en matière de redevances, l'agence de l'eau Seine-Normandie a fait le choix d'un système d'information indépendant et trop ambitieux, dont les coûts de développement ont très largement excédé ce qui était prévu et dont le retard de déploiement a faill i conduire à la prescription de 300 M de redevances industrielles 6. 6 Les titres de recettes ont finalement été émis juste avant d'être prescrits, avec près de cinq ans de retard.

Cour des comptes - Référé n 72216 516 L'absence d'une gouvernance unique, pour l'ensemble des agences, des systèmes d'information, qu'il s'agisse des systèmes d'information de gestion, des systèmes d'information métiers sur l'eau ou des données liées à ces systèmes d'information, est regrettable. Dans quelques domaines, comme celui des achats, la mutualisation a commencé : certains marchés sont communs et des guides particuliers ont été rédigés. Elle devrait être intensifiée. Ainsi, une étude comparative recensant les fournisseurs communs aux agences et identifiant les positions quasiment monopolistiques, examinant les prix pratiqués et évaluant l'importance des agences dans la clientèle des fournisseurs, pourrait utilement être conduite par le groupe «achat» sous l'égide de la tutelle. De même, des cahiers des charges communs devraient être mis en place pour des marchés dont les objets sont similaires. Enfin, dans plusieurs domaines où chaque agence agit isolément (notamment, la communication, la formation professionnelle ou l'expertise juridique), la mutualisation permettrait de renforcer l'expertise des agences de petite taille et d'abaisser le coût de l'ensemble. La Cour formule donc les recommandations suivantes : Recommandation n 1 : maîtriser les dépenses de personnel, en mettant fin aux recrutements aux conditions actuelles du statut et en explorant les voies d'une refonte du cadre d'emploi à coût constant ; Recommandation n 2 : renforcer la fonction de contrôle, en particulier pour les interventions et les redevances ; Recommandation n 3 : contenir les dépenses de communication et d'action internationale et mieux encadrer les relations entre les agences et les associations qu'elles financent, pour éviter tout conflit d'intérêt entre les membres de l'association et l'agence; Recommandation n 4 : renforcer la mutualisation des moyens et des systèmes d'information des agences dans le cadre d'un pilotage unique proposant une trajectoire commune à toutes les agences. -=ooo=- Je vous serais obligé de me faire connaître, dans le délai de deux mois prévu à l'article L. 143-5 du code des juridictions financières, la réponse, sous votre signature, que vous aurez donnée à la présente communication 7. 7 La Cour vous remercie de lui faire parvenir votre réponse, sous votre signature personnelle exclusivement, sous forme dématérialisée (un fichi er PDF comprenant la signature et un fichier Word) à l'adresse électronique suivante : grcffeprcsidence1zi'ccornptes.fr. 13 rue Cambon - 75100 PARIS CEDEX 01 - T +33 1 42 98 95 OO - www.ccomptes.fr

Cour des comptes - Référé n 72216 6/6 Je vous rappelle qu'en application des dispositions du même code : deux mois après son envoi, le présent référé sera transmis aux commissions des finances et, dans leur domaine de compétence, aux autres commissions permanentes de l'assemblée nationale et du Sénat. Il sera accompagné de votre réponse si elle est parvenue à la Cour dans ce délai. À défaut, votre réponse leur sera transmise dès sa réception par la Cour (article L. 143-5) ; dans le respect des secrets protégés par la loi, la Cour pourra mettre en ligne sur son site internet le présent référé, accompagné de votre réponse (article L. 143-1); l'article L. 143-10-1 prévoit que, en tant que destinataire du présent référé, vous fournissiez à la Cour un compte rendu des suites données à ses observations, en vue de leur présentation dans son rapport public annuel. Ce compte rendu doit être adressé à la Cour selon les modalités de la procédure de suivi annuel coordonné, convenue entre elle et votre administration. ---~omier Migaud