Nouvelles techniques et nouveaux besoins dans le bâti traditionnel. Quentin Wilbaux MARRAKECH-MEDINA Charte pour la réhabilitation des maisons de la médina. Marrakech, ville d artisanat et de commerce, par essence cosmopolite, a su créer au fil du temps une cohésion sociale dans des espaces très denses par des règles de voisinage, de respect et de tolérance, issues de la religion musulmane. L architecture des maisons et des riyads (les maisons-jardins) de Marrakech, n est pas un simple collage de formes, elle est la parfaite réponse d une population urbaine à ses besoins d habitat, en répondant aux exigences d un site, d un climat, avec des matériaux et des savoir-faire traditionnels. La médina de Marrakech est classée sur la liste du Patrimoine mondial de l UNESCO depuis 1985. Outre les grandes mosquées et les monuments, c est la structure urbaine si particulière de Marrakech et la façon dont les maisons collées les unes aux autres forment les derbs et les quartiers qui a ainsi été reconnue comme indispensable témoignage pour les générations futures de la façon dont les hommes ont parfois su organiser l espace pour vivre ensemble. S inscrivant dans cet esprit de sauvegarde, le projet de Marrakech-Médina est de participer par des opérations ponctuelles de rénovation à la préservation des espaces, des techniques de construction traditionnelles, mais aussi d un art de vivre qui fait le charme de la ville. C est pourquoi, les propriétaires désireux de restaurer leur maison avec l aide des équipes de Marrakech- Médina se doivent d approuver certains principes qui sont les siens : 1
- Au niveau des rapports sociaux : Ils seront conscient de leur statut particulier de «nouvel arrivant». Acceptés par principe dans une société où l accueil de l étranger est une règle essentielle, ils s efforceront de maintenir de bons rapports de voisinage. Par respect des codes, ils veilleront tant pour eux que pour leurs hôtes à un habillement décent. L accès des terrasses, était traditionnellement réservé aux femmes ; l usage des toitures pour l agrément devra donc respecter la nécessaire intimité des maisons voisines. Les classes sociales aisées qui ont progressivement abandonné la médina participaient traditionnellement à l entretien et au gardiennage des espaces communs. Les nouveaux propriétaires, conscients que l avenir de la médina est dans la restauration d un nouvel équilibre social, se devraient de les remplacer dans ces responsabilités. - Au niveau de l architecture : Pour les équipes de Marrakech- Médina, le projet d aménagement d une maison ancienne se fait d abord dans le respect des espaces existants. Les riyads et les maisons traditionnelles sont constituées de pièces organisées symétriquement autour d un espace ouvert. Ce principe de symétrie servira de base au projet d aménagement. Pour le jardin : point d eau central entouré de jardins. Dans les axes des façades : portes, b hou ou sekaïa. Dans les pièces : fenêtres encadrant les portes et alcôves latérales. Les espaces de service (cuisine, salles d eau, circulations) occuperont de préférence les angles. Un certain nomadisme doit être favorisé dans la maison en fonction des saisons en évitant les aménagements et les mobiliers «en dur» (podiums, banquettes et tables maçonnées). Les escaliers tournent sur eux même en s appuyant sur des maçonneries. Les constructions ne dépasseront pas le niveau R+1 autorisé. Dans la mesure du possible on élèvera les murs périphériques, autant pour garantir l intimité des terrasses que par respect pour le voisinage. Pas de piscines sur les toits ; un bassin d eau de petites dimensions et de faible profondeur pourra dans certains cas être proposé au niveau du jardin. 2
Au niveau des matériaux et des techniques : La construction traditionnelle demande beaucoup de soins et le respect de temps de séchage entre les différentes interventions. C est pourquoi les délais de travaux sont longs et peu précis. Le réemploi des matériaux est à la base de la construction traditionnelle à Marrakech. Dans ce principe, on récupérera au maximum les briques, les rondins, les linteaux, les châssis et les portes, pour les réutiliser au cours des travaux. Les rondins disponibles sur le marché local sont de qualité peu constante. Ils ne sont pas traités. On choisira de préférence des bois peu sensibles aux attaques des insectes. Les bois seront traités sur chantier avant pose, néanmoins aucune solution définitive ne semble exister et aucune garantie contre les attaques d insectes ne peux être donnée. Les murs, qu ils aient été construits en pierre, en briques ou en terre compactée (pisé), sont porteurs par nature. Ils ne seront pas remplacés par des poteaux de béton armé, mais prudemment restaurés ou renforcés. L étanchéité des toitures sera réalisée par compactage de chaux sur une dalle de terre stabilisée. Ce type d étanchéité nécessite un entretien annuel. Un lait de chaux doit être passé à la brosse sur toute la surface des terrasses chaque automne. La chaux vient ainsi colmater les fissures de l été. L usage du ciment sera évité le plus possible ; on lui préférera comme liant la chaux artisanale locale. C est cette chaux qui est à la base du très médiatisé «taddelakt». Cet enduit lisse et (relativement) étanche était utilisé pour la finition des sols, des hammams, des bassins, Dans la tradition, ce n est pas un matériau de décoration. Il faut savoir que les enduits de chaux se fissurent légèrement au séchage, puis de façon plus importante en suivant la vie de la maison, qu ils sont fragiles aux coups et aux griffures et que les réparations sont toujours visibles. C est cependant le matériau qui convient le mieux aux sols, aux plinthes et aux surfaces exposées à l eau dans l esprit du travail de Marrakech-Médina. Les murs seront enduits de plâtre. C est le plâtre qui fait la finition des murs du patio, aucune peinture ne résistant aux intempéries et au soleil de Marrakech. Dans les pièces, on préférera la peinture à la chaux aux peintures vinyliques et acryliques pour laisser respirer les murs. Les gros problèmes de salissures et de décollement d enduits des murs inférieurs des maisons de la médina proviennent des remontées capillaires des eaux usées perdues par les réseaux d assainissement défaillants. Si la rénovation du réseau d égoûtage des maisons rénovées peut solutionner les remontées de salpêtre dans les murs intérieurs, il n en est pas de même des murs mitoyens. Etant donné l épaisseur de ces murs, aucun traitement ne peut être efficace. 3
Le travail de Marrakech-Médina est d accompagner la réhabilitation des maisons qui lui sont confiées. cette mission est basée sur un rapport de confiance mutuelle. Dans cet esprit, le client, une fois les plans d aménagement approuvés, confie la réalisation aux équipes de MM et de TM, leur accordant une grande liberté de manœuvre pour les choix et décisions nécessités par l évolution du chantier. Marrakech-médina, forte de son expérience et de sa parfaite connaissance de l architecture traditionnelle assume pleinement la responsabilité esthétique de ses choix. Bien que tout soit mis en œuvre pour stabiliser les structures, le client est averti que la responsabilité décennale d usage dans les construction contemporaines n est pas applicable pour les travaux de réhabilitation en matériaux et techniques traditionnelles. En signant cet charte, les clients de Marrakech-Médina acceptent les principes énoncés. Améliorations et intégration d équipements dans le cadre d habitations anciennes patrimoniales ou de constructions traditionnelles accèssibilité, hauteur de linteaux, escaliers, etc.. protection contre les intempéries étanchéité traditionnelle ou moderne? remontées capillaires et salpêtres couvertures temporaires des patios, lanternons des douayas adaptation des techniques anciennes (taddelakt, sols et plinthes, zellijs, bejmats, ) Placement et remplacement des réseaux (eau, électricité, ) Évacuation des eaux usées les salles d eau; salles de bain, douches, cuisines, toilettes, l éclairage Le chauffage (cheminées) Nouveaux besoins, nouvelles techniques? 4
Escaliers traditionnels -nez de marches en bois -finition bejmats, taddelakt ou ciment lissé Couverture des patios 5
Verrières pyramidales carrées ou octogonales Techniques de coloration du taddelakt: - pigmentation dans la masse - coloration de surface dans l enduit frais 6
Finitions au taddelakt plinthes Calepinage de carreaux de ciment Cadre de bejmats, plinthes en taddelakt 7
Zellijs traditionnels et carreaux de ciment Polissage et séchage du taddelakt 8
Les finitions intérieures Installation des réseaux: Electricité et plomberie 9
Ballon d eau chaude Chauffage d un hammam Douche Eviers et lavabos en cuivre ou en porcelaine 10
Bain, douches et lavabos en taddelakt Réseaux d assainissement 11
Intégration de l électricité: interrupteurs Cheminées: - maçonnerie des âtres - conduits de fumées 12
Nouveaux besoins, nouvelles techniques? Hier sur les toits et dans la rue 13
La question du béton armé 14