Vœux aux autorités militaires et aux institutionnels 2015 21 janvier, salons du Gouverneur militaire de Paris, Invalides Discours du Commissaire général (2s) Antoine LAMON, Président directeur général d Unéo Messieurs les officiers généraux, mesdames, messieurs, chers amis, Avant de débuter cette cérémonie des vœux de la mutuelle, je tenais tout d abord à vous remercier de votre présence pour ce rendez-vous que je souhaite sous le signe du rassemblement et du partage. Vous nous faites le plaisir d être avec Unéo ce soir en dépit des difficultés occasionnées par le plan Vigipirate alerte attentat.
Remerciements - Aux représentants du Ministère - Aux représentants de l état-major des armées, des états-majors et de la direction générale de la gendarmerie nationale - Aux représentants des partenaires Défense et des associations du monde militaire - Aux anciens présidents d Unéo, et à ceux des mutuelles d accompagnement social - Aux représentants du mouvement mutualiste et des mutuelles - Aux représentants du secteur de l assurance mutuelle ou paritaire, - Au représentant de l autorité de contrôle, l ACPR - Aux acteurs qui participent de l amélioration de l offre aux adhérents Enfin, je ne saurais conclure cette longue liste, sans remercier le général Ract-Madoux, Gouverneur des Invalides, et notre hôte, qui compte tenu de l actualité n a pu être avec nous ce soir, le Général Charpentier, Gouverneur militaire de Paris, qui nous accueille ici, dans ses salons, au cœur de l hôtel des invalides. *** L hôtel des invalides, haut lieu de la mémoire nationale, classé monument historique, considéré comme un chef d œuvre du style classique, est aussi, bien sûr, un lieu dont la vocation d origine nous est chère. La logique, qui a présidé à la création des invalides par Louis XIV en 1670, reste d une grande actualité : - Il s agissait de satisfaire un besoin social : il n existait alors, pas de fondation pour les plus démunis - Il s agissait de répondre à une volonté politique : assurer la reconnaissance de l Etat à ceux qui s étaient battus à son service et éviter qu ils ne tombent dans la mendicité. - Et tout cela, en intégrant une dimension économique, reposant sur l emploi des pensionnaires selon leur niveau de handicap. Les plus valides assuraient des services de garde à la Bastille tandis que les autres animaient des ateliers de cordonnerie, de tapisserie ou d enluminure. L hôtel des invalides, incarne encore aujourd hui cette vocation sociale à travers l hébergement de nombreuses associations, mais surtout, et bien sûr, celui de l Institution Nationale des Invalides. La solennité du lieu se prête parfaitement à l hommage que je souhaite, au nom d Unéo, rendre à tous ceux qui nous ont quitté au cours de ces derniers mois : - Aux morts «médiatiques», si vous me permettez cette expression, de ces derniers jours, 17 personnes dont 3 policiers. - Mais aussi, aux morts plus lointains, morts sur les théâtres d opération, hors de nos frontières, et dont la vie n a pas moins de prix. Ils luttent, eux aussi, contre le terrorisme et défendent une certaine vision de la vie en société, la démocratie À travers ces morts, je veux aussi que nous ayons une pensée toute particulière pour ceux qui restent, les membres de leur famille qui, chez les militaires, sont partie prenante de leur engagement, aussi bien dans la vie quotidienne que lorsque l absence devient malheureusement définitive. Les événements tragiques de ces dernières semaines, payés au prix exorbitant de nombreuses vies humaines, ont déclenché une véritable prise de conscience. Les Français, pour la plupart d entre eux, se sont rappelés le rôle essentiel et l engagement ultime des militaires et des policiers : assurer, au péril de leur vie, la sécurité des citoyens. Les Français, pour la quasi totalité d entre eux, ont découvert la réalité de la guerre : une violence insupportable.
Une guerre d un genre nouveau a soudainement et brutalement fait irruption dans la vie des Français Les livres blancs successifs depuis la fin de la guerre froide, avaient définitivement renvoyé le danger loin de nos frontières. Cette situation, avait contribué à créer une certaine distance entre l armée et la Nation. Ainsi que me le rappelait, il y a encore quelques semaines, le Général Beckrich, secrétaire général du Conseil Supérieur de la Réserve Militaire, la relation des Français à l armée est très paradoxale : lorsque la conscription existait encore, l armée, qui était alors une réalité pour une grande partie des Français, était décriée. Aujourd hui, elle jouit d une bonne image alors même que les Français connaissent peu la réalité de son engagement. Il faut reconnaître que l extrême violence des derniers évènements a suscité une véritable mobilisation nationale, un réveil de la Nation : la guerre n est même plus à nos portes, elle a fait irruption, par ce qu elle a de plus barbare, sur le territoire national, en s attaquant à un des fondamentaux de la démocratie : la liberté d expression. Les images, qui n ont cessé de tourner en boucle au cours de ces derniers jours, ont mis une réalité sur la nature de l engagement de ceux qui assurent la sécurité des autres. Les militaires, partie prenante des forces de sécurité, sont certes garants de la sécurité de chaque citoyen. Mais ils sont également, et surtout, les garants de la souveraineté nationale. Comme le soulignait très récemment le chef d état-major des armées, le Général De Villiers, je cite «il y un lien entre ce que nous faisons à l extérieur, ce qu on appelle la Défense de l avant, et la sécurité sur notre territoire, c est la lutte contre le terrorisme. Jamais le lien entre sécurité intérieure et extérieure n a été aussi important». C est pourquoi, bien entendu, les militaires, eux aussi, ont besoin et le droit d être protégés. C est un enjeu qui ne saurait se réduire à la simple protection d une catégorie professionnelle. Protéger les militaires et plus largement ceux qui ont fait le choix de protéger les autres c est, d une certaine manière, contribuer à protéger la nation toute entière. La protection sociale, à sa façon, occupe une place toute particulière, pour ceux qui ont fait le choix de protéger les autres. La protection sociale participe de la cohésion du groupe. Primordiale pour les militaires, elle constitue, notamment au combat, une question de survie. Au-delà de la communauté militaire, il faut rappeler que la protection sociale participe de la cohésion d un groupe quel qu il soit. En effet, elle organise les liens de solidarité, entre ses membres pour faire face, ensemble, aux aléas de la vie. Cette solidarité n est toutefois, pas une fin en soi. Elle reste seulement un moyen pour protéger efficacement, et donc durablement le groupe. La question fondamentale, que pose alors la protection sociale, la question à laquelle, chaque groupe, doit répondre est celle de savoir ce qui l unit, de savoir ce qui le rend plus fort, de savoir dans quelle mesure les intérêts de chacun sont mieux préservés grâce à la force du collectif. Pour une population marquée par l esprit de corps, la protection sociale matérialise, bien sûr, un lien de cohésion ; entre les militaires, entre les familles de militaires, entre ceux qui partent et ceux qui restent, entre les générations. Mais, elle représente aussi :
- Un devoir, celui du droit à réparation et plus largement du droit à être protégé tout au long de la vie. Un devoir, d autant plus prégnant dans un contexte marqué, à la fois, par une relation plus courte avec l institution, du fait de la contractualisation, et aussi, par le développement de blessures invisibles, le stress post traumatique, qui peuvent apparaitre bien après avoir quitté l armée. Elle représente aussi, - Un avantage, en contrepartie d un statut particulier, qui inclut l esprit de sacrifice qui va jusqu au sacrifice suprême. C est la raison pour laquelle, la protection sociale est, historiquement, un élément constitutif de la condition militaire. Vous l aurez compris, la protection sociale des militaires représente un véritable enjeu politique qui dépasse le seul périmètre des acteurs qui y participent. La mutuelle Unéo n en demeure pas moins un des acteurs majeurs, avec une mission singulière. Mission, que le contexte économique et social actuel, rend de plus en plus complexe à accomplir. Parce qu Unéo est à la fois militaire et mutualiste, son projet est avant tout politique. Sa mission ne saurait donc se limiter à une simple offre assurantielle, aussi attractive soit elle. Cette offre n est que la traduction de ce projet politique. C est ce projet, qui rend, plus que l offre, la mutuelle spécifique et utile : projet, porté par notre unique raison d être : protéger et servir la communauté militaire. C est à la fois un projet mutualiste, celui d assurer l accès aux soins de tous ses membres, y compris les plus fragiles à une protection sociale de qualité. Mais c est aussi, un projet au profit de la seule communauté militaire : celui de préserver un dispositif de protection sociale spécifique pour une population particulière. Evident dans son énoncé, le projet d Unéo, s avère de plus en plus difficile à mettre en œuvre. L environnement économique dans lequel nous évoluons n invite pas, pour le moins, à un optimisme béat : - La population que nous protégeons traditionnellement diminue sous le double impact des lois de programmation militaire et, de façon plus circonstanciée, de la loi de sécurisation de l emploi appelée communément ANI (accord national interprofessionnel). La base de mutualisation se rétrécissant, les coûts augmentent mécaniquement. - Au-delà de la question des effectifs, les contraintes financières qui pèsent sur le ministère de la Défense n ont jamais été aussi fortes, comme en atteste la poursuite de la réduction drastique des budgets, auquel n échappe pas celui de l action sociale. Ainsi, en 2014, le ministère de la Défense n a pas été en mesure, dans le cadre du référencement, de verser le solde relatif à la participation de l Etat pour la protection sociale de ses agents. Sur les 13 millions prévus, 4 millions n ont pas été versés. Comme nous n avons pas voulu pénaliser nos adhérents sur le montant de leur cotisation, cela a pesé directement sur le résultat net d Unéo. - De plus, le pouvoir d achat des Français, comme celui des militaires, baisse inexorablement et la question de la solvabilité de nos adhérents constitue une contrainte forte, qu il est impossible d ignorer. Il est vrai, que la taxation régulière des complémentaires santé ne facilite pas les choses. En 2014, une nouvelle taxe, qui ne dit pas son nom, la contribution OCAM, a vu le jour et renchéri le montant des cotisations. Pour mémoire, le niveau des taxes, qui s élève à 13,7%, est supérieur à celui de nos frais de gestion.
- Enfin, le renforcement des contraintes règlementaires telles que l ANI (encore!) ou la refonte des contrats responsables limitent notre capacité d innovation, compliquent la lisibilité des offres, et surtout, contribuent à l augmentation générale de leur coût sans valeur ajoutée réelle sur le niveau de protection. Au delà, le contexte social n est guère plus engageant. - La population militaire, sous le double impact de la suspension de la conscription et des évolutions sociétales, change. Une approche reposant essentiellement sur des critères socio- démographiques, de grade ou d armée d appartenance, n est plus totalement adaptée à la réalité. L étude sociologique qu Unéo mène actuellement met en avant une réalité plus subtile : la vision que nos adhérents portent sur la société, sur le monde militaire ou encore sur la protection sociale est plus diverse et moins rationnelle. - De même, la question de la solidarité ne va pas toujours de soi. Le terme de solidarité n a jamais été autant galvaudé qu aujourd hui. Pour un grand nombre de Français, la solidarité renvoie trop souvent à une vision réductrice, celle de l assistanat. Elle est vécue comme subie plutôt que choisie. La communauté militaire, incarnation même d un collectif fort, n échappe pas à ces tendances de fond. Les plus jeunes de nos militaires à l instar de leurs semblables, n acceptent plus de «payer» pour leurs aînés. A l inverse, les plus âgés, ont tendance à considérer la solidarité intergénérationnelle, plutôt en leur faveur, comme un dû. Ils perçoivent tout changement comme une remise en question de leurs acquis, que les jeunes estiment être des privilèges. Toutes choses que je rappelais dans l éditorial de notre magazine de début d année. Eu égard à ce contexte, le projet que nous portons pourrait être considéré comme une forme d utopie. Mais comment renoncer à donner le meilleur à ceux qui donnent le maximum et qui sont prêts au sacrifice de leur vie? C est tout l objet du plan stratégique de la mutuelle dont le titre est évocateur de notre volonté commune, élus comme salariés, «2015/2018 : Unéo, une force au service d une communauté». Unéo se met en ordre de bataille pour réaliser son ambition : «Unis, pour protéger ceux qui ont fait le choix de protéger les autres». Ce plan, dit notre volonté d être une force d attraction, c'est-à-dire notre capacité à sécuriser et élargir notre population de référence Il dit notre volonté d être une force de conviction, c'est-à-dire, notre capacité à valoriser nos différences et démontrer la force de notre modèle. Il dit notre volonté d être une force en mouvement, c est à dire notre capacité à nous doter d une organisation souple, robuste et réactive. Il dit enfin notre volonté d être une force d innovation, c est à dire notre capacité à anticiper et agir au profit direct de notre communauté. Tout cela, en s appuyant sur des activités clefs que nous devons parfaitement maîtriser : la relation aux adhérents, la mise en marché de l offre, la gestion des risques, les partenariats, la marque, l animation de la vie mutualiste, la culture d entreprise et le développement des compétences. Bien entendu, Unéo, ne saurait réaliser cette ambition, et par la même mettre en œuvre son plan stratégique, sans respecter : - des valeurs, au cœur des racines militaires : l entraide, l excellence, l utilité - et des missions, par essence mutualistes : protéger, prévenir, accompagner
Ce plan doit permettre à Unéo, d être à la hauteur des rendez-vous majeurs qui l attendent dans un avenir proche. Il s agira, en effet, de fédérer les acteurs qui protègent ceux qui ont fait le choix de protéger les autres, en créant un véritable continuum Défense nationale/sécurité intérieure, qui dépasse stricto sensu la communauté militaire. C est dans ce cadre que s inscrit la volonté partagée d un rapprochement avec la MGP. Il s agira aussi, de constituer une alliance forte avec un acteur assurantiel majeur. Toutefois, cette alliance ne saurait se réduire à des considérations purement financières. Ce partenariat stratégique, structurant, doit permettre de préserver une modèle de protection sociale spécifique, qui participe à la fois de la cohésion de notre communauté et de son efficacité opérationnelle. Quel que soit le partenariat futur, tous les éléments porteurs de notre identité et à travers eux des besoins de protection de la communauté militaire devront être sanctuarisés. *** En conclusion, j espère avoir réussi à vous démontrer que la protection sociale des militaires, et plus généralement celle de ceux qui ont fait le choix de protéger les autres, représente un enjeu national qui ne saurait se réduire à une équation purement financière. Une équation, qui soumise aux seules lois du marché, favorise une logique court termiste, totalement incompatible avec le projet d Unéo, qui se veut intégrateur car rassembleur, performant car durable, et juste car accessible financièrement. La communauté militaire doit pouvoir continuer à bénéficier d une protection sociale spécifique, pour éviter sa banalisation. Une banalisation, qui nous parait tout simplement inconcevable eu égard à la nature de son engagement. C est tout le sens de celui d Unéo au service de cette communauté. Plus que jamais, la communauté militaire, elle aussi, doit se réinterroger sur ce qui l unit, ce qui la rend plus forte et lui permet de maintenir l esprit de corps qui traditionnellement la cimente. C est en effet la réponse à cette question, qui confortera le caractère spécifique et utile d une protection sociale à part et par la même constituera un rempart à sa banalisation. Tout cela mérite et exige un acteur unique et référent. Même si c est difficile, même si cela peut être considéré, je le répète, comme une utopie, mais une utopie maitrisée, nous devons agir comme s il était impossible d échouer. Et la citation de William Arthur Ward, écrivain américain vétéran de la guerre du Pacifique, me paraît une synthèse de ce qui nous anime. «C est impossible dit la fierté, c est risqué dit l expérience, c est sans issue dit la raison, essayons murmure le cœur». *** Rassurez-vous, je n ai pas oublié l essentiel : je suis heureux de vous présenter les vœux d Unéo, des vœux de bonheur et de bonne santé, cela va de soi, à vous et tous ceux qui vous sont chers.