SOINS DE SANTÉ PRIMAIRES : UNE NOUVELLE APPROCHE À L ÉGARD DE LA RÉFORME DES SOINS DE SANTÉ



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Transcription:

SOINS DE SANTÉ PRIMAIRES : UNE NOUVELLE APPROCHE À L ÉGARD DE LA RÉFORME DES SOINS DE SANTÉ Notes pour des remarques de Rob Calnan et D r Ginette Lemire Rodger Président élu et présidente Association des infirmières et infirmiers du Canada Au Comité sénatorial permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie 6 juin 2002 50, DRIVEWAY, OTTAWA (ONTARIO) K2P 1E2 TÉL : (613) 237-2133 / 1-800-361-8404 TÉLÉC. : (613) 237-3520 SITE WEB : www.aiic-infirmieres.ca

INTRODUCTION : Les infirmières et infirmiers et la réforme des soins de santé Nous sommes heureux d avoir la possibilité de nous adresser au Comité sénatorial permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie. Au nom de l Association des infirmières et infirmiers du Canada, nous nous réjouissons des efforts du comité pour déterminer les futures orientations et les paramètres du système de santé. Dans son invitation, le comité a demandé que nous abordions plusieurs questions précises, notamment la viabilité des autres modèles de système de santé et les obstacles à la réforme du système. J aimerais également parler de certains des points soulevés dans le rapport d avril 2002 préparé par votre comité, Volume cinq : Principes et recommandations en vue d'une réforme. J aimerais d abord vous présenter mon association et ma profession. L Association des infirmières et infirmiers du Canada a été créée en 1908 par les associations de délivrance des licences et d exercice professionnel provinciales et territoriales afin de donner une voix aux infirmières sur les questions nationales et internationales. Aujourd hui, il existe environ 255 000 infirmières et infirmiers autorisés au Canada. Quelque 60 % d entre eux assurent des soins directs dans les hôpitaux. D autres travaillent dans la collectivité et offrent des soins préventifs aux familles, des soins de réadaptation et de traitement aux personnes, des soins à domicile et des soins palliatifs aux mourants et à leurs familles. Les infirmières et infirmiers sont également employés comme experts en santé professionnelle et comme conseillers dans le secteur de l assurance. De plus, comme l a noté l Institut canadien d information sur la santé dans son rapport de 2001 sur le système de santé, les infirmières et infirmiers sont la principale source d information et de conseils dans le nouveau service florissant de télésanté. Il n est donc pas surprenant que les infirmières et infirmiers interagissent chaque jour avec les Canadiens qui ont besoin d aide pour maintenir et améliorer leur santé. Ils peuvent donc déterminer les tendances dans la population et la santé publique. Ils connaissent les forces et les faiblesses du système de santé du Canada. Ils se rendent compte directement des questions liées à l accessibilité des services. Les infirmières et infirmiers sont témoins de la nécessité d intégrer les services de santé à d autres aspects de la politique du développement social. Ils travaillent dans le changement, qu il s agisse de la recherche, des nouvelles connaissances et des nouvelles technologies. C est en fonction de ces connaissances et de cette expertise collective que l AIIC a préparé cet exposé. Nous notons que le comité, dans son rapport et dans sa correspondance, parle de «soins primaires». Nous aimerions dire trois choses au sujet des «soins primaires» : comme dans la plupart des systèmes, les principaux éléments du système de santé sont interdépendants; les soins primaires sont un élément du système de santé; le fait de privilégier les soins primaires ne permettra pas de réduire les problèmes du système de santé. Soins de santé primaires : un modèle viable pour la réforme des soins de santé J aimerais maintenant répondre à votre question sur les modèles viables pour la réforme des soins de santé. 2

En 1978, l Organisation mondiale de la santé (OMS) a adopté une approche axée sur les soins de santé primaires comme base de prestation efficace des services de santé. Cette approche est à la fois une philosophie des soins de santé et un modèle de prestation des services. Cette approche vise à prévenir les maladies et à promouvoir la santé. L OMS a fixé cinq principes pour les soins de santé primaires : l accessibilité, la participation du public, la promotion de la santé, les compétences et la technologie appropriées et la coopération intersectorielle. Les cinq principes doivent se compléter et être mis en œuvre simultanément afin de réaliser les avantages de l approche axée sur les soins de santé primaires. J aimerais décrire chacun de ces principes : L accessibilité veut dire que tous les Canadiens, quel que soit l endroit où ils vivent, peuvent avoir accès aux services de santé. La répartition des professionnels de la santé dans les régions rurales, éloignées et urbaines est essentielle au principe de l accessibilité. La participation du public signifie que les clients sont encouragés à participer à la prise de décisions sur leur propre santé, à déterminer les besoins dans leur collectivité et à prendre en compte les mérites de solutions de rechange pour répondre à ces besoins. L adoption du principe de participation du public garantit le respect de la diversité. Cela veut dire également que la conception et la prestation des soins de santé est souple et adaptée. La participation garantit la planification efficace et stratégique des services de soins de santé communautaires ainsi que leur évaluation. La promotion de la santé implique l éducation sur la santé, la nutrition, l hygiène, les soins maternels et de l enfant, l immunisation, la prévention et la lutte contre les maladies endémiques. Les activités liées à la promotion de la santé réduisent la demande de soins curatifs et de réadaptation. Grâce à la promotion de la santé, les personnes et les familles comprennent mieux les déterminants de la santé et acquièrent des compétences pour améliorer et maintenir leur santé et leur bien-être. La technologie appropriée renvoie à l importance de s adapter à ce que vous appelez dans le Volume cinq «les nouvelles réalités». Le principe reconnaît l importance de créer et de tester des modèles de soins de santé innovateurs et de diffuser les résultats de la recherche sur les soins de santé. Il reconnaît également l impératif d un renforcement permanent de la capacité et du perfectionnement professionnel de l effectif dans un secteur dont les connaissances et l infrastructure technologique évoluent et changent continuellement. Le principe veut dire également que les malades recevront des soins appropriés de la part de professionnels des soins de santé appropriés dans les délais appropriés. La coopération intersectorielle reconnaît que la santé et le bien-être sont liés aux politiques économiques et sociales. Intersectoriel signifie que les experts du secteur de la santé travaillent avec des experts dans les domaines de l éducation, du logement, de l emploi, de l immigration, etc. Cela veut dire également que les professionnels de la santé des diverses disciplines collaborent et sont interdépendants afin de répondre aux besoins des Canadiens. Ce dernier aspect est lié au Principe 10 de votre rapport sur les «équipes multidisciplinaires». La coopération intersectorielle et intrasectorielle est nécessaire pour établir des objectifs de santé, ou des «normes», comme vous les appelez dans votre rapport, au niveau national. Elle est également nécessaire à l amélioration de la politique publique sur la santé et à la planification et à l évaluation des services de santé. 3

En 1978, le directeur général de l OMS avait dit que la mise en œuvre de l approche axée sur les soins de santé primaires reposait sur les infirmières, en raison de leurs relations de travail étroites avec le public. Or, même si le secteur infirmier a fait des soins de santé primaires une méthode d amélioration de la santé des Canadiens, il n est pas devenu le pivot du système des soins de santé canadien. L approche des soins de santé primaires est restée largement ignorée au Canada, malgré le fait qu en 1974, le rapport Lalonde ait défini quatre éléments qui influent sur la santé des Canadiens : la biologie humaine, l environnement, le mode de vie et l organisation des soins de santé. Les soins de santé primaires sont restés dans l ombre, malgré l acceptation canadienne de la Charte d Ottawa (1986) qui affinait encore les concepts de promotion de la santé et incorporait quatre des cinq principes des soins de santé primaires (participation publique, accessibilité, promotion de la santé et collaboration intersectorielle). Quelques exemples canadiens de soins de santé primaires Outre les cadres théoriques, on trouve au Canada des exemples de mise en œuvre efficace des principes des soins de santé primaires. J aimerais en souligner quelques-uns. Le travail du Centre de santé communautaire du nord-est d Edmonton a adopté l approche des soins de santé primaires. Le centre offre tout un éventail de services allant de la prévention à l information sur la santé en passant par le traitement, la gestion des maladies chroniques, les services d urgence, les laboratoires et l imagerie diagnostique. Avec les conseils d un comité consultatif communautaire, le centre planifie les services pour répondre aux besoins des nouveaux immigrants, des personnes âgées, des enfants, des adolescents et des femmes en matière de santé. Le centre est situé sur les principaux trajets des autobus et près des écoles. Le personnel du centre comprend des nutritionnistes, des audiologistes, des travailleurs sociaux, des infirmières de santé publique, des infirmières d urgence, des médecins, des travailleurs culturels et autres qui travaillent ensemble afin de pouvoir répondre efficacement aux besoins individuels et des familles. Le centre est doté d un système d information intégré qui permet aux professionnels de consulter les dossiers et l information. Ce centre a des liens très solides avec d autres ressources de la collectivité, comme les écoles, les logements sociaux et les lieux de travail. L approche des soins de santé primaires a également été adoptée à la Clinique de soins infirmiers ambulatoires de la côte nord, au nord de Vancouver. La clinique se concentre sur la promotion de la santé. On y a noté un nombre important d annulations de rendez-vous par les patients souffrant de cancer, ce que l on a attribué à des rendez-vous concurrents avec d autres professionnels de la santé. Parallèlement, bon nombre des clients du centre de cancer ont exprimé un fort intérêt pour l amélioration de leur accès aux soins oncologiques. Grâce à des consultations avec les divers professionnels de la santé, un programme de visites à domicile par des infirmières a été mis au point. Ce programme a permis d en arriver à meilleure coordination des soins aux patients cancéreux, à une amélioration de l accès aux services appropriés des professionnels de la santé et à une utilisation plus efficace des ressources. La coordination et l affectation appropriée du personnel ont entraîné une amélioration de la qualité des soins et une plus grande efficacité dans la prestation. Par exemple, la durée des visites a diminué de 45 à 24 minutes par patient. Par conséquent, le système de santé est mieux adapté. Chacune des infirmières s occupe maintenant de 13 patients par jour par rapport à six en moyenne auparavant. Une clinique semblable a été créée à Ottawa dans le cadre d un projet de recherche assuré par un financement temporaire. 4

Dans le domaine de la télésanté, nous avons l Institut de cardiologie de l Université d Ottawa, qui assure à la fois des services de télésanté et de télémédecine. Il offre des consultations en cardiologie aux clients dans le Nord, en particulier dans les communautés autochtones. Les patients ayant des défaillances cardiaques ont un accès permanent et ininterrompu à une infirmière, 24 heures par jour, 7 jours par semaine et 365 jours par année. À partir des renseignements sur la santé des patients (pression artérielle, poids, etc.), les infirmières leur prescrivent de modifier leur régime ou leur médication ou les mettent en contact direct avec le professionnel approprié. Les patients participent à leurs propres soins et se prennent en charge. La diminution des taux de réadmission qui en résulte est un avantage pour le système de santé. Les équipes de santé de rue, qui sont actives dans la plupart des villes du pays, sont un autre exemple de soins de santé primaires. Ces équipes sont composées d infirmières et d infirmiers, de médecins, de nutritionnistes, de travailleurs de la santé, d avocats et d autres professionnels ainsi que des membres des secteurs du logement et de la justice pénale. Leur clientèle est composée des populations «marginalisées» comme les sans-abri. La santé de ces groupes est compromise par une mauvaise alimentation, le manque de logement et une mauvaise hygiène. Bon nombre d entre eux souffrent de maladies comme la tuberculose. Beaucoup sont porteurs du VIH/sida et de l hépatite C. Et pourtant, ils ne peuvent pas accéder au système de santé. Les équipes de santé de rue apportent leurs diverses expertises dans la rue. Certaines se concentrent sur les soins aux malades; d autres travaillent à surmonter les difficultés auxquelles sont confrontées ces populations des difficultés qui déterminent leur état de santé. Dans certaines villes, les équipes de santé de rue offrent des programmes d échange de seringues. Dans d autres, comme à Ottawa, l équipe a collecté des fonds et a construit un centre de soins palliatifs pour les sans-abri. Il y a aussi les systèmes de triage par téléphone dans tout le pays qui souscrivent au principe de l utilisation appropriée des ressources en matière de soins de santé. Ce système fait participer le public à sa santé, favorise la promotion de la santé et facilite l accès aux conseils et aux services. L Ontario, le Québec et le Nouveau-Brunswick ont des systèmes à l échelle de la province. Le personnel du programme du Nouveau-Brunswick, par exemple, est en mesure de répondre aux questions et aux préoccupations de presque 75 % des personnes qui appellent. Le programme a donc permis de réduire l encombrement des salles d urgence et leur utilisation abusive. Soins de santé primaires : Les avantages Ces initiatives jettent les bases d un cadre national pour notre système de santé. Elles vont audelà de la prestation des soins de santé traditionnels. Elles sont liées à l école et au lieu de travail et créent des partenariats et des liens. Elles ciblent l éducation du public par la promotion de la santé et la prévention de la maladie. Elles encouragent tous les Canadiens à jouer un rôle actif dans leur santé. Ces exemples montrent que lorsque l on en vient aux éléments, comme les chiffres, la composition des professionnels et l éventail des services, il n y a pas de réponse toute faite. Ils montrent que l adoption de l approche axée sur les soins de santé primaires peut et doit améliorer la qualité et l accessibilité des soins. Elle peut également améliorer l efficacité et réduire les coûts dans la mesure où l attention et les ressources se portent sur la prévention. L AIIC croit que les cinq principes des soins de santé primaires peuvent créer la base d un cadre de reconstruction du système de santé au Canada. 5

L AIIC estime qu il existe trois obstacles à l adoption des soins de santé primaires au Canada : des obstacles systémiques et liés aux ressources humaines et aux attitudes. Les obstacles systémiques sont notamment attribuables au manque de soutien à la collaboration intersectorielle, à des facteurs législatifs et politiques comme la Loi canadienne sur la santé et aux programmes de rémunération à l acte, qui renforcent l entrée unique, et au fait de privilégier les soins curatifs. L instabilité du financement a aggravé tous ces obstacles systémiques. Les obstacles liées aux ressources humaines ont été décrits dans notre présentation au comité en mai dernier. Nous notons que dans votre rapport, Volume cinq, vous consacrez un chapitre à la question des ressources humaines. Les infirmières vous félicitent de l intérêt que vous portez à l accès à l éducation. Nous espérons que vos recommandations porteront également sur l éducation permanente. Dans un secteur comme la santé où les connaissances et la technologie changent très rapidement, l apprentissage tout au long de la vie est une nécessité. La pénurie d infirmières continue d être problématique et continuera de l être au cours de la prochaine décennie, si rien n est fait. Certains investissements dans les stratégies de recrutement et de maintien en poste sont nécessaires, tout comme des décisions sur le cadre des fonctions. L AIIC croit que tous les fournisseurs de services devraient travailler au maximum de leur cadre de fonction. L Association médicale canadienne a élaboré un énoncé de principes au sujet des décisions concernant le cadre des fonctions. L AIIC souscrit à ce document et vous recommande de le lire. Les obstacles liés aux attitudes sont notamment la négligence des principes des soins de santé primaires. Les Canadiens apprécient les technologies coûteuses et les traitements «miracles». Mais la promotion de la santé implique souvent des «technologies rudimentaires» et des initiatives à moyen et à long terme. En revanche, les diagnostics et les soins curatifs peuvent faire appel à tout l arsenal des technologies. Par conséquent, l attention du public et des décideurs s est portée sur les aspects curatifs en négligeant les aspects préventifs du système de santé. D autres obstacles liés aux attitudes viennent de l utilisation interchangeable des termes soins de santé primaires et soins primaires. Les deux concepts sont fondamentalement différents dans la conceptualisation des sources d un problème et, par conséquent, dans les stratégies adoptées pour y trouver une solution. Ils diffèrent également dans la définition de la santé. Les soins primaires sont un élément important du système de santé. Les soins de santé primaires sont une approche qui englobe ces éléments mais aussi les soins secondaires et tertiaires. C est l approche axée sur les soins de santé primaires qui contribuera à assurer la viabilité du système de santé au Canada. Conclusion Les infirmières et infirmiers canadiens se consacrent avec passion à la santé des Canadiens. Nous croyons que le système de santé actuel offre un point de départ solide pour l avenir. Les infirmières et infirmiers savent qu il existe des stratégies de soins de santé primaires qui amélioreront l efficacité et l efficience du système actuel. Nous encourageons le comité à recommander ces stratégies dans son rapport final. 6