Création d un leadership ouvert aux deux sexes dans le secteur des mines et des ressources CENTRE FOR WOMEN IN POLITICS AND PUBLIC LEADERSHIP



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Transcription:

Création d un leadership ouvert aux deux sexes dans le secteur des mines et des ressources CENTRE FOR WOMEN IN POLITICS AND PUBLIC LEADERSHIP Novembre 2012

UN MOT DE LA DIRECTRICE ADMINISTRATIVE C est avec plaisir que nous vous présentons cet ouvrage de référence sur la création d un leadership ouvert aux deux sexes dans le secteur des mines et des ressources. Notre centre a comme mission de faire progresser les connaissances sur le leadership féminin au Canada en vue de faciliter les efforts à mettre de l avant pour accroître la participation des femmes à tous les paliers décisionnels. Je remercie sincèrement l organisme Women in Mining Canada et Xstrata Nickel d avoir accordé leur soutien à la préparation de cet ouvrage. L industrie minière est importante au Canada, et pourtant les femmes y sont encore largement sous-représentées à tous les échelons. Le recrutement, le maintien en poste et la promotion des femmes posent de véritables défis. L industrie minière a maintenant l occasion de faire preuve de leadership et de capitaliser sur le potentiel que représentent les femmes, en nommant davantage de femmes aux conseils d administration des sociétés minières et en leur confiant des postes de direction et même des postes de niveau d entrée. Ce rapport révèle à la fois les défis que posent la situation et les voies à emprunter pour aller de l avant. Nous avons été très heureux de constater l intérêt que le rapport a suscité non seulement auprès des hauts dirigeants de l industrie, mais aussi dans d autres secteurs, notamment l administration publique, les milieux syndicaux et universitaires, le secteur non lucratif et les organisations autochtones. Ce rapport a été rendu possible grâce à la volonté de tous les secteurs de contribuer à la promotion du leadership féminin. Les partenariats sont importants pour atteindre l objectif de leadership ouvert aux deux sexes. J encourage tous les acteurs de notre société à collaborer pour atteindre cet objectif important. Clare Beckton Directrice administrative Centre for Women in Politics and Public Leadership

UN MOT DU PRÉSIDENT ET CHEF DE LA DIRECTION DE XSTRATA NICKEL, IAN PEARCE À Xstrata, nous sommes déterminés à faire une véritable différence en appuyant le virage qui s opère dans l industrie minière. La promotion d un milieu de travail diversifié et ouvert aux deux sexes nous enthousiasme. L ouvrage de référence que constitue le rapport Création d un leadership ouvert aux deux sexes dans le secteur des mines et des ressources nous est présenté à un moment charnière dans l histoire de notre industrie. Le succès à long terme de l industrie minière repose sur sa capacité à attirer, à mettre à contribution et à fidéliser une main-d œuvre efficace et engagée. Notre industrie est confrontée à une pénurie de main-d œuvre qui, si nous ne nous mettons pas tout en œuvre pour y remédier, risque de nuire à notre compétitivité et à notre durabilité. Or, en dépit de cette pénurie imminente, les femmes restent largement sous-représentées dans notre industrie. Ce rapport nous met sur une multitude de pistes pour créer un cadre de travail qui favorise et valorise une main-d œuvre plus diversifiée entre les sexes. La logique d affaires est implacable : nous devons attirer et retenir les meilleurs talents pour contribuer à la durabilité de notre secteur, en nous constituant une main-d œuvre compétitive à l échelle mondiale et menée par des dirigeants qui ont le courage de reconnaître les avantages d un leadership diversifié et ouvert aux deux sexes. De la façon dont je vois les choses, nous devons saisir l occasion de faire de l inclusion des femmes une partie intégrante des principes mis de l avant par notre industrie. J invite nos plus hauts dirigeants à faire preuve d audace et à concrétiser les idées et les recommandations que contient le rapport. Le temps est venu d agir et d instaurer des changements qui se font attendre depuis trop longtemps. Des rapports de cette qualité ne se rédigent pas par magie, et je m en voudrais de ne pas souligner le travail du Centre for Women in Politics and Public Leadership de l Université Carleton, qui a été le fer de lance de cette initiative. Je tiens également à remercier toute mon équipe de spécialistes à Xstrata Nickel pour l appui et l aide que chacun a apportés à ce projet depuis ses débuts. Enfin, j exprime ma sincère gratitude à l égard des personnes, associations et partenaires de l industrie qui ont participé aux entrevues, groupes de discussion et conférences, et qui n ont pas hésité à partager en toute franchise leurs expériences et leurs recommandations. Chacun de vous a agi comme un catalyseur de changement et, au nom de l ensemble de l industrie minière, nous vous remercions.

À PROPOS DU CENTRE FOR WOMEN IN POLITICS AND PUBLIC LEADERSHIP Le Centre for Women in Politics and Public Leadership de l Université Carleton fait la promotion du leadership public des femmes en offrant des possibilités de formation, de perfectionnement et de recherche de pointe. Le centre collabore avec divers partenaires en vue d intégrer, de renforcer et de faire progresser la réflexion critique et les travaux en cours visant à accroître l influence et le leadership des femmes dans la vie publique, au Canada et à l échelle internationale. À PROPOS DES AUTEURS Umut Riza Ozkan est titulaire d un doctorat de la School of Public Policy and Administration de l Université Carleton et chercheur au Centre for Women in Politics and Public Leadership. Clare Beckton est la directrice administrative du Centre for Women in Politics and Public Leadership. Après avoir enseigné le droit, elle a occupé des postes de direction dans l administration publique fédérale, notamment à titre de sous-procureure générale adjointe aux Affaires autochtones et de coordonnatrice et chef d organisme de Condition féminine Canada. Membre du Women s Leadership Board de l Université Harvard et du comité directeur du Conseil canadien pour la diversité administrative, Mme Beckton est en outre vice-présidente du conseil d administration, présidente du comité de gouvernance et membre des comités de direction de l Hôpital Queensway Carleton. Auteure de nombreux articles sur la Charte canadienne des droits et des libertés, elle possède une expérience considérable des questions liées au leadership organisationnel, à la gouvernance, à la diversité en milieu de travail, à l égalité entre les sexes, aux droits de la personne et aux enjeux relatifs aux Autochtones. Lauréate en 2008 du prix décerné par le Réseau des femmes exécutives aux 100 femmes les plus influentes du Canada, elle a également reçu le prix Woman of the Year de la Federated Press, en reconnaissance de ses réalisations exceptionnelles et de son leadership, ainsi qu une médaille commémorative du 125e anniversaire de la Confédération du Canada. REMERCIEMENTS Nous tenons à remercier la société Xstrata Nickel, qui a rendu possibles la publication de ce rapport et l atelier tenu dans le cadre des Critical Conversations, non seulement pour son soutien financier, mais également pour sa collaboration à la réussite de l atelier, ainsi que pour son rôle de chef de file dans le développement d un leadership ouvert aux deux sexes, à Xstrata et dans l ensemble de l industrie. Nous souhaitons également remercier tous les membres des sociétés Xstrata Nickel, Goldcorp et IAMGold qui ont pris le temps de participer à une entrevue ou à un groupe de discussion. Leurs opinions ont considérablement enrichi notre recherche. Merci à l organisme Women in Mining Canada d avoir pris part à l atelier et de nous avoir permis d utiliser les résultats de ses recherches. Ses efforts pour attirer les femmes dans le secteur minier répondent à la fois aux aspirations des femmes et à celles de l industrie. Merci également à tous les leaders d opinion qui ont pris le temps de venir à l Université Carleton et de partager avec nous leurs connaissances, leur expérience et leurs idées dans le cadre de l atelier. Ils ont apporté une contribution inestimable à ce rapport.

TABLE DES MATIÈRES 5 Résumé 11 I. Introduction 13 II. Situation et expérience des femmes dans l industrie minière canadienne 25 III. Revue de la littérature internationale sur les femmes et les mines : stratégies 27 IV. Résultats de l atelier 31 V. Recommandations 33 VI. Conclusion La voie à suivre 34 Annex A - Questions débattues dans le cadre des entretiens et de l atelier 36 Annex B - Pratiques exemplaires à l échelle internationale 48 Bibliographie TABLEAUX ET FIGURES 14 Tableau 1 : Prévisions sur les besoins en matière d embauche dans l industrie minière canadienne d ici 2013, 2016 et 2021 16 Tableau 2 : Pourcentage de femmes parmi les cadres supérieurs et les employés de différents secteurs d activité au Canada en 2011 15 Figure 1 : Proportion de femmes dans certains emplois de l industrie minière au Canada en 2006 17 Figure 2 : Domaines d emploi de la main-d œuvre autochtone par sexe au Canada en 2006

5 RÉSUMÉ Le Canada joue un rôle de premier plan dans l industrie minière mondiale, grâce à la production de plus de 60 types de minéraux et de métaux. L industrie minière du Canada apporte une contribution importante à l économie canadienne, sa valeur ayant représenté 4,5 % du produit intérieur brut et 23 % des exportations du pays en 2011. L industrie sera toutefois bientôt confrontée à des problèmes importants, dont de graves pénuries de main-d œuvre dues au vieillissement de ses effectifs, qui exigeront le recrutement intensif de nouveaux talents. Selon le rapport Prévisions sur l emploi et l embauche dans l industrie minière canadienne (2011), l industrie minière aura besoin de 45 760 nouveaux travailleurs d ici 2016 et devra en recruter 75 280 d ici 2021. En dépit de la pénurie de main-d œuvre imminente, les femmes restent sousreprésentées dans toutes les catégories d emploi de l industrie, des postes au niveau d entrée aux postes de leadership. En fait, la proportion de femmes qui a été d environ 15 % au cours des 14 dernières années est très faible comparativement à d autres secteurs clés de l économie : mines (18,6 %), services (71,86 %), administrations publiques (47,70 %), fabrication (21,70 %), énergie (24,56 %), finances (61,53 %), tourisme et transport (45,21 %). L emploi des femmes dans l industrie minière a légèrement augmenté, pour passer d environ 14 % en 1988 à 18,6 % en 2011. En 2007, 24 % des diplômées universitaires avaient étudié dans un domaine lié à l ingénierie ou à la technologie et 9 % des apprenties ayant obtenu une qualification professionnelle avaient suivi une formation dans un métier spécialisé à prédominance masculine. On pourrait donc s attendre à retrouver la même proportion dans les postes correspondants de l industrie minière. Or, en 2006, les femmes ne comptaient que pour 5 % des travailleurs exerçant ces métiers et professions dans l industrie, ce qui semblerait indiquer que d autres obstacles, en plus de la pénurie de main-d œuvre féminine, limitent la participation des femmes à l industrie minière.

6 Ces métiers et professions techniques ont une importance particulière pour l avenir de l industrie minière au Canada, car ils représenteront, selon les estimations du rapport Prévisions sur l emploi et l embauche dans l industrie minière canadienne (2011), environ 73 % de l ensemble des besoins d embauche de l industrie minière d ici 2016 et 2021, contre seulement 7,3 % en ce qui concerne les «professions libérales et du domaine des sciences». D autres facteurs, au-delà du niveau général de participation des femmes à l industrie, doivent être pris en considération pour comprendre la sousreprésentation des femmes aux postes de cadres supérieurs et de dirigeants. La revue de la littérature internationale sur les femmes dans le secteur minier a fait ressortir les obstacles que les femmes doivent surmonter, en particulier pour accéder à des postes de leadership. Des entrevues et des groupes de discussions avec des hommes et des femmes de l industrie ont confirmé l existence de ces obstacles et permis de mieux comprendre le travail à faire pour que la situation change. Les résultats des entretiens et de la revue de la littérature relative à l industrie minière et à d autres secteurs montrent clairement la nécessité d adopter une approche globale qui s attaque simultanément aux multiples facteurs responsables de la sous-représentation des femmes aux postes de leadership. Cette approche conteste la validité des arguments basés sur l offre et la demande selon lesquels la sous-représentation des femmes ne serait attribuable qu à un bassin de talents insuffisant. En fait, la culture traditionnellement masculine qui imprègne les valeurs professionnelles, les styles de travail et les modes de communication, ainsi que l absence de soutien à la gestion des responsabilités familiales, représentent des obstacles importants à l accession des femmes à des postes de direction.

7 CONSTATATIONS 1. Les femmes sont sous-représentées aux postes de haute direction et au sein des conseils d administration. L absence de femmes appartenant à un groupe minoritaire à ces échelons est en outre particulièrement remarquable. 2. Il y a des différences importantes entre les cadres masculins et féminins quant au style de leadership. Les cadres féminins utilisent plus souvent une approche axée sur la collaboration, alors que les cadres masculins ont davantage recours à l autorité ou à la confrontation. 3. La culture en milieu de travail exerce une pression considérable sur les femmes, qui ont le sentiment de devoir faire leurs preuves en travaillant plus fort que les hommes. 4. Comme la plupart des femmes qui travaillent pour des sociétés minières y assument des fonctions de soutien ou de service (p. ex. dans les domaines des ressources humaines, des communications, de la comptabilité ou des finances), elles ont souvent du mal à accéder aux postes de cadres supérieurs, qu on a plutôt tendance à offrir aux employés des secteurs opérationnels. 5. La nouvelle génération est plus à l aise et coopère mieux avec les travailleuses et les cadres féminins, envers qui elle manifeste davantage de respect, que la génération qui la précède. 6. En dépit de l évolution de la notion de leadership, dont la définition est désormais axée sur les valeurs et la collaboration plutôt que sur les compétences techniques et opérationnelles, les personnes que nous avons rencontrées en entrevue croient que le style de leadership traditionnel basé sur des rapports d autorité persiste au sein de nombreux services opérationnels de l industrie minière, tout comme on continue à attendre des cadres supérieurs qu ils travaillent de longues heures et se déplacent fréquemment. 7. Des progrès ont été accomplis dans la lutte contre les formes de discrimination les plus flagrantes (comme le harcèlement sexuel en milieu de travail), mais la culture masculine dominante continue de se manifester sous la forme de préjugés implicites, cachés et plus subtils. Certains répondants ont par exemple déclaré qu il y a encore des mineurs qui refusent de travailler avec des femmes parce qu ils croient que ça porte malheur. Les femmes sont en outre exclues des réseaux informels susceptibles de contribuer à leur avancement professionnel. 8. Les femmes subissent souvent une pression culturelle qui leur impose des responsabilités à la fois familiales et professionnelles. Bon nombre des femmes interrogées ont l impression que certains cadres masculins sont moins tolérants à l égard des responsabilités familiales assumées par les femmes. Les hommes ne sont pas considérés comme ayant le même degré de responsabilité envers leur famille et hésitent à prendre des congés pour obligations familiales de crainte de nuire à leur carrière. 9. Le manque de politiques officielles visant à faciliter la conciliation des responsabilités professionnelles et familiales contribue au maintien d une culture de travail dominée par les hommes. Les mesures favorables à l équilibre entre le travail et la famille (p. ex. modalités de travail flexibles, lieux de travail variables) sont souvent laissées à la discrétion du supérieur masculin ou féminin de l employé. 10. Un autre problème lié à la conciliation travail-famille est celui de la «mobilité», dans la mesure où l on attend des femmes qui occupent des postes de cadres supérieurs qu elles se déplacent fréquemment pour leur travail,

8 indépendamment de leurs responsabilités familiales. 11. Les sociétés minières n ont pas suffisamment de politiques et de programmes officiels de mentorat et de réseautage visant à faciliter l avancement professionnel des femmes au sein de leur organisation. Des programmes comme Creating Choices et ceux du Réseau des femmes exécutives ont été mentionnés à titre d outils de promotion du mentorat et du réseautage. Cependant, ces programmes ne sont pas mis en œuvre sur tous les sites miniers, leurs processus de sélection ne sont pas transparents et il n est pas toujours facile d en bénéficier. PRATIQUES EXEMPLAIRES DANS L INDUSTRIE La littérature internationale sur les femmes et l industrie minière fait état de six enjeux susceptibles de favoriser le recrutement, le maintien en poste et l avancement professionnel des femmes dans l industrie minière : attirer les étudiantes dans l industrie, éliminer les principales barrières à l emploi, créer une culture de travail conviviale pour les femmes, permettre aux travailleuses de concilier leurs responsabilités professionnelles et familiales, promouvoir l équité salariale entre les sexes et faciliter la progression de carrière des femmes dans l industrie minière. Le tableau ci-dessous présente la liste des stratégies et des meilleures pratiques mises en œuvre par l industrie et les sociétés minières pour s attaquer aux problèmes liés à chacun de ces enjeux. Efforts d attraction des étudiantes dans l industrie Organiser des camps d été éducatifs Offrir des programmes pédagogiques sur les minéraux aux élèves des niveaux primaire et secondaire Offrir des stages, des placements professionnels et des bourses d études Former et renseigner les conseillers en orientation professionnelle des établissements d enseignement secondaire et postsecondaire sur les perspectives d emploi dans l industrie minière Élimination des barrières à l emploi Établir des pratiques qui facilitent la transférabilité de l expérience et des compétences vers l industrie minière Promouvoir les initiatives qui permettent aux femmes d acquérir de l expérience dans des emplois non traditionnels Culture de travail inclusive Promouvoir des modèles de femmes occupant des postes de niveau supérieur dans les sociétés minières Créer des programmes de formation sur la diversité à l intention des cadres supérieurs Mettre en œuvre des programmes visant à mieux faire connaître les communautés autochtones vivant à proximité des mines Concevoir des programmes visant à donner de l assurance aux femmes et à leur inculquer des valeurs de leadership Faire une analyse comparative du salaire des travailleurs, hommes et femmes, dans les entreprises

9 Assurer le caractère inclusif des activités sociales parrainées par les entreprises Établir des structures de rétroaction (syndicats de femmes, groupes de représentantes des femmes, agents des griefs, pairs aidants, etc.) afin que les femmes puissent se faire entendre dans les entreprises Promouvoir une image positive de l industrie grâce à des projets de développement communautaire Établir des pratiques de travail souples à l intention des femmes autochtones pour les aider à concilier leurs responsabilités communautaires et professionnelles Mettre sur pied des programmes de sensibilisation aux valeurs culturelles des peuples autochtones et des nouveaux arrivants à l intention des cadres supérieurs Conciliation travail-famille Offrir des horaires de travail variables Offrir le partage de poste Réduire le nombre de travailleurs pendant les quarts de travail réguliers de douze heures Offrir des modalités de travail flexibles (postes de consultants, travail à temps partiel ou emplois occasionnels) Adopter ou améliorer les programmes de congés parentaux financés par l employeur ou par l État Créer des services de garde financés par l employeur ou par l État Donner aux femmes la possibilité de déduire de l impôt leurs frais de garde d enfants Offrir des incitatifs fiscaux aux employeurs pour les encourager à offrir des services de garde Équité salariale entre les sexes Créer un portail Internet afin de faire connaître aux femmes les salaires moyens correspondant à leur poste Favoriser la collecte de données ventilées selon le sexe dans les sondages sur les salaires versés par les entreprises Publier des données sur les salaires des métiers ou professions selon le sexe Progression de carrière dans l industrie minière Instaurer un programme officiel de mentorat pour les travailleuses Faciliter l accès des employées aux activités de réseautage des femmes dans l industrie minière pour leur permettre de rencontrer leurs mentors dans un cadre informel Accroître la participation des femmes aux programmes de stages d apprentissage et de leadership Établir des objectifs et des mesures en vue d augmenter la représentation des femmes aux postes de direction (Ces pratiques exemplaires sont décrites en détail à l Annexe B.)

10 RECOMMANDATIONS 1. Le changement doit être mené par le secteur minier. Les chefs de la direction peuvent se concerter pour élaborer des stratégies organisationnelles, partager l information, mettre sur pied des initiatives de grande envergure et évaluer la réussite de ces initiatives. 2. Les conseils d administration des sociétés minières doivent recruter des femmes qualifiées, puisque l augmentation du nombre de femmes aux conseils d administration et aux postes de haute direction a une incidence positive sur l attraction des femmes dans l industrie. L adoption de mesures proactives, comme l utilisation de la liste de candidats qualifiés de l initiative Diversité 50 du Conseil canadien pour la diversité administrative, devrait permettre d augmenter rapidement la participation des femmes aux conseils d administration. 3. Les programmes destinés aux femmes ne doivent pas simplement faire partie d une initiative générale de promotion de la diversité; ils doivent être spécialement conçus à l intention des femmes. 4. L industrie minière devrait envisager la possibilité de tirer parti de la transférabilité des compétences entre les secteurs pour attirer plus rapidement des femmes à des postes de leadership dans les cas où elle ne dispose pas d un bassin de talents suffisant. 5. Les sociétés minières doivent élaborer et mettre en œuvre des stratégies de changement culturel à volets multiples, ainsi que des initiatives spéciales intégrées à leurs priorités opérationnelles. Une stratégie à plusieurs volets pourrait inclure une analyse de la culture de l organisation et la vérification de la prise en compte des questions d égalité entre hommes et femmes, l examen des pratiques de recrutement et de promotion, l établissement d objectifs et l obligation pour les dirigeants de rendre compte des progrès réalisés. 6. Les sociétés minières devraient créer des études de cas de pratiques exemplaires qu elles partageraient avec l ensemble de l industrie. 7. Les sociétés minières devraient élaborer et appliquer des politiques et des pratiques visant à aider les employés, tant masculins que féminins, à assumer leurs responsabilités familiales. Les hommes et les femmes doivent disposer du temps nécessaire pour s acquitter de leurs obligations familiales sans devoir pour autant renoncer à mener des carrières enrichissantes et à obtenir de l avancement. 8. L industrie et les sociétés minières devraient se doter d outils de mesure destinés à évaluer les progrès et exiger des dirigeants qu ils rendent compte des résultats obtenus. 9. L industrie minière devrait établir des partenariats avec les administrations publiques, les écoles, le milieu universitaire et le secteur non lucratif en vue d attirer les femmes et de leur donner accès aux métiers. 10. L industrie et les sociétés minières devraient mettre sur pied des projets spéciaux et des programmes de formation destinés à attirer les femmes des communautés autochtones situées à proximité des sites miniers et déployer des efforts particuliers en vue de recruter une main-d œuvre féminine diversifiée. 11. L industrie minière doit mieux faire connaître les perspectives d emploi qu elle offre aux femmes dans de nombreux domaines d activité professionnelle (allant des soins infirmiers, de l administration, des finances et des ressources humaines au génie et à la géologie).

11 I INTRODUCTION L industrie canadienne des mines et des ressources sera bientôt confrontée à des problèmes importants en ce qui concerne le maintien en poste de ses effectifs. L industrie fera face à de graves pénuries de main-d œuvre au cours de la prochaine décennie, en raison du vieillissement des travailleurs, du départ à la retraite de la génération du baby-boom et de l intensification de la concurrence dans le recrutement de talents. Elle doit donc s attaquer sans tarder à la recherche de nouveaux talents 1. L un des moyens de relever ce défi consiste à améliorer la représentation et l avancement professionnel des femmes dans l industrie. L élimination des obstacles à l emploi et à l avancement des femmes dans l industrie contribuerait en outre à améliorer de façon significative la compétitivité et la productivité du secteur minier. Des études ont montré que les entreprises qui comptent une proportion plus élevée de femmes à des postes de haute direction sont des chefs de file en ce qui a trait à la performance financière (du point de vue de la productivité, des revenus et de la rentabilité) 2. En dépit de cette réalité, les femmes sont largement sous-représentées dans l ensemble de la maind œuvre et aux postes de direction de l industrie. Le présent rapport vise à analyser les barrières qui limitent le recrutement, le maintien en poste et l avancement des femmes dans l industrie minière et à formuler des recommandations pour changer la situation. Le rapport présente une vue d ensemble quantitative de la situation des femmes dans l industrie, des données qualitatives sur l expérience des femmes qui travaillent actuellement dans des sociétés minières, ainsi que le point de vue de grands leaders d opinion des secteurs minier, gouvernemental et non lucratif. Le rapport examine en outre les pratiques exemplaires mises en œuvre à l échelle internationale et susceptible de contribuer à promouvoir le leadership ouvert aux deux sexes dans l industrie minière canadienne. Méthodologie Le rapport est basé sur l analyse de l expérience vécue par les travailleuses du secteur minier, de l état actuel des méthodes de recrutement, de maintien en poste et de promotion, ainsi que des pratiques exemplaires de l industrie. L information analysée provient des quatre sources suivantes : le dépouillement d ouvrages spécialisés sur le secteur minier canadien en vue de résumer la situation de la main-d œuvre féminine dans l industrie; vingt-quatre entrevues individuelles et huit séances de discussion en groupe avec des femmes et des hommes travaillant dans différents bureaux et sites des sociétés minières Xstrata, IAMGold et Goldcorp; un atelier qui a réuni des hauts représentants de sociétés minières, de l État (dont le ministre fédéral du Travail), d associations minières, d organisations autochtones, de syndicats, du milieu universitaire et d organisations non gouvernementales; une revue de la littérature internationale sur les pratiques exemplaires susceptibles de promouvoir le recrutement, le maintien en poste et l avancement des femmes dans le secteur des mines et des ressources.

12 Le dépouillement d ouvrages spécialisés a consisté à consulter des rapports sur les femmes et l industrie minière au Canada afin de rassembler et d analyser les données quantitatives pertinentes sur les femmes qui travaillent dans l industrie. Cette recherche nous a permis de cerner les principaux enjeux à prendre en considération pour promouvoir le leadership féminin dans le secteur des mines et des ressources. Les entrevues individuelles et les groupes de discussion (constitués de 8 à 10 personnes) visaient à déterminer comment les hommes et les femmes perçoivent la représentation des femmes aux postes de niveau supérieur, les styles de leadership masculin et féminin, la façon dont le style de leadership a évolué avec le temps dans le secteur minier, les parcours qui conduisent les femmes à des postes de direction au sein des organisations et les politiques qui visent à augmenter le nombre de femmes occupant des postes de niveau supérieur. Les participants ont en outre suggéré des solutions possibles en vue d accroître la présence des femmes aux postes de direction. L atelier, tenu dans le cadre des Critical Conversations de l Université Carleton, a permis de recueillir les idées et les points de vue de leaders d opinion de différents secteurs concernant les difficultés, les pratiques exemplaires et les possibilités de changement associées au recrutement, au maintien en poste et à l avancement des femmes dans l industrie. Les discussions ont porté sur les six questions présentées à l Annexe A. La revue de la littérature internationale a permis de repérer les principaux obstacles auxquels sont confrontées les femmes du secteur des mines et des ressources à différentes étapes de leur carrière. Elle présente une vue d ensemble des difficultés, des pratiques exemplaires et des réussites liées aux efforts déployés en vue d améliorer le recrutement, le maintien en poste et l avancement professionnel des femmes. La revue est articulée autour des six enjeux suivants : la transition école-travail, les barrières à l emploi, la culture du milieu de travail, l équilibre travail-famille, l écart de rémunération entre les sexes et la progression de carrière dans l industrie minière.* Structure du rapport Le rapport proprement dit se divise en quatre sections. La section II donne une vue d ensemble de la situation des femmes dans le secteur minier canadien et analyse les obstacles à l avancement professionnel des femmes dans l industrie. La section III résume brièvement les stratégies mises en œuvre par le secteur des mines et des ressources dans différents pays, dont l industrie minière canadienne pourrait s inspirer. La section IV présente les résultats de l atelier, qui complètent les données recueillies dans le cadre des entretiens. La section V présente une série de recommandations visant à améliorer le recrutement, le maintien en poste et l avancement des femmes au sein de l industrie, et ouvre des pistes de recherche prioritaires. Les questions posées dans le cadre des entrevues individuelles et des groupes de travail, ainsi que celles qui ont orienté les discussions de l atelier, figurent à l Annexe A.

13 II. SITUATION ET EXPÉRIENCE DES FEMMES DANS L INDUSTRIE MINIÈRE CANADIENNE INTRODUCTION La sous-représentation des femmes parmi les travailleurs et les cadres supérieurs du secteur des mines et des ressources est attribuable à une combinaison de facteurs : le peu d attrait qu exerce ce secteur sur les diplômées des établissements d enseignement postsecondaire; les obstacles à l embauche des femmes qui ne répondent pas aux exigences minimales en matière de formation et d expérience; le manque de politiques officielles de conciliation travail-famille et de promotion du leadership, du mentorat et du réseautage; et la persistance d une culture à dominance masculine en milieu de travail. Le présent chapitre décrit la façon dont ces facteurs freinent le développement d un leadership ouvert aux deux sexes dans l industrie. En dépit de la pénurie de main-d œuvre imminente dans le secteur des mines et des ressources, les femmes y demeurent sousreprésentées dans toutes les catégories d emploi et à tous les échelons hiérarchiques. En fait, la proportion de femmes dans l industrie a été d environ 15 % seulement au cours des 14 dernières années. L emploi des femmes dans l industrie minière a légèrement augmenté, passant d environ 14 % en 1988 à 18,6 % en 2011 3. La représentation des femmes dans le secteur des mines et des ressources est particulièrement faible comparativement à d autres secteurs clés de l économie : finances (61,53 %), énergie (24,56 %), commerce de gros et de détail (49,29 %), techniques et sciences (42,72 %), tourisme et transport (45,21 %), fabrication (21,7 %), immobilier (43,84 %), services (71,86 %) et administrations publiques (47,70 %) 4. Par ailleurs, en 2007, 24 % des diplômées universitaires avaient étudié dans un domaine lié au génie ou à la technologie et 9 % des apprenties ayant obtenu une qualification professionnelle avaient suivi une formation dans un métier spécialisé. On pourrait donc raisonnablement s attendre à retrouver la même proportion de femmes dans les postes correspondants de l industrie minière. Malheureusement, ce n est pas le cas. En 2006, les femmes ne comptaient que pour 5 % des travailleurs exerçant ces métiers et professions dans l industrie, ce qui semble indiquer que d autres obstacles que la seule pénurie de maind œuvre limitent la participation des femmes à l industrie minière.

14 TABLEAU 1 Prévisions sur les besoins en matière d embauche dans l industrie minière canadienne d ici 2013, 2016 et 2021 2013 2016 2021 Métiers et emplois non désignés 13 640 20 540 35 625 Professions libérales et du domaine des sciences physiques 1 470 2 260 3 990 Professions des domaines des ressources humaines et des finances 875 1 365 2 370 Travailleurs de soutien 4 070 6,330 11 185 Professions techniques 1 395 2 095 3 635 Surveillants, coordonnateurs et contremaîtres 3 050 4 715 8 180 Total 24 500 37 305 64 985 Remarque : Les chiffres ont été arrondis. Les métiers et emplois dont les besoins en matière d embauche sont inférieurs à 15 travailleurs au cours de la période de prévision n ont pas été signalés. Source : Conseil des ressources humaines de l industrie minière, Prévisions sur l emploi et l embauche dans l industrie minière canadienne, 2011, p. 12-13. La possibilité de pourvoir aux postes susmentionnés revêt une importance cruciale pour l avenir de l industrie minière au Canada. Selon les estimations du rapport Prévisions sur l emploi et l embauche dans l industrie minière canadienne (2011), ces métiers et professions techniques (p. ex. métiers et emplois non désignés, professions techniques et postes de surveillants, coordonnateurs et contremaîtres) représenteront environ 73,3 % des besoins en matière d embauche de l industrie minière d ici 2016 et 2021, alors que les «professions libérales et du domaine des sciences» ne compteront que pour 7,3 % des besoins en matière d embauche au cours de la même période (voir le Tableau 1 ci-dessous). La Figure 1 ci-dessus montre clairement que les emplois des femmes dans le secteur minier sont actuellement concentrés dans le domaine du travail de bureau et de soutien, ainsi que dans celui des services administratifs et généraux. Or, ces emplois ne représentent qu environ 20 % (soit 3,6 % dans le domaine des ressources humaines et des finances et 16,9 % en ce qui concerne le travail de soutien) des besoins en matière d embauche de l industrie d ici 2016 et 2021. Ces données indiquent que les efforts de l industrie doivent être réorientés de façon à attirer davantage de femmes dans les programmes d enseignement postsecondaire menant à l exercice de métiers spécialisés et de professions scientifiques, pour recruter ensuite les femmes exerçant ces métiers et professions dans le secteur des mines et des ressources. La tâche ne sera pas facile. L industrie minière canadienne a énormément de mal à attirer des femmes exerçant ces métiers ou professions. Cette difficulté est en partie imputable au manque d information et aux préjugés des femmes à l égard du secteur minier. L étude Ramp-Up (étude sur le statut de la femme dans l industrie minière et le secteur de la prospection au Canada), réalisée en 2010 par l organisme Women in Mining Canada, a constaté que plus du quart des étudiantes rencontrées en entrevue qui suivaient un programme d enseignement postsecondaire en rapport avec l exploitation et la prospection minières n étaient pas attirées par l industrie minière en raison d appréhensions liées au milieu de travail et à la culture («culture dominée par les hommes» et «discrimination») 5. L étude Ramp-Up souligne également que les deux tiers des employées interrogées perçoivent la culture du milieu de travail comme un problème pour les diplômées qui sortent de l école pour aller travailler dans l industrie minière 6.

15 Un autre problème du secteur canadien des mines et des ressources tient à la quasi-absence, dans la main-d œuvre de l industrie, de femmes appartenant à des groupes minoritaires. Les Autochtones et les immigrants sont les groupes les plus défavorisés en ce qui concerne l accès à l emploi dans le secteur des mines et des ressources, en raison des obstacles à l embauche auxquels ils sont confrontés (comme les exigences minimales en matière de formation et d expérience et le manque de reconnaissance des titres de compétences et des qualifications professionnelles). Lors du recensement de 2006, les Autochtones représentaient seulement 6,75 % de la main-d œuvre de l industrie minière et les femmes ne constituaient que 14 % de l effectif minier autochtone, soit seulement 0,9 % de la main-d œuvre du secteur minier. Dans l industrie minière, les femmes autochtones travaillaient surtout dans les domaines des affaires, de la finance et de l administration (28,5 %), de la vente et des services (23,6 %) et des sciences naturelles et appliquées (15,5 %). Seulement 0,6 % de la main-d œuvre féminine autochtone occupait des postes de gestion 7. Les immigrants représentaient 8,75 % des effectifs de l industrie minière 8. Malheureusement, il n y pas de statistiques concernant la répartition des sexes au sein de la main-d œuvre immigrante. Les femmes étaient en outre largement sous-représentées dans les postes et les comités de direction du secteur des mines et des ressources. Elles ne formaient que 12,3 % des dirigeants des sociétés minières 9, ce qui représente le taux le plus bas comparativement aux autres industries, à l exception du secteur de l énergie (8,44 %). (Voir le Tableau 2 ci-dessous.) FIGURE 1 Proportion de femmes dans certains emplois de l industrie minière au Canada en 2006 100 80 Femme Homme % 60 40 20 0 Gestion sauf les services administratifs et généraux Gestion services administratifs et généraux Professions libérales domaines technique et scientifique Professions libérales services administratifs et généraux Métiers techniques et spécialisés Main-dèœvre, service et production Travail de bureau et de soutien Source : Women in Mining Canada (2010), tiré du rapport Prévisions sur l emploi et l embauche dans l industrie minière canadienne, Conseil des ressources humaines de l industrie minière, 2010, p. 27.

16 TABLEAU 2 Pourcentage de femmes parmi les cadres supérieurs et les employés de différents secteurs d activité en 2011 Secteur 2011 Cadres supérieurs Employés Finances 19,25 61,53 Énergie 8,44 24,56 Commerce de gros et de détail 18,45 49,29 Techniques et sciences 33,55 42,72 Tourisme et transport 24,99 45,21 Fabrication 10,68 21,70 Immobilier 17,19 43,84 Services 50,11 71,86 Administrations publiques 40,95 47,70 Mines et extraction de pétrole et de gaz 12,30 18,62 Total 28,92 47,49 Source: Stewart et Rankin (2012), d après l Enquête sur la population active, et Catalyst (2011). En 2011, les femmes représentaient seulement 6,6 % des administrateurs d entreprises du secteur des mines et des ressources, soit le taux le plus bas par rapport aux autres secteurs : services publics (21,7 %), finances et assurances (19,6 %), commerce (18,5 %), industries manufacturières (9,7 %) et œuvres de charité (40 %) 10. La sous-représentation des femmes parmi les cadres supérieurs et les membres de la haute direction ne peut pas s expliquer uniquement par une réserve de talents insuffisante due à la participation limitée des femmes à l industrie minière. Il est clair que la répartition des sexes dans les postes et les comités de direction ne reflète pas la composition de la main-d œuvre de l industrie. Même si les femmes représentaient 18,6 % de la main-d œuvre en 2011, elles ne comptaient que pour 1,4 % des chefs de la direction, 5,3 % des administrateurs et 12,3 % des membres de la haute direction des sociétés minières 11. Par conséquent, d autres facteurs au-delà du niveau général de participation des femmes à l industrie doivent être pris en considération pour comprendre les raisons de la sous-représentation des femmes aux postes de cadres supérieurs et de dirigeants. Il faut tenir compte de questions telles que l écart de rémunération entre les sexes 1, le manque de politiques visant à concilier les responsabilités professionnelles et familiales, et la persistance d une culture essentiellement masculine. 1 L étude Ramp-Up (2010) a montré que les femmes qui travaillent dans l industrie minière touchent en moyenne une rémunération inférieure de 32 % à celle de leurs homologues masculins; cette différence dépasse de 11 % l écart salarial moyen entre les sexes à l échelle nationale.

17 Entrevues et groupes de discussion Des entrevues et des groupes de discussion avec des hommes et des femmes de l industrie nous ont permis de mieux comprendre ce qu il faut faire pour que les choses changent. Les résultats des entretiens et de la revue de la littérature relative à l industrie minière et à d autres secteurs ont clairement démontré la nécessité d adopter une approche globale qui s attaque simultanément aux multiples facteurs responsables de la sous-représentation des femmes aux postes de leadership. Une telle approche va au-delà des arguments basés sur l offre et la demande voulant que la sous-représentation des femmes ne soit attribuable qu à un bassin de talents insuffisant. La culture traditionnellement masculine qui imprègne les valeurs professionnelles, les styles de travail et les modes de communication, ainsi que l absence de soutien à la gestion des responsabilités familiales, représentent des obstacles importants à l accession des femmes à des postes de direction. FIGURE 2 Domaines d emploi de la main-d œuvre autochtone, par sexe, en 2006 50 40 % 30 20 10 0 Gestion Metiers* Administration Sciences Industries primaires Traitement Ventes et services Autres Femme Homme Source : Statistique Canada, recensement de 2006 (http://www.nrcan.gc.ca/minerals-metals/aboriginal/ bulletin/3605).bulletin/3605 «Dans une mine, les femmes ont demandé et reçu des casques roses. C était pour elles un moyen d affirmer leur présence et leur différence» une cadre supérieure des Ressources humaines

18 «La culture favorise le recrutement des femmes à des postes de soutien, mais... il n y a pas de bonnes occasions d obtenir des promotions. Il est également plus difficile pour les femmes d accepter certaines promotions, parce que les postes en question exigent de fréquents déplacements» une ingénieure dans un groupe de discussion Influence de la culture du milieu de travail La culture de travail dominée par les hommes continue de nuire au maintien en poste et à l avancement professionnel des femmes dans le secteur des mines et des ressources. Des progrès ont toutefois été accomplis en ce qui concerne les formes de discrimination flagrantes (p. ex. en luttant contre le harcèlement sexuel en milieu de travail, en adaptant l environnement physique aux besoins des femmes). La nouvelle génération est plus respectueuse envers les femmes, qu elles soient cadres ou employées, que la génération qui la précède. La nouvelle génération est plus à l aise et coopère plus facilement avec les travailleuses et les leaders féminins. En dépit de ces progrès, la culture masculine dominante persiste en milieu de travail sous la forme de préjugés implicites, cachés et plus subtils. La culture masculine traditionnelle entretient souvent des préjugés contre l affectation des femmes à des tâches d exploitation. Ces préjugés contre les travailleuses contribuent à la sousreprésentation des femmes dans les postes opérationnels, laquelle limite à son tour leurs possibilités de gravir les échelons supérieurs de l organisation. Comme la plupart des femmes qui travaillent pour des sociétés minières y assument des fonctions de soutien ou de service (p. ex. dans les domaines des ressources humaines, des communications, de la comptabilité ou des finances), elles ont souvent du mal à accéder aux postes de cadres supérieurs, qu on a plutôt tendance à offrir aux employés des secteurs opérationnels. «Il y a des différences entre les générations. Les baby-boomers avaient une vision particulière des cadres. Les hommes plus jeunes considèrent comme normal que des hommes et des femmes travaillent ensemble» une cadre supérieure «J ai 50 ans, et quand j ai commencé à travailler les hommes étaient très sexistes. Il y avait des photos de femmes nues sur les sites d exploitation minière. Maintenant, il y a davantage de respect envers les femmes en milieu de travail et les attitudes sexistes ont perdu du terrain avec l arrivée de la jeune génération.» «C est plus difficile pour les femmes au niveau de la mine parce qu elles sont encore stigmatisées. Certains mineurs refusent de travailler avec des femmes à cause de vieilles superstitions. Ils refusent aussi parce qu ils ne sont pas sûrs de savoir comment se comporter et qu ils ont peur d être poursuivis pour harcèlement s ils travaillent avec des femmes» un cadre supérieur des Ressources humaines

19 «En gravissant les échelons comme ingénieure, j ai eu l impression que je devais davantage faire mes preuves que les hommes. Je devais m assurer d avoir des opinions... autrement, on m aurait ignorée» une cadre supérieure «Les hommes ont l air de penser que les femmes sont moins capables d obtenir des résultats. Le patron d une femme lui reprochait de se montrer trop conciliante, même lorsqu elle atteignait ses objectifs. Il y a encore une mentalité autoritaire chez les hommes. Les femmes essaient d adopter un style plus indirect, parce qu elles pensent que le style direct ne favorise pas la motivation» une ingénieure dans un groupe de discussion «Il s agit d une industrie dominée par les hommes. Au poste que j occupe, il faut que le travail se fasse, peu importe l heure à laquelle je finis par pouvoir partir, ce qui est difficile même pour une personne célibataire» une ingénieure «L organisation doit réévaluer les compétences en leadership pour en arriver à une approche plus équilibrée qui inclurait le travail d équipe, la collaboration et le respect» une cadre supérieure des Ressources humaines La culture du milieu de travail exerce une pression considérable sur les femmes, qui pensent qu elles doivent faire leurs preuves en travaillant plus fort que les hommes. Malheureusement, il arrive souvent que le rendement insuffisant des femmes soit moins bien toléré que celui des hommes, et les superviseurs masculins ont souvent le sentiment qu ils ne peuvent défendre une employée que si son rendement est exceptionnel. De plus, les femmes subissent souvent une pression culturelle qui leur impose des responsabilités à la fois familiales et professionnelles. Bon nombre des femmes interrogées ont l impression que certains cadres masculins sont moins tolérants à l égard des responsabilités familiales assumées par les femmes. Enfin, les entrevues ont montré que les hommes ne sont pas considérés comme ayant le même degré de responsabilité envers leur famille et qu ils ne sont pas encouragés à prendre des congés pour obligations familiales. Les hommes interrogés ont déclaré qu ils hésitaient à prendre des congés familiaux de crainte de nuire à leur carrière. «Le leadership a été redéfini. On en parle beaucoup, mais je n ai constaté aucun changement dans la pratique... Les promotions continuent d être accordées en fonction des compétences techniques et opérationnelles» une cadre supérieure des Ressources humaines